Chapitre 51 : La promesse

Hôtel, Cleveland, Ohio

Jarod, en position assise sur le lit, était ébloui par la lumière matinale. Mlle Parker reposait encore paisiblement dans ses bras. Sans faire de geste brusque afin de ne pas la réveiller, il se sépara légèrement d'elle et massa sa nuque raidit, puis tendit la main vers le tiroir de la table de chevet, là où était rangée la clé de chez lui, de chez eux et l'enveloppe. La gorge serrée, il en dépliait la fameuse lettre. Il était temps d'arrêter pour lui de se poser trop de questions, de lire enfin ces écrits. Ses doigts caressèrent le papier où une petite bulle d'eau était apparue. Jarod en reniflait son parfum, ses émotions, ses peurs, et tout ce qui faisait de Mlle Parker, ce qu'elle avait été autrefois, ce qu'elle était devenue aujourd'hui. Ses yeux parcouraient attentivement chaque ligne, une boule de tension se forma soudainement dans sa mâchoire, ressentant l'impact émotionnel des phrases qui sonnait comme des aveux ou des confidences jamais dites : « Jarod, si tu savais à quel point te perdre me serais insupportable... J'en mourrais. » Les mots durs à entendre, lui pesaient si lourdement que tout son corps, se contracta, lui évitant ainsi un tremblement inutile. Sans plus tarder, le caméléon poursuivait sa lecture : « Je n'ai jamais rien su du véritable grand amour avant toi, Jarod... Et avant toi, je ne savais pas qu'il était possible d'aimer quelqu'un à ce point. » Un éclat d'étonnement traversa ses iris comme s'il découvrait pour la première fois le pouvoir de l'amour. Le véritable et elle était, elle avait toujours été. Il ne le réalisa que bien tard à son goût, il se maudissait pour ça : « Je veux un avenir avec toi et Junior, ce petit garçon, ton fils, cette partie de toi, je veux être là pour lui. » Un sourire joyeux illuminait son visage alors qu'il envisageait le futur avec elle, et cela, il ne le croyait plus possible. Il avait tort : « Je suis sûre que je serai capable d'être une bonne mère pour ton fils. J'ai tellement d'amour à lui donner. À te donner. » Au bord des larmes, Jarod ému par la promesse d'un sentiment maternel, lui laissa entrevoir une petite lueur d'espoir. Celle d'un avenir meilleur.

Entourée par les bras forts de son amant, elle ouvrit lentement ses paupières closes, ses yeux encore obscurcis par le sommeil. Les rayons du soleil l'aveuglant, elle avait du mal à distinguer clairement son bel amant, mais rassuré par son odeur, elle se pressa davantage contre lui. Ses doigts effleuraient tendrement le torse de Jarod, relevant la tête pour croiser le regard de celui qui partageait son espace intime. Le caméléon, éveillait depuis un long moment, l'observait en silence, pleinement satisfait de la situation. Il dessina affectueusement des cercles dans son dos, retenant ainsi un sourire contemplatif, laissant transparaître sa joie de retrouver leur complicité égarée. Mlle Parker, elle, sereine, se perdait dans cet agréable cocon de plénitude. Jarod, lui, suivait chaque mouvement, s'attardant sur les nuances de bonheur qui marquaient son visage.

« Bonjour, mon amour. Est-ce que je rêve ?

- Je crois, il l'embrassa. Bonjour, toi.

- C'était merveilleux, cette nuit. Je voudrais rester comme ça toute ma vie.

- Moi aussi, murmura-t-il, un sourire en coin. Avec toi, mon rêve devient réalité. Nous avons tant à rattraper et tant à partager.

- Le destin nous a joués de drôles de tours. Il y a quelques mois encore, je te traquais et voilà qu'aujourd'hui, je suis amoureuse de toi et sur le point de m'engager dans une relation très sérieuse, elle posa sa tête contre la poitrine de son amant, écoutant les battements réguliers de son cœur. Hmm… Quoiqu'il en soit, je ne veux plus regarder en arrière. Notre avenir est devant nous, ses doigts filaient sur le long du bras du caméléon.

- Notre histoire ne fait que commencer. Chaque chapitre à venir sera écrit sans aucun regret.

- Jarod… On devrait rendre chaque jour aussi mémorable que cette nuit inoubliable ! il la serra un peu plus fort contre lui.

- Je n'y vois pas d'inconvénient.

- Tu... Tu as lu la lettre. elle constata l'enveloppe déchiquetée. Qu'en dis-tu ?

- Oui, je l'ai lue. Je ne savais pas que tu ressentais ça. Merci de m'avoir dit que tu m'aimais, ça compte énormément pour moi.

- C'était extrêmement difficile de t'écrire ce que j'éprouvais, mais je voulais que tu saches mes attentes et mes espoirs pour nous deux, lui confia-t-elle, les yeux mi-clos. Et toi, Jarod, comment te sens-tu par rapport à tout cela ? Je veux savoir.

- Heureux. Immensément heureux. Savoir que tu veux être avec moi et Junior, c'est plus que je ne pouvais espérer. Tu es certaine de vouloir t'occuper de lui ?

- Pour être honnête, j'ai des appréhensions. Je n'ai aucune expérience avec les bébés, Jarod. Je crains de ne pas être à la hauteur.

- Écoute-moi bien, Parker. Tu es une personne exceptionnelle. Tu as tant à lui apporter. Cet adorable petit garçon à énormément de chances de t'avoir dans sa vie et je n'ai aucun doute sur le fait que tu seras une maman incroyablement géniale.

- Junior… Comment est-il maintenant ? Ça fait si longtemps. Je ne sais pas ce qu'il aime, ce qu'il déteste, ce qu'il fait. Il a dû changer, sa voix devenait mélancolique.

- C'est normal d'avoir des inquiétudes, Parker. En-tout-cas, tu ne seras pas seule. Je serais là. On est une équipe. Tu te rappelles ? Et puis, il y aura notre frère. Je suis sûr qu'il apprécierait de jouer les tontons.

- J'ai tellement envie de bien faire. Je veux qu'il soit heureux avec nous.

- Et il le sera. Avec toi, avec moi, il aura tout ce dont il aura besoin. Tu es prête à te donner, et ça, c'est la plus grande force d'une mère, la rassura-t-il, se montrant compatissant.

- Oh, comme je voudrais être aussi optimiste que toi. Je n'ai jamais été mère. Comment être sûre de faire les choses correctement ? J'ai si peur de commettre des erreurs avec lui, avec toi. Peut-être que… Que je n'ai pas cet instinct maternel. Ça me terrifie et d'un autre côté ça m'excite... Pffff !

- Personne ne naît parent parfait, Parker, et les bébés ne viennent pas au monde avec le mode d'emploi. Ce serait beaucoup trop facile, n'est-ce pas ? C'est même certain que toi et moi, nous commettrons des erreurs. C'est en apprenant et en grandissant avec notre enfant que l'on le deviendra. Crois-moi, tu es bien plus prête que tu ne le penses.

- Notre enfant… » ces deux mots la laissèrent songeuse.

La chambre s'illuminait de plus en plus, les rideaux eux s'agitaient au gré d'une fine brise. Épuisés par la force de leurs sentiments, Jarod et Mlle Parker se laissèrent emporter par leur complicité physique. La jolie brune se rapprocha de lui, la main sur sa joue. « Oui, notre enfant ! » Quant à lui, il retenait sa respiration tandis qu'elle effleurait doucement ses lèvres des siennes, en retour, il lui offrit un baiser langoureux. Il se rappelait de la nuit précédente, celle qui fut magique, fusionnelle. Son corps tout entier lui rayonnait de bonheur contre celui de Jarod. Ce dernier toucha sa peau si chaude qu'il en avait l'impression de se brûler rien qu'à son contact. Jarod souriait. Les yeux fermés, elle poussa de petits murmures à son oreille, puis de gémissements de plaisir, sentant une bouche gourmande se promener sur ses seins. Ses phalanges sur son dos l'écrasèrent dûment lorsque, enfin, il se plaça juste au-dessus d'elle, l'embrassant de nouveau. « Jarod, ne m'abandonne plus jamais. » Il comprit assez vite qu'elle faisait allusion à leur dernière rupture, en guise de réponse, il déposa son index sur ses lèvres afin de la rassurer, l'embrassant jusqu'à en perdre haleine. Le parfum frais, subtile note de fleurs délicates dans son cou emplissait ses poumons, évoquant la douceur d'une journée trop parfaite, capturant l'essence même de la paix intérieure. « tu es si merveilleuse. » Et pour tout l'or du monde, il ne voudrait être ailleurs que dans ses bras. Le regard pénétrant il fit descendre une main jusque vers le bas. « Un jour, mon amour, peut-être, qu'on pourrait agrandir notre famille. Avoir un petit frère ou une petite sœur pour Junior. Imaginer nos vies remplies de rires, de pleurs, de joie, de drôles d'aventures avec nos propres enfants, une toute nouvelle génération de caméléons. » Jarod était sérieux et elle le savait. Mais pour la première fois de sa vie, elle aspirait à l'envie de donner à son compagnon, le cadeau que tous les deux désiraient tellement. Elle lui succomba suivant dans l'instant présent son cœur et son intuition. Un peu plus tard dans la matinée, après leurs ébats amoureux, blottis l'un contre l'autre, Jarod et Mlle Parker se livraient à des câlins tendres et à des discussions profondément intimes.

« Tu es heureux avec moi, Jarod ?

- Oui, je le suis. Et plus encore. Je suis comblé. Pourquoi cette question ?

- Te souviens-tu de notre première rencontre ? De notre premier baiser ? De notre première fois ? Hé bien, vois-tu, c'est comme cette nuit, ce sont des moments comme ceux-là, que j'espère ne devoir jamais oublier.

- Parker, la fixant de ses yeux noisette, Jarod repoussa une de ses mèches brunes. Tous ces moments que nous avons passés ensemble sont trop précieux pour être oubliés.

- Tu sais, Jarod… Avant, tu étais la voix de mes vérités, maintenant, tu es devenu celle de mes mensonges.

- Tu es bien mystérieuse, Parker. Pourquoi dis-tu ça ?

- Jusqu'à présent, tu étais le seul qui me disait la vérité et aujourd'hui toi et moi, on vit dans le mensonge par amour l'un pour l'autre.

- Alors arrêtons de nous cacher ! Il est temps de reprendre notre vie en main.

- Et si cela venait à se savoir, qu'adviendrait-il de nous ? sa tête reposée contre l'épaule du caméléon.

- Je me fiche de tout ça. Ce qu'il compte, c'est nous. Seulement…

- Seulement, il manque Junior, c'est ça ?

- Ça n'a rien avoir avec toi, Parker. C'est qu'on ne sait toujours pas où il est et on est en train de rater les moments les plus importants de sa vie, il sortit du lit. Je n'étais pas là à sa naissance. Il ne me connaît pas. Te rends-tu compte que je ne l'ai jamais tenu dans mes bras.

- Jarod, tu es son père. Personne ne peut te reprocher ce que le Centre a fait. Et tu es là maintenant, prêt à assumer ton rôle, elle remonta le drap au-dessus de sa poitrine.

- Il a un an, Parker. Ses premiers pas, ses premiers mots. Les anniversaires et les Noël. J'ai envie de le voir évoluer et découvrir le monde, de l'emmener à la pêche, à l'école, au parc et au zoo. J'ai l'impression qu'il nous échappe.

- Un an déjà, comme le temps passe. Je... Je me souviens encore de sa naissance. C'était très dur. Il n'y avait pas de médecin. J'étais toute seule face à Brigitte… Cette nuit-là, j'étais si aveuglé par la vengeance que je n'ai pas vu que sa vie était menacée, elle se replongea dans ce qui fut un souvenir douloureux.

- Parce que tu voulais venger la mort de Thomas.

- Je... J'avais le doigt appuyé sur la détente. Quand j'ai compris que Junior était en détresse, je n'ai pas hésité, j'ai rangé mon arme et…

- Tu l'as aidé à venir au monde, Jarod enfila son pantalon.

- Oui. À partir de cette nuit, j'ai ressenti un lien très fort entre nous. Oh, c'est stupide, hein ?

- Non, je t'assure, ça ne l'est pas. Je voudrais également ressentir ce lien avec lui. Je ne sais pas si Junior m'acceptera, un jour.

- C'est impossible qu'il ne t'accepte pas. Il est une partie de toi, Jarod. Il te ressemblera, il te comprendra. Et il t'adorera.

- Et toi, Parker ? Comment vis-tu tout cela ?

- C'est très difficile, Jarod. Je veux que nous soyons tous les trois réunis. Voir le bonheur dans les yeux de Junior en te voyant, c'est tout ce que je souhaite. Ça prendra juste du temps. Mais on va y arriver, déclara-t-elle confiante.

- Chaque jour sans lui devient insupportable. Je ne l'ai jamais vu, et pourtant, il me manque.

- Il me manque à moi aussi, elle se leva du lit enveloppant sa silhouette nue dans le drap.

- Non. Je ne veux pas vivre de cette manière. Je ne veux pas vivre comme nos parents avant nous et passer des années à sa recherche. Junior, il est notre priorité, il se tourna vers la jeune femme. Parker, je ne veux pas que ça consume nos vies, elle se rapprocha de lui. Nous devons continuer à avancer. Sinon, toi et moi, nous allons nous perdre.

- Je vois ce que tu veux dire, Jarod. On ne sera pas comme nos parents. On est plus forts que ça. Je ne veux pas non plus que cela nous consume. Cela étant, tant que Junior n'est pas avec nous, il y aura toujours un vide. Nous devons le trouver, pour lui, pour nous. Je ne peux pas imaginer notre vie sans lui.

- Être dans l'incertitude de ne pas savoir où il est, ce qu'il fait, et s'il va bien. Je m'y refuse, il attrapa, à l'intérieur du dossier, la photo de son fils. Mon amour, nous avons tous les deux grandi avec cette absence de nos parents, on sait ce que c'est. Je veux que Junior grandisse sans ce fardeau, qu'il soit auprès de nous. Et c'est pour ça que je ne veux pas simplement le rechercher. Je veux le ramener à la maison, chez nous et construire des souvenirs heureux avec lui. Il faut trouver Junior, avant que le temps ne s'écoule davantage.

- Qu'est-ce que tu veux faire, on ignore où il est, on a aucune piste. Aucune ! Par où commencer ?

- On ne s'y est pas pris de la bonne manière. Pour retrouver Junior, on va utiliser la seule personne susceptible de nous aider.

- Angelo, oui bien sûr, tu as raison, elle acquiesça. Je vais immédiatement appeler Sydney.

- Lyle ! C'est lui qui nous mènera à lui ! » Affirma Jarod en lui retirant l'appareil téléphonique.

Dans la chambre d'hôtel. Le beau brun animé d'une détermination maladive pour ramener son fils auprès de lui, s'assit autour de la table, les manches retroussées, il exhibait fièrement ses muscles alors qu'un petit-déjeuner les attendait patiemment. Avec le sourire, il servait le café fumant dans deux tasses assorties, les arômes enivrants planaient dans l'air. Les yeux de Jarod se posèrent sur la jeune femme tandis qu'elle le rejoignit en peignoir, tenté de se jeter sur la nourriture. Le caméléon réfléchissait à leur situation presque désespérée. Les viennoiseries aussi bien croustillantes que dorées et les fruits appétissants, faisaient écho au clink-clink de la cuillère en argent qui remuait dans une tasse. Jarod lui tendit un verre de jus d'orange. Elle le regardait dessiner divers schémas sur la surface en bois, révélant comment Lyle, le frère jumeau de Mlle Parker, deviendrait un pion dans le sauvetage de leur petit garçon. À quoi pensait-il ? Avait-il l'intention de s'introduire au Centre afin d'obtenir des informations confidentielles et découvrir des indices sur la localisation de Junior ? Jarod secoua la tête. Non ! Suivre les transactions financières de Lyle qui aiderait le caméléon à repérer toutes les opérations liées à Junior ? Broots surveille déjà le compte de Lyle et du Centre. « On va faire mieux que ça ! » Il l'embrassa à plusieurs reprises avant de lui annoncer qu'il allait lui-même analyser les allés-venus de cette sale vermine. En étudiant ses habitudes et ses déplacements, Jarod pourrait, de ce fait, anticiper le moindre de ses mouvements, facilitant la planification d'actions ciblées. Évidemment, ce n'était pas un plan très bien détaillé et pour l'instant Jarod n'avait pas établi de stratégie a promptement parler. Le temps comptait, aujourd'hui, il n'y avait plus le choix ! Et elle, elle n'était pas d'accord avec cette méthode. Mlle Parker insista fâcheusement, sur le fait, qu'il était hors de question de le laisser se mettre en porte-à-faux.

« Non, non, non ! Tu oublies ça tout de suite !

- Parker, on a plus le choix, il prit sa main, déposant un baiser sur ses doigts. On ne peut pas abandonner Junior.

- Non ! Tu ne feras pas ça ! Tu as compris ?

- On doit agir rapidement sinon Parker, on pourrait ne plus jamais le revoir. C'est ce que tu veux ?

- Ce que je veux, c'est que tu oublies cette idée, elle se leva, repoussant violemment sa chaise en arrière.

- Je sais que c'est épineux et que tu as peur. J'ai peur moi aussi.

- Jarod, ça ne servirait à rien. Sydney a déjà chargé Sam de suivre mon frère, il est revenu en très mauvais état, debout, les poings sur la table, elle sentait ses yeux piquer.

- Parce que Lyle est bien trop intelligent. Ce qu'il faut, c'est un esprit supérieur, comme le nôtre !

- Jarod, es-tu conscient que si Lyle découvre que tu le suis… Tu vas tomber tout droit dans la gueule du loup. Non seulement, tu te feras capturer et ramener au Centre, mais Jarod, tu ne récupéreras jamais ton fils.

- Parker, mon amour, écoute-moi, si c'est la seule chance que nous ayons de le retrouver, je dois la saisir. Rien ne m'arrêtera, ça ne devrait pas t'arrêter, toi non plus ! il avala une gorgée de jus d'orange.

- C'est insensé. Tu te crois invincible Jarod, tu n'es qu'un être humain. Le Centre va te tendre un piège. Lyle est dangereux ! Il serait capable de te tuer s'il avait le choix. Il ne reculera devant rien pour protéger ses intérêts.

- Justement ! C'est pour ça que nous devons être prudents et anticiper chaque mouvement. Il sait où est Junior, c'est lui notre meilleure piste. Viens-là, Parker, il l'invita à se rasseoir.

- Jarod, imagine le pire des scénarios. Si quelque chose t'arrivait... Si tu te faisais prendre, qui... Qui nous dit que Junior ou toi ne serait pas plus en danger, hein ?

- Si je ne le fais pas, comment pourrai-je me regarder dans le miroir ? il aperçut son reflet sur le dos d'une cuillère.

- Admettons que tu récupères le petit, qu'il soit sain et sauf, qu'il rentre à la maison, mais que malgré ton ingéniosité et ton intelligence, toi, tu te fasses capturer. Et si tu ne revenais pas ? Comment vais-je expliquer cela à Junior ? Comment vais-je lui dire que son père a risqué sa vie pour le retrouver, et qu'il n'est jamais revenu ?

- Parker, je ferai tout pour revenir vers toi. Tu me connais, je ne renoncerais pas, il lui releva le menton. Puisque tu soulèves le sujet. Si ça se passe mal pour moi, je voudrais que tu t'occupes de Junior.

- Non, elle s'éloigna de lui. Sans toi, je n'en serais pas capable.

- Moi, je sais que tu en es capable. Et tu le feras, parce qu'il n'aura plus que toi dans sa vie. C'est important. Tu es forte, bien plus forte que tu ne le crois.

- Jarod... Ces paroles sonnent comme un adieu.

- Non, ce n'est pas un adieu. Je vais faire ce qu'il faut, d'accord. Je ne peux pas rester ici les bras croisés alors qu'il est là-bas, quelque part, seul en attendant d'être libéré. Ça va aller. »

Elle, s'érigeait en rempart inflexible et refusant catégoriquement le sacrifice de son amant qui pourrait le conduire tout droit, là-bas, dans la maison des horreurs. Debout, le front appuyé contre la paroi de verre, elle observait la ville en silence. Le regard soucieux, et une légère crispation des doigts autour du rebord de la fenêtre. Elle soupira, laissant la marque d'une buée sur la vitre. À mesure qu'elle exprimait ses doutes quant au plan de Jarod, ses lèvres tremblaient. Cependant, son angoisse persistait dans chacun des traits de son visage, où Jarod, à ses côtés, remarqua sa volonté de fer de vouloir le protéger à tout prix. Lui, l'homme dont elle était amoureuse. Et si elle pouvait, elle éliminerait les dangers qui le menaçaient, un par un. Il caressa son dos, la calmant. Non ! Mlle Parker rejetait cette proposition qu'il mettrait sa vie et sa sécurité en jeu. Elle ne voulait pas qu'il retourne au Centre. Non ! « Je ne l'ai jamais voulu. Jamais ! » Mlle Parker l'implora de chercher un autre moyen, il baissa les yeux les fermant presque. Malheureusement, il n'en voyait aucun. Aucun ! Et ils devaient d'abord penser à Junior. Mlle Parker insista. Voilà ce qu'ils allaient faire, tous deux allaient trouver une solution un peu moins radicale. Ensemble, ils passèrent en revue toutes les options possibles au problème. Mlle Parker ne voulait plus lutter contre la probabilité de le perdre de nouveau. Malgré ça, Jarod resta persuadé que la meilleure façon de procéder était la sienne. Il était confronté à un dilemme fort déchirant, entre son amour pour elle et son devoir familial. Lorsque tout à coup, la demoiselle eut une idée brillante. En vrai, plusieurs. Le caméléon admiratif, s'attardait sur sa bouche qu'il désirait embrasser encore et toujours. Il se félicitait d'avoir une femme comme elle, à ses côtés et Mlle Parker, elle, appréciait qu'il se montrât plutôt compréhensif et ouvert sur le sujet, qu'il prenne en considération son avis. « Hum... Hum... Jarod, pourquoi ne pas le faire chanter ? » Elle s'expliqua, ils connaissent le passé sombre de Lyle. Meurtres, fausse mort, trahison. Bref, ils vont réunir des informations compromettantes sur lui, des données ultra-sensibles dont seuls eux et le Centre étaient au courant. Le sourcil du jeune caméléon se releva, mais où voulait-elle en venir ? Avec le sourire, Mlle Parker déclara aussitôt : « On va les utiliser comme levier pour forcer la coopération de Lyle. S'il ne nous donne pas Junior, on transmettra tout un joli paquet de documents au FBI. Oh, oui, on va lui faire peur ! » Elle en jubilait d'avance. Toutefois, il y avait une petite faille dans son plan parfait. « Quelle faille ? » Comment dénoncer cette crapule de Lyle sans pour autant l'exposer, elle, lui-même ou même Sydney et Broots directement ? Soit, il était vrai qu'elle n'y avait pas vraiment pensé. « Et pourquoi ne pas le ruiner ? Prenons-lui tout son argent ! » Jarod éclata de rire. C'était une possibilité à envisager, une faillite financière qui inciterait son jumeau à coopérer avec eux, craignant ainsi la perte de ses ressources et de son pouvoir. Le génie ne crut pas une minute que la menace économique puisse convaincre ce dingue. Mlle Parker suggéra de créer une situation dans laquelle elle serait mise en avant, elle serait impliquée dans une affaire qui le discréditerait. « Non, certainement pas ! Je ne vais pas me servir de toi, Parker. » Elle lui proposa de faire des montages vidéo et audio, impliquant Lyle dans des activités illégales. C'est tout à fait le genre de ce fou furieux. D'abord, il pourrait utiliser ces enregistrements comme moyen de pression. Ensuite, Jarod les remettrait à ses amis.

« Ok. Et si on l'enlevait ? On attaque Lyle, on l'enferme dans un vieux entrepôt crasseux et on le laisse pendant quarante-huit heures sans boire ni manger. Une approche assez directe, ajouta-t-elle avec un sourire sadique.

- Oui, ça effrayerait Lyle, mais je ne suis pas sûr que cela aura l'effet escompté. La dernière fois que je l'ai enlevé, il s'est montré assez coriace.

- Donc quoi ? Tu veux faire quoi ?

- Employer la violence ne résoudra pas le problème, intervient-il, levant les mains pour signaler son point de vue. En s'en prenant à lui de cette façon, on risque de déclencher une série d'événements dont je n'ose imaginer l'ampleur des dégâts. Lyle pourrait réagir de manière imprévisible. Et ça ne nous garantira pas que nous aurons nos réponses. Non, non, il nous faut une approche plus stratégique qui le contraindra à parler sans compromettre la sécurité de notre enfant. Utiliser ses faiblesses contre lui pour le pousser à nous révéler ce qu'il sait sans déclencher une guerre ouverte.

- Comment ? On n'a pas beaucoup d'options, et le temps joue contre nous. Qu'est-ce que tu comptes faire exactement ? questionna-t-elle.

- Il a toujours eu des failles, des secrets. Nous devons exploiter ses points faibles, ce qui le fait trembler, ce qui le fait plier. Si on peut le forcer à penser que sa meilleure option est de coopérer, Lyle pourrait parler sans qu'on ait à recourir à des fins extrêmes. Parker, si nous voulons sauver Junior, nous devons agir avec prudence, pas avec précipitation.

- Quand veux-tu entrer en action ?

- Après notre visite à Thomas au cimetière, et après avoir élaboré un plan. Il y a autre chose. Ne te fâche pas. Quand sera le moment venu, je ne veux pas que tu sois dans les parages.

- Quoi ? Tu veux me mettre à l'écart ?

- Ça peut-être dangereux.

- C'est à moi de décider. Je suis une grande fille. Je suis armée et je sais me défendre. On est une équipe que tu le veuilles ou non. Je ne resterais pas en retrait. Junior compte pour moi autant que pour toi, rétorqua-t-elle, le pointant du doigt.

- Le Centre est un nid de serpents, et je ne veux pas que tu sois prise entre leurs crocs.

- Et toi, tu veux y aller sans soutien ?

- Je sais ce que je fais. Je ferai attention.

- Ah, bien sûr, le grand Jarod sait tout. Hey ! Devine quoi, on est tous les deux dans cette galère. Jarod. On fait ça ensemble. Si tu veux m'exclure de cette partie de ton existence, alors c'est que tu ne me connais pas du tout.

- Parker, je t'en prie. C'est déjà assez difficile comme ça, il ajusta les manches de sa chemise.

- Difficile pour qui ? Toi ? Moi ? Ou Junior ?

- Je veux juste te protéger. Je ne supporterai pas que tu sois blessée. Je ne veux pas te perdre. Pas une deuxième fois.

- Alors, ne me perds pas en essayant de me protéger. On a déjà affronté tant d'épreuves tous les deux. Ne commence pas à décider à ma place de ce qui est bon pour moi, elle lui tourna le dos, incapable de supporter ces propos.

- Parker, fais-moi confiance sur ce coup-là. » s'écria-t-il.

Déçue et abattue par la conversation avec son amant, la jeune femme quitta la pièce pour se réfugier dans la chambre franchissant le seuil, les épaules affaissées, la démarche lente voire mécanique. La porte se refermait derrière elle. Elle soupira. Devant son lit et sans hésitation, elle s'y laissa tomber, à plat ventre sur le matelas, ses membres manquaient d'énergie. Ses doigts s'agrippaient aux draps. Son visage, assombri par la tristesse, était enfoui entre deux coussins. Des larmes commencèrent à surgir où apparaissaient des traînées humides sur sa peau. Elle tourna la tête. Le regard lointain, elle ne fixait pas vraiment quelque chose de précis, elle essayait juste de comprendre le caméléon. Rien qu'en pensant à lui, et à son fils, un nœud se forma dans son estomac. Le toc-toc discret de Jarod vint la tirer de sa réflexion. Il s'allongea près d'elle, l'attirant doucement à lui tandis qu'elle faisait face au mur. Il la serra plus fort, il s'excusa.

« Tu n'as pas confiance en moi, Jarod. Tu te méfies toujours.

- Non. À part Sydney, tu es la seule personne en qui j'ai une totale confiance.

- Pourquoi tu fais ça ? Ses iris se dirigèrent vers lui. Je tiens à ton fils. Je veux être là pour lui.

- Récupérer Junior pourrait virer au drame, on pourrait ne pas s'en sortir indemne. Je t'aime, Parker. Et c'est justement parce que je t'aime que je ne veux pas que tu viennes avec moi. Cette bataille, c'est à moi de la mener.

- Oui, tu es fou amoureux, mais tu ne veux pas de moi pour sauver ton fils. Ce que tu dis n'a pas de sens.

- Parker, je t'en prie, arrête !

- Assez, Jarod ! Ne me prends pas pour une idiote. Tu as dit que tu voulais avoir un enfant avec moi, une famille… Je viens de prendre conscience qu'en fin de compte, c'est toi qui n'es pas prêt à t'engager sérieusement dans notre relation. Ça n'a rien à voir avec moi. C'est toi le problème !

- C'est vrai, tu as raison. Tu vois, depuis que nous sommes ensemble, tu as toujours été là, tu ne m'as pas laissé tomber. Tu as sacrifié bien plus pour moi que je ne l'ai jamais fait. Ce qu'il y a, c'est que j'ai le sentiment que si tu te retrouves face à Lyle ou Raines, tu finisses par te retourner contre moi…

- Tu ne peux pas éternellement me protéger comme si j'étais une demoiselle en détresse et tu ne peux pas douter en permanence de mon amour pour toi, sinon toi et moi, Jarod, nous n'aurons aucun avenir, la jeune femme s'empara du visage de son amant, ses pouces frôlaient ses joues. C'est d'accord, je resterai à l'écart. Mais n'oublies pas que je ne serai pas loin.

- Il y a une chose que tu peux faire, il effaça ses larmes. Si quelque chose m'arrivait, je voudrais que tu sois là pour Junior, que tu prennes soin de lui.

- Pourquoi moi ? Tu penses vraiment que je pourrais l'élever sans toi, Jarod ? Non. C'est inenvisageable. Je suis désolée, je ne peux pas. Les enfants, ils ont besoin de leurs deux parents.

- Oui, je sais que je t'en demande beaucoup, je ne veux pas te mettre dans une position difficile.

- Tu n'as pas compris, Jarod. Je ne parlais pas de Junior. J'ai eu des visions... Une petite fille. Et si elle n'est pas déjà en route, on… elle porta son regard sur son ventre.

- Une fille ? Parker, c'est incroyable ! Je suis fou de joie. Oh je suis tellement heureux ! tout excité, il posa sa main sur son abdomen. On va avoir un bébé, une petite Miss. Comme je suis impatient de la voir !

- Attends, Jarod, laisse-moi parler, elle eut un rire léger. Ne te méprends pas, je ne suis pas enceinte. Pas encore. Ce n'est qu'une vision. Si tu veux un autre bébé, faisons-le ! Mais tu n'as pas intérêt à retourner au Centre ou à mourir ! Parce que je ne veux pas avoir à dire à nos enfants qu'ils ne verront jamais leur père.

- Je n'ai pas l'intention de mourir, crois-moi. C'est génial, Parker ! Peut-on s'y mettre tout de suite ? il se jeta sur elle, la dévorant de baisers.

- Hey ! Doucement, Jarod. On devrait planifier ces choses-là.

- Planifier ? Non ! Ne crains rien, je ferai de mon mieux, il défie le nœud de son peignoir. Moi aussi, je veux cette petite fille, autant que je veux Junior, ses lèvres rencontrèrent pour la énième fois, le ventre de la demoiselle, puis sa langue qui s'agitait sans cesse sur son corps. Il revint vers sa bouche. Parker regarde-moi, je veux que tu me promettes de veiller sur Junior. S'il te plaît. C'est important.

- Je te le promets, oui, je prendrais toujours soin de lui.

- Et moi, je te promets que quoiqu'il arrive, je reviendrai toujours vers toi.

- Ne me fais pas de fausses promesses, Jarod.

- Je ne te promets rien que je ne puisse pas tenir. Je t'aime, Parker. »

Mlle Parker lui exprima son désir profond de fonder une famille ainsi que son intention de concevoir un enfant avec lui, et ce, de l'unique façon qui leur était possible de faire. Enlacés, ils savouraient le moment présent. La matinée toucha à sa fin. Celle-ci était remplie de belles promesses et de l'espoir pour l'avenir, scellant leur engagement l'un envers l'autre.