Chapitre six :

Bonjour ou bonsoir à tous, cela dépend (évidement) de l'heure où vous lisez ceci !

J'espère que vous allez bien, que la fin d'année scolaire a été sympa avec vous et que vous passez de bonnes vacances :) !

Je reviens aujourd'hui avec le sixième chapitre de cette petite fanfiction. Je suis plutôt mitigée mais j'espère qu'il vous plaira tout de même ! c'est un chapitre exclusivement centré sur le passé d'Ambre et de Matthew mais ne vous en faites pas : le présent (1986) reviendra en force dans le prochain chapitre ! :) (et avec lui, quelques petites scènes Hermy/Flambi plutôt intéressantes ;))

Je m'excuse des quelques fautes d'orthographe qui pourraient s'être glissées à l'intérieur de ce petit chapitre et je m'excuse également de l'attente due à quelques petits soucis de santé.

N'hésitez pas à donner votre avis, qu'il soit positif ou négatif !

Je vous souhaite une bonne lecture tout en vous remerciant grandement d'être présents ! Je vous adooooore et vous fais plein de bisous !

Bonne soirée/journée/aprem à vous,

SP17.

Yona : Je n'abandonne évidemment pas la fiction et je te prie de m'excuser pour les attentes qui peuvent être longues :/. il n'est parfois pas facile de gérer les études, l'écriture et la vie en elle-même en même temps et j'essaie tant bien que mal de poster dès que je peux ^^.

Je suis contente que la fiction te plaise autant et j'espère que ce chapitre ne te décevra pas :)

Date précise inconnue,

Année 1981 (NDLA : Matt' et Amby sont donc âgés de treize ans),

Etat du Texas,

Aux alentours de dix-huit heures.

Les pneus de la Ford Escort blanche dérapèrent sur le goudron à la sortie du virage et la voiture s'arrêta au milieu de la rue, surprenant l'automobiliste qui la suivait de près. D'un geste aussi rageur que précipité, Cole Jones éteignit le moteur et sortit en trombe de l'habitacle, totalement imperméable aux cris et protestations des autre conducteurs dont il bloquait le passage : ces petits morveux lui avaient désobéi et il se devait de les remettre le plus rapidement possible sur le droit chemin.

On ne s'opposait pas aussi facilement aux règles qu'imposait un père. C'était irrespectueux et dangereux. Si ces règles existaient, c'était qu'elles étaient nécessaires. Sortir en centre-ville après dix-sept heures avec ses camarades de classe et sans aucun adulte à ses côtés ? Du pur suicide. Ambre et Matthew avaient-ils conscience du nombre d'enfants et d'adolescents qui disparaissaient chaque jour ? Du nombre de détraqués qui déambulaient en totale liberté sous le nez du gouvernement américain ? Et sa fille qui s'obstinait à mettre des robes et à traîner avec des garçons … Ce n'était pas parce que son frère jumeau passait son temps en compagnie d'adolescents boutonneux et imberbes qu'elle devait faire de même. Avait-elle conscience que les jeunes d'aujourd'hui étaient de plus en plus précoces, surtout la gente masculine ? Savait-elle que les garçons de son âge ne pensaient qu'à assouvir leurs pulsions sexuelles ? Certainement pas, puisqu'elle continuait d'en fréquenter. Cole l'avait pourtant mise en garde plusieurs fois. Mais il semblait que sa fille ait décidé de n'en faire qu'à sa tête et cela l'énervait au plus haut point. Il n'était pas question qu'Ambre finisse avec la même réputation que sa mère. Il n'était pas question qu'elle devienne une traînée et Cole était prêt à prendre les décisions les plus drastiques qui soient pour empêcher cela. Il était même prêt à séparer les jumeaux pour plus de sécurité : un garçon et une fille, cela pouvait dégénérer à tout moment.

« Papa ? Mais qu'est-ce que tu fais là ? »

Toujours aussi furibond, les poings et la mâchoire serrés, le visage rouge sang, le père de famille se tenait désormais à quelques pas du banc sur lequel ses enfants et leurs amis s'étaient installés.

Pâles comme deux morts et légèrement tremblants, Ambre et Matthew avaient bien du mal à fixer Cole du regard, préférant observer avec une attention surprenante les lacets de leurs chaussures ou les brins d'herbe à leurs pieds. Ils étaient mal barrés, ils le savaient : leur père détestait qu'une quelconque personne lui désobéisse. Et cela, ils l'avaient rudement appris dès leur plus jeune âge.

« Qu'est-ce que je fais là ? Tu OSES me demander ce que je fais ici ?!, s'écria Cole Jones à l'adresse de Matthew, d'une voix tellement forte que le groupe d'amis sursauta et que plusieurs passants se retournèrent dans leur direction, à fois surpris et légèrement effrayés (Que Diable était-ce encore que cet hurluberlu ?). Tu oses me demander un truc pareil ? Mais mon pauvre, n'as-tu pas de cervelle ? Qu'est-ce que je vous ai dit lorsque vous m'avez demandé si vous pouviez sortir, hein ? Qu'est-ce que je n'ai pas arrêté de vous répéter à chaque fois que vous me preniez la tête avec ces conneries ?! QU'EST-CE QUE JE VOUS AI DIT ?! EST-CE QUE L'UN DE VOUS PEUT ME LE RÉPÉTER ?! »

Il y eut un instant de silence, durant lequel Ambre et Matthew déglutirent difficilement, la boule au ventre et le coeur battant la chamade. Aucun des deux ne souhaitaient et n'osaient répondre, sachant pertinemment que cela n'améliorerait en rien la situation : lorsque Cole Jones était en colère, mieux valait faire profil bas et attendre que cela passe. Mieux valait attendre que l'homme trouve quelques cannettes de bière et un mur de brique pour faire passer sa crise. Si on intervenait d'une quelque façon, cela pouvait facilement se retourner contre nous.

« Alors ? J'attends ! », s'exclama Cole Jones d'un ton impérieux, fusillant ses deux enfants du regard, les poings sur les hanches.

Dans le même temps, les quatre amis d'Ambre et de Matthew détalèrent, effrayés par cet homme étrange qu'ils n'avaient jamais apprécié, et ce, sans même un regard de compassion pour leurs deux amis qui gardèrent une nouvelle fois le silence, préférant garder la tête basse.

« Aaargh ! »

Les traits déformés par la rage, Cole souffla bruyamment et se précipita vers ses enfants. Ceux-ci, craignant le pire, se recroquevillèrent légèrement sur eux-mêmes, anticipant les éventuels coups qu'il pourrait y avoir. Mais Cole se contenta de maugréer entre ses dents tout en saisissant brutalement le bras d'Ambre pour ensuite tirer la jeune fille vers la voiture, un Matthew effrayé sur les talons. Il était hors de question que l'homme laisse ses deux enfants traîner la nuit. Comme il était hors de question qu'il les punisse devant un quelconque témoin.

« Papa, arrête, tu me fais mal ! », murmura Ambre, d'une voix étrangement basse et hésitante, les traits contractés par la douleur.

Mais Cole Jones ne sembla pas entendre et la jeune fille ne fit rien pour essayer de se dégager et ne répéta pas sa plainte : avec le temps, elle avait appris à avoir peur de son père et se plaindre de la douleur qu'il lui affligeait ne changerait sûrement rien à la situation, bien au contraire ; Ambre avait déjà conscience que la punition serait rude. Il n'était donc pas nécessaire d'en rajouter.

« Eh, Cole ! Qu'est-ce que tu fabriques ? Y'a un parking à trente mètres ! »

Michael Connors venait de faire irruption devant Cole Jones, l'air passablement contrarié : shérif depuis plus d'une dizaine d'années, l'homme grassouillet à la moustache hirsute était autant accro à l'ordre qu'à la nicotine et aux barres chocolatées : le moindre désordre, le moindre automobiliste mal garé ou le moindre chewing-gum échoué malencontreusement sur les pavés, et son visage de bulldog hargneux devenait rouge sang. Le shérif faisait tout pour maintenir sa ville propre et en ordre, c'était sa plus grande responsabilité, son but ultime, sa plus grande fierté. Il ne laissait jamais personne se mettre en travers de la beauté de Agua Dulce, faisant payer le prix fort à chaque contrevenant et n'hésitant pas à lui pourrir sa réputation. Rien ni personne ne ferait fuir les touristes et leur argent de la ville, telle était sa devise.

« Hé, tu pourrais me répondre quand j'te cause ! », s'écria à nouveau Connors, voyant que son interlocuteur ne lui répondait pas.

Mais une fois encore, Cole Jones ne daigna pas lui accorder son attention. Le père de famille, plongé dans ses pensées, était désormais arrivé à sa voiture. Maugréant toujours des paroles incompréhensibles entre ses dents, les traits toujours aussi contractés, Cole ouvrit la portière arrière et poussa Ambre et Matthew sur la banquette, la main sur leur tête comme s'il s'était s'agit de deux délinquants. Puis, toujours aussi impassible face aux automobilistes qui lui criaient leur mécontentement face à sa voiture stationnée en plein milieu de la chaussée, Cole Jones se tourna finalement vers le shérif, sa colère laissant place à de la lassitude.

« Je m'en vais, Connors., dit-il d'un ton légèrement agacé. Dans quelques minutes, ta ville chérie aura retrouvé sa splendeur habituelle et tout le monde sera content. »

« Je m'en fiche que tu partes, Cole. J'ai une ville à faire marcher droit, moi, m'sieur. Et toute personne qui s'y oppose doit en accepter les conséquences. »

Cole Jones esquissa un sourire moqueur, nullement effrayé par le ton ferme et légèrement menaçant employé par Connors : bien que ce dernier soit devenu shérif – et Cole se demandait encore comment il y était arrivé – il n'inspirait pas le moindre respect ni la moindre once de peur chez Cole. À vrai dire, le père de famille continuait de voir Michael Connors comme il l'avait vu tout au long de sa scolarité : comme un gros adolescent hyper maladroit, au visage englouti par l'acné et à l'incapacité à se faire respecter par l'ensemble de ses camarades. Jeune, Michael Connors avait toujours été le souffre-douleur et le bouc-émissaire de chaque établissement scolaire où il avait mis les pieds. Et il était inconcevable pour Cole Jones de se laisser intimider par ce loser-né.

Avec un soupir, mais sans se départir pour autant de son sourire, Cole s'approcha de Connors, le surplombant ainsi de toute sa hauteur. Il mesurait bien une tête de plus que le shérif et c'était sans doute, ajouté avec l'air menaçant qu'il maîtrisait si bien, son plus grand atout pour effrayer son adversaire.

« Tu crois réellement que tu m'effraies, Connors ? », murmura Cole à voix basse, son corps situé à moins de cinq centimètres de celui de son interlocuteur.

Pour toute réponse, Michael Connors laissa échapper un couinement. Toute trace d'assurance avait désormais disparu de son visage et le shérif avait baissé la tête, incapable de soutenir le regard meurtrier que Jones lui adressait. Cole avait été l'un des élèves les plus brutaux lors des années lycée et Connors, bien qu'il essayait tant bien que mal de montrer de le contraire, ressentait toujours de la peur à son égard : à chaque fois qu'il l'approchait d'un peu trop près, de mauvais souvenirs affluaient par centaines et lui broyaient la faible confiance en lui qu'il avait réussi à se construire. Ajoutez à cela les nombreuses rumeurs qui dépeignaient Cole Jones comme un homme violent et alcoolique, et Michael Connors avait toutes les bonnes raisons de ne pas trop s'y frotter.

Cependant, conscient des nombreux regards qui étaient posés sur eux, et ne souhaitant pas mettre à mal sa réputation de shérif indomptable déjà bien entachée, Michael Connors ne prit pas tout de suite ses jambes à son cou comme son instinct ne cessait de lui dicter depuis le début de l'altercation. Non. Au lieu de cela, il bégaya de manière hésitante et sortit une feuille et un stylo de sa poche de poitrine d'une main tremblante. Puis, après y avoir écrit rapidement quelques mots d'une écriture illisible, il jeta le papier contre le torse de Cole Jones et tourna les talons, rejoignant sa voiture de fonction à grands pas. Celle-ci démarra ensuite en trombe, sirène hurlante.

Cole Jones regarda le shérif s'éloigner, son sourire moqueur toujours présent aux lèvres. Ce peureux de Connors avait encore une fois prit la fuite, son activité favorite depuis la seconde. Le père de famille s'en serait sûrement amusé quelques instants et aurait certainement appelé son ami Charles Longsberg pour pouvoir en plaisanter quelques minutes mais il avait plus urgent à faire. Il devait remettre ses enfants sur le droit chemin. Il devait leur montrer que l'on ne désobéissait pas à son père. Il devait leur montrer une bonne fois pour toute.

A cette pensée, son visage s'assombrit, ses poings se serrèrent. Il détestait faire cela mais c'était plus que nécessaire.

oOoOoOoOoOo

Janvier 1982,

Dans les rues de New-York,

Date et heure précises inconnues.

« AAAAAAAARRRGGGGGHHHH ! »

Le robot ne sembla pas apprécier que les trois demi-dieux qu'il avait réussi à emprisonner quelques jours plus tôt ne lui sautent sauvagement dessus. Mais ce ne fut certainement pas lui qui eut le plus mal : son créateur avait fait en sorte qu'il puisse encaisser les chocs les plus rudes. Ainsi, être violemment projeté au sol ne lui arracha qu'un simple grincement métallique tandis que le jeune satire qu'il tenait contre lui hurla de douleur et de surprise, compressé qu'il était entre la créature métallique et les demi-dieux.

« Jacob ?! »

Ambre, dont les coudes et les genoux – avec l'aide des mains de Benjamin et de l'avant-bras d'Hugo - maintenaient le satire et le robot immobiles, se redressa en position assise, son visage transcrivant une réelle surprise : Jacob était censé être avec Matthew. Jacob était censé être arrivé à la colonie il y a de cela quelques semaines, Matthew à ses côtés. Et pourtant, il était là, en compagnie du robot qui les avait enfermés dans une pièce humide et froide depuis elle ne savait combien de jours.

Ce constat fit accélérer les battements de son coeur et contracter douloureusement son estomac, la peur envahissant soudainement son esprit. Jacob était le protecteur de Matthew. C'était lui qui devait s'assurer que son jumeau atteigne la colonie des Sang-Mêlés en toute sécurité. Si le satire était entre les mains de leur ravisseur, où était Matthew ? Lui était-il arrivé quelque chose ? Était-il en danger ou perdu on ne savait où à cause d'une énième négligence du satire ? Jacob n'était pas des plus rigoureux et courageux ; il lui arrivait régulièrement de commettre des fautes et de se laisser submerger par ses peurs. Ambre avait eu beaucoup de mal à lui confier son frère. Si malheur était arrivé à ce dernier …

« Non., pensa Ambre qui fut prise d'un frisson et de nausées. Non. S'il lui était arrivé quelque chose, tu le saurais. Tu le sens toujours. »

« Qu'est-ce qu'il fiche ici, ce débile ? », cracha Hugo Walters, d'un ton où teintait à la fois la colère et l'agacement.

Le fils d'Arès s'était relevé et avait posé la pointe de son épée sur la gorge du satire tandis qu'il fusillait le robot d'un de ses regards les plus meurtriers : un regard noir et l'ennemi pouvait se retrouver paralyser durant quelques instants. Telle était la torture qu'il était en train d'affliger au robot et Hugo n'en était pas peu fier. Des dons qu'il avait hérité de son père, celui-là était sans nul doute son préféré.

« Je … J'étais … enfin … je … », tenta Jacob, la voix tremblante.

Il avait tellement peur que Hugo finisse par lui trancher la gorge qu'il en avait presque oublié comment former une phrase correcte. Le fils d'Arès était connu pour être quelqu'un d'extrêmement impulsif et Jacob savait que si son histoire ne lui plaisait pas, il allait faire ce que son instinct de fils du Dieu de la Guerre lui dictait depuis la naissance : tuer la personne qui osait le contrarier.

« Tu n'as rien à te reprocher … absolument rien … »

« Où est Matthew ? »

Devant la difficulté du satire à ne sortir ne serait-ce qu'une seule phrase, Ambre n'avait pas tenu plus longtemps et avait posé la question qui la tourmentait le plus au moment présent : où, par le caleçon de Charon, était passé son frère jumeau ?

« Je … Je ne sais pas … », finit par articuler Jacob d'un ton douloureux.

Le jeune satire avait alors tourné la tête vers la fille d'Iris, bien content de ne plus avoir à fixer le visage plus que laid et énervé du fils d'Arès mais, devant l'expression pleine de colère que lui adressa Ambre lorsqu'il lui communiqua la triste vérité – à savoir qu'il n'avait aucune idée de l'endroit ni dans quel état pouvait se trouver le jeune homme qu'il était censé protéger -, il ne put retenir un bêlement effrayé. Les plus violents n'étaient pas forcément ceux qui en avaient l'air : Jacob eut la terrible impression qu'Ambre pouvait très bien lui arracher les cheveux et faire fondre sa cervelle s'il arrivait – par un terrible malheur - à la faire sortir de ses gonds. Et quelque chose lui disait qu'il n'allait pas tarder à réussir, malgré lui.

« Il … il n'arrêtait pas de répéter qu'il t'était arrivé quelque chose., reprit Jacob après un court instant de silence et plusieurs grandes respirations, tout en évitant de croiser le regard de plus en plus sombre et inquiet de son interlocutrice. Il … il s'est mis en tête d'aller te chercher, où que tu sois et … à un moment donné …. je … j'ai tellement honte, Ambre, si tu savais ! J'ai paniqué et … et je l'ai laissé. Je voulais retourner à la colo mais … mais impossible de retrouver le chemin. Alors j'ai essayé de retrouver Matthew. Mais là aussi , j'ai échoué. J'ai … j'ai donc tenté le tout pour le tout et j'ai joué un air de flûte pour essayer de vous retrouver et j'étais sur votre piste lorsque … lorsque cette drôle de machine m'a foncé dessus. »

En dessous de lui, le robot voulut manifester son mécontentement face au terme employé pour le définir. Une drôle de machine ? Il était bien plus que cela ! Il était le plus fidèle serviteur de son humble maître ! Un robot capable d'assumer les tâches les plus difficiles et à qui l'on confiait les plus hautes responsabilités ! Le satire aimerait-il qu'on le traite de simple mouton ?

Mais le fils d'Arès maintenait toujours son regard paralysant sur lui. Par conséquence, le grognement de rage qui devait sortir de sa gorge et ainsi effrayer ses adversaires se transforma en un faible gémissement, ce que le robot trouva lui-même très humiliant.

Un silence lourd de tension s'était installé entre les demi-dieux et le satire. Benjamin, Ambre et Hugo regardaient tous trois Jacob, se demandant sans doute s'il y avait des risques d'être poursuivi par la police pour avoir abandonné le cadavre d'un homme-bouc dans une benne à ordure. Le satire avait eu une seule et unique mission à mener à bien et il n'avait pas été capable de la remplir : il avait délibérément laissé un demi-dieu errer seul dans la nature parce qu'il avait eu peur pour sa propre vie. Et même si Hugo n'appréciait pas réellement le jumeau de la blondasse – au contraire de Benjamin qui le considérait comme l'un de ses meilleurs amis - , il n'aimait pas les déserteurs et encore moins les froussards.

« T'avais un job, mec., s'exclama Hugo d'un ton à la fois agacé et lassé. Le job de tout satire. Et tu t'en es absolument pas montré digne. Barbie avait confiance en toi lorsqu'elle t'a confié son frère. Et toi, qu'est-ce que tu as fait ? Tu as laissé ton protégé à la merci de centaines de montres ! T'es un gros loser, mec ! Tu mériterais qu'on t'abandonne ici avec cette saleté de robot ! »

L'être métallique émit un nouveau gémissement de protestation. Vraiment, si cet abruti de fils d'Arès ne le maintenait pas au sol …!

« … sais … je le sais très bien …, marmonnait Jacob d'une voix tremblante et suppliante. Mais … mais s'il … s'il vous plaît … ne … ne me laissez pas … je vous promets que je n'ai pas fait exprès … c'était … c'était plus fort que moi … je vous promets de ne plus jamais recommencer … »

Mais, mis à part le robot qui avait bien envie de l'étrangler pour lui casser ainsi les oreilles, personne ne l'écoutait. Les trois demi-dieux s'étaient mis à parler entre eux, probablement pour discuter des événements à suivre. Qu'allaient-ils faire à présent ? Valait-il mieux partir à la recherche de Matthew ou essayer d'accomplir la quête qu'Héphaïstos leur avait confié ? Et le robot : pour qui travaillait-il ? Était-il l'un des serviteurs de la personne qui avait volé les précieux outils du Dieu des forges ? Cela voulait-il donc dire qu'ils étaient à la recherche d'un quelconque inventeur ? Ou d'un voleur sachant reprogrammer les inventions d'autrui pour les mettre à son service ? Des dizaines de questions se bousculaient dans leur esprit et les trois camarades discutèrent de longues minutes avant de trouver un accord : l'un de leurs amis – ou l'une de leurs connaissances, en ce qui concernait Hugo et un frère jumeau dans le cas d'Ambre – était en danger et ils ne pouvaient ignorer cela. La priorité était donc de partir à la recherche de Matthew, pour éviter que celui-ci ne finisse dévorer par ils ne savaient quels monstres : le fils d'Iris savait se débrouiller avec une épée, mais il ne pourrait jamais combattre une horde de monstres à lui tout seul. Et il était hors de question qu'Ambre laisse son jumeau dans cette situation.

« Et si jamais la Mocheté réapparaît et nous dit de retourner à New York fissa pour mener à bien la quête qu'il nous a confié ?, demanda Hugo, son attention reportée sur le robot qui commençait à remuer. C'est un Dieu, les mecs. Seul lui peut savoir ce qu'il nous ferait si on ne fait pas ce qu'il dit. »

D'ordinaire, la volonté des Dieux ne perturbait pas réellement Hugo : le jeune homme méprisait ces êtres de trois mètres de haut et avait refusé bon nombre de quêtes que son père avait tenté de lui imposer. La colère divine, il s'en fichait comme sa toute première paire de chaussettes. Mais, il avait l'impression que la tâche qui leur avait été confiée cachait quelque chose. Quelque chose de plus grand, quelque chose d'énorme et d'extrêmement dangereux. Et le jeune homme adorait le danger et la violence, c'était dans son sang depuis sa naissance. Il adorerait voir ce qui se cachait au bout du chemin qu'ils étaient en train de prendre. Et puis … revenir sur ses pas, perdre plusieurs journées pour retourner dans la région de Long Island chercher quelqu'un qu'il n'appréciait pas particulièrement … il avait tellement hâte de découvrir la suite de leurs aventures que cette éventualité n'avait rien d'alléchante.

Il régna un court silence entre les demi-dieux avant que Benjamin ne le rompe, sourcils froncés.

« Peut-être qu'on devrait se séparer., déclara-t-il d'un ton pensif. Ce n'est peut-être pas la meilleure idée que j'ai eu, ajouta-t-il après quelques secondes, alors qu'Ambre s'apprêtait à dire qu'il s'agissait d'une très mauvaise idée. Mais je pense qu'on sera certainement plus efficaces ainsi. Hugo a raison : si on souhaite contenter tout le monde, on n'a pas tellement le choix. On doit à la fois retrouver Matthew et mener à bien une quête. Pour cela, on doit prendre deux directions bien différentes et on ne peut se couper en deux. »

« Mais alors, qui part avec qui ? », s'enquit Ambre.

L'idée de scinder le groupe en deux ne plaisait pas à la jeune fille mais elle avait confiance en le fils d'Aphrodite. Celui-ci avait toujours été plutôt doué en matière de stratégie et avait souvent de bonnes idées. Elle lui confierait sa vie et ses biens les plus précieux sans aucune hésitation. Alors, même si son idée ne l'emballait pas au premier abord, elle garda ses quelques craintes pour elle et se concentra sur le moment présent : le plus urgent était de vite trouver une solution pour ensuite pouvoir passer à l'action. Les Dieux seuls savaient si d'autres monstres n'allaient pas tarder à arriver pour tenter de les renvoyer dans leur trou.

« Toi et moi partons chercher Matthew. Hugo et Jacob s'occupent du voleur d'outils. », dit Benjamin d'une voix assurée. Maintenant, mettons-nous en route avant que d'autres créatures rappliquent. »

Le fils d'Arès n'était pas très ravi de prendre en charge le satire mais il ne se manifesta pas. Au loin, des grognements se faisaient entendre et Hugo savait qu'ils avaient déjà trop tarder à se remettre en route.

« Detoute façon, pensa-t-il alors que Benjamin et Ambre aidaient Jacob à se redresser et qu'il tranchait la gorge métallique du robot qui émit un dernier couinement, l'air d'être totalement en désaccord avec le sort que Hugo lui avait réservé. s'il se montre trop idiot et lourd, je n'aurais qu'à l'abandonner en plein New York, comme il l'a lui-même fait avec Jones. J'suis presque sûr qu'il ne manquerait à personne. »

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Le Dieu ne put retenir un léger rire. Ainsi, son plan fonctionnait à la perfection : les demi-dieux avaient décidé de se séparer pour mener à bien deux quêtes bien différentes. Deux quêtes organisées par ses soins et dont il ne pouvait que se réjouir de l'issue : l'heure de la vengeance avait sonnée. Une vengeance au goût tellement délicieux et addictif qu'il regrettait presque de ne pas y avoir cédé plus tôt. Mais trouver le bon scénario et sélectionner les bons acteurs avait demandé du temps. Et le Dieu n'avait pas eu envie de prendre le moins risque : un pion qui n'était pas le bon et tout pouvait capoter. Hors, il n'était pas question que son opération ait le moindre raté. Il s'était trop investi pour cela. Et puis, c'était son moment de gloire. Le moment où tous ses camarades le verraient enfin sous son véritable jour et arrêteraient de le sous-estimer, de le considérer comme une divinité de second rang, laide et boiteuse, soumise aux ordres d'Héra et des Trois Grands. Ils lui accorderaient enfin la reconnaissance et l'importance qu'il méritait. Et le Dieu avait tellement hâte que cela arrive ! Tellement ! Après toutes ces années de discrimination et d'humiliation ! Car oui, il avait été humilié. Humilié par deux êtres qui étaient censés être des membres de sa famille. Des membres de sa famille qui étaient censés l'aimer, le chérir, le protéger, l'accepter pour ce qu'il était. Et, même si les Dieux Olympiens n'avaient jamais été très doués pour cela, le Dieu avait longtemps espéré que ses camarades s'améliorent avec le temps et commencent à agir comme une véritable famille. Pourquoi n'avait-il jamais eu de relation complice avec quelqu'un comme Hermès avec Apollon ? Ou Hermès et Poséidon ? Le Dieu jalousait régulièrement le Dieu des Messagers. Celui-ci avait toujours eu le respect de ses pairs et n'avait jamais été humilié publiquement. Il n'avait jamais dû faire face à des remarques désobligeantes de la part de personnes qu'il appréciait malgré lui. Il n'avait jamais dû faire face à l'une des pires trahisons. Il n'avait jamais dû vivre avec le fait que sa femme et l'un de ses demi-frères couchaient ensemble.

À cette pensée, le Dieu serra fortement le mini-automate qu'il venait de construire sans même s'en rendre compte et celui-ci s'écrasa comme s'il était fait de pâte à modeler.

Avec un soupir, et tentant tant bien que mal de contrôler sa colère pour ne pas faire exploser sa forge, Héphaïstos commença à ranger nerveusement ses outils tout en prenant soin de ne pas les faire fondre. Bientôt, il allait pouvoir se venger, rendre à Aphrodite et à Arès la monnaie de leur pièce en leur infligeant une douleur semblable à celle qu'ils lui causaient depuis maintenant des milliers d'années et c'était tout ce qu'il comptait. C'était tout ce à quoi il devait penser pour calmer sa colère qui ne cessait d'augmenter depuis quelques jours, depuis qu'il avait commencé à prendre les choses en mains, à lancer la partie.

« Tout sera bientôt terminé., pensa-t-il en se retournant. Tout sera bientôt terminé. Dans quelques jours, Arès et Aphrodite arrêteront de se moquer de toi et tu auras enfin la place que tu mérites. »

Et alors que son visage se fendait en un grand sourire, son regard croisa celui, effrayé, de Matthew Jones. Le jeune homme, bâillonné et enroulé dans une solide corde, était assis dans un coin de la pièce et regardait le Dieu comme s'il s'agissait d'une bombe prête à exploser.

Car c'était sans nul doute ce qu'était désormais le Dieu des Forges.

Une bombe nucléaire prête à exploser et à anéantir tous ceux qui l'avaient déçu depuis le début de son existence.

La vengeance contre Arès et Aphrodite ? Il ne s'agissait que d'un début.

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