SYNOPSIS : L'USS Enterprise reprend sa mission d'exploration dans l'espace. Une année après la trahison de l'Amiral Marcus et de la vengeance de Khan, Jim Kirk a encore du mal à vivre avec ce qu'il s'est passé. Si ses proches essaient au mieux de l'aider, ils sont loin d'imaginer ce qui les attend dans l'immensité de l'espace, et que le passé n'est pas toujours si loin que l'on pourrait le croire. Jim devra faire face à ses plus grosses erreurs. Spock l'aidera-t-il à couvrir ses arrières à nouveau ? Jim gardera-t-il son statut de Capitaine ? Et surtout, Hermes sera-t-il sa perte, ou son salut ?
Disclaimer : L'univers original ne m'appartient pas. Se base sur les reboot de JJ Abrams.
Rated M : Spirk.
L'histoire est en cours d'écriture, je n'indiquerai donc pas de délai pour poster mes chapitres et je garderai une certaine avance dessus.
N'hésitez pas à me faire des retours sur ce que vous en pensez, je répondrais à vos reviews.
Sur ce, très bonne lecture à tous !
Prologue
Jim courrait à s'en exploser les poumons. Dans quelle galère ils venaient encore de se fourrer ?! Il courrait droit devant lui sans même voir où il posait les pieds. Le plafond de la grotte s'effondrait sur lui et il n'avait clairement pas le temps d'observer plus longtemps le paysage. Pour ce qu'il y avait à voir. Il bénissait le dépôt de mousse phosphorescente pour l'éclairer un minimum, lui évitant de foncer droit contre une paroi.
Il se précipita contre l'une d'entre elle quand un énorme rocher tomba juste sur sa position. Il lâcha spontanément son communicateur, qui tomba au sol au milieu de la pluie de roches.
_Merde !
Il sauta dessus pour le récupérer et reprit sa course, activant son communicateur.
_Kirk à Enterprise ! La navette a réussi à décoller ?
Jim buta sur une roche et s'étala sur le sol escarpé. Cette fois, il cramponnait fermement son communicateur à la main. Ce dernier s'activa à nouveau alors qu'il se relevait et se remettait à courir.
« Capitaine, ils ont réussi à repartir nous essayons de verrouiller votre position pour vous téléporter à bord, mais il y a trop d'interférences. »
Spock n'avait fait que confirmer ses craintes. Il arrivait à voir le bout de la grotte. Encore une centaine de mètres. Derrière lui, une deuxième explosion provoqua un tremblement plus important dans toute la grotte. L'horizon de lumière devant lui se boucha. Il hésita moins d'une seconde : remarquant une ouverture sous un rocher, il s'y engagea sans même réfléchir à une chance de sortie.
Il rampa sur plusieurs mètres, étouffant avec la poussière et l'espace réduit de son passage. Puis, enfin, il vit la lumière. Le passage était trop étroit. Il devait forcer pour sortir. Il s'appuya sur la roche et tira pour s'extraire, criant sous l'effort et la douleur. Il étouffait presque de panique à la peur de rester coincé.
« Capitaine, la densité de l'environnement semble empêcher un verrouillage optimal de votre signal, il faudrait vous éloigner du site du crash. »
Jim cria sous l'effort.
_Sans déconner !lâcha-t-il, conscient que personne ne l'entendrait.
Il tira, pour faire passer son bassin et enfin, les jambes suivirent, dans un véritable cri de soulagement. Sans plus attendre, il se releva et s'éloigna de la zone, fonçant vers le tracé dégagé par le crash du vaisseau cardassien.
_Remontez-moi !
Son ordre sonnait plus comme un cri de désespoir. Jim continuait de courir droit devant lui alors que le sol s'effondrait au fur et à mesure.
_Vite !
Le pied gauche de Jim s'enfonça dans le vide. Il tombait. Juste à l'instant où les étincelles de la téléportation l'entourèrent.
Jim s'étala sur la plaque de réception des téléporteurs la tête en avant, son nez faisant office d'amortisseur dans un « crac » significatif. Son cri de douleur le fut également.
_Jim ! Dis donc, t'as le chic pour atterrir avec grâce à chaque fois !
Le Capitaine de l'Enterprise lança un regard noir vers son médecin en chef alors qu'il se rasseyait, se tenant le nez alors que le sang en coulait abondamment. Bones pointa son tricordeur sur lui et Jim orienta immédiatement son regard vers Spock, qui venait tout juste d'arriver.
_Flemmings et son équipe sont remontés à bord ? Aïe !
Bones venait de lui planter un hypospray dans le bras. Spock répondit immédiatement.
_Ils sont tous sains et saufs à bord et n'ont aucune blessure à notifier. Contrairement à vous.
Jim n'était clairement pas d'humeur à recevoir ce genre de « faits » de la part de son second. Bones lui passa une lumière devant les yeux qui l'aveugla et fit monter un peu plus sa colère.
_Je vais bien ça va ! Je viens seulement de me péter le nez !
Bones retira la lumière mais fit une grimace.
_Non, ça ne va pas ! Tu es salement amoché et il faut que je regarde de plus près tes plaies !
Jim n'eut pas le temps de protester. Il fut saisi par le bras et trainé dans les couloirs par Bones, qui les dirigeait vers l'infirmerie, observant ses côtes et ses hanches. Maintenant que l'adrénaline redescendait, Jim sentit effectivement des picotements douloureux par endroits.
Le docteur le força à s'assoir et, armé d'un autre hypospray, injecta un de ces produits dont Kirk ignorait totalement les propriétés. Bones souleva les ruines de son uniforme jaune, faisant grimacer Jim. Là, il commençait bien à ressentir la douleur, et sa tête lui tournait. Christine passa en coup de vent, lui donnant deux mèches aux propriétés coagulantes qu'il se flanqua dans chaque narine.
_Je suppose que la mission est un échec.
Jim ne cacha pas son agacement quand il se tourna vers Spock.
_Brillante observation Monsieur Spock. C'était dans vos statistiques, je vous l'accorde. Et maintenant, je vais devoir informer l'Amiral Aaya Na'er que nous n'avons pas pu récupérer cette foutue boîte noire ou télécharger son contenu !
Jim ferma un instant les yeux, conscient qu'il s'énervait pour rien.
_Mes excuses, Capitaine. Je ne voulais aucunement vous blesser.
Le blond tourna la tête vers Spock, se radoucissant.
_Je suis celui qui est désolé, Spock. Je n'aurais pas dû vous répondre comme ça.
Jim avait bien conscience que Spock était présent à l'infirmerie non pas pour s'inquiéter de la mission, mais pour voir comment il allait.
Il retint un soupir. Depuis qu'ils avaient repris leur expédition après la trahison de l'Amiral Marcus, soit depuis un an, Spock avait changé de comportement vis-à-vis de lui. Il se faisait plus présent, bien qu'il reste toujours ce même glaçon coincé. Parfois, Jim n'arrivait pas à déterminer si c'était un signe d'amitié ou bien seulement un commandant en second qui redoutait les folies de son capitaine.
Jim grimaça alors que Bones lui appliquait un pansement régénérant sur les côtes.
_Je ne sais pas comment tu t'es fait ça, mais ça t'as tranché assez profondément.
Jim haussa les épaules.
_En rampant pour sortir, probablement. Leur roche était assez coupante.
Spock hocha la tête.
_Elle semblait de nature volcanique.
Jim hocha la tête également, en accord avec Spock.
_Ok, j'ai terminé. Jim, repasse demain pour un bilan complet et là, repose-toi ! Tes données indiquent que tu commences sérieusement à être en état d'épuisement !
Jim se redressa et retira les mèches dans son nez.
_Tu me l'as déjà dit Bones, je te dis que ça allait passer d'ici quelques jours !
Il jeta les mèches et se dirigea vers la sortie. Bones cria derrière lui :
_Tu m'as déjà dit ça la semaine dernière, et celle d'avant !
Les portes se fermèrent juste après. Jim était déjà dans le couloir, s'engageant vers le turbolift, Spock le suivant comme son ombre. Ce dernier essayait de l'interpeller mais Jim l'ignorait, sachant pertinemment ce que Spock allait dire. Que Bones avait raison, qu'il devait l'écouter, que ça risquait de mal se passer, etc. Les discours de moralité à la vulcaine, il les connaissait par cœur. Il entra dans le turbolift.
_Capitaine, le Docteur McCoy a raison. Vous devriez envisager de prendre un temps de congés-
Jim le coupa en levant la main.
_Ma santé, c'est mes affaires, Commander. Je gère. Fin de la discussion.
Il serra les dents et fixa les portes du turbolift, attendant impatiemment qu'elles s'ouvrent. Spock n'ajouta pas un mot de plus. Tant mieux. Jim n'était pas d'humeur.
_Capitaine sur la passerelle.
Kirk prit place sur son fauteuil de commandement et dirigea son regard vers son premier pilote :
_Mettez les gaz, Monsieur Sulu ! On s'en va d'ici ! Reprenez le cap sur notre destination première.
L'asiatique hocha la tête et déclencha la manœuvre.
_A vos ordres, Capitaine.
Kirk attendit qu'ils passent en distorsion pour se tourner vers Spock :
_Je vous laisse prendre la suite du quart. Je vais contacter l'Amiral depuis mes quartiers.
Spock hocha la tête et ils échangèrent leurs places.
Quand les portes du turbolift se fermèrent et qu'il fut seul, Jim lâcha un profond soupir. Quelle situation de merde. Il se passa une main dans les cheveux, sentant la fatigue retomber sur ses épaules crispées. Il sortit du turbolift, marchant dans les couloirs d'un blanc immaculé de l'Enterprise plus par automatisme qu'autre chose.
Il composa son code d'identification et entra dans ses quartiers. Il se servit un verre d'eau qu'il engloutit d'une traite et se dirigea vers sa salle de bains. Son uniforme était foutu, déchiré et tâché de sang un peu partout, noirci par la poussière et les cendres. Encore un uniforme en moins, pour changer.
Il se déshabilla entièrement et alluma sa douche. Les pansements de Bones tiendraient sans problème. Il posa son front contre la paroi, fermant les yeux pour essayer de détendre ses muscles sous l'eau chaude. Il fallait qu'il se fasse tout un résumé de la situation pour savoir ce qu'il avait exactement à dire.
Alors qu'ils avaient mis le cap vers une nébuleuse encore peu connue à la limite de l'espace de la Fédération, Kirk avait reçu un ordre venant de l'Amiral Aaya Na'er pour lui demander d'effectuer une mission d'urgence. L'Enterprise étant le seul vaisseau de la Fédération dans les parages, Jim n'avait pas eu d'autre choix que d'obéir et de mettre de côté sa mission d'exploration.
De ce que l'Amiral lui avait communiqué, un vaisseau de classe Galor de l'Union cardassienne s'était crashé sur un planétoïde non loin de leur parcours. Il était alors devenu vital pour la Fédération d'aller sur place récupérer un maximum de données que le vaisseau contenait, notamment de récupérer leur boîte noire. Un tel vaisseau représentait une véritable mine d'or d'informations.
L'idée était alors d'arriver sur les lieux du crash, de récupérer la boîte noire et de repartir sans être repéré. C'était simple. Un aller-retour. Ce qu'ils n'avaient pas prévu, s'étaient les données topographiques du planétoïde qui étaient catastrophiques. S'y rendre sur place était beaucoup trop dangereux et Spock s'y était fermement opposé, Scotty également et Jim n'avait pas eu d'autre choix de la part de sa hiérarchie que d'essayer.
Alors avec une équipe de la sécurité, il s'y était rendu. Le vaisseau cardassien, bien que très endommagé, avait eu une coque bien plus résistante que le sol et s'était enfoncé sous la roche de plusieurs centaines de mètres. Jim avait posé leur navette en extérieur et ils s'y étaient rendus, tentant de rejoindre le vaisseau à travers les galeries creusées naturellement dans la roche. Ils avaient à peine mis le pied à bord du vaisseau quand tout avait commencé à trembler.
Le simple fait d'y repenser fit frissonner Jim. Les quelques cardassiens qui avaient miraculeusement survécu au crash avaient piégé leur vaisseau. La réaction en chaîne avait été violente. Jim avait tenté de stopper la mise en fonction du réacteur via les panneaux de commande alors qu'il avait ordonné à son équipe de partir devant et fuir. Il avait échoué. Il ne lisait pas très bien le cardassien et ses connaissances en informatique et en pilotage ne lui avaient été d'aucune aide.
Alors il était parti en courant à son tour. Résultat des courses : il avait failli y laisser sa peau, celle de son équipe et le vaisseau était parti en morceaux, enseveli sous des tonnes de pierre. Le plan était foireux dès le départ, mais la hiérarchie n'allait peut-être pas avoir cette même opinion.
Jim coupa l'eau et sorti de sa douche. Il était épuisé. Moralement, psychologiquement, physiquement. Surtout physiquement. Il avait du mal à tenir un tel rythme et cette petite escapade extérieure l'avait poussé à bout. Il laissa son regard se perdre sur son reflet. L'image qu'il voyait n'était pas plaisante. Son teint était plus pâle qu'à l'accoutumée, ses traits étaient tirés et de grosses cernes ornaient le dessous de ses yeux. Sans parler de son nez cassé, qui était encore coloré malgré les soins régénérateurs de Bones.
Il s'habilla avec lassitude et se prépara à passer cet appel qui allait, assurément, lui déplaire. Son interlocutrice répondit au bout de quelques secondes.
« Capitaine Kirk. Comment s'est déroulée la mission ? »
Jim croisa les bras devant le visage projeté de la trill alpha.
_Amiral, la mission s'est avérée être un échec. Comme nous vous l'avions indiqué, les données topographiques indiquaient une instabilité du sol et une roche friable, rendant toute expédition terrestre dangereuse. Ajoutez à cela le fait que le vaisseau était piégé et vous obtenez un vaisseau cardassien en morceaux et une équipe ayant échappé de peu à la mort.
L'Amiral tenta de cacher sa frustration. Jim la lisait parfaitement sur son visage.
« Vous nous avez fait perdre une occasion inestimable de pouvoir récupérer des informations sur l'Empire cardassien ! J'espère que vous n'avez pas laissé de traces de votre passage. Vous me décevez, Capitaine Kirk. Vous ne méritez pas les éloges que Christopher avaient faits à votre sujet.»
Jim reçut la pique en plein cœur, mais il ne se laissa pas démonter face à elle. Hors de question.
_Sauf votre respect, Amiral Na'er, je ne suis pas un faiseur de miracles. J'ai suivi vos ordres, malgré le fait que vous mettiez la vie de mes hommes en danger. Vous n'avez pas tenu compte des risques, maintenant en voici les conséquences.
La brune lui lança un regard noir.
« Votre insolence n'a d'égal que votre incompétence. »
Jim serra les dents avant d'ouvrir la bouche pour répondre une réplique cinglante quand l'intercom de ses quartiers sonna. Jim tourna un instant la tête vers la porte avant de reporter son attention sur l'Amiral.
_Je vais devoir mettre fin à notre charmante discussion, Amiral. Je vous enverrai un rapport détaillé de la mission.
« Je ne manquerai pas de faire part de votre échec au Haut Commandement de Starfleet. »
Jim lui adressa son plus beau sourire impudent.
_Parfait, je comptais justement leur envoyer le rapport de mission également. Bonne soirée, Amiral.
La communication se coupa sans même qu'il ne fasse le moindre geste. Jim laissa échapper sa colère en balayant sa table d'un geste du bras.
_Quelle connasse !
Le plateau d'échec vola. Il se pinça l'arrête du front alors qu'à la porte, la sonnerie retentit à nouveau. Il essaya de calmer sa respiration avant de se rendre à la porte et d'ouvrir.
_Capitaine.
Jim lui adressa un grand sourire, spontanément content de voir un visage qu'il appréciait.
_Spock ! Votre sens du timing vient de me sauver la mise, vous n'avez pas idée ! Il y a un problème ?
Spock pencha légèrement la tête sur le côté. Jim devina son interrogation avant même que les mots du vulcain ne sortent de sa bouche :
_Je venais prendre de vos nouvelles. Votre entretien avec l'Amiral s'est mal passé ?
Jim haussa les épaules.
_Disons que j'ai entendu pire. Cette femme oublie que le respect va dans les deux sens, même si mon grade est inférieur au sien.
Le tressautement d'un des sourcils de Spock lui indiqua son léger amusement.
_De votre part, je trouve cela assez… ironique.
Jim ne put s'empêcher de sourire.
_C'est vrai, je vous l'accorde.
Spock reprit :
_Souhaitez-vous que nous reprenions ce soir la partie d'échecs que nous avions commencé il y a trois jours ?
Jim ferma les yeux, se passant une main sur la nuque. Cette partie qu'ils avaient commencée juste avant cette mission inopinée sur le planétoïde. Cette partie qu'il venait d'envoyer valser moins de cinq minutes avant.
_Euh… j'ai malencontreusement renversé le plateau. On en refait une autre ce soir ?
Spock hocha la tête.
_Avec plaisir.
Jim lui adressa un sourire et Spock se tourna pour repartir lorsqu'il s'arrêta.
_« Malcontreusement », Capitaine ?
Jim eut un délai de réaction avant de répondre.
_Oui, enfin, vous voyez ce que je veux dire ! A tout à l'heure.
Il referma la porte avant même que Spock n'ait pu ajouter quelque chose. Pour éviter que Jim n'expose plus encore ses écarts de comportement. Il n'avait pas besoin d'être encore sermonné. Pas aujourd'hui.
Il jeta un regard vers l'échiquier et toutes les pièces renversées. Il se força à tout ramasser et reposa les pièces sur la table en vitesse, pressé d'en finir. Il avait encore pas mal de travail et il ne voulait pas que ça empiète sur toute sa soirée. Pas ce soir.
Il s'installa pour rédiger en priorité son rapport de mission, ne manquant pas de mentionner chaque détail pouvant refléter l'incompétence de l'Amiral Na'er, se réfrénant sur le vocabulaire pour ne pas être trop agressif. Il compila le reste des rapports de son équipe de la sécurité ainsi que les données du terrain et envoya le tout aux destinataires concernés par l'affaire. Jim y passa un bon moment, et fit une croix sur son dîner pour rattraper son retard sur d'autres rapports qui s'étaient accumulés. Pour ça, il avait dû décliner l'offre d'Uhura d'aller manger avec toute la fine équipe. Un autre soir.
Il en oublia presque que Spock devait arriver. Quand l'intercom de ses quartiers sonna à nouveau, Jim décida qu'il était temps de s'arrêter. Il alla ouvrir à Spock, qui s'installa naturellement à sa place habituelle lorsqu'ils jouaient.
_Je suppose que vous ne m'accompagnez pas ?
Jim montra à Spock la bouteille de whisky qu'il avait dans les mains. Spock secoua négativement la tête.
_De l'eau suffira, Capitaine. Merci.
Jim avait anticipé et il apporta les deux verres sur la table alors que Spock disposait les pièces sur les plateaux. Jim trouva une pomme juste devant sa place.
_Je vous ai ramené ceci. Ne pas vous nourrir ralentirait votre temps de récupération.
Le Capitaine lui adressa un sourire reconnaissant. Il trouvait toujours ce genre de geste touchant de la part du vulcain.
Ils entamèrent alors leur partie d'échecs, dans le silence, comme à leur habitude. Jim mangeait en même temps sa pomme sous le regard attentif de son commander. Depuis le début du voyage, ils se voyaient régulièrement le soir dans les quartiers de l'un ou de l'autre pour passer des soirées comme celles-ci. Quelques fois, ils jouaient dans la salle de repos des officiers mais ils servaient lus de spectacle aux passants et cela pouvait parfois les ennuyer.
Alors, le temps qu'ils passaient en privé dans leurs quartiers, c'était un privilège qu'ils s'accordaient mutuellement. Parfois, à la place des jeux d'échecs, Jim venait écouter Spock jouer du luth vulcain, d'autres fois ils discutaient littérature terrienne. Jim adorait ces moments de détente qu'il passait avec Spock et ça comptait beaucoup pour lui. C'était des moments où Spock ne le sermonnait pas ou ne lui rappelait pas constamment les règles de Starfleet. Surtout que bon, ces règles, à quelques exceptions près, il les connaissait bien. Il les ignorait juste.
Jim reporta son attention sur la partie et déplaça un de ses cavaliers, puis il scruta Spock. Quand ils étaient l'un en face de l'autre, il pouvait prendre le temps d'analyser chaque micro-expression de son second, déterminer à quoi chaque haussement de sourcil était dû, ce qu'un changement de regard pouvait signifier ou une inclinaison de la tête. Avec le temps, il avait appris à lire un peu en Spock, qui se relâchait parfois en sa présence. Cet état de fait rendait Jim content, compte tenu de l'importance que Spock accordait à la logique et à la raison face à ses émotions humaines.
Il en était profondément admiratif. Spock devait garder un contrôle constant sur ses émotions et ses intuitions humaines. Un contrôle qui pouvait s'avérer être dangereux s'il était un jour rompu. C'était ce genre de contrôle qui lui manquait parfois, et qui avait manqué dans ses débuts de capitaine. Il avait amèrement retenu la leçon et malgré ça, il n'arrivait pas à faire de progrès de ce côté-là. Il agissait impulsivement et en suivant son instinct.
Il repensa à l'évolution de sa relation avec Spock. Même si cette relation était mal partie et qu'ils étaient totalement opposés, ils formaient un duo efficace. Peut-être qu'un jour, si Jim arrivait à être meilleur et à agir de manière plus réfléchie, Spock et lui formeraient un duo encore plus efficace. Peut-être qu'un jour, cette image de capitaine immature et impulsive cesserait de le suivre, et qu'il serait plus respecté par ses pairs. Chose difficile avec le parcours qu'il avait eu jusqu'ici. Quelque part, son équipage avait été le seul à changer d'opinion sur lui.
Jim but une partie de son verre, réalisant une chose qu'il n'avait jamais faite jusqu'ici. Il en avait toujours eu honte et, ce soir, il avait besoin de l'extérioriser.
_Je ne me suis jamais excusé envers vous, Spock. Pour ce que j'ai pu vous dire, il y a quelques années, après… après Vulcain.
Il but une autre partie de son verre. Spock eut un léger tic de surprise avant de répondre.
_Nul besoin de vous en excuser, Capitaine. J'ai réalisé plus tard que le but de votre manœuvre était de me fragiliser émotionnellement pour récupérer un commandement qui, en tout état de cause, vous revenait de droit. Je ne vous en ai jamais tenu rigueur.
Jim hocha la tête.
_Je sais mais… je ne vous l'ai jamais dit.
Spock porta toute son attention sur lui et Jim essaya d'échapper à son regard en se concentrant sur le plateau.
_Vous n'aviez pas besoin. Pourquoi maintenant, Jim ?
Il haussa les épaules. Peut-être que c'était pour se retirer un peu de poids sur la conscience. Pour se sentir un peu mieux. Parce qu'il y pensait, et qu'il avait fallu que ça sorte. Jim joua un pion sans répondre. Spock enchaina immédiatement avec le déplacement de sa tour. Jim saisit son verre pour le terminer.
_Votre changement de comportement a t-il un rapport aux évènements de l'année dernière concernant Khan Noonien Singh ?
Jim faillit recracher son whisky tant il était surpris par la question. Il reposa son verre, observant Spock. Son cœur avait loupé un battement et quelque part, il sentit sa panique monter. Il avala difficilement son whisky, essayant de garder contenance alors qu'il prenait son cavalier pour le jouer. Il décocha un sourire par réflexe avant de répondre :
_Quel changement ?
Il savait que jouer l'autruche ne marcherait pas face à Spock, mais il avait tenté le coup sous la panique. Il déglutit, sachant qu'il était totalement grillé. En face, le vulcain répondit de manière très analytique.
_Ces dernières semaines, votre comportement a changé. Vous réduisez vos rapports sociaux, vous êtes plus introverti : moins de rires, de sourires, d'échanges tactiles. Vous vous excusez plus auprès des autres, vous êtes plus soucieux, vous dormez moins. Votre isolement est un trait significatif à la tristesse et vous n'adoptez ce repli sur vous-mêmes qu'à l'approche de votre anniversaire, date rappelant également la mort de votre père. Le Capitaine Pike étant décédé il y a exactement un an en date stellaire, j'en ai conclu que ces évènements étaient la raison de votre attitude. Je peux illustrer tous mes propos par des chiffres si vous le souhaitez.
Spock déplaça sa pièce juste après le coup de Jim. Son fou prit le cavalier du blond. Jim serra la mâchoire sans répondre.
Son anniversaire n'avait jamais été un évènement joyeux, parce que son père était mort ce jour-là. Et son absence n'en avait été que plus présente au fil des années. Pike avait été là pour lui servir de seconde figure paternelle et avait comblé ce vide que Jim avait toujours ressenti. Puis il était mort, et… et dans sa quête de vengeance, une partie de son équipage avait été balayée également.
Il posa son fou sur le second plateau. Il avait perdu tout sourire sur son visage. De toute façon, ses sourires de façade n'avaient jamais trompé Spock. Et, il n'avait pas la force de faire semblant devant lui.
_Ce n'est pas un jugement, Jim.
Le blond eut un léger rictus.
_Je sais, Spock. Mais… à cause de mon impulsivité, des dizaines de personnes sont mortes.
Il ferma les yeux, les échos de leurs cris résonnant dans sa tête. Jim en rêvait beaucoup dernièrement et se rappelait de choses comme si ça s'était passé la veille.
_Et vous avez sauvé des dizaines d'autres vies, dont la mienne. N'oubliez pas Capitaine, que vos actes ont sauvé de nombreuses vies.
Jim termina son verre et joua.
_Je n'oublie pas également que ce sont mes actes qui nous ont mis dans cette situation plus que périlleuse.
_Vous avez fait ce qui était juste. Sans quoi, le Haut Commandement de Starfleet ne vous aurait pas confié l'Enterprise après sa reconstruction et vous n'auriez pas conservé votre grade.
Le vulcain joua son tour. Jim se servit un autre verre mais n'ajouta rien de plus. Il n'avait pas envie de s'étaler sur le sujet et Spock semblait l'avoir compris. Jim ne pouvait pas en parler plus que ça. C'était encore trop récent. Trop douloureux. Trop présent.
Il but un peu et joua son tour. Il se laissait distraire par ses pensées et reporta son attention sur les plateaux pour resserrer sa stratégie. Spock avait bien joué et avait entremêlé plusieurs pièges, lui assurant de multiples victoires selon les coups que Jim jouerait. Il devait être prudent et les envisager pour tout contrer. Le mouvement de Spock allait lui indiquer ce qu'il allait devoir faire. Le mouvement le plus optimal était de bouger la reine sur le plateau intermédiaire. Spock bougea son fou.
Jim essaya de rester de marbre face à ce mouvement. Il avait beau tourner la chose dans sa tête, la reine aurait été le choix le plus judicieux. Au mieux, Spock aurait gagné en quatre coups. Au pire, il aurait gagné en sept. Bouger le fou… ça l'éloignait de la victoire. C'était quoi, cette manœuvre de la part de Spock ?!
Il bougea sa propre reine. Spock se montrait plus indulgent avec lui, pour quoi, préserver son égo ? Il n'avait jamais fait ça avant. Comment est-ce qu'il devait considérer la manœuvre de Spock ? Ce dernier bougea sa reine au centre du plateau. Un coup de retard. Spock était peut-être distrait. Jim se faisait des nœuds à la tête pour rien. Il soupira, faisant basculer son roi.
_Désolé, je reconnais ma défaite. Je suis trop fatigué pour continuer ce soir.
Il ne mentait pas. Il sentait sa fatigue et l'envie de continuer à jouer n'y était plus. Spock le scruta quelques secondes avant d'hocher la tête.
_Dans ce cas, je vais vous laisser. Bonne nuit, Jim.
Le blond le raccompagna jusqu'à la porte.
_Bonne nuit Spock.
Il regarda le vulcain partir dans le couloir avant de rentrer en soupirant. Il espérait que ses pensées noires allaient vite s'en aller. Il était loin de se douter que ce serait sa dernière soirée sereine avant un long moment.
