Une pizzeria énigmatique nichée au cœur des ruelles pavées de Londres se distinguait comme une étoile singulière. Si son apparence se fondait fièrement dans le décor urbain avec son enseigne en néon Pizza ineffable , l'intérieur était un monde de merveilles enchanteresses qui n'attendaient que d'être découvertes.
La salle était baignée d'une lumière tamisée, créant des ombres dansantes qui donnaient vie aux murs. Les tables étaient disposées au hasard, chacune ornée d'une nappe colorée et d'un bouquet de fleurs fraîches. Les étagères en bois débordaient de livres anciens, de curiosités ésotériques et d'objets qui semblaient avoir été arrachés à des réalités parallèles.
Le comptoir, situé au centre de la pièce, exposait des pizzas odorantes et suantes du four. C'est là que vous rencontriez Crowley, avec ses cheveux roux ébène et ses yeux dorés qui étincelaient comme des étoiles malicieuses. Vêtu d'une chemise noire élégante, il paraissait incarner un air de mystère, invitant les clients à plonger dans l'inconnu caché dans chaque saveur.
Un coin tout confort niché à l'arrière a été conçu pour les consommateurs souhaitant déguster leur pizza sur place. De vieux fauteuils en cuir, des coussins moelleux et des lumières scintillantes conféraient à cet espace une ambiance intime et douillette, parfaite pour lire ou engager des conversations exceptionnelles. Cependant, la véritable magie de l'établissement réside dans ses créations culinaires. Chaque pizza était une œuvre d'art délectable, un mélange audacieux menant à un voyage ensorcelé. La tentation qui met l'eau à la bouche a été élaborée non seulement avec minutie, mais aussi avec une appréciation émotionnelle et thématique.
Aziraphale était un homme au goût unique et au style intemporel. Ses lunettes rondes étaient reconnaissables entre toutes et ajoutaient toujours un air d'excentricité à son personnage. On le voyait souvent avec une touche de tartan, qu'il portait toujours avec fière allure. Bien que son sens de la mode fût déjà assez unique, on pouvait également compter sur sur son esprit inventif qu'il mettait à profit pour créer des recettes intrigantes qui titillaient les papilles de tous ceux qui les dégustaient.
Expert dans son devoir, l'homme aux boucles dorés glissait gracieusement entre les tables avec un aplomb qui démentait son âge. C'était un hôte né et bienveillant. Son charme et son esprit convainquait sans effort les invités les plus perplexes d'essayer quelque chose de nouveau. Et il en avait des histoires à raconter ! Des anecdotes fascinantes sur l'origine des nouveaux plats, comme la fois où Crowley et lui avaient inventé une pizza par une soirée bien arrosée.
Tout avait commencé par une plaisanterie. Un soir, après quelques verres de vin de trop, Aziraphale avait proposé un défi audacieux à Crowley. Utiliser uniquement des ingrédients commençant par la lettre P pour créer une pizza. Crowley avait été séduit par l'idée et avait commencé à énumérer au hasard les différentes garnitures impliquées, non sans un rire partagé. Pepperoni, parmesan, pesto, pommes de terre, poivrons. Le résultat fut un chef-d'œuvre, une pizza si unique qu'elle prit une vie propre. Surnommée la pizza Aventure Particulière, elle avait finalement trouvé son public au sein de palais avec peu de limites.
Mais si Crowley aimait son métier - simple, social et créatif - il n'y avait rien de plus exquis que d'observer les différentes facettes d'Aziraphale. L'ange était un agréable puzzle d'émotions. Il souriait toujours d'un air discret et mesquin lorsqu'il s'agissait de convaincre les clients qui s'écriaient "surprenez-moi !". Le chaos de la création était alors parfaitement en place. En quelques mots, il suffisait de décrire ses attentes pour concocter une pizza sur mesure qui laisserait le client émerveillé et entièrement satisfait. C'était comme si Aziraphale avait un sixième sens pour savoir ce que les gens voulaient, une intuition divine qu'il utilisait pour créer des chefs-d'œuvre culinaires qui laissaient les gens sans voix. Et cela lui correspondait pleinement.
Et pour tout cela, Crowley ne pouvait s'empêcher de l'aimer. Cette façon dont ses yeux s'illuminaient lorsqu'il parlait de nourriture. Cette façon dont ses mains bougeaient comme si elles dirigeaient un orchestre de saveurs et de textures jouant avec passion leurs partitions. Il aimait la façon dont Aziraphale goûtait chaque ingrédient, savourant chacun d'entre eux avec une révérence qui frôlait la religion. Mais surtout, il aimait la façon dont Aziraphale l'aimait en retour, avec une douceur et une tendresse que Crowley n'avait jamais connu auparavant.
Bien que leur quotidien soit ponctué de rencontres et de commandes inhabituelles, générant souvent quelques spéculations entre eux, le dernier appel de la soirée s'était avéré particulièrement insolite. La nuit était déjà bien avancée lorsque le téléphone accordéon sonna. Le rouquin, toujours prompt à agir, répondit et prit soigneusement note de la commande.
Un sourire contenu sur les lèvres, il annonça à son partenaire : « Une pizza ineffable spéciale Aventure épicée, à livrer au 221 B Baker Street. Double extra fromage. »
Le blondinet, derrière le comptoir, leva un sourcil interloqué : « As-tu bien dit Baker Street ? »
Crowley laissa échapper un rire. « C'est l'adresse de Sherlock Holmes, mon ange. Quelqu'un là-bas semble avoir besoin d'un peu de piquant. ».
Avec un air de curiosité, ils se mirent à l'œuvre pour préparer la pizza attendue. Des peppéronis furent soigneusement disposés sur la pâte, tandis que des accompagnements s'ajoutaient dans une touche au mélange. Le supplément double fromage se prêta au jeu. Une fois cuite et bien coulante, la commande fut placée dans une boîte et son aura magique paraissait se renforcer.
Tenant son casque à la main, Aziraphale ne put s'empêcher de marmonner pour lui-même. « Ce lieu est une source inépuisable de surprises. »
Crowley, attentif, se tourna vers lui, déjà assis sur la Vespa, un éclat malicieux dans ses yeux dorés. « C'est vrai. La pizza ineffable pour des vies ineffables. »
Aziraphale s'agrippa à la taille du motard aux cheveux roux. Bien qu'il apprécie tous les aspects des préparatifs, les promenades en Vespa étaient devenues son plaisir coupable, gagné avec le temps. Glisser dans l'air frais du soir, accompagné de l'odeur alléchante des plats sortant du four, était déjà une aventure excitante. Cependant, ce qui l'était encore plus c'était de le faire aux côtés de son amant. Chaque escapade infusait toujours la magie du moment, provoquant chez lui une montée d'adrénaline. Et il adorait ça.
Ils roulèrent dans les rues de Londres, laissant la douce pluie rafraîchir l'air et leurs pensées. La moto naviguait habilement dans les virages et les conduisirent enfin à l'adresse légendaire.
Crowley frappa à la porte et une élégante silhouette en sortit laissant apercevoir des cheveux noirs et bouclés.
L'ange lui tendit la boîte avec un sourire radieux, trahissant son admiration. « Voici votre pizza ineffable spéciale Aventure épicée. Nous espérons qu'elle répondra à vos attentes. »
L'homme au long manteau de laine ouvrit la boîte avec une excitation contagieuse, mais prudente, découvrant les sensations vibrantes qu'elle contenait.
« Parfait ! Ça me donne déjà faim ! »
Il leur adressa un sourire contenu et leur remit ses billets pour finaliser la transaction.
Aziraphale et Crowley partagèrent un regard complice, mais singulier, reconnaissant du compliment sur leur travail. « Nous sommes enchantés que cela vous plaise, » dit le démon et la porte se referma aussitôt.
Avant de remonter sur la moto, le rouquin sourit tendrement à son compagnon et serra sa main dans la sienne. Les yeux verts de l'ange étincelèrent à nouveau et adoucirent quelque chose en Crowley qu'il négligeait encore. Sa nature solitaire était toujours là et bien qu'il faisait des efforts pour exprimer ses émotions à Aziraphale, il était encore quelque peu difficile de s'en montrer vulnérable.
Il se redressa pour embrasser ses joues et murmura : « Allons-y. »
Alors qu'ils démarraient le moteur, une voix résonna depuis une fenêtre ouverte au dernier étage du 221B Baker Street.
« Sherlock, ne te précipite pas. Les indices ne vont pas s'échapper ! »
Sherlock Holmes, détective et passionné d'énigmes, était en effet le destinataire de la pizza. Les deux livreurs créatifs échangèrent un discret rire amusé tandis que les paroles de John Watson s'évanouissaient.
De retour à la pizzeria, la pluie continuait de se déverser à travers les fenêtres.
L'ange laisse échapper un soupir réconfortant. « Encore une belle soirée. »
Crowley commença à fermer la boutique, il était temps de prendre un repos bien mérité. Débarrasser les chaises et ranger le surplus du comptoir était encore les dernières corvées avant de pouvoir s'affaler sur un lit dans l'intimité.
Tournant la tête, il scruta la pièce à la recherche de sa personne préférée. « Mon ange, où es-tu ? »
Il entendit une voix depuis le petit salon. « J'arrive, vas-y sans moi. »
Cela le surprit, mais il monta tout de même dans la chambre. Alors que la soirée touchait à sa fin, son ange semblait plus silencieux, mais il n'y avait pas lieu de s'alarmer ; peut-être que la dernière rencontre d'Aziraphale lui avait laissé une bonne impression.
Déjà vêtu de son pyjama noir en soie, Crowley regardait sa montre lorsqu'il reconnut enfin les pas qui s'approchaient vers lui. « Je n'ai pas pu résister à l'envie de m'adonner à un peu de lecture, j'étais tout simplement ravi ! » s'exclama Aziraphale.
Les yeux dorés serpentins se posèrent sur l'objet convoité qui lui avait valu cette petite attente. Il reconnut l'ensemble de livres anciens qui arboraient des couvertures colorées et dont le dos portait la mention Sir Arthur Conan Doyle. Il tira son amant sur le lit tandis qu'il plaçait soigneusement les livres sur la table de chevet.
Les joues du bouquiniste s'enflammèrent en sentant un baiser se planter sur son front. Mais il garda sa voix encore enjouée. « Puis-je partager un peu de lecture avec toi ? »
Déjà enveloppé par l'envie de faire une sieste, Crowley souleva la couverture pour se blottir dans les bras aimants qui l'encerclaient déjà, reposant sa tête sur le torse à côté de lui.
« Juste pour ta belle voix, Azi. »
Ému par cette réponse, le cœur de l'amoureux se remplit de nouveau de joie. Il caressait distraitement les cheveux couleur flamme qui se détachaient dans toute leur splendeur rien que pour lui.
Ne pouvant détacher son sourire si tendre, il entamait enfin la séance de lecture promise : « Les aventures de Sherlock Holmes. »
Alors qu'Aziraphale déroulait les pages usées par le temps du tome classique, Crowley fermait les yeux et laissait la cadence apaisante de l'a voix de son bien-aimé l'emmitoufler. Une tranquillité l'envahissait. Ce sentiment de paix et de sécurité que seule l'étreinte de l'ange qu'il chérissait plus que tout au monde pouvait lui procurer.
La voix d'Aziraphale, mélodieuse et douce, caressait chaque mot avec soin, donnant vie à l'histoire complexe. Au fur et à mesure que le récit se déroulait, Crowley se trouvait de plus en plus absorbé par l'intrigue laborieuse et les personnages captivants que Sir Arthur Conan Doyle avait créés de main de maître. La narration d'Aziraphale peignait des images vivaces dans l'esprit de Crowley. Il pouvait presque se remémorer, leur marche dans les rues brumeuses du Londres victorien, se tenant côte à côte avec l'illustre ange détective, l'aidant à démêler l'écheveau du mystère qui enveloppait leur dernière affaire.
Le temps passait inaperçu, le monde extérieur n'étant plus qu'un lointain souvenir tandis que la pièce se chargeait de l'essence de leur expérience commune. La seule réalité qui comptait était l'histoire, la chaleur et l'amour qui remplissaient l'espace entre eux. L'imagination de Crowley commença à dériver sur les paisibles vagues des récits d'Aziraphale, une marée berceuse qui l'entraînait dans la douce étreinte de l'assoupissement.
Après ce qui lui avait semblé une éternité dans cocon réconfortant de sommeil, Crowley reprit conscience. Il ouvrit les yeux vers Aziraphale, qui veillait sur lui, un sourire affectueux jouant continuellement sur ses lèvres.
Aziraphale s'enquit avec une pointe d'amusement, « Tu t'es bien reposé, mon amour ? ». Ses doigts effleuraient délicatement une mèche de cheveux égarée sur le front de Crowley.
Crowley acquiesça, un sentiment de contentement et de bonheur fleurissant dans sa poitrine. « Grâce à toi, mon ange », murmura-t-il en se blottissant davantage dans les bras accueillants d'Aziraphale. « Tu me fait apprécier le sommeil comme personne. ».
Un doux gloussement échappa à Aziraphale tandis que ses mains traçaient des cercles paresseux dans le dos de Crowley, un geste réconfortant qui en disait long sur leur profonde connexion. « Je suis heureux de l'entendre, mon cher. Lire pour toi est un plaisir inestimable. »
Leur soirée se poursuivit de cette façon douillette et intime, avec des messages d'amour murmurés dans leur creux et le silence partagé de deux êtres foncièrement passionnés. Le livre fut oublié un instant, tandis qu'ils se délectaient de la présence de l'autre, chaque moment étant précieux.