Hello!

Petites précisions:

On est loin d'être à la fin, les gens, j'ai jamais dit qu'on arrivait au terme de l'histoire. J'ai peur de vous avouer qu'on vient à peine de passer le milieu (du moins selon mes estimations).

Avec Hogwarts Legacy qui sort cette semaine, je vais faire au mieux pour sortir le 55 la semaine pro mais on va pas se mentir je pressens que je vais être extrêmement occupée haha (cela dit c'est l'avantage de travailler dans un milieu qui grève beaucoup en ce moment).

Et maintenant, roulement de tambour, chose promises chose due, mes trois théories préférées sur l'espion:

Numéro 3, en pas du podium, nous avons... Masque. J'avoue que j'adore l'idée de Masque étant un Animagus secret (et qui sait, hein? Ce chat a clairement des secrets) mais je ne vais pas faire durer le suspense, si ce chat a un don pour rentrer dans des pièces fermées c'est qu'il a sûrement ses habitudes. Les chats font des trucs des fois, c'est à halluciner. Enfin... Je ne vais pas vous mentir, non, Masque n'est pas un sorcier qui se fait passer pour l'animal de compagnie de Severus, c'est juste un chat, probablement une race magique, et plutôt intelligent.

Numéro 2: les portraits. Ah ça j'aimais tellement que j'ai failli tout changer pour suivre cette théorie là. Mais non plus. Les portraits c'est surtout la méthode Dumbledore pour espionner les gens en toute impunité mais Vodly ne l'a pas encore volée ;)

Numéro 1: Plus récente mais non moins brillante... Kingsley. C'était tellement argumenté comme théorie que j'ai douté moi-même haha. Je me disais mais Kingsley serait-il le traître au final? Non, non, pauvre homme, il ne l'est pas.

Mention spéciale pour Gellert en grand maître d'orchestre dans les coulisses parce que ça aurait eu de la gueule.

Sinon, je sais qu'il reste beaucoup de zones d'ombre dans l'histoire d'Anthony. Pourquoi s'est-il allié aux Mangemorts etc. On aura les réponses. Ah, je clarifie aussi un truc parce que j'ai lu deux reviews dans ce sens: ses parents ne se battaient pas contre les Mangemorts, hein, ils étaient là au mauvais endroit au mauvais moment sur le Chemin de Traverse. Mais on ne sait pas s'ils avaient une opinion politique ou autre.

J'espère que vous aimerez ce chapitre!

Enjoy & Review!


« There will be hatred. There will be war. The country will fight itself to pieces. It will starve its people, ravage its land, poison its breath. Shanghai will fall and break and cry. But alongside everything, there has to be love—eternal, undying, enduring. Burn through vengeance and terror and warfare. Burn through everything that fuels the human heart and sears it red, burn through everything that covers the outside with hard muscle and tough sinew. Cut down deep and grab what beats beneath, and it is love that will survive after everything else has perished. »
Our Violent Ends – Chloe Gong

« Il y aura de la haine. Il y aura une guerre. Le pays se détruira jusqu'à ce qu'il ne reste que des miettes. Il affamera ses habitants, ravagera ses terres, empoisonnera son air. Shanghai tombera et se brisera et pleurera. Mais, au milieu de tout ça, il y aura forcément de l'amour – éternel, immortel, tenace. Brûlez la vengeance et la terreur et la guerre. Brûlez tout ce qui alimente le cœur humain et le forge jusqu'à le faire rougir, brûlez tout ce qui le recouvre de muscles durs et de tendons résistants. Taillez profondément et attrapez ce qui bat là-dessous et c'est l'amour qui survivra lorsque tout le reste aura péri. »
Our Violent Ends – Chloe Gong


Chapitre 54 : After Everything Else Has Perished


En moins d'une fraction de seconde, ce fût le chaos le plus total dans le tunnel.

Il y eut un mouvement de foule, les cris paniqués couvrirent les appels au calme de Trelawney, tout le monde se bousculait, cherchait à fuir…

« Évacuez les premières années ! » hurla quelqu'un. Un des rares sixièmes années non Serpentard qui restaient probablement.

Ça aurait été un plan sensé, songea Draco, en faisant de son mieux pour rester sur ses pieds, si qui que ce soit avait été en mesure d'écouter ou de réfléchir. Plusieurs élèves, parmi les plus jeunes, tombèrent au sol… Personne ne s'attarda pour les ramasser ou essaya d'éviter de leur marcher dessus.

« Putain… » jura-t-il, en poussant Astoria plus près du mur, où, il l'espérait ils seraient moins en danger d'être happé par la foule.

Peine perdue.

Il semblait y avoir deux courants contradictoires, l'un emportant les élèves dans la direction d'où ils étaient venus, l'autre allant vers les Mangemorts. Mais le tunnel était si étroit, il fallait se battre pour passer.

Quelqu'un le heurta délibérément ou non entre les omoplates et il perdit l'équilibre…

La seule chose qu'il put faire fût de lâcher Astoria avant de l'entraîner avec lui dans sa chute. Il chercha immédiatement à se relever, sachant que s'il restait au sol, il était mort. Si les Mangemorts ne l'achevaient pas, les autres élèves le feraient.

Ce n'était pas aussi facile que cela aurait pu le paraître de se remettre debout au milieu d'une foule en panique. Il parvint à garder une prise sur sa baguette mais quelqu'un écrasa son autre main, quelqu'un d'autre trébucha sur ses jambes et s'étala par-dessus lui uniquement pour se faire piétiner par quelqu'un d'autre…

Il aurait dû suivre Granger.

La pensée lui vint, fugace et inutile.

Puis quelqu'un attrapa son bras et le hissa vers le haut… C'était toute l'aide dont il avait besoin, il s'accrocha à son sauveur, s'agrippant à ses bras quand le mouvement de foule les fit tanguer, menaçant de les renverser… Il ne reconnut le visage terrifié de Pansy qu'avec un temps de retard. De grosses larmes roulaient sur ses joues et ses cheveux habituellement impeccablement coiffés étaient tout ébouriffés.

Par réflexe, il l'attira vers lui, tâchant de la protéger de la foule par sa carrure.

« Astoria ? » s'inquiéta-t-il, haussant la voix pour se faire entendre par-dessus les cris. « Est-ce que tu as vu… »

Mais quelqu'un leur rentra dedans, l'empêchant de terminer sa phrase et ils dérivèrent avec la masse d'élèves, incapables de lutter contre la poussée.

Les Mangemorts n'avaient pas encore commencé à jeter de sorts, se dit-il, mais pourquoi se fatigueraient-ils quand la panique faisait leur travail pour eux ?

Des adolescents jouaient pourtant des coudes, luttant contre les élèves qui cherchaient à s'enfuir, leur bouchant la sortie… L'espace d'un instant, Draco pensa naïvement qu'ils voulaient défendre les plus jeunes… Puis, le fait que la grande majorité de ces élèves soient des Serpentards d'âges variés le heurta.

Et, comme pour confirmer sa vilaine suspicion, Nott apparut soudain, poussant un quatrième année de Poufsouffle pour mieux se frayer un chemin jusqu'à eux. Ou plutôt jusqu'à Pansy. Il attrapa le bras de la jeune fille, tenta de l'attirer vers lui mais leur amie était fermement accrochée à Draco.

« Viens, Pansy ! Dépêche-toi ! » cria Nott. « Les loyalistes étaient tous au courant ! On doit rejoindre les Mangemorts avant qu'ils ne commencent à abattre les branches pourries et les traîtres ! »

Pansy le regarda avec des yeux ronds, jetant à peine un coup d'œil là où attendait Greyback et ses loups-garous avec horreur.

Les Parkinsons étaient des Sangs-Purs on ne pouvait plus puristes.

Néanmoins, à la connaissance de Draco, le père de Pansy était heureux de donner raison au Seigneur des Ténèbres sans avoir jamais poussé la chose jusqu'à prendre la Marque.

Si ce que Nott disait était vrai, ce n'était pas étonnant que son père n'ait pas été mis dans la confidence. Si ce que Nott disait était vrai, alors les Mangemorts n'allaient pas se contenter d'attaquer l'école, ils allaient chercher à massacrer tous les élèves qui ne suivaient pas la doctrine ou qui se retrouveraient tout simplement au milieu.

Et ils étaient entourés de premières et deuxièmes années.

« Pansy ! » insista Nott, en tirant à nouveau sur son bras.

Un nouveau coup d'œil aux loups-garous et Pansy secouait la tête, terrifiée.

Un sixième année de Serdaigle entraîna Nott avec un aboiement de reproche. Vaguement, Draco l'identifia comme un de ses cousins. La main du cinquième année lâcha le bras de Pansy et ils furent avalés par la foule.

« Oh, Circée ! Oh, Circé ! » paniqua la jeune fille. « On va mourir ! On va… »

« Non, on ne va pas mourir. » gronda-t-il fermement, avant de lever sa baguette en l'air.

Le bruit tonitruant qui en sortit déclencha des cris mais mit un terme soudain au mouvement de panique. Il profita de la surprise des Mangemorts comme de celle de ses camarades.

« Laissez passer les premières et deuxièmes années ! Les troisièmes années, ramassez les blessés ! Les autres, en rang derrière moi !. » ordonna-t-il. « Préfets, à l'attaque ! »

L'espace d'une seconde, les yeux de la quasi-totalité de l'école furent rivés sur lui.

Il crut vraiment que ça allait fonctionner.

Nul doute que s'il avait été Saint Potter, cela aurait fonctionné.

Au lieu de ça, tout le monde se remit à courir et à hurler et, visiblement, les Mangemorts trouvèrent sa petite intervention hilarante parce qu'ils se mirent à rire pendant que les derniers enfants des familles loyales au Seigneur des Ténèbres se faufilaient entre eux.

Puis ils cessèrent de rire et attaquèrent.

Alors Draco fit la seule chose qui lui vint à l'esprit : il visa le plafond au dessus des Mangemorts.

Et il lança un confringo.

°O°O°O°O°

Il y avait davantage de Mangemorts que les estimations de Sirius l'avait laissé penser mais toujours pas autant qu'il aurait pu y en avoir.

Le parc était devenu un véritable champ de bataille où il était difficile de distinguer ami d'ennemi. La visibilité limitée par la pluie et les épais nuages qui couvraient le ciel n'aidait pas.

Severus parait et tâchait de répliquer depuis plusieurs minutes mais s'obligeait à des sorts précis, restreints, par crainte de toucher un allié par accident.

Les Détraqueurs s'en donnaient à cœur joie, fondant sur les tours d'où Molly Weasley et Fleur Delacour et leurs petites troupes bombardaient les Mangemorts sur leurs balais, attaquant les membres de l'Ordre ou les Aurors sans crier gare…

Par deux fois, déjà, Severus avait manqué se faire soulever par une de ces créatures.

Il n'avait commis l'erreur de tenter de jeter un patronus que la première fois.

Le faon avait refusé de se manifester.

Ce qui n'était pas étonnant.

Comment aurait-il pu penser à un souvenir heureux alors qu'ils étaient désormais pratiquement tous teintés de chagrin ? Il avait essayé de se concentrer uniquement sur Harry, mais il n'était pas dans le bon état d'esprit pour un sort comme ça.

Il y a plus d'une manière d'arracher le cœur de quelqu'un.

Il ne parvenait pas à cautériser le trou béant dans sa poitrine, peut importait combien il renforçait ses boucliers mentaux.

« Severus ! »

L'avertissement vint de sa droite et il tourna la tête par réflexe, vit le trait vert fuser vers lui, se jeta au sol in extremis… Il eut du mal à s'extirper de la boue, à convaincre sa jambe douloureuse de coopérer… Son bras gauche était toujours un poids mort, une douleur tangible qui faisait écho à…

Une main attrapa son bras valide, le tira sur ses pieds.

Lupin n'avait pas l'air en meilleure forme que lui. Il avait une estafilade sur la joue, la lueur ambrée dans ses yeux indiquait que le loup était davantage aux commandes que l'humain, et il avait l'air tout aussi dépassé que lui.

« Qu'est-ce qu'il s'est passé avec la sphère ? » demanda le loup, élevant la voix pour se faire entendre par-dessus les bruits de combats et de la pluie. « Où est Albus ? »

Severus secoua la tête, en signe d'ignorance. « Où est le Seigneur des Ténèbres ? »

Il jeta un bouclier large autour d'eux deux, bloqua par réflexe un sort qui venait droit sur Lupin, le laissa répliquer…

« Kingsley se battait avec lui la dernière fois que je l'ai aperçu. » répondit le loup-garou, tout en engageant un sorcier masqué d'ivoire. « Les Mangemorts ont eu des renforts mais je n'ai encore vu ni Malfoy, ni Bella, ni Peter… C'est étrange, non ? »

« Oui. » admit-il, en lui prêtant main forte. Parce que, autant le Seigneur des Ténèbres semblait avoir pensé son attaque, autant il était étrange de ne pas voir au moins un ou deux de ses lieutenants les plus intimes coordonner la batailler pour lui. « Charlie Weasley est sous Imperium. »

Cela alerta Lupin qui se tourna vers lui, offrant une cible trop tentante pour le Mangemort qui laissa son flan à découvert une demi-seconde de trop.

Severus en profita pour se débarrasser de leur adversaire, la gorge serrée.

« Le traître était Anthony. » continua-t-il. « Black se battait avec lui avant que nous soyons séparés. Je crois qu'il est toujours à l'intérieur. »

Le loup jeta un regard en arrière, vers le château qui se dressait dans leur dos, mis à mal par les potions explosives. Il y avait des crevasses dans les murs, de la fumée s'élevait, âcre et noire, vers le ciel… Une des tourelles semblait avoir pris feu mais la pluie paraissait contenir l'incendie…

« Nymphadora… » lâcha-t-il, sa voix se brisant sur le prénom. « Il a dit que… Il a dit qu'il avait ordonné à Charlie de… Il a dit qu'elle était… »

« Non. » l'interrompit Lupin, dans un grondement sourd. « Non. »

Juste au-dessus d'eux, quelqu'un lança une potion explosive de l'une des tours, visant visiblement un Mangemort, mais ne réussit qu'à enflammer la queue de son balai. Le sorcier perdit rapidement le contrôle et chutait vers eux à une vitesse alarmante.

Ils n'eurent le temps que d'échanger un regard avant de s'élancer dans des directions différentes, Severus ralenti par sa jambe.

Le Mangemort devait avoir été en possession de potions volatiles parce qu'il ne se contenta pas de s'écraser au sol, il explosa, laissant derrière lui un petit cratère dans le parc et emportant dans la mort un Auror et un autre Mangemort qui se battaient non loin.

Un peu roussi, Severus se retrancha vers le mur d'enceinte, le souffle coupé, aveuglé par la pluie et la sueur, sa jambe le portant à peine… Il s'écroula contre le mur, aux aguets…

Mais il ne semblait pas y avoir de danger immédiat.

Il pouvait s'autoriser à respirer une seconde…

Il pouvait…

Quelque chose chauffait dans sa poche intérieure.

Comment ne l'avait-il pas remarqué avant ? Senti ? Depuis quand le carnet chauffait-il ?

Ce n'était ni l'endroit, ni le moment, mais il ne pouvait pas attendre, il ne pouvait pas ne pas savoir, il ne pouvait pas…

Forcer sa main gauche à coopérer demanda un peu d'effort mais il parvint à extirper le carnet de sa poche malgré le fait que ses robes trempées d'eau et de boue collaient à sa peau. Il s'abrita sous un bouclier et un impervius, l'ouvrit, prêt à feuilleter jusqu'à…

Les pages étaient couvertes d'encre.

Il lui fallut une seconde pour comprendre.

Le sort ne reproduisait pas la couleur.

Ce n'était pas de l'encre.

C'était du sang.

Le sang de Nymphadora qui avait imprégné son carnet.

Il n'y avait pas de message… Juste son sang qui avait déclenché le sort de transfert.

Tellement de sang.

Le carnet échappa à ses doigts gourds et tomba dans l'herbe mouillée. À nouveau, il sentit ses boucliers mentaux s'écrouler sans qu'il n'y puisse rien alors qu'il imaginait… Il fit deux pas, trois… Ses oreilles sonnaient, sa vision se rétrécissait…

Il se plia en deux et vomit, frissonnant, claquant presque des dents…

Nymphadora. Nymphadora. Nymphadora.

Son nom tournait en boucle dans sa tête.

Elle était morte.

C'était vrai.

Il avait voulu une preuve et elle était là.

Tellement de sang.

Elle était morte.

Et il ne lui avait jamais dit…

Il ne lui avait jamais qu'il…

Son désespoir, sa douleur étaient si pesants qu'il ne se rendit même pas compte qu'il n'était plus seul.

Quand était-il tombé à genoux ?

Il leva les yeux, pas même surpris de trouver le Détraqueur juste devant lui, de le voir lever les mains vers sa capuche…

Une part de lui voulait tenter à nouveau de lancer un patronus.

Sans espoir, répondit le reste de son cerveau.

Nymphadora était morte.

Si une de ces choses aspirait votre âme, pouviez-vous tout de même passer le voile ? Rejoindre vos défunts ? Où étiez-vous doublement assassiné ? Éradiqué sur un plan physique et cosmique ?

Tu as promis à Harry de te battre jusqu'au bout, murmura une petite voix à son oreille.

Une voix qui ressemblait à s'y méprendre à celle de la femme qu'il aimait.

Il ferma les yeux, empoigna plus fermement sa baguette, isola sans mal la poche de ses souvenirs les plus précieux dans un recoin de son esprit : Lily, enfant, qui riait alors qu'il la poussait sur la balançoire à moitié rouillée du parc Harry qui lisait enroulé dans son plaid sur le canapé Harry qui plaisantait par-dessus un plateau d'échec Harry qui l'appelait papa sans ironie pour la première fois Harry qui acceptait le sceau des Prince avec une émotion palpable Nymphadora qui souriait un baiser qui s'égarait pas si accidentellement vers la commissure de ses lèvres Nymphadora qui riait avec lui, le drap glissant sur sa peau nue alors qu'il embrassait sa gorge, incapable de résister à la tentation une danse ridicule dans un simili de bar à la lumière trouble et changeante qui venait de sous le lac Nymphadora qui jurait de ne jamais l'abandonner…

Nymphadora qui jurait de ne jamais l'abandonner.

Le patronus ne vint pas.

Il rouvrit les yeux, sans panique mais sans satisfaction non plus. Ce n'était pas ainsi qu'il aurait souhaité mourir même s'il y avait une justice poétique à la chose.

Le Détraqueur se penchait désormais vers lui.

La fin était là.

Et, lâchement, il en était presque soulagé.

°O°O°O°O°

Bill s'éveilla en s'étouffant à moitié dans la flaque d'eau qui s'était formée sous sa joue. Il toussota tout en se redressant sur une main, portant automatiquement l'autre à l'arrière de sa tête pour la retirer pleine de sang. Sa tête l'élançait de manière alarmante et il était désorienté, les sons étaient étouffés comme s'ils venaient de très, très loin…

Il aurait pourtant fallu être aveugle pour rater les bruits d'explosions, les hurlements et les éclats des sorts qui illuminaient la grisaille.

Il lui fallut une bonne minute pour reconstruire mentalement ce qui s'était passé avant que la sphère n'implose.

La petite cours avait été balayée par le cataclysme, les bancs arrachés, les arbustes et autre végétation aplatis…

Charlie.

Charlie avait jeté un sort de mort sur Flitwick.

Flitwick était mort.

Charlie avait été couvert de sang. Peut-être le sien, peut-être pas.

Bill voulut se relever, tangua et se retrouva à nouveau à genoux, les doigts enfoncés dans la terre meuble, combattant la nausée.

Il n'était pas Médicomage mais le traumatisme crânien paraissait certain.

Charlie.

Charlie allait tuer quelqu'un d'autre ou se faire tuer.

Il ne savait pas si son frère avait trahi ou était sous influence – pitié, faites qu'il soit sous influence – mais il était hors de question qu'il perde un autre membre de sa famille ce jour là. Il prit une profonde inspiration, une deuxième, puis se repoussa en position accroupie et, lentement, se remit debout. Le monde tangua autour de lui mais il parvint à rester sur ses pieds.

« Accio baguette. » marmonna-t-il, en tendant la main.

Sa baguette vint se loger dans sa paume et il se sentit un peu mieux, un peu moins vulnérable.

Il ne voyait Charlie nulle part.

Son frère avait été plus à l'abri, au niveau de l'arche, peut-être n'avait-il pas été touché par l'implosion ? Ou, du moins, pas autant que lui l'avait été ? Il fouilla tout de même la cours par acquis de conscience, dénichant le corps de Flitwick sous un buisson.

Il dût le laisser là, sous la pluie.

D'un pas trainant mais déterminé, il rejoignit l'intérieur du château.

Il y avait des bruits de combat plus loin, pas à l'extérieur mais à l'intérieur.

Il dût se faire violence pour ne pas s'y précipiter dans l'espoir que ce serait Charlie.

Il devait être méthodique. Intelligent. Certes, ce n'était pas facile avec le crâne à moitié défoncé, mais…

Il plaça sa baguette à plat sur sa main.

« Pointe vers Charles Weasley. » exigea-t-il.

Le bout de bois tourna vers la droite.

Alors Bill suivit la piste.

°O°O°O°O°

Le hall d'entrée s'était rapidement transformé en bataille rangée et Harry n'y voyait plus très clair.

Tous les conseils de Severus et Sirius se bousculaient dans sa mémoire mais, dans un espace aussi réduit où tellement de gens se battaient en même temps, dont certains qui ne semblaient pas maîtriser leurs sorts autant qu'ils le devraient, c'était très différent de l'entraînement et, avec un léger regret, il se vit contraint de davantage se reposer sur les enseignements de Remus – à qui, visiblement, il aurait dû faire davantage confiance.

Harry campait sur la défense, se battait contre trois Mangemorts à la fois, et tentait de garder un œil sur les autres dans le même temps… Mais c'était trop difficile. Ils avaient été séparés. Certains, parmi lesquels Hermione, avaient été repoussés vers les étages. Il ne voyait plus Ron, non plus. Les Mangemorts semblaient pousser comme des champignons.

Neville se battait pas très loin de lui mais son adversaire ne tarda pas à être renversé par un énorme chien noir qui resserra ses mâchoires sur sa gorge et serra jusqu'à ce que le Mangemort ne bouge plus. Neville eut l'air sur le point de vomir puis repartit à la charge.

D'où venaient ces putains de Mangemorts ?

L'instant de distraction lui coûta.

Les trois Mangemorts qui l'entouraient n'étaient pas si bons en duels – jeunes, s'il avait dû deviner, un peu plus vieux que lui mais sans plus, bien que ce soit dur à dire vu les masques qui dissimulaient leurs visages – mais ils avaient l'avantage du nombre. L'un d'eux lança un endoloris qui l'aurait atteint en pleine poitrine s'il n'y avait pas eu un craquement soudain, accompagné d'un cri de guerre…

L'elfe apparut directement sur les épaules du Mangemort et enfonça ses pouces dans ses yeux à travers les encoches du masque jusqu'à le faire hurler – et dévier l'endoloris vers son compagnon – puis disparut dans un nouveau craquement.

Cela faisait déjà trois fois que Kreattur intervenait mais ne s'arrêtait pas suffisamment longtemps pour qu'Harry lui ordonne de rester en dehors de la bataille avant de se faire tuer.

Il élimina le troisième Mangemort d'un stupefix, jeta rapidement un incarcerem aux deux autres…

Et se tourna à temps pour voir plusieurs jeunes élèves émerger des cachots en hurlant, leur panique semblant augmenter lorsqu'ils réalisèrent dans quoi ils avaient débarqués.

La main de Sirius s'abattit sur son épaule, plus lourde et sévère que d'ordinaire.

« Reste près de moi. » ordonna-t-il dans un sifflement qui suintait la désapprobation.

Jamais encore son parrain n'avait eu l'air aussi fâché après lui.

Harry refusait de s'excuser.

Il n'avait toujours pas retrouvé Severus.

Mais un énorme loup au pelage argenté venait de quitter les cachots, s'arrêtant juste assez longtemps pour que sa vue crée davantage de panique avant de rentrer dans la danse.

Malgré son ordre précédant, Sirius le poussa en arrière avec un juron.

La seconde suivante un énorme chien noir fonçait sur le loup qui faisait deux fois sa taille.

°O°O°O°O°

Un des enfants gémit. Draco le fit taire d'un chut probablementun peu trop sec, cependant il était à bout de patience.

Et presque à bout de forces.

Pansy serrait sa main à lui faire mal, trois premières années étaient accrochées à l'arrière de sa chemise comme des canetons, quatre deuxièmes années soutenaient deux autres premières années et les rares troisièmes et quatrièmes années qu'ils avaient récupérés en route avaient l'air hagard.

Sortir de ce tunnel sans se faire toucher par un sort de mort ou se faire mordre par l'un des loups avait été l'enfer.

Les Mangemorts avaient tiré dans le tas et avaient touché plus d'un élève.

Ce n'était pas simplement un massacre, c'était une épuration.

Les loups… Les loups avaient ordre de mordre et de ramener les victimes à Greyback. Il aimait transformer les enfants, apparemment.

Draco ne s'était pas attardé pour en apprendre davantage sur le sujet.

Il avait fait la chose la plus insensée, la plus dangereuse de sa vie – encore que, non, puisqu'il ne s'était pas jeté devant un sort de mort, ce coup-ci – et avait lancé un confringo sur le plafond dans l'espoir d'enterrer vivants leurs ennemis. Ça avait un peu trop bien fonctionné.

Il avait hurlé aux autres de le suivre mais il n'était pas sûr que…

Il ne pouvait pas être sûr que…

Il était possible que quelques uns des élèves se soient retrouvés coincés sous les rochers par sa faute.

Cela n'avait pas arrêté les Mangemorts ou les loups très longtemps, de toute manière, ils étaient à leur poursuite ou à la poursuite des autres groupes qui étaient partis en courant sans s'occuper de ramasser les blessés ou d'attendre les plus jeunes qui, terrifiés, ne savaient pas quoi faire.

Il n'avait pas non plus retrouvé Astoria.

Daphné allait le tuer lorsqu'elle apprendrait qu'il avait perdu sa sœur.

Elle allait le tuer.

Si les Mangemorts qui les pourchassaient ne le tuaient pas d'abord.

Qu'était-il censé faire avec Pansy pour seul soutien ? Les quatrièmes années paraissaient trop terrifiés pour être d'une quelconque utilité…

Les cachots s'étaient transformés en labyrinthe.

Il n'avait aucune idée d'où ils étaient.

Il s'était perdu au moment où ils étaient parvenus à quitter le tunnel et il n'osait pas l'avouer à voix haute parce que les autres le suivaient aveuglément mais il n'avait aucune idée d'où ils allaient et ils ne pouvaient pas continuer à tourner en rond…

Et puis, soudain, devant eux, à quelques couloirs, il entendit des bruits de combat.

« N'allons pas par là. » supplia immédiatement Pansy, les yeux écarquillés d'effroi. « N'allons… »

« Ça pourrait être d'autres élèves. » l'interrompit Draco, en se détachant de sa poigne – et de celle des premières années tant qu'il y était. « Ou un Professeur. Reste là avec eux, d'accord ? Jette un bouclier et un sortilège de Désilusion. »

« Draco… » siffla-t-elle, visiblement paniquée. « Ne me laisse pas toute seule. Tu… »

« Tu es une préfète. » lui rappela-t-il fermement. « Tu t'en sortiras très bien. »

Il n'était pas tout à fait persuadé que c'était vrai mais il n'avait pas le choix. Il attendit qu'ils soient tous cachés sous un sort de désilusion avant de s'en jeter un sur lui-même et de se glisser dans le couloir suivant, se guidant aux sons de l'affrontement.

Le soulagement qu'il ressentit en apercevant la quatrième année brune qui se battait comme si sa vie en dépendait fût indescriptible. Peut-être que Daphné n'allait pas le tuer, après tout. À côté d'Astoria, Cassiopée Jones faisait de son mieux pour l'épauler mais même un an d'A.D. n'aurait pu transformer une troisième année en combattante aguerrie, quant aux trois premières années recroquevillées contre le mur…

Draco se glissa dans l'ombre, visant le premier Mangemort d'un sort d'emprisonnement. Il toucha sa cible, malheureusement cela attira l'attention du deuxième qui pivota vers lui et jeta un endoloris avant même d'essayer d'identifier son adversaire.

La douleur fût intense mais miraculeusement brève.

Il n'eut pas le temps de hurler.

C'était le Mangemort qui hurlait.

Parce qu'un elfe enragé lui avait arraché l'oreille d'un coup de dents et paraissait déterminé à lui crever les yeux.

Astoria lui jeta un stupefix, puis tourna sa baguette vers l'elfe qui…

« Non ! » lui ordonna Draco, alors que Kreattur sautait des épaules du Mangemort avant que celui-ci ait pu toucher le sol. « Qu'est-ce que… »

« Maître Sirius a dit à Kreattur de protéger Maître Harry et Maître Draco. » expliqua l'elfe, en s'inclinant profondément devant lui. Étant donné ce qu'il venait de faire et la matière visqueuses sur ses doigts, c'était un peu incongru. Comme un salut après un spectacle davantage qu'un signe de respect. « Maître Harry est en danger. Kreattur doit partir. Maître Draco doit rester en sécurité, s'il vous plaît. Kreattur est un bon elfe mais Kreattur ne peut pas être à deux endroits à la fois. »

Dans un craquement, l'elfe disparut avant que Draco ait pu lui ordonner d'aller chercher de l'aide.

Relativement certain qu'ils n'allaient pas se faire à nouveau attaquer dans les minutes qui suivraient, il se tourna vers Astoria qui se jeta dans ses bras sans aucun décorum. Il la serra fort, s'autorisant à poser son menton sur ses boucles brunes l'espace d'une seconde et à respirer.

Astoria était vivante.

Daphné n'allait pas le tuer.

Il la relâcha pour se tourner vers Jones et se vit faire l'objet d'une autre étreinte un peu désespérée.

Si même les Serpentards se mettaient à s'enlacer à la moindre occasion comme des Poufsouffles ou des Gryffondors, bougonna-t-il intérieurement, en lui rendant pourtant son accolade. La troisième année respirait vite et il était clair qu'elle avait eu peur.

Compréhensible.

Les premières années recroquevillées contre le mur ne paraissaient pas en meilleur état mais parurent tous rassurés de le voir.

Quand était-il devenu la coqueluche des premières années exactement ?

Ah oui… La Trêve… Ombrage… Autant d'évènements qui paraissaient à des années lumières.

Il jeta un patronus, regardant le lion argenté avec le même mépris qu'à l'accoutumée. « La voie est libre. »

Il l'envoya vers Pansy et s'assura que personne n'était trop sérieusement blessé le temps qu'elle arrive avec le reste de leur petite troupe. Il y eut des exclamations soulagées de parts et d'autres. Serpents, Aigles, Blaireaux ou Lions… Cela ne semblait plus avoir d'importance. Ils étaient simplement heureux de trouver quelqu'un qu'ils connaissaient, qui n'était pas hostile et, par-dessus tout, quelqu'un qui était vivant.

« Bonne nouvelle, je sais où on est. » murmura-t-il en aparté, pour Pansy.

Elle lui jeta un regard noir. « Parce que tu étais perdu ? »

Il leva les yeux au ciel.

Personne n'appréciait son génie dans cette école.

°O°O°O°O°

Albus émergea avec difficultés et un mal de tête carabiné.

La première chose qu'il vit lorsque ses paupières cessèrent de papillonner fût la baguette de Gellert, à quelques centimètres de sa main inerte.

Le chagrin le heurta comme un dragon en charge et il referma les yeux.

Puis les bruits de combats le tirèrent brutalement de sa torpeur. Combien de temps avait-il été inconscient ? Combien de temps…

Il chercha sa connexion avec Poudlard, la trouva ténue mais bel et bien présente… L'école souffrait mais faisait son possible pour se défendre. Les protections étaient inactives sur le domaine mais s'étaient automatiquement remises en place autour des zones les plus importantes : les salles communes, son bureau et l'infirmerie. En plus de ça, Poudlard tentait d'étouffer plusieurs incendies, et, surtout, de protéger les…

Merde.

Merde. Merde. Merde.

Il n'était pas prompt à la vulgarité mais rien d'autre n'aurait correctement exprimé la situation, à cet instant précis.

Il y avait des enfants dans l'école.

Beaucoup trop d'enfants.

Un piège, ils étaient tombés dans un piège. C'était pour ça que Tom ne s'était pas empressé de briser les protections, pour laisser à ses Mangemorts le temps de se mettre en place.

Il se remit debout, prit le temps de réfléchir, se frottant la bouche… Il fit quelques pas vers le parapet extérieur, se figea en constatant l'ampleur des dégâts… La bataille faisait rage et, là, dans le parc, au loin…

Une silhouette qu'il s'avait appartenir à Kingsley parce qu'il reconnaissait son style de combat tenait tête à Voldemort.

Mais pas seul.

Abelforth se battait juste à côté de lui. Un large cercle s'était formé autour d'eux…

Il se détourna, le cœur au bord des lèvres.

Il devait rejoindre le parc, prendre la relève de son frère.

Gellert était mort.

Il ne supporterait pas de perdre…

Ses yeux s'arrêtèrent sur la jeune femme qui gisait au sol, apparemment toujours vivante, quoi qu'à peine, mais il ne s'arrêta pas. Il ne pouvait pas se le permettre.

Il descendit les marches quatre à quatre, s'élança dans le couloir, sentit un mouvement sur sa gauche avant d'atteindre l'embranchement suivant et leva sa baguette, un sort offensif sur les lèvres…

Horace leva sa main libre et sa baguette, une expression de soulagement pure se peignant immédiatement sur son visage lorsqu'il l'aperçut.

« J'étais à ta recherche. » expliqua le Maître des Potions. « Les élèves… »

« Je sais. » l'interrompit-il.

Horace acquiesça. « Pomona fait de son mieux pour tenir l'escalier sud. Elle a récupéré quelques-uns de ses Poufsouffles pour l'aider. Je vais à l'infirmerie en faisant le grand tour. Je ramènerai avec moi tous les enfants que je trouverai en route. »

Albus allait approuver ce plan puis hésita. « Pourrais-tu faire un crochet par la tour d'astronomie avant ? Tonks est blessée. Je crains que ce ne soit fatal mais je lui ai donné deux fioles de reconstituant sanguin… Si elle tient encore un peu… »

« L'Auror de Severus ? » releva Horace.

Tonks aurait probablement protesté d'être ramenée à cette partie de sa vie comme si elle n'était pas une sorcière à part entière mais il n'avait pas le temps de discuter.

« Oui. » confirma-t-il.

« En haut de la tour d'astronomie ? » gémit presque le Professeur de Potions.

« S'il te plait. » insista-t-il. « Sais-tu où est Minerva ? »

« Aucune idée. » admit son collègue. « Mais la connaissant, probablement dans le parc en train de se battre contre cinq Mangemorts à elle toute seule. »

Il ne s'attarda pas davantage, cherchant à rejoindre le rez-de-chaussée au plus vite. Pourtant, lorsqu'il entendit un rire gras dans un couloir adjacent et une petite voix trop fluette jeter un protego qui manquait singulièrement d'intention, il s'y précipita sans hésiter.

Le Mangemort qui avait acculé la première année passa par la fenêtre avant d'avoir seulement compris ce qui se passait. La petite fille hurla de terreur puis l'aperçut et explosa en sanglots qui secouèrent son petit corps. Rien ne remettait en perspective le tragique d'enfants pris dans une guerre comme de voir une gamine trembler de peur.

Il lui fallut quelques secondes pour retrouver son nom.

Zoé, se souvint-il brusquement. Zoé Barnaby. Serdaigle. Première année. Née-Moldue.

Et qui avait fait partie de la chorale disparue pendant des mois, en plus de ça.

Il approcha lentement, s'efforçant d'avoir l'air le moins effrayant possible.

« Tout va bien, Zoé. » offrit-il.

« Professeur Dumbledore ! » s'exclama-t-elle finalement, à travers ses larmes. La seconde suivante, deux bras étaient fermement attachés à sa taille alors que la fillette pleurait dans sa barbe.

Un peu mal à l'aise, Albus lui tapota le dos, réfléchissant à ce qu'il pouvait faire d'elle pendant qu'il allait rejoindre les combats, où était l'endroit sûr le plus proche…

Ce fût le moment où les armures se mirent en mouvement autour d'eux, arrachant un nouvel hurlement à la fillette que le Directeur fit taire rapidement d'une main sur la bouche. Hurler attirerait davantage de Mangemorts et, bien qu'il ne soit pas particulièrement inquiet pour sa propre sécurité, c'était tout à fait autre chose de devoir se soucier de celle d'une enfant sans défense ou presque.

« Il n'y a pas lieu d'avoir peur. » lui promit-il. « Je reconnais bien là la main créative du Professeur McGonagall. » Toutefois, si Minerva en était à appeler les armures pour défendre l'école… « Elle va gagner cette bataille à elle toute seule, sois-en sûre. »

« Je me suis perdue. » avoua Zoé, entre deux sanglots. « Je… Je ne sais pas où il faut que j'aille… Draco a dit… Draco a dit de le suivre mais j'ai trébuché et… Il y avait des loups ! Des gros, gros loups ! J'ai couru. »

« Et tu as très bien fait. » la félicita-t-il, heureux de savoir qu'au moins un préfet semblait avoir pris le commandement dans les cachots.

Draco était intelligent et suffisamment doué…

Mais pouvait-il protéger les enfants ?

Silencieusement, Albus demanda à Poudlard de l'aider autant que possible.

°O°O°O°O°

Entrer dans le château s'était avéré plus simple que Remus l'avait craint. Les grandes portes s'étaient écroulées, bouchant le hall d'entrée, mais les combats avaient laissés des trous dans les murs par lesquels il avait réussi à se glisser.

Il était au rez-de-chaussée et hésitait entre rejoindre le hall d'où il entendait de sérieux bruits de combats et se précipiter vers la tour d'astronomie comme Lunard l'exigeait lorsque le mur devant lui explosa dans une avalanche de briques sous l'impact d'un loup-garou ayant été projeté par un sort particulièrement virulent.

Il aperçut Harry qui n'aurait absolument pas dû être là, puis une boule de poils noirs qui attaqua le loup à la gorge.

Le loup l'envoya voler d'un coup de pattes arrières, les éclaboussant tous de sang au passage.

Patmol couina mais se releva, couvert de griffures, le pelage pelé par endroit, les flans se soulevant et s'affaissant brutalement…

Il ne se laissa pas hésiter.

Il n'allait pas regarder un ennemi tuer un membre de sa meute.

« Avada Kedrava ! » hurla-t-il, alors même qu'Harry jetait un sortilège de confinement qui aurait potentiellement pu retenir le loup mais pas longtemps.

Les Impardonnables étaient traitres avec les loups-garous sous forme animale et le sort de mort l'assomma à peine.

Patmol s'élança à nouveau à l'assaut, cherchant à emprisonner la jugulaire de sa mâchoire…

Remus s'avança lui aussi, profitant que Sirius ait coincé le loup à terre pour se jeter sur lui, sortir le couteau qu'il gardait dans sa botte et planter la lame dans sa gorge. Il frappa fort et ignorant l'animal qui se débattait sous lui, aidé par Patmol qui faisait de son mieux pour l'immobiliser, ramena la lame vers lui dans un arc de cercle qui demandait beaucoup de force.

Le loup-garou tressauta plusieurs fois puis devint inerte. Égorgé.

Couverts de sang, Lunard et Patmol s'écartèrent lentement du cadavre sous les yeux nauséeux de Harry.

En lui, le loup hurlait sa victoire.

« Est-ce que c'était vraiment nécessaire ? » grimaça le garçon.

« Il n'y a pas cinquante façons de se débarrasser d'un loup sous forme animale. » trancha Remus, sans remord. « Et ils sont endoctrinés. On ne les retournera pas tant que je n'aurais pas tué Greyback et pris sa place d'Alpha. »

« Oh, donc c'est un projet sérieux, ça ? » marmonna Sirius, avant de les débarrasser du sang poisseux qui les couvrait d'un sort de nettoyage.

Il n'eut pas le temps de lui répondre, les armures du couloir dans lequel ils se trouvaient s'animèrent soudain et se mirent en marche dans un alignement parfait.

« Dumbledore ? » demanda l'Animagus, avec espoir.

« McGonagall. » corrigèrent Remus et Harry, en cœur.

Il jeta un regard curieux à l'adolescent qui haussa les épaules. « Elle m'entraîne pour… autre chose. Je connais sa signature magique. »

Ils suivirent prudemment les armures qui s'engageaient vers le hall.

Étant donné les bruits métalliques qui résonnaient un peu partout, la sous-directrice semblait avoir réveillé tout le château.

Et ils comprirent pourquoi quand les armures s'élancèrent dans la bataille.

Le premier Mangemort ne se méfia pas et se vit balayé d'un méchant coup de bras qui dût briser beaucoup de côtes.

Les quelques adolescents qui se battaient dans le hall laissèrent échapper des exclamations de joie et se relancèrent à l'assaut avec d'autant plus de détermination.

Ça effraya Remus.

Trop de gamins.

Pas assez d'adultes.

°O°O°O°O°

Draco était certain que Poudlard était en train de réarranger les cachots.

S'il s'était repéré après avoir récupéré Astoria et les autres, il était certain qu'ils avaient été plus loin sous la surface qu'ils ne semblaient l'être à présent. Les couloirs s'enchaînaient sans que cela n'ait de sens comme si l'école créait des raccourcis pour eux.

Bien sûr, en temps normal, il aurait sans doute jugé la chose impossible mais…

En l'état, il prenait tous les signes d'espoir, même impossibles, si cela signifiait un répit.

Ils avaient passé deux corps déjà.

Marietta Edgecombe, il l'avait identifiée sans mal parce qu'elle était dans leur année à Serdaigle et que Chang la quittait rarement.

Le deuxième corps portait l'uniforme de Gryffondor et était suffisamment menu pour avoir été un troisième ou quatrième année, tombé à plat ventre. Draco avait simplement vérifié qu'il n'avait pas de pouls mais n'avait pas cherché à voir son visage et avait encouragé les autres à presser le pas sans regarder.

Ils tournèrent à droite en silence et, malgré l'illogisme de la chose, arrivèrent à leur salle commune.

« Ce n'est pas un bon plan. » protesta immédiatement Pansy. « N'importe quel élève plus âgé… »

« Oh, et tu as peur d'eux maintenant ? » râla Astoria. « Je croyais que c'étaient tes amis ? Miss je suis une Sang-Pure et je vaux mieux que tout le monde. »

« Toi aussi tu es une Sang-Pure, il me semble ! » rétorqua la cinquième année.

« Mais je n'ai jamais dit que le Seigneur des Ténèbres devrait prendre le pouvoir ! » s'insurgea la plus jeune, en levant le bras vers le couloir d'où ils venaient. « Tu vois ce qu'il se passe quand des tyrans veulent prendre le pouvoir ? »

« C'est sans doute une erreur. » répliqua Pansy. « Jamais ils ne s'en seraient pris à des Sang-Purs. Il… »

« Oh, grandis un peu. » cracha Draco, en jetant le mot de passe et en priant pour que ça fonctionne. La porte coulissa et il se dépêcha de faire rentrer tout le monde avant de la refermer. Il fût soulagé de sentir la vibration réconfortante d'importantes protections magiques sur la salle commune. Celles autour de Poudlard étaient tombées mais, apparemment, celles sur les salles communes devaient avoir survécu… Sans attendre, il plaqua la main sur le mur de pierre, et usa de son autorité de préfet. « Severus Snape. »

Il n'y eut pas de miracles dans les secondes qui suivirent, pas de messages, pas d'apparitions de son Directeur de Maison, mais il ne s'y attendait pas vraiment. Avec un peu de chance, ça avait suffi à alerter le Maître des Potions – s'il n'était pas mort – d'où ils étaient et il enverrait du secours.

Les autres seraient à l'abri ici.

Il se dirigea donc vers la sortie.

« Où vas-tu ? » s'écria Pansy, se relevant soudain de là où elle s'était accroupie pour inspecter une vilaine brûlure sur le bras d'un des premières années. Les gamins avaient besoin de soins mais Pansy n'était pas forcément la personne la plus patiente ou douce qu'il soit. Néanmoins, Snape ne l'avait pas choisie comme préfète pour rien.

Draco savait qu'elle était tout à fait capable de gérer une crise.

Si elle avait bien voulu s'en souvenir, toutefois…

« Il y a forcément d'autres élèves là-dehors. » lâcha-t-il. « Il ne peut pas rester que nous. » S'il ne restait qu'eux, ce serait un bien triste constat. « Ils vont avoir besoin d'un endroit sûr. »

« Tu veux juste aller chercher ta Sang-de-Bourbe. » accusa Pansy.

« N'appelle pas Hermione comme ça ! » siffla Astoria.

Il ne chercha pas à nier. Il laissa ses yeux gris glisser sur le groupe d'élèves qui, au lieu de prendre possession des lieux, s'étaient tous entassés sur un canapé ou le sol pour mieux s'agglutiner les uns aux autres.

Oui, décida-t-il, il comptait aller à la poursuite de Granger.

Mais il voulait aussi s'assurer que personne n'était coincé entre un Mangemort et un loup-garou.

Ils avaient tiré dans la masse.

Sur les premières années.

Sur des gosses.

Et les loups…

Il avait vu un loup traîner un enfant par la jambe vers Greyback.

Il n'était pas Saint Potter et il n'était pas courageux… Merlin savait qu'il n'était pas courageux. Mais il n'allait pas rester caché là s'il pouvait en sauver un ou deux.

Sans compter qu'il avait fait exploser le tunnel et…

Il n'était pas sûr.

Il n'était pas sûr de ne pas avoir touché d'élèves.

« Vous serez en sécurité, ici. » insista-t-il.

Il soupçonnait fort que Poudlard les avait guidés vers la salle commune et, en conséquence, supposait que l'endroit serait sûr comme point de replis. C'étaient beaucoup d'hypothèses et peu de preuves concrètes bien sûr, mais…

L'école était magique.

Le genre de magique qui, comme le Choixpeau, tirait quelque chose d'inanimé vers la conscience et l'intelligence. Poudlard, comme beaucoup de demeures sorcières exposées à la magie sur des générations, était vivante.

Et il supposait que Poudlard voulait, avant tout, protéger ses enfants.

« Draco. » Pansy le rejoignit en quelques grandes enjambées et attrapa son poignet pour mieux conserver son attention. « Si… Je ne peux pas les protéger. »

« Tu es parfaitement capable… » contra-t-il.

« Non, non, non… » protesta-t-elle, en secouant la tête, gardant la voix basse. « Non seulement je ne suis pas capable mais, en plus, je ne peux pas promettre que je ne les vendrais pas tous contre ma vie. » Elle jeta un regard déchiré aux plus jeunes et baissa encore la voix. « Regarde-les, ils sont sans défense. Je ne suis pas… Je ne suis pas du tout le genre de personne à qui on veut confier des gens sans défense. Tu me connais ! »

« Tu te sous-estimes. » déclara-t-il.

Encore que…

Pouvait-il entièrement lui faire confiance pour protéger les gamins si on lui proposait une meilleure alternative ?

Serpentard un jour…

Ravalant un juron, il chercha une autre solution. S'il avait pu envoyer un message, s'il avait pu…

« Kreattur ! » appela-t-il, sans être certain que cela fonctionnerait.

L'elfe l'appelait Maître mais c'était un titre de courtoisie dû à son sang Black, il n'avait aucune autorité sur lui et…

Dans un craquement, le vieil elfe apparut, l'air échevelé et la taie d'oreiller de travers. La créature semblait épuisée.

« Maître Draco est en sécurité. Bien. » déclara l'elfe sans même s'embarrasser de s'incliner. « Maître Draco doit rester là, s'il vous plaît. Kreattur doit retourner s'assurer que Maître Harry ne se fasse pas tuer comme un stupide petit idiot inconscient. Kreattur ne le traite pas d'idiot, bien sûr, ce serait une très mauvaise chose pour un bon elfe et Kreattur est un bon elfe maintenant, Kreattur dit juste que si un troll ressemble à un troll, c'est généralement un troll. »

Il allait disparaître à nouveau.

Draco se précipita pour lui attraper l'épaule. « Attends ! »

Les oreilles de l'elfe tressautèrent avec détresse mais il ne disparut pas. « Kreattur a des ordres, Maître Draco. Kreattur doit… »

« J'ai besoin d'aide. » l'interrompit-il. « Ça rentre dans tes ordres, ça, non ? »

Kreattur inclina la tête, ses oreilles tressautant d'autant plus fort. « Les ordres de Kreattur sont de protéger Maître Draco et Maître Harry. Maître Draco est protégé. Maître Harry… »

« J'ai des enfants ici. » le coupa-t-il à nouveau, forçant l'elfe à pivoter vers les gamins terrifiés, recroquevillés les uns contre les autres. « Et il y en a probablement davantage dans les couloirs à la merci des Mangemorts. J'ai besoin d'aide pour les trouver et pour les protéger. »

Et s'il pouvait aller chercher Granger en même temps, c'était encore mieux.

Kreattur secoua la tête. « Kreattur a des ordres et… » Mais l'elfe se tut abruptement, apparemment incapable de détourner les yeux des plus jeunes élèves. Ses oreilles ne tressautaient plus tant qu'elles s'agitaient avec détresse et il se gifla deux fois. « Kreattur a ses ordres. » Il se tourna vers lui à nouveau. « Beaucoup d'enfants en danger ? »

Draco secoua la tête. « Je ne sais pas mais je suis sûr qu'il y avait des blessés qui n'auront pas pu remonter dans les étages. Et même ceux qui sont en haut… Ce n'est pas sûr qu'ils soient en sécurité. »

Un grondement emplit la pièce et il fallut un moment au Serpentard pour réaliser qu'il venait du petit corps de l'elfe. Il ne savait pas que les elfes de maison pouvaient faire ce genre de bruits sauvages.

« Kreattur ne peut pas fouiller tout seul. » L'elfe lui jeta un regard irrité, se mettant une troisième et une quatrième gifle sans même sembler s'en rendre compte. « Si Maître Draco quitte la salle commune, Kreattur sera extrêmement contrarié et le ramènera d'une manière qui ne plaira pas à au jeune maître. Maître Draco comprend ? »

Plus amusé qu'insulté – et peut-être un peu effrayé – Draco acquiesça.

« Dans ce cas, Kreattur va chercher de l'aide. » déclara l'elfe, en se frappant d'autant plus fort. Il se tourna à nouveau pour regarder les jeunes élèves, puis Astoria qui se tenait là, les bras croisés, puis Pansy qui le dévisageait avec incrédulité, puis Draco à nouveau. « Pas bouger, Maître Draco. »

Il disparut dans un craquement.

Pansy brisa le silence tendu qui s'était installé par une exclamation incrédule. « C'était quoi ça ? »

« Ça, c'est ce à quoi un véritable elfe de maison compétent devrait ressembler. » rétorqua-t-il, sur la défensive.

Il n'avait peut-être rencontré Kreattur que la veille mais l'elfe lui avait sauvé la vie et n'avait été que déférence et respect. Il appréciait ces qualités chez un serviteur.

« Kreattur sert la noble et ancienne nouvelle génération des Black. » rajouta-t-il, non sans une touche de fierté.

Pansy secoua la tête. « Ça ne veut rien dire. »

« Tu es sûr que tu ne t'es pas cogné la tête en tombant, tout à l'heure ? » demanda Astoria.

Il n'eut pas leur temps de leur expliquer qu'elles manquaient de raffinement. Dans une série de craquements, la salle commune se remplit de ce qui ressemblait fort à une armée d'elfes de maison portant tous des taies d'oreillers barrées du blason de Poudlard et affublés de casseroles et autres instruments de cuisine comme des casques de fortune. Plus d'un étaient armés d'un rouleau à pâtisserie, d'une poêle ou, plus alarmant, d'un couteau.

Kreattur réapparut à côté de lui, se chamaillant avec un autre elfe qui portait au moins quatre paires de chaussettes dont une sur les oreilles…

Il lui fallut une seconde pour le reconnaître. « Dobby ? »

C'était donc à Poudlard que l'elfe avait atterri ?

« Monsieur Draco. » répondit l'elfe avec un mépris évident.

Kreattur plissa les yeux. « Maître Draco, espèce de représentant dégénéré des elfes de maison. »

Il n'avait pas le temps d'arbitrer une dispute. « Quel est ton plan, Kreattur ? »

« Le plan de Dobby est de sauver les élèves, Monsieur Draco ! » s'exclama l'autre elfe en premier. « Un groupe va rester ici pour protéger tout le monde et Dobby va aller chercher les autres enfants avec d'autres elfes ! »

« Kreattur veut aider. » grinça son elfe. Enfin… L'elfe des Black.

« Kreattur a ses ordres. » rétorqua Dobby, un peu moqueur. « C'est ce que Kreattur a dit à Dobby, non ? C'est pour ça que Kreattur a demandé de l'aide à Dobby. »

Kreattur semblait fortement hésiter à se jeter sur Dobby pour le frapper puis parut se reprendre.

« Kreattur va demander à Maître Sirius d'annuler son ordre. » grinça l'elfe, en pointant un doigt légèrement menaçant vers Draco. « Maître Draco doit rester ici. »

Il disparut dans un craquement.

Draco en profita pour fait un nouveau pas vers la porte.

« Tu ne peux pas me laisser ici avec des elfes de maison pour toute protection ! » protesta Pansy.

Il leva les yeux au ciel mais se tourna vers Dobby. « Les elfes peuvent-ils garantir la sécurité des élèves dans la salle commune ? »

Dobby n'hésita même pas avant de hocher vigoureusement la tête. « Personne ne s'en prendra aux élèves de Poudlard. S'il faut partir de l'école pour en être sûr, les elfes emmèneront les enfants ailleurs. »

« Très bien. » déclara-t-il. « Si je trouve d'autres élèves, je t'appelle, d'accord ? »

Rien ne garantissait que l'elfe voudrait bien répondre.

« Pour les élèves de Poudlard, Dobby viendra. » promit froidement l'elfe.

La cinquième année tenta à nouveau de lui barrer la route mais il la repoussa gentiment. « Reste ici et attends. Tout ira bien, Pansy. »

Il s'éclipsa avant que Kreattur puisse revenir.

Dobby, pas si curieusement que ça, semblait beaucoup moins inquiet de sa sécurité.

Pas si étonnant.

Il se souvenait distinctement d'avoir trouvé hilarant de le regarder repasser ses propres oreilles en guise de punition quand il avait sept ou huit ans.

Peut-être que Granger n'avait pas tellement tort de dire que la manière dont les sorciers traitaient les elfes de maison était relativement mauvaise.

°O°O°O°O°

Severus avait vu la mort en face tellement de fois qu'il était presque blasé.

Il aurait été incapable de dire si le désespoir qui glaçait son âme venait du Détraqueur ou de ses propres émotions.

Puis un blaireau argenté apparut soudain dans son champ de vision, repoussant la créature avec suffisamment de furie pour lui rendre ses esprits. Il rampa en arrière, aussi loin du Détraqueur qu'il le put. Il ne tenta pas de relancer son propre patronus mais dressa suffisamment de boucliers pour le ralentir si…

Mais le blaireau était extrêmement déterminé à vaincre le Détraqueur.

Il butta contre quelque chose dans son dos, eut à peine le temps de lever la tête avant qu'un homme ne le remette sur ses pieds. Severus se dégagea immédiatement, levant sa baguette, méfiant. Le sorcier ne portait pas les robes des Mangemorts, pas de masque, mais il ne le connaissait pas et…

« Professeur Snape ? » demanda l'inconnu avec un amusement évident. « Je voulais vous rencontrer depuis un moment. J'aurais préféré d'autres circonstances, évidemment, mais… »

Des cheveux bruns grisonnants aux tempes, des yeux clairs, une légère ombre qui lui mangeait les mâchoires et la carrure d'un homme habitué aux travaux manuels…

Il y avait quelque chose de familier dans ses traits.

Un parent d'élève ?

Il…

« Ted. » offrit le sorcier. Puis, devant son manque évident de réaction… « Ted Tonks. »

Severus le dévisagea, le souffle coupé parce que…

Nymphadora était morte. À cause de lui. Par sa faute.

Mais ça l'homme ne pouvait pas le savoir.

Pas encore.

Il n'eut pas le temps de dire quoi que ce soit, d'expliquer…

Ils se retrouvèrent happés par la bataille, ramenés vers le parc…

L'esprit de Severus était à moitié à ce qu'il faisait seulement. Les mots tournaient en boucle dans sa tête.

Elle est morte.

Et son père se battait à côté de lui, avec lui, lançant de temps en temps une plaisanterie comme pour mieux détendre l'atmosphère, comme s'il n'avait pas de raison de le haïr…

Parce qu'il avait tué sa fille.

Mais Ted ne le savait pas.

Et Severus ne pouvait pas le lui expliquer en plein milieu d'une bataille où cela ne résulterait qu'en sa mort probable.

Des armures enchantées quittèrent le château, se mêlant aux combattants et renversant visiblement le cours de la bataille. Il ne voyait Minerva nulle part. Peut-être était-ce l'œuvre d'Albus… Mais… non. Il reconnaissait le style de la vieille femme qui déplaçait les armures comme des pièces sur un plateau d'échecs.

Au-dessus de leurs têtes, les jumeaux Weasley avaient apparemment rallié tous les joueurs de Quidditch qu'ils avaient trouvés et les avaient équipés de battes qui étaient tout aussi efficaces contre les Mangemorts ou les Détraqueurs qu'elles l'étaient contre un cognard. Il vit, du coin de l'œil, Katie Bell faire une ville pour éviter un sort de mort, défoncer la tête du Mangemort avec la batte… Le sorcier n'avait pas encore touché le sol qu'un Détraqueur arracha la jeune fille à son balai et, faisant fi de son hurlement, attira son visage sous sa cape. Les autres élèves et leurs patronus arrivèrent trop tard. Un des jumeaux réceptionna son corps lorsque la créature la lâcha mais…

Severus détourna les yeux.

Il se concentra sur les Mangemorts devant lui, perdant le compte de ceux qu'il vainquait et ceux qu'il ne parvenait qu'à repousser…

Pour un Botaniste de métier, Ted savait se battre plus que correctement et, graduellement, Severus se reposa sur lui pour garder son flan gauche, en faisant de même pour son flan droit. Il aurait voulu demander ce qu'il faisait là. Il n'était pas censé être là. Il était censé être à l'abri, derrière un Fidelitas avec Andromeda. Cependant, Albus avait dû lancer un appel général à l'Ordre parce qu'il avait aperçu plus d'un membre qui, d'ordinaire, ne servait que de contact ou de renfort le cas échéant…

Lady Londubat était particulièrement en forme. Facilement repérable à son chapeau à vautour et son étiole de renard, elle avait pourtant fait le vide autour d'elle et ne semblait pas s'en porter plus mal.

Soudain, un sortilège vicieux brisa sa première couche de boucliers et passa sous sa garde…

Ted l'intercepta d'un bouclier basique et répliqua dans la même seconde, prenant pourtant le temps de lui faire un clin d'œil.

« Je sais que la tradition veut que je menace de vous tuer si vous faites du mal à ma fille et tout ça, mais évitez de vous faire assassiner à côté de moi. Elle m'en voudrait. » plaisanta le sorcier.

Nymphadora est morte.

Les mots étaient sur le bout de sa langue.

Il ne lui avait pas encore adressé la parole.

Il avait peur d'ouvrir la bouche.

Peur que ce soient les mots qui en sortiraient : Nymphadora est morte par ma faute.

Puis il repéra autre chose par-dessus l'épaule du sorcier ou, plutôt, quelqu'un. Une masse de cheveux roux qui se balançaient dans une queue de cheval, un sortilège de chauve-furie particulièrement féroce…

Et puis…

Et puis cela lui parut si évident qu'il ne savait pas comment il ne l'avait pas remarqué avant.

Il avait fait le tri.

Il avait fait le tri des adolescents majeurs et mineurs.

Il avait fait le tri.

Ginny Weasley n'était certainement pas majeure.

Pas plus que Cho Chang qu'il apercevait sur un balai dans le sillage d'un des jumeaux Weasley.

Pas plus que Dean Thomas ou Seamus Finnigan qui arrosaient les Mangemorts de ce qui ressemblait fort à des cocktail Molotov improvisés.

« Mon fils… » souffla-t-il. Parce que s'ils étaient là, alors…

Oh alors il y avait fort à parier qu'Harry était quelque part dans ce massacre lui aussi.

Que les armures semblent leur avoir permis de reprendre la main comptait peu…

« Votre… quoi ? » balbutia Ted, apparemment surpris.

« Mon fils ! » répéta-t-il, en s'élançant en direction de Ginny Weasley, tout autre considération oubliée.

Nymphadora

Ses boucliers mentaux se remirent en place tout seuls, compartimentant la douleur de sa perte, l'enterrant assez profondément pour qu'il puisse pleinement fonctionner parce que…

Son fils était un idiot qui n'avait jamais fait ce qu'on lui ordonnait de faire, particulièrement si sa sécurité était en jeu.

Il ne mesura pas la force de son sectumsempra et le Mangemort qui affrontait la jeune fille termina en plusieurs morceaux. La lionne eut un haut le cœur mais il n'eut aucune pitié lorsqu'il l'attrapa par le bras, la forçant à pivoter pour lui faire face. « Où est Harry ? »

Elle secoua immédiatement la tête en le reconnaissant. « Je ne sais pas, on a été séparés ! »

Il la poussa vers Ted, surveillant le champ de bataille des yeux sans apercevoir le Survivant. « Mettez-la en sécurité… Mettez en sécurité autant d'enfants que vous le pouvez. Je dois trouver mon fils. »

Visiblement Nymphadora n'avait jamais expliqué sa situation familiale peu orthodoxe parce que Ted paraissait toujours perplexe mais avec une quatrième année face à lui, il fit la chose sensée, hocha la tête et entraina la jeune fille vers le château.

« Attendez ! » cria Ginny. « Il y a eu une embuscade dans les cachots ! Personne n'est en sécurité à l'intérieur ! Le château est envahi ! »

Merveilleux.

Excellente nouvelle.

Serrant les dents, il se lança à la recherche de son fils en se demandant quand est-ce qu'Albus consentirait à venir leur prêter main forte à l'extérieur.

Personne ne dirigeait leur armée.

Et s'il voulait retrouver Harry sous cette pluie battante et au milieu de ces combats…

Il jeta patronus sur patronus, ne se laissant pas douter qu'il y parviendrait, et commença à donner ses ordres.

Il leur fallait deux lignes de combattants sur les côtés, Minerva au centre avec ses armures, Molly là haut sur sa tour avait une vue d'ensemble… Ils allaient repousser les Mangemorts quoi qu'il lui en coûterait juste pour qu'il puisse retrouver son fils et lui passer le savon du siècle.

Il venait juste de libérer les patronus lorsqu'il sentit le sortilège d'alarme sur la salle commune des Serpentard le frapper au sternum. Seul un préfet aurait pu l'activer…

C'était bon signe, décida-t-il.

Cela signifiait que certains élèves avaient trouvé refuge dans la salle commune.

°O°O°O°O°

Horace n'était pas fier de l'avouer mais il termina l'escalade de la tour d'astronomie à quatre pattes, épuisé, rouge et en sueur, le cœur battant si fort qu'il aurait pu jurer qu'il allait exploser… Il en était à son deuxième philtre de force.

Pas très sage, pour ne pas dire peu recommandé.

Il y avait une raison pour laquelle il s'aventurait rarement au-delà du premier étage.

C'était décidé, il se mettait au régime dès le lendemain.

S'il survivait à cette guerre de fou.

Severus allait lui devoir beaucoup plus que des excuses, cependant, et c'était cette pensée qui le convainquit de terminer l'ascension au lieu de mentir effrontément à quiconque poserait la question plus tard et de déclarer qu'elle était déjà morte lorsqu'il était arrivé. Il n'avait pas apprécié les insinuations de son ancien élève ou les menaces de Minerva. Sauver son Auror serait une bonne manière de récupérer la main mise sur le Professeur de Défense. Après tout, le garçon avait peut-être un talent inné mais c'était lui qui lui avait appris à s'en servir, à le développer. Un peu de reconnaissance ne serait pas malvenue.

Il aurait une dette envers lui.

Et Horace collectionnait celles-ci avec autant de passion qu'il collectionnait les alcools les plus rares.

Bien heureusement, il n'y avait personne en haut de la tour capable de remarquer son entrée peu digne et il prit le temps de reprendre sa respiration, assis à l'entrée, ignorant du mieux qu'il le put le cadavre de Gellert Grindelwald, avant de se traîner jusqu'à la jeune femme et la flaque de sang qui s'étendait sous elle. Une partie avait déjà commencé à coaguler et une ou deux mouches commençaient à s'intéresser à l'Auror.

Très honnêtement, lorsqu'il parvint à son chevet, écartant les insectes d'un geste impatient, il était persuadé qu'il était arrivé trop tard. Elle était trop pâle, trop inerte et la quantité de sang autour d'elle…

Il fit un rapide calcul, estima qu'elle en avait perdu beaucoup plus que ce qu'un corps humain pouvait se permettre.

Mais il y avait les deux fioles de reconstituant sanguin que Dumbledore lui avait fait avaler, si son organisme était parvenu à synthétiser assez de sang assez vite…

Il attrapa son poignet pour chercher un pouls, ne fût pas surpris de ne pas en trouver un.

Par acquis de conscience, il jeta un sort de diagnostic, s'attendant à ce qu'il confirme le décès.

Il se redressa lorsque le sort lui indiqua un signe de vie. Il posa la main sur sa poitrine, se pencha au-dessus de son visage… Oui, il y avait un souffle. Un souffle ténu qui ne tarderait pas à s'éteindre.

Il jeta un second sort, fronça les sourcils lorsqu'il ne montra pas le résultat escompté… La plaie était là, il le confirma en écartant les pans de sa robe d'Auror et en soulevant son tee-shirt… Pourtant, l'hémorragie semblait si faible à présent par rapport à ce qu'elle avait dû être… Parce qu'elle n'avait plus de sang à perdre ? Ou bien…

Soudain, il comprit.

C'était une Métamorphomage, il l'avait oublié.

« Oh, c'était très intelligent, ma chère… » murmura-t-il, en levant sa baguette au-dessus de son abdomen. « Très intelligent… »

Il lui sembla voir ses paupières tressauter mais elle n'ouvrit pas les yeux.

« Je vais terminer ce que vous avez commencé et nous irons à l'infirmerie. » promit-il. « Ce n'est pas gagné, comprenez-moi, mais vous semblez aussi têtue que notre ami commun. Cela ne m'étonne pas. Il a toujours eu un faible pour les femmes à fort caractère… »

°O°O°O°O°

Lunard était déchiré entre deux instincts tout aussi forts l'un que l'autre.

L'un voulait qu'il se jette dans la bataille au côté des armures pour protéger les plus jeunes, l'autre lui hurlait de courir jusqu'à sa compagne.

Le patronus arriva pile à ce moment là, le faon argenté presque intangible et clairement agité.

« Prends le contrôle du flan gauche. » ordonna Severus. « Minerva tient le centre avec ses armures. Je m'occupe du droit. Nous devons les prendre en tenaille. Renvoie tous les élèves qui n'ont rien à faire à l'extérieur vers le château. La salle commune de Serpentard est possiblement un endroit sûr. À confirmer. Et si tu trouves Harry, mets le en sécurité coûte que coûte. »

À nouveau, Lunard s'agaça de se voir donner des ordres. Pourtant, il devait admettre que quelqu'un devait prendre le commandement dehors et…

Sous les regards soucieux de Sirius et d'Harry, il jeta son propre patronus.

« Dis-lui que j'ai Harry avec moi. » demanda Patmol. Le garçon commença à protester, à argumenter qu'il pouvait être utile à l'extérieur… « Fais ce que je te dis. » cingla Sirius, plus sèchement qu'il ne l'avait jamais entendu parler à l'adolescent. « On sait tous les deux que ce n'est pas à cause de l'embuscade dans les cachots que tu es remonté et Severus aura ma peau s'il t'arrive quelque chose. Tu restes avec moi et tu fais tout ce que je te dis, un point c'est tout. »

Harry n'était visiblement pas d'accord avec ça mais Remus l'ignora, refoulant une légère pointe de satisfaction parce qu'il savait qu'il avait eu raison durant tous ces mois d'entraînement. Sirius et Severus avaient insisté pour dire qu'il ne stimulait pas assez l'adolescent, qu'il ne lui faisait pas assez confiance… Ils lui avaient mis dans la tête qu'il pouvait se battre aussi bien qu'eux… Était-ce si surprenant que le gamin le croit, à présent ? Veuille se mettre en danger ? Ils l'avaient entraîné comme un soldat. Ce n'était pas surprenant qu'Harry réagisse en tant que tel.

« Je suis à l'intérieur. Il y a des Mangemorts dans le château. » confia-t-il à son patronus. « Trouve quelqu'un d'autre pour le flan gauche et envoie-nous des Aurors si tu peux, je vais tâcher de coordonner l'intérieur et repousser l'ennemi à l'extérieur. Tenez-vous prêt à vous battre sur deux flans. Harry est avec Sirius, les deux sont sains et saufs. » Il envoya le loup argenté puis se détourna du hall et de son meilleur ami même si ça lui faisait mal de l'abandonner avec des adolescents pour seul soutien. « Je vais essayer de trouver Albus. Je t'envoie Fleur et son groupe. »

Sirius ne chercha pas à discuter mais lui serra brièvement l'épaule. « Sois prudent. »

« Vous aussi. » offrit-il, son regard s'arrêtant sur Harry qui bouillait visiblement de retourner se jeter dans la bataille. « Harry. » Il attendit que le garçon croise son regard pour continuer. « Ne joue pas aux héros. Ce n'est pas ce qu'aurait voulu ton père. »

Non sans ironie, le Gryffondor lâcha un bruit amusé. « Lequel des deux ? »

Le poids de ce qu'avait dit Remus, ce qu'il avait fait, plana entre eux comme un non-dit acéré. Ils ne s'étaient pas revus depuis.

Cela lui coûta de ne pas répéter que James aurait sans doute été horrifié de voir un homme qu'il avait haï élever son fils mais… Il ne pouvait pas, non plus, nier que Severus avait pris le rôle plus au sérieux que les Dursley. Ou que Patmol.

Quant à lui, comment aurait-il pu juger… Sirius le lui avait bien reproché, il n'avait jamais tenté de voir Harry avant d'être invité à Poudlard.

« Aucun des deux. » répondit-il calmement, comme une offre de paix.

Harry lui adressa un hochement de tête.

Puis suivit Sirius lorsqu'il retourna dans le hall.

°O°O°O°O°

Entre les armures de McGonagall et Fleur et son groupe arrivé à la rescousse, Sirius commençait à mieux respirer. Il commençait même à croire qu'ils pouvaient gagner.

Pour l'instant, il n'avait perdu aucun des adolescents encore dans le hall. Son corps était fourbu, éreinté par les multiples transformations en Patmol, mais il ne prêtait attention ni aux contusions, ni aux plaies que le loup-garou avait laissées derrière lui. Il était dans cet état d'esprit si particulier aux batailles. Hyper-vigilent. Hyper-conscient de son environnement.

Depuis quand durait l'assaut ?

Il lui semblait que cela faisait des heures mais, rationnellement, il savait qu'il ne pouvait pas être beaucoup plus tard que midi…

Il gardait perpétuellement un œil sur Harry, pas tant parce qu'il craignait que le garçon soit en difficultés – Harry était facilement meilleur combattant que la plupart des Mangemorts qui avaient pénétré le château jusque là – mais parce qu'il ne lui faisait pas confiance pour ne pas s'enfuir rejoindre Severus.

S'il devait être honnête, il était furieux que l'adolescent ait désobéi et soit remonté.

Pas surpris mais furieux.

Bien sûr, au demeurant, cela n'aurait pas fait une grande différence.

Il ne savait pas exactement ce qui s'était passé là en bas mais l'avalanche d'élèves poursuivis par des Mangemorts et des loups indiquait clairement que quelque s'était passé.

Il se battait contre deux des quelques Mangemorts qui restaient, se faisant mentalement la réflexion qu'il était étrange que Bellatrix ne se soit pas encore montrée pour tenter de le tuer vu l'obsession qu'elle vouait à éradiquer les membres renégats de la famille, lorsqu'il y eut un craquement près de lui.

Kreattur déblatérait mais, entre le bruit des combats et son propre cœur qui battait à ses oreilles, Sirius ne comprenait qu'un mot sur trois.

« Kreattur, je suis un peu occupé ! » cingla-t-il, parant à droite tout en se tournant pour mieux éviter l'autre sort qui fusait vers lui.

L'elfe eut l'air suprêmement ennuyé puis disparut.

Uniquement pour réapparaître sur les épaules d'un des Mangemorts avec une précision qui suintait l'habitude. Avant que l'homme ait compris ce qui lui arrivait, il avait perdu une partie de l'oreille. Kreattur la cracha avec dégoût et enfonça ses pouces dans les encoches du masque, refusant de lâcher jusqu'à ce que le sorcier laisse tomber sa baguette pour se débattre en hurlant…

Pas très ragoûtant mais très efficace, décida Sirius, en désarmant le second Mangemort qui, après avoir vu ce qui était arrivé à son copain, s'échappa sans demander son reste.

Kreattur réapparut devant lui.

« Kreattur veut aider les elfes à sauver les enfants, Maître Sirius, s'il vous plait. » plaida l'elfe.

Sirius jeta un regard circulaire sur le champ de bataille mais Fleur avait la situation en main. Elle avait placé les adolescents plus jeunes derrière sa ligne de septièmes années et de recrues et était en train de botter les fesses des trois Mangemorts restants, aidée par les armures. Un groupe de ces armures était occupé de déblayer l'entrée, sans doute pour rejoindre le parc plus facilement…

« Maître Sirius ! » s'agaça Kreattur.

Il baissa les yeux vers son elfe, sans trop de patience. « Qu'est-ce que tu racontes ? »

Kreattur lui jeta un de ses regards lourds de jugement qui en disaient long. Principalement que Regulus, lui, n'aurait jamais été aussi stupide et qu'il aurait fait un bien meilleur hériter.

L'elfe semblait avoir connu des jours meilleurs. Sa taie d'oreiller était déchirée, il avait quelques écorchures…

« Les elfes de Poudlard rassemblent les enfants blessés et les cachent dans la salle commune de Serpentard. Kreattur veut aider. » lâcha l'elfe. « Mais Maître Sirius a ordonné à Kreattur de protéger Maître Draco et Maître Harry. Kreattur a dit à Maître Draco de rester dans la salle commune, Maître Draco est en sécurité. » L'elfe se balança d'avant en arrière. « Kreattur veut vraiment sauver les enfants, Maître. Kreattur ne fait pas confiance à ce Dobby pour bien faire le travail. Dobby n'est pas un bon elfe, Kreattur peut le sentir. Kreattur peut faire mieux. »

Il y avait trop d'informations mais tout ce qu'il retint c'était que des gosses étaient en sécurité dans la salle commune de Serpentard et Draco avec.

« Fais ce que tu veux. » offrit-il. Il le regretta immédiatement. C'était précisément le genre d'ordres qu'on ne voulait pas donner à un elfe de maison en qui on avait une confiance relative.

Kreattur agita les oreilles avec un contentement évident. « Maître Sirius est un bon maître. Kreattur est désolé d'avoir dit que Maître Sirius avait l'hygiène d'un rat d'égout même si Maître Sirius aurait bien besoin d'une douche là tout de suite. »

« Sale petit… » Mais il s'interrompit et dût en rire. De la part de Kreattur, c'était presque affectueux. « Va sauver les gosses mais sois prudent. Kreattur ? Tu es un bon elfe. »

L'elfe s'inclina bas puis disparut.

Sirius se tourna vers Fleur pour voir ce qu'il pouvait faire mais elle venait de terminer le ménage. Harry était à sa droite.

« On attache et assomme tous ceux qui sont encore vivants et on les entasse dans le coin. » ordonna-t-il à la cantonade. « Coups de pieds autorisés. Fleur, occupe-toi des blessés. »

Ils travaillèrent en silence pendant plusieurs minutes, vite et bien. Ce furent les bruits de course qui les alertèrent et ils se tournèrent tous vers les cachots, baguettes levées, ce qui fit que lorsque Draco débarqua en trombe, il se retrouva face à un petit groupe armé de très mauvaise humeur.

L'adolescent leva immédiatement les deux mains.

Les baguettes se baissèrent et le Serpentard avança vers lui à grandes enjambées.

« C'est drôle, Kreattur vient juste de me dire qu'il t'avait laissé en sécurité. » railla l'Animagus.

« Hilarant. » commenta Draco mais le cœur n'y était visiblement pas. Ses yeux gris étaient hantés, il avait une petite coupure au front, un gros hématome sur sa main gauche qui tirait déjà au violet et il était couvert de poussière. « Granger ? »

« On a été séparés. Elle est quelque part dans les étages. » répondit Harry avec inquiétude, en le regardant des pieds à la tête. « Ça va ? »

« Génial. » siffla le Serpentard. « Tu as emmené avec toi les meilleurs combattants et ensuite on s'est retrouvés face à des Mangemorts, des loups, et Fenrir Greyback, avec moi et trois pauvres sixièmes années pour défendre les premières et deuxièmes années. Il y a des cadavres partout en bas. »

Harry accusa le coup.

Sirius posa une main sur son épaule mais son filleul se dégagea et alla rejoindre silencieusement Fleur. Il ne prit pas la peine de reprocher à Draco son manque de tact. Il n'était pas tout à fait d'accord avec lui sur son analyse de la situation mais il était évident que l'adolescent venait de vivre quelque chose d'extrêmement difficile.

Les yeux gris, si similaires aux siens, passèrent sur le groupe qui continuait de travailler à empiler leurs prisonniers dans un coin sous les encouragements de Fleur.

« Les elfes tiennent la salle commune mais si tu peux envoyer de l'aide… » lâcha le garçon. « Il y a des blessés et j'ai laissé Pansy aux commandes. »

« Merlin, la situation devait être vraiment désespérée alors. » plaisanta-t-il. Ça tomba à plat. Il posa les mains sur les épaules de son cousin, le força à le regarder en face. Le Serpentard tremblait un peu. « Draco, respire avec moi. Grandes inspirations… »

L'adolescent se dégagea avec agacement. « Je n'ai rien. Je vais très bien. » Il secoua la tête. « Je vais chercher Granger. »

« Absolument pas. » contra-t-il immédiatement. « Tu restes avec Harry et moi. »

Il était responsable du Serpentard maintenant.

La réalisation lui vint, soudaine et triste.

Il était responsable de lui parce que Tonks…

« Tu restes avec Harry et moi. » répéta-t-il.

Il n'allait pas perdre un autre membre de sa famille ce jour là.

Il refusait de perdre quelqu'un d'autre.

« Et où est Harry ? » se moqua Draco.

La panique tordit le ventre de Sirius lorsqu'il se retourna pour inspecter le groupe derrière lui. Il ne voyait plus son filleul nulle part.

« Fleur ! » appela-t-il. « Fleur, où est Harry ? »

La jeune femme haussa les épaules.

Les adolescents reprirent l'appel mais Harry n'était plus là.

Les armures non plus.

Elles avaient terminé de dégager une ouverture dans le mur.

Sirius laissa échapper une série colorée de jurons puis pivota vers Draco pour…

Son cousin n'était plus là.

« Sales gosses. » cracha-t-il. « Sales putain de gosses ingrats. »

Voilà pourquoi il ne voulait pas d'enfants.

Severus allait le tuer.

Tonks allait…

Non, Tonks, la pauvre, ne le tuerait pas. Mais Narcissa, dans un futur plus ou moins lointain, c'était une certitude.

Merlin, Andromeda allait le tuer.

Et elle aurait raison.

Il avait échoué à protéger sa famille.

« Neville ! » aboya-t-il. « Tu prends le reste de l'A.D. et tu files à la salle commune de Serpentard. » Il étudia le groupe qui avait été avec Fleur, repéra une septième année qui avait l'air trop blessée pour continuer vu la manière dont elle tenait son bras. « Simpson, avec eux. Récupérez le maximum d'élèves en route mais pas de zèle. » Il y eut un moment de flottement avant qu'il ne frappe dans ses mains. « Allez. »

Simpson leva une main tremblante. « Euh, Professeur Black ? Où est la salle commune de Serpentard ? »

Son regard tomba sur la cravate bleue et argent.

Il chercha le hall à la recherche de…

Où étaient Zabini et Greengrass quand on avait besoin d'eux ?

Visiblement pas dans le hall.

« Et merde. » s'énerva-t-il. « Kreattur ! »

L'elfe ne parut pas ravi d'être rappelé pour jouer les guides mais s'adoucit lorsqu'il réalisa qu'on lui demandait de ramener des élèves en sécurité.

Qui aurait cru que les gamins étaient le talon d'Achille de cet elfe de maison ?

°O°O°O°O°

Bill tournait en rond.

Il avait croisé deux Mangemorts mais avait préféré se cacher plutôt que d'engager le combat. La plaie à l'arrière de son crâne battait au rythme de son cœur et il titubait plus qu'il ne marchait, laissant des traces de sang derrière lui. S'il prenait l'envie à quelqu'un de remonter la piste…

Mais il suivait toujours le sortilège.

Sa baguette indiquait toujours la bonne direction.

Du moins, l'espérait-il.

Le vertige et la nausée étaient…

Peut-être pourrait-il s'asseoir un peu, songea-t-il, en atteignant l'escalier qui menait au troisième étage. Pourquoi Charlie était-il remonté ?

Pour éliminer les autres ancres.

Mais le sort s'était dissipé.

Il n'arrivait pas à réfléchir.

Il n'y arrivait pas.

Il allait s'asseoir, décida-t-il, alors même qu'une partie de son esprit le mettait en garde contre cette idée stupide. Tout ce qu'il voulait, c'était s'asseoir. Fermer les yeux juste une seconde. Se reposer. Juste une seconde.

Il continua pourtant à se traîner en haut de l'escalier.

Il allait s'asseoir mais pas au milieu, pas là où il pourrait facilement être découvert.

Un mur avait explosé juste derrière lui un peu plus tôt, sans crier gare.

Un potion explosive, sans doute. L'une des leurs ou une de l'ennemi.

Une salle de classe.

Il allait se traîner jusqu'à une des salles de classes et…

Les éclats de voix le tirèrent un peu de sa torpeur.

« Pourquoi tu fais ça ? » cria quelqu'un. « Charlie, arrête ! Tu me fais peur ! Charlie ! »

Bill se mit à courir – autant qu'il le pouvait – avant même d'avoir compris pourquoi. Avant même d'avoir réalisé que c'était parce qu'il connaissait cette voix.

Il déboula dans le couloir alors même que Charlie pointait sa baguette tremblante sur Ron.

Ron qui se tenait debout devant Hermione qui était affalée au sol…

Il y avait eu duel, visiblement.

Il y avait des traces de sorts au mur.

La jeune fille semblait plus sonnée que blessée.

Ron avait les yeux pleins de larmes alors qu'il tâchait du mieux qu'il le pouvait de protéger Hermione de son corps.

Ce fût là que Bill le vit.

Derrière eux, il y avait un corps inanimé. Celui aux yeux ouverts qui le fixait d'un air presque réprobateur. Celui qui était mort.

Il ne portait pas l'uniforme de l'école.

Une des recrues que Tonks avait postées à Poudlard, supposait-il.

« Pourquoi tu fais ça ? » supplia Ron.

« Ava… » balbutia Charlie et le sang de Bill ne fit qu'un tour.

Ses deux frères sursautèrent de surprise lorsqu'il s'interposa entre eux, une main levée en direction de Charlie, comme pour bloquer un sortilège qu'il n'avait aucun espoir de stopper. Il ne chercha même pas à utiliser sa baguette. Il n'avait pas la force de…

« Charlie. » lâcha-t-il, les mots s'accrochant les uns aux autres parce qu'il n'était pas… Il n'allait pas… Sa bouche était pâteuse, sa vision trouble… « Ron, prends Hermione et va-t-en. »

Si son plus jeune frère le comprit, il ne bougea pas.

« Av… » répéta Charlie, en grimaçant, le visage couvert de sueur et de sang séché qui n'était pas le sien. Il sanglotait. « Ar… Arrête moi. » supplia-t-il. « Avada… Bill… Bill… Ne me laisse pas… Avada… Bill, je t'en supplie… Tue moi… Avada Ke… »

Mais Bill en était incapable.

Il ne pouvait pas lever sa baguette sur un frère qu'il avait tenu dans ses bras quelques minutes à peine après sa naissance. Il ne pouvait pas lever sa baguette sur un frère qui avait été son confident, son meilleur ami, son miroir. Il ne pouvait pas.

« Ron, prends Hermione et va-t-en. » répéta-t-il.

Il entendit Ron remettre la jeune fille sur ses pieds dans son dos, entendit les sanglots que son plus jeune frère ne retenait plus.

« Bill… » plaida-t-il.

« Stupefix ! » lança soudain Hermione, sans avertissement, en bondissant de derrière lui.

Charlie para immédiatement et répliqua d'un sort de mort qui aurait touché l'adolescente si Ron ne s'était pas jeté sur elle. Le sort frisa la tête de leur frère et Bill leva finalement sa baguette, se décalant pour se retrouver à nouveau entre eux…

« Je dois… Je dois tuer tous ceux qui m'attaquent… » marmonna Charlie, luttant visiblement contre lui-même. Sa main tremblait tellement que c'était un miracle qu'il puisse encore tenir sa baguette. « Retrouver… Retrouver Anthony… Bill… Bill, s'il te plaît… Je ne veux plus faire de mal… Bill, tue moi… Tue-moi… Ava… »

Bill ne vit pas le sort venir parce qu'il arriva dans le dos de Charlie.

Son frère s'écroula soudain, inconscient.

Remus se tenait là, juste derrière lui.

« Charlie ! » s'exclamèrent Bill et Ron en cœur, avant de se précipiter vers le dragonnier.

La main du Briseur de Sorts tâta sa gorge, chercha un pouls… Ron secouait le jeune homme, pleurant à gros sanglots, en panique…

Bill aussi était en panique.

Ils ne pouvait pas perdre quelqu'un d'autre.

Pas si tôt après leur père.

Pas…

« Ce n'est qu'un stupefix. » gronda Remus, la voix rauque. Ses yeux brillaient d'un éclat sauvage, comme si le loup le commandait davantage que l'humain. « Severus a dit qu'il avait tué Dora. »

Il eut si froid tout d'un coup. La panique, la blessure à l'arrière de sa tête, l'énormité de ce que Remus disait… Tonks était comme une sœur supplémentaire pour Charlie, elle l'avait toujours été. Un peu comme Ron avait ramené Harry et Hermione dans la famille. Bill ne se souvenait plus d'un moment, à partir de son entrée à Poudlard, où ces deux là n'avaient pas été joints à la hanche et ça incluait la période après qu'elle ait été fortement amoureuse de lui et lui très amoureux du chanteur d'un groupe de rock sorcier. Leur amitié avait survécu à ça parce qu'elle survivait à tout. Tonks était sa meilleure amie. Tonks était…

Il a tué Flitwick.

Il a tué cette recrue.

Et Merlin savait combien d'autres.

Il ravala les mots qui voulaient passer sa gorge, ignora les bruits pleins de détresse de Ron et d'Hermione…

« Il est sous Imperium. » le défendit-il, se plaçant de manière à pouvoir protéger Charlie de son corps si le loup-garou…

« Et c'est la seule raison pour laquelle il est encore en vie. » siffla Remus, d'une voix toujours plus animale qu'humaine. « Ron, Hermione… Ligotez Charlie puis aidez-les à rejoindre l'infirmerie. Et n'en bougez plus. »

Ron semblait trop choqué pour réagir mais Hermione hocha immédiatement la tête, malgré les larmes qui roulaient sur ses joues.

« Où… Où est-ce que vous allez ? » demanda-t-elle.

« Chercher Dumbledore ou ma compagne. » grinça le loup-garou. « Celui que je trouve en premier. »

Ça n'avait pas grand sens parce que Tonks était morte, d'après lui, et, en plus, ce n'était plus vraiment sa compagne si ? Personne ne lui avait confirmé qu'elle était avec Severus mais, très franchement, il suffisait d'être dans la même pièce qu'eux pendant dix minutes pour comprendre… Ils n'étaient pas exactement aussi subtils ou discrets qu'ils pensaient l'être.

Tonks ne portait plus beaucoup le loup dans son cœur de toute manière, elle…

Elle était morte.

Charlie l'avait tuée.

Son frère l'avait tuée.

Charlie avait manqué tuer Ron.

Il regarda Hermione jeter un incarerem au dragonnier, la regarda le faire léviter…

« Tu peux marcher ? » lui demanda Ron, d'un ton inquiet, en essuyant ses larmes d'un revers de manche.

Lorsqu'il releva la tête, Remus était déjà parti.

Tout tanguait.

« Anthony… » marmonna-t-il. « Il faut le trouver… Il faut… »

« Harry, Hermione et Sirius l'ont déjà capturé. » répondit son frère, en le forçant à passer un bras autour de ses épaules. « Allez, viens. On va à l'infirmerie. Pomfresh va briser l'envoûtement sur Charlie et tout ira bien. »

« Ce n'est pas si simple, Ron… » soupira-t-il.

Briser le sort…

Il aurait pu le faire.

Il aurait dû le faire tout de suite.

Mais il devint évident lorsqu'il fût sur ses pieds qu'il n'était pas capable de faire de la magie avancée. Il était à peine capable de mettre un pied devant l'autre avec l'aide de Ron qui soutenait son poids sans sourciller.

« Quand est-ce que tu es devenu aussi grand ? » demanda-t-il, un peu choqué.

Dans sa tête, Ron et Ginny étaient pratiquement toujours des bébés. Mais Ron faisait presque sa taille désormais.

« Qu'est-ce que tu veux dire, ce n'est pas si simple ? » insista son frère.

« Ce n'est pas briser le sort le problème. » murmura Hermione tristement. « C'est vivre avec ce qu'on a été forcé de faire sous l'influence du maléfice. »

« Mais ce n'était pas sa faute ! » protesta Ron. « Il ne voulait pas… Tu as vu ! Tu as vu qu'il a essayé de combattre l'Imperium. »

Bill doutait que Charlie verrait les choses de cette manière.

Tue-moi avait supplié son frère.

Peut-être que cela aurait été plus magnanime.

Parce que vivre avec la mort de Tonks, Flitwick, cette recrue et qui savait d'autre sur la conscience ?

Ce ne serait pas facile.

°O°O°O°O°

Albus s'exhortait à la patience et affichait un calme à toute épreuve mais, à l'intérieur, il bouillait.

Il n'avait pas réussi à seulement atteindre le rez-de-chaussée, encore moins le parc où se déroulait désormais le gros des combats. Il avait accumulé les enfants à la place et n'avait trouvé aucun endroit sûr où les abandonner momentanément.

Son idée, au départ, avait été de les redescendre vers les cachots où, selon ce que lui disait Poudlard, les protections autour de la salle commune de Serpentard tenaient bon – et où un certain nombre d'élèves semblait s'être réfugié. Mais il s'était vu barrer le passage par des Mangemorts à chaque fois. Ce n'était pas véritablement un problème, ils n'étaient pas à sa mesure. Lord Voldemort n'avait visiblement pas emmené la fine fleur de son armée ce jour là mais il ne pouvait pas passer en force lorsqu'il avait cinq enfants avec lui.

Et le dernier groupe qu'il venait de trouver…

Luna Lovegood était, en apparence, tout aussi calme que lui mais il soupçonnait que c'était davantage un air qu'elle se donnait qu'une véritable sérénité.

Elle était accompagnée de deux autres quatrièmes années, l'une de Gryffondor, l'autre de Serpentard qui ne semblait pas savoir si elle devait être hostile envers eux ou reconnaissante pour leur aide, et un troisième année de Serdaigle, Bowen Donovan qui était blessé.

Luna demeurait imperturbable alors qu'elle appuyait sur la plaie sur l'épaule du garçon qui pleurait et gémissait, clairement terrifié. La Serpentard, Shelby Yates, se tenait aussi loin d'eux que possible. Quant à la jeune Gryffondor, Josie Puckett, elle ne semblait pas savoir quoi faire.

« Professeur Dumbledore. » le salua posément Luna, lorsqu'elle le vit approcher, sa collection d'enfants accrochée à ses robes.

Shelby et Josie se lancèrent immédiatement dans le récit de ce qui s'était passé dans les cachots – un récit auquel il avait eu droit plusieurs fois déjà, par chacun des élèves agglutinés autour de lui.

« Il s'est fait mordre par un loup-garou ! » s'exclama Shelby, en pointant sa baguette sur le troisième année.

« Range ça. » ordonna-t-il sèchement, en s'accroupissant près du garçon, masquant au mieux son horreur. Luna écarta les mains sans qu'il ait besoin de le lui demander pour qu'il puisse examiner la plaie. C'était bien une morsure. Et elle n'était pas jolie. « Quand est-ce arrivé ? Lorsque vous étiez en train de fuir du tunnel ? »

« Non. » répondit Josie, en secouant la tête. « Yates et moi on a été séparées de nos amis lorsque Malfoy a fait exploser le tunnel, on ne savait pas quoi faire alors on est montées dans les étages… On a tourné en rond un moment… Loufoca était en train d'attaquer le loup-garou quand on est tombées sur eux. »

« Je pense que tu veux dire Miss Lovegood. » corrigea Albus, sans s'embarrasser de cacher son mécontentement.

« Ça ne fait rien. » répondit Luna, en observant le troisième année de sa Maison avec une compassion évidente. « Je me battais avec Ginny mais on a été séparées. Ensuite, il y avait des duels partout et je me suis retrouvée toute seule. Je cherchais les autres quand j'ai entendu Bowen crier. Le loup-garou essayait de l'entrainer… »

« Pour mieux le manger ! » s'écria Shelby, déclenchant des petits cris et gémissements terrifiés de la part des élèves plus jeunes qui l'entouraient.

« J'en doute fortement. » lâcha-t-il. Pour aller grossir les rangs de Greyback, en revanche…

« Je ne vais pas devenir un loup-garou, hein ? » demanda Bowen, entre deux sanglots. « Ce n'est pas la pleine lune. Je ne peux pas être contaminé. Ce n'est pas la pleine lune. »

Il y avait des traces de la malédiction autour de la morsure.

La lune comptait-elle si le loup-garou était sous forme animale ?

Il lui faudrait demander à Remus d'examiner l'enfant, lui seul pourrait donner une réponse certaine.

« Qu'est-il arrivé au loup-garou ? » demanda-t-il. « Comment l'avez-vous repoussé ? »

« Le Professeur Snape a dit que quand on ne savait pas quoi faire dans un combat, le mieux c'était de faire simple et de s'en tenir à ce qu'on maîtrise. » expliqua Josie. « Le loup avait lâché le garçon et s'était tourné vers Loufo… Lovegood pour l'attaquer, alors j'ai jeté un bouclier sur nous quatre. »

« Ensuite le plafond s'est écroulé avec le mur de l'étage du dessus et le loup-garou était de l'autre côté des débris. » continua Shelby. « On a eu de la chance. »

Albus croisa le regard de Luna qui semblait avoir compris que Bowen n'avait pas eu autant de chance que ça.

Cela réglait la question de quoi faire des enfants, cela dit.

Il devait les ramener à l'infirmerie.

Bowen était le seul à avoir une blessures importante mais tous les autres avaient aussi des bleus ou des écorchures… Ils y seraient aussi bien qu'ailleurs.

Des bruits de pas précipités l'alertèrent et il se releva souplement, baguette levée, un bouclier puissant entourant déjà tous les élèves…

Draco Malfoy déboula au pas de course et se figea lorsqu'il les vit avant d'approcher, main et baguette levées pour montrer qu'il n'était pas une menace. Albus baissa sa baguette, s'autorisant un léger sourire qui n'atteignit pas ses yeux.

« Je te pensais dans les cachots, Draco. »

L'adolescent secoua la tête. Il était couvert de poussière, sale, avait plus d'une estafilade et, surtout, avait l'air hanté. « Je cherche Granger. »

Le Directeur secoua la tête. « Je ne l'ai pas croisée. Harry ? »

« Il était en bas avec Sirius. » répondit le garçon, en haussant les épaules. Il continua à approcher jusqu'à toucher la joue Luna. « Tu n'as rien ? »

La jeune fille déglutit avec difficulté puis se jeta dans ses bras. Draco n'eut aucune hésitation avant de l'étreindre, plaçant une main à l'arrière de son crâne comme pour mieux la rassurer.

« C'est fini. » promit-il. « C'est fini. Tu n'aurais pas dû partir avec eux. »

« Ce sont mes amis. » protesta la quatrième année avec un reniflement. « Je n'ai jamais eu d'amis avant… »

« Moi aussi, je suis ton ami. » lui rappela Draco, dans un grondement mécontent. « Et contrairement à eux, je ne te demanderai jamais de charger dans le tas comme un stupide Gryffondor. » Le garçon ignora les exclamations indignées des divers lions. « Tu aurais dû rester près de moi. Tu aurais dû rester avec Astoria. » Par-dessus la tête de la jeune fille, il croisa le regard d'Albus. « La salle commune des Serpentards… »

« Je sais. » l'interrompit-il. « Une excellente initiative. Je te récompenserais bien par des points mais je crains que cela ne soit plus d'actualité. Le problème est d'atteindre la salle commune. »

« Non. » réfuta Draco. « J'y ai pensé. Kreattur ! »

Albus fût plus qu'un peu ahuri de voir l'elfe de maison de Sirius apparaître en plein milieu du couloir. N'était-il pas assigné à résidence ? Comment avait-il désobéi à Sirius ? Et pourquoi obéissait-il à Draco Malfoy ? Que…

« Kreattur a dit à Maître Draco de ne pas bouger de la salle commune. » siffla l'elfe, visiblement furieux. « Kreattur a dit à Maître Draco que Maître Draco n'allait pas aimer la manière dont Kreattur l'y ramènerait. »

« Sirius t'a-t-il ordonné de m'y ramener ? » rétorqua le garçon.

L'elfe plissa des yeux. « Maîtresse Cissy était une si gentille sorcière. Kreattur commence à penser que cette pauvre excuse d'elfe à chaussettes a raison sur son ancienne famille. »

Draco posa une main sur ton torse, au niveau du cœur. « Kreattur, tu me fais de la peine. Je croyais qu'on était devenus proches, toi et moi. »

Kreattur agita les oreilles avec un agacement manifeste. « Maître Draco et Maître Harry vont achever Kreattur avant que ce ne soit l'heure pour lui de voir sa tête montée sur le mur. Le poil de Kreattur devient gris depuis que Kreattur doit surveiller les jeunes Maîtres. »

Albus se racla la gorge, levant les sourcils en guise de question.

Le Serpentard haussa les épaules. « Kreattur a rallié les elfes de maison. Ils cherchent les élèves en danger et les ramènent dans les cachots. »

Pour toute réponse, Kreattur attrapa Luna et Josie avant de disparaître dans un craquement, uniquement pour revenir immédiatement et attraper deux autres élèves.

« Bowen doit aller à l'infirmerie. » intervint le Directeur.

« Dobby ! » appela Draco. L'autre elfe apparut immédiatement, avec un regard noir pour son ancien maître. « Monsieur Draco a appelé Dobby ? »

« Peux-tu emmener ce garçon à l'infirmerie, s'il te plait ? » s'enquit Albus.

Dobby se répandit en courbettes. « Oui, Albus Dumbledore, monsieur le Directeur ! »

En quelques minutes, l'affaire était pliée. Les deux elfes avaient évacué tous les élèves.

« Utiliser les elfes de maison était une brillante idée, Draco. » le félicita-t-il.

Le Serpentard secoua la tête, en croisant les bras. « J'ai… J'ai fait exploser le tunnel, en bas. Je ne voyais pas quoi faire d'autre… »

« Je suis certain que tu as fait au mieux. » répondit-il.

L'adolescent se frotta le visage, étalant la poussière sur ses joues. « Je suis quasiment certain que des élèves se sont retrouvés coincés dessous. Je n'ai pas mesuré… Je… Ça ne les a même pas arrêtés… À peine ralentis… »

« Tu as donné à beaucoup l'opportunité de fuir. » contra Albus, en lui serrant l'épaule.

Kreattur réapparut dans un craquement qu'il parvint à rendre indigné. « Maître Draco retourne aussi dans la salle commune. »

« Non. » protesta l'adolescent. « Je dois trouver Granger. Va voir si Potter a besoin d'aide. »

« Je vais me charger d'aller aider Harry. » intervint le Directeur. « Kreattur, pourquoi n'irais-tu pas t'assurer qu'aucun élève n'a besoin d'aide dans le tunnel ? Draco pense que certains pourraient être coincés sous les décombres. S'il y a des blessés, évacue-les vers l'infirmerie. »

L'elfe ne semblait pas impressionné et le regarda avec agacement. « Kreattur ne sert pas le grand loufoque. Kreattur sert la noble et ancienne nouvelle génération des Black. »

« Fais ce qu'il dit, s'il te plait ? » soupira Draco.

Kreattur sembla hésiter puis ses épaules s'affaissèrent. « Maître Sirius ne va pas aimer que Maître Draco ne soit pas en sécurité. Si Maître Draco se fait tuer, Kreattur sera très, très mécontent. »

« C'est noté. » railla le Serpentard. « Je ferai de mon mieux pour ne pas me faire tuer. Merlin me préserve de la colère de notre elfe de maison. »

L'elfe ne sembla pas saisir l'ironie.

Il hocha la tête et puis disparut.

« Il va falloir m'expliquer comment cet elfe en est venu à circuler librement dans mon école. » déclara-t-il. « Mais cela peut attendre. J'ai rendez-vous avec Lord Voldemort. »

« Essayez de le tuer, ce serait bien. » cingla Draco, en faisant quelques pas dans la direction d'où il venait avant de s'arrêter. Il se tourna à nouveau mais parut incapable de croiser son regard. « Avez-vous vu… Savez-vous si… »

« Je n'ai pas vu ton père. » répondit-il honnêtement et aussi gentiment qu'il le put. « Mais s'il est quelque part, c'est certainement à la tête des troupes, dehors, dans le parc. »

Le garçon acquiesça, presque tristement, puis repartit en courant à la recherche de sa lionne.

Albus s'autorisa un soupir avant de s'élancer lui-même vers les étages inférieurs.

°O°O°O°O°

Horace avait presque stabilisé l'Auror, à défaut de l'avoir sauvée, lorsqu'il entendit les bruits de course dans l'escalier.

Il n'hésita pas une seconde à l'abandonner pour se coller contre le mur et se transformer, d'un coup de baguette, en une énorme armoire. La Métamorphose lui avait plus d'une fois sauvé la vie. Personne ne pensait jamais à vérifier le mobilier.

Quelqu'un déboula dans la tour au pas de charge, le souffle court…

« Dora ! »

Il reconnut la voix du loup-garou et laissa filer le sort, redevenant humain.

Et il se retrouva face à un homme aux yeux entièrement ambrés, qui haletait, et dont les dents ressemblaient presque à des crocs à la lumière grisâtre qui filtrait par les arcades de pierre…

Il leva immédiatement les mains, regrettant d'avoir été aussi impulsif.

Il aurait dû rester une armoire un peu plus longtemps.

°O°O°O°O°

Remus devait lutter pour garder le contrôle.

Sous sa peau, Lunard poussait et poussait… Il sentait ses griffes labourer ses entrailles alors que le loup cherchait à sortir… Impossible, bien sûr, pas sans une dose de cette potion miraculeuse ou la pleine lune mais…

Le loup était fou.

Le sang de sa compagne s'étalait partout.

Tellement de sang.

L'endroit puait la mort.

Et ce n'était pas juste le cadavre de Grindelwald.

C'était elle.

L'odeur lui collait à la peau.

« Remus, Remus, mon garçon… » murmura Slughorn.

« Que faites-vous là ? » aboya-t-il, en s'accroupissant près d'elle.

Elle était…

Elle était livide.

Si pâle…

Tellement de sang…

Ses robes bleues étaient devenues écarlates.

Et la plaie que Slughorn avait visiblement dégagée, le tee-shirt déchiré, sa chair exposée sans pensée pour sa dignité…

C'était son pire cauchemar. Il avait toujours su que ça finirait comme ça. Elle était trop imprudente, trop...

Il attrapa sa main, la porta à ses lèvres… Ses doigts étaient froids, si froids… Il souffla dessus pour les réchauffer, ne chercha pas à ravaler le gémissement de détresse qu'émit Lunard mais qui passa par sa bouche…

« Albus m'a demandé de… » balbutia Slughorn, visiblement interloqué.

« Laissez-nous ! » rugit-il.

Le sang lui battait aux tempes.

Il ne pouvait pas survivre sans elle.

Il ne pouvait pas…

Il ne pouvait pas.

« Elle… Elle est toujours vivante, Remus. »

Il leva la tête vers le Professeur si vite qu'il sentit quelque chose claquer à l'arrière de sa nuque. Aussi vite qu'un prédateur ayant repéré une nouvelle proie.

« Quoi ? » demanda-t-il.

« Elle est toujours vivante. » répéta Slughorn, sans s'approcher. « Si vous me laissez terminer de la stabiliser… Si nous parvenons à l'emmener rapidement à l'infirmerie… Ce n'est pas… Ce n'est pas gagné, mais il y a des chances qu'elle… »

« Faite-le. » ordonna-t-il, plus loup qu'humain, plus Alpha que loup.

Slughorn se dépêcha de se remettre à genoux auprès d'elle, avec des difficultés liées à sa masse, puis il agita sa baguette et Remus pressa à nouveau ses lèvres contre la main de la jeune femme.

« Je suis là. » murmura-t-il contre sa peau. « Je suis là. Tu restes avec moi. Je suis là. »

« Voilà. » déclara Slughorn. « Cela devrait tenir le temps de… »

Remus n'attendit pas.

Il la prit dans ses bras, la cala avec autant de précautions qu'il le put contre son torse, et détala comme un loup en chasse.

°O°O°O°O°

Le monde n'était plus que sang, sueur et rage.

C'était pire à l'extérieur qu'à l'intérieur du château.

Le parc était un champ de bataille à grande échelle.

Harry s'était immédiatement dirigé vers la droite parce que c'était là où son père avait dit être dans son patronus mais il n'était pas allé bien loin avant de se retrouver pris dans les combats. Ça ne l'empêchait pas d'avancer. Mètre par mètre. Il se frayait un chemin. Sortilège par sortilège. Son patronus repoussait les Détraqueurs, offrant un répit aux sorciers et sorcières qui avaient ralliés Poudlard pour défendre le château…

Trois destins convergent ce jour. Trois hommes de l'ombre entrent dans la lumière. Le premier trouvera sa vengeance. Le deuxième trouvera sa rédemption. Le troisième trouvera sa mort.

L'espion était Anthony.

Ils n'avaient pas eu le temps pour les débats ou les explications mais cela semblait évident. Or, Anthony n'avait pas semblé éprouver de remords et il n'était pas mort puisque Harry lui-même l'avait enfermé, toujours assommé, dans un des placards à balais de Rusard, dans le hall, après l'avoir saucissonné un peu plus étroitement qu'Hermione l'avait fait. Il restait la vengeance.

Ce qui signifiait que Severus risquait toujours de mourir.

Et ça, il ne le permettrait pas.

Alors il se frayait un chemin, coûte que coûte.

°O°O°O°O°

Il ne la trouverait jamais.

Draco marchait plus qu'il ne courrait, à présent, évitant les quelques Mangemorts qui semblaient encore fouiller les couloirs, davantage pour mettre le désordre ou tuer gratuitement des gens que par souci tactique, semblait-il. À chaque fois qu'il s'était aventuré à regarder par une fenêtre, il semblait évident que les Aurors qui restaient, les Professeurs et l'Ordre du Phoenix étaient en train d'accomplir l'impossible et de repousser l'assaut. Peut-être y seraient-ils déjà parvenus sans la pluie qui rendait le terrain traître, les Détraqueurs et les quelques Mangemorts sur leurs balais avec leurs potions explosives qui continuaient à mettre le bazar.

Encore que les jumeaux Weasley semblaient avoir inventé une nouvelle version du Quidditch qui consistait à frapper les gens avec des battes en plein vol. Pas très éthique mais certainement efficace.

De Granger, il n'y avait aucune trace.

Il avait passé plusieurs cadavres.

Des recrues, des élèves d'âges divers, quelques Mangemorts… Il s'était arrêté à chaque fois pour soulever leur masque, même lorsque la carrure ou la taille n'avait pas été la bonne. Pour être certain. Parce que…

Ça le rendait malade.

Que son père ait pu participer à ce massacre, cela le rendait malade.

Il s'efforçait de rester sur ses gardes, concentré, mais son cerveau semblait rejouer en boucle ce moment où les Mangemorts avaient commencé à lancer des sorts de mort à l'aveugle sur la masse paniquée des élèves qui cherchaient à s'enfuir. Il lui semblait encore entendre les cris, les bruis d'os qui se brisaient alors que d'autres élèves écrasaient ceux qui avaient eu la malchance de tomber au sol, le rire gras de Greyback…

Il ne trouverait jamais Granger.

C'était comme chercher une aiguille dans une meule de foin géante.

Le château était grand, certains couloirs étaient endommagés, le plafond ou les murs s'étant effondrés, le forçant à faire des détours… Encore que, était-ce un détour s'il ne savait pas où il allait ?

Il aurait dû laisser Kreattur le ramener dans les cachots. Il y aurait été beaucoup plus utile.

Granger ne l'avait pas attendu, ne lui avait pas demandé de le suivre…

Je t'aime.

C'était facile de faire une déclaration d'amour et de partir se faire tuer.

C'était facile.

Il était en colère. Sous le choc et l'inquiétude et la peur… Il y avait de la colère.

Il n'était plus si loin de la classe d'Arithmancie.

Vector.

Il avait beaucoup aimé le Professeur d'Arithmancie. Elle était d'un calme et d'une logique qui faisaient parfois du bien au milieu du monde chaotique dans lequel ils vivaient.

Elle ne méritait pas de mourir abattue comme un chien.

Il se racla la gorge parce qu'une boule s'y était logée et que ce n'était ni le lieu, ni le moment.

Il tourna à gauche à la prochaine intersection, s'éloignant de la classe d'Arithmancie et du cœur du château pour mieux se rapprocher du couloir avec des fenêtres donnant sur l'extérieur. Il voulait jeter un coup d'œil, voir où en était la bataille qui résonnait comme autant de coups de tonnerre…

Il avait honnêtement renoncé à trouver qui que ce soit.

Ce fût la raison pour laquelle il se figea, presque choqué, lorsqu'il tomba sur Blaise complètement par inadvertance.

Il lui fallut plusieurs secondes pour intégrer ce qu'il voyait : son meilleur ami était assis au milieu du couloir, sa baguette abandonnée par terre. Il serrait Daphné dans ses bras mais Daphné était… Daphné était toute molle.

Inconsciente ?

Draco n'osa pas faire un pas en avant.

Parce qu'il savait qu'elle n'était pas juste inconsciente.

Elle était trop…

Blaise la berçait presque, le visage enfoui dans ses cheveux blonds…

Et puis il y avait le corps inanimé – mort – du Mangemort qui gisait entre lui et ses amis.

Le masque avait glissé.

C'était le père de Goyle.

Blaise avait dû…

Blaise avait…

Ils étaient allés chez les Goyle un nombre incalculable de fois, Blaise et lui. Pansy aussi. L'homme n'était pas beaucoup plus intelligent que son fils et il n'était pas non plus particulièrement sympathique mais… Mais il était très habile lorsqu'il était question de construire des choses avec des cubes en bois, cela Draco s'en souvenait de ses innombrables visites lorsqu'il était petit. Et il était patient avec les enfants, ne rechignait jamais à jouer avec eux. Plus que Lucius parfois et…

Blaise l'avait…

« Qu'est-ce que… Qu'est-ce qu'il s'est passé ? » balbutia-t-il, sans s'approcher davantage.

Il aurait dû.

Il aurait dû se précipiter, examiner Daphné, appeler Kreattur pour qu'il les sorte tous de là…

Il n'osait pas bouger.

Il n'osait pas bouger parce qu'il était déjà mort une fois cette année et qu'il avait perdu toute l'innocence qui lui restait. Ou, du moins, c'était ce qu'il avait cru avant ce jour là. Il était persuadé que s'il avançait, s'il rejoignait Blaise, s'il touchait Daphné et qu'elle était… Il était persuadé qu'une autre part de lui mourrait avec elle et il n'était pas tout à fait certain de ne pas en avoir déjà laissé un autre petit bout dans les cachots.

Il n'osait pas bouger.

Il ne pouvait pas bouger.

Blaise leva lentement le regard vers lui, le visage baigné de larmes. Il ne faisait pas un bruit, pourtant. Il pleurait en silence.

Draco sentit les larmes lui monter aux yeux à lui aussi.

Il tenta de les ravaler parce qu'un homme ne pleurait pas, c'était ce que Lucius lui avait appris. Un homme demeurait fort, un homme demeurait… Un chef de famille devait rester digne en toutes circonstances. Ne jamais rien montrer. Ne jamais faillir. Ne jamais faiblir.

« Blaise… » lâcha-t-il, sa voix se brisant de douleur pour la peine que devait éprouver son meilleur ami. Il était trop simple d'imaginer Granger à la place de Daphné, trop simple de…

Sans prévenir le monde explosa.

Il n'y avait plus ni haut, ni bas, ni droite, ni gauche.

L'espace d'une seconde tout à fait glorieuse, Draco vola. Il n'y avait ni douleur, ni peur, juste une absence de pesanteur…

Et puis le souffle de l'explosion le propulsa contre un mur et la douleur se manifesta, lui arrachant un cri étranglé.

°O°O°O°O°

Remus débarqua à l'infirmerie en trombe, passant entre les élèves stationnés aux portes comme autant de gardes superflus : les protections étaient toujours actives autour de cette partie du château. Mais il fallait les occuper, supposait-il, les empêcher de se mettre dans les pattes des soignants…

L'infirmerie était pleine à craquer.

Les lits étaient presque tous occupés. Élèves, professeurs, Aurors avec leurs robes bleues, membre de l'Ordre, Bill et Charlie… Pomfresh courrait partout, il y avait d'autres Médicomages reconnaissables à leur uniforme de Sainte Mangouste… Et…

« Andy ! » hurla-t-il, sa voix tonnant par-dessus le chaos ambiant.

Andromeda était en train d'examiner la tête d'un Auror mais lorsqu'elle l'aperçut, lorsqu'elle vit qui il tenait dans les bras… Elle abandonna son patient sans un mot pour se précipiter vers lui, avec une expression paniquée, le guidant jusqu'à un lit où il déposa avec précaution son précieux fardeau…

« Qu'est-ce qui s'est passé ? » demanda-t-elle, en écartant déjà les pans de la robe bleue, révélant le tee-shirt déchiré, dévoilant la plaie, une partie de son soutien-gorge. Il n'y avait pas de rideau à tirer mais Remus jeta un regard venimeux alentour pour décourager qui que ce soit de l'observer… Cependant personne n'avait le temps de se préoccuper de ce genre de choses. « Nymphadora ? Dora, ma chérie, tu m'entends ? »

Remus lui résuma ce qu'il savait, ce qui n'était pas grand-chose au demeurant, et l'observa jeter des sorts de diagnostic d'un geste tremblant. Le visage d'Andromeda, d'abord décomposé, reprit rapidement des couleurs et sa respiration se fit plus facile.

« Elle a commencé à colmater l'hémorragie toute seule… » murmura-t-elle, avant de se pencher pour poser un baiser sur le front de sa fille. « Tu vois ? J'ai toujours su que ces livres d'anatomie serviraient un jour… Maman va s'occuper du reste. Tu es en sécurité, maintenant. Ça va aller. Ça va aller, mon bébé, tu vas t'en sortir. »

Remus la regarda avec espoir. « Elle vivra ? »

Andy avait l'air déterminé mais il n'était pas sûr que… Il n'était pas sûr de ce qui était vrai et de ce dont elle voulait se convaincre. Dora avait perdu tant de sang… Et l'odeur de la mort s'accrochait à elle comme si…

Elle était très près du voile.

Sans répondre, elle commença à agiter sa baguette, les yeux fermés, fredonnant une litanie latine…

Remus se tut et observa, serrant la main de Nymphadora dans la sienne comme si cela pouvait la retenir sur cette terre. Avec lui. Où était sa place.

Sa compagne.

Slughorn débarqua après de longues minutes, le visage violacé et à bout de souffle. Il repoussa les tentatives d'une septième année pour le faire asseoir et se traîna jusqu'à eux, attendant que Andy ait terminé son incantation pour parler.

« Elle a déjà eu trois doses de reconstituant sanguin. Je ne recommande pas une quatrième. » haleta-t-il. « Remus. Une chaise. »

Il dût lâcher la main de la jeune femme pour sortir sa baguette et faire apparaître un siège avant que le Professeur de Potions ne s'écroule. L'homme se laissa aller dessus avec reconnaissance, une main posée sur le cœur.

« Vous vous sentez mal, Professeur ? » s'inquiéta Andromeda, en se détournant à regret de sa fille.

Slughorn agita la main. « C'est décidé, je me mets au régime. Comment va-t-elle ? »

« Elle avait commencé à régénérer sa blessure. » expliqua la Médicomage, en écartant avec tendresse des mèches éparses du visage de Tonks. « Ce n'est pas une utilisation naturelle de ses dons et cela la vide toujours de son énergie… J'ai réparé le reste. Elle a perdu beaucoup de sang mais je suis optimiste, si elle parvient à passer la journée, elle… Nymphadora ? »

Remus attrapa à nouveau la main de la jeune femme, la serrant au creux des siennes, lorsqu'il vit ses paupières papillonner.

« Nymphadora, tu m'entends ? » demanda Andy doucement.

« Dora ? » murmura Remus, en se penchant un peu plus. « Je suis là. Je… »

« Severus… » souffla-t-elle, sans sembler parvenir à complètement ouvrir les yeux.

Le coup de poignard qu'elle avait reçu n'avait pas pu être plus douloureux que ça.

Ignorant le loup enragé qui tournait comme un lion en cage dans sa poitrine, il lâcha sa main comme si elle l'avait brûlé et recula.

Severus.

Andromeda et Slughorn avaient tous deux l'air gêné mais pas surpris.

Severus.

À l'agonie, aux portes de la mort, alors que son loup hurlait de douleur à l'idée de la perdre, c'était le nom de Severus qui passait ses lèvres ?

Andy se racla la gorge. « Tu sais si… »

« Il était toujours vivant il n'y a pas si longtemps. » déclara-t-il avec un détachement forcé. « Il commandait le flan droit, je vais aller le relever. Il voudra la voir. »

« Oui, c'est aussi bien. » grimaça Andy. « On a besoin de tous les soignants possibles ici, de toute manière. »

S'arracher du chevet de la jeune femme alors qu'elle était si vulnérable, si près du voile, fût la chose la plus dure qu'il ait jamais faite. Il dût se battre contre son instinct le plus profond.

Mais Nymphadora voulait voir Severus.

Et il aurait fait n'importe quoi pour elle, à cette seconde.

Même aller chercher son amant.

Même s'arracher le cœur.

Ce qui, au fond, revenait au même.

°O°O°O°O°

Draco revint à lui graduellement.

Quelque chose bourdonnait. C'était tout ce qu'il entendait. Ce bourdonnement incessant.

Sa tête lui faisait mal.

Il porta la main à son front et siffla lorsqu'il rencontra une plaie. Il observa le sang qui tâchait ses doigts sans comprendre, puis réalisa qu'il était allongé au sol et entreprit de se redresser lentement.

Il ne comprenait pas ce qu'il voyait.

Là où s'était tenu Blaise, il n'y avait plus qu'un amoncellement de gravas.

À droite, la salle de classe était éventrée.

Et, à gauche…

À gauche, le mur… Non, il n'y avait plus de mur.

Il n'y avait plus que le ciel gris, la pluie qui tombait, les Détraqueurs qui filaient comme des flèches, et les balais qui zigzaguaient de temps à autre. La falaise à pic. Le vide vertigineux. Le lac en contrebas.

Il fixa la crevasse béante du regard plusieurs minutes, sans comprendre, puis il se traina jusqu'au tas de gravas et se mit à creuser.

Blaise et Daphné étaient là-dessous.

Il devait les sauver.

Il ne s'était pas arrêté pour essayer de sauver les élèves dans le tunnel.

Mais c'était différent.

C'était Blaise et Daphné.

Il devait les sauver.

Ils étaient là-dessous.

Il lui suffisait de creuser.

°O°O°O°O°

Remus était presque au deuxième étage lorsqu'il entendit le hurlement suivi du rire menaçant de Greyback.

Oubliant Severus, oubliant presque Nymphadora, il changea de direction et courut vers le bruit qui venait d'une salle de classe vide. Il entra en trombe mais comprit rapidement ce qui se passait lorsqu'il vit Parvati Patil recroquevillée dans un coin, terrifiée, et le loup au pelage fauve qui trainait Lavande Brown vers Greyback et la seconde entrée, par la jambe.

La jeune fille avait perdu sa baguette mais ne se laissait pas faire pour autant, elle donnait des coups de pied dans le museau du loup malgré le fait qu'il lui grognait dessus. Lionne jusqu'au bout de ses ongles manucurés. Le Choixpeau ne se trompait jamais même quand les raisons pour une répartition ne semblaient pas toujours évidentes.

« Lâche-la. » ordonna-t-il et le loup s'immobilisa, reconnaissant l'autorité dans sa voix.

Greyback cessa de rire mais semblait ravi de le voir.

« Elle est à moi. » déclara gaiment le sorcier, avec un sourire torve. « Ma Marque, ma louve. »

« Je ne crois pas non. » gronda-t-il. « Lâche-la. »

Il mit davantage de force dans son ordre, ne se laissa pas hésiter. C'était un concours de dominance et…

Les mâchoires du loup se desserrèrent suffisamment pour que Lavande lui assène un autre violent coup de pied et se libère. Elle s'éloigna à quatre pattes, pleurant de peur. Le loup tenta de la rattraper mais Remus lança un sort qui le toucha en plein museau et donna à la jeune fille le temps de se réfugier derrière lui.

« Incapable. » siffla Greyback. « Je te punirai plus tard. File. Nous n'avons plus de temps. » Le loup ne se le fit pas dire deux fois. Il fit volte-face et détala. « Quant à toi, Lupin… On a un compte à régler mais ça devra attendre. »

« Pourquoi ? » se moqua-t-il. « Tu as trop peur d'affronter un autre Alpha ? Peur de perdre ta meute ? Comme tu as perdu ta compagne ? »

Le grondement qui échappa à Greyback était plus animal qu'humain. « Tu payeras pour Loba. »

Il écarta le bras d'un geste théâtral. « Je t'attends. »

Mais Greyback n'attaqua pas. « Je suis surpris que tu oses parler de compagnes… On dit que la tienne préfère coucher avec les traîtres dernièrement… Tu ne pouvais pas la satisfaire ? Quel genre de loup se laisse humilier comme ça ? Et tu prétends être un Alpha ? »

« Je ne prétends rien. » lâcha Remus. « Tu sais ce que je suis. Tu sais que je vais t'arracher ta meute. Et tu as peur de moi. »

« Je n'ai peur de personne et surtout pas d'un louveteau qui découvre à peine son loup. » cracha Greyback. « Mais je n'ai pas le temps de te régler ton compte. Le Seigneur des Ténèbres n'aime pas qu'on soit en retard. » Il jeta un regard méprisant à Lavande. « Garde-la. Elle m'amuserait une nuit ou deux mais elle chouine trop pour moi. »

Lunard lui intimait d'attaquer, de morde et de déchirer…

Mais avec deux adolescentes dans la pièce…

Il garda sa baguette levée, attendit que Greyback soit parti même si ça le tuait de le laisser s'en tirer à si bon compte, puis il se précipita sur Lavande pour examiner sa jambe. Elle eut un mouvement de recul mais ne chercha pas à se débattre lorsqu'il inspecta les plaies sur son mollet.

Multiples morsures.

Ce n'était pas la pleine lune.

Mais sous forme de loup…

Il renifla aussi discrètement qu'il le put. C'était dur à dire parce que les deux adolescentes empestaient la terreur mais… Il aurait pu jurer qu'il percevait Lavande différemment de Parvati, comme un sixième sens qui se serait activé. Et, lorsqu'il jeta un sort sur une des morsures, il trouva une trace de la malédiction.

Il n'eut même pas besoin de le dire à voix haute, à peine de croiser son regard pleins de larmes.

« Non. » s'étrangla la jeune fille. « Non, non, non… »

« Je suis désolé. » offrit-il.

Elle continua de secouer la tête. « Non… Non, non, non, non, non, je ne peux pas devenir un loup-garou ! Je suis trop jolie et trop jeune et… Non. »

Malgré lui, il laissa échapper un bruit amusé. Il fallait admirer sa liste de priorités. « Je vais te porter jusqu'à l'infirmerie, d'accord ? » Épuisée, tremblante et en pleurs, elle se contenta de hocher la tête. Avant de la soulever, il se tourna vers Parvati. « Tu es blessée ? »

La jeune fille ne répondit pas. Il voulut s'approcher d'elle mais elle recula jusqu'à être complètement collée au mur, le dévisageant avec autant de peur que lorsqu'elle avait regardé le loup et Greyback. Elle le visait également de sa baguette.

Ah.

Tout libéré qu'il était par la Potion Révèle-Loup, il avait presque oublié cet aspect des choses. La peur des gens. Leur dégoût.

« Parvati ? » appela Lavande, d'une voix tremblante.

Le regard de la jeune fille dériva jusqu'à la jambe sanguinolente de sa camarade. Son expression en disait plus long que tous les discours.

Lavande dût le comprendre parce qu'elle se mit à pleurer plus fort.

« Je ne peux pas te laisser toute seule ici, Parvati. » déclara Remus, un peu brusquement. Il ramassa Lavande et la souleva sans difficulté, la laissant enfouir le visage dans son épaule pour mieux sangloter. Il ne chercha pas à réprimer l'élan protecteur qu'il éprouva. Meute. Elle était Marquée, pas par lui certes, mais cela n'avait pas grande importance. Il ne laisserait pas une gamine grandir comme lui avait grandi, sans autres loups, terrifiée de sa propre dualité, seule. Elle lui appartenait désormais. Elle appartenait à sa meute. Elle était sous sa responsabilité. Et il n'aimait pas l'idée que son amie la regarde avec dégoût. « Passe devant. »

°O°O°O°O°

Harry repéra finalement Severus parmi les sorciers qui repoussaient les Mangemorts vers le lac.

« Papa ! » cria-t-il, cherchant à s'approcher.

Son père tourna la tête vers lui, croisa son regard puis regarda par-dessus son épaule avec un soulagement manifeste…

La seconde suivante, avant qu'il ait pu le rejoindre, des bras se refermaient sur lui et Sirius le traînait en arrière, vers le château.

« Je sais que j'étais aussi con et inconscient à ton âge, je sais, et le pire c'est que je n'ai pas beaucoup grandi… Mais là, vraiment, c'est le pompon. » grommela son parrain, tout du long. « On ne se casse pas le cul à essayer de te sauver la vie pour que tu ailles te faire tuer sur un champ de bataille, Harry, merde. Si on te dit de faire quelque chose, c'est pour ton bien. Tu crois que ça m'amuse de jouer les adultes responsables ? Pas du tout. Si, moi, je te dis que c'est trop dangereux, c'est que c'est trop dangereux. Putain. Tonks est morte. Tu crois que j'ai envie de t'enterrer toi aussi ? Tu crois que Severus pourrait survivre à ça ? »

Il cessa de se débattre lorsque les mots le percutèrent.

Tonks est morte.

Il ne s'attendait pas à ce que ça fasse si mal.

Il ne pensait pas s'être autant attaché en aussi peu de temps.

Dora était…

Severus le savait-il ?

S'il savait alors il ne pouvait pas avoir la tête à ce qu'il faisait.

S'il savait…

Le troisième trouvera sa mort.

Sans plus hésiter, il frappa le pied de Sirius du talon et, profita de sa surprise et sa douleur pour se dégager et filer droit vers là où il avait aperçu Severus.

Mais il n'était déjà plus là.

°O°O°O°O°

Albus venait à peine de se frayer un chemin à l'extérieur par un trou dans la muraille lorsqu'il repéra la silhouette de Kingsley qui boitait vers lui. Le sorcier avait vécu des jours meilleurs. Il était trempé, couvert de boue et de sang, boitait bas et favorisait son côté gauche. Et c'était sans parler de la large plaie qui lui barrait l'œil et l'obligeait à le garder fermer.

« Albus… » grimaça l'Auror, l'air grave, dès qu'il fût assez près. « Votre frère… »

Non.

Non.

Il voulut courir, retrouver Abelforth, provoquer Voldemort…

« Albus ! » s'écria Aurora, en se précipitant vers lui. Dès qu'elle fût assez près, elle attrapa son bras, tira comme pour l'entraîner avec elle… « Minerva est épuisée. Elle ne pourra pas maintenir les armures beaucoup plus longtemps mais c'est notre meilleur atout ! »

L'Occlumencie.

Cette amie à double-tranchant.

Sans plus tergiverser, il suivit son professeur d'astronomie.

°O°O°O°O°

Severus s'autorisa un moment de soulagement mêlé d'irritation lorsqu'il vit Sirius entraîner le garçon qui se débattait vers le château, là où il serait en sécurité. Du moins, il l'espérait.

Beaucoup de Mangemorts avaient fui le bâtiment uniquement pour se retrouver confrontés aux armures de Minerva qui continuaient à leur donner l'avantage. La sous-directrice devait être à bout de forces. Lui-même accusait le coup de la sphère de Troie et il l'avait maintenue moins longtemps qu'elle.

Il entraperçut Albus et ses robes bariolées.

Le Directeur pouvait prendre le relais, Severus n'en pouvait plus de coordonner la bataille.

Il n'en pouvait plus tout court.

Mais Sirius avait Harry et c'était l'important.

Il n'avait aucune idée de comment le reste arriva.

Était-ce un accident ou cela avait-il été orchestré ainsi ? Avait-il été rabattu à son insu par les Mangemorts ? Il n'avait encore aperçu ni Bellatrix, ni Lucius, ni aucun membre du cercle intime du Seigneur des Ténèbres, ce qui était plus que suspect, mais cela ne signifiait pas que personne ne coordonnait les troupes dans le camp opposé.

Comment, sinon, expliquer qu'il trébuche sur le corps d'Abelforth Dumbledore ?

Comment expliquer que, lorsqu'il leva la tête, ce fût pour croiser les yeux rouges de Lord Voldemort ?

Il était mort.

Ce fût la première pensée qui lui traversa l'esprit.

La deuxième et la troisième aussi.

Puis, passé ce moment de panique, il se releva aussi souplement qu'il le put et prit une position de duel, tentant désespérément de prétendre que ses mains ne tremblaient pas, que sa jambe n'était pas trop raide pour soutenir entièrement son poids, que…

Un sourire amusé étira les lèvres du Seigneur des Ténèbres.

« Tu ne manques décidément pas de bravoure, Severus. » commenta le mage noir. « Tu m'affronterais ? Toi ? On dit que tu n'es plus que l'ombre de toi-même depuis notre dernière rencontre… Que ton corps te trahit. Poétique pour un traître, non ? »

Severus s'humecta les lèvres, rassemblant ce qu'il lui restait de forces. Il ne perdit pas de temps en paroles ou en discours. C'était la tactique préférée du Seigneur des Ténèbres, parler jusqu'à abrutir son adversaire ou à faire germer la panique dans son cœur.

Il ouvrit le bal d'un sectumsempra que le mage noir para d'un geste presque blasé.

« As-tu remarqué ma nouvelle baguette, Severus ? » s'enquit le Seigneur des Ténèbres, sur le ton de la conversation, en faisant tourner la baguette à l'aspect brut, ni polie, ni laquée, sans décorations particulières. On aurait dit une fine branche que l'on venait d'arracher à un arbre.

Il ne répliqua même pas.

Il n'en avait pas besoin.

La Marque le brûlait tellement que Severus devait serrer les dents pour ne pas hurler. Il s'efforça de garder l'esprit clair mais même l'Occlumencie avait ses limites.

« Peut-être pas. Tu ne sembles pas avoir remarqué, non plus, que tout ceci n'était qu'une diversion. » continua tranquillement le mage noir, après avoir paré un deuxième maléfice. « Tu perds la main, mon cher espion. »

Le Maître des Potions n'eut pas le loisir de se demander ce que cela signifiait.

Le Seigneur des Ténèbres avait visiblement terminé de jouer avec lui. D'un coup de baguette presque négligent, il l'envoya glisser au sol sur plusieurs mètres et vola l'oxygène de ses poumons. Severus ouvrit la bouche sans parvenir à avaler d'air.

« Ah, Peter… Pile à l'heure. » commenta le mage noir alors que le rat qui venait de se frayer un chemin dans l'herbe jusqu'à eux se transformait en un homme rougeau et court sur pattes. « Est-ce fait ? »

Peter Pettigrow s'inclina avec un grand sourire. « Oui, Maître. Bellatrix vous attend à Azkaban pour vous faire son rapport. »

« Bien… Bien… » commenta le Seigneur des Ténèbres, en reportant son attention sur son ancien espion. « Dans ce cas, il est temps de prendre congé. Qu'en dis-tu, Severus ? Il faut bien en finir un jour, non ? »

Le mage noir pointa sa baguette sur lui.

Severus ne se laissa pas détourner le regard.

Il voulait affronter la mort en face.

Il voulait…

Harry, je suis désolé, je me suis battu jusqu'au bout.

Nymphadora, attends-moi, mon amour.