Disclaimer : Les personnages ne m'appartiennent pas, sont la propriété exclusive et malheureuse de JK Rowling.

CW: Les propos d'Harry sur la psychiatrie ne reflètent pas ma vision des choses. Je tiens à le préciser; cela n'a d'intérêt que pour l'intrigue. Si vous avez quelconque maladie mentale je vous encourage même à aller voir des professionnels.


Chapitre 2.

Les cartes

Harry paniquait. Et dire qu'il paniquait était bien en-deçà de la vérité. Des questions qui n'amenaient que plus de questions le tourmentaient : Est-ce que Théodore était de retour? Non, impossible. Est-ce qu'il l'avait retrouvé? Est-ce qu'il avait un nouvel harceleur? Il avait pourtant essayé de cacher son identité, d'être discret et surtout de ne plus mêler son travail à son véritable nom. Des milliers de scénarios prenaient vie dans son esprit pour tenter de décrypter la situation, de la rendre sensée. Mais, rien de cela n'avait de sens. Il pourrait faire part de ses théories aux officiers, assis face à eux, pourtant il s'y refusait. Il savait déjà ce qu'ils penseraient. Au mieux qu'il avait une imagination débordante, ce qui allait de pair avec sa profession n'allait pas forcément de soi, au pire qu'il était complètement fou. Les officiers, du moins l'un d'eux, le dévisageaient déjà comme s'il était fou. Ils avaient été rapides, à peine quelques minutes après l'appel de Ginny, l'officier au regard noir se trouvait sur le pas de sa porte à le lorgner. Harry ne l'appréciait pas. D'abord, parce que son regard mauvais le sondait comme s'il était responsable de tous les malheurs du monde, puis parce qu'il le traitait comme un paria. Sa façon de remettre en question la moindre des suggestions qu'il faisait le rendait furieux. À peine avait-il suggéré le rapport entre la présence des fleurs de lys et cette attaque qu'il l'avait rabroué et demandé s'il désirait faire son boulot à sa place.

Harry se contenait du mieux qu'il le pouvait, mais oui, il aurait eu envie de lui apprendre son métier. Comment pouvait-il les traiter de la sorte, surtout après ce qu'ils venaient de vivre? Enfin, plutôt, le traiter, lui, comme un criminel. Il n'avait fait qu'écouter Ginny, allant même jusqu'à prendre des notes, sans jamais la regarder. Il voulait en finir avec cette déposition le plus vite possible et le faire sortir de chez lui.

– Monsieur Potter, c'est bien ça? finit-il par lui demander pour la énième fois.

Il le savait pertinemment, d'après Harry, il cherchait simplement à le faire sortir de ses gonds pour l'inculper pour outrage à agent. Il ne rentrerait pas dans son jeu. Non, si quelqu'un devait exploser de colère ici, ça ne serait pas lui!

– Peut-être que si vous relisiez vos notes, vous auriez la réponse à votre question.

Une étincelle de haine pure s'alluma dans ce néant qu'on appelait regard, pour une fois, Harry et l'officier étaient sur la même longueur d'ondes. Ses lèvres fines se pincèrent si bien qu'on avait l'impression qu'il n'en possédait pas. A l'idée que cet officier, si désagréable et désobligeant, pouvait le haïr, une joie enfantine naquit en lui. Il aurait voulu le pousser à bout, lui aussi, et peut-être que dans un contexte différent il l'aurait fait.

— Hormis, cette théorie fleurie, nous n'avons pas entendu votre version des faits.

— C'est sensiblement la même, Monsieur.

— Nous devons l'entendre.

— C'est important, peut-être que vous vous rappelez de certains détails que Madame Weasley aurait oubliés. ajouta son second, beaucoup plus avenant et rassurant.

Harry hésita, ses mains ancrées dans ses cheveux comme à la recherche d'indices qui lui auraient échappé. Son regard se balada dans la pièce, s'arrêtant sur les regards bienveillants de Ginny et du deuxième officier de police.

— Nous sommes rentrés et, alors qu'on … on s'embrassait, la porte s'est mise à trembler et…

— À trembler? demanda le second officier.

— Je pense qu'on toquait à la porte, répondit Ginny.

— Oui, c'est ça. C'était si fort qu'on en est tombés à la renverse…

— Monsieur Potter, que faites-vous dans la vie? l'interrompit le premier officier aux cheveux gras.

— Je… je ne vois pas quel est le rapport…

— Peut-être que vous vous êtes fait des ennemis avec votre profession. C'est ce que j'essaye de comprendre.

— Je.. J'écris. Mais, sous un nom de plume, donc c'est peu probable, répondit-il, lui-même peu convaincu par sa réponse.

— Pourtant, vous n'êtes pas très éloquent, constata-t-il.

— Severus!

— Je dis simplement…

— Je suis plus à l'aise à l'écrit qu'à l'oral, de toute évidence. Et, je…

— Il vient de subir une tentative de meurtre! s'offusqua Ginny.

— Vous aussi, Mademoiselle. Pourtant, vos réponses étaient bien plus éloquente que notre petit écrivain, ici présent.

— Madame, le corrigea Ginny d'un regard noir de colère.

Son métier d'auteur s'accompagnait inévitablement de critiques, aussi Harry en avait parfaitement l'habitude et était, la plupart du temps, imperturbable. Cependant, il ne savait l'expliquer, cette remarque avait touché un point sensible et la bile lui remontait dans la gorge. Harry voulait soudainement retrouver le confort de son lit et tout oublier. Il voulait oublier les mots méprisants de cet inconnu qui atteignaient toujours leur cibles, il voulait oublier qu'il avait encore une fois échappé de justesse à la mort. C'est alors qu'il se demanda si rester dormir ici, après ce qu'il venait de se passer, était une bonne idée. Il pourrait très bien dormir chez Ginny, mais il avait peur de la mettre en danger. Il savait au plus profond de lui qu'il était la cause de cette attaque. Et si cette fois, elle mourrait vraiment, tout serait de sa faute.

— Je crois que je me fais harceler, dit-il d'une toute petite voix, sachant pertinemment que son hypothèse serait rejetée.

Le regard que Ginny lui lança était compatissant, mais lui donna envie de s'arracher les yeux. Il pouvait y lire plus de pitié qu'il ne pouvait en supporter. Il ne voulait plus y faire face. Elle subsistait toujours dans le regard ses amis, malgré ses prières et ses suppliques.

— Qu'est-ce qui vous fait dire ça, Monsieur Potter? s'intéressa le second officier, notant quelque chose sur son calepin.

— Il y a cette silhouette qui m'observe, là-bas, près de ce lampadaire, depuis que j'ai emménagé… et les fleurs, ajouta-t-il plus bas.

— Une silhouette, vraiment? Un fantôme de votre passé, peut-être? ironisa le dénommé Severus.

— Oui, une silhouette, je ne dirais pas que je la vois tous les soirs, mais elle m'observe plusieurs fois par semaine.

— Que fait-elle d'autre? continua le second officier.

— Rien… elle m'observe, c'est tout.

— Monsieur Potter, n'avez-vous pas été victime de harcèlement, il y a peu? Un certain…

Il resta silencieux, comme si l'information qu'il cherchait lui restait sur le bout de la langue. Mais, son regard sombre fixé sur le visage d'Harry lui disait qu'il le connaissait aussi bien que lui. Qu'il ne cherchait qu'à lui faire dire. Il ne pouvait pas le faire, n'y arrivait pas. La simple idée de la faire était une parfaite torture pour lui.

— Nott. Théodore Nott, l'informa Ginny.

Si cela était encore possible, le regard de l'officier, Severus, se fit encore plus inquisiteur. Si bien qu'Harry eut l'impression d'être coupable de quelque chose, quoi que cela puisse être cet officier en avait l'air convaincu. À cette idée, son coeur se mit à battre si fort dans sa cage thoracique qu'il avait l'impression qu'on pouvait en voir les contours sous sa peau. Son estomac se noua de plus belle et il se demanda s'il arriverait à retenir sa nausée plus longtemps.

— Oui, c'est ça. Cela me revient. Vous avez été harcelé par ce certain Nott, il me semble?

— Oui… mais, je ne vois pas le rapport.

— Le rapport, Monsieur Potter, est que nous n'avons jamais trouvé ce certain Nott.

— Vous … vous pensez que j'invente cette histoire de silhouette?

— Est-ce que vous avez des preuves de ce que vous avancez?

— Est-ce que quelqu'un d'autre que vous aurait vu cette silhouette? Lui demanda le second officier avec beaucoup plus de diplomatie que son collègue.

Harry resta silencieux et ce fut la réponse que ce Severus semblait chercher. Il se tourna vers Ginny, comme s'il avait élucidé l'affaire, un sourire satisfait sur les lèvres et le regard plus brillant que jamais.

— Nous allons vous raccompagner à votre domicile.

— Pas besoin, je reste.

— Non, tu devrais rentrer, je… ça me rassurerais.

— T'es sûr, Harry? Je peux très bien rester avec toi, le rassura-t-elle, sous le regard moqueur de l'officier Severus.

Harry tenta de rester impassible et de ne pas laisser paraître le fait que son regard lui donnait envie de hurler. Cet officier n'avait vraiment aucune compassion et maniait l'art de le faire se sentir minable avec perfection. Devait-il se sentir coupable d'être moins courageux que Ginny? Était-il moins un homme que ce Severus parce qu'il était accablé par son anxiété? Non, Harry n'aurait pas honte de cela, il ne le devait pas.

— Oui. Envoie moi un message quand tu es rentrée, répondit-il d'un ton calme, ignorant les regards des officiers.

Severus avait déjà quitté les lieux, s'attendant à ce que tout le monde le suive. Ginny, après un dernier regard, avait fini par le faire. Mais, le second officier attendait visiblement qu'ils soient seuls, pour glisser sa carte de visite entre ses mains, un regard compatissant qui manqua d'achever Harry.

— N'hésitez pas à m'appeler en cas de problème, Monsieur Potter. Je prends votre histoire très au sérieux. Et, veuillez pardonner mon collègue. Ça n'a rien avoir avec vous, Severus est… naturellement comme ça.

– Merci…

Il ne sut combien de temps il se tint là, au milieu de la pièce, les yeux rivés sur les fleurs de lys — Bien après leur départ. Il déposa la carte de visite sur le comptoir, se servant au passage un verre de whisky. Peut-être que ça l'aiderait si ce n'est à dormir, du moins à se détendre. Il fixait son portable en se disant qu'il demanderait à ses hommes de rénovation de faire installer des caméras, histoire de s'assurer sa tranquillité d'esprit. Il aurait ainsi les preuves que l'officier avait demandé, mieux encore, il aurait la preuve qu'il n'est pas fou. Pas complètement.

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Il se cachait sous ses couvertures quand il reçut le message de Ginny, elle était arrivée saine et sauve, mais s'inquiétait pour lui. Il lui répondit que tout allait bien, c'était un mensonge et ils le savaient aussi bien l'un que l'autre. Son cœur n'avait cessé de tambouriner dans sa poitrine comme s'il cherchait à fuir les lieux et il devait se donner toutes les peines pour retrouver un souffle normal. Il se redressa pour attraper les écouteurs qu'il laissait sur sa table de chevet quand quelque chose attira son attention. Ses écouteurs reposaient sur une carte qu'il n'avait pas le souvenir d'avoir acheté. Elle était plutôt élégante, le papier était souple et de bonne qualité, elle était sobre, avec ce symbole qu'il ne connaissait pas du tout. On pouvait y deviner un serpent sortant de la bouche d'une tête de mort et dessinant la forme d'une fleur de lys. Harry fronça les sourcils. Sur le dos se trouvait un message manuscrit, d'une écriture élégante et souple:

Cher Harry,

Ne laisse plus jamais qui que ce soit te toucher. Ceci est ton premier et dernier avertissement, si tu ne veux pas être responsable de leur mort, arrête.

- M.

Harry laissa la carte lui échapper des mains. Il n'était pas fou, cette situation n'était pas une simple coïncidence. Ginny avait véritablement failli mourir par sa faute. Il fixa cette carte avec rancœur. Il ne pouvait pas s'agir de Théodore? Peut-être bien qu'il s'amusait avec les lettres de l'alphabet? Non, Nott ne lui avait jamais envoyé d'avertissement. Conscient qu'il n'arriverait pas à fermer l'oeil de la nuit, il redescendit dans son salon, la carte en main. Il la déposa auprès des fleurs de lys, l'observant d'un regard noir tandis qu'il se versait un second verre de whisky. Avec toutes les précautions du monde il glissa la carte sous vide dans l'espoir que la police pourrait relever les empreinte de ce fou furieux. La confirmation qu'il avait bien un harceleur, car il ne pouvait pas s'agir d'autre chose, était plus douloureuse à avaler qu'il l'aurait cru. Il se demanda ce qu'il ferait cette fois. Est-ce qu'il irait voir la police dès que possible? Est-ce qu'il fuirait le plus loin possible? Est-ce qu'il était maudit? Deux harceleurs en l'espace de quoi, trois ans, plus? Il ne savait le dire. Ça n'avait rien de commun. Était-ce encore dû à ses romans? Il songea sincèrement à abandonner sa plume, mais la simple idée lui était insupportable. Sans s'en rendre compte, il s'était mis à faire les cent pas, son verre en main. Ses pas l'avaient mené à sa porte d'entrée où la fissure au beau milieu de sa porte le fit tiquer. Peut-être qu'il devrait tenter de réparer cela cette nuit, au cas où son harceleur serait tenter de revenir? Seulement, il n'avait aucune idée de comment s'y prendre.

Étonnement, il trouva son petit bonheur sur YouTube. Les problèmes de portes défigurées étaient, semble-t-il, courants. Il était appuyé contre le comptoir de son salon, tentant d'enregistrer la technique de l'homme sur la vidéo pour la reproduire à l'identique. Il lui semblait avoir le matériel nécessaire, vue les travaux en cours chez lui cela allait de soi. Il avait fini par sortir son carnet pour noter quelques informations, elle lui serait surement utiles dans son roman quand son coeur se mit à battre dans ses oreilles et que les poils de son bras se mirent au garde à vous. Quelqu'un l'observait, il pouvait sentir son regard brûlant le happer. La silhouette était là.

Il se redressa et sans surprise il la découvrit face à sa fenêtre. Elle l'observait, une cigarette au coin des lèvres. Hormis les mouvements de ses lèvres et les gestes qui accompagnaient le fait de fumer, elle se trouvait complètement immobile. Harry osait à peine respirer, de peur que le moindre de ses mouvements la pousse à agir. Ils s'observaient mutuellement, du moins il le supposait, il ne pouvait pas exactement voir son visage. Harry haïssait le fait que la peur soit devenue une constante dans sa vie, cela faisait des années maintenant qu'elle dirigeait le moindre de ses mouvements. Il était furieux, contre lui-même pour s'être laissé devenir quelqu'un de si faible, lui qui, autrefois, n'avait jamais peur du danger et fonçait tête baissé. Mais, aussi contre Théodore Nott, cause de cette angoisse qui ne le quittait plus. Et, donc contre les personnes prônent à harceler les autres en général. Contre cette silhouette menaçante qui le faisait passer pour un fou auprès de la police. La colère montait en lui, bouillante et aveuglante, elle prenait en assaut chacun de ses sens. Sa respiration n'était alors plus erratique et sa vision trouble à cause de la peur. Ses membres tremblaient, comme furieux de ne pas pouvoir agir. Alors, il n'avait pas réfléchit, il n'en était plus capable, avait attrapé l'arme la plus proche de lui, un couteau à beurre se rendit-il compte plus tard et s'était précipité dehors.

« Qu'est-ce que tu me veux putain?! S'écria-t-il, la silhouette maintenant à quelques mètres. Il n'y avait pas assez de luminosité pour qu'il puisse distinguer ne serait-ce que la forme de son visage. Il aurait voulu la prendre en photo, preuve qu'il avait désespérément besoin mais son téléphone était resté dans son salon.

— J'ai appelé la police, va-t-en! Il pointait son arme de pacotille vers la silhouette qui n'était de toute évidence pas impressionnée ou même inquiétée par ses menaces.

— Qu'est-ce que tu me veux?! »

La silhouette termina sa cigarette qu'elle écrasa d'un geste lent et maîtrisé, puis s'avança vers Harry que la panique poussa à se barricader derrière la porte. Il lui fallut exactement trente secondes pour la fermer à double tour, c'était beaucoup trop long. Il l'entendit approcher de la porte et pensa que son coeur allait tout simplement lâcher face à la peur qui lui nouait les entrailles. Il s'attendait presque à ce qu'une lame transperce de nouveau sa porte, mais rien ne se produisit. Il n'osa même pas vérifier par le juda ce que la silhouette pouvait bien faire. Au bout de ce qui lui semblait être les minutes les plus interminables de son existence, une carte glissa sous sa porte. Elle arborait le même symbole que l'autre. Harry ne fit aucun mouvement pour l'attraper, de peur que la silhouette en profite pour l'attaquer.

— Va-t-en!

Rien ne se produisit.

— Je ne la lirais pas tant que tu ne seras pas parti!

Là, il entendit les pas de la silhouette s'éloigner. Il lança un rapide coup d'oeil vers le juda. Elle était partie. Il ramassa la carte et alla se resservir un verre de whisky. À la fenêtre, il n'y avait plus aucun signe de la silhouette.

La carte retrouva sa jumelle et pendant de longues minutes il ne fit rien d'autre que les observer, il avait peur de lire son contenu. Comme si le fait de la lire allait coller son destin. Il finit par la retourner et ce qu'il lut laissa un goût amer dans la bouche:

J'ai hâte de faire ta connaissance, Harry.

-M.

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Il avait longuement hésité à tout raconter à ses amis, de peur de les inquiéter davantage. Mais, il lui sembla qu'il était naturel de leur raconter — il leur avait toujours tout raconté, après tout. Il laisserait seulement échapper quelques détails, comme le fait qu'il avait failli causer la mort de Ginny ou qu'il avait eu la bonne idée d'affronter son avec un couteau à beurre. Ils n'avaient pas besoin de connaître ce genre de détails, en revanche il n'en épargnait aucun quand il s'agit de leur parler de son altération étrange avec les officiers de police.

« C'est affreux, tu étais assez sous le choc pour qu'il en rajoute une couche!

— Oui, son comportement était plus que odieux, confirma Ron d'un ton sinistre.

— Donc, vous ne pensez pas que je sois fou?

— Bien sûr que non, Harry.

— Puis, qu'est-ce que c'est d'être fou? S'interroga Ron d'un ton presque philosophique qui ne trompait personne.

— Menacer de tuer ceux que je côtoie?

— Quoi?

Il leur présenta les cartes que la silhouette lui avaient laissées. Et le regard qu'ils échangèrent après avoir jeté un rapide coup d'oeil à ces cartes lui noua l'estomac. Là, ils devaient certainement le prendre pour un fou. Et, surement à raison.

— Harry…

— Quoi? Je ne suis pas fou!

— Non, bien sûr que non.

— Mais, il n'y a rien d'écrit sur ces cartes.

Hermione donna un rapide coup de coude à Ron, lui lançant un regard noir. Harry se pencha sur les cartes et faillit fondre en larmes. Elles étaient vierges. Il se laissa choir sur sa chaise avec l'envie de se coucher et de ne plus jamais se réveiller. Du moins, pas dans la peau d'Harry James Potter. Il était las de cette éternelle misère.

— Je…

— C'était peut-être ce type d'encre qui s'efface après quelques heures, tenta Hermione.

— Écoute, tu as raison sur un point. Il te faut des preuves pour que ce policier, Severus, prenne cette affaire au sérieux. On va faire installer des caméras, aujourd'hui même.

— Oui, mais pas dans ma chambre, ni dans la salle de bain.

— Cela va de soi, Harry.

— Tu devrais venir chez nous quelque temps.

— Et vous mettre en danger? Hors de question.

— Tu ne peux pas rester ici!

— Avec les caméras, je n'ai pas grand chose à craindre. Puis elle ne m'a rien fait jusqu'à présent.

— Pour l'instant, qui te dit qu'elle ne passera pas à l'acte sous peu.

Harry repensa à la seconde carte, mais se passa de faire un commentaire. Non, il ne se laisserait pas dicter par la peur, il se refusait de revivre cela.

— Ne vous inquiétez pas. Si les caméras ne fonctionnent pas, alors… je ne sais pas, j'engagerais un garde du corps. Je ferais n'importe quoi, mais je ne revivrais pas ce qu'il m'a fait subir une deuxième fois.

Il évita sciemment de regarder ses amis dans les yeux, de peur d'y lire de la pitié. La main d'Hermione vint se poser sur la sienne, et il remarqua alors qu'elle tremblait légèrement. Hermione avait dû le remarquer.

— Nous serons là pour toi, Harry.

— Je vais m'assurer de la solidité de chacune des portes. Il ne pourra pas recommencer.

La façon dont ses amis cherchaient toujours à le soutenir dans les épreuves qu'il traversait lui réchauffait le coeur. Cela l'aidait parfois à se sentir plus courageux, bien que ça ne puisse pas réellement suffire à soigner ses problèmes d'anxiété.

— Je me demande vraiment ce que je ferais sans vous…

— Tu serais surement mort.

— Ronald!

Une étincelle joueuse traversa son regard suite à la remarque de son ami. En un sens, Ron n'avait pas tout à fait tort. Cette constatation était douloureuse, mais nécessaire. Cette fois, il ferait tout ce qu'il lui était possible pour garder son indépendance et la tête haute. Il s'en fit la promesse.

« Tout va bien? Est-ce que vous désirez quelque chose d'autre?

Tous les regards se tournèrent vers la serveuse, elle avait un regard bienveillant qui fixait Harry avec beaucoup d'attention. Lu..cie? se souvenait toujours de sa commande, parfois elle ajoutait même quelque chose de nouveau histoire "de lui faire découvrir le menu". La plupart du temps il trouvait ces ajouts à son goût et en était fort heureux, lorsque ça n'était pas le cas, il se gardait bien de lui dire.

– Je reprendrais un expresso, merci Luna, lui répondit Hermione.

Harry se sentit rougir en se rendant compte que, même en tant qu'habitué, il n'avait retenu son nom. Bien qu'il soit le seul à le savoir, il se sentait fort honteux. Il lui fit son sourire le plus charmant — histoire de se rattraper, bien qu'elle ne sache rien de cela — avant de passer commande:

— De même pour moi, Luna.

— Une part de cette délicieuse tarte aux pommes.

— Puisque tu accompagnes Harry, je vais te mettre de la chantilly en extra! S'enthousiasma la jeune fille en prenant commande. Son regard s'attarda sur Harry alors qu'elle se dirigeait vers les cuisines.

— Est-ce que je t'ai déjà dit que c'était génial de te connaître, Harry? S'enthousiasma Ron, Harry se fit la remarque qu'il se léchait les babines à la manière du chat d'Hermione.

Cette dernière leva les yeux au ciel avec amusement avant de se tourner vers Harry. Une lueur qu'Harry ne connaissait que trop bien brillait dans son regard, il pouvait presque prédire ce qu'elle dirait.

— Je crois que tu lui plais…

— Oh?

— Oui, elle te dévore des yeux!

—Elle est jolie.

— Elle est blonde, confirma Ron d'un ton narquois.

S'il ne rougissait pas déjà cette phrase aurait suffit à l'achever. Harry avait toujours considéré qu'il n'avait pas de type à proprement parlé, tout lui plaisait — mais dire qu'il n'avait pas un petit (gros) faible pour les blond.e.s serait un mensonge. Il ne savait pas d'où cela lui venait, mais il ne pouvait jamais leur résister. Peut-être était-ce à cause des livres qu'il avait lu? D'un premier amour qu'il aurait oublié? Il ne savait le dire. Le fait étant qu'il ne pouvait jamais, absolument jamais, leur résister. Et, plus les cheveux approchaient du blanc laiteux, plus il tombait en pâmoison. Cela lui avait valu des heures interminables de moquerie de la part de ses amis.

— Je n'aurais jamais dû te le dire!

— Et me priver d'un tel plaisir, comme tu es cruel.

— Toi, bien plus.

— Tu devrais l'inviter à sortir.

— Je le ferais…

Il hésita, ses pensées se redirigeant vers les cartes, maintenant blanches. Est-ce qu'il pendrait ce risque? Ses amis le fixèrent avec étonnement, c'était probablement la première fois qu'il hésitait à inviter une fille aussi belle et douce que Luna à sortir. Il avait peur de la mettre en danger, bien qu'un part de lui, aussi infime soit-elle, trouvait cela ridicule.

— Probablement, ajouta-t-il après réflexion.

— Tu as raison, concentre-toi sur ton manuscrit.

— Je ne pense qu'à ça, Hermione. Nuit et jour, s'amusât-il face au regard noir de son amie.

Luna déposa leur commande sur la table avec beaucoup d'adresse et un grand sourire aux lèvres. Elle s'attarda quelques secondes, attendant quelque chose qui ne viendrait pas, puis fini par les quitter quand elle ne reçut que des remerciements.

— Comment va Ginny? S'intéressa Harry.

Il lui avait téléphoné le matin même, elle avait semblé normale, mais il se doutait qu'il lui mentait. Du moins, il en avait peur.

— Oh, elle reprend les entraînements donc elle est plutôt fatiguée.

— Elle a un garde du corps, maintenant.

— Un garde du corps?

— Oui, toute l'équipe en a un maintenant.

— Oh… c'est à la fois inquiétant et rassurant.

— Ça fait des années que je lui dit d'en prendre un.

— Pour une fois que quelqu'un écoute tes conseils avisés, Ron.

— Oui, tout le monde s'en sortirait mieux s'il suivait son exemple. N'est-ce pas, Harry?

– Quel conseil avisé n'ai-je pas écouté? S'offusqua-t-il.

Ron jouait avec les restes de sa tarte au pomme, de toute évidence il était nerveux d'aborder le sujet. Le regard qu'il échangea avec Hermione le confirma. Harry se mordit l'intérieur de la joue, il avait peur de ce qui allait venir et pourtant il savait que ça n'allait pas tarder à en arriver là. Ils avaient toujours ce regard, gêné mais convaincu, lorsqu'ils abordaient le sujet.

— Londubat…

Harry prit le temps de déguster son café, avalant en même temps les réponses acerbes qu'il voulait leur servir. Il ne voulait pas avoir cette conversation, elle n'était jamais agréable. Mais, elle était tout autant inévitable. Il poussa un long soupire avant de répondre, histoire de marquer son agacement.

— Donc, tu le penses.

— Que tu devrais voir un professionnel? Oui.

— Non, tu penses que je suis fou! Je ne le suis pas, Ron.

— Ce n'est pas ce que je dis. Ne déforme pas mes propos, Harry.

— C'est exactement ce que tu dis!

Il essayait tant bien que mal de maîtriser ses émotions, de ne pas se laisser envahir. C'était plus fort que lui, cette discussion lui laissait toujours la bouche sèche et l'envie de fuir le plus loin possible.

— Harry… Je pense que ça t'aiderait beaucoup avec tes angoisses.

— Je vois déjà Pomfresh.

— Et elle ne t'aide pas vraiment.

— Si..

— Est-ce que tu as fait des progrès depuis que tu la vois?

Non, il n'en avait fait aucun, ils le savaient aussi bien que lui. Elle était gentille et attentive, elle ne le jugeait pas, mais elle était complètement incapable de l'aider. Pourtant, il continuait de la voir et il aimait ça, ça lui donnait l'impression de vraiment essayer d'aller mieux.

— Ça prend du temps.

— Va voir Neville, si ça ne va pas tu n'es pas obligé de continuer. Essaie au moins quelques séances avec lui.

— Je l'ai déjà vu, Hermione.

— Je veux dire… va le voir dans des circonstances différentes.

— Où je ne serais pas retenu dans un hôpital contre mon gré, par exemple? Dit-il un peu plus sèchement qu'il ne l'aurait voulu.

Hermione eu un mouvement de recule, surprise par le venin dans sa voix. Harry évita son regard, de peur de voir qu'il l'avait blessé. Au lieu de quoi, il fixait Luna, occupée à servir d'autres clients.

— Oui, par exemple, répondit-elle d'un ton autoritaire. Tu te sentirais peut-être plus en confiance.

— Je ne pourrais jamais lui faire confiance. Il pense que je suis fou.

— Non, bien sûr que non…il ne te juge pas de la sorte.

— Écoutez, je…

— Pense-y, tu n'es pas obligé de prendre une décision maintenant.

— Oui, c'est juste une opportunité que tu pourrais saisir si jamais tu en ressens le besoin.

— Je vais y réfléchir.

— Bien.

Il ne le ferait pas, il préférait encore obéir à son au doigt et à l'oeil que de revoir le Docteur Neville Londubat. Il préfèrerait même s'offrir sur un plateau d'argent à cette silhouette plutôt que de mettre un seul pied dans ce foutu cabinet. Il n'était pas fou, il n'avait rien à y faire!