VI. L'idéal

17 janvier 1999 (Rafael)

Je me réveille parce que, dans un dernier éclair de lucidité, j'ai mis un réveil avant de m'écrouler. Ça me laisse deux heures pour être présentable et alerte pour le rendez-vous avec le professeur Fonsfata. Une brève introspection m'apprend que mon corps aimerait encore du repos, mais que je ne souffre heureusement pas d'un trop grand mal de tête ou de nausées. Il semble que le cocktail exotique de Cyrus Lupin n'ait pas d'effets secondaires trop désagréables.

Comme effet primaire, il m'a permis de passer une soirée mémorable, où j'ai ri, dansé et osé des trucs comme si toutes les limites que je me pose le reste du temps avaient tout bonnement disparu. En plus, j'ai l'impression de me souvenir de tout, je me félicite, en prenant un café et un petit déjeuner, dans un appartement totalement silencieux. Un grand luxe.

Je suis donc en avance et relativement en forme à l'hôtel de Fonsfata. Je passe le temps en regardant ma baguette, en me demandant si on arrivera effectivement à lui "rendre sa liberté" ou si c'est une quête qui sera déçue. Un gars positif et sûr de lui ne choisirait-il pas plutôt de changer de baguette et de brûler à jamais la preuve de ce maléfice ? Est-ce que mon incapacité à couper les derniers ponts avec mon héritage maternel n'est pas le truc auquel je devrais m'attaquer plutôt que de chercher à plaire à tout un chacun ? J'en suis là dans mes pensées quand Tonks-Lupin arrive, cinq minutes avant l'heure du rendez-vous, enveloppée dans un grand manteau de lainage grenat.

"Nous sommes à Londres ce week-end", elle m'apprend. "Mais Remus a dû rentrer en urgence à Poudlard et j'ai dû réveiller Cyrus pour qu'il vienne garder les jumeaux. Il paraît que vous vous êtes rencontrés ?"

Un Cyrus acceptant de jouer le baby-sitter des jumeaux me prend totalement par surprise et me montre combien j'ignore tout des dynamiques de cette famille.

"Ronald Weasley nous a présentés", je commente un peu au hasard.

"Ah, voilà. Il est arrivé en disant que je cachais un type sympa et je n'avais pas le temps de creuser. Une bonne soirée alors ?"

"Plutôt", je confirme prudemment. À la réaction de Ron et la question de Cyrus, il est clair que personne ne me remercierait de parler des potions préparées par ce dernier.

"Ne t'inquiète pas, je ne veux surtout pas savoir les détails", elle s'amuse. "Bill et Fonsfata nous attendent. Tu aurais dû monter les rejoindre."

Quand il nous a installés sur les fauteuils du coin salon de sa très grande chambre d'hôtel - jamais vu une chambre aussi grande et luxueuse, Fonsfata étudie longuement ma baguette, avec des procédés qui me semblent en tout point égaux à ceux de Bill. Mais ce dernier ne dit rien - moi, j'aurais sans doute babillé à n'en plus finir. Tonks-Lupin reste toute aussi silencieuse. Je ronge mon frein.

"Le maléfice est là depuis très longtemps", finit par annoncer Fonsfata avec une voix de professeur habitué à expliquer ses conclusions. "C'est difficile d'être certain, mais j'oserais presque dire depuis la conception de cette baguette. Je ne sais pas si Ollivander vous l'a dit, mais elle n'est pas seulement faite de bois d'oranger et de crin de licorne, cette baguette. Plus précisément, le crin de licorne a été trempé dans du sang. Je dirais le sang d'un de vos ancêtres, Monsieur Soportújar. C'est une pratique plus qu'ancienne et qui a été largement abandonnée pour diverses raisons. Mais ce qui nous intéresse aujourd'hui, ce sont les raisons pour lesquelles le fabricant a fait ça. On peut avancer deux théories. Soit, il l'a fait pour assurer qu'en effet cette baguette conviendrait à une majorité des descendants génétiques de son premier commanditaire - ça a toujours été la principale raison de l'utilisation de cette méthode. Soit, ça a été fait pour rendre possible la pérennité de la malédiction... Un mélange d'ailleurs des deux motivations est envisageable", il termine.

Bill a l'air fasciné, Tonks-Lupin se mordille les lèvres et, moi, j'essaie d'imaginer ces ancêtres d'un autre âge et leurs négociations avec un faiseur de baguette sans identité. Fonsfata ne se formalise d'aucune de ces réactions.

"Pour aller plus loin, il faudrait plus d'informations. Y a-t-il d'autres baguettes ? Ont-elles les mêmes caractéristiques ? Vous avez parlé de votre grand-mère ? Est-elle..."

"Elle est décédée il y a neuf ans", je réponds, agacé du regard de Tonks-Lupin et Bill Weasley sur moi.

"Avez-vous conservé sa baguette ?"

"Dans ma famille, on conserve les baguettes, professeur Fonsfata."

"Où est ce matériel ?"

"Dans un coffre gobelin à Cordoue. Il n'y a pas d'établissement gobelin à Grenade", je lâche presque à contrecœur. Tout ce qui a trait à mon passé est un peu honteux, il me semble. Rien à voir avec le luxe confortable de cette chambre, avec l'expertise tranquille et reconnue de ce Briseur de sorts et de son ancien élève. Rien à voir avec l'efficacité professionnelle, l'aisance politique et le charisme de ma mentore. Tout mon passé, lui, parle de pauvreté, de persécution, de limitation. Voire de malédiction.

"Je serais intéressé de les examiner", énonce Fonsfata en me regardant. Visiblement, il a senti ma réticence.

"C'est un voyage long et coûteux", je lui oppose.

"Deux Portoloins, et c'est réglé !", s'exclame Bill Weasley sortant de sa réserve.

"Les Portoloins sont coûteux, Bill", intervient Tonks-Lupin d'une voix raisonnable. "Rafael vient juste de commencer son aspiranat."

"Même si j'y allais aujourd'hui, c'est un dimanche et je ne pourrai jamais voir les Gobelins avant demain. Je ne peux pas m'absenter", je rajoute, content qu'il existe aussi cette raison objective au-delà de mes honteuses limitations pécuniaires.

Fonsfata et Bill regardent alors Tonks-Lupin qui secoue la tête.

"Non, je ne vois pas comment je ferais accepter au Bureau des Aurors que Rafael parte plusieurs jours - à moins d'expliquer toute son histoire. Et je ne pense pas que ça soit une bonne idée. Un aspirant dont la baguette est limitée par une malédiction ? Ce n'est pas une réputation souhaitable."

Non, j'abonde silencieusement. Mouton noir.

"Ok", estime Bill après un assez long silence méditatif. "Moi, je peux prendre des vacances et aller les chercher. Il faut juste que tu passes demain chez les Gobelins, Rafael, et que tu me donnes un pouvoir pour le faire. Si on l'établit à Londres avec les Gobelins, ce sera solide."

"Je n'ai... pas les moyens de...", je balbutie, terrifié par cette nouvelle efficacité.

"Je comprends, Rafael. J'ai été dans ton cas, à compter chaque Gallion", prétend Bill. "Mais j'ai un bon salaire, et depuis assez longtemps pour avoir maintenant des économies. Et je n'ai jamais vu l'Alhambra."

"L'Alhambra est à Grenade, pas à Cordoue", je corrige presque par réflexe.

"Cordoue a une belle réputation magique également", commente Fonsfata, magnanime.

"Un troisième portoloin et ce sera réglé", badine Tonks-Lupin en guise de conclusion.

Personne ne fait ça pour toi, je rumine en marchant sous la pluie glacée jusqu'à mon appartement loué en colocation - pauvreté et limitation, là encore. Ma mentore veut améliorer tes résultats parce qu'elle sera notée sur sa capacité à faire de toi un Auror fonctionnel. Fonsfata veut étudier un truc rare et Bill a envie de profiter de ce cours particulier. Tout le monde se fiche de savoir pourquoi les baguettes de ta famille ont été ensorcelées. Personne n'a demandé de quoi ta grand-mère était morte ! La liste de mes constats amers me saisit à la gorge. Il me faut de longues inspirations pour dépasser ce point de rage aveugle et d'auto-apitoiement.

Car, est-ce important ? Est-ce qu'il n'est pas rassurant au fond que tu connaisses leurs motivations ? Ils ont leurs propres raisons. Tu ne leur devras rien après. Si ça réussit. Si ça débouche sur quoi que ce soit. Parce que personne ne t'a non plus promis qu'il y avait une solution. Peut-être que ça finira par un grand feu de joie - quand tu auras mis de côté assez d'or pour t'acheter une baguette fonctionnelle. Un dernier effort avant de remiser tout le passé à tout jamais...

Je m'arrête sur un pont et je regarde la Tamise s'écouler en flux lourds et boueux. Peut-être que c'est le bon compromis : un dernier effort qui, s'il n'aboutit pas, me permettra de me dire que je dois tout abandonner sans me sentir un traître.

Sauf qu'il reste Don Curro. En n'allant pas à Cordoue, je laisse passer la chance de mesurer ce qu'il savait de la malédiction durant toutes ces années. Ou j'échappe à la nécessité de regarder ça en face. Je ne prends pas le risque d'entacher le seul lien que j'ai encore avec mon passé.

Je suis trempé avant d'avoir totalement tranché.

13 janvier 2021 (Dora)

Le premier rapport d'Iris arrive trois heures après qu'elle ait quitté mon bureau. Pas que j'attendais autre chose. Il dit que les dispositifs de surveillance sont en place des deux côtés de la mer d'Irlande. Il dit que les deux commandants régionaux sont coopératifs. Il dit que les équipes sont alertées sur l'identité des commanditaires et les liaisons possibles entre les deux lieux. Il dit enfin qu'elle est joignable.

Je l'appelle donc et je ne laisse aucune ambiguïté sur la nature de mon appel. "Merci pour ton rapport, Auror Lupin-McDermott."

"Tu as des questions, Commandante", elle répond sans état d'âme, je crois.

"Oui. Qu'est-ce qui n'est pas dans ce rapport, Iris ? Est-ce que quelque chose te pose question ? Est-ce que quelque chose te gêne ? Est-ce que ton instinct te dit qu'on merde… ? C'est tout ce qu'on n'écrit pas qui m'intéresse."

Ma question directe me vaut au moins un demi sourire, avant que ma fille se lance : "Mark m'a demandé si on avait le profil de l'infiltré et j'ai répondu ce que tu avais conseillé : qu'on ne savait pas et qu'il y en avait peut-être plusieurs. J'ai mis ça sur le secret de Bruxelles. Mais... Forrest est dans l'équipe... et Ron m'a dit qu'ils étaient aspirants en même temps. Et est-ce que tu sais si Sopo est reconnaissable ?"

"C'est une bonne remarque, Iris", je reconnais. "Je vais prendre le prétexte de ton rapport pour appeler Philippine et lui en parler. D'autres choses ?"

"Pas pour l'instant, Commandante."

"Tu vas rentrer ?", je demande.

"Je vais passer la première nuit avec les équipes. Leur mettre un peu la pression pour qu'ils soient vigilants."

"Samuel... ?", je m'inquiète, en essayant de me rappeler si je sais sur quoi mon gendre travaille en ce moment. Ce qui vient de proéminent est qu'il doit avoir un procès bientôt.

"Ça fait partie des aléas de notre métier et... sa mère va l'aider... ", prétend ma fille en relevant le menton. Ok, ça ne doit pas bien tomber, je décide, vérifier la charge de travail de mon gendre remonte en flèche sur mon agenda.

"La Division prend en compte les contraintes de tous ses agents", je lui rappelle patiemment. "Mais mettre la pression me paraît une bonne idée. J'essaie de creuser sur cette question de l'apparence de Sopo."

"Merci, Commandante", elle me répond avec cette distance qu'elle aime bien mettre parfois - qu'elle doit avoir besoin de mettre sans doute. Je vois qu'elle retient une question et je décide de ne pas m'enfuir.

"Pose tes questions Iris. Là où tu es, tu as besoin d'information", je souligne.

"Sopo... tu as de ses nouvelles de lui ?", elle se lance sans chercher à y mettre trop de formes.

"De loin en loin. Indirectement et directement", je précise. "Il m'envoie parfois des sortes de rapports d'étape... - dans le même style cryptique et poétique que tu as pu voir dans le dossier."

"Mais tu ne savais pas qu'il était là", elle vérifie sans oser me regarder en face.

"Certainement pas", je confirme avec patience. "Je promets de partager ce que je pourrais savoir de nouveau."

"Merci", est sa conclusion. "Prochain rapport dans trois heures."

Moi, j'hésite ensuite entre appeler Philippine pour creuser l'affaire ou la mère et le supérieur de Samuel. La conscience professionnelle l'emporte de très peu.

"Je n'aurais jamais dû te parler de Soportújar", juge Philippine Maisonclaire quand j'ai posé mes questions sur l'apparence actuelle de Rafael. "Tu es trop sentimentale - ta fille, ton ancien aspirant, tu perds toute mesure."

"Je ne te parle pas de moi ou d'Iris, mais des Aurors de sa génération qui ont été de service, en cours, voire en colocation avec lui", je soupire. "Nous ne sommes pas si nombreux pour que je puisse tous les écarter des missions concernées."

"Il a commencé son infiltration en Espagne", elle me rappelle.

"Il n'est pas reconnaissable", je suppose. Elle se tait. Je n'aurais pas de meilleure confirmation. "Ça doit bien lui plaire", je commente donc. Est-ce que j'ai rencontré dans toute ma vie quelqu'un qui ait eu autant envie d'être un autre que Sopo ?

"Je ne le connais pas, moi, Dora", remarque Philippine avec plus d'empathie que précédemment. "Quand je t'ai connue, tu ne t'amusais plus à former des aspirants... Plaisanterie mise à part, son apparence actuelle, peu de gens la connaissent et je n'en fais pas partie. On ne peut pas se permettre qu'une photo ou que son nom de naissance circulent."

"Je comprends", je promets avec sincérité. Comprendre n'est pas se pardonner entièrement d'avoir peut-être poussé un jeune homme dans une voie difficile, faite de secrets, de risques et de certainement beaucoup de solitude.

"Tu... tu t'inquiètes pour lui ?", elle veut savoir. C'est subtil, mais je sens bien qu'elle est passée à un registre plus privé.

"Je ne m'inquiète pas autant de sa sécurité que des intentions de cette petite bande et leurs activités sur mon territoire", je prétends - ce n'est pas foncièrement faux. Juste une hiérarchie très ténue. "Comme tu l'as souligné, ça fait un moment que Rafael ne demande plus de conseils et qu'il accepte des missions... dangereuses et engagées... C'est un grand garçon qui a ses propres raisons pour prendre autant de risques et de sacrées bonnes dispositions pour s'en sortir... "

"Zorrillo en parle presque dans les mêmes termes... J'avoue que je suis curieuse."

"Je ne crois pas que les détails pertinents doivent circuler davantage que son nom ou sa photo."

"Touché", elle se marre. "T'es vexée de ce matin, Dora ? Pourtant, tu peux être fière de ta fine équipe. Ils nous ont bien tordu le bras. Zorrillo était furieux. Je ne pouvais que le soutenir."

"Je sais bien", je reconnais facilement. "Ils m'ont fait flipper parce que je n'étais au courant de rien..."

"J'ai vu !"

"... mais je crois que je ne suis pas totalement de parti pris quand je pense que je peux leur faire confiance..."

Philippine grimace.

"Je m'excuse de ce que j'ai sous-entendu au début de notre conversation, Dora. Sincèrement. Je ne veux pas tout coller sur le dos de Zorrillo, mais c'est bien ce que lui pense. Que tu pousses ton équipe à creuser derrière notre dos parce que tu veux être en position de sauver ce fameux Mouton noir", elle précise. "Je t'aime beaucoup Dora, mais je ne te ferai pas l'injure de te penser sans subtilité. Tu pourrais faire ça. Mais je ne crois pas que c'est ce qui s'est passé. Ton équipe... ils sont un peu trop malins pour toi aussi parfois... non ?"

"Promis, on a recadré les pulsions d'initiative incontrôlées à tous les étages", je réponds sans lui faire l'injure de prendre sa camaraderie pour gallion comptant.

"Ron et Iris ?", elle doute ouvertement.

"J'espère que les rapports que tu reçois t'en convainquent, Philippine."

"Ce sont de bons rapports qui montrent le professionnalisme de ta fille et l'ampleur de votre dispositif de surveillance", elle formule lentement. "Je continue néanmoins à craindre que nos cibles ne soient pas aussi naïves et peu connectées que ton équipe semble collectivement le croire. Mais je serais contente d'avoir tort."

J'avoue que, derrière, je suis, moi, bien contente d'appeler la mère de Sam et de lui demander si je peux être moi aussi une grand-mère utile. Ça m'évite de laisser libre cours à une malheureuse paranoïa.

"En dehors de faire revenir ma fille de sa mission", je précise ma question parce que c'est sans doute ce qui vient d'abord à l'esprit de Fergie McDermott. Ma propre mère avait trouvé que je laissais mes propres jumeaux bien trop tôt et ils avaient l'âge qu'ont Klervie et Nimuë aujourd'hui. Iris a repris quand les filles ont eu un an et la mère de Samuel n'a jamais réellement compris pourquoi, même si elle est ravie de s'en occuper.

"Je ne sais pas, Dora". Fergie a fini par utiliser mon prénom, mais ça lui demande toujours un effort. Elle serait sans doute étonnée si elle savait que c'est le même effort que j'entends dans la voix de mes subordonnés quand je les invite à le faire. "Je suis rentrée chez moi. Je leur ai laissé à dîner. Je crois que Samuel a du travail, mais il pense s'y mettre quand les filles seront couchées... "

"Merci, Fergie. Je vais passer l'aider", je lui annonce.

Il me faut encore trois quarts d'heures pour finir de signer trois rapports et surtout prévenir Remus de tous ces développements qui font que je ne vais pas rallier Poudlard ce soir. Sans surprise, il essaie de cacher son inquiétude pour notre fille et trouve juste et "bien" que je fasse mon maximum pour soutenir Samuel. Plus étonnant, parce que plus rare au final, est sa question :

"Et toi, tu vas bien ?"

"Moi, je regrette juste qu'Iris ait l'air coupable de quoi que ce soit...", je soupire, contente de pouvoir le dire à quelqu'un. Ron ou Dawn n'auraient pas une once d'empathie, je le sais.

"Je ne parle pas de ça", me coupe Remus. "Cette histoire a l'air... Rafael dont on n'a pas de vraies nouvelles depuis des années... des dimensions européennes… Je dirais que c'est encore un peu plus… intimidant que ton quotidien habituel... Je me trompe ?"

"Il en faut davantage pour m'intimider", je mens et je suis transparente de ce que je lis dans ses yeux. "Je ne sais pas encore, Remus, si c'est juste un gros soufflé qui va retomber ou quelque chose... de réellement intimidant..."

Il accepte cette réponse-là, mais m'enjoint à ne pas "m'épuiser en voulant tout prendre sur moi" et à ne pas hésiter à l'appeler si j'ai besoin.

Je rumine encore la première partie de ce conseil, qui me paraît difficile à tenir, quand je sonne chez ma fille et mon gendre. Samuel blêmit quand il me reconnaît et laisse échapper un "Iris ?" affolé qui est comme une gifle.

"Désolée, Samuel. J'aurais dû te prévenir", je m'empresse de le rassurer. Je vais jusqu'à poser une main sur son épaule. "Iris va bien de ce que je sais. Aucun développement inquiétant de leur surveillance. Mais il paraît que tu as un procès demain. Je vais m'occuper des filles... "

"Comm..."

"Dora, Samuel. La Commandante espère avoir fini son service", je précise.

Au même moment, Nimuë et Klervie bousculent leur père pour se jeter dans mes bras en criant : "Avó !" - le surnom brésilien pour les grand-mères qui a logiquement pris la suite du Mãe qui est celui sous lequel j'aurai vécu ma maternité. La question pleine d'espoir vient juste derrière nos embrassades : "Tu viens jouer avec nous ?"

"Et vous mettre au lit à une heure raisonnable, sinon vos parents vont me gronder", je réponds en me laissant tirer à l'intérieur. Samuel nous laisse passer et ferme la porte.

"C'est toi qui les grondes !", estime joyeusement Klervie.

"C'est toi la grande cheffe !", précise Nimuë.

Je croise le regard patient et curieux de Samuel. Sans doute pense-t-il à Iris et même que ma présence trahit une forme de mauvaise conscience.

"Je les gronde très rarement", je tempère en me demandant comment ils ont parlé de la mission d'Iris. "Mais on a le temps de s'amuser toutes les trois avant qu'on reparle de se coucher."

"On fait le Jeu des Visages !", réclame Nimuë.

"Ce serait chouette", je reconnais.

Avoir deux de mes petits enfants métamorphomages est une drôle d'expérience. Un partage inattendu et vraiment enrichissant. J'ai promis avant même leur naissance que j'aiderais, mais, quand les premiers signes sont arrivés, j'ai mesuré toute la gageure de cette affirmation. Comment transmettre un contrôle que j'ai appris toute seule et avec difficulté ?

L'imitation est venue assez vite - la première fois, presque par instinct. Je reproduisais les changements qu'elles adoptaient et ça les intéressait assez pour qu'elles en prennent petit à petit conscience et se mettent à suivre les miens. Ça a été bien sûr encore plus simple une fois qu'elles ont su parler et le Jeu des visages est venu très vite et s'est complexifié.

On en est arrivé à un stade où on a quatre dés à douze faces : couleur de la peau, couleur des yeux, couleur des cheveux, taille. Tour à tour, on le lance : "Tu aurais un visage noir, des yeux bleus, des cheveux roses et tu serais toute petite. On compte ensemble jusqu'à cinq pour la transformation et on commente le résultat. Il n'y a ni gagnant ni perdant, mais on rit beaucoup.

En conséquence, elles ont aujourd'hui un contrôle de leur don totalement remarquable - à la fois dans la précision de ce qu'elles peuvent faire et dans l'endurance qu'elles peuvent démontrer. J'envisage d'ailleurs de bientôt rajouter un cinquième dé pour des détails comme la forme du nez ou de la tête.

Iris s'inquiète parfois qu'elles ne soient un peu trop à l'aise. Je lui réponds à chaque fois que c'est surtout l'endurance qui est chouette parce que perdre son apparence contre son gré à cause d'une émotion fait partie des pires souvenirs de ma vie. Mais est-ce que disparaître de la mémoire de ses contemporains pour mener d'âpres batailles contre les forces les plus noires des hommes ne bat pas tous mes pires souvenirs ? Voilà une question que j'aimerais bien poser à Rafael Soportújar.

oooooooooooo

Notes personnages (Complétées, avec des précisions temporelles)

Rafael Eolo Soportujar : Aspirant Auror d'origine andalouse sous la responsabilité de Dora Tonks-Lupin, Rang Trois, juste revenue à la Division, en 1999.

Nuria Soportujar : Grand-mère décédée de Rafael, maitre des potions.

Azahara Soportujar : Mère décédée de Rafael, fille de Nuria.

Jovela Sylfor : Bijoutière qui s'est fait voler une tiare

Lieutenant Jérémy Berrycloth : bras droit de Kingsley Shacklebolt en 1999. Proche de Scrimgeour

Kingsley Shacklebolt : Commandant en 1999 ancien mentor de Dora

Dora Tonks-Lupin : Auror Rang Trois en 1999 ; 2021 Commandante des Aurors britanniques

Carley Paulsen : Auror Rang Trois en 1999, ami de Dora, a été le mentor d'Albus Ogden ; 2021 Lieutenant détaché à la Coopération internationale auprès du Département d'application des Lois magiques.

Dawn Lawrell-Paulsen : Auror de Rang Trois en 1999, amie de Dora, a été la mentor de Albus Ogden ; 2021 Sous Commandante, chargée de la conformité des dossiers et les relations avec le Magenmagot

Charity Perkins : Auror de Rang Trois en 1999 (sera la mentore d'Iris)

Osmond Nuttley : Auror de Rang Quatre en 1999

Zoya Twycross: Jeune Auror de Rang 5, petite amie d'Albus Ogden en 1999. Future épouse de Albus Ogden.

Albus Ogden : Jeune Auror Rang 5, habite dans la même colocation que Rafael en 1999. Son père est juge.

Eurydice "Dikkie" Forrest, Aspirante de Gawain Robards en 1999. 2021 : Auror de Rang Deux en Ecosse.

Aonghus Giles, Aspirant de Andrea Williamson en 1999, colocataire de Albus Ogden, Nydia Lytton et Rafael Soportujar.

Nydia Lytton, Aspirante de Herman Hawlish en 1999, colocataire de Albus Ogden, Aongus Giles et Rafael Soportujar .

Aelius Wind, ancien petit ami de Dora, Analyste en 1999

Agent principal chef Saral en 1999

Agent Stanley Alter en 1999

Balor McLaggen, petit ami éconduit de Jovela Sylfor, voleur de la tiare, maître des potions, en 1999.

Iris Lupin McDermott, R3 dans l'équipe mixte Aurors/Brigade sous les ordres du sous-commandant Ron Weasley en 2021

Samuel McDermott, R2 dans l'équipe centrale d'enquête en 2021, époux de Iris Lupin

Nimuë et Klervie McDermott, filles jumelles de Iris et Sam, 5 ans en 2021

Fergie McDermott, mère de Samuel, s'occupe souvent des jumelles en 2021

Mark Wang, R4 dans l'équipe mixte Aurors/Brigade, en 2021, ancien aspirant d'Iris Lupin

Agente Principale Olivia Miller, petite amie de Mark Wang en 2021

Hermosa Fioralquila McNair - sorcière hispano-britannique, ancienne cheffe du XIC, en prison en 2021

Edelmiro Allodia, sorcier espagnol qui a racheté une propriété d'Hermosa. Financier de la Nouvelle-Atlantide

Siofra O'Shea, sorcière irlandaise, spécialiste en bibliothèque, un autre nom utile.

Fidel Leales, chef d'un clan au sang pur espagnol en 2021, chef présummé de la Nouvelle-Atlantide

Duilio Fervi - ami et bras droit de Fidel Leales, issu d'une longue famille de serviteurs de la communauté sorcière espagnole,

Nicéforo Casagrande, beau-frère de Edelmiro Allodia. Soutien financier de la Nouvelle Atlantide

Albano Altamira, homme d'affaires espagnol qui n'a pas réussi à devenir premier ministre, membre de la Nouvelle-Atlantide

Graciano Fioralquilla Fervi, un cousin éloigné d'Hermosa, membre de la Nouvelle-Atlantide,

Ayoze Nauzet - sorcier canarien,porteur aussi d'une envie d'indépendance envers le Ministère espagnol, membre de la Nouvelle-Atlantide

Philippine Maisonclaire, sous-commandante française, Commandante du Bureau européen des Aurors à Bruxelles en 2021

Lieutenant Ernesto Zorrillo, Auror espagnol détaché au Bureau européen des Aurors à Bruxelles en 2021

Sous-Commandant Rigel Savage. Auror dirigeant la Division écossaise du Bureau britannique en 2021