Publié le 18 mars 2017.
Hum... Oui, ça fait longtemps.
Pour un très rapide résumé de ce qu'il se passait avant : Kairi réussit peu à peu à se souvenir de Sora, qu'elle espère pouvoir retrouver et sauver, refusant de demeurer coincée sur son île. Elle rencontre la mère de Sora, mais peu à peu commence à retomber dans son amnésie. Elle panique et décide, sur conseil de Selphie, d'aller consulter Yeul, une mystérieuse magicienne vivant à l'écart de la ville. Celle-ci lui propose d'échanger son esprit avec celui d'une fille liée à elle qui veille sur Sora (Naminé) pour qu'elle puisse retrouver son ami, mais Kairi se réveille dans la citadelle de l'Organisation, et non pas au manoir de la cité du crépuscule. Tout ne s'est donc pas passé comme prévu...
Chapitre 9 : Éveils en des lieux inconnus
Il n'avait pas fallu longtemps pour expliquer la situation à Naminé. C'était une fille très compréhensive, et elle avait immédiatement compris ce qu'il se passait dès les premiers mots. Dire qu'elle l'avait mal pris serait un euphémisme. Bien qu'elle ne soit pas très expressive, son visage reflétait l'horreur que la situation lui inspirait et Yeul crut voir des larmes perler au coin de ses yeux. Caius s'était approché avec vigilance. Aucun d'eux ne s'attendait à voir la jeune Simili se montrer sous son meilleur jour.
Quant à Naminé, elle tentait de contrôler ses émotions, idée qu'elle aurait trouvée ironique, n'étant pas supposée avoir de cœur, si elle n'avait pas été aussi bouleversée.
Kairi... Kairi avait...
Elle s'exhorta au calme, fermant les yeux. Au fond, elle comprenait les motivations de son Humaine.
Mais comment pourrait-elle réparer la mémoire de Sora si elle n'était plus avec lui ? Elle devait y retourner, immédiatement.
« S'il te plaît, fais moi revenir », supplia-t-elle.
Yeul s'était bien entendu préparée à cette demande.
« Je ne peux pas. Kairi a besoin de temps. »
Naminé tressaillit.
« Non... murmura-t-elle. Je ne peux pas... Cela ne se doit pas... »
Le visage de DiZ quand il allait apprendre qu'elle avait disparu surgit devant ses yeux. Oh non. DiZ allait être furieux.
La jeune fille se leva sous le regard paisible de la magicienne, rejeta les longues mèches de Kairi derrière son oreille et tendit le bras, se concentrant autant qu'il lui était possible dans la situation de stress où elle se retrouvait plongée. Rien ne se passa. Elle tenta à nouveau, en vain. Déçue, elle laissa retomber le bras. Elle n'avait jamais été douée pour ça. Ce n'était pas quelque chose que l'Organisation et DiZ avaient jugé utile de lui apprendre.
« Tu essaies d'utiliser un Couloir Obscur ? » demanda Yeul.
Naminé la regarda en se mordant la lèvre.
« Oui.
-Mmh... Je ne pense pas que tu y parviendras de sitôt. »
Estomaquée, Naminé lui lança un regard nerveux.
« Pourquoi donc ?
-Vois-tu, il n'y a pas de multiples façons d'utiliser les Couloirs Obscurs, expliqua Yeul d'un air paisible. Il faut utiliser les Ténèbres de son cœur, ce que tu n'es pas en mesure de faire, ou être un Simili, un être entre les Ténèbres et la Lumière.
-Je suis...
-Ton vrai corps est celui d'une Simili, en effet. Malheureusement, ton âme, ton esprit, appelle cela comme tu le souhaites, a été transféré dans le corps d'une personne ordinaire, ton Humaine de plus... Tu résides donc dans le corps d'un habitant de la Lumière, ce qui te soustrait à tes caractéristiques de Simili. »
Fatiguée, Naminé se rassit sur sa chaise avec un soupir.
« ... Je suis coincée ici, n'est-ce pas ? »
Elle baissa le regard vers ses mains, serrées sur sa jupe. Elle nota distraitement que Kairi avait la peau légèrement plus foncée que la sienne, preuve de ses journées passées dehors sous le soleil des îles, tandis qu'elle-même demeurait à l'ombre, entre quatre murs. Elle n'avait visiblement aucun moyen de partir. Peut-être valait-il mieux coopérer avec Yeul et régler la situation ainsi. Si Kairi se trouvait là-bas, alors sans doute rencontrerait-elle Riku, qui pourrait aider à remettre la situation en ordre.
« Que comptes-tu faire alors ? demanda-t-elle sans la regarder.
-Laisser à Kairi le temps d'accomplir sa quête. »
Naminé releva la tête.
« Elle ne pourra rien pour Sora. Moi seule peux le sauver. Parce que je suis celle qui l'a fait sombrer. »
Yeul inclina le visage.
« Oui. J'en suis consciente. Mais Kairi a un parcours à accomplir. Et je sais qu'elle y parviendra.
-Donc, tu suggères d'attendre que les choses se passent ? » demanda encore Naminé, désespérée, en tordant le bas de son uniforme par nervosité.
Le rire de la jeune magicienne, pourtant empli de bonté sincère, sonna étrangement désespérant à ses oreilles.
« C'est exact. Ne sois donc pas si inquiète. Les choses se passeront bien mieux que tu ne le crains et... »
Elle se tut brusquement et se raidit. Les deux autres lui jetèrent un regard intrigué.
« … Yeul ? »
Celle-ci détourna le regard. Son visage s'était assombri.
« Quelque chose... quelque chose ne va pas, souffla-t-elle d'une voix grave.
-Quoi donc ? » l'interrogea sèchement Caius en jetant un regard méfiant à Naminé, qui s'en serait offusquée si elle n'en avait pas eu l'habitude.
Après ses mésaventures avec l'Organisation et DiZ, elle se disait parfois qu'elle pouvait supporter n'importe quelle marque de mépris.
Après un instant de silence pesant, durant lequel Naminé dévisageait la fille aux cheveux bleus sans masquer son inquiétude, cette dernière prit la parole, les yeux baissés, les sourcils légèrement froncés.
« Je crois... Je ressens des ondes étrangères. Quelque chose ne s'est pas passé comme il était prévu. Quelqu'un a interféré. »
Anxieuse, Kairi jetait des regards nerveux autour d'elle tout en sentant son cœur s'emballer. Selon Yeul, c'était dans ce lieu étrange que Sora était gardé en sécurité. Mais l'atmosphère qui y régnait était tout sauf chaleureuse. Elle tenta de faire taire ses doutes quant à la sincérité de la magicienne aux cheveux bleus, et de faire le point sur sa situation.
D'après ce qu'elle en voyait, elle avait échoué dans le corps d'une jeune fille, un corps semblable au sien, ce qui la rassura. Elle ne serait au moins pas dépaysée dans ce domaine. Elle portait un curieux manteau noir qui recouvrait tout son corps, fabriqué d'une matière qu'elle ne parvint pas à identifier. Elle sentait contre son dos le poids léger d'une capuche, et sur ses jambes le tissu d'un pantalon. Venaient compléter l'ensemble une paire de bottes étroites à talon et les gants qui recouvraient ses mains. Étrange tenue... mais elle avait d'autres sujets de préoccupation pour l'instant. Kairi leva une main et palpa son visage, ses cheveux. Elle n'avait malheureusement pas de miroir à portée de main mais rien d'étrange ne la dérangea. L'inconnue possédait de courts cheveux noirs, qui ne viendraient pas la déranger en se rabattant sans cesse sur ses yeux.
Elle abaissa le regard sur ses genoux. Malgré la pensée qu'il ne s'agissait pas de son propre corps mais celui d'une inconnue, que celui-ci lui était inconnu et pouvait lui réserver de mauvaises surprises, elle ne remarquait à première vue rien d'insolite dans son apparence. Si elle avait ignoré avoir été placée dans un autre corps, elle ne l'aurait sans doute pas remarqué au premier abord. Mais le fait était qu'elle en était parfaitement consciente et que, bien qu'elle tenta de la maîtriser, une peur inconnue s'insinuait en elle, menaçant de la faire céder à la panique. Son environnement ne l'aidait en rien.
Kairi ferma les yeux et posa une main gantée sur son cœur. Il fallait qu'elle se calme. Son cœur battait trop vite. Voyons... Il n'y avait rien à craindre, n'est-ce pas ? Yeul lui avait dit qu'elle était en sécurité. Tout ce qui lui restait à faire était de retrouver Sora. Peut-être même que Riku était dans les environs ? Ragaillardie par cette pensée, elle sentit son cœur se calmer légèrement et rouvrit les yeux.
« Allons-y doucement. Nul besoin de se presser », se murmura-t-elle.
Parler à haute voix lui permettait de concrétiser ses pensées, et de ne pas se disperser. Elle avait maintes fois pu constater l'efficacité de cette technique.
« D'abord, se relever. »
Un peu plus confiante, elle posa une main sur le sol et tenta de se remettre sur pieds. En vain. Ses membres étaient raides, sans doute n'était-elle pas encore en harmonie avec ce nouveau corps. Elle grimaça. Quelques zones de son corps la lançaient douloureusement et... était-ce un bleu qu'elle sentait contre sa cuisse ? Impossible de s'en assurer avec cette tenue, mais elle put en revanche remonter sa manche pour examiner un point de son bras qui la brûlait. Une plaie à peine cicatrisée bien que bénigne zébrait sa peau. Elle grimaça. A en croire les multiples signaux que son nouveau corps lui envoyait maintenant qu'elle recouvrait ses sens, son corps était parsemé de bleus et multiples coupures.
« Un endroit sûr, hein... »
Kairi se retint de jeter des regards inquiets autour d'elle. Ce n'était pas le moment de paniquer, elle était encore au sol. Elle tenta à nouveau de se relever, poussa sur ses jambes flageolantes, posa un talon sur le sol et prit appui sur lui pour se redresser. Lentement, doucement... Parfait. La jeune fille clopina jusqu'au mur le plus proche et s'appuya contre lui, tremblante. Une bonne chose de faite, se dit-elle pour s'encourager.
« Maintenant, euh... »
Elle parcourut le couloir du regard. Deux directions s'offraient à présent à elle. Laquelle choisir ? Laquelle la mènerait à Sora ? Laquelle serait la plus sage à emprunter ? Devait-elle suivre le chemin vers lequel était orienté le corps quand elle avait repris connaissance, c'est-à-dire celui que suivait l'inconnue ? Cela semblait le plus logique. Mais peut-être que la jeune fille s'en revenait d'une visite de chez Sora, auquel cas il serait préférable de rebrousser chemin...
Après un instant d'indécision, Kairi décida de poursuivre la route malheureusement interrompue de sa... victime, une main sagement posée sur le mur en cas de faiblesse impromptue.
Mais si elle avait craint de s'écrouler au bout de quelques pas, il n'en fut rien. Ses pas, d'abord lents et hésitants, gagnèrent peu à peu en assurance, son corps reprenant force et son esprit s'adaptant à ce nouveau réceptacle, qui ne paraissait pas si étranger à son véritable corps. Bientôt, elle cessa de surveiller ses pieds et regarda autour d'elle, tentant de percer les ténèbres du couloir, surveillant chaque zone d'ombre et guettant le moindre bruit. Ses bottes ne faisaient presque aucun son, ce qui était rassurant. Elle n'entendait rien ; le mystérieux bâtiment était plongé dans un silence glacial, endormi, mais oppressant. La jeune fille avait la désagréable impression d'être surveillée de tous côtés, et ne pouvait s'empêcher de jeter des regards anxieux dès qu'elle croyait apercevoir un lambeau d'ombre bouger du coin de l'œil. Où était donc passée sa bravoure ?
Une image surgit dans sa tête : celle d'une créature noire comme la nuit, aux yeux jaunes fixés sur elle, agitant des doigts menaçant dans sa direction. L'une des créatures qui l'avaient déjà attaquée dans le passé, dans cet autre château.
« Ne pense pas à ça », murmura-t-elle entre ses dents.
Elle continua à avancer, l'oreille aux aguets. Aucune porte, aucun couloir transversal ne se présenta à elle. Au moins, elle n'avait plus à choisir une direction.
Kairi laissa néanmoins échapper un hurlement quand une sorte de silhouette blanche et filiforme surgit du sol juste devant ses pieds. L'étrange créature ne lui accorda pas le moindre regard et disparut si vite qu'elle ne put l'identifier clairement, mais elle en demeura pétrifiée pendant une bonne minute. Elle s'efforça de reprendre ses esprits : la créature ne l'avait pas attaquée, elle ne pouvait donc pas être très dangereuse. Du moins la laisserait-elle tranquille. Son cœur battant à tout rompre, elle reprit courageusement sa route.
A son grand soulagement, elle ne fit aucune autre mauvaise rencontre. Le couloir déboucha sur une passerelle qui montait vers un niveau supérieur. Elle s'approcha prudemment de la rambarde. Sous ses pieds, elle n'apercevait que le vide.
Kairi n'hésita pas et grimpa les marches une à une, atteignant bien vite le palier supérieur, qui ouvrait sur un nouveau couloir identique au précédent et tout aussi silencieux, se poursuivant sans fin sur sa gauche et sa droite.
« Mais où ai-je atterri ? » murmura-t-elle encore.
Était-ce au moins un château ? Elle espérait ne pas s'être égarée dans une sorte de labyrinthe. Il n'y avait pas le moindre bruit, comme si était seule en ces lieux. Elle nota alors la présence d'une porte entrouverte sur sa droite, dans le mur opposé du couloir. Aucune lumière ne s'en échappait, mais voilà qui rompait la monotonie du décor. Elle s'en approcha sur la pointe des pieds, espérant que la salle était vide. Un rapide coup d'œil à l'intérieur lui confirma avec soulagement que c'était bien le cas.
Elle avait sous les yeux une petite pièce vide plongée dans la pénombre. Cette pièce comportait de nombreux avantages : tout d'abord, elle était vide, ensuite, elle comportait un lit - enfin un endroit où se reposer ! - et, plus important, elle possédait une énorme fenêtre.
Kairi prit le temps de refermer la porte derrière elle avant de se précipiter vers la large ouverture fermée de verre et de jeter un coup d'œil au dehors.
La vue était magnifique ...et terrifiante. Loin sous ses pieds s'étendait, sous un lourd ciel d'encre, une cité comme elle n'en avait jamais vue, qu'elle pouvait contempler aussi loin que portait la vue. Elle plissa les yeux, laissant son regard vagabonder sur la mer de buildings de béton et de métal froid plongés dans un silence pesant. De sa position, elle n'apercevait pas le moindre signe de vie dans les rues sinueuses qui se propageaient à ses pieds telle une toile d'araignée. Quelle était donc cette étrange cité ? Si Yeul ne lui avait pas dit qu'elle était en sécurité, elle en aurait eu froid dans le dos.
La jeune fille leva les yeux, le regard irrésistiblement attiré par cette énorme lune jaune en forme de cœur qui flottait dans le ciel, bien trop proche, maintenant qu'elle s'en rendait compte, pour que ce soit naturel. La lune, ou l'entité quelconque qui en avait la forme, lui renvoya son regard, scintillant doucement dans l'obscurité, comme veillant sur les lieux silencieux. Elle se sentait curieusement en paix juste en l'observant.
Kairi abaissa le regard et ses yeux s'agrandirent d'anxiété en constatant que l'étrange citadelle où elle avait échoué trônait au-dessus d'un gouffre profond, d'où s'échappait une étrange lumière bleue. Voilà qui n'était pas pour la rassurer, mais elle décida de faire confiance aux architectes : après tout, si des personnes vivaient ici, il n'y avait rien à craindre, non ? Elle reporta le regard sur la ville, plongée dans ses pensées. Elle avait donc atterri au sein d'une cité étrange, dans ce qui en semblait le palais... Peut-être le palais royal ? Elle n'en savait rien, mais se savoir protégée par les murs épais de la forteresse ne lui déplaisait pas, si elle oubliait le gouffre béant sous ses pieds.
Elle se sentait trop fatiguée pour partir en exploration sur-le-champ et jugea préférable d'attendre le jour. La jeune fille grimaça : son bon sens lui dictait de prendre un peu de repos, mais parviendrait-elle seulement à dormir dans ce lieu inconnu et inhospitalier, avec ce corps qui n'était pas le sien ?
Elle se détourna de la fenêtre et jaugea la petite chambre du regard. On pouvait difficilement faire plus sobre : les murs nus possédaient la même architecture que les couloirs extérieurs, donnant un aspect froid et inconfortable à la pièce. Un lit simple était poussé contre le mur sur sa droite, recouvert d'une couverture froissée, signe que la chambre était habituellement occupée. Avec un peu de chance, elle avait trouvé sa chambre, ou du moins celle de l'inconnue dont elle empruntait le corps. Sur sa gauche, une penderie entrouverte laissait voir un autre exemplaire du manteau qui la recouvrait, près d'un lavabo et d'une minuscule table nue. Rien de bien extraordinaire. En fin de compte, l'endroit lui faisait plus penser à une cellule de prison.
Un éclat de couleur qui tranchait avec la monotonie des tons gris et blancs du décor attira son attention. Elle s'approcha pour constater que de petits objets aux couleurs vives s'alignaient sur le rebord du lavabo. Intriguée, Kairi en prit un entre ses doigts. C'était un simple coquillage, en tous points semblable à ceux que la marée déposait sur le sable de la plage, sur les îles. Elle le reposa et examina la petite collection qui s'étalait sous ses yeux.
« ... »
Elle aussi prenait parfois l'habitude de ramasser les coquillages échoués sur la plage. Un sentiment de familiarité chaleureuse lui tira un léger sourire. Peut-être n'était-elle pas si différente de cette fille après tout... Prise d'une intuition subite, elle palpa son manteau étrange, à la recherche de poches qu'elle ne tarda pas à trouver. Celles-ci étaient vides, sans rien qui puisse la renseigner sur l'identité de celle dont elle empruntait le corps, à part la dernière, au fond de laquelle gisaient deux autres petits coquillages. Elle sourit plus franchement : il semblait qu'elle avait par chance trouvé la chambre de son hôte infortunée.
« Bien... murmura-t-elle. Et maintenant ? »
Son regard dévia vers le lit. Il semblait sage de prendre un peu de repos, n'est-ce pas ? Elle pourrait se mettre au travail le lendemain. Elle avait tant à faire... Trouver un miroir pour commencer, cela ne lui ferait pas de mal de voir son visage. Trouver des renseignements sur celle dont elle avait emprunté le corps – elle se promit de se confondre en excuses quand elle la rencontrerait –, à commencer par son nom. Et des renseignements sur ce lieu où elle avait atterri. Et chercher Sora, bien sûr. Chercher Sora.
Avant que l'amnésie ne la rattrape.
« Bien, dit Kairi, à haute voix pour se distraire de cette pensée, commençons par explorer un peu. Cette chambre. »
Rassérénée à présent qu'elle était en sécurité, ou du moins qu'elle se sentait en sécurité, elle décida de commencer par la penderie.
Quelques minutes à peine lui furent nécessaires pour passer la chambre au peigne fin, et elle vint s'asseoir sur le lit, déçue. Quelques vêtements de rechange, tous noirs, tous semblables, la collection de coquillages, une bourse contenant une poignée de munnies, deux étranges fioles contenant un liquide vert sur lesquelles une étiquette portait le nom « Potion », un crayon et quelques feuilles de papier vierges, c'était tout ce qu'elle avait pu dénicher. Rien de tout cela ne lui serait très utile. Tant pis...
Sa main se porta sur la fermeture de son manteau, et elle prit la décision de le retirer. Ce serait mieux pour dormir, n'est-ce pas ? Elle le posa à côté d'elle et jeta un coup d'œil à son apparence, constatant qu'elle ne portait qu'une brassière et un pantalon léger, avec les gants et les bottes complétant son uniforme. Mais ce ne fut pas l'étrangeté de sa tenue qui la frappa, après tout, elle ne connaissait pas les usages de ce monde, mais les multiples bleus et entailles qui constellaient son corps. Elle avait pu les ressentir désagréablement jusqu'à présent, mais elle réprima avec difficulté une grimace ; au moins, ce n'étaient que des blessures mineures, en partie déjà cicatrisées. En revanche, l'état de ce corps engendra un flot de pensées peu positives dans son esprit : la fille s'était-elle battue ? Contre quoi, les Sans-cœur ? Yeul avait dit qu'elle protégeait Sora, non ? Que des nouveaux ennemis étaient apparus ? Était-ce son travail, se battre pour le protéger ? Ou, pire, et elle évita d'y songer, la fille était-elle maltraitée ?
Kairi se releva et tourna le robinet, tentant de passer de l'eau sur ses plaies mais elle ne parvint qu'à former des flaques sur le sol. Fatiguée, elle renonça.
Elle s'étendit sur les couvertures et fixa le plafond gris comme le reste du décor, songeuse. Son stress était toujours présent, mais au moins, elle avait la sensation d'avoir la situation en main... pour le moment. Le lendemain, elle partirait en exploration. Et elle retrouverait Sora.
Sa tête lui faisait terriblement mal. Il lui fallut quelques secondes pour se rendre compte qu'elle gisait sur le sol. Comment... ? Les souvenirs lui revinrent peu à peu. La dernière chose dont elle se souvenait était une atroce sensation de vertige et ses jambes qui se dérobaient sous elle. Que s'était-il passé ?
Xion entrouvrit les yeux, mais l'obscurité qui régnait autour d'elle ne lui permettait pas de discerner quoi que ce soit. Le sol était froid contre sa joue, ses bras et ses jambes et une sensation de nausée la saisit quand elle prit appui sur son coude pour tenter de se redresser.
Désorientée, la jeune fille ne prit conscience des anomalies qu'au bout d'une dizaine de secondes. Était-ce un pied de table devant elle ? Elle était pourtant sûre d'être dans le couloir menant à sa chambre. Et... ses jambes, ses bras ? Pourquoi ne ressentait-elle plus la sensation confortable du tissu de l'uniforme de l'Organisation, mais plutôt la fraîcheur de l'air et la froideur du sol ?
Xion parvint à se redresser en position assise, clignant des yeux, cherchant désespérément à trouver un sens à ce qu'elle voyait.
Elle n'était plus dans le couloir de la citadelle. Elle se trouvait dans une salle plongée dans la pénombre dont elle ne reconnaissait rien : une petite pièce dont une grande table, près de laquelle elle gisait, occupait le centre. Les ombres de quelques meubles se découpaient contre les murs, et, en levant les yeux, elle comprit immédiatement qu'elle n'était plus à la l'Illusiocitadelle. Par une fenêtre entrouverte, elle apercevait les étoiles qui scintillaient dans un ciel paisible.
Où était-elle ? Que lui était-il arrivé ?
