Chers lecteurs,

Vous ne l'attendiez plus, vous ne frémissiez plus, vous étiez dans le désespoir le plus profond et pourtant... Le voici ! Le tout nouveau chapitre, corrigé par Nictocris (comme toujours), tout beau tout frais, avec des mots recherchés, des phrases sublimes, des accents circonflexes comme vous n'en avez jamais vus !
Rating K aujourd'hui. Ou K+. Bref, du gentil.
Comme d'habitude, merci pour vos commentaires (notamment à la prolixe Katymyny) et autres followitations.
Portez-vous bien, profitez des derniers moments vacanciers, à bientôt,

Al

PS : Réponses aux reviews :

Nicto : rien ne va jamais, soyons honnêtes...

Katymyny : tes commentaires me font toujours rire ! vu ton imagination, tu devrais écrire une mini fic. je suis d'accord avec toi sur augusta, j'aime bien ce personnage, vraiment. on ne la voit pas assez dans les fics, c'est fort dommage. et puis plus je la travaille plus elle me plaît ! j'aime aussi l'idée de parkinson appréciée improbablement. quant à ton cadal de 50e review, j'ai une autre idée en tête que l'image (tu ne m'auras pas comme ça) (je ne suis corruptible qu'avec des pizzas) : un os dont tu m'as donné l'idée (j'y travaille). profite de ta canicule (hin hin hin) et de justin bieber, et surtout porte-toi bien !


« Je l'écoute. Ce n'est qu'une voix humaine
Qui traverse les fracas de la vie et des batailles,
L'écroulement du tonnerre et le murmure des bavardages. » R. Desnos, « la voix », in Contrées


Neville se tenait raide comme un balai depuis une demi-heure, et il en avait déjà marre.

La salle carmin du Renard Doré regorgeait de Sang-purs malintentionnés. Il avait reconnu certaines têtes de ces putain de Mangemorts. Entre autres, un des hommes qui l'avaient emmené au Ministère en novembre de l'année précédente. Le chauve. Apparemment, il ne l'avait pas reconnu. Il n'avait eu aucune réaction quand il avait vu Neville. Pas même surpris. Juste indifférent.

Preuve s'il en est qu'il accomplissait régulièrement son travail sans jamais se poser de questions sur le sort réservé à ceux qu'il convoyait.

« Garçon, un brandy. Et plus vite que ça ! »

Neville se tourna vers Nott, réfrénant son envie pulsante de lui casser la gueule. Le mépris des Serpentard, il s'y était habitué. Il le fallait bien, depuis toutes ces années. Pas de fierté, pas d'amour-propre. C'était la meilleure manière de survivre sous les moqueries de Parkinson et les remarques de Malefoy. Mais cette condescendance brutale, ce dédain inattendu, c'était au-dessus de ses moyens.

Ils avaient la même pureté de sang. Et pourtant, par une disposition sociale inattendue, Neville avait permis l'émergence d'un mépris de classe violent.

Il ravala sa bile et répondit, courtois :

« Oui, Monsieur. »

Il se dirigea vers le bar central et demanda un brandy à l'elfe du comptoir. Il observa la salle le temps que l'elfe le servît.

La pièce était plus petite que la salle de bal mais de proportions gargantuesques tout de même. Du bar central, derrière lequel étaient planqués les deux seuls elfes qu'Holly Montague avait dû accepter, partaient des dessertes mobiles qui se promenaient entre les tables où pavoisait la bonne société sorcière. Sur ces dessertes, de quoi nourrir un troupeau de trolls. Tout était opulent, et Neville devinait que Montague et Crabbe avaient dû payer rubis sur l'ongle pour asseoir leur réputation parmi les Sangs-purs. En offrant un thé digne de ce nom, ils s'assuraient une conservation de leur statut que leurs fiançailles inattendues fragilisaient.

Entre les froufrous des vieilles rombières et les talons des cœurs à prendre, des domestiques, tout de noir vêtus, déambulaient servilement. Chacun portait un insigne indiquant son nom surmonté de la mention de leur propriétaire. Sur la plaque de Neville on pouvait lire : Parkinson's mansion. Il aperçut Lavande qui servait un groupe de jeunes premières.

Malefoy's mansion.

Bien entendu, parmi les serveurs, il était le seul Sang-pur. De quoi rehausser le statut social de Parkinson… Les serveurs étaient tous des Nés-moldus ou des Sangs-mêlés. On reconnaissait les Nés-moldus à leur air soumis : s'ils osaient moufter, leur sort serait réglé sans autre forme de procès.

« Le brandy, Monsieur. »

Neville remercia l'elfe et apporta à Nott sa boisson.

À la table de ce dernier, la bande Serpentard au grand complet. Malefoy, grand prince, encadré par Crabbe et Goyle, toujours aussi béats de bêtise. À place d'Holly Montague, qui saluait seule des invités à la table voisine, Theodore Nott, l'œil vif, et Daphné Greengrass, sirotant délicatement son thé, paraissaient trop peu aimables l'un envers l'autre. Les pourparlers à propos de la dot de Greengrass devaient toujours être en cours. Assis à table mais un peu éloignés, comme à l'écart des autres mais sans l'être pour de bon, Zabini et Parkinson, côte à côte, le bras possessif de Zabini sur les épaules de Parkinson.

Si tu savais dans les bras de qui elle a dormi la nuit dernière…

« Tiens, Londubat, on parlait de toi, l'apostropha vertement Malefoy quand il le vit. On prend des paris pour savoir si tu pourras un jour trouver Sang-pur à ton pied, vu la déchéance sociale de ta famille. J'en étais à leur dire que tu te contenterais sûrement d'un elfe libre comme conjoint. »

Neville prit son air impassible. Après tout, il n'en était pas à sa première insulte. Ça lui glisserait dessus, comme toujours.

« On ne peut pas forcer un elfe libre à l'épouser, constata Greengrass avec un petit rire. C'est dans le nom : il est libre.

- Un elfe, même libre, obéit toujours, coupa Nott. C'est dans leur nature. Le seul problème, c'est que le seul elfe libre qu'on connaît vient de chez toi, Drago, et il demanderait sûrement la bénédiction de son ancien maître pour épouser Londubat, Potter n'étant pas disponible pour officier aux mariages. »

Neville sentit une légère tension se créer : le coup était subtil mais avait touché juste. Nott venait tout simplement de rappeler que Malefoy avait perdu un de ses elfes au profit d'Harry Potter. C'en était drôle.

« Londubat a tout intérêt à ce que Potter ne repointe pas le bout de son nez, nota Greengrass. Ça lui ferait un rival trop difficile à vaincre pour conquérir le cœur de la Weasley. Il peut encore prétendre à une Traîtresse-à-son-sang.

- Weaslette ? En plus d'être traître à son sang, il paraît qu'elle est devenue aussi folle que Lovegood. »

Putain de Zabini. Cette fois, ils s'attaquaient à ses amies. Neville essaya de garder son calme. Il ne pouvait rien dire, rien faire. La réputation de Parkinson se jouait là : s'il ne se maîtrisait pas, les autres pourraient penser que la laisse n'était pas aussi courte que ce qu'ils pouvaient soupçonner. Il devait paraître soumis, dompté. Faire croire à tous qu'elle le muselait aussi bien qu'ils le pensaient. À ce prix là et à ce prix seulement, ils pourraient tous deux continuer leur arrangement.

« Dans ce cas-là, Londubat ne sera pas dépaysé, ajouta Nott. S'il met l'une des deux dans son lit, il sera sûr d'obtenir la bénédiction parentale. »

Cette allusion si brutale à ses parents, toujours logés à Sainte-Mangouste, fit enfin réagir Neville. Il serra les poings. Pas eux. Pas sa famille. Ils n'avaient pas le droit.

Ils n'étaient pas censés être au courant. Personne ne devait savoir.

Il fulmina, prêt à mettre son poing dans la sale face de rat de Nott.

« Vous pouvez éviter d'accaparer mon valet ? »

Parkinson l'interrompit net dans ses velléités de meurtre.

« J'aimerais bien qu'il retourne faire ce pour quoi il est payé. Vincent, je ne t'ai pas prêté Londubat pour la déco. Qu'il travaille un peu. »

Neville n'osa pas la regarder et fixa de nouveau le sol. Entendre une voix amie le calma instantanément.

Amie, vraiment ?

« Mais il est payé pour nous divertir, non ? » dit Malefoy.

Neville imagina le sourire malsain qui devait cisailler son visage sournois. Parkinson avait parlé nonchalamment, comme si elle s'en foutait. Mais sa voix se fit plus froide quand elle lui répondit :

« Londubat m'appartient, Drago. Si tu as envie de distraction, appelle ta propre bonne. N'utilise pas mon personnel. »

Neville la regarda enfin : elle le congédia d'un signe et retourna à son tête-à-tête avec Zabini.

Il prit la fuite sans autre forme de procès, essayant de se calmer en se rejouant la scène humiliante qui s'était déroulée sous ses yeux : Malefoy s'était fait rembarrer par deux fois en moins de dix minutes. Ils pouvaient tous paraître amis aux yeux de tous, mais la conquête de leur rang social passait toujours avant les sentiments. Il savait que ce serait à Lavande, occupée à disposer des biscuits sur une assiette en porcelaine incassable, de subir les attaques de la bande d'anciens Serpentard.

Neville alla s'occuper d'un groupe de vieilles dames acariâtres qu'il avait reconnues de loin. Les grands-mères qu'il se félicitait de ne pas avoir dans la famille.

« Mesdames, vous désirez ?

- Un Earl Grey pas trop infusé. Et deux sucres. Saviez-vous que l'école de Poudlard est de plus en plus souple ?, reprit Janet Goyle en ignorant totalement Neville. De mon temps, on n'aurait jamais laissé des élèves faire le mur…

- Voyons, Janet, ce ne sont que des rumeurs ! Vous savez bien que Rogue garde une main de fer sur l'école.

- Quelles rumeurs, ma chère Persephone ? »

Persephone Malefoy lança un regard aigu à Neville :

« Je vous en dirai plus une fois que les oreilles indiscrètes se seront éloignées. Pas besoin de mettre les sous-fifres au courant. »

Neville s'inclina, servit les trois femmes et s'éloigna, persuadé que les commérages reprendraient à la seconde même. Elles étaient beaucoup trop méfiantes pour parler devant lui de ce qu'il soupçonnait : les tags à Pré-au-lard incitant à se joindre aux rebelles.

Je demanderai un compte-rendu à Parkinson.

Il retourna au bar central et discuta quelques instants avec l'elfe qui faisait le lien entre les cuisines et le salon carmin. Lavande arriva vers eux :

« Alors, ça va ?, lui demanda Neville en la débarrassant du plateau qui encombrait ses mains.

- J'ai eu droit à des remarques déplacées ou sexuelles sur à peu près tout ce qui me compose, mais je crois qu'il ne me forcera pas à me taper Crabbe ou Goyle. »

Neville lui sourit :

« Tant mieux. Crabbe est fiancé, je ne suis pas sûr que Montague te le pardonnerait… »

Elle lui sourit.

« Ni lui. Il devient possessif, je crois. Je suis son jouet, et il n'est pas prêteur.

- Malefoy a toujours été un enfant gâté, reconnut Neville. Souviens-toi, il est entré dans l'équipe de Quidditch grâce à un caprice. Ses parents ont dû toujours tout lui passer. »

Elle lâcha un petit rire :

« Il adore faire du balai dans son parc. Il lâche un vif d'or et c'est un vrai gamin. Il a toujours adoré voler après les balles.

- On court toujours après ce qui nous fait défaut. »

Ils ricanèrent tous deux. Des exclamations dans un coin de la salle les coupèrent. Lavande jeta un coup d'œil dans cette direction et ravala finalement son rire :

« C'est l'heure du fumoir. »

Neville fit demi-tour.

Les hommes, à comprendre Malefoy, Zabini, Nott et les deux gorilles, se dirigeaient vers le fumoir. D'autres sorciers, comme Lucius Malefoy, Rodolphus Lestrange – et Neville réprima un frisson en le reconnaissant – et Sir Arceus Parkinson passèrent eux aussi, complices, dans la pièce dévolue aux fumeurs. La porte se ferma sur Sir Parkinson.

« Je crois que les vraies discussions ont lieu dans cette salle, commenta Lavande. Ce doit être une des rares pièces qu'Uto n'a pas placées sous sortilèges d'écoute.

- Ça, c'est ce qu'il dit. » répondit distraitement Neville en observant Parkinson qui se disputait avec Montague.

L'entente entre les deux sorcières paraissait au beau fixe, mais Neville savait que Montague ne pardonnait pas à son interlocutrice de l'avoir fiancée à Crabbe. Elle devait avoir espéré un mariage plus intéressant.

« Écoute, Holly, il va falloir te confronter à ta peur des elfes de maison, ou tu seras obligée de tenir ta maison seule. »

Parkinson semblait irritée et quitta la fille Montague d'un pas vif pour s'orienter vers le bar central.

« Oh oh, ça va être pour moi, suggéra Neville. File, avant qu'elle passe ses nerfs sur toi. »

Lavande hocha la tête et saisit son plateau de pâtisseries pour se fondre dans la foule. Parkinson, en effet, se dirigeait droit sur Neville.

« Londubat, siffla-t-elle quand elle fut à sa hauteur, sers-moi un whisky. »

Neville obtempéra. Elle se pencha vers lui pour prendre son verre et lui souffla :

« Débrouille-toi pour aller dans le fumoir. »

Neville eut un sursaut. Lui avait-elle vraiment demandé d'aller espionner ses propres amis ? Elle avala cul-sec son verre et le lui rendit. Ses yeux perçants le fixaient. Il murmura :

« Diversion. »

Elle acquiesça puis tourna les talons. Neville reposa le verre sur le bar et vérifia que la cape d'invisibilité d'Harry se trouvait bien coincée sous sa robe. Il effleura le tissu fluide et attendit le signal de Parkinson.

Ça ne tarda pas.

« Merlin ! »

Parkinson était couverte de thé brûlant et injuriait copieusement l'elfe qu'elle avait volontairement bousculé :

« C'est brûlant ! Mais quel incapable ! »

L'attention des invités était fixée sur le scandale d'un elfe de maison osant blesser une Sang-pur. Neville en profita pour tirer la cape de dessous sa robe et la poser sur lui d'un geste rapide.

Il avisa l'héritier Montague qui se dirigeait vers le fumoir. Il hâta le pas, le rejoignit et se coula dans son dos quand il passa la porte.

« Alors, Graham, ça fait quoi de caser enfin sa sœur ? »

L'effectif était réduit dans le fumoir. Un brouhaha de murmures couvrait le son, plus efficace qu'un Assurdiato pour cacher les conversations. Même si Uto avait pourvu toute sa pièce d'oreilles à rallonge, il ne pouvait qu'en entendre un long murmure ininterrompu, percé de temps en temps d'une remarque plus articulée, comme celle de Marcus Flint à l'entrée de son acolyte.

La même méfiance régnait partout, même chez les Sangs-purs.

Neville situa le groupe de Malefoy et se dirigea vers eux, ignorant la réponse acerbe de Montague.

Malefoy père et fils discutaient. Sir Parkinson, pareil à un faucon, était figé dans une posture tendue en avant, comme s'il voulait tout entendre, même les battements de cœur de ses interlocuteurs.

Neville retint son souffle. Normalement, la cape était indécelable. Elle cachait même les sons. Enfin, il n'avait jamais pu vérifier, c'était le moment où jamais ! Parce que la graisse presque solidifiée du visage de Sir Parkinson n'incitait à aucune forme de confiance.

« Fils, il nous faut les noms des membres du club de Potter !

- Le club qu'il avait formé en cinquième année ? L'Armée de Dumbledore ?

- Si tu crois que j'ai l'esprit à retenir ce genre d'informations… »

Malefoy fils avait l'air ennuyé, comme un adolescent trop gâté à qui on vient demander une grâce. Il répondit du bout des lèvres :

« Père, je vous l'ai dit, il y avait Potter, Grang…

- Peu nous importent ceux-là ! »

Neville s'immobilisa dans un coin et observa les autres hommes. Zabini avait l'air ailleurs, bien que Neville sût qu'il était concentré à l'extrême sur la conversation. Quand il ne l'était pas, il riait toujours aux éclats. Nott tirait de longues bouffées sur son cigare, affalé dans un sofa, échangeant des commérages avec Crabbe et Goyle. Ils faisaient du bruit de fond. S'assurant ainsi de la confidentialité de leur conciliabule.

« Je veux les noms de ceux qui pourraient toujours lui appartenir, siffla Lucius Malefoy. Le Seigneur des Ténèbres ne plaisante pas avec ces choses-là, et tu le sais ! Il nous faut des noms, et Rogue pourra rendre la loi comme il se doit ! Si des couillons d'écoliers se permettent de s'opposer à notre maître, tout notre travail n'aura servi à rien ! Utilise ta cervelle, merde ! »

Malefoy ne parut pas se formaliser des jérémiades de son père.

« Je ne sais plus, ça date d'il y a trois ans. Je suis sûr qu'il y avait Londubat, Weasley fille et Lovegood, puisqu'on les avait attrapés en même temps que Potter avec la Brigade. Mais je ne me souviens plus des autres. »

Un léger silence se fit, troublé uniquement par une réflexion de Nott destinée aux deux imbéciles. Puis Sir Parkinson prit la parole, et cette fois Malefoy trembla :

« Drago, tu ne nous es d'aucune utilité. J'en référerai à qui de droit.

- Mais… Weasley… »

Malefoy perdait contenance sous le regard perçant de Sir Parkinson.

Qu'il ressemble à sa fille quand il est comme ça.

« Weasley est la seule à être encore à Poudlard, reprit Sir Parkinson de sa voix gutturale, et elle n'a rien fait. On ne laisse pas la chérie de Potter sans surveillance. »

Bien entendu. Ginny devait être surveillée vingt-quatre heures sur vingt-quatre par Rogue et les Carrow.

« Pareil pour Londubat : ma fille l'a à l'œil. »

Ah.

« La Lovegood, introuvable. On veut d'autres noms. »

C'était donc ça.

« Il y avait les jumeaux Weasley. »

Putain de Zabini qui ouvrait sa putain de gueule.

« Les frères Crivey. Finnigan et Thomas, du même dortoir que Potter et Weasley. »

Pourquoi ce bâtard disait ça ? Qu'est-ce que ça lui apportait ?

Interceptant le regard curieux de Sir Parkinson, Neville comprit : il montrait son allégeance envers les Parkinson.

Et les noms continuèrent de s'égrener :

« Jordan. Spinnet. Bell. Johnson.

- Que des Gryffondor, nota Sir Parkinson.

- Ce sont ceux qui m'ont marqué, répliqua Zabini sans s'émouvoir. Il est probable que Finch-Fletchey et Corner en aient été, mais je ne suis pas sûr. Et Brown en a définitivement fait partie. »

Neville aperçut la contraction des mâchoires de Malefoy.

« Nous interrogerons la fille dès ce soir.

- Ça ne sera pas nécessaire, Lucius. Nous avons déjà suffisamment de pain sur la planche, et je ne voudrais pas priver ton fils de sa petite impureté personnelle. »

Le regard froid de Sir Parkinson démentait sa blague graveleuse.

Zabini avait-il volontairement omis Ernie McMillan, Sang-pur ? Zacharias Smith, qui avait ses entrées dans toutes les soirées mondaines ? Anthony Goldstein ? Hannah Abbot ? Et tant d'autres… Ou gardait-il ses victimes pour une autre vague de dénonciations ? En atout pour plaire à son maître ? Ou à Parkinson ?

« Messieurs, nous vous laissons. Nous avons à faire. »

Sir Parkinson, Lucius Malefoy et Rodolphus Lestrange quittèrent la pièce. Neville se fit la réflexion que Rodolphus Lestrange n'avait pas pipé mot de toute cette conversation, tenant auprès des deux hommes le même rôle que tenaient Crabbe et Goyle auprès de Malefoy.

Neville faillit être bousculé par Sir Parkinson et s'écarta de justesse. Sir Parkinson s'arrêta, fixa l'air vide devant lui :

« Eh bien, Arceus, qu'est-ce qui te prend ?, grogna Lucius Malefoy.

- Rien, j'ai cru sentir… »

Il s'approcha puis siffla :

« On sait s'il y a des capes d'invisibilité, en Angleterre ? »

Et merde.

« À part celle de Potter, je ne crois pas, répondit Lucius Malefoy. Croupton avait d'ailleurs été très surpris que Potter en ait une. »

Sir Parkinson renifla :

« J'ai dû abuser du whisky. »

Ils partirent tous trois. Zabini se laissa tomber en arrière dans son fauteuil, soupirant lourdement avec un rire léger. Imperceptiblement, l'ambiance se détendit : les épaules de Crabbe et Goyle se relâchèrent, Nott se craqua distraitement la nuque. Malefoy tira une longue bouffée de fumée sur son cigare. Comme si tous avaient été plus impressionnés que ce qu'ils auraient voulu par les trois Mangemorts.

« Pas facile à apprivoiser, le futur beau-père, pas vrai ? »

Malefoy essayait d'être ironique, mais personne ne fut dupe.

« Arrête, Drago, il t'impressionne autant que moi. On aurait dit un botruc face à un scroutt. »

Nott, revenu dans la conversation dès que les Mangemorts avaient quitté la pièce, laissa échapper un ricanement :

« C'est vrai que je t'ai connu plus bravache. Même ton père ne te fait pas autant d'effet.

- Père a arrêté de m'impressionner après son échec au Département des Mystères, grommela Malefoy. Mais Parkinson n'a jamais failli. Il est vraiment dans les petits parchemins du Seigneur des Ténèbres. Heureusement que Blaise a une bonne mémoire, on y a tous gagné, cette fois-là. »

Neville ne pouvait malheureusement pas se réjouir de la bonne fortune de Malefoy. En effet, Zabini avait une excellente mémoire. Il aurait dû s'en douter. Zabini était un des rares à décrocher régulièrement des Optimal en histoire de la magie.

« À moins que ce ne soit le contraire… Que ce soit le Seigneur des Ténèbres qui soit dans les petits parchemins de Sir Parkinson, blagua Nott.

- Si j'étais toi, je me méfierais, grinça Malefoy. Si ça lui remontait, il te le ferait payer.

- Pansy est de cet avis, remarqua Zabini. Elle pense que le Seigneur des Ténèbres ne peut pas mettre en doute la fidélité d'une des plus puissantes familles anglaises. Sinon, il se mettrait à douter de tout. Il n'a pas la possibilité de chercher des noises à tous ses sbires.

- Pansy commet rarement des erreurs d'appréciation, reconnut Malefoy. Sauf en ce qui concerne Londubat. Je l'aime pas, ce type. »

Et c'est réciproque.

« Ah bon ? Moi, ça me plaît de le voir à nos bottes…

- Londubat n'est pas aussi incompétent que ce qu'il veut bien laisser paraître, continua Malefoy. L'an dernier, il a tenu tête à Rogue assez souvent, et il s'est redoutablement amélioré en sortilèges. Contrairement à Potter, il a un potentiel. Sinon Parkinson ne l'aurait jamais accepté comme garde-du-corps pour sa fille. »

Neville se sentit presque flatté que Malefoy pût reconnaître ses qualités. Finalement bon analyste, ce con.

« Si Parkinson l'a agréé, je ne vois pas en quoi nous aurions notre mot à dire là-dessus, coupa Nott. Il a suffisamment les cartes en main pour que nous ne puissions pas nous inquiéter. Ce serait vu comme du lèse-majesté.

- Et Pansy l'a dressé comme il faut. Vous saviez que son patronus est un chien ? C'est clair que le gars aime être soumis et obéir à son maître. »

Neville eut un sourire : Parkinson avait menti. Elle savait que son patronus était un ours : il le lui avait dit.

« C'est pour ça qu'il s'est jamais tapé Brown, en fait ! Deux soumis ensemble, ça n'a jamais fait bon ménage, ricana Malefoy. Vous l'auriez vue hier, une vraie chienne en chaleur !

- Se faire désirer d'une pute au sang-mêlé, c'est plutôt facile, quand on a ton calibre, nota Zabini avec un gros rire. Mais te faire une Sang-pur, ça, c'est un autre challenge, mon vieux !

- Peuh ! Pansy manque de goût. Et de toute façon, je me taperai bientôt plus classe que toi. Y a pas plus pur comme sang que celui des brahmanes ! »

Neville sentait des crispations désagréables : une crampe lui tenait la jambe, et l'envie de sortir sa baguette pour ensorceler Malefoy pour le punir de ses remarques était très forte.

Il respira calmement, espérant que le son de son expiration ne passât pas la barrière de la cape, et obligea son esprit à entrer dans la même humeur que lorsqu'il bloquait son esprit à des attaques de légilimencie.

Neville avait beaucoup gagné en maîtrise de soi quand sa grand-mère l'avait formé en occlumencie. Et ça lui servait finalement plutôt assez souvent.

« D'ailleurs, je te remercie de n'avoir rien dit pour les jumelles Patil. Ça aurait jeté un léger contentieux entre nos deux familles.

- C'était un plaisir, répliqua Zabini. De toute façon, comme ils l'ont dit, ils auront déjà de quoi faire. Autant ne pas donner des idées de gendre au futur beau-père. »

Ainsi, Zabini avait volontairement oublié les sœurs Patil pour préserver la future alliance Malefoy-Patil. En ne jetant pas le doute sur l'allégeance de Padma, il s'assurait un rival de moins dans sa course pour Parkinson.

Voilà qui réjouirait Parkinson. Zabini tenait vraiment à elle.

« Et tu sais à quel point j'aime protéger les biens de mes amis. »

Malefoy releva brusquement la tête. Neville mit quelques instants à comprendre ce qui se jouait.

Zabini avait un moyen de pression sur Malefoy. Si Malefoy faisait le con et décidait de s'en prendre à Pansy, Zabini le grillerait avec cette info.

Neville avait du mal à croire que les deux eussent un jour été amis, tant leur relation semblait basée sur des calculs et des équilibres précaires.

« Ça va se faire, du coup ? »

La question de Nott les coupa dans leur duel de regard.

« Pour l'instant, c'est ce qui est prévu. Je compte sur Pansy et Daphné pour me cuisiner Padma. »

D'après ce que Neville avait pu en voir, Malefoy misait bien sur les deux filles les plus efficaces de sa bande.

« De toute façon, elle peut pas dire grand-chose. Papa Patil veut juste assurer tous ses arrières. Il a un pied dans chaque camp. »

L'analyse de Malefoy tenait la route. Si un jour on parvenait à renverser Celui-dont-le-nom-ne-doit-pas-être-prononcé, Parvati permettrait à sa famille d'être dans le camp des vainqueurs. Dans le cas contraire, c'était Padma qui tenait ce rôle.

« Tu crois que ces débiles de l'Ordre pourraient renverser notre maître ? »

Nott avait posé la question d'un ton détaché, mais Neville ne fut pas dupe. Zabini non plus, apparemment.

« Tu remettrais en doute la puissance du Seigneur des Ténèbres ? Tu crois que quelqu'un serait capable de l'abattre ? Décidément, Théo, tu tiens peu à la vie.

- Fais pas le malin, Blaise. Pansy fait exactement la même chose en embauchant Londubat. Alors ne viens pas nous seriner que tu n'y as jamais pensé. »

Malefoy était vraiment finaud dans ses analyses. Pas étonnant que Parkinson et lui se fussent toujours bien entendus.

« Ils ont quand même réussi à endormir les hiboux de la volière londonienne, reprit Nott. Ils ont empêché la distribution de la Gazette pendant trois jours !

- Et alors, on n'en est pas mort ! En plus, rien ne dit que ce soit eux !

- C'était signé !, s'insurgea Nott.

- Ce ne serait pas la première fois qu'on falsifierait une signature. Tu es plutôt expert, je crois… » railla Malefoy.

Neville pensa à Ron, qui avait imité pour lui une signature de professeur au bas d'un parchemin pour aller chercher un livre dans la Réserve interdite de la bibliothèque. C'était en cinquième année, quand Neville avait appris l'évasion des Lestrange. Il avait voulu se renseigner, un peu, sur les maléfices.

Ce qu'il avait lu lui avait glacé le sang et l'avait d'autant plus encouragé à pratiquer les contre-maléfices qu'enseignait Harry.

« T'as intérêt à pas falsifier la signature du contrat de mariage avec Daphné, lâcha Blaise. Je suis pas sûr qu'elle te le pardonnerait.

- Elle n'en saurait rien. Comme si j'allais risquer ma fortune pour ses beaux yeux. »

Tiens tiens. Parkinson serait ravie d'avoir ce renseignement.

« On sait tous qu'elle vend son cul au plus offrant. Aucune preuve, mais il est hors de question qu'un bâtard hérite.

- T'es un peu dur, sentit Zabini. T'as juste à la cloîtrer pendant trois mois et à la mettre sous surveillance elfique pour contrôler la conception de ton premier héritier. Après, on s'en fout. »

Un écœurement saisit Neville. Ils parlaient des femmes comme d'objets de transaction ! Ils ne voyaient en leurs amies rien d'autre qu'un ventre dont sortirait l'héritier légitime ! Pas étonnant que Narcissa Malefoy fût toujours en dépression depuis tout ce temps…

« T'as prévu ça pour Pansy ?

- Contrairement à toi, j'ai d'autres moyens de m'assurer sa fidélité. »

Zabini était devenu froid, coupant court à la conversation. Malefoy ricana :

« T'as vu, Théo, le petit cœur tout mou de Blaise a trouvé son propriétaire.

- Allez vous faire foutre.

- Si c'est avec toi, c'est pas pour me déplaire. »

Les trois éclatèrent tous d'un rire gras, comme complices d'une vérité qui échappait à Crabbe et Goyle. Neville observa Nott, qui avait lâché cette vanne si rapidement. Quelque chose lui échappait…

« T'as fait ta demande à Parkinson ? » demanda Nott en se rallumant un cigare.

Zabini plissa des yeux.

« Pansy m'a dit d'attendre. Vous savez qu'il nous faut l'aval du Seigneur des Ténèbres, et pour l'instant il ne s'est pas prononcé. Comme elle n'est pas première héritière, elle est moins intéressante à marier que Millicent ou Theresa. Pour ces deux-là, l'héritage est en jeu. »

Neville avait déjà croisé Theresa Flint. Elle n'avait toujours pas trouvé de mari, alors qu'elle approchait de l'âge fatidique de vingt-quatre ans.

« J'ai bon espoir que notre maître se désintéresse de Pansy et qu'il la laisse épouser n'importe qui, du moment que son sang est pur. Et si je manœuvre bien, je récupère une part de l'héritage Parkinson par legs direct du père.

- Par legs direct ?

- Bien entendu ! Parkinson ne va pas léguer à sa cadette les biens dont il est maître. Il y a un héritage sur le marché à récupérer, et je veux vous proposer d'y travailler avec moi. »

Zabini pensait pouvoir spolier Parkinson ? Il n'était pas au courant de ce qu'Augusta lui avait fait comprendre. Sa future fiancée ne le lui avait pas dit.

Elle avait caché à l'homme qu'elle aimait qu'elle était sûrement première héritière, et qu'elle hériterait. De toute la fortune Parkinson.

Ils allaient comploter à trois pour récupérer ce qui lui revenait de droit.

« Les gars, ça fait presque une heure qu'on est là. Les filles vont râler si on tarde trop.

- Ou on va retrouver le cadavre d'Holly dans les toilettes et la mine innocente de Pansy, roucoula Nott. Elles peuvent pas se piffer, pas vrai, Vince ? »

Crabbe jeta un regard vide à Nott et se leva. Debout, il était aussi grand que Neville, mais beaucoup plus large. Goyle l'imita et ils se placèrent tous deux autour de Malefoy. Le trio partit en premier et Neville intercepta une remarque de Nott :

« C'est vraiment des lèche-cul, ces deux-là. Et dire qu'ils le font gratuitement.

- Tu sais bien que Malefoy trempe dans de sombres histoires. Crabbe et Goyle lui en doivent une. Protéger le fils, c'est s'assurer que les sous du père tombent toujours le premier du mois. »

Neville les suivit, réfléchissant à ce qu'il venait d'entendre.

Les liens de féodalité qui existaient entre les familles Malefoy, Crabbe et Goyle assuraient une importance supplémentaire à Malefoy. Celui-dont-le-nom-est-à-taire, s'il lui venait à l'idée de répudier son Mangemort, se mettrait à dos trois familles au lieu d'une. Les alliances politiques que Parkinson créait par des mariages étaient complétées par des salaires réguliers que se versaient entre eux les Sangs-purs.

La question à laquelle Neville devait trouver une réponse, c'était de connaître les personnes à faire basculer pour isoler au maximum, par ces jeux d'alliance, Celui-qui-se-prend-pour-Merlin.

Dans le salon carmin, l'ambiance était électrique. Un grand nombre d'invités était parti, notamment les générations âgées. Ne restait que les personnes de l'âge des fiancés. Les filles jouaient aux mikadominos, un jeu où Parkinson excellait, vu son air ravi. Des exclamations variées naquirent au retour des fumeurs.

L'attention de tous étant happée, Neville se glissa derrière une tenture pour ôter la cape d'invisibilité. Quand il repoussa le rideau, il aperçut Parkinson qui houspillait Malefoy. Il partit vers le bar central, pour récupérer son plateau : il lui raconterait le soir-même ce qu'il avait entendu, lors de ces veillées étranges où Parkinson fuyait le sommeil en sa compagnie, terrifiée par les cauchemars qui la guettaient dès la lumière éteinte.