Chers lecteurs,

Quel plaisir d'avancer de nouveau sur cette fic ! Je ne vous oublie pas. Jamais.
Aujourd'hui T je pense. Même pas.
Résumé rapide : Neville s'enquiquine au château du Loch et étudie avec Filius Flitwick.

Portez-vous bien, buvez du polynectar, à bientôt,

Al

PS : réponse à Katymyny la patiente qui normalement ne lit que des fics finies mais qui là a commencé une fic absolument pas finie : enfin un chapitre ! c'est plus une question d'équilibre à trouver qu'une question de review. là ça va j'ai de nouveau un peu de temps pour écrire, mais c'est par périodes, et la régularité n'a jamais été mon point fort (ni l'organisation). et les fics vacances c'est tellement moins prise de tête à écrire ! je ne fais aucune recherche, je ne réfléchis pas, j'écris mes conneries et roule ma poule c'est réglé ! donc oui. même si c'est gratifiant d'avoir des commentaires sur son travail, je préfère écrire des fics costauds que des bluettes, mais les bluettes me permettent de rigoler, ce que je ne peux pas trop faire sur celle ci. donc je mélange les styles et j'écris là où j'ai besoin. eh ben ! une psychanalyse d'auteur de fanfic en un pavé ! merci pour ta review et ta lecture tenace ! à bientôt, que le canada vive en toi

PPS : l'intro de chapitre c'est pour Nictocris.


« Accroche-toi, ferme les yeux, concentre-toi
Tes bijoux ne valent pas ta présence
Tu ouvriras les yeux le jour où »
Les bijoux, Maître Gims


Neville était en train d'arroser ses plantes quand cela survint. Un échauffement au torse qui bientôt le brûla en un endroit précis. Il mit trois à quatre secondes à comprendre que la bague de Parkinson, pendue à son cou, était en train de surchauffer.

« Merde ! »

Il lâcha son arrosoir. Il avait une heure pour aller à la Tête du Sanglier.

Elle n'avait pas chauffé depuis qu'il avait quitté la réception de Celui-dont-le-sadisme-est-très-connu au manoir Parkinson, et Neville avait naïvement pensé qu'en lançant le sortilège d'amnésie sur sa pseudo-suzeraine, il avait effacé son souvenir où elle lui transmettait un moyen de communication.

Apparemment, il s'était lourdement trompé.

Il alla récupérer Higin. Le corbeau était posé comme une sentinelle sur un poteau planté dans le sol : quand Neville s'était rendu compte que sa blessure à l'aile ne guérirait jamais complètement, il avait pris l'habitude de le promener avec lui. Il le portait sur l'épaule droite pour le changer d'endroit et avait placé dans tout le château des perchoirs pour l'oiseau. Higin claquait parfois du bec pour ponctuer ses phrases : l'oiseau appréciait la compagnie de Neville et Neville ne se plaignait pas d'avoir d'autres être vivants auxquels parler que Flitwick et Luna.

« Allez, Munin, on y va. »

Il ne savait pas si la corneille le comprenait. La plupart du temps, elle volait où elle voulait. Parfois, elle disparaissait pendant trois jours, puis revenait, l'air de rien, et les deux oiseaux jasaient pendant des heures pour le plus grand plaisir de Luna. Neville avait fini par leur donner des noms et les appeler par les prénoms des deux oiseaux d'Odin lui avait semblé convenir.

Il rentra vers le château du Loch en hâtant le pas, veillant à ce que Higin ne tombât pas de son épaule. Et si Parkinson lui tendait un piège ? Non, il ne fallait pas penser à ça. Elle l'avait trahi une fois – peut-être trahi, il l'espérait toujours – mais le fait que leur lieu de rendez-vous fût la Tête du sanglier le rassurait : s'il y avait eu un danger, Abelforth s'en serait occupé.

Il sentit un émoustillement le chatouiller : il quittait le château du Loch !

Il avait l'impression d'être un prisonnier s'échappant d'Azkaban.

« Tu vas où ?

- Voir Abelforth. Je te laisse les corbaks. »

Luna ne réagit pas, ne s'inquiéta pas et repartit à ses affaires lupines. Ce qui était toujours aussi bien avec Luna, c'est qu'elle le laissait vivre sa vie. Ginny aurait tenté de l'en dissuader, Parvati de lire le futur pour vérifier que tout se passerait bien, Seamus de l'accompagner.

Luna, elle, s'en foutait.

Il remonta dans sa chambre, prit la cape d'invisibilité et sa baguette. Il hésita devant les babioles que les Weasley lui avaient passées et décida de ne rien prendre. Il n'y avait pas de danger immédiat : autant ne pas risquer de gaspiller ou perdre les maigres ressources qu'il avait.

Il passa dans la bibliothèque.

« Professeur ? »

Flitwick releva le nez de son grimoire.

« Oui, Londubat ?

- Je dois sortir, me rendre chez Abelforth Dumbledore. Si je ne reviens pas dans deux heures…

- Attendez, Londubat. » répliqua-t-il en faisant venir un parchemin vers lui d'un coup de baguette.

Il griffonna rapidement le nom et l'adresse du château du Loch dessus et le tendit à Neville.

« Si l'on vous attrape et qu'on vous demande où vous habitez, donnez-leur ce papier. Hors de question que vous mouriez pour me sauver. J'aurai le temps de partir avant qu'ils débarquent. »

Neville prit le morceau de parchemin et ne chercha pas à discuter. Quand les jumeaux et lui avaient décidé de placer le 93 chemin de Traverse sous Fidélitas, ils avaient longuement hésité. Ce sortilège était une puissante protection, certes, mais si l'on cherchait à faire avouer quelqu'un qui n'était pas Gardien du secret, et notamment sous Véritaserum, cette personne, bloquée par le sort, pouvait mourir. Protéger sa maison avec un Fidélitas équivalait à prendre de gros risques pour la vie de ses habitants ; c'était une décision beaucoup plus lourde que simplement mettre la maisonnée sous protection magique. La plupart des sorciers se contentait des sorts de base et ne passait pas la barre du Fidélitas, jugé trop dangereux pour ceux qui étaient dans le secret sans être gardien.

Quand il quitta le château du Loch, Neville espéra sincèrement ne pas le voir pour la dernière fois. Il avança sur la route qui menait à la forêt en attendant de quitter la barrière de protection magique qui enveloppait le château. Ce fut quand il arriva à la frontière qu'il revêtit la cape d'invisibilité et transplana directement à Pré-au-lard.

Il faillit heurter un passant et se rétablit in extremis sur ses deux pieds. Pré-au-lard était bondé : des sorciers couraient de partout, des bars servaient en terrasse. Si parfois une vitrine brisée ou une boutique abandonnée indiquaient qu'il s'était passé des choses, des événements, quelques mois auparavant, ces quelques traces d'un passage de Mangemort dans les environs étaient effacées par la frénésie des passants. La fin d'après-midi était encore chaude. Comme toujours, Neville fut surpris de remarquer que la vie des sorciers n'avait guère changé depuis le retour à la vie de Celui-dont-on-ne-doit-pas-prononcer-le-nom : en posant un tabou sur son nom, on ne le nommait pas, il n'existait pas, la vie continuait. CQFD.

Neville avança dans la foule, se calant dans le sillage d'un passant. Quand il arriva devant la porte de la Tête du Sanglier, il avait l'impression d'avoir couru un marathon tant il avait tout fait pour échapper aux gens qui le croisaient.

La salle était vide. Heure creuse : les buveurs du matin étaient partis cuver leur vin, les soudards du soir n'étaient pas encore arrivés. Quant aux rares étudiants de Poudlard qui auraient pu être présents, depuis six mois, ils n'avaient plus le droit de sortir du château. Protection de Rogue pour les plus optimistes ; simple punition perpétuelle pour les autres.

Neville s'avança jusqu'au comptoir, restant tout de même sous sa cape.

À son bar, Abelforth semblait se porter bien. Il avait tressé sa grande barbe et noué ses cheveux en chignon sur le haut du crâne, ce qui faisait ressortir ses pommettes et lui donnait l'air d'un biker comme sur les photos moldues que Dean leur avait montrées dans leur dortoir, en cinquième année.

Neville se gratta la gorge pour attirer son attention. Abelforth devina immédiatement qui se trouvait là :

« Neville ?

- C'est moi.

- C'est quoi la couleur des sous-vêtements de Parkinson ? »

Neville sentit ses joues chauffer. Heureusement qu'il était resté sous la cape, Abelforth ne verrait rien.

« Noirs.

- Content de te revoir. Dans la cave. Tu connais la route. »

Abelforth libéra le passage qui menait à la cuisine. Neville se glissa dans l'ouverture, ôta la cape qui lui tenait vraiment trop chaud et la glissa dans son sac.

Dans la cuisine régnait un bazar sans nom. Neville se dirigea vers les escaliers qui descendaient vers la cave dans laquelle était planqué le portrait d'Ariana Dumbledore. Il poussa la porte et commença à descendre quelques marches.

L'escalier était plongé dans l'obscurité. Il sortit sa baguette :

« Lumos ! »

Il descendit les marches éclairées par la lumière diffusée par le sort.

Arrivé en bas des marches, il se prit une baffe monumentale.

« Salaud !

- Merde, Parkinson ! »

Par réflexe, il bloqua son bras qui revenait pour lui en mettre une deuxième.

S'il avait eu des doutes sur l'identité de Parkinson, elle venait de les faire voler en éclats : il n'y avait qu'elle pour le gifler avec autant de conviction.

« Je peux concevoir que t'aies une bonne raison de me gifler, mais deux, je vois pas.

- Tu m'as jeté un sortilège d'Amnésie !

- C'est toi qui me l'as demandé ! »

Grognant de rage, elle commença à vouloir se dégager. Il lui fit une clef de bras, la retourna et la coinça contre lui. Il fut content de sentir qu'il la maîtrisait beaucoup plus facilement qu'avant : les séances de sport qu'il s'était forcé de faire portaient leurs fruits. Elle se débattait entre ses bras et il n'éprouvait aucune fatigue : il était beaucoup plus éreintant de jouer avec des loups deux fois plus gros qu'elle.

« Londubat… Tu me fais mal ! Lâche-moi !

- J'attends que tu te sois calmée. »

Elle trépigna. Neville était bizarrement content de la serrer dans ses bras : il était en manque de contact. Il avait pris l'habitude que les gens le touchent, pour un oui ou pour un non : Lavande, Ginny, les jumeaux pour le charrier, Angelina qui lui ébouriffait les cheveux quand elle passait à côté de lui et qu'il était assis, ses plantes… Quant à Luna, elle l'alpaguait souvent de manière bourrue. Mais depuis qu'il logeait au château du Loch, il se sentait seul. Avoir Parkinson serrée contre lui, c'était bizarrement réconfortant.

Ça lui rappela la fois où chez Grimlen ils s'étaient battus comme des chiffonniers. Il avait encore grandi et son étreinte devait paraître encore plus grotesque qu'avant : Parkinson semblait toujours si fragile mais avait une volonté d'acier, alors que lui était grand et fort mais pliait toujours face à elle. Il y avait des choses qui ne changeraient jamais.

Parkinson se débattit encore un peu puis finit par respirer profondément contre son torse, presque calmée. Neville se sentait bien.

« C'est bon, je me suis calmée. Lâche-moi. »

Il n'aurait rien de mieux pour l'instant. Il la relâcha de mauvaise grâce. Parkinson s'éloigna de lui de quelques pas et il se mit à l'observer.

Elle avait maigri et paraissait plus adulte que dans son souvenir : ses pommettes étaient plus saillantes que jamais, ce qui lui allait bien, il devait le reconnaître. Elle ressemblait de moins en moins à l'adolescente qu'il avait connue à Poudlard. Elle avait ôté son manteau et Neville pouvait distinguer, sous la dentelle de sa robe, l'ombre malsaine de la Marque des Ténèbres qui s'étalait sur son avant-bras. Parkinson se soumit à son regard scrutateur en coinçant des mèches qui s'échappaient de son chignon. Elle le regarda enfin – ses yeux noirs et sombres posés sur lui.

« Il s'est passé quoi ? » demanda-t-elle abruptement.

Neville fronça des sourcils.

« Hein ?

- Ta joue… »

Elle avança vers lui, leva la main, caressa sa joue d'un geste délicat, suivant de l'index les quatre longues cicatrices qui lui ravageaient le côté du visage. Neville frémit : elle s'inquiétait pour lui ? Vraiment ?

« Luna m'a attaqué. »

Parkinson ôta sa main d'un geste vif comme s'il l'avait brûlée.

« Lovegood t'a mordu ?

- Non, la rassura-t-il. Juste blessé. Une nuit de pleine lune. »

Parkinson paraissait secouée : la peur dilatait ses pupilles, Neville pouvait le voir.

« Tu as survécu à une attaque de loup-garou ?

- Oui, reconnut Neville qui n'avait pas l'impression d'être un super-héros – après tout, c'était Luna qui avait fait tout le travail. Maintenant, je lui appartiens. En quelque sorte. »

Parkinson siffla :

« N'aie pas trop de maîtres, tu ne saurais plus à qui obéir, Londubat. »

Neville ne répondit rien, se souvenant à nouveau de la trahison de Parkinson. Mais si elle était là, c'était pour une bonne raison. Et le fait qu'il n'y ait toujours pas de Mangemort autre qu'elle dans la pièce était bon signe. Il relança :

« Tu vas bien ? »

Neville ne pouvait pas poser d'autre question pour l'instant. Elle parut surprise et cligna rapidement des yeux, puis elle opina :

« Ouais. »

Contre toute attente, Neville sentit ses entrailles se dénouer. Ainsi, pendant tout ce temps, il s'était inquiété pour elle ? Cette traîtresse ?

« Mais ce n'est pas le cas de tout le monde, ajouta Parkinson. On a encore attrapé certains de tes petits copains, et Brown a disparu. »

Lavande ? Disparue ?

« Ces infos ne sont pas encore sorties dans La Gazette pour ne pas alerter la population : les Malefoy aiment quand ça reste en famille. La chasse à l'homme pour Brown est lancée : Drago la veut. »

Neville grimaça :

« Pourquoi tu me mets au courant maintenant ? T'as pas pris cette peine, la dernière fois…

- Je ne savais pas pour McLaggen. » coupa froidement Parkinson.

Ah. Ça changeait tout.

« Tu ne savais pas… »

Il hésitait à la croire. Elle était si bonne menteuse… Il l'avait vue faire. Elle était douée en dissimulation et en manipulation. D'un autre côté, elle ne lui avait jamais menti : peut-être qu'il pouvait lui faire confiance, de nouveau. Peut-être qu'elle ignorait vraiment ce qui se tramait chez elle.

« Le manoir de mon père est suffisamment grand pour que j'ignore ce qui se passe dans toutes les pièces, expliqua-t-elle. De plus, comme je ne suis toujours pas reconnue héritière, le château ne m'obéit pas. C'est pas pour rien que je continue à faire mes petites recherches : mon père garde la mainmise et je t'avoue que ta fuite m'a sérieusement fait prendre du retard dans mes projets. J'ai eu beaucoup de paperasse à régler et quelques désagréments d'ordre majeur. »

Comme un légilimens qui se baladerait dans ses souvenirs ou quelques Doloris.

« Ils t'ont torturée ? »

Pourvu qu'ils ne l'eussent pas fait. Neville fut surpris de sentir à quel point cette idée lui était insupportable.

« C'est gentil de t'en préoccuper maintenant, Londubat.

- Je suis désolé. »

Elle le soupesa du regard, comme pour évaluer s'il était sincère, et sembla le croire : elle s'adoucit.

« Non. Le Seigneur des Ténèbres a juste fait un petit tour dans mes souvenirs. »

Ce serpent dans sa tête… Il ne devait rien y avoir de pire. Tant de méchancetés en un seul être ! Et Parkinson en parlait d'un ton détaché, narquois. Neville pensa à Luna et à la distance qu'elle avait créée entre elle et certains souvenirs du manoir Malefoy. Il retrouvait cette même distanciation chez Parkinson, un rejet de traumatisme, une conscientisation brutale, sans concession, pour accepter un peu mieux l'inacceptable.

« Il a avoué lui-même ne rien voir de problématique. J'ai menti de tout mon être. »

Neville eut un sursaut :

« Quoi ? Mais c'est impossible !

- Je suis très bonne dans ce que je fais.

- C'est pas contre toi ! La légilimencie débusque le mensonge. Tu-sais-qui est un excellent légilimens : il aurait dû découvrir que tu lui cachais des choses, même si c'était du vide. Le sortilège d'amnésie laisse un blanc dans les souvenirs ! Il a vu qu'il y avait un blanc et il n'a pas cherché à en savoir plus ?

- Je ne sais pas non plus comment j'ai fait. Je t'avoue que je n'ai pas compris pourquoi il n'a pas tiqué : j'ai réussi à lui cacher qu'il me manquait des souvenirs et toutes nos conversations trop tendancieuses. Je lui ai montré certaines d'entre elles, celles où tu me promettais ton allégeance, mais je lui ai caché d'autres moments. J'ai vraiment cru que j'allais y passer. »

Parkinson hésita un instant, puis reprit :

« Mais… Je ne sais pas. C'est comme si d'un coup, je comprenais comment bloquer mon esprit, ce qui ne m'était jamais arrivé. Mon père a pris l'habitude de fouiller dans mes souvenirs depuis que je suis petite, et je n'avais jamais réussi à lui cacher quoi que ce soit s'il cherchait à en savoir plus. Il me punissait quand il trouvait quelque chose qu'il réprouvait. Je te savais bon occlumens et j'ai toujours été jalouse de ça : j'aurais tellement aimé que mon père ne sache pas tout ! Et là, face à mon maître, rien : j'ai réussi à cacher des tas de choses. À croire que nos magies se complètent bien. »

Un silence.

« Ou que tu as déteint sur moi. »

Ils réfléchirent tous deux. Leurs magies pouvaient-elles se reconnaître ? Celle de Neville aider celle de Parkinson en cas de besoin ? Pourtant, les liens de vassalité n'avaient jamais été complets entre eux, leur magie respective ne devait pas se sentir concernée par ce que faisait l'autre, non ? À moins que la Marque des Ténèbres ait accentué le lien entre eux… Est-ce que c'était comme les morsures de loup-garou ? Échanger leurs sangs par un tatouage de sang avait-il aussi transformé leurs magies ?

Neville reprit contact avec la réalité : il y réfléchirait plus tard, au château du Loch, et demanderait à Flitwick ce qu'il en pensait.

« Tu me disais que vous teniez des Loups d'Odin ?

- Oui. Un frère Crivey et un autre gars, John Bowl je crois. Il n'était pas à Poudlard en même temps que nous. »

Le nom disait vaguement quelque chose à Neville.

« Et ?

- Rien. Je ne suis pas invitée à leurs sessions torturons des adolescents, même si je me suis beaucoup entraînée l'année dernière. De toute façon, ça se passe chez les Goyle : le manoir Malefoy n'est plus aussi sûr qu'avant. »

Neville ne répondit rien en repensant aux tortures des Carrow. Il espéra qu'ils pourraient s'enfuir : il avait bien compris qu'on ne pouvait pas quitter les manoirs familiaux sans l'avis du propriétaire. Crivey et Bowl étaient voués à disparaître ou à revenir en piteux état. Comme les frères Crivey étaient encore à Poudlard, il y avait de fortes chances que Rogue voulût le récupérer. Enfin, Neville l'espérait… La fin d'année était proche, peut-être que Rogue se désintéresserait d'un Né-moldu.

Pourvu que non.

« Et Lavande ?

- Ah oui ! Ça, déjà, c'est plus rigolo. »

Parkinson fouilla dans son sac et en sortit un miroir de poche : l'instant auto-apitoiement était terminé. Elle se recoiffa et rectifia son maquillage en commentant :

« Brown et le mioche qu'elle garde ont disparu il y a deux jours. Drago est hors de lui : je crois qu'il s'est attaché à cette pimbêche.

- Tu sais où ils sont ?, demanda avidement Neville.

- Non, répondit Parkinson en vérifiant son eye-liner. Mais t'inquiète pas, s'ils étaient morts, je le saurais. Ils sont encore en vie, c'est sûr et certain. »

Neville s'assit sur une caisse retournée. Il observa Parkinson ranger son miroir. Il retrouvait chez elle cet humour cinglant et son efficacité avec bonheur. Le fait de savoir qu'elle ne l'avait pas trahi lui remontait grandement le moral, trop peut-être. Il s'était attaché à elle ?

Tout était vraiment trop confus, ce jour-là. Il chassa ces pensées en se concentrant sur plus urgent.

« Pourquoi aujourd'hui ?

- Quoi ?

- Si Lavande et Teddy ont disparu il y a deux jours, pourquoi est-ce que tu ne me préviens que maintenant ? »

Elle plissa les yeux :

« Ta grand-mère m'a demandé quelque chose.

- Elle va bien ? »

C'était un cri du cœur et Parkinson ne s'y trompa pas.

« Parfaitement bien. Les Rafleurs qui ont essayé de la faire parler pour savoir où tu étais ont tâté de ma baguette : elle est dorénavant sous ma protection.

- Quoi ? » éructa Neville.

Parkinson eut un mouvement de recul :

« Calme-toi, voyons. Quand tu as disparu dans la nature, il a bien fallu qu'elle se protège : mes amis n'en auraient fait qu'une bouchée. Alors elle m'a proposé de devenir son héritière pour racheter ta fuite. Ainsi elle passe sous ma suzeraineté et tes parents – qui vont bien aussi, ne t'inquiète pas – avec elle, ce qui est finement joué pour tout le monde. Comme elle n'avait plus personne pour l'héritage, je suis devenue héritière Londubat. Comme elle t'a renié, tu ne leur es plus relié et je n'ai pas à te protéger. Nous ne sommes pas de la même famille. Ça arrange tout le monde, cette histoire : ça me rachète aux yeux du Seigneur des Ténèbres parce qu'il a toujours, grâce à moi, le contrôle sur la famille Londubat ; ça me donne accès à un premier héritage, même misérable, ce qui augmente mon prix en tant que fille à marier ; ta famille est protégée. »

Ainsi, c'était à Parkinson qu'Augusta Londubat avait confié l'héritage qui revenait à Neville. C'était logique, finalement, et tellement du style de sa grand-mère, mais ça faisait mal : Neville ne s'était jamais senti digne de le recevoir. Mais le voir remis à autrui, c'était une autre histoire. Parkinson n'acquérait pas qu'un legs matériel, somme toute assez dérisoire face à la fortune qu'elle recherchait du côté de son père : non, elle obtenait un poids politique supplémentaire. Le Magenmagot ne pourrait pas composer sans elle, ni les autres familles sangs-purs.

Neville avait le cœur lourd. Tout ça, c'était de sa faute. S'il n'était pas parti en vitesse pendant la soirée de Parkinson, tout aurait été différent.

« Londubat…, l'appela Parkinson avec un claquement de doigts. Arrête de te prendre la tête. Ce qui est fait est fait : tu n'as pas de retourneur de temps. »

Ouais mais quand même. Ça faisait mal de voir son héritage lui filer entre les doigts, quand bien même ça assurait la protection de sa famille.

Mais il lui faudrait réfléchir plus tard.

« T'as raison. »

Il se reprit.

« Qu'est-ce que ma grand-mère me fait dire ?

- Les Weasley ont besoin de te voir. Un souci de tuyauterie dans leur douche : apparemment, tes plantes s'attaquent aux siphons. Tu dois y aller parce qu'ils ont envie de t'engueuler, et pas par beuglante interposée. Et tu es l'un des rares à pouvoir entrer chez eux. »

Parkinson retrouvait son ton de suzeraine, ce qui fit sourire Neville.

« Je suis toujours ton vassal ?

- Tu n'as jamais été autre chose qu'un allié, Londubat. »

Sa voix claqua mais Neville la connaissait suffisamment bien pour savoir qu'il y avait une question dans sa réponse. Il la rassura :

« Je serai de ton côté tant que nous aurons le même ennemi. »

Elle cligna des yeux. Neville était rasséréné de la savoir dans son camp. L'idée de sa trahison l'avait finalement beaucoup plus abattu que prévu. Il s'aperçut qu'il n'avait jamais cessé de compter sur Parkinson durant tout ce temps.

« Dépêche-toi de faire ton sale boulot, reprit son alliée d'un ton péremptoire. J'ai des choses à faire et j'aurai besoin de toi, maintenant que j'ai retrouvé comment te contacter.

- T'as fait comment ? »

Elle soupira théâtralement :

« Je connais le nombre, la forme, la provenance et le métal de tous mes bijoux sur le bout des doigts. Il me manquait l'alliance en argent de mon arrière-grand-père, deux lévriers noirs sur fond pourpre : le pourpre est signe de puissance, or je suis ta suzeraine, et tu m'obéis comme un chien de chasse, c'était pas compliqué d'en déduire que je t'avais donné ma bague. Et si je t'avais donné ma bague, c'est que je l'avais sûrement enchantée pour qu'elle m'obéisse à distance. Il a juste fallu que je retrouve le sort que j'avais utilisé et que je l'active. Un jeu d'enfant. »

Parkinson ne laissait rien au hasard. Jamais.

« Et demande aux Weasley, pendant que tu y es, où ils en sont de leur production de Polynectar. Ce sont les seuls qui ne dépendent pas d'une officine reconnue : ça pourrait changer le marché noir londonien du tout au tout s'ils sont capables d'en produire régulièrement à peu de frais. »

Eh bien ! Il s'en passait des choses en Angleterre.

Parkinson se leva et s'apprêta à quitter la pièce. Neville tenta de la retenir un court instant : il ne voulait pas la voir partir, c'était aussi simple que ça :

« Parkinson…

- Oui ? »

Son ton cassant, toujours, et qui pourtant parut tellement chaleureux à Neville.

« Je suis vraiment content de te revoir.

- Sois pas nigaud, Londubat. »

Elle aussi.

« Ta grand-mère te fait aussi dire qu'un essayage de chapeau est pour bientôt. Faudra que tu ailles la voir. »

Il acquiesça : il s'en doutait. La fin d'année scolaire approchait à grands pas : il savait qu'il allait falloir récupérer les indésirables du monde sorcier qui ne seraient soudain plus sous la coupe de Rogue et prévenir les Nés-moldus de onze ans de ne surtout pas venir à Poudlard.

Parkinson épousseta sa robe :

« C'est un vrai taudis, ici.

- C'est un endroit sûr, corrigea Neville.

- J'ai bon espoir d'en trouver un autre pour nos rencontres fortuites. Sois sage et ne te fais pas prendre. »

Elle quitta la pièce et remonta les escaliers qui menaient à la salle d'Abelforth. Neville sentit une allégresse angoissée l'envahir : il baignait de nouveau dans le jeu.