La journée fut mouvementée pour Thranduil. Il n'avait fait que lire et rédiger des rapports mais avait eu du mal à se concentrer avec tous les vas et viens. L'installation prochaine de Giselle dans ses appartements n'était pas de tout repos. L'installation d'un nouveau lit, d'un pare-vent… ainsi que les affaires de la jeune femme, en additionant les robes qu'elle avait porté depuis qu'elle était ici. Cela commençait à s'accumuler, il fallait faire de la place. Non pas qu'il en manque, mais il ne pouvait les mélanger avec ses propres effets. Il savait déjà que les rumeurs allaient aller bon train concernant le nouvel aménagement de l'elleth.

Que pouvait-il faire d'autre ? Elle était incontrôlable et Edwen ne pouvait pas la surveiller jour et nuit. Giselle avait failli commettre une grave erreur avec le seigneur Tárion, heureusement qu'il était intervenu à temps. Voilà ce qui l'avait poussé à prendre cette décision et c'était la meilleure décision, essaya-t-il de se convaincre.

Thranduil venait de réaliser que lui aussi devrait s'acclimater à ce nouveau changement. Cela faisait des siècles et des siècles qu'il n'avait pas partagé ses appartements, la dernière fois étant… avec sa défunte femme. La tristesse envahit soudainement le souverain. Il secoua vivement la tête, il ne devait pas penser à cela maintenant.

De faibles coups à la porte le firent sortir de ses pensées. Il ne montra rien, mais il appréhendait beaucoup cette soirée, ainsi que les prochaines à venir.

– Entrez. Tonna-t-il.

Cette soirée serait déterminante pour la suite, réalisa le souverain.


Le roi portait simplement une tunique marron, des jambières soulignant ses mollets, et le plus important… il ne portait rien sur sa tête. Aucune couronne ou tiare. C'est ce que Giselle préférait, elle ne se rendait pas compte qu'elle était en train de dévisager le roi avant qu'il ne se mette à parler.

– Suis-je si hypnotisant ? Fit-il, haussant un sourcil. Mettez-vous à l'aise Giselle, souffla le roi, après tout vous allez vivre ici désormais.

"Il est repassé au vouvoiement, je sais vraiment plus sur quel pied danser avec lui" s'exaspèra la jeune femme.

– Est-ce que je peux prendre la parole ? Osa-t-elle.

– Je vous en prie. Lui intima-t-il en s'asseyant sur sa chaise de bureau.

– Qu'ai-je fais de si grave pour être puni à ce point ?

Il fronça légèrement les sourcils d'incompréhension.

– Prenez vous vraiment cela comme une punition ?

– Être surveillée jour et nuit, oui, j'appelle ça une punition. Affirma-t-elle.

– Ce n'en est pas une. Vous êtes trop volatile Giselle, je ne peux le tolérer. N'ayez crainte je ne vous poserais pas plus de problème que cela, je m'assure juste que vous n'irez pas trop loin, que ce soit dans n'importe quel domaine.

Elle plissa légèrement les yeux.

– Surtout le domaine intime n'est-ce pas ? Elle pencha la tête sur le côté. C'est à cause de l'autre soir avec Tárion c'est exact ?

– Seigneur Tárion, la corrigea-t-il.

– Oui. Vous pouvez m'expliquer ce qui a été commis qui me vaille toute cette mascarade ? Le seigneur Tárion est un obsédé d'après ce que m'a dit Edwen, plus ou moins. Mais je ne vois pas en quoi ça vous regarde ? Même s'il s'était passé un truc, en quoi cela vous impacte-t-il ?

– Vous êtes ma protégée, je vous ai recueilli, prise sous mon aile, fait de vous ma servante personnelle. Je n'accepterai point que vous soyez souillée. Dit-il naturellement.

– Souillée !? S'énerva-t-elle. Vous plaisantez ? Parce qu'une femme qui couche avec un homme est souillée ? Vous vivez dans quel monde ? Pour votre information, continua-t-elle, j'ai déjà eu des aventures, je suis déjà "souillée" comme vous dites, depuis longtemps.

Il fronça durement les sourcils.

– Ce n'est pas ce que j'ai insinué. Cet ellon n'est pas quelqu'un de bien, s'énerva-t-il à son tour, tu devrais être reconnaissante j'essayais simplement de te protéger, tu n'es qu'une ingrate.

– Alors on repasse au tutoiement maintenant ? Il va falloir vous décider. Ensuite je souhaite savoir en quoi cela vous importe, personne n'aurait été au courant et puis de toute façon qui vous dit que je serais allée jusque-là !?

Il se leva et s'arrêta devant elle, la dominant de toute sa hauteur.

– J'ai simplement évalué toutes les possibilités, disons que si jamais tu ne l'avais envisagé, je t'ai évité le pire.

– Vous êtes jaloux, mon roi ? S'amusa-t-elle.

Il fit les gros yeux, ne sachant quoi répondre mais reprit rapidement le contrôle.

– Ne prends pas tes rêves pour une réalité. Tu ne partageras pas ton lit avec cet ellon. Ma décision est sans appel.

La jeune femme afficha un sourire narquois et défia Thranduil.

– Très bien. J'accepte votre décision.

– Tu te montres enfin sage, j'en suis heureux. Il se détourna d'elle et alla se servir un verre de vin.

– Cela dit… fit-elle en se déplaçant dans la pièce, toujours cette lueur de défis dans le regard, vous n'avez rien dit concernant les autres ellyn.

Sa main, parée de bagues, se crispa autour de son verre mais il ne détourna pas son visage du liquide rouge. Il ne savait quoi répondre, il ne pouvait pas l'interdire de voir des ellyn sous prétexte…

– Tu es libre de faire ce que tu veux dans la limite du raisonnable, mais je t'ai à l'œil quoiqu'il arrive.

– Bien, acquiesça-t-elle légèrement déçue.

La jeune femme partit en direction de son lit qui se trouvait dans cette même pièce. "Ah ouais c'est vraiment dans la pièce principale, on peut même pas péter en paix". Elle remarqua son sac posé sur une table de chevet, tout semblait s'y trouver à l'intérieur.

Elle passa de l'autre côté du pare-vent et s'adressa à Thranduil.

– Vous me faites visiter ? S'enquit-elle.

Il haussa un sourcil, blasé.

– Tu n'as besoin d'aller nulle part dans cet appartement. Seule la salle d'eau te sera nécessaire. Elle se trouve au fond. La porte à droite est ma chambre, inutile de te dire qu'elle t'est interdite.

– Et pourtant, vous me le dites quand même. Lui fit-elle remarquer. Elle se dirigea vers la salle d'eau. Celle-ci était immense, il y avait une très grande baignoire dans l'angle de la pièce, un joli "lavabo" surplombé d'un miroir. Elle admira la pièce qui devait être trois fois plus grande que sa minuscule salle d'eau dans son ancienne chambre. "Au moins ça de gagné". Elle retourna dans le salon.

Thranduil avait toujours le regard plongé dans son verre de vin. Elle le considéra un instant et remarqua le panier qui contenait sa pâtisserie. Il était vide. Un fin sourire vint égayer son visage.

– Vous avez mangé mon muffin ! S'exclama-t-elle.

Il leva les yeux vers elle.

– Que dis-tu ? Fit-il en plissant légèrement les yeux.

– Le muffin qu'il y avait dans le panier là, pointa-t-elle du doigt, c'est moi qui vous l'avait fait. Enfin c'est plutôt Daeron et moi je l'ai aidé, mais c'était mon idée. Expliqua-t-elle, venant s'asseoir en face du roi.

Il la détailla un instant. Elle avait l'air bien plus apaisée, il ne comprenait pas ce changement presque soudain de la jeune femme, mais il commençait à s'y habituer. Il pouvait passer du chaud au froid avec elle en seulement quelques minutes.

– Tu m'as fait cette pâtisserie ? Pour quelle raison ?

– J'étais venu m'excuser pour mon comportement de la veille. Je me suis énervée pour rien, reconnaissait la jeune femme, vous ne m'aviez rien dit de mal et j'ai mal réagi sans raison. Je m'en excuse. Elle marqua une courte pause. Il était bon ?

– Oui, affirma-t-il. Mais pourquoi me l'avoir laissé devant la porte ? Pourquoi ne pas me l'amener en main propre ? Fit-il d'un air curieux.

– C'est une longue histoire… le principal c'est que vous l'ayez eu.

– Je suppose.. Lui souffla-t-il. Alors elle était venue s'excuser de son comportement ? La raison ne l'avait donc pas totalement abandonnée, elle savait reconnaître ses torts. "Enfin un attrait de sa personnalité qui joue en sa faveur".

Le ventre gargouillant de la jeune femme le fit le sortir de ses pensées.

– As-tu faim ? Lui demanda-t-il. Il vit ses yeux pétiller soudainement.

– Oui ! Extrêmement. Elle se leva se dirigeant vers la sortie.

– Où comptes-tu aller ?

– Chercher nos couverts, les plats et tout ça, vous ne voulez pas manger ? Répondit-elle innocemment.

– Tu ne me serviras point ce soir. Il se leva et fit appeler une servante à qui il donna un ordre en Sindarin.

– Assieds toi, tu seras une invitée ce soir. Elle avait été agréable ce soir, pour la première fois ils avaient pu avoir une conversation sans verre cassé ni hurlements à travers la pièce.

Les deux elfes s'assirent et se firent servir à manger et à boire, Giselle avait demandé de l'eau et non du vin pour le repas. Elle laisserai le roi se rendre ivre tout seul, elle devait garder la tête froide.

Elle mangea très peu, mal à l'aise. Cela n'était pas dû au souverain pour une fois, mais à la servante qui se tenait près d'eux, prête à resservir si nécessaire. Giselle n'en pouvait plus et osa prendre la parole.

– Vous pouvez partir s'il vous plaît ? Elle s'adressa à la servante qui ne savait quoi répondre et regarda le roi, ne sachant pas quoi faire.

– Un problème ? L'interrogea Thranduil qui se tapota le coin des lèvres pour s'essuyer, après avoir fini sa première bouchée.

– C'est que… je pensais qu'on mangerait tranquille, tous les deux. Ne le prenez pas mal mademoiselle mais je n'arrive pas à manger quand quelqu'un reste planté là à me regarder.

Thranduil congédia la servante et s'adressa de nouveau à Giselle.

– Tu vas devoir t'acclimater à ce mode de vie Giselle, cela est notre quotidien, lors des banquets il y aura plus d'une servante autour de la table.

– Je sais bien, mais lorsqu'on est tous les deux, je préfère parler tranquillement avec vous et pas avoir quelqu'un qui entend tout ce que l'on dit. Dit-elle naturellement, recommençant à manger.

– Ne vous inquiétez pas, c'est moi qui vous servirez, ça ne me dérange pas. Dans mon monde à moi je n'ai pas de servante ni rien de ce genre, je fais mon ménage seule, ma cuisine seule enfin si on peut appeler ça de la cuisine quand on voit ce que vous prépare Daeron… et je me sers seule. Et surtout, je me lave seule !

Il détailla la jeune femme qui se servait goulûment sans se préoccuper des bonnes manières. Il l'admira secrètement, il aimait que Giselle soit si libre et sans contrainte. Qu'elle ne mesure pas chaque parole, geste ou bonne manière à avoir. Elle était naturelle et c'était quelque chose qu'il ne pouvait lui-même se permettre depuis qu'il régnait. Il n'avait pas pour habitude d'avoir ce genre de comportement autour de lui. Tout le monde était si poli, mesuré, droit, lui disant oui à tout. Surtout concernant les ellith, chacune d'entre elles souhaitait tellement être celle qui ferait la différence aux yeux du roi.

Mais Thranduil n'était pas dupe, il savait que les ellith ne s'intéressaient qu'à sa couronne. Elles savaient toutes faire semblant, plaire à leur roi, choisir les bons mots au bon moment. Il était habitué même lorsqu'il était encore prince. Mais il s'en fichait, il avait déjà connu l'amour, sa défunte femme était la seule à laquelle il pensait. Jusqu'à Giselle. Pour une raison inconnue, il était intrigué par cette étrange elleth. Elle occupait ses pensées bien plus qu'il ne l'aurait voulu.

– Je vous ai choqué à ce point pour que vous ne disiez plus rien ? L'interrogea-t-elle.

Elle l'avait sortie de ses pensées. C'était pour le mieux.

– Je peux comprendre ta réticence envers certaines de nos coutumes. Mais tu vas devoir faire avec. Lâcha-t-il.

– Cela vous dérange-t-il tant de vous retrouver seul avec moi ? Suis-je si insupportable que ça ? Lui demanda sérieusement la jeune femme, faisant papillonner ses paupières.

Comment le lui dire ? Comment lui avouer qu'elle le troublait et que se retrouver seuls à table le troublait davantage ? Il devait trouver une parade sans la blesser.

– J'accepte de faire cette concession concernant les dîners, mais cela sera ta dernière exigence, suis-je clair ?

Elle leva les yeux au ciel. Qu'avait-elle dit de mal ? Il la détestait à ce point là qu'il ne supporte pas de dîner seul avec elle ? "Au moins il a accepté, c'est déjà ça" se rassura la jeune femme.

– Très bien. Vous ne finissez pas ? Elle designa la part de tarte du roi qu'il n'avait pas touché.

Il avança l'assiette vers la jeune femme.

– Je n'ai plus faim. Je m'étonne d'ailleurs que ce ne soit pas également ton cas.

Les plats étaient vides, elle avait bien plus mangé que lui et avait également mangé sa propre part de tarte. Il n'avait encore jamais vu une elleth manger autant.

– Votre cuisinier se donne du mal, je fais simplement honneur à ses plats. Fit-elle, un grand sourire aux lèvres en engloutissant la part de tarte.

Il la regarda faire, amusé. Il se demanda si la jeune femme était aussi pleine d'entrain pour les autres choses de la vie. Mais il chassa rapidement cette pensée de son esprit.

– Pourquoi vous me tutoyez ? Le questionna soudainement l'elleth.

Il ne savait pas lui-même, c'était venu tellement naturellement.

– Cela te gêne-t-il ? Lui demanda-t-il tout en penchant sa tête sur le côté.

– Et bien non, seulement ce n'est pas équitable, vous vous pouvez le faire mais pas moi… vous savez je tutoie également Edwen et c'est bien plus naturel lorsqu'on connaît quelqu'un.

– Nous ne nous connaissons absolument pas Giselle. Affirma le roi en baissant les yeux vers son verre de vin vide.

La jeune femme le servit de nouveau et lui répondit quelque chose qui lui fit plaisir, malgré lui.

– Moi je souhaiterais vous connaître. Je veux dire le vrai vous, pas des on dit de couloir.

Les yeux du souverain se mirent soudainement à briller.

– Que veux-tu savoir ?

– Votre vie, comment c'est d'être roi, vous devez être constamment sollicité. Est-ce que vous avez le droit d'avoir vos propres activités et vous accorder un peu de repos ? Qu'est-ce que vous auriez aimé faire si vous n'aviez pas été roi ?

Thranduil mit un certain temps à répondre. C'était la première fois qu'on lui posait ce genre de question et surtout que l'on s'intéresse vraiment à lui et ce qu'il voulait.

– Je.. Je ne sais pas ce que j'aurai voulu être. Je suis roi depuis tellement longtemps que je ne sais plus. Cela me plaît d'être roi même si les tâches qui m'incombent sont ardues.

Il marqua une courte pause.

– J'ai le droit de faire plus ou moins ce qu'il me plait tout en restant raisonnable. Partir chasser me manque. Avoua-t-il en buvant une gorgée de vin.

– Quel effet cela procure-t-il d'avoir toutes les femmes à ses pieds ? Demanda-t-elle, un air faussement innocent.

Ne s'attendant pas à une telle question, le roi recracha le vin, s'étouffant légèrement. Il prit une serviette s'essuyant la bouche ainsi que le haut de sa tunique qui avait reçu quelques gouttes.

– Je ne te permets pas ! S'exclama-t-il.

– Arrêtez de faire votre prude. Je suis sûr que vous avez plein de maîtresses.

– Tu dois me confondre avec un humain. Les elfes savent se contenir. S'offusqua le roi.

– Donc je ne sais pas me contenir ? L'interrogea la jeune femme, un sourcil levé.

– Tu es une elleth Giselle, quand vas-tu l'intégrer ?

Elle leva les yeux au ciel.

– Vous ne vous êtes jamais laissé tenter ? Cela fait plusieurs siècles, il n'y a aucun mal à cela…

– Il suffit ! Tonna le roi. Cette discussion est terminée.

– On peut même pas discuter calmement. Souffla Giselle.

– Tu me demandes des choses qui ne te regardent en rien, vas te coucher, tu as assez parlé pour ce soir. Fit le roi en se levant.

Elle fronça légèrement les sourcils. Elle devait savoir si il s'était tapé la moitié du royaume ou non. Non pas que cela la regarde en quoique ce soit… mais elle avait besoin de le savoir c'est tout.

Tant pis, elle le travaillera au corps une prochaine fois.

– Si tu as besoin de la salle d'eau, vas l'utiliser immédiatement. Je ne veux plus te voir de la soirée.

– Ça va d'accord… Elle se leva et alla se laver les dents.

Thranduil fit les cent pas dans la pièce. Pour qui se prenait cette elleth ? Elle lui posait des questions bien trop intimes. Il se sentait déjà coupable d'avoir succombé à la tentation, il n'avait pas besoin qu'on le lui rappelle. Et cette maudite elleth qui testait son calme et le confrontait à ses propres besoins..

Elle ne se rendait pas compte de l'effet qu'elle commençait à avoir sur lui. Lorsqu'elle lui avait posé des questions sur ses propres envies, ses responsabilités, ce qu'il souhaitait faire… il avait eut une forte envie de l'embrasser. Jamais personne ne s'intéressait vraiment à lui, à sa personne. Cette elleth arrive d'un monde inconnu et chamboule tout. L'avoir invité dans ses appartements n'était peut-être pas l'idée la plus judicieuse qu'il ait eu.

Giselle revint de la salle d'eau et Thranduil partit s'enfermer dans sa chambre. Il entendit un "bonne nuit" qu'il ignora royalement.

– Super. Fit Giselle pour elle-même. Et dire qu'on passait une bonne soirée jusque là. Ils sont trop susceptibles ces elfes.

La jeune femme se jeta sur son nouveau lit qu'elle trouva plus confortable que le précédent, et même plus grand, ce qui ravit l'elleth. Elle fouilla dans son sac pour y trouver ses airpods qu'elle mit et écouta de la musique. Il lui restait beaucoup de batterie sur son téléphone puisqu'elle n'avait pas pu l'utiliser jusque-là. Elle finit par s'endormir en pensant à un certain elf aux cheveux d'argent.


Giselle fut réveillée assez tôt par des vas et viens dans la pièce. Elle sentit l'odeur du petit-déjeuner et cela apaisa sa mauvaise humeur du matin. Après tout, se faire réveiller par du monde qui passe devant vous lorsque vous dormez n'a rien d'agréable.

Elle se leva sans un regard pour Thranduil qui était assis à la table, lisant un rapport "comme d'habitude" se dit la jeune femme. Elle partit se passer un coup d'eau sur la figure pour se réveiller et se donner meilleure mine. Son regard s'arrêta sur son reflet dans le miroir, elle se demandait comment elle allait pouvoir affronter chaque jour avec Thranduil dans les parages. Il prenait tout au pied de la lettre. Il pouvait se montrer chaleureux mais prendre le moindre truc de travers et être froid comme de la glace. Elle sortit enfin de la salle d'eau après quelques minutes et se mit à table.

La jeune femme se servit plusieurs pâtisseries et se fit une tartine avec de la confiture. "Ça manque vraiment de café ici".

– Vous me faites la tête ? Tenta la jeune femme.

Il la regarda un instant mais ne répondit rien.

– J'ai beaucoup moins d'appétit si vous êtes fâché contre moi, et si je mange pas je serais encore plus insupportable que d'ordinaire. Donc c'est plutôt dans votre intérêt de me repondre. Osa la jeune femme, un air amusé dans la voix.

– Tu es insupportable, tu ne sais donc jamais te taire ?

– Non. La jeune femme sourit de toutes ses dents.

Le souverain leva les yeux au ciel.

– Je ne t'en veux pas pour ta bêtise d'hier soir, tu n'es qu'une elleth ignorante, je ne peux pas te le reprocher. Lança le roi tout en reportant son regard sur son rapport.

– Cool ! Je vais pouvoir me goinfrer alors ! Vous devriez manger aussi, un roi ne devrait pas régner le ventre vide. S'exclama la jeune femme. Vous voulez pas garder une pâtisserie pour plus tard ? Suggéra l'elleth.

Il leva les yeux une nouvelle fois sur elle, les sourcils froncés lui faisant comprendre d'arrêter de l'importuner.

La jeune femme leva les deux mains en l'air en signe de reddition et continua de manger.


La matinée se passa calmement pour Giselle, elle était passée à la bibliothèque pour pouvoir lire et en apprendre plus sur la terre du milieu. Tout ce qu'elle comprit c'est que les elfes se vantaient d'être sages mais c'était eux qui avaient foutu un beau bordel en terre du milieu. "Tout ça pour des cailloux" se moqua intérieurement Giselle. Bien sûr elle savait que c'était plus complexe que cela mais sur le fond "c'est pareil".

La jeune femme était ensuite passée voir Daeron. L'ellon était ravi de la voir. Il avait enfin l'impression de ne plus cuisiner dans le vent depuis que la jeune femme dînait avec le roi. Il lui avait offert une part d'un "truc" dont elle n'avait pas saisi le nom, mais qu'elle engloutît sans problème. Il lui offrit ensuite deux petites pâtisseries à la crème d'amande qu'elle accepta volontiers. Elle les gardait pour l'après-midi.

Giselle souhaitait passer une partie de l'après-midi dans la forêt. "Pas trop loin quand même" se dit la jeune femme. Elle avait bien trop peur de l'environnement dépourvu de confort pour s'y aventurer seule. Elle passa à quelques mètres du roi qui discutait sûrement d'un truc sans intérêt pour la jeune femme. Il discutait avec une garde. Elle l'admira quelques minutes, il était magnifique avec sa couronne pleine de baies qui lui donnait de la couleur.

Sa beauté était telle qu'elle se demandait si elle verrait plus belle créature un jour. Tous les elfes étaient beaux, hommes ou femmes, mais lui… il était sur un autre plan. Ses cheveux d'argent étaient ce qui le différenciait le plus des autres elfes. Il y avait déjà peu d'ellith ou d'ellyn blonds, alors avec des cheveux si clairs… la plupart étaient bruns, châtains ou encore roux. Les épais sourcils foncés du roi contrastaient avec la clarté de sa chevelure, ce qui le rendit encore plus unique selon la jeune femme. Elle rougit légèrement sans s'en rendre compte et secoua la tête en se dirigeant vers la sortie, sous le regard d'Edwen.

Giselle se baladait depuis plusieurs minutes, elle admirait les couleurs magnifiques de la forêt, le printemps donnait de la couleur avec toutes ces fleurs. Elle vit un visage familier non loin d'elle. C'était le garde qui l'avait sauvé le jour où elle était arrivée ici.

– Faelor, c'est bien ça ? L'interrogea Giselle, le cœur léger.

– En effet, fit le garde, comment se porte votre vie au sein de notre royaume ?

– Ma foi pas trop mal, je suis bien épaulée. Sourit la jeune femme.

Faelor jeta un rapide coup d'œil dans les alentours.

– Edwen n'est pas avec vous ? S'enquit-il.

– Non pas en ce moment, pourquoi ?

Il sembla déçu.

– Simple curiosité, fit il.

La jeune femme décida de mettre les pieds dans le plat, comme à son habitude.

– Elle vous plaît ? Lui demanda la jeune femme le plus naturellement du monde.

– Co..comment ? L'elleth l'avait pris au dépourvu, comment pouvez-vous penser une telle chose ? Bafoua le jeune homme.

– Parce qu'elle est très jolie et gentille ? Vous n'êtes pas d'accord ?

– Si ! Bien sûr que si ! S'indigna l'elf. Qui ne le penserait pas…

– Puisque vous ne me le demandez pas, je vous le dis quand même, elle se porte bien et si elle vous plaît vous devriez vous lancer avant que quelqu'un d'autre ne le fasse.

– Comment ? Vous pensez qu'un elf lui fait la cour ? S'inquiéta le brun.

– Je n'ai pas dit ça, mais je pense qu'il ne faut pas perdre de temps. Vous avez vu la demoiselle, elle est jolie, gentille, bien élevée… tout ce que je ne suis pas. Ria Giselle. Elle doit avoir un certain succès. La jeune femme partit s'assoir sur un banc suivit du garde.

– Je ne comptais pas lui faire la cour tout de suite, je voulais d'abord m'assurer qu'elle m'apprécie. Fit le garde en s'asseyant à côté d'elle.

– Vous êtes trop lent vous les elfes… se plaigna gentiment Giselle, elle va vous passer sous le nez et vous ne direz pas que je ne vous ai pas prévenu. Insista Giselle.

Le visage de Faelor s'adoucit.

– Vous avez raison Giselle, je ne dois pas perdre de temps. Mais vous savez, les elfes ont l'éternité devant eux, voilà pourquoi ils prennent le temps. Lui souffla-t-il.

– Je ne vois pas l'intérêt de passer son éternité à attendre que le bonheur vous tombe dessus. Quand vous pouvez commencer à partager votre vie avec la personne que vous aimez. Lacha Giselle.

Faelor fronça légèrement les sourcils en signe de réflexion. Ce que lui dit Giselle le toucha directement. L'elleth brune avait totalement raison, pourquoi attendre lorsque l'on peut avoir la vie rêvée ?

– Vous voulez une pâtisserie à la crème d'amande ? Lui proposa Giselle. J'en ai deux. Je vous dois bien ça, après tout c'est vous qui m'avez trouvé et ramené ici.

– Avec plaisir ma dame. Accepta l'elf avec joie. Vous avez totalement raison Giselle. Et vous aviez tort lorsque vous disiez être l'opposé de dame Edwen.

Vous êtes très jolie, de très bonne compagnie et vous avez de sages paroles. Lui intima le garde. Votre franchise peut parfois vous faire du tort mais elle peut également être un grand atout. Beaucoup d'elfes en sont dépourvus, lui dit-il avec un clin d'œil.

Il mangea sa pâtisserie et se leva.

– Merci pour la douceur, ainsi que vos sages paroles Giselle. Je dois retourner faire ma ronde, je ferais bon usage de vos conseils. Il s'inclina, une main sur le cœur et partit.

La jeune femme se leva à son tour et retourna au royaume. Elle monta dans les appartements de Thranduil et décida de prendre un bain, c'était la fin d'après-midi, elle savait le roi encore occupé. Il ne viendrait qu'en début de soirée. Elle avait donc le temps de se relaxer. La baignoire était grande elle pouvait s'y allonger de tout son long. Elle pouvait étendre ses grandes jambes sans les plier. "Quel bonheur".

Les appartements du roi n'étaient pas si mal. "Qu'est ce que je raconte, ils sont magnifiques" Si grands, si spacieux… elle fut curieuse de savoir à quoi ressemblait la chambre du roi mais respectait son intimité. Elle n'ouvrit pas la porte interdite et retourna au salon, elle passa la brosse dans ses cheveux propres et doux. Elle remarquait qu'ils avaient poussé de quatre ou cinq centimètres, cela ne lui déplaisait pas. Elle avait eu les deux, les cheveux longs et les cheveux courts. Son humeur changeait selon les saisons, en ce moment elle souhaitait se les laisser pousser.

Le claquement de la porte la fit sursauter. Thranduil se tenait devant la porte, les poings serrés.

– De quel droit oses-tu distraire l'un de mes gardes ?

Et voilà, la journée avait été bien trop parfaite pour que cela dure jusqu'à ce qu'elle aille se coucher. Le roi était rentré et de mauvaise humeur, pour changer.