Bonjour!

J'ai souffert d'un blocage épouvantable et je suis désolée si ce chapitre arrive à ce point en retard! Je n'arrivais tout simplement pas à mettre en ordre des idées et tout ce que j'écrivais était un ramassis de kfjhfdgkjfndbjk que j'effaçais et recommençais sans arrêt.

Et puis, quand j'ai fini par sortir la tête de l'eau, j'avais écrit l'équivalent de deux chapitres et demi en terme de longueur. :/ ...Et je n'ai toujours pas atteint l'événement qui devait terminer mon chapitre!

Donc, comme ça m'arrive souvent, j'ai décidé de séparer ce gigantesque monstre en plusieurs chapitres plus petits, question de vous aider à patienter.

Bonne lecture!

Charlie

P.S.
kfjhfdgkjfndbjk = schnoutte
schnoutte = merde
lol

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CHAPITRE 8 - LE PLACARD

Prompto écouta le message sur sa messagerie vocale le vendredi matin, principalement parce qu'il ne supportait plus de voir la notification dans la barre de menu de son téléphone.

"Bonjour Prompto... Je suis désolé de la façon dont notre conversation s'est déroulée. Je crois que je me suis mal exprimé et je comprends parfaitement votre colère. S'il vous plaît, permettez-moi de m'expliquer à nouveau. J'aurais préféré le faire en personne, mais je dois quitter la ville pour quelque temps et je ne crois pas que cette importante discussion puisse attendre mon retour. S'il vous plaît, rappelez-moi dès que possible."

Il effaça le message et n'en fit pas suite. Il bouillait toujours de colère lorsqu'il pensait à leur échange et il savait que peu importe ce que le conseiller avait à lui dire, le mal était déjà fait.

Toute la semaine, il s'était demandé si Noctis était au courant de la situation, mais il n'avait pas osé aborder le sujet par messagerie texte. Il se demandait si le prince savait que son conseiller s'était déplacé à l'école pendant son absence uniquement pour piéger Prompto dans une conversation désagréable. Et si Ignis lui avait dit (prévenu?) que son nouvel ami était gay. Et s'il avait suivi avec un discours sur ses préjugés monstrueux.

Mais les messages que les deux étudiants s'étaient échangés toute la semaine étaient restées parfaitement normaux, et, au bout d'un moment, Prompto avait arrêté de se casser la tête.

Il avait quand même décidé qu'il était temps de sortir du placard. Pas pour avertir Noctis, mais simplement pour partager quelque chose de lui-même. Il savait que le moment viendrait de toute façon; l'information finissait toujours par se glisser dans une conversation. Il préférait habituellement cette technique plutôt que d'en faire une grande déclaration.

Et si le prince pensait comme Ignis, bah. Qu'il aille se faire voir.

Il n'en avait rien à foutre.

Non?

– Qu'est-ce que t'as en tête pour ce soir?, demanda Prompto.

Noctis et lui venaient de s'asseoir à leur table habituelle dans la classe de Barbarossé, attendant que leur cours de physique ne commence.

– Je sais pas, répondit le prince. On peut aller chez toi?

L'idée ne fut pas aussi horrible que la première fois.

– Ok, répondit Prompto. J'espère que t'aime les Cup Noodles, parce que c'est tout ce que j'ai à bouffer.

– C'est quoi?

Prompto lui lança un regard éberlué.

– Sérieux?!

– Je déconne.

Il eut un moment de silence, puis Prompto éclata de rire. Lorsqu'il se tourna de nouveau vers Noctis, il constata que ce dernier le regardait comme s'il n'y avait rien dans l'univers de plus beau que son ami qui riait.

Et le cœur de Prompto se mit immédiatement à palpiter comme le traître qu'il était.

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Ce fut Gladio qui vint les cueillir après les cours. Le bouclier était aussi sympathique qu'à son habitude lors du trajet, discutant de tout et de rien, et lorsqu'il s'arrêta devant la maison, il se retourna pour tendre un billet de trois cents gils aux garçons qui s'apprêtaient à sortir.

– Commandez-vous de la pizza ce soir, je vous l'offre.

Avant même que Prompto n'eut le temps d'interpréter la phrase, Noctis avait déjà attrapé le billet précipitamment, comme s'il s'attendait à ce que Gladio ne retire son offre.

– Oh putain la classe!, s'exclama-t-il.

Mais Prompto détecta immédiatement le manège. Très certainement que Gladio avait deviné qu'il n'avait que peu de choses à manger chez lui, et il voulut protester parce qu'il ne supportait pas d'être pris en pitié. Il ouvrit la bouche, prêt à rejeter l'offre.

– J'ai jamais droit à de la pizza, commenta Noctis, secouant le billet comme s'il s'agissait d'un don du ciel, un sourire béant aux lèvres. C'est le plus beau jour de la vie!

Noctis sortit de l'habitacle et Prompto hésita soudainement. Il jeta un coup d'œil à Gladio, mais le bouclier s'était déjà retourné.

Il se mordit la lèvre inférieure. Puis, soupirant, il sortit à son tour.

Peut-être méritait-il une pizza aujourd'hui.

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Prompto décida que le temps passait trop rapidement. Ils venaient à peine d'arriver, lui semblait-il, que le soleil se couchait déjà. La gigantesque pizza, recouverte d'une quantité absolument ridicule de garnitures de toutes sortes, prônait toujours sur la table de la cuisine, mais le trois-quarts des pointes étaient déjà englouties. Leurs livres se terraient toujours dans leurs sacs à dos, et Prompto ne proposa pas d'étudier.

Il préférait de loin entendre le rire de Noctis, de l'écouter s'extasier à chaque bouchée de pizza, de voir ses mains glisser dans sa chevelure lorsqu'il se remémorait un souvenir, de savourer chacune de ses paroles alors qu'il parlait de tout et de rien, comme si les deux hommes se connaissaient depuis toujours.

Décidément, Barbarossé n'avait jamais été aussi loin dans son esprit.

Noctis lui raconta des anecdotes savoureuses que seul un enfant né prince pouvait avoir vécu; comment il avait renversé tout un verre d'eau sur les genoux d'un diplomate, comment il avait fait paniquer le palais entier en se cachant des gardes toute une journée, comment il avait fait apparaître ses armes par accident un soir que sa nounou lui faisait prendre son bain.

Prompto riait. Il se surprit aussi à partager des histoires de son passé : il parla de son ancienne obsession pour les documentaires de National Geographic et de ses matinées à jouer au basket en se faufilant sur des terrains privés. Il raconta des anecdotes hilarantes à propos de tous les animaux soi-disant en détresse qu'il avait ramenés à la maison, au grand détriment de sa pauvre maman (le raton laveur avait été de trop). Il se rappela des après-midi qu'il passait à la salle d'arcade avec sa mère et la manie de celle-ci de ne lui laisser aucune chance dans les duels.

– Elle m'entraînait à la dure, sourit Prompto. J'ai jamais gagné un seul combat de Street Fighter contre elle.

– C'est cool qu'elle t'emmenait à la salle d'arcade, commenta Noctis en s'enfonçant la moitié d'une tranche de pepperoni dans la bouche. J'ai toujours rêvé d'y aller.

Prompto se redressa sur sa chaise.

– Quoi?! Tu n'as jamais mis les pieds dans une salle d'arcade?! Sérieux?!

Noctis haussa les épaules, mastiquant.

– Je me souviens que gamin, j'avais supplié mon père de m'y emmener. Mais il m'avait répondu que ce n'était pas un endroit pour un prince, et encore moins pour un roi.

– Putain, c'est pas possible!

– Ouais, répondit Noctis en pigeant un second morceau de pepperoni. C'est le genre de truc que je regrette de ne pas avoir vécu…

Sur une impulsion, Prompto se leva d'un coup.

– On y va tout de suite!, déclara-t-il.

Le prince le dévisagea, une main tenant le morceau de pepperoni figé devant sa bouche.

– Quoi? On va où?

– Il y a une salle d'arcade pas loin d'ici!

– Attends, quoi?!

– Bah oui, pourquoi pas! Il faut absolument que tu y ailles au moins une fois dans ta vie!

Noctis le regardait comme s'il était complètement fou.

– Je… Tu veux… Mais… Gladio ne sera jamais d'accord?!

Prompto commençait déjà à remettre les restes de la pizza froide dans sa boîte et à ranger la table.

– C'est pas lui que j'invite, c'est toi, crétin.

Noctis roula les yeux, mais avala enfin sa bouchée. Puis, sans rien dire de plus, il se leva à son tour pour ramasser les verres vides. Prompto s'arrêta devant son absence d'enthousiasme.

– C'est si tu veux, hein?, lui dit-il.

Noctis garda le silence quelques secondes.

– C'est juste que… Les lieux publics sont pénibles pour moi.

– Ah… Ouais, je comprends.

– Mais je veux y aller!, reprit aussitôt le prince. Je veux vraiment y aller…

– Mais c'est stressant pour toi, devina Prompto.

Le prince hocha la tête, le regard penché vers la table.

– C'est con, marmonna-t-il.

– C'est pas con, répliqua Prompto.

(Il lui semblait qu'il répétait ce type de phrases sans arrêt en présence de Noctis.)

– Honnêtement, continua le blond, je crois pas que les gens te reconnaîtront dans le quartier Nord… Sans vouloir t'offenser, on s'en fout de la famille royale ici.

Les gens avaient en général trop de problèmes dans leur propre vie pour s'attarder à celle de gens qui ne semblaient pas vouloir les aider. Il garda cependant cette réflexion pour lui.

– Si tu veux, ajouta-t-il, on essaie et si c'est trop intense, on revient aussitôt. T'en dis quoi?

Le prince se mordit la lèvre, réfléchissant à la proposition. Prompto attendit sa réponse patiemment.

Puis :

– Ok. On le fait, décida Noctis.

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Il était difficile pour Prompto de contrôler la vitesse de son cœur lorsqu'il voyait Noctis s'émerveiller sur absolument tout. Même le trajet en bus était soudainement devenu l'attraction de l'année : Noctis avait insisté pour qu'ils restent debout malgré les sièges vides afin d'expérimenter à son maximum la joie de la conduite erratique d'un chauffeur détestant visiblement son job et, plus tard, lorsque l'autobus fit le plein de passagers, des savoureux coups de coudes et des sacs à dos trop volumineux.

Prompto avait l'impression que plus ils étaient coincés, plus que Noctis jubilait.

Celui-ci était absolument magnifique; son sourire semblait indécrochable et son regard curieux glissait sur tous les détails autour de lui, au point où Prompto ne put plus résister.

Il sortit son téléphone et photographia le prince.

Avant même d'avoir vu la photo, il sut qu'elle était parfaite. Noctis s'était retourné au dernier moment vers lui et son sourire s'était étiré encore plus largement, si ce n'était possible.

– Prends-en une de nous deux!, lança Noctis.

Prompto obéit, levant le bras pour les cadrer tous les deux dans l'écran, et, même s'ils étaient déjà écrasés l'un contre l'autre par les autres passagers, Noctis s'approcha encore plus de lui, appuyant son menton contre son épaule et posant sa main dans le bas de son dos.

La respiration de Prompto figea subitement. Un courant électrique grimpa le long de sa colonne jusqu'à sa nuque et son torse enfla soudainement d'une émotion identifiable. Il eut l'impression qu'il pouvait sentir chacun des doigts du prince comme s'ils étaient directement sur sa peau, brûlants à travers de son t-shirt, et il tenta d'expirer normalement.

Dans l'écran de son téléphone, le prince souriait magnifiquement, époustouflant comme toujours, mais c'était surtout son propre visage qu'il avait l'impression de ne pas reconnaître. Ses yeux étaient plus vifs qu'ils n'avaient jamais été, son sourire était franc et heureux, ses joues étaient rouges sous ses taches de rousseurs.

Il émanait un bonheur qu'il n'avait jamais vu sur lui-même.

Il appuya sur le déclencheur et abaissa le bras.

Noctis s'éloigna, mais à peine. Sa chaleur était toujours perceptible contre le bras de Prompto, picorant agréablement sa peau, et il tenta d'ignorer ce détail.

– Tu me l'enverras, dit le prince.

– Ouais, ok.

Il regarda la photo. Noctis et lui ressemblaient à un couple.

Il se pinça les lèvres et glissa son téléphone dans sa poche.

Bientôt. Il lui dirait bientôt.

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Le Atari était une vieille salle d'arcade qui n'arrivait pas à mourir. Elle était obsolète lorsque Prompto était jeune, mais depuis, elle avait réussi à se transformer en un endroit au style rétro qui rassemblait des nostalgiques de tous âges.

La salle était exactement comme dans ses souvenirs. L'odeur de maïs soufflé, le bruit des machines et les lumières psychédéliques lui donnaient l'impression d'avoir reculé dans le temps.

– Oh putain!, lança Noctis. C'est le rêve cet endroit!

Prompto sourit.

– Bienvenue au paradis, commenta-t-il. Viens, on va échanger des pièces.

Ils firent le plein de jetons, puis attaquèrent aussitôt les bornes. Comme Prompto l'avait prédit, personne ne reconnut le prince : son visage était peu connu dans cette partie de la ville, et les gens étaient de toute façon trop absorbés par l'action sur leurs écrans pour le remarquer – ce qui fit visiblement le bonheur de Noctis qui jubilait comme un gamin. Et puis, avec sa chemise blanche et son pantalon d'uniforme scolaire, il passait complètement inaperçu dans la masse d'étudiants habillés comme lui.

Les deux hommes passèrent un temps infini sur le simulateur de planche à roulette de Tony Hawk, à hurler comme s'ils étaient réellement en train de voler au-dessus de la demie-lune, puis à courser sur les circuits fictifs de Nascar. Ils s'attardèrent sur Pac Mac – surtout par devoir, car il s'agissait d'un classique incontournable – puis flambèrent leurs jetons sur Contra, parce que ce jeu avait définitivement été créé par le diable lui-même et qu'il était hors de question qu'ils ne percent pas le troisième niveau.

Le temps sembla passer à une vitesse folle tout en figeant que pour eux dans leur petite bulle parfaite, et au bout d'un moment, Prompto prit conscience qu'il n'arrivait plus à se concentrer.

Il était trop obnubilé par le rire clair et musical du prince, par ses mouvements, par son odeur. Par ses grandes mains masculines aux mouvements adroits, par ses avant-bras musclés exposés par ses manches roulées, par son épaule qui s'appuyait contre la sienne parce que les bornes étaient trop étroites.

Et, putain, Prompto était faible. Faible, faible, faible, incapable de respirer tant sa poitrine était gonflée d'un sentiment qu'il ne reconnaissait pas, tant qu'il était attiré de tout son corps et son âme vers chaque mouvement de son camarade, chaque mot, chaque rire…

Son personnage marcha stupidement dans une étendue de lave fluorescente.

L'écran afficha GAME OVER en lettres géantes et Prompto le regarda, pantois, comme s'il ne comprenait pas ce qui venait de se passer.

– Ah merde, fit Noctis.

Prompto expira un souffle qu'il n'avait pas pris conscience d'avoir retenu. Mais qu'est-ce qui lui arrivait, bon sang? Il avait l'impression de perdre la carte. Jamais un mec ne lui avait fait tant d'effet.

Un hétéro, de surcroit. Et un type plus inatteignable que les six dieux eux-mêmes. Quelles conneries.

Prompto tenta d'ignorer la petite voix au fond de son esprit qui lui soulignait que Ignis-le-trou-de-cul l'avait prédit depuis le début et se retourna en s'éloignant légèrement, tentant de masquer son malaise.

Ça ne changeait rien, en fait, pensa-t-il. Oui Noctis était un mec attirant et il fallait être aveugle pour ne pas l'avouer, mais c'était aussi l'opinion d'absolument toute la population d'Insomnia. Alors si Prompto le trouvait superbement sexy, qu'est-ce que ça changeait? Il n'était qu'une personne de plus dans une masse infinie de gens.

Voilà tout, rien de plus.

Monsieur Dracula n'avait aucune inquiétude à avoir.

– Tu veux jouer à autre chose?, demanda-t-il d'une voix qu'il espéra être normale.

Son camarade répondit d'un "Oh oui putain!" exagérément enthousiaste qui fit sourire Prompto.

– Ce jeu était en train de me rendre fou, continua Noctis en jetant un coup d'œil circulaire sur les bornes autour d'eux. Hey, Mortal Kombat ça te dit?

La distraction fut la bienvenue et Prompto acquiesça, se dirigeant vers la machine affublée d'un gigantesque dragon.

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Ce fut un piège.

Prompto se croyait talentueux, mais même les entraînements intensifs de sa mère aux jeux de duels ne l'avaient pas préparé à ce qu'était le génie de Noctis Lucis Caelum.

Il se fit absolument massacrer. Son ego le força à étirer stupidement le supplice, ronde après ronde, sous le rire du prince qui jubilait à chaque victoire, jusqu'à ce qu'il doive déclarer forfait.

– Ok, j'abandonne, déclara Prompto après sa douzième défaite. T'es un dieu.

Noctis lança un cri de victoire en dressant le poing et le blond ne put s'empêcher d'échapper un petit sourire malgré sa fierté entachée. Le prince le frappa d'un coup amical à l'épaule, les yeux pétillants.

– Allez, je te laisse choisir le prochain jeu pour que tu puisses avoir ta revanche!

Prompto jeta un regard circulaire autour de lui, analysa avec sérieux leur environnement, puis s'arrêta sur une borne munie d'un panier de basketball au centre d'ampoules clignotantes.

– Celui-là, déclara-t-il d'une voix assurée.

– Parce que tu crois pouvoir me battre au basket?

Le sourire de Prompto s'étira.

– T'as peur?

– Je te parie ce que tu veux à bouffer que je défonce ton pointage.

– Prépare-toi à payer!

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Lorsqu'ils quittèrent la salle d'arcade vers minuit, marchant dans la nuit vers l'arrêt de leur autobus, Prompto tenait sous son bras une gigantesque boîte en styromousse remplie de hot-dogs et de frites.

– Dommage qu'ils ne vendaient pas de homard…, commenta Prompto à la blague.

– C'était la cantine la plus louche que j'ai jamais vu de toute ma vie, répliqua Noctis. Tu vas réellement manger ça?

– Ça fait partie de l'expérience de la salle d'arcade… Et puis tu es simplement jaloux parce que je sais mieux tirer au panier que toi.

Noctis ne répondit pas, très certainement parce qu'il ne pouvait pas le contredire : Prompto avait littéralement doublé son pointage. Celui-ci était satisfait d'avoir eu sa revanche, et, par la même occasion, d'avoir gagné un repas pour le lendemain. Même si des frites réchauffées étaient le summum du mauvais goût.

– Il va pleuvoir, je crois, commenta Noctis.

Le ciel sombre s'alourdissait au-dessus de leur tête, l'humidité gorgeant l'air autour d'eux.

– Ouais, ça va tomber en orage. Avec un peu de chance, on sera déjà rentrés.

Il n'y avait que quelques mètres de marche pour rejoindre leur arrêt et ils le parcoururent de pas légers sous la lumière orangée des lampadaires. Autour d'eux, la ville était grouillante d'énergie, comme elle l'était toujours peu importe l'heure. Les gens allaient et venaient sur les trottoirs, contournant des vendeurs de grillades qui enfumaient le ciel et des marchands de beignets frits qui criaient pour attirer des clients.

– Le quartier ne dort jamais, hein?, commenta Noctis.

– Non, c'est toujours comme ça. Et particulièrement les vendredis soir. Dans quelques heures, tous ces gens seront complètement bourrés.

Certains l'étaient déjà, à la vue de leur démarche chancelante. Il y avait des ivrognes heureux et d'autres plus grincheux, qui marmonnaient pour eux-mêmes en se balançant étrangement. Au pied d'un mur, un homme se préparait visiblement à passer sa nuit à l'extérieur : il avait déjà placé des boîtes de cartons dépliées sur le sol par-dessus lesquelles il avait déposé un sac de couchage. La scène était fréquente dans le quartier et les gens marchaient devant lui sans même le regarder, mais Prompto le remarqua car il était plus jeune que d'habitude. À peine quelques années de plus de lui-même.

Il se pinça les lèvres. Sur une impulsion, il se pencha lorsqu'ils arrivèrent à sa hauteur et lui tendit discrètement la boîte de styromousse sans dire un mot. Le mec l'attrapa aussitôt et le remercia d'un sourire, duquel Prompto répondit d'un hochement de tête avant de continuer sa marche sans s'arrêter.

Il connaissait trop bien le sentiment de crever de faim et de dormir dehors le ventre vide… mais surtout l'horreur d'être pris en pitié par des gens dont la vie était plus facile. Et il avait déjà bien mangé ce soir-là, gracieuseté de Gladio. Il n'avait pas réellement besoin d'un second repas.

Ils atteignirent finalement leur arrêt, où il y avait un petit abri qui avait connu de meilleurs jours. Lorsque Prompto se retourna vers Noctis, ce dernier le fixait d'un drôle de regard.

– Quoi?, demanda Prompto.

Noctis garda le silence pendant quelques secondes, puis il baissa les yeux.

– Non, rien…

Prompto fronça les sourcils, mais l'autobus apparut au même moment et interrompit leur conversation silencieuse.

– Voilà notre bus, annonça-t-il en jetant un coup d'œil à son téléphone. Exactement à l'heure, c'est un putain de miracle.

Noctis échappa un rire léger, et Prompto conclut que le malaise, s'il y en avait un, était déjà passé.

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Le ciel se déchaîna au moment même où les deux hommes quittaient l'autobus et ils furent forcés de courir sous la pluie battante jusqu'à la maison.

Enfin, Prompto courut. Noctis se contenta de disparaître et d'apparaître quelques mètres plus loin dans un éclair bleuté qui manqua de tuer Prompto alors qu'il s'emmêlait dans ses propres pieds sous la surprise et passa près de tomber en pleine gueule.

– Ça va pas la tête?!, hurla ce dernier après s'être redressé de justesse.

Le prince éclata de rire en voyant l'expression de son camarade.

– Allez, t'es lent putain! répliqua-t-il en riant.

Il se retourna et disparut à nouveau, apparaissant plus loin sous une lueur bleue qui se réfléchit sur le sol recouvert d'eau.

Putain, la magie des Lucii, comprit Prompto. Il resta bouche bée quelques secondes, admirant les étincelles magiques qui disparaissaient graduellement sous la pluie diluvienne, n'y croyant pas ses yeux.

– PROM! Qu'est-ce que tu fous!, cria Noctis, loin devant lui.

Prompto se secoua la tête pour reprendre ses esprits, puis courut à nouveau derrière le prince qui s'éloignait de plus en plus.

Lorsqu'il arriva enfin à la maison, ce dernier l'attendait en haut de l'escalier, sautillant sur place pour se réchauffer.

– Putain, s'exclama le blond avec enthousiasme, c'était complètement fou!

Noctis lui fit un sourire timide alors que Prompto – après avoir vérifié d'un bref coup d'œil que le camion était bien absent – enfilait sa clé dans la serrure. La porte résista, comme elle le faisait souvent lorsque le temps était très humide, et il dut l'enfoncer d'un coup d'épaule.

– Bordel, quelle merde… Voilà.

Il entra et retira ses chaussures et ses chaussettes gorgées d'eau, puis activa l'interrupteur. Une lumière jaunâtre inonda la cuisine et une bonne partie du salon.

– Je vais chercher des serviettes, déclara-t-il.

– Ok, merci.

Il se rendit à la salle de bain à l'étage, où il prit deux serviettes propres, prenant soin de choisir celles qui étaient le moins usées. Puis, il revint à l'escalier, au bas duquel l'attendait Noctis.

Oh.

Le tour de magie du prince ne l'avait pas épargné de la colère des cieux, et celui-ci était trempé de la tête aux pieds, ressemblant en tout point à une sublime œuvre d'art. Des mèches de cheveux noirs étaient collées à son front et des gouttes d'eau glissaient le long de sa mâchoire définie, roulant jusque sur sa gorge sur laquelle sa pomme d'Adam était prédominante. Sa chemise était devenue légèrement transparente, exposant ses pectoraux musclés, et, ok…

Il s'agissait là d'un brutal rappel que Prompto était définitivement et complètement gay.

Bordel.

La promesse qu'il s'était fait plus tôt dans la semaine lui revient à l'esprit, celle où il avait décidé qu'il était temps de sortir du placard, et il se trouva stupide d'avoir oublié un truc aussi important. Il s'était senti si bien toute la soirée, si à l'aise et confortable – excepté peut-être un court laps de temps où il avait trouvé Noctis beaucoup trop sexy pour sa santé mentale – qu'il n'avait plus pensé à rien d'autre que de profiter du moment.

Son temps était compté, pensa-t-il. Il devait absolument trouver une façon de le glisser quelque part dans une conversation avant le départ de son camarade.

Il descendit l'escalier, frottant la serviette sur ses cheveux tout en tendant la seconde à Noctis, qui l'attrapa en le remerciant.

– Tu veux un verre d'eau?, demanda Prompto en se dirigeant vers la cuisine.

– Non merci, je crois que j'ai vu assez d'eau pour le restant de ma vie!

– Ouais, pour un type qui se téléporte magiquement, t'es plutôt trempé…

– Si tu avais couru plus vite, aussi, je n'aurais pas eu à t'attendre à la porte!

Prompto rit. Il abandonna la serviette sur ses épaules pour se préparer un verre d'eau, qu'il but d'une traite, debout devant l'évier.

– À ce sujet…, continua Noctis. Iggy ne doit pas savoir que j'ai utilisé ma magie… Il me tuerait.

Le blond le regarda d'un air surpris.

– Pourquoi?

– Parce qu'elle attire légèrement l'attention, disons. Et je n'avais pas de garde du corps avec moi, donc…

Noctis pencha la tête, comme honteux.

– Il n'y avait absolument personne sous cette flotte, répliqua Prompto. Et puis, tu sais te battre non? Tu disais que tu t'entraînais au combat quatre fois par semaine!

Noctis lui fit un sourire, mais il ne se rendit pas à ses yeux.

– Ouais, mais Iggy me dit toujours qu'il ne suffit que d'un seul espion nif pour… enfin, tu comprends.

Prompto sentit son sang se retourner dans ses veines – son sang niflhe de surcroit – et il dut faire un effort phénoménal pour ne pas grimacer. Cette discussion allait dans une direction qu'il ne voulait absolument pas entendre, peut-être bien pour des raisons égoïstes.

Car après avoir vu la réaction de Ignis face à son orientation, il n'osait imaginer pas ce que ce serait si le conseiller découvrait ses origines.

Il déposa le verre dans l'évier en se raclant la gorge.

– Je vais me changer, déclara-t-il pour détourner la conversation. Tu veux que je te prête des vêtements secs?

– Ouais, merci.

Il grimpa l'étroit escalier, son camarade sur les talons, pensant malgré lui au conseiller du prince. Il n'appréciait pas être rappelé du souvenir de la conversation pénible qu'il avait eue avec celui-ci, mais le sujet arrivait au bon moment.

Il avait eu l'intention d'en discuter avec le prince, après tout.

– Parlant de ton fabuleux conseiller…, mentionna-t-il d'un ton qui se voulait anodin, alors qu'il allumait la lumière de sa chambre. Tu savais qu'il était venu me rendre visite à l'école durant ton absence?

– Quoi?! Pourquoi?!

Un bref coup d'œil à l'expression éberluée de Noctis lui fit comprendre que ce dernier n'était effectivement pas au courant et il en fut soulagé. Il n'aurait pas apprécié que le prince ait entendu toutes les saletés qu'il avait lui-même entendues ce jour-là.

Il se rendit à sa commode et ouvrit un tiroir pour y chercher un t-shirt.

– Il voulait avoir une discussion en privé avec moi.

– Ah putainnnnn…, râla Noctis. Il fait chier par moments!

Le prince glissa une main frustrée dans ses cheveux humides.

– J'espère qu'il t'as pas fait son discours de merde sur le protocole!, continua-t-il. Je lui en ai parlé au moins cent fois! Il est vraiment pénible avec ça!

Prompto eut un sourire en coin en constatant qu'au moins, le prince et lui pensaient la même chose. Il pigea un t-shirt de son tiroir qu'il tendit à son invité, puis en ouvrit un second pour y chercher un pantalon.

– Non, pas exactement, répondit-il tout en fouillant dans la commode. En fait, il était surtout inquiet à propos du fait que je suis…

Il n'eut pas l'occasion de terminer sa phrase. Noctis retira soudainement sa chemise en la glissant au-dessus de sa tête et Prompto se retrouva nez à nez avec la plaquette d'ados la plus irréelle qu'il n'avait jamais vue de toute sa vie. Sous la surprise, il tira trop fort sur le tiroir qui se décrocha de son socle et, dans sa précipitation à vouloir rattraper la chose, il poussa la commode qui se balança en faisant tomber tout le bordel qui trônait sur le dessus.

– Ohputainmerde!

Il s'accroupit pour rattraper ce qu'il pouvait, mais sa coordination devint complètement déficiente et Noctis se pencha pour l'aider. Tout à coup, il y eut des abdos partout dans son champ de vision, des muscles définis et luisants tout droit tirés d'un magazine, si proche de son visage qu'il était près d'enfoncer le nez contre eux, et putain bordel fuck Prompto allait crever d'une crise cardiaque.

– Ça va?, demanda Noctis d'un ton inquiet.

Non ça n'allait pas du tout, sa tête allait exploser tant son visage était brûlant et merde merde merde.

– Oui oui, no prob, aucun problème, mentit-il en tentant de se redresser le plus rapidement possible tout en sauvant le pauvre contenu de son tiroir qui se répandait à ses pieds.

– Attends, je t'aide, fit Noctis en empoignant un côté du tiroir.

À deux, ils le replacèrent dans la commode et Prompto ramassa rapidement les vêtements qui traînaient au sol pour les enfoncer pêle-mêle dans le tiroir, tout en poussant du pied les milliers d'objets qui étaient tombés du meuble sous son lit.

Il attrapa un short de basket et l'enfonça dans les bras de Noctis.

– Voilà, pour toi, je vais, heu, me changer à la salle de bain.

– Ok?

Il fit quelques pas vers la porte, se rappela qu'il n'avait pas pris de vêtements, revint à sa commode duquel il tira deux morceaux de tissus au hasard, puis s'enfuit à nouveau, le visage si rouge qu'il le sentait prêt à décoller vers la stratosphère.

Et le tout devant un Noctis qui le dévisageait d'un air perplexe.

Génial.

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Si vous connaissez mon écriture, le "fluff" n'est pas réellement ma force... Je suis plutôt une drama queen habituellement lol, mais pour cette histoire je voulais me mettre au défi... D'où pourquoi j'ai autant eu du mal avec ce(ces) chapitre(s).

Mais évidemment, je prévois revenir à mes premiers amours pour les tempêtes très bientôt lol

Si vous êtes toujours ici, en train de lire, vous avez mon éternelle admiration et mon amour inconditionnel. Merci merci merci mille fois. Écrivez-moi un petit quelque chose dans les reviews, ça me fait tant plaisir de vous lire!

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