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There were grief and ruins, and you were the miracle.

Pablo Neruda

Il y avait du chagrin et des ruines, et tu étais le miracle.

Pablo Neruda

Chapitre 26 : Grief And Ruins

Le monde n'avait aucun sens.

Ce n'était qu'un amas intangible de sensations, de bruits et d'odeurs.

Et de douleur.

La douleur était omniprésente.

Aveuglante.

Le rire familier de Lily se perdait dans les cris des suppliciés.

La voix d'Harry était avalée par les sortilèges beuglés de toute part par les Mangemorts et le Seigneur des Ténèbres.

Le monde s'écroulait dans une pluie de gravas. La bruine attaquait son pelage, alourdissant encore sa vieille carcasse qui avait bien du mal à résister au vent qui voulait brider sa course, le ramener vers le danger… Ses ailes battaient…

Non…

Severus n'avait pas d'ailes.

Qu'importe combien de fois il tentait de les bouger, rien ne remuait dans son dos.

Il n'était plus Nox.

Il était humain à nouveau.

Humain

Prisonnier de ses cauchemars qui n'en étaient pas.

« Redonnons lui une dose de potion antidouleur. » déclara une voix qu'il ne reconnut pas.

Il y avait d'autres mots, d'autres voix… Plus familières…

Séquelles

Incurable…

Doloris…

Miracle…

Un liquide pâteux fut forcé dans sa bouche et il sombra vers un niveau plus profond d'inconscience.

Il perdit le compte du nombre de fois où sa conscience effleura le réveil uniquement pour être assommée à nouveau par une potion.

La douleur était toujours vive lorsqu'il parvint enfin à s'arracher aux visions fiévreuses, à ouvrir les paupières. Elle était toutefois supportable. Il lui aurait été impossible de déterminer quelle partie de son corps était la plus meurtrie, ses organes paraissaient tous le faire souffrir. Et, pourtant, après quelques minutes, la douleur la plus intense se localisa dans son avant-bras gauche.

La Marque, déduisit-il, groggy, avant même de tenter de s'orienter. La Marque le brûlait aussi intensément que lorsque le Seigneur des Ténèbres la lui avait apposée, la sensation était comparable à un fer chauffé au blanc pressé contre sa peau. Il fut presque surpris de ne pas sentir l'odeur atroce de la chair carbonisée.

Un bourdonnement désagréable de conversations réveilla immédiatement une migraine latente.

Odeur d'antiseptiques, potions de soin… Les parfums étaient trop familiers, tout autant que la sensation des draps un peu rêches et des pyjamas en coton dont on l'avait affublé.

Poudlard, déduisit-il sans trop y croire. L'infirmerie de Poudlard.

Il tenta de se redresser et jugea la tâche impossible. D'abord, la douleur le clouait au matelas. Ensuite, ses bras et jambes étaient entravés.

« Sev ! » s'écria soudain une voix familière, mettant un terme à la conversation qui se jouait en arrière plan. Harry apparut dans son champ de vision, des cernes épaisses sous ses yeux verts, les cheveux plus en bataille que jamais et l'air épuisé.

Il tenta de prononcer le nom du gamin – peut-être pour le rabrouer d'utiliser un surnom dont personne ne l'avait affublé depuis des années – mais ne parvint qu'à tousser suffisamment fort pour qu'il craigne, l'espace d'un instant, perdre un poumon.

« Doucement, mon garçon, doucement… » le gronda gentiment McGonagall en apparaissant à sa droite, faisant disparaître d'un coup de baguette les liens matelassés qui l'attachaient au lit. Un nouveau coup de baguette força le haut du matelas à se redresser légèrement, de sorte que le torse de Severus soit un peu surélevé. Il en grimaça mais ne protesta pas. Il était bien plus simple de respirer ainsi.

« Tenez. » offrit Albus, forçant Harry à se décaler pour porter un gobelet à ses lèvres. Severus but sans y réfléchir à deux fois, n'étant pas en état de se méfier de tout et de son ombre. L'eau avait un arrière goût de camomille, ce qui lui fit dire que le Directeur y avait ajouté une faible dose de potion calmante.

Avant qu'il ait put tenter à nouveau de prononcer un mot, Poppy et une sorcière inconnue poussèrent les autres pour s'approcher davantage. Il eut un mouvement de recul en apercevant son visage, réveillant la douleur dans ses os.

« C'est juste Andy. » lança la voix familière et honnie de Sirius Black de quelque part sur sa droite. « Andromeda, pas Bellatrix. »

Andromeda Tonks.

La Médicomage n'eut pas l'air enchanté de la méprise mais elle ne commenta pas. Elle et Poppy lancèrent sort de diagnostic sur sort de diagnostic et Severus resta là, la tête lourde et l'esprit embrumé, tâchant de comprendre ce qu'il se passait.

Harry avait l'air non seulement épuisé mais inquiet. Il se tenait juste derrière l'infirmière, bras croisés, ses yeux volant de lui aux Médicomages avec une angoisse évidente. Minerva et Albus attendaient maintenant au pied de son lit, masquant mal leurs propres inquiétudes. Et il aperçut Black perché sur le lit voisin, penché légèrement en avant pour mieux voir, les coudes appuyés sur les cuisses.

« Pouvez-vous me dire votre nom ? » s'enquit soudain Andromeda. « L'année. L'endroit où nous sommes. Le nom du Ministre de la magie. Et nommez toutes les personnes présentes dans cette pièce. »

Cela faisait beaucoup de questions.

Il dut s'y reprendre à plusieurs fois avant qu'un son ne daigne sortir de sa gorge irritée par les hurlements qu'il avait poussés.

« Professeur Severus Snape… » s'efforça-t-il d'articuler. « L'année… 1996 ? » Il hésita, guettant Harry du regard, quelque peu confus. La dernière fois qu'il s'était retrouvé à l'infirmerie, ils étaient dans le passé. L'adolescent confirma d'un hochement de tête alors il poursuivit. « Rufus Scrimgeour, à moins qu'il ait été remplacé depuis. »

« Rufus est toujours Ministre de la Magie. » intervint Albus.

Severus cilla mais réfléchir plus avant à la question était trop lui en demander.

« Vous vous débrouillez très bien, Severus. Nommez les personnes présentes, je vous prie. » l'encouragea Andromeda.

Il n'aimait guère qu'on lui parle comme à un enfant.

« Andromeda Tonks. » marmonna-t-il, juste pour lui prouver que sa mémoire à court terme n'était pas endommagée. « Poppy Pomfresh. Albus Dumbledore. Minerva McGonagall. Harry Potter. Et la plaie de mon existence. »

« Ça, je suppose que c'est moi. » se moqua l'Animagus. « Je n'aurais jamais cru que je serais si content de t'entendre m'insulter. »

« Je peux être un peu plus imagé si tu préfères. » grommela-t-il.

« Merlin, Severus… » souffla brusquement Minerva, avec une émotion palpable, avant de s'éloigner brusquement, une main couvrant son visage.

Albus la regarda partir avec une compassion évidente.

« Poppy, pourriez-vous… » s'enquit le vieux sorcier.

Poppy hocha la tête et se pressa à la suite de son amie, laissant une place libre à son chevet qu'Harry s'empressa de combler. Le regard vert était, pourtant, rivé sur la Médicomage.

« Pour autant que je puisse le dire, il n'y a pas de séquelles neurologiques. » déclara Andromeda. « Cela concorde avec ce que les sorts de diagnostics nous disaient. »

« Séquelles ? » releva-t-il.

Sa tête bourdonnait et il voulut porter la main à son front. Soulever son bras du matelas lui demanda un effort considérable mais son avant-bras tremblait tellement que l'entreprise semblait vaine. Une boule d'angoisse se forma dans son estomac.

« Ne paniquez pas. Vous risquez d'aggraver vos blessures. » lui ordonna immédiatement Albus. « Il semble que vous ayez été sujet à l'Endoloris durant un laps de temps considérable, mon garçon. »

« Non. » refusa-t-il tout net, s'efforçant à nouveau de lever les bras, mettant toute sa volonté à stopper les tremblements violents qui les agitaient.

« La bonne nouvelle, c'est que les nerfs des mains semblent être les plus touchés. » offrit Andromeda. « Étant donné l'étendue de vos blessures, c'est un petit miracle en soi. »

« Un miracle ? » siffla-t-il. Cédant à l'angoisse et à la fureur, il tenta de se redresser en poussant sur ses mains inutiles. Son abdomen était en feu mais il l'ignora. « Un miracle ? Je suis Maître des Potions ! »

Sa voix tonna dans l'infirmerie et il se mit à tousser, trop faible pour lutter contre les nombreuses mains qui le forcèrent à nouveau à s'allonger.

Pourrait-il seulement encore tenir une baguette ?

Ses mains étaient toute sa vie.

Il aurait encore mieux valu qu'il termine en légume à Sainte Mangouste.

« On va trouver une solution. » promit Harry, en désespoir de cause. « On trouve toujours. Ce n'est pas pire que se retrouver coincés en soixante-quinze. Severus, ça va s'arranger. »

Il était trop fatigué pour l'abreuver d'injures comme il aurait aimé pouvoir le faire. Clouons le garçon au sol et disons lui qu'il ne pourra jamais plus voler, songea-t-il, et voyons ensuite s'il pensera que tout va s'arranger.

« Ma potion. » lâcha-t-il, en désespoir de cause. « Je travaillais sur une potion pour restaurer les nerfs… Harry, va la chercher. Dans mon laboratoire… »

« Non brevetée et non testée? » le coupa Andromeda. « Je ne crois pas, non. Nous pouvons réduire les tremblements avec un traitement approprié. » Son visage se fit compréhensif mais tout ce que vit Severus, ce fut la pitié dans son regard. « Mais il est peu probablement que vous retrouviez le plein usage de vos mains. »

Il fusilla la Médicomage du regard, vaguement conscient du grondement qui enflait autour de lui. Les vitres se mirent à vibrer, plusieurs fioles explosèrent sur les étagères…

« Est-ce que c'est le bon moment pour parler de ce foutu contrôle dont tu es si fier ? » se moqua Black.

Il lui fallut plusieurs inspirations avant de récupérer le plein contrôle de sa magie. Et cela le laissa épuisé.

« Vous avez besoin de repos. » insista Andromeda. « Vos muscles et vos nerfs ont besoin de repos. Les tremblements auront déjà diminué quelque peu dans quelques jours. »

« Azkaban. » lâcha-t-il, car cela était préférable à affronter la panique grandissante dans sa poitrine. Il voulut tendre la main vers Albus, attirer son attention, et ne parvint qu'à s'horrifier davantage du manque de contrôle qu'il avait sur ses membres. « Le Seigneur des Ténèbres… »

« Nous le savons déjà. » offrit le vieux sorcier. « Pour être franc… Nous craignions ne plus jamais vous revoir, Severus. S'échapper d'Azkaban n'est pas aisé. »

Black émit un bruit amer et Severus cilla, tâchant de rassembler ses esprits, d'être cohérent malgré la douleur, la peur et les souvenirs qui l'assaillaient en masse. Ses boucliers…

« Il y a un espion… » murmura-t-il.

« Toujours aussi élusif, je le crains. » soupira Albus, en posant une main rassurante sur son épaule. « Y a-t-il quoi que ce soit d'urgent ? Une information qui pourrait faire la différence ? Dans le cas contraire… Mon garçon, je pense qu'Andromeda a raison. Vous avez besoin de repos. »

Lucius

Lucius avait laissé dépasser sa baguette de sa poche à dessein…

Lucius lui avait donné l'opportunité de s'échapper…

Il croisa le regard bleu du Directeur mais n'osa pas formuler cette information à voix haute, en sachant qu'un espion rôdait.

Il n'en voyait, de toute manière, pas l'intérêt.

Il avait deviné depuis un bon moment avoir été remplacé.

Il laissa Andromeda lui administrer une nouvelle dose de potion de sommeil sans rêve.

Dormir lui semblait préférable à affronter la réalité.

°O°O°O°O°

Le monde était enveloppé d'une épaisse couche de ouate.

Du moins, c'est ce qu'il lui sembla lorsqu'il ouvrit à nouveau les yeux. La douleur n'était pas moins forte, se focalisant surtout dans son avant-bras gauche. La Marque pulsait toujours régulièrement, un battement de cœur qui battait à contretemps du sien comme un parasite. Il voulut serrer le poing mais ne parvint qu'à perdre le contrôle de ses doigts.

Il ferma les paupières et laissa sa tête rouler sur son épaule.

Ses mains étaient les plus touchées avaient dit Andromeda, cela laissait entendre que le reste de son corps n'en était pas sorti indemne. Serait-il seulement capable de marcher ? Avait-il encore une quelconque utilité ?

« Ça va s'arranger. »

Ses yeux fouillèrent la semi-obscurité à la recherche de l'homme et le trouvèrent avachi sur le lit suivant, un bras négligemment jeté sur le visage, sans doute pour bloquer les quelques rayons de soleil qui perçaient encore à travers les rideaux clos. Sa vue, au moins, était toujours excellente. Suffisamment pour que Severus conclue que Sirius Black avait eu des jours meilleurs. Une ombre de trois jours obscurcissait son menton et il portait toujours les mêmes vêtements que lors de la bataille dans l'Allée des Embrumes.

À croire qu'il l'avait veillé tout ce temps là. Ridicule.

Pour Harry, peut-être. Sans doute.

Cela ne fit rien pour diminuer le ressentiment qu'il éprouvait.

« Épargne-moi ta pitié. » cracha-t-il, non sans rancœur. Il était typique qu'il finisse, lui, brisé en mille morceaux alors que ce qu'il restait des Maraudeurs fanfaronnait sans une égratignure.

« Ce n'est pas de la pitié. » soupira Black, en s'asseyant pour mieux le dévisager. Il l'observa en silence quelques secondes, le visage crispé, puis désigna ses mains tremblantes du menton. « Ça, c'était ma tête quand je me suis échappé d'Azkaban. Tout était… » Il haussa les épaules. « J'ai survécu. Tu survivras. »

Il n'y avait aucune place au doute dans la voix du Gryffondor, elle était ferme, assurée. À croire qu'il énonçait une vérité évidente et pas un vœu pieux.

« Où est Harry ? » s'enquit-il.

« J'ai demandé à Ron et Hermione de le distraire un peu. » répondit l'Animagus. « L'obliger à manger autre chose qu'un sandwich, prendre une douche et se reposer quelques heures dans un lit pour changer. » Il laissa échapper un bruit amusé. « Ils arriveront à le nourrir en le trainant aux cuisines et, maintenant que tu es hors de danger, il va probablement prendre le risque d'une douche, mais je te parie qu'il sera de retour dans l'heure. Il ne t'a pas quitté depuis que tu t'es écrasé en haut de la tour d'astronomie. »

La tour d'astronomie…

Il n'en gardait que de vagues souvenirs.

Battre des ailes, battre des ailes… Voilà la pensée qui l'avait accompagné alors qu'il volait dans la vague direction de l'Écosse, tentant de semer ses poursuivants, mu par le seul instinct des sombrals. Le vol avait les qualités d'un cauchemar, il s'en souvenait sans véritablement sans souvenir, ne gardait que des bribes d'images… Harry qui le maintenait au sol… Minerva qui lui caressait la joue… Albus qui lui ordonnait de s'accrocher à la vie…

« Pratique comme forme animagus. » commenta Black, en étirant les bras au-dessus de sa tête. Son dos craqua comme celui d'un vieil homme.

« Combien de temps… » demanda-t-il, quelque peu confus.

« Depuis la Nuit des Ténèbres, deuxième version ? Quatre jours. » répondit son rival. « Tu n'as pas manqué grand-chose. Voldemort n'a même pas encore levé le petit doigt. Il n'a rien à faire, les gens sont en train de plier bagages. Azkaban est imprenable, alors tout ce qu'on peut faire c'est tenter d'endiguer l'hémorragie. »

Il absorba l'information, forcé de faire un effort conscient pour poursuivre une réflexion plus poussée. Il était fatigué. Non seulement dans son corps, mais dans son esprit.

« L'espion… » hasarda-t-il. Il avait déjà posé la question, lui semblait-il. À Dumbledore un peu plus tôt.

« On a éliminé Kreattur de la liste mais on n'a rien de plus. » déclara Black, la mâchoire contractée. « J'arrive pas à croire qu'on en soit de nouveau là. Ça va être la pagaille. Comment être sûr de… »

« Nymphadora. » marmonna-t-il. « Bill Weasley. Minerva. Albus. Ce sont toutes les personnes que nous avons pu innocenter. »

Black l'étudia du regard et sauta de son lit pour se rapprocher du sien.

Couché comme Severus l'était, sans possibilité réelle de se redresser, la présence de l'autre sorcier était écrasante. Ses doigts se contractèrent par réflexe, cherchant une baguette qu'il n'était même pas certain de pouvoir tenir correctement.

« Et moi. » lâcha doucement Black, presque incrédule. « Moi. Tu ne crois pas… »

Severus hésita. « Je ne crois pas, non. Mais je n'ai pas pour habitude de m'appuyer sur la seule foi de mon instinct. Les enjeux sont trop importants. »

« Harry. » insista Black. « Tu sais bien que je ne ferai jamais rien qui puisse nuire à Harry. »

Il ferma les paupières, réticent à se montrer vulnérable devant son ennemi de toujours et pourtant paradoxalement certain que Black ne s'apprêtait pas à le poignarder dans le dos. Ces instincts contraires s'affrontaient régulièrement en lui, des années d'habitude faisant face aux derniers mois.

Les gens ne changeaient pas, pas viscéralement.

Du moins, l'avait-il toujours cru.

Avant.

Avant…

« Je le sais. » accepta-t-il finalement, d'un ton las. N'avaient-ils pas déjà eu cette discussion ? Pas en ces termes mais en d'autres.

Et puis…

Black s'était interposé entre lui et les autres, les mains vides, sur la simple force de sa confiance.

Il n'avait jamais véritablement soupçonné Black, en premier lieu. Il ne lui aurait jamais confié le secret des horcruxes autrement. Il ne l'aurait pas risqué. La discussion était stérile.

« Tu as ma confiance. » ajouta-t-il, avec un léger grognement, tant parce que la sensation de brûlure dans la Marque était insupportable que parce que les mots lui laissaient un arrière-goût amer.

« Et toi la mienne. » répondit immédiatement l'Animagus.

Il sentit sa main se poser sur son épaule, la pressa presque avec gentillesse, mais il ne trouva pas la force de rouvrir les yeux. Il s'humecta les lèvres, tâchant d'occluder la douleur sans y parvenir. C'était la pagaille dans sa tête, ses boucliers gisaient brisés et il n'avait pas la force qu'il aurait fallu pour les reconstruire. Il était vulnérable sur tous les plans.

Il était plus facile de se laisser sombrer dans la torpeur qui voulait l'emporter.

« Black ? » murmura-t-il, la voix rauque et la gorge irritée.

« Toujours là. » offrit son rival.

« Merci. » lâcha-t-il.

Pour avoir pris son parti contre le reste de l'Ordre mais, surtout, pour Harry.

S'il réponse il y eut, il ne l'entendit pas.

Il se rendormit.

°°O°°O°°O°°O°°

Les rideaux avaient été rouverts lorsqu'il reprit connaissance mais le ciel avait la couleur ambrée d'une fin de journée et il ne faisait pas plus clair dans l'infirmerie.

Harry était perché en tailleur sur une chaise, à côté du lit, et griffonnait sur un morceau de parchemin appuyé sur son genou, un manuel quelconque posé sur le matelas à côté de la jambe du professeur, l'encrier coincé entre ses jambes. Périlleux.

Severus saisit l'opportunité de l'étudier tandis qu'il se réveillait tout à fait, notant les cernes, les joues creuses et la pâleur inhabituelle du garçon. Il n'était pas en uniforme mais portait un jean bien trop grand et un pull marron marqué d'un H majuscule sur le torse qui était sans conteste l'œuvre de Molly Weasley. Il semblait flotter dans ses vêtements, lui donnant l'air plus jeune qu'il n'était réellement.

Leur dernière discussion avait été houleuse.

Pour ne pas dire qu'elle s'était soldée en dispute.

Harry avait été en colère, blessé par ce qu'il avait perçu, très justement, comme Severus tentant de lui faire ses adieux. Il n'avait pu lui en tenir véritablement rigueur, sachant qu'Harry aurait très mal supporté de perdre quelqu'un d'autre, une chose qui avait semblé inévitable à ce moment là

Il prit le temps de faire un inventaire de ses blessures avant de déranger l'adolescent. Ses poumons le brûlaient beaucoup moins à chaque inspiration, sa cage thoracique lui paraissait meurtrie sans que cela soit insupportable… Il parvint à contracter et relâcher ses orteils sans que cela ne déclenche de spasmes intempestifs dans ses jambes, peut-être la seule bonne nouvelle depuis qu'il avait repris connaissance un peu plus tôt – quelques heures ? quelques jours ? – et sa tête était moins lourde. Demeurait la douleur sourde et brute de la Marque et des muscles et nerfs de ses bras.

Il tenta de plier le bras droit, heureux de constater que si la tâche était toujours difficile, il paraissait avoir retrouvé le contrôle de son biceps. Du coude au bout de ses doigts, en revanche… Il laissa retomber son bras, peu surpris de trouver le regard vert rivé sur lui.

« J'ai tenu ma promesse. » lâcha-t-il. Cela le surprenait lui-même d'y être parvenu, à vrai dire, et pourtant il était là… A n'importe quel prix, avait-il juré à Harry, et le prix semblait être le sens de sa vie. Il jeta un coup d'œil amer à ses mains, souhaitant presque…

« Je suis désolé. »

Il reporta son attention sur le garçon qui avait détourné les yeux et fixait un point sur le mur. Harry déglutissait rapidement, cherchant probablement à se maîtriser.

« Inutile. » commenta-t-il. Il lui fallut se concentrer pour lever à nouveau son bras et réussir à le déplacer. Que sa main atterrisse sur le genou du gamin était plus un heureux accident qu'autre chose.

« Si. » insista Harry. « L'autre jour, ce que j'ai dit… Si vous n'étiez pas revenu… Si… »

« Harry. » l'interrompit-il. « Je sais. Ce n'était pas les adieux que j'aurais souhaités mais c'est tout aussi bien, en fin de compte. Je suis revenu. »

Brisé et inutile, certes, mais là néanmoins.

Il ignorait combien de temps le garçon était resté à son chevet. Tout du long, s'il en croyait Black. Il ne doutait pas qu'Harry ait pris sur lui au cours des derniers jours, n'ait refoulé ses émotions pour mieux fonctionner…

À cet instant, ce fut comme une marionnette dont on aurait coupé les fils.

Le sanglot fut brutal et, s'il le ravala bien vite, ce ne fut pas suffisamment pour empêcher quelques larmes de s'échapper.

« Harry… » marmonna-t-il, irrité de ne pouvoir consoler le garçon correctement.

Le Gryffondor secoua la tête avec un piètre sourire. « Je suis juste… J'ai cru… Je suis content que vous soyez . »

Severus l'observa, sentant son amertume s'estomper légèrement. Peut-être le prix à payer n'était-il pas si terrible. Pas s'il lui permettait de voir grandir l'adolescent. Il n'était pas certain d'être toujours la meilleure protection que le Survivant trouverait jamais mais il avait toujours un corps et un corps arrêtait un sort tout aussi bien qu'un sortilège du bouclier.

« Je sais que tu ne veux pas de partisans, mais sache que je serais à tes côtés aussi longtemps qu'il me sera donné d'y rester. » offrit-il.

Le serment ne lui coûta rien. Il viendrait un temps, plus proche peut-être que l'adolescent ne le réalisait, où Harry Potter serait un point de ralliement qu'il le veuille ou non. Severus retarderait ce moment le plus longtemps possible, désireux de lui épargner ce poids, mais il l'y préparait pourtant parce qu'il se refusait à ce qu'Harry ne soit que le pantin de Dumbledore.

« C'est mon père que je veux. » contra le garçon. « Pas un partisan, pas quelqu'un qui croit qu'il doit mourir en mon nom, juste… Je veux mon père. Vous n'êtes plus un espion maintenant. On peut recommencer comme avant. N'est-ce pas ? »

Il y avait tellement d'espoir dans la voix du gamin…

Faire cette promesse là, en sachant ce qu'elle représentait pour lui, sans être certain de pouvoir la tenir… Il n'était pas dans une autre réalité, il n'était pas en soixante-quinze… La loi était la loi… Techniquement parlant, et à condition qu'Harry l'accepte, ce qu'il n'avait pas encore fait, Black était son tuteur légal et, bien que lui et l'Animagus soient parvenus à une trêve qui tendait presque vers une amitié fragile à laquelle Severus était réticent, rien ne garantissait que son parrain accepte de partager cette charge. Severus n'était pas certain qu'il soit même judicieux de le faire. Harry avait besoin de stabilité et…

Il était impossible de refuser quoi que ce soit aux yeux verts qui le fixaient avec insistance.

« Dans la mesure du possible. » nuança-t-il, s'engageant sans s'engager.

Cela fut suffisant pour l'adolescent qui lui adressa un grand sourire, avant de jeter un coup d'œil au-dessus de son épaule en grimaçant.

« Vous ne devriez pas parler autant. » déclara le Gryffondor. « Vous êtes censé vous reposer. Pomfresh a menacé de m'expulser de l'infirmerie si je vous dérangeais. »

« Tu ne me déranges pas. » nia-t-il immédiatement, peu enclin à se retrouver seul avec ses idées noires.

« Je voudrais bien la voir essayer, de toute manière. » se moqua le garçon. « Ça fait trois jours que McGonagall essaye de me renvoyer dans la salle commune. »

« Où tu retourneras ce soir. » gronda-t-il.

Harry refusa d'une secousse de tête. « Je dormirais ici. Je veux être sûr… Tant qu'on ne sait pas qui est l'espion, je veux être sûr que vous soyez en sécurité. »

« Tu es donc mon nouveau garde du corps ? » commenta-t-il, avec un bruit amusé. « Comme les tendances s'inversent. »

« Vous en avez plusieurs. » répondit Harry, sans véritablement plaisanter. « McGonagall vient toutes les heures à peu près. Sirius a dit qu'il reviendrait demain matin. Oh, et Remus et Tonks sont passés pendant que vous dormiez… Ils sont tous à l'enterrement de Fol'Œil, je crois. »

Remus et Tonks

Une bouffée de quelque chose l'envahit, sans qu'il ne cherche à y mettre un nom. Il chassa la pensée qui, au demeurant, avait bien peu d'importance.

« L'enterrement… » répéta-t-il. « Y sont-ils tous ? Poudlard… »

« McGonagall et les Professeurs sont restés. » le rassura Harry. « Il y a un Auror aussi. Et j'ai entendu Dumbledore dire à Andromeda que Charlie, Anthony et Hagrid patrouillaient dans la Forêt Interdite et dans le parc. »

Ce n'était pas un système de sécurité idéal, même avec les protections qui entouraient Poudlard. Il renonça à l'idée de convaincre Harry de retourner dans son dortoir. Si Albus n'était pas présent, il préférait encore avoir le gamin près de lui, tout aussi inutile qu'il soit à l'instant.

« Mr Potter ! » s'écria Poppy du seuil de son bureau. « Je vous avais dit… »

« Inutile de hurler, Poppy. » râla-t-il. « Je suis le seul coupable. »

La Médicomage ne voulut, cependant, rien entendre. Elle ne fut heureuse que lorsqu'il eut consenti à se plier à ses examens et à avaler quelques gorgées de bouillon, le maternant tellement que cela le rendit furieux, au grand amusement d'Harry qui se tint loin de son chemin.

Elle l'épuisa tant et si bien qu'il se rendormit sans même s'en rendre compte.

°°O°°O°°O°°O°°

Il rouvrit les yeux brutalement, le souffle court et le cœur au bord des lèvres, fuyant par réflexe la main qui s'approchait de son visage.

« Doucement, mon garçon. » gronda la voix familière de la sous-directrice. « Ce n'est que moi. » Il se détendit quelque peu en reconnaissant la voix de McGonagall, suffisamment en tout cas pour la laisser poser brièvement la main sur son front en un geste apaisant, sans toutefois être très à l'aise avec cette affection assumée. « Vous faisiez un cauchemar. »

Il faisait nuit, à présent, et la lueur des bougies ne parvenait pas tout à fait à chasser l'obscurité. Harry était allongé sur le lit voisin, son livre de Sortilèges sur le ventre, un tas de parchemins froissés recouverts de l'écriture petite et pointue de Granger coincé sous son bras droit, semblant s'être endormi sans s'en rendre compte.

« Cet enfant est têtu. » grommela McGonagall. « Il refuse de quitter l'infirmerie depuis… » Sa voix resta en suspens. « Au moins, nous pouvons toujours compter sur Miss Granger pour s'assurer qu'il rattrape son retard, je suppose… Avec les BUSEs si proches… »

« Pensez-vous réellement que nous parviendrons jusque là ? » se moqua-t-il. Il n'aimait guère se voiler la face.

« Non, bien sûr… » soupira-t-elle, en se pinçant l'arrête du nez. « L'école est en proie au chaos le plus total. Nous avons perdu beaucoup d'élèves, plusieurs familles ont quitté le pays, les Professeurs ne savent que répondre à leurs questions, Albus passe son temps au Ministère… Votre absence s'est faite sentir, Severus. Sans vous pour me seconder… »

« Toutes mes excuses, Minerva, j'avais d'autres préoccupations. » ironisa-t-il.

La sorcière pinça les lèvres, le visage grave. « Parlons-en, de vos préoccupations. À quoi diable pensiez-vous ? Risquer votre vie de la sorte… Avez-vous une seule idée du sang d'encre que je me suis fait ? Et ce garçon ? Avez-vous seulement pensé à ce garçon ? Il n'aurait jamais supporté de perdre un second père. Je ne parle pas d'Albus, de vos élèves, ou même de Miss Tonks… »

Il leva les yeux au ciel. « Je suis certain que Miss Tonks se serait rapidement consolée. »

Cela lui valut un regard noir.

« Ne le prenez pas à la légère. » cingla-t-elle. « Il serait temps que vous vous rendiez compte que, malgré ce que vous semblez en penser, vous avez des amis, une famille, qui se préoccupe de votre sort. Vous vous saviez en danger. Pourquoi avoir tenté le diable… »

« Je me devais essayer. » gronda-t-il, jetant un coup d'œil à Harry pour s'assurer que leur discussion ne le réveillerait pas.

« Ne refaites plus jamais une idiotie pareille, Severus, plus jamais. » insista-t-elle, en croisant les bras devant sa poitrine dans cette pose sévère qui terrifiait les élèves. « Honnêtement. À croire que l'on répartit trop tôt… »

Il faillit s'en étouffer d'outrage.

« Ne me comparez pas à un lion. » grinça-t-il.

« Dans ce cas, cessez de vous comporter comme l'un d'entre nous. » riposta-t-elle, une fêlure dans la voix qu'elle dissimula derrière un raclement de gorge. « J'ai réellement cru que vous alliez mourir dans mes bras. »

Il poussa un bref soupir agacé, plus pour garder la face que par véritable irritation. « Minerva… »

« Et ne croyez pas que vous allez vous en tirer si facilement. » l'interrompit-elle. « Nous allons avoir une longue et fructueuse conversation sur les transformations Animagus et pourquoi il était absolument stupide de votre part de vous entraîner seul. De la part de Potter, passe encore, mais vous ? » Elle claqua la langue avec irritation. « Dès que vous serez sur pieds, nous organiserons une session de rattrapage. Je veux m'assurer que vous ne courriez aucun risque. »

Session de rattrapage.

Pensait-elle qu'il avait encore quinze ans pour se plier à ses exigences ?

« Bien sûr. Dès que je serais sur pieds. » accepta-t-il, sachant très bien que la promesse ne valait rien.

Pourrait-il encore se transformer avec des nerfs endommagés ? Nox n'était déjà pas très habile en vol, il ne voulait pas penser à ce que cela donnerait avec des ailes qui ne cesseraient de trembler.

McGonagall, cependant, ne le connaissait que trop bien.

« Vous vous remettrez, Severus. » décréta-t-elle avec conviction. « Un autre que vous… Vous savez pertinemment qu'un autre que vous serez confiné à Sainte Mangouste, sans espoir d'en sortir. Vos blessures étaient telles… »

Elle ne termina pas sa phrase mais, à la manière dont elle secoua à nouveau la tête, il n'eut pas besoin d'entendre le reste. Ils avaient craint des séquelles autrement plus graves. Et, rationnellement, il savait qu'il avait été chanceux, que cela aurait pu être bien pire… Rationnellement. Lorsqu'il tentait de soulever une main en revanche… Il ne ressentait que dégout, terreur et rage.

« Il est tard, Minerva. » remarqua-t-il, avec plus d'hostilité qu'elle n'en méritait. « Vous devriez aller vous coucher. »

Elle avait certainement l'air d'en avoir besoin. Comme Harry et Black, elle avait des cernes et ne paraissait pas en pleine forme.

« Dès qu'Albus sera revenu. » contra-t-elle, balayant sa réponse d'un geste de la main.

« Ah, l'enterrement… » se souvint-il avec un temps de retard.

« Oui. » soupira-t-elle avec tristesse. « L'enterrement… »

Ils ne l'enterreraient pas, cela dit, songea Severus, pas avec le risque à présent démultiplié d'Inféris. Ils le brûleraient. Il y aurait probablement une veillée ensuite. Cela prendrait du temps…

« Vous allez devoir me trouver un remplaçant. » lâcha-t-il, peu enclin à parler de funérailles lorsqu'il avait échappé à la mort de si près. « Je crains que la malédiction du poste de Professeur de Défense n'ait eu raison de moi. »

« J'ai déjà pourvu le poste. De manière provisoire. » répondit-elle. « Il est entendu que vous le retrouverez dès que vous vous sentirez en état de reprendre les cours. De même, Horace a réinvesti le bureau du Directeur de Maison mais a insisté sur le fait qu'il ne serait que trop heureux de vous le restituer en temps et en heure. »

Il jeta un coup d'œil à ses mains et ravala la réplique acerbe qui lui brûlait les lèvres. Comment pourrait-il enseigner la Défense – sans parler des Potions – dans cet état ?

« Il y a des notes et des plans de cours dans mon bureau que vous pourriez trouver utiles. Harry sait comment passer les protections, demandez-lui de jouer les messagers. » offrit-il. « Qui a été suffisamment fou pour accepter le poste ? »

Minerva hésita et il sut qu'il n'allait pas aimer.

« Pas Lupin ? » cracha-t-il. Il aurait probablement été le meilleur candidat, n'en déplaise à Harry qui ne trouvait pas son enseignement suffisamment dur après un an passé sous son égide, mais voir le loup se pavaner dans les couloirs avait été suffisamment difficile deux ans auparavant, il n'était pas certain de le supporter, à présent.

« De façon regrettable, Remus est mieux employé au QG. » rétorqua Minerva, n'appréciant visiblement pas son ton. « Vraiment, Severus… Remus s'est enquis de votre santé plusieurs fois et… »

« Il espérait sans doute que je tombe raide. » siffla-t-il avec une mauvaise foi assumée. Le loup était bien trop noble pour espérer une chose pareille.

« Severus ! » le gronda-t-elle.

« Il a été le premier à retourner sa baguette contre moi, le saviez-vous ? » insista-t-il. « Ou bien personne ne vous a-t-il informé de la charmante scène qui s'est tenue au Square Grimmaurd ? »

« De quoi parlez-vous ? » demanda-t-elle, sourcils froncés.

« Eh bien, il semble que la moitié de l'Ordre m'ait pensé être un agent double. Ou quadruple, plutôt. » ricana-t-il avec amertume. « Cela devait arriver tôt ou tard, je suppose. Néanmoins, et c'est bien naïf de ma part, je ne m'attendais pas à ce que Lupin mène la charge, je vous l'avoue. J'aurais parié sur Maugrey. Bien sûr, il gisait mort à quelques mètres de là donc je suppose que quelqu'un d'autre se devait de reprendre le flambeau… Miss Tonks semblait certainement le penser aussi étant donné la rapidité avec laquelle elle a levé sa baguette… »

Le visage de la sorcière se ferma. « Qui d'autre ? »

« Suffisamment. » commenta-t-il. Il était plus intéressant de noter qui n'avait pas douté. Weasley et Black.

« Et Tonks… » hésita Minerva.

« Si ce n'est pas Lupin, alors qui ? » détourna-t-il la conversation.

Il ne voulait pas penser à Nymphadora. À la facilité avec laquelle elle s'était retournée contre lui uniquement pour s'effondrer dans les bras de Lupin lorsque le loup avait finalement consenti à baisser sa baguette. Le sentiment de trahison était un brasier qu'il se refusait d'alimenter. Il avait arpenté cette route trop longtemps par le passé. Un simple coup d'œil sur la gauche, à l'adolescent qui dormait toujours, lui rappela pourquoi il n'avait pas de temps à perdre en ressentiment.

Il aurait, de toute manière, été bien hypocrite de sa part de reprocher à la jeune femme d'avoir douté de lui. Certes, il avait pensé qu'ils avaient établi un véritable rapport de confiance… Cependant, la situation étant ce qu'elle était… Prudence était mère de sûreté. Il aurait sans doute réévalué les choses, lui aussi, plutôt que de faire aveuglément confiance.

C'était dans sa nature.

Il n'avait pas eu conscience que c'était dans la sienne mais peut-être avait-il déteint sur elle. Et peut-être que cela lui sauverait la vie un jour.

Harry, il le savait, comme James avant lui, considérait que douter de ses amis était le plus grand des déshonneurs. Severus n'avait jamais eu ce luxe là.

Il pouvait comprendre l'incertitude momentanée de Nymphadora et il pouvait la pardonner. Elle était une alliée trop précieuse pour être jetée aux orties pour une simple affaire de rancune.

Non… Il ne lui en tiendrait pas rigueur bien que la pilule soit dure à avaler. C'était le jeu lorsqu'on était espion… Et il était un excellent espion. Qu'elle l'ait soupçonné l'espace d'un instant d'être parvenu à tromper son monde à une telle échelle était presque un compliment au fond.

McGonagall l'observa quelques instants et puis soupira. « Sirius Black. »

Elle s'attendait visiblement à une explosion de sa part, il se contenta d'un hochement de tête approbateur. Black était le choix logique, à défaut d'être le meilleur.

De plus, Severus n'avait rien contre l'idée d'avoir un allié supplémentaire au sein de l'école.

Surtout un qui voudrait protéger Harry autant que lui.

°°O°°O°°O°°O°°

Severus se réveilla dans un sursaut, cherchant automatiquement McGonagall du regard, ne s'étant pas rendu compte s'être assoupi. Il était tard, visiblement. Les bougies avaient été soufflées et la seule clarté venait de la lune.

Harry était toujours endormi. Il avait roulé dans son sommeil et la moitié des parchemins étaient à présent éparpillés par terre. Le Professeur doutait que Granger l'en remercie.

Son attention se porta toutefois vers l'homme qui était en train d'étaler une crème épaisse et froide sur son poignet, dans la pénombre. Il ne put retenir un sifflement de douleur malgré ses efforts.

« La Marque saigne. » murmura Dumbledore, en terminant d'appliquer ce que Severus, à l'odeur, identifia comme étant un baume apaisant. Le Directeur fit apparaître une longue bande de gaze d'un coup de baguette et l'enroula autour de son avant-bras avec précaution.

Il le laissa faire, peu à l'aise mais incapable de nier que le baume soulagea presque immédiatement la douleur.

« La Marque sera un problème. » marmonna-t-il.

Il n'y avait aucune raison de se voiler la face sur ce sujet… Lorsqu'il serait un peu plus reposé et qu'il lui serait possible de reconstruire ses boucliers… Peut-être parviendrait-il à occluder la douleur… En attendant, il n'avait aucun doute que le Seigneur des Ténèbres ne reculerait devant rien pour lui faire payer sa trahison.

Il n'en eut qu'un bref aperçu avant qu'elle ne disparaisse sous les bandages mais si la Marque était d'un noir d'encre, son contour était d'un rouge vif, la peau craquelée et boursoufflée… La Marque ne le tuerait pas mais elle pouvait le laisser à l'agonie.

Au point où il en était, peut-être aurait-il été plus judicieux de simplement se couper l'avant-bras. Il y avait des compensations magiques à la perte d'un membre. Il était certain que Dumbledore aurait pu lui métamorphoser quelque chose de semblable…

Le vieux sorcier lui jeta un coup d'œil réprobateur, comme s'il avait lu dans ses pensées – et, peut-être avait-il lu dans ses pensées – et noua le bandage d'un coup de baguette, avant de nettoyer les tâches de sang d'un geste distrait de la main.

« Je n'ai jamais pensé que vous y retourneriez, Severus. » déclara doucement le Directeur.

« Alors vous me connaissez fort mal. » grinça-t-il, luttant contre le sommeil qui voulait à nouveau l'emporter.

« C'est ce que prétend Minerva. » répondit Albus, avec un sourire bienveillant avant de secouer la tête. « Peut-être répartit-on trop tôt… »

Il leva les yeux au ciel.

« C'est aussi ce que prétend Minerva. » commenta-t-il.

« Peut-être devrions-nous l'écouter davantage. » plaisanta le Directeur. « Elle est pleine de sagesse. »

Severus préféra ne pas se prononcer et grogna simplement ce qui aurait pu être un assentiment aussi bien qu'une réprobation.

Albus plaça une main sur son épaule, attentif à ne pas aggraver ses blessures.

« Il y a une jeune femme dans le couloir qui est impatiente de vous voir. » déclara-t-il d'un ton volontairement neutre mais qui cachait mal, pourtant, un amusement certain. « Je viens en émissaire car elle n'est pas certaine d'être la bienvenue. »

Il aurait préféré attendre d'être davantage maître de lui-même pour cette conversation mais il supposait que c'était tout aussi bien d'en finir au plus vite.

« Je l'ai connue plus courageuse. » remarqua-t-il. Par réflexe, il leva la main pour se frotter les yeux mais la laissa bien vite retomber lorsque le manque de contrôle qu'il avait sur ses avant-bras se rappela à lui.

« Loin de moi l'idée de m'immiscer dans votre vie privée, Severus… » hasarda le vieux sorcier.

« Depuis quand ? » ironisa-t-il.

Albus ne sembla pas en prendre ombrage, se contentant de tapoter amicalement son épaule.

« Elle a été une de vos défenseurs les plus acharnés, ces derniers jours. » l'informa le Directeur. « Ma foi… Elle a même remis Scrimgeour droit dans ses bottes lorsque notre cher Ministre a émis quelques doutes sur vos allégeances… »

« Poufsouffle. » marmonna-t-il.

« Vous pouvez être rancunier… Ne jetez pas tout cela aux orties pour un simple instant d'égarement. » conseilla Albus.

Il n'y avait rien à jeter aux orties, mais cela il se refusa à l'expliquer à son mentor. Cela ne le regardait pas.

« Elle peut entrer. » grommela-t-il parce qu'il semblait que le Directeur voulait un consentement explicite. Le vieil homme approuva cette décision d'un hochement de tête et s'éloigna. « Albus ? » le rappela-t-il.

« Oui ? » s'enquit l'homme, les sourcils levés.

« Dites lui d'être plus prudent. Ce qu'il a fait, bien que j'en apprécie l'intention, était stupide. » lâcha-t-il, sans s'embarrasser de précisions. Albus comprendrait qu'il faisait référence à Lucius. « Et dites lui également que je payerai ma dette. »

Il protégerait Draco autant qu'il le pourrait.

Une vie pour une vie.

Ce n'était pas sa première dette d'honneur.

Albus acquiesça en silence et quitta l'infirmerie. Il ne fallut pas attendre longtemps avant qu'une silhouette bien plus fine et élancée ne se glisse dans l'embrasure des portes qui se refermèrent magiquement derrière elle.

Nymphadora sembla hésiter l'espace d'une seconde puis avança vers le lit d'un pas déterminé qui aurait sans doute été plus impressionnant si elle n'avait pas trébuché sur une dalle mal scellée. Elle se rattrapa à un chariot et manqua envoyer valdinguer tout ce qui se trouvait dessus et probablement réveiller tout l'étage.

Ce ne fut que par miracle qu'elle parvint à le stabiliser.

Malgré lui, il ne put empêcher ses lèvres de tressauter dans un sourire qu'il ravala bien vite.

Agacée par sa propre maladresse et ayant probablement aperçu le rictus en dépit de la pénombre, elle soupira.

« Pas un mot. » l'avertit-elle.

« Je vois qu'il ne t'a pas fallu bien longtemps pour cesser de jouer les demoiselles effarouchées qui se cachent derrière le Directeur. » se moqua-t-il. « Tant mieux, ce rôle ne te va pas. » Il jeta un coup d'œil à Harry. Outre qu'il ne souhaitait pas troubler son sommeil, il ne désirait pas non plus de témoins pour la discussion qui suivrait. Irrité de sa propre impotence, il grimaça. « Peux-tu… »

Elle jeta suffisamment de sorts pour s'assurer que personne ne les surprendrait avant même qu'il ait terminé sa requête. Sa mère rôdait encore dans l'infirmerie… Sans doute ne voulait-elle pas risquer de mauvaises surprises elle non plus.

La chaise destinée aux visiteurs était vacante mais la jeune femme ne s'y installa pas, préférant venir se percher à même le matelas, au niveau de son torse, prenant garde à ne pas le remuer de trop.

D'un coup, ce fut comme si elle perdait toute contenance. Ses yeux gris se remplirent de larmes et elle tourna et retourna distraitement sa baguette entre ses doigts comme elle en avait l'habitude lorsqu'elle était nerveuse.

« Je suis désolée… » murmura-t-elle. « Severus… »

« Inutile. » l'interrompit-il.

Elle secoua la tête, une supplique dans la voix. « Je ne savais plus ce que je faisais ce soir là… Je sais que ce ne sont que des excuses mais… Fol'Œil… Tu comprends, c'est… C'était… Je ne savais plus ce que je devais croire ou pas. Je n'aurais jamais dû douter de toi. Je sais que c'est impardonnable. Je sais que j'ai trahi ta confiance. Je sais que… Severus, je suis tellement, tellement désolée. »

« Ce n'était pas le plus grand moment de fierté pour ta Maison. » commenta-t-il. « Cependant, j'ai toujours dit que tu aurais eu ta place dans la mienne… »

« Je m'en veux tellement. » murmura-t-elle. « Je sais que j'ai probablement tout foutu en l'air mais… »

« Cesse ces jérémiades. » grommela-t-il, mal à l'aise. « Je ne te blâme pas. » Ce qui aurait suffit à un Serpentard mais à voir la culpabilité qui crispait ses traits… Il soupira. « Je te pardonne, si tu préfères. »

L'espace d'une seconde, elle ne parut pas le croire, puis son visage s'éclaira et elle posa la main sur sa joue, écartant les mèches sombres de son visage, avant de retracer du pouce l'os de sa pommette. Il se laissa aller à la caresse par réflexe avant de se reprendre et de se racler la gorge, agacé d'avoir développé tant d'habitudes en si peu de temps.

« Comment va Lupin ? » lança-t-il, et c'était peut-être cruel mais il prit plaisir à la voir se figer, surprise sans doute qu'il en sache autant. Le souvenir de la manière dont elle s'était laissée aller dans les bras du loup alors même qu'elle venait de douter de lui revint, vivace.

Il n'était pas étranger au goût de regret qui lui envahit la bouche.

Elle retira sa main comme si son contact l'avait brûlé et baissa les yeux, les joues rougies. De honte ou d'embarras, il ne savait trop.

Il prit pitié d'elle.

« Nous ne nous sommes rien promis. » lui rappela-t-il. « Tu ne… »

« Ce n'était qu'un baiser. » lâcha-t-elle, en se passant une main dans les cheveux – châtain, il ne put s'empêcher de le remarquer. « Peut-être un peu plus, d'accord. Mais il ne s'est rien passé de plus. Je ne… »

« Tu ne me dois rien, Nymphadora. » l'interrompit-il, peu enclin à entendre les détails. « Tu es libre. »

Un éclair de douleur passa sur son visage, ses mains serraient sa baguette si fort qu'il craignit presque qu'elle la brise accidentellement en deux…

« Severus… » souffla-t-elle. « Je t'en prie… »

« Tâche d'être prudente, cependant. » l'interrompit-il, peu enclin à écouter ses excuses. « La potion Révèle-Loup ne rend pas le loup-garou moins dangereux et, crois le ou non, je n'ai aucune envie de te voir blessée. »

Ce n'était pas la première fois qu'une femme lui préférait un Maraudeur. La différence était que, cette fois, il n'avait jamais été suffisamment idiot pour y croire totalement. Il avait apprécié les moments qu'ils avaient partagés, non seulement ceux qu'ils avaient volés et qui l'avaient, l'espace d'un instant, aidé à se souvenir qu'il était toujours jeune en dépits du poids qui pesait sur ses épaules, mais, également, les moments plus incongrus. Les sortilèges qu'il lui avait appris, souvent un simple prétexte pour la toucher plus longtemps, prétexte au travers duquel elle voyait clair mais faisait semblant de croire…

« Severus. » insista-t-elle.

Son attitude avait changé, elle semblait presque amusée, à présent. Cela le fit grimacer d'agacement. Voilà qu'elle se moquait. Il aurait dû s'y attendre…

« Lupin n'est pas beaucoup plus stable qu'il l'était il y a un mois. » cracha-t-il. « Je doute qu'il te fasse du mal, cependant tu dois comprendre, qu'en acceptant sa part animale… »

« Severus, c'est fini. » l'interrompit-elle.

Il leva les yeux au ciel.

« Oui… » ironisa-t-il. « J'avais saisi sans que tu ais besoin d'expliciter, merci, Nymphadora. »

« Non. » Elle secoua la tête, un sourire aux lèvres. Et, vraiment… « C'est fini, entre Remus et moi. Pour de bon, je veux dire. Et, Severus… Je sais ce qu'on avait dit mais… Peut-être qu'à partir de maintenant on devrait se devoir des comptes. »

Il lui fallut plusieurs secondes pour comprendre ce qu'elle essayait de dire.

« Oh. » lâcha-t-il, d'un ton faussement détaché.

Il ne trouva rien d'autre à dire, pris de cours par un retournement de situation qu'il n'avait pas vu venir. Qu'une femme le quitte pour un Maraudeur n'était pas sans précédent, qu'une femme quitte un Maraudeur pour lui

S'il s'était s'agit de n'importe qui d'autre, il aurait peut-être douté de ses intentions, l'aurait soupçonnée de chercher à le manipuler ou de vouloir lui jouer un tour cruel… Nymphadora, cependant, ne cessait de le surprendre et elle avait su faire taire sa méfiance instinctive dès la première nuit qu'ils avaient passé ensemble.

Elle n'était pas le genre de femme qui prenait plaisir à torturer un homme. Elle ne s'enorgueillissait pas de ses conquêtes. Elle était sincère. Lorsqu'elle se donnait, elle se donnait pleine et entière. Il y avait une certaine naïveté chez elle, en dépit de tout, que Severus trouvait charmante. Une lueur qui attirait sa part de ténèbres. C'était sans doute très cliché, trop pour lui peut-être, et pourtant, il n'avait aucune envie d'y résister.

« Oh ? » répéta-t-elle, un brin nerveuse.

« Ce n'est pas… » hésita-t-il. « Cela ne me semble pas inacceptable. »

Elle lâcha un soupir qui se disputait au rire et se pencha pour un baiser auquel il se laissa aller sans regret. Ses lèvres étaient douces et une part de lui s'apaisa à leur contact. Il leva instinctivement la main pour caresser son visage, oublier l'espace d'un instant que…

Il grimaça et ne put retenir un léger grognement de douleur, ce qui mit un terme aux effusions.

Elle recula, une expression inquiète sur le visage. « Tout va bien ? »

Ses cheveux étaient à nouveau rose bonbon, remarqua-t-il distraitement, et cela lui fit bien plus plaisir que la situation ne l'exigeait.

« Peut-être devrais-tu reconsidérer ton choix… » grommela-t-il avec une dérision amère. « Tu es trop jeune pour t'attacher à un infirme. »

Il fit l'effort de contracter à nouveau son bras pour soulever sa main mais fut incapable de la garder en l'air bien longtemps. Ses muscles étaient trop douloureux et les soubresauts imprévisibles de ses doigts bien trop gênants pour qu'il s'entête. Elle captura sa main entre les siennes, retraçant distraitement ses articulations avec son pouce.

« Ça va forcément s'arranger… » déclara-t-elle. Elle fit de son mieux mais il détecta tout de même le soupçon d'horreur dans sa voix.

« Pas à en croire ta mère. » répliqua-t-il. « Je devrais m'estimer chanceux de parvenir à tenir à nouveau une baguette, je suppose. »

« Tu es Maître des Potions. » souffla-t-elle, sans plus s'embarrasser de dissimuler son trouble. « C'est toute ta vie. »

Et c'était bien la première qui, non seulement comprenait, mais en plus s'en souciait.

« Plus maintenant. » lâcha-t-il avec regret.

Elle secoua la tête. « Et… Ta potion ? Tu travaillais sur une potion qui réparait les effets de l'Endoloris… »

« Je n'ai jamais eu véritablement le temps de la tester. Elle aurait sans doute besoin d'ajustements… » répondit-il dans un bref haussement d'épaules qu'il regretta aussitôt parce qu'il réveilla la douleur dans son torse. « Ta mère refuse de me l'administrer quoi qu'il en soit. Il semble qu'elle n'ait confiance qu'en des traitements homologués par le Ministère. »

Nymphadora eut une moue agacée. « Tu penses que cette potion pourrait aider ? Sans risquer de t'empoisonner ? »

« Cela ne coûterait rien d'essayer. » soupira-t-il avec un regard noir pour la main qu'elle tenait toujours entre les siennes. « Ces tremblements… Une dose de potion tous les jours pourrait sans doute les réduire… »

Il n'était pas suffisamment idiot ou naïf pour penser pouvoir récupérer le plein contrôle de ses mains… L'art subtil et précis des potions lui serait désormais inaccessible… Toutefois… Son objectif était davantage de parvenir à se servir à nouveau de sa baguette avec la même aisance que par le passé.

« Je vais aller la chercher. » offrit-elle.

Il soupira. « Les protections… »

« Oh, je sais déjouer tes protections… » l'interrompit-elle, balayant l'objection d'un geste de la main. « Je t'ai vu les poser suffisamment de fois. »

Elle sauta du lit et déposa un bref baiser sur ses lèvres avant de disparaître entre les portes de l'infirmerie. Il tenta de l'attendre, étudiant la silhouette endormie du Gryffondor, heureux que le garçon ne se soit pas réveillé car la situation aurait été difficile à expliquer, mais finit par somnoler, irrité par le peu de contrôle qu'il avait sur son propre corps. Il lui arrivait habituellement de passer des jours sans dormir, pourtant il était incapable de résister à la fatigue pesante à cet instant. Il était également tentant de céder au sommeil qui le délivrerait pour quelques temps de la douleur latente.

« Hey. »

Il sursauta légèrement, rouvrant les paupières, à peine rassuré lorsqu'il se rendit compte, dans un état second, que ce n'était que la jeune femme. Elle porta la fiole à sa bouche et il en avala la moitié, toussant légèrement lorsqu'il eut terminé.

« Il n'y en a pas beaucoup. » remarqua-t-elle. « Il faudra trouver quelqu'un pour en préparer. » Elle hésita. « Est-ce que tu penses que… »

« Non. » coupa-t-il, devinant où elle voulait en venir. « Cela demande plus de dextérité que tu n'en as. »

« Si je me souviens bien, tu n'as rien trouvé à redire à ma dextérité dernièrement. » bouda-t-elle brièvement. « Je peux toujours soudoyer Slughorn… »

« Non. » protesta-t-il encore. Slughorn était un excellent Maître des Potions – un piètre enseignant mais un grand maître – cependant Severus ne lui faisait aucune confiance. Il passa en revue la maigre liste des élèves qu'il estimait prometteurs qui pourraient contre espèces sonnantes et trébuchantes – ou quelques points pour leur Maison – lui rendre ce service. Les jumeaux Weasley auraient été son premier choix car ils étaient probablement ses meilleurs élèves. Mais les jumeaux étaient trop dissipés et avaient un style personnel déjà prononcé qui les poussait à ignorer ses instructions pour suivre leur instinct. Cela ne fonctionnerait pas. C'était sa vie qui se jouait et il devait avoir pleinement confiance. Il devait trouver quelqu'un qui suivrait ses instructions à la lettre mais saurait s'adapter si le besoin s'en faisait sentir. Harry avait fait des progrès mais pas à ce point là… Non… Restait… « Granger. »

« Hermione. » confirma-t-elle. « Je m'en occupe. »

« Merci. » lâcha-t-il, renonçant à lutter contre ses paupières trop lourdes qui voulaient se refermer.

Il sentit la caresse sur sa joue et sourit légèrement, plus franchement qu'il ne l'aurait fait s'il avait été tout à fait éveillé.

« Tu es vivant, c'est tout ce qui compte. » murmura-t-elle. « Le reste… On trouvera des solutions pour le reste, je te le promets. Ça va s'arranger. »

Il y avait tellement de conviction dans sa voix…

C'était bien la première qu'il croyait.