Chapitre 17

Je me dirige vers Angéla quand j'arrive au lycée, ce lundi matin. Elle me sourit et me salue.

« J'ai appris que tu as été au bal, finalement, me lance-t-elle.

« Ouais, je me suis décidée au dernier moment.

« Et tu y a été avec Edward.

Elle arque un sourcil étonné.

« Ouais. Au diable Lauren et sa politique. Je voulais y aller avec lui alors je l'ai invité et il a accepté.

« Tu l'aimes bien ? S'enquiert-elle.

« À ton avis ? Éludé-je.

Elle ricane.

« Lauren n'y a pas été avec Tyler, enchaîne-t-elle. C'est bizarre, non ?

« Ouais, j'ai vu qu'elle était avec un autre mec. Peut-être que Tyler a eu un empêchement ? Je ne l'ai pas vu de la soirée.

« Peut-être, glisse-t-elle. Elle a été d'une humeur exécrable vendredi après-midi, je me demande si c'est lié. Il s'est peut-être passé un truc entre eux.

« Je sais pas.

La Volvo d'Edward entre sur le parking et je me rappelle des trois vampires que j'ai cru réels samedi. Je me souviens m'être demandée si les Cullen n'étaient pas des vampires non plus mais bien sûr que ça ne peut pas être vrai. C'est juste mon cerveau malade qui se crée des histoires. Je ne peux même pas lui poser la question parce que si tout ça a été réel, je ne peux pas dévoiler à Edward que je sais que les vampires existent s'il est un vampire.

Mais il ne l'est pas ? Non, bien sûr que non. Des vampires, des hommes-animaux et quoi encore ? De toute façon, il n'a pas les yeux rouges. Edward sort de la voiture avec Jasper et Alice, il s'arrête pour laisser passer la Mercedes de sa sœur puis reprend sa marche pour nous rejoindre, Angie et moi.

« Bonjour Angéla, la salue-t-il.

« Bonjour Edward, répond-elle.

Il s'arrête près de moi et dépose un bref baiser sur mes lèvres puis pose sa main dans mon dos.

« T'as passé un bon week-end ? S'enquiert-il à mon égard.

« À moitié, je me suis baladée samedi et j'ai réfléchi. Dimanche, je n'ai rien fait à part... réfléchir encore

Ses yeux se font questionneurs.

« Et toi ? Demandé-je avant qu'il ne pose des questions.

« Rosalie et moi avons fait un road-trip tout le week-end.

« Et c'était bien ?

« Je te raconterai, esquive-t-il. Et toi, Angéla ?

« J'ai aidé une association à servir des repas aux sans abris à Port Angeles, je le fais tous les samedis. Dimanche matin, j'ai été à la messe et l'après-midi, j'ai aidé mes parents avec le ménage.

Sainte Angie, c'est exactement le genre de dimanche que je l'imagine faire.

« Angéla, l'interpelle Lauren.

Angie se tourne vers la blonde.

« Bonjour Lauren.

« Oui, bonjour, fait Lauren avec impatience. Viens avec moi, j'ai à te parler.

« Ok.

Angie nous fait un petit signe de la main avec une grimace contrite et je me retrouve seule avec Edward, parfaitement ignorée par Lauren. Nous les regardons tous les deux s'éloigner vers les escaliers à droite du bâtiment pour se diriger vers la cour arrière.

« Tu es devenu infréquentable, explique Edward. Maintenant que tu sors avec moi, Lauren refuse que qui que ce soit t'adresse la parole.

« Tout ça ne serait pas arrivé si tu n'avais pas snobé tout le lycée, lui fais-je remarquer. C'est de ta faute.

« Ma faute ? Répète-t-il. Je ne pense pas que tout ça soit uniquement de ma faute. Je pense qu'elle ne serait pas si vindicative à ton propos si elle avait pu obtenir celui qu'elle voulait.

« Tu sais quelque-chose ? Soupçonné-je.

« Je sais beaucoup de choses, sourit-il. Il est difficile pour qui que ce soit de me cacher des choses. À part toi, bien sûr.

« Tu vas me partager l'info ou je vais devoir le découvrir par moi-même ?

« Tu ne sais pas ?

« Quoi donc ?

« Tyler a une liaison avec une prof.

Je feins la surprise, les yeux grands ouverts, la bouche formant un "o" de circonstance.

« Je compte sur toi pour ne rien dire à personne, bien sûr, me prévient-il.

« Évidemment. Lauren les a surprit ?

Il hoche la tête.

« Quand elle a ramené la raquette aux vestiaires des mecs, pour te rendre service.

« Ah. Merde, alors.

Je réprime un sourire.

« Attends, fais-je. Tu as pensé que je savais et que je l'avais fait exprès ?

Il me sourit.

« J'avais un doute mais je vois que c'était un mauvais concours de circonstances puisque tu n'étais pas au courant de cette histoire. N'est-ce pas ?

« Bien sûr que non.

« Tu es officiellement mise à l'écart de la société, à présent, me prévient-il. Lauren vient de terminer son petit speech auprès de ses partisans pour que tous t'ignorent, ils sont encouragés à faire passer l'information aux autres élèves.

Je me doutais qu'elle ferait ça, les pestes populaires sont prévisibles. Je la laisse croire qu'elle gagne mais...

« C'est trop tard pour toi, maintenant, fait Edward. On dirait bien que tu es coincée avec moi, à présent.

Je le scrute un moment puis souris. Peut-être que je n'ai pas besoin d'être en haut de la chaîne alimentaire, si j'ai Edward avec moi. Ça m'étonnerait qu'Angie décide de la suivre, elle n'est pas du genre à avoir de camp alors je ne suis pas si mal que ça.

« Angie n'est pas du genre à tourner le dos à ses amis, je pense que je peux toujours compter sur elle et puis je t'ai toi.

Edward m'attrape la nuque et m'embrasse mais nous sommes interrompus par la sonnerie du lycée. Nous nous dirigeons vers le bâtiments et nous séparons dans le couloir pour rejoindre nos classes. Je le retrouve à la pause matinale, dans le couloir. Il me prend la main et nous sortons pour nous isoler dans la cour arrière. Je remarque les regards de tout le monde sur nous et pas uniquement parce que l'ordre de ne plus me parler s'est ébruité. Pas mal de filles sont dégoûtées de ne pas être moi. En soit, j'ai déjà gagné.

« Alors, ce road-trip ? Demandé-je après m'être assise entre les jambes d'Edward.

Il s'appuie sur le tronc derrière lui et je dois dire que son torse doit être plus confortable pour moi que le tronc pour lui. Ses bras m'entourent, ses mains sont sur mon ventre et son petit doigt est posé sur ma peau, entre mon sweat et mon jean.

« C'était pour l'anniversaire de l'adoption de Rosalie, m'explique-t-il. Elle a toujours besoin de revenir sur les traces de son passé, à ce moment-là.

« Vous n'étiez que tous les deux ?

« Ouais.

« Pourquoi elle n'y a pas été avec Emmett ? C'est son copain, non ?

« Oui et c'est justement parce qu'il l'est, répond-il. Tu es jalouse ?

« Non, pas d'émotion, t'as oublié ?

Il pose un baiser sur mes cheveux et je le sens sourire contre.

« Les circonstances de son adoption ne sont pas joyeuses et elle ne veut pas qu'il y soit mêlé. Il y a aussi que j'étais déjà là, quand elle est arrivée alors c'est plus simple si c'est moi. Je connais son histoire et je comprends alors chaque année, nous allons là où tout à commencé pour elle.

« Ça fait longtemps que tu as été adopté par tes parents adoptifs ?

« Quelques années mais j'ai l'impression que c'est tout un siècle.

« Je vois.

Je laisse le silence retomber et repense à l'annonce de mon père.

« Je vais peut-être savoir qui est mon père, le week-end prochain, lui annoncé-je.

« Tu es nerveuse ?

« Non, souris-je.

« Ouais, je m'en doutais.

Il dépose un baiser à la base de mon cou.

« Qu'est-ce...

La sonnerie me coupe, je décide de laisser tomber. Je lui poserai la question plus tard parce que je me demande bien ce qu'on ressent quand on ressent des émotions.


Edward m'a proposé de profiter qu'il y aie des sandwichs au menu pour manger dehors. Nous sommes donc entré dans la forêt avoisinant l'école pour manger notre repas assis sur l'herbe, le dos appuyé contre un arbre, l'un en face de l'autre.

« Toujours pas déçue d'être coincée avec moi ? S'enquiert Edward.

Je peux entendre l'amusement chanter dans le ton de sa voix.

« Je ne peux pas être déçue, de toute façon.

« Ça doit être facile de se foutre de tout, théorise-t-il.

« Pas tant.

« Ah bon ?

« J'ai eu du mal à choisir mon plan de carrière, par exemple.

Il me sourit avant de croquer dans son sandwich qu'il mâche à peine avant de l'avaler.

« Je suis curieux. Sur quoi t'es-tu arrêtée, alors ?

« Épouser un mec très riche.

Il s'arrête avant de croquer une nouvelle fois, il baisse ses mains et me regarde avec sérieux.

« Tu sais que la plupart des hommes très riches sont vieux.

« Pas ton père, riposté-je.

À nouveau, ma réplique l'empêche de croquer dans son sandwich.

« Tu sais que sortir avec son fils n'est pas la meilleure technique de drague ? S'amuse-t-il.

« Il est déjà marié, de toute façon.

« Donc, tu te rabats sur moi ?

« En attendant le divorce, souris-je. C'est ton père qui est riche, pas toi.

Il plisse les yeux.

« Je plaisante, le rassuré-je avec un grand sourire.

Bon, j'y ai pensé une fois mais ça va à l'encontre de mon plan de manipulation. Cependant, le jour où Edward et moi, nous nous séparerons... ça pourrait être amusant de voir sa tête quand il découvrira que je deviendrais sa belle-mère. Non, en fait, ça serait bizarre, même pour moi.

« Un mariage intéressé alors ? Souffle Edward.

Je hausse les épaules.

« Comment avoir un mariage d'amour si je ne peux pas être amoureuse ?

Je relève les yeux vers Edward, il me fixe, un léger sourire traînant sur les lèvres mais son regard m'indique qu'il réfléchit. Ça doit être difficile pour lui de ne pas pouvoir lire dans ma tête mais c'est tellement pratique pour moi que je ne peux pas le plaindre.

Une fois nos en-cas dévorés, je me décroche de mon tronc, me déplace et me cale entre ses jambes, dos contre lui.

« Qu'est-ce qu'on ressent quand on ressent des émotions ? Lui demandé-je.

« Ça dépend des émotions, me répond-il. C'est difficile à décrire, ce serait comme décrire le goût des aliments à quelqu'un qui n'a jamais mangé de sa vie.

« Ah.

« Mais je vais essayer de te faire une description correcte.

Il glisse sa main sous mon sweat et mon t-shirt, sa main s'arrête au niveau de mon sternum, je suis prise d'un frisson à cause du froid.

« Pour la colère, tu ressens quelque-chose qui t'oppresse quelque-part ici, tu as envie de tout casser si elle est forte.

Il retire sa main qui vient se glisser sous ma mâchoire qu'il caresse avec le pouce.

« La tristesse, tu es submergé, tes yeux se brouillent et les larmes apparaissent, ce qui, étrangement, t'apaise.

Sa main disparaît, il arrache quelques herbes près de lui.

« La jalousie ressemble un peu à la colère avec un mélange d'envie. La joie, tu te sens tellement heureux que tu as l'impression que tu vas pouvoir t'envoler, tu as envie de sauter partout. La peur, c'est plus viscéral...

Sa main se pose sur mon ventre par dessus mon sweat cette fois. Il plie ses doigts comme pour serrer mon ventre.

« Ça te prend aux tripes, ton cœur accélère...

Il tapote mes côtes sous mon sein gauche puis de ses deux mains, il m'attrape vivement les deux bras comme pour me faire peur.

« Et ton corps t'envoie une dose d'adrénaline pour pouvoir parer le danger, c'est l'outil principal de l'instinct de survie. Ce que tu n'as pas.

Sa main revient sur mon ventre, par dessus mon sweat.

« La nervosité, c'est une nuance très légère de la peur, il n'y a pas de danger mais tu redoutes l'instant alors tu as un tout petit peu peur.

J'essaye d'assimiler mais ça reste très flou pour moi.

« Et l'amour ? Murmuré-je.

Il sourit dans mes cheveux pendant que sa main se glisse sous mon sweat et mon t-shirt.

« L'amour, c'est merveilleux, souffle-t-il. Tu ressens des picotements dans ton ventre.

Il fait danser ses doigts sur ma peau.

« Tu ressens une chaleur autour de ton cœur et, la plupart du temps, il est accompagné de désir. La personne que tu aimes deviens la personne la plus importante de ta vie et ce tout le temps que cet amour dure. Parfois, l'amour est éternel, parfois, il n'est qu'éphémère. Ça dépend si tu es avec la bonne personne ou non.

« Tu es déjà tombé amoureux ?

« Non, murmure-t-il. Tu es la première... de qui je pourrais tomber amoureux.

J'ai cru que ça y était, qu'il était amoureux de moi mais non, pas encore. Au moins, c'est en bonne voie.

« Tu penses que je suis la bonne personne pour toi ?

« Oui, je pense que tu l'es.

Je me mords la lèvre inférieure et sourit. En très bonne voie.

« Et le désir ?

« Ça, prononce-t-il.

Son souffle caresse mon oreille.

« C'est quelque-chose de plus... primaire. Le désir est l'émergence de ton envie d'avoir des relations charnelles avec la personne qui suscite cette émotion en toi. Un besoin de ne faire qu'un avec celui ou celle que tu aimes. Parfois le désir survient sans l'amour et là, c'est juste le plaisir de la relation charnelle qui te fait envie.

« Tu as déjà...hm...

« Non, je suis plutôt vieille école. Enfin, je n'attends pas le mariage mais je préfère que ce soit avec une fille que j'aime que juste... comme ça.

Ses mains me serrent un peu plus, il dépose des baisers depuis la base de mon cou en remontant pour terminer sous mon oreille. C'est agréable, je pourrais finir par ne plus vouloir m'en passer.


Quand je sors du bâtiment, à la fin des cours, je suis surprise de trouver Jacob à moitié assis sur un scooter. Je ne l'ai pas reconnu tout de suite parce qu'il semble complètement changé. Il a les cheveux courts maintenant, il ne porte qu'un t-shirt qui serre ses nouveaux abdos, un short comme si nous étions en plein été et ses bras ont triplé de volume. À vrai dire, je ne suis pas tout à fait convaincue qu'il s'agisse de Jacob, c'est peut-être un grand frère caché. Il se lève quand j'arrive près de lui et ouais, il a grandi aussi.

« Jacob ?

« Je ne voulais pas le croire mais mon père m'a dit de venir voir par moi-même.

« De quoi tu parles ? C'est toujours cette histoire de serpents ?

« Non, il ne s'agit pas de serpent mais de toi. Il avait raison, tu n'es pas celle que tu prétends être.

« Quoi ? Mais de quoi tu parles ?

Il se tourne pour prendre son scooter mais je le bloque, ma main sur son biceps et mon regard se porte directement sur l'endroit où je le tiens. Je retire ma main aussitôt. Si Edward est bien plus froid que la moyenne, Jacob est bien plus chaud.

« Tu le sais très bien, ne fais pas semblant de ne pas comprendre.

« Mais je ne comprends vraiment pas. » je me défends.

Il me scrute comme s'il voulait trouver la vérité dans mes yeux.

« Tu ne sais pas ce que tu es ?

Je me fige. Qu'est-ce que ça veut dire ?

« Qu'est-ce que je suis, selon toi ? Parce que jusqu'à présent, j'ai toujours pensé que j'étais juste... moi.

Je fronce les sourcils.

« Est-ce que tu sais ?

Billy a peut-être toujours compris que mon cerveau déconnait.

« Quoi donc ?

Je regarde autour de nous et bien sûr, il y a des ados qui nous regardent. Personne ne perdrait un tel spectacle. Je m'approche de lui pour lui chuchoter :

« Que je suis malade. C'est ça, hein ? C'est pour ça que Billy a peur de moi ?

Il me regarde interdit. Peut-être qu'il ne sait rien et je viens de me dévoiler. Enfin, je peux toujours dire que j'ai une maladie physique quelconque, après tout.

« Est-ce qu'on peut en parler ? Me demande-t-il. Pas ici, trop d'oreilles pendues. Je peux te rejoindre chez toi et on en discute ?

« D'accord, si tu veux.

Il hoche la tête et récupère son casque mais il s'arrête avant de le mettre et son regard se dirige vers le bâtiment. Je me tourne et vois Edward, Emmett et Rosalie qui viennent de sortir. Tout le monde semble tendu, Jacob et les Cullen s'échangent des regards méfiants. Edward me sourit et fait un signe de tête.

« On se voit demain, me lance-t-il.

« Ouais, à demain.

« Son odeur est sur toi, m'apprend Jacob.

« Son odeur ? Répété-je.

« Le gringalet mal coiffé, précise-t-il.

« C'est mon petit-ami.

Il soupire.

« Allons chez toi, ton lycée n'est pas vraiment fréquentable.