Chers lecteurs,
Que de fics en si peu de jours, après tant de jours d'absence.
Nictocris a relu ce chapitre, où finalement, un rating K suffit. Elle potasse un nouveau chapitre (j'aime la torturer). Elle a vraiment du taf (et en plus un vrai travail, pas que sa relecture de mes fics). Bref.
L'inspiration est revenue, réjouissez-vous. J'ai de nouveau deux chapitres d'avance.
Merci aux commentateurs, as always.
Portez-vous bien, à bientôt (promis, pas dans un mois, un peu avant, genre dans 15 jours, allez 14 parce que je suis sympa),
Al
PS : Réponse au commentaire de Katymyny : ah ah sir parkinson est un chouette garçon, il ne faut pas se fier aux apparences. regarde, après tout ce qu'il a fait de mal dans les livres, drago malefoy est un des personnages préférés d'harry potter parce qu'au fond, c'est un bon gars. merci pour ton commentaire ! nicto à mes côtés t'embrasse aussi
« Si un royaume est divisé contre lui-même, ce royaume ne peut pas tenir. Si les gens d'une même maison se divisent entre eux, ces gens ne pourront pas tenir. » Marc 3, 24-25
Neville entra dans son atelier, déjà fatigué avant même de commencer sa journée. Il n'espérait qu'une chose : ne voir aucun client et manipuler tranquillement les diadèmes sur lesquels il travaillait depuis une semaine sans être dérangé.
Sa misanthropie était exacerbée par sa lassitude.
En voyant l'énorme kétoupa qui trônait sur le dossier de sa chaise, il sentit que ses souhaits n'allaient pas être exaucés.
« Karma ! Toi ici ? »
L'oiseau le fixait d'un œil sévère, presque aussi lointain que celui de sa maîtresse quand elle regardait les étoiles. Neville s'approcha de lui et détacha la lettre accrochée à sa patte. L'oiseau claqua du bec, mécontent.
« Je dois bien avoir un truc à grignoter, je garde des réserves pour Gnaa. Attends un peu. »
Neville revint à son bureau, attrapa le coupe-papier qui lui servait aussi de tournevis et décacheta la lettre. Tout en dépliant la lettre d'une main, il ouvrit son tiroir et jeta un bout de viande séchée à Karma qui le happa au vol.
« Glouton, va. »
L'oiseau occupé à mâchonner, Neville revint à son courrier.
La lettre tenait en peu de mots.
N,
Quand ton faux maître te trahira, va vers la Lune. Au solstice, garde la fille au sang de feu.
P.
Comme d'habitude, Parvati était obscure. À croire que les devineresses étaient toujours sibyllines…
J'ai bien besoin de ça, tiens…
Son faux maître, ce devait être Parkinson. Sans grande surprise. Aux yeux de tous, il lui obéissait. Mais en réalité, leur combine reposait sur autre chose que des liens de servitude.
Pour quelle raison Parkinson le trahirait-elle ?
Question con. Pour sauver sa peau, son héritage ou Zabini, au choix. Ou les trois à la fois.
D'un autre côté, il avait l'impression qu'elle avait confiance en lui. Et il lui faisait confiance.
Connerie. Il voulait lui faire confiance.
Bon. Le reste. La fille au sang de feu, il en avait déjà entendu parler.
« Londubat, je ne vous paye pas à regarder dans le vide. »
Il s'ébroua, alla fermer la porte et revint à sa tâche, attendant impatiemment sa pause de midi. Il tritura l'argenterie qu'il devait restaurer, laissant son esprit vagabonder.
Les mains occupées, les idées s'étaient toujours présentées plus clairement à son esprit. Il adorait avoir les mains dans le terreau et les racines, parce que ça lui vidait la tête. Il trouvait le même avantage en joaillerie.
Il cala le diadème qu'il retapait sur son établi et attrapa ses outils et sa baguette. Au bout d'une heure, il se sentait déjà l'esprit plus clair.
Quatre mois auparavant, au Sunday's Sundae, Parvati l'avait mis en garde contre les deux bêtes, vivante et morte, qui pourraient attaquer la fille de sang et de feu. Ou au sang de feu, il ne se souvenait plus trop.
Deux nuits plus tard, il était allé à Poudlard et avait visité la Chambre des secrets avec Ginny. Il avait vu la carcasse du basilic.
La bête morte. Qui avait attaqué, à distance, post-mortem, Ginny.
Ginny serait donc la fille au sang de feu ?
La même nuit, il avait vu Luna, traînant avec des loups sauvages avec l'aisance de Parkinson dans une soirée mondaine. Encore humaine, certes, mais avec un comportement de bête sauvage.
Non, une nature de bête sauvage.
Un loup-garou.
La bête vivante. Bien entendu. Les deux bêtes, il les avait rencontrées en une seule soirée, à Poudlard. Le basilic et Luna.
Parvati avait vu juste.
« Londubat – et Neville ne put s'empêcher de tressaillir en étant tiré aussi abruptement de ses pensées par son patron – voilà deux épingles à cheveux qu'il vous faudra réparer avant la rentrée de septembre. Miss Smith les voudrait pures pour sa remise des diplômes d'ASPIC. »
Mais bien sûr ! Le solstice ! Ginny allait terminer son année dans deux mois, elle allait devoir quitter Poudlard au mois de juin !
Neville attrapa les épingles et se remit, en apparence stoïque, à sa tâche.
Ils avaient réussi à enjoindre aux nouveaux élèves désignés par le Choixpeau de ne pas venir à Poudlard et de rester cachés dans le monde moldu. Ils avaient réussi à mettre sous la coupe de Rogue – et donc sous les regards aiguisés de McGonagall et Chourave principalement – des élèves au sang impur. Ils avaient réussi, à force de supercheries dans les papiers de famille, à mettre en sécurité certains Nés-moldus, en leur inventant une famille sorcière.
Une année.
Ils avaient eu une année de répit.
Neville savait que McGo allait bientôt lui demander d'envoyer une lettre aux quelques rares Nés-moldus pour leur sommer de rester loin du monde magique. Et ils allaient devoir s'occuper de la disparition des élèves Nés-Moldus ayant fini leurs études.
Ginny, malgré la pureté de son sang, n'y couperait pas. Elle devrait, elle aussi, disparaître. Fuir les Rafleurs. Éviter au maximum le monde magique. Elle lui hurlerait dessus, elle qui espérait tant retrouver sa liberté de mouvement entravée depuis presque un an. Elle serait déçue. Il faudrait la faire partir. La mettre en sécurité. L'empêcher de bouger. Elle n'avait plus la force psychique d'antan : elle risquait trop gros.
C'était ça, ce que lui disait Parvati. La fin d'année approchant, il allait falloir faire ce qu'ils avaient déjà fait l'année précédente : rien n'avait changé en une année. La situation n'avait pas évolué. Quoi qu'ils pussent faire, rien ne changeait.
Bizarrement, cette année était passée à toute vitesse. Comme quoi, on s'habitue à tout…
Neville travailla d'arrache-pied pour éviter de penser, et ce fut relativement efficace.
Quand enfin sa nuque raidie se détendit, il était midi passé.
Il saisit sa cape et sortit de l'officine de Grimlen en ne croisant personne sur sa route.
Sur le trottoir d'en face l'attendait Parkinson.
« Eh merde… Qu'est-ce qui se passe, encore ?
- C'est comme ça que tu salues tes supérieurs, Londubat ? »
Elle avait les lèvres pincées sur un rouge à lèvres discret. Son sac, pourtant chargé, semblait ne rien peser sur son épaule : elle se tenait droite et n'avait pas l'air de l'attendre. Elle portait une robe bleu nuit, rehaussée de broderies argentées, sûrement faite sur mesure par Tissard et Brodette.
« Bonjour, Miss Parkinson. Vous êtes très en beauté, aujourd'hui, grinça-t-il.
- Je t'emmène déjeuner, dit-elle en se détendant légèrement. Bouge-toi. »
Il cala son pas sur ses enjambées et ils partirent en silence, lui légèrement en retrait, elle fière et altière. Elle ignorait les regards des hommes sur elle avec une telle désinvolture qu'on aurait pu croire qu'elle ne les remarquait pas. Il savait qu'elle faisait tout pour les provoquer, ces regards insistants. Elle montrait qu'elle était là. Il carra des épaules comme pour mieux tenir son rôle de garde-du-corps. Il avait encore grandi ces derniers mois et atteindrait bientôt les deux mètres réglementaires, comme son père avant qu'il fût voûté par l'amnésie. Mais malgré sa haute taille, il ne faisait aucun doute que c'était elle qui avait la préséance.
Le monde sorcier tout entier savait qu'il était au service de Pansy Parkinson.
Ils parvinrent au restaurant qu'elle avait choisi. Contrairement au Guerni'café qui regroupait toute la haute société anglaise sang-pur, la Guivre semblait être une brasserie sorcière abordable, moins guindée. Un endroit sympathique dans lequel il pourrait emmener Lavande et Teddy.
Parkinson poussa la porte. Un serveur affable se précipita à sa rencontre.
« Miss Parkinson, c'est un plaisir de vous revoir. Un box privé pour vous et monsieur, je présume ?
- Tout à fait, Edgar, répondit Parkinson – montrant ainsi qu'elle avait ses habitudes dans un endroit plus décontracté que ceux qu'elle fréquentait usuellement. Apportez-nous un Chambord avec la carte, s'il vous plaît. »
Il les mena vers un box derrière un rideau et tira la chaise de Parkinson pour qu'elle pût s'asseoir.
« Ces Français… Si on peut bien leur reconnaître une qualité, c'est qu'ils savent faire du vin, convint Parkinson une fois le serveur parti et Neville installé en face d'elle.
- Je suppose que tu ne m'as pas emmené ici pour parler alcool. »
L'air poli de Parkinson disparut.
« Ne va pas plus vite que le vif d'or, Londubat. Chaque chose en son temps. »
Un elfe leur apporta la carte et une bouteille dans un seau rempli de glaçons. Neville remercia l'elfe, saisit la bouteille et servit Parkinson. Elle huma son verre et observa la robe du vin, en connaisseuse. L'œnologie avait toujours fait partie d'une bonne éducation sang-pur anglaise. Neville avait toujours pallié son manque de nez par une observation rigoureuse, mais il n'avait jamais acquis une fine connaissance des vins ni développé son palais. Il se doutait que Parkinson était du genre à reconnaître les arômes à la première gorgée. Son père avait dû lui apprendre à boire sans s'enivrer et à apprécier un bon alcool en gardant les idées claires et le goût affûté.
Neville ouvrit la carte et la parcourut des yeux. Il ne savait quoi choisir : tous les plats avaient des noms alléchants.
Le serveur revint vers eux :
« Nous prendrons deux truites fumées aux baies de Naples, avec un gratin de citrouille en guise d'accompagnement. » déclara Parkinson, le coupant dans son observation minutieuse de la carte.
Il aurait pu se sentir vexé qu'elle eût choisi à sa place, mais il devait reconnaître qu'il aurait pris un temps fou pour se décider. De toute façon, c'était Parkinson qui l'invitait. Autant lui laisser le choix dans le menu.
Quand le serveur eut récupéré les cartes et se fut éloigné, elle sortit un étui à cigarettes. Neville, se sentant d'humeur galante, sortit le briquet qu'il avait l'habitude d'avoir sur lui depuis qu'il servait Parkinson et le tendit devant elle pour qu'elle pût embraser sa cigarette.
« Drôle de briquet, commenta Parkinson en l'allumant.
- Récupéré dans le rebut de Grimlen. Je ne sais pas à qui il a appartenu. »
Elle jeta un coup d'œil aux armoiries frappées sur le métal.
« Je dirai aux Temple, une dynastie sang-pur qui s'est éteinte il y a un siècle. Le cygne était leur animal de prédilection. »
Elle lui rendit le briquet et reprit :
« Mon père te soupçonne d'avoir été présent à Pré-au-lard mardi dernier, commença Parkinson en expirant une longue bouffée de nicotine. Lors de cette fameuse séance de vandalisme. Avec Cormac McLaggen. Et deux autres, non-identifiés. »
Neville ne répondit rien. Elle devait savoir, de toute façon. Nier n'aurait servi qu'à passer pour coupable.
« Son adversaire a osé le provoquer et a lâchement pris la fuite.
- Je l'ai traité de bâtard, avoua Neville. Et je n'ai pas fui, j'ai fait diversion. »
Parkinson eut un ricanement qui ressemblait à un reniflement
S'il y avait bien une insulte qui ne pouvait pas passer dans les milieux sangs-purs, c'était les attaques sur la filiation.
« Bâtard, à mon père ? T'as plus de courage que ce j'aurais cru, Londubat.
- Ton père voulait me tuer. Il a failli réussir.
- Je suis d'ailleurs étonnée que tu sois encore en vie. Il vieillit. D'habitude, il ne rate jamais sa cible.
- Il a voulu faire durer le plaisir et s'est fait prendre de vitesse par Luna, blagua Neville.
- Ça lui apprendra. On ne joue pas avec la nourriture, il me l'a suffisamment répété. S'il ne met pas en pratique son propre enseignement, tant pis pour lui… »
Le ton froid et distant qu'elle utilisait était démenti par le léger sourire qui flottait sur ses lèvres.
Il comprit qu'elle était heureuse qu'il fût encore en vie.
« Si je suis suspect, pourquoi personne n'est venu me voir ? On est venu interroger les Weasley pour moins que ça…
- Sois pas susceptible, Londubat. Père serait venu en personne te poser des questions si je ne lui avais pas assuré que tu étais avec moi cette nuit-là. »
Neville soupira. Un alibi. Elle lui donnait un alibi.
« Il était sûr de lui et m'a questionnée. Pour savoir pourquoi tu étais chez moi à une heure aussi matinale. »
Il grimaça. Il sentit ce que ça impliquait, ce verbe. Questionner. Elle devait avoir des cicatrices encore fraîches…
« Un fâcheux réglage de télescope. Étude d'étoiles et d'astres, voilà pourquoi tu étais chez moi à cinq heures du matin. »
Si on l'interrogeait, il saurait quoi répondre. Or, si Parkinson lui fournissait l'alibi, c'est qu'elle allait lui demander quelque chose en échange.
Les truites apparurent dans leurs assiettes. La discussion sembla close : Parkinson prit ses couverts et commença à ôter les écailles qui couvraient la chair de poisson. Neville l'imita, et pendant quelques instants, ils mangèrent en silence. La truite était délicieuse, le gratin parfait. Neville savoura chaque bouchée : ça le changeait de la cuisine des jumeaux.
Parkinson reprit au bout d'un moment, les yeux fixés sur son assiette :
« Si j'ai menti à mon père, c'est que je ne peux plus lui faire confiance : si ta grand-mère a raison, il veut me priver de mon héritage. Il n'en a pas le droit. »
Neville ne réagit pas : ça, il le savait déjà. Il attendit la suite.
« Il veut me vendre au plus offrant et transmettre mon patrimoine à un inconnu. Peut-être au Seigneur des ténèbres lui-même, pour se faire bien voir et gagner sa sympathie, si l'on peut parler de sympathie quand on parle d'eux… »
Parkinson ne s'était jamais montrée aussi critique envers le maître qu'elle feignait de servir. Heureusement que les boxes étaient pourvus de sortilèges de discrétion…
Neville savait que Parkinson valait très cher sur le marché des filles à marier, l'une des raisons pour lesquelles elle n'avait toujours pas de fiancé : elle devait être, avec Daphné Greengrass, un des meilleurs partis d'Angleterre. Que son père fût dorénavant chef des Aurors devait augmenter son prix. Zabini allait devoir aligner.
« Zabini est en bonne position pour te décrocher ?
- Non. Et c'est bien pour ça qu'il voudrait se faire bien voir de mon père en lui donnant des infos de première main sur la résistance. Il compte sur moi pour te les soutirer. »
Ah.
« Je ne te dirai rien, répondit calmement Neville. Il est hors de question que…
- Je sais bien, Londubat, c'est ce que je lui ai dit, le coupa-t-elle. Tu as beau avoir tous les défauts du monde, tu ne donnerais jamais le nom d'un des tiens. Personne n'a jamais réussi à te tirer les vers du nez. Je ne vais pas m'y risquer. »
Elle avait toujours joué franc jeu avec lui, il devait lui reconnaître ça.
Lui aussi. Bizarrement, elle était l'une des rares personnes au monde auxquelles il pouvait parler sans filtre.
« À force d'obstination, tu aurais pu me faire parler, avoua-t-il.
- Je ne prendrai pas le risque de perdre ce que nous avons. »
Ah.
Elle le fixa dans les yeux.
« Londubat, quoi que tu dises, je fais partie des tiens. »
Elle assénait ça comme une vérité incontestable, et c'était le cas.
« Tu as toujours protégé les tiens. Je sais que tu ne me vendras jamais et que tu feras toujours tout pour me protéger, même si je ne t'ai jamais rien demandé. Et là, je vais te demander quelque chose. »
Neville grimaça : il sentait venir ce qui n'allait pas lui plaire.
Elle porta le coup de grâce en se penchant sur la table.
« Donne-moi accès à ton appartement. »
Depuis qu'ils avaient bloqué les pénates des Weasley et de Neville, seuls certains membres des Loups d'Odin étaient autorisés à gagner le 93 chemin de Traverse.
Ce qui n'était pas le cas de Parkinson.
« Tu sais bien que le lieu est sous Fidelitas, et que je ne suis pas gardien du secret. »
C'était pas le genre de Parkinson de montrer ses émotions, mais Neville était certain que le tressaillement de sa lèvre inférieure était dû à la déception qu'elle n'avait pas circonscrite à temps.
« Et je suppose que Frederick Weasley verrait un inconvénient majeur à confier l'adresse à la fille de Sir Parkinson, c'est ça ?, lâcha-t-elle d'un air ronchon.
- Comment tu sais que c'est Fred le Gardien ?, s'étonna Neville.
- Je ne savais pas, c'est toi qui viens de me le dire. »
Il se mordit la lèvre. Elle l'avait bien eu !
« J'aurais pu être le Gardien…, grogna Neville, blessé que cette éventualité ne l'eût pas effleurée.
- Tu aurais été le Gardien, ça fait deux mois que j'aurais eu l'adresse. »
Elle paraissait vraiment amère. Elle avala le reste de son verre de vin cul sec et Neville comprit que quelque chose n'allait pas.
Parkinson avait réellement besoin de son adresse. Elle voulait vraiment aller chez lui.
« Qu'est-ce que tu cherches exactement ? »
Elle le jaugea un instant et avoua :
« Je n'ai plus de lieu de repli. Pas que j'aime aller chez toi, très franchement, c'est d'un goût affreux et d'une dangerosité absolue, avec ces trucs qui explosent un peu partout, mais j'ai besoin d'un endroit inaccessible aux miens. Tout le monde peut venir chez moi. Mes elfes peuvent surgir à n'importe quel moment. »
Ou son père.
« Je pensais avoir gagné ma tranquillité en achetant à Eton College. »
Elle avait donc acheté un appartement côté moldu pour éviter que ses amis vinssent trop régulièrement la voir. Imaginer Malefoy, Zabini ou Greengrass en territoire moldu était surprenant mais pas improbable. Néanmoins, ils devaient éviter au maximum de se pointer chez elle.
Parkinson ne voulait pas venir l'emmerder jusque chez lui.
Elle voulait un endroit sûr.
« Je ne peux pas t'offrir ce que tu me demandes, Parkinson. Désolé. »
Il espéra qu'elle sentirait la sincérité dans sa voix.
Il ne comprenait pas pourquoi ce besoin d'abri sûr la préoccupait uniquement maintenant. Elle faisait normalement un minimum confiance à ses amis…
Elle soupira lourdement :
« Écoute, si je te demande ça, c'est qu'on tiendra bientôt une réception au manoir Parkinson et qu'en tant que maîtresse de maison, je me dois de l'organiser. Nous fêtons la nomination de mon père à la tête du bureau des Aurors. »
Neville ricana.
« Mes félicitations les plus sincères…
- Il y aura tout le gratin sang-pur anglais. »
Les habituels des soirées d'Uto.
« Et notre maître et ses disciples. »
Cette fois, Neville tiqua. Celui-qui-parlait-aux-serpents était de retour en Angleterre ? C'était mauvais, ça…
« En tant que personnel de la famille Parkinson, tu seras au service. »
Cette déclaration lui fit autant d'effet qu'un sort d'explosion sur un mur de confettis. Lui, au service du mage noir ?
Elle continua avant qu'il eût pu réagir :
« Tu comprends pourquoi j'ai besoin d'un abri ? Je ne peux pas prévoir les réactions de mes amis face à notre maître. Théo le vénère, Drago l'adore. Blaise le craint. Il sera prêt à dire n'importe quoi pour s'attirer ses bonnes grâces et être bien vu. Tu savais que le Seigneur des ténèbres donnait son avis sur les unions sorcières ? Apparemment, dès que ça concerne des enfants sangs-purs, il se sent investi… Blaise fera tout ce qu'il faut pour qu'il nous soit favorable. »
Parkinson jouait sur le fil depuis de nombreux mois, elle avait l'habitude des situations tendues. Mais cette fois, elle devrait conserver cet équilibre face à son maître, le plus puissant sorcier d'Angleterre maintenant qu'Albus Dumbledore était mort.
Dumbledore…
Il aurait dû y penser plus tôt.
« J'ai peut-être une idée. Je termine à vingt heures. Attends-moi devant chez Grimlen. »
Ils finirent leur repas en discutant, bizarrement, littérature – Parkinson était elle aussi fan de l'Auror Odin, et comme Angelina avait fait des résumés des romans de Von Mopp à Neville, il avait suffisamment de connaissances en la matière pour mener une conversation polie avec son employeuse. Quand il retourna travailler, il se sentait imperceptiblement plus léger. Discuter avec Parkinson lui avait changé les idées.
Le soir, il faisait la fermeture. Grimlen le laissait toujours fermer les vendredi et samedi soirs. Il congédia servilement les derniers clients, rangea les instruments dans leurs tiroirs et tira les rideaux. La clochette tinta à vingt heures pétantes.
« Je suis toujours étonnée de te voir trimer aussi dur, remarqua Parkinson. Après tout, il me semblait que l'héritage Londubat aurait pu te permettre d'être rentier. Ou au moins de choisir un métier à la hauteur de ton sang. »
Neville ne prit pas pour attaque personnelle cette remarque. Ça faisait belle lurette qu'il manquait d'argent, ça ne le gênait pas qu'on le vît comme ce qu'il était vraiment : un noble sang-pur désargenté.
« On doit payer les soins de mes parents à Sainte-Mangouste depuis dix-neuf ans, répliqua-t-il en comptant la caisse. Tu te doutes bien que mes parents ne travaillent plus depuis un petit bout de temps. Ma grand-mère n'a jamais travaillé, je me vois mal lui demander de l'or. On vit sur mon héritage depuis mon enfance. Depuis que les époux Lestrange ont torturé mes parents. »
Parkinson ne fit aucun commentaire – il lui en sut gré. Elle s'assit dans un fauteuil destiné à la clientèle et il sentit son regard sur lui tandis qu'il rangeait la boutique.
« Allez, on y va. »
Il s'approcha de la cheminée et y jeta une pincée de poudre de cheminette.
« On n'en a pas pour longtemps. »
Il se glissa dans la cheminée en annonçant :
« Arrière-cuisine de la Tête du Sanglier. »
Parkinson le suivrait.
« Vraiment, Neville, tu pourrais arrêter de débouler comme ça sans t'annoncer, grommela Abelforth en le voyant arriver.
- Abe, je t'ai prévenu ! »
Neville s'éloigna de deux pas et Parkinson arriva derrière lui.
« Mademoiselle, la salua froidement Abelforth.
- Monsieur. » répliqua Parkinson, glaciale.
Deux hippogriffes de faïence. Neville se lança dans les présentations :
« Abe, je te présente Pansy Parkinson.
- La fille du Mangemort ?
- Du chef des Aurors, je vous prie.
- Parkinson, continua Neville, imperturbable, Abelforth Dumbledore, propriétaire de la Tête du Sanglier.
- Enchantée. »
Il n'y avait que Parkinson pour réussir à être polie tout en ayant l'air légèrement écœurée, le tout en un seul mot.
« Abelforth, je peux te demander un service ?
- Tu me l'as déjà demandé, ronchonna Abelforth. Et je t'ai déjà dit oui.
- En cas de pépin, Parkie, tu peux venir ici. Abelforth te cachera. »
Elle haussa un sourcil à la mention du surnom stupide qu'il avait utilisé, mais ne dit rien. Pour une fois, Neville était en position de force. Et il lui fournissait ce qu'elle lui avait demandé : un abri temporaire, où personne n'aurait l'idée d'aller la chercher si ça tournait à l'aigre.
« À quoi je vous reconnaîtrai ? Je ferai jamais confiance à quelqu'un qui se présentera devant moi en disant s'appeler Parkinson.
- Demandez-moi la couleur de mes sous-vêtements quand Londubat les a vus. » répliqua-t-elle sans s'émouvoir.
Neville sentit une rougeur soudaine envahir son front, puis atteindre ses oreilles quand Abelforth, sincèrement surpris, se tourna vers lui.
« Eh ben finalement, t'es moins niais que ce que je pensais…
- C'est ce qu'il croit, coupa Parkinson en sortant une cigarette de son sac.
- Il est temps d'y aller, Parkinson. » dit-il en la poussant vers la cheminée.
Il avait l'impression que Parkinson et Abelforth allaient bien s'entendre. Elle se tourna vers lui juste avant de se couler dans le foyer :
« Je te redis pour la réception. Tu iras t'acheter une robe neuve sur mon compte chez Tissard et Brodette. »
Une fois qu'elle eut disparu, Abelforth fit un clin d'œil à Neville :
« Elle a pas l'air facile, ta copine…
- C'est pas ma copine. » coupa nerveusement Neville.
Il réfléchit un instant.
« Je dois passer à Poudlard.
- Encore ? Méfie-toi.
- Rogue est sur les nerfs, je sais…
- Et les Carrow ont pas trop apprécié ton tag chez les Serdaigle.
- Ginny a toujours réussi à faire porter le chapeau à quelqu'un d'autre, blagua Neville. Je resterai dans la Salle sur demande. T'as quelque chose à leur passer ? »
Abelforth fouilla dans ses placards et en sortit un saucisson, deux fromages et un pain.
« Dobby est passé ce matin, il a pris des légumes. Tarde pas trop.
- Merci. »
Il prit les victuailles et alla vers le portrait d'Ariana Dumbledore. Elle le salua et le laissa passer. Il remonta le long tunnel et parvint à la Salle sur demande, certain d'y trouver Colin et Dennis. Les deux frères avaient l'habitude de dormir dans la Salle sur demande pour éviter les lynchages des Carrow dans leur dortoir.
Quand il ouvrit la porte, il tomba en effet sur un frère Crivey.
« Neville ! Ça fait longtemps qu'on t'a pas vu ! »
Neville lui fit une accolade.
« Colin n'est pas là ?
- Il prend sa douche. Il va pas tarder. Oh chic ! Un saucisson ! »
Ils s'installèrent, grignotant et discutant.
« C'est pas trop dur ? La Gazette vous a fichés activistes et nés-moldus…
- Tu sais, répondit Dennis en se coupant une belle tranche de cheddar, quand Demelza a découvert il y a deux ans que nous étions ses cousins en fouillant dans ses archives familiales, ce qui a fait de nous des Sangs-mêlés, on s'en est déjà pris plein la gueule. Personne n'est dupe, mais tout le monde fait semblant, sauf les Serpentard et quelques Serdaigle. La Gazette n'a rien changé.
- Vraiment ? »
À l'automne 1997, les élèves qui n'avaient pas repris après Toussaint – dont Dean – étaient ceux qui n'avaient vraiment pas pu se rattacher à une famille sorcière quelconque.
« Tu sais ce que Colin va faire, l'an prochain ?
- On a un grand-oncle en Irlande. Apparemment, c'est moins craignos là-bas. Il va y aller, je pense. »
L'Irlande… Mais bien sûr ! Une illumination saisit Neville :
« Tu-sais-qui ne va pas en Irlande, c'est ça ?
- Non, pourquoi ?
- Ce serait parfait, en fait, pensa-t-il tout haut. On pourrait envoyer les Nés-moldus en Irlande… Les Finnigan et les Murphy sont étendus jusqu'en Amérique, comme tout bon Irlandais ! Et si jamais ça se gâte, les Nés-moldus pourraient toujours partir à New-York !
- New-York ? »
Dennis paraissait perdu. Étant Né-moldu, il n'avait pas dû entendre parler des rivalités entre Sangs-purs irlandais et anglais. Les Sangs-purs anglais avaient toujours voulu créer des liens de féodalité avec des grandes familles irlandaises, mais l'orgueil et la fierté des insulaires n'avaient jamais permis à aucun Anglais de s'installer durablement sur l'île. Certes, les Murphy, les O'Malley et les Finnigan étaient très souvent en guerre ouverte entre eux. Mais ils savaient toujours s'allier pour empêcher un Anglais de venir – le dernier en date, au siècle dernier, était rentré à Westminter en cinq morceaux. Et on n'avait toujours pas retrouvé sa tête.
Neville s'enthousiasma :
« On va tirer profit du sang anglais de Tu-sais-qui en Irlande. On va y mettre ceux qu'il recherche. Il ne pourra jamais les chercher jusque là.
- Neville, tu vas trop loin…
- Imagine, Dennis ! On va exfiltrer les Nés-moldus d'Angleterre ! »
Dennis le regarda comme s'il était devenu fou.
« Je ne sais pas ce que t'a refilé Dumbledore, mais ça a l'air fort, son truc… »
