[Avertissement : sous-entendus plus ou moins explicites au sujet de la guerre]
Chapitre 4 - La force des ancêtres
- Comment sommes-nous arrivées là ? Demanda Link en regardant la salle qui s'élevait bien au dessus de sa tête.
Et celle de tout autre Hylien, tout compte fait.
Le bâtiment était mine de rien très bien entretenu. Bien mieux que la tourelle, qui s'écroulait à chaque pas des enfants - vraiment, comment diable Demise était-il parvenu à ne serait-ce que faire deux pas sans tomber à travers le plancher ?! - et encore mieux que le bunker, qui se trouvait déjà dans un état assez bon. Les toiles d'araignée n'avait pas imprégné le lieu de leur voile blanchâtre, aucune bête ne semblait être décédée dans les parages. A la place, le fort du village le plus au Sud de la contrée de Juju possédait de grandes et imposantes peintures, toutes en couleur riches et chaudes, que ce soit le jaune, le rouge ou l'orange glorieux, le tout pour former différents schémas qu'elle reconnaissait plus ou moins. Des soleils, des nuages, de la chaleur en général.
Tout semblait être conçu à l'intention de Din. Link trouva cela amusant. Juju était la nation de Farore, comme l'indiquait le jaune dans les yeux des véritables habitants de ce pays. C'était les Bongos qui étaient censés vénérer la déesse de la Force. Mais le village du Sud était tout proche de la frontière qu'ils avaient en commun, ce n'était donc pas surprenant de trouver une telle sculpture dans les parages.
Par contre, elle se retrouva à se demander à nouveau ce qu'elle faisait là. Son regard se porta à nouveau sur Taketi.
La femme était immense, et toute en rouge. Tout, vraiment tout sur elle était rouge, à la seule exception de sa tunique blanche et noire typique de Juju. Les plumes sur ses bras bronzés étaient rouges, sa queue était rouge, les plumes et duvet à ses cheveux étaient rouges. Sa taille en elle-même était impressionnante. Même dans un lieu aussi imposant, elle était obligée de se baisser légèrement. Ses yeux sanguinolents semblaient pétiller de rire, dans un brasier crachotant et chaleureux.
- Ton oiseau s'est enfui, s'amusa la femme-oiseau en s'avançant d'un pas leste et léger, rappelant inconsciemment sa condition de volatile. Tu l'as suivi quand personne d'autre que moi ne te surveillait.
Maintenant qu'elle le disait, il était vrai qu'elle avait couru après Petra, l'oiseau flamboyant né de son œuf gargantuesque. Il était grand, immense, surtout pour son âge. Hinné avait mis un moment avant de se rappeler de quelle espèce il s'agissait. Un célestrier, de ce qu'elle avait dit. Hyrule, il fut un temps - celui de son existence - s'était spécialisé dans leur élevage. La chasseresse n'en avait jamais eu. Elle lui avait expliqué que la cérémonie avait généralement lieu aux quatorze ans de l'Hylien, hors Hinné avait été forcée de quitter le pays à cet âge.
Petra était son célestrier, avait affirmé la jeune femme. Il était rare de trouver son célestrier à cet âge, mais pas impossible. Ce qui était bien plus surprenant avait été de découvrir qu'il existait encore des représentants de cette race, que l'on pensait alors éteinte avec le reste du son royaume.
Peut-être était-il tombé du ciel, avait ri Hinné. Cela expliquerait le trou dans la tourelle.
- Petra est là, grogna l'enfant. J'en suis sûre. Demise lui a fait peur, c'est tout.
Taketi explosa d'un rire cinglant, semblable aux cris joyeux des oiseaux. Ses plumes gonflèrent tout autour d'elle comme le feraient celles de Marion dans une crise similaire, mais son attention fut momentanément détournée alors qu'elle se relevait assez vite pour rencontrer le plafond dans un bruit sourd.
- Aïe !
Link gloussa. Un petit cri répondit à l'agitation, elle se retourna immédiatement vers une porte condamnée.
- Petra !
Le piaillement recommença presque immédiatement. La Takeih se reprit rapidement. Un sourire sournois étira ses lèvres, comme il semblait devoir l'être avec elle.
- Elle est vraiment là, la petite ! Mais dis-moi gamine, comment veux-tu la sortir de cette salle ?
- Quelle salle ?
La femme immense se rapprocha de la porte qui les intéressait. Même par rapport à elle, elle semblait trop grande.
- Presque tout ici a été condamné et ta petite copine est entrée par une fenêtre. En gros, faut trouver la clé du fort pour l'ouvrir.
L'enfant la fixa avec horreur, refusant d'imaginer sa Petra enfermée toute seule dans une salle fermée qu'elle ne pouvait pas atteindre. Elle ferma les yeux, essayant de se concentrer dessus.
- Il faut... sortir Petra de là.
- Les clés sont toujours là, fit remarquer la dame plumée. Mais je ne sais plus où.
- Les clés sont là ?!
Elle n'en croyait pas sa chance.
- Mais je ne sais plus où elles sont, répéta Taketi.
L'enfant ne s'en affligea pas. Il y avait une chance pour qu'elle sorte sa Petra ! S'approchant de la porte, elle se dépêcha de calmer son amie. Un piaillement dépité lui répondit, mais l'oiseau sembla s'installer plus confortablement pour l'attendre. Satisfaite, elle se tourna vers la Takeih.
- Le fort est dangereux, tu sais ?
L'enfant fronça les sourcils.
- Raison de plus pour sortir Petra d'ici.
Sur ce, elle se dirigea vers la première partie. Ses oreilles tremblèrent, elle fut surprise de trouver la jeune femme en train de la suivre.
- Hinné va avoir mes plumes si tu te blesses, se dédouana-t-elle avec un sourire.
Il semblait à la petite fille que tout le monde avait peur de la chasseresse. Demise tremblait à chaque dispute qu'elle lui infligeait - et elle semblait toujours lui trouver une raison, sans doute - sans nul doute en fait, parce qu'il y en avait toujours une. Vaati paraissait imperturbable, bien que ce soit surtout parce qu'il évitait ouvertement de la mettre en colère. Beaucoup d'adultes trouvaient ces scènes aussi amusantes que donneuses de leçons.
Taketi ne faisait pas exception.
Link haussa les épaules et se tourna vers la pièce qui l'intéressait. Surélevée par rapport à la pièce principale, son plafond était bien plus bas, assez pour même pousser un Hylien adulte à se baisser. Cela fit grogner Taketi. Les concepteurs n'avaient, semble-t-il, pas pensé aux races les plus imposantes. La fillette, elle, pouvait se déplacer sans avoir à se contorsionner. Elle plissa les yeux, cherchant au travers de la poussière comment avancer. Des blocs de pierre obstruaient le chemin qui était censé la mener à Petra. Et ils étaient gros.
- Ah, je me souviens où sont les clés !
Sursautant, l'enfant se tourna d'un coup sec vers Taketi. La femme-oiseau jouait avec ses mèches courtes. Ses serres aiguisées luisaient à la faible lueur lui les éclairait.
- Où ?!
La grande femme gloussa, gênée.
- Dans le sous-sol, qui est inondé.
La petite fille la fixa dans un silence glaçant.
-... Quoi ?
- J'avais oublié qu'on avait caché les clés là-bas, continua la Takeih dans un chant trop heureux par rapport aux paroles qu'elle prononçait. Et, tu sais, on avait un peu oublié leur existence quand on a construit les égouts... Du coup, tout est sous l'eau.
La petite fille resta muette d'horreur.
- Mais il est possible d'accéder à la salle par les pièces voisines ! Bon, ici, ça va être compliqué, mais ça doit être possible de l'autre côté !
Link se reprit aussi rapidement qu'il lui était possible de réagir, son regard allant directement à la porte qui l'intéressait tantôt. Elle réfléchit un court instant avant de se tourner vers son aînée. La Takeih était connue pour être encore plus forte que les races les plus puissantes, elle devait bien être capable de dégager ce bloc de pierre.
- Non, je ne peux pas rentrer ici, lui fit remarquer la Takeih. Va falloir faire le tour.
L'Hylienne perdit momentanément de sa confiance. Il était vrai que le plafond était trop bas pour permettre à la jeune femme de ne serait-ce qu'avancer. La seule raison pour laquelle elle, elle s'en sortait, c'était grâce à sa petite taille. Les sourcils froncés, elle réfléchit au conseil donné. De l'autre côté, elle repéra une trappe dans le mur. Enhardie par sa découverte, elle grimpa rapidement - trop au goût d'une certaine personne - sur l'un des blocs.
- Essaye de pas te casser un truc ! Surtout pas sous ma garde !
Link ne prit même pas la peine de lui répondre. Elle sauta sur le bloc le plus proche, avant d'escalader le pilier voisin. Ses mains grattèrent la surface rêche, elle grimaça. Il lui fallut un peu plus d'efforts pour arriver au sommet. Cela fait, elle regarda où elle se trouvait par rapport à la trappe. Elle s'était un peu décalée de la trajectoire originale, mais était déjà un peu plus proche. Prudemment, elle tenta de descendre de son perchoir. Du sol, elle ne voyait plus Taketi.
Elle recommença à grimper les blocs, sauta sur les suivants, et manqua de tomber alors que son nouveau support tremblait en la réceptionnant. Soufflant un bon coup quand il cessa de bouger, elle passa plus lentement sur le suivant. Une fois sur le dernier cube, elle mit à nouveau pied à terre et passa la trappe. Une odeur rance l'assaillie.
Cette pièce était bien plus haute que la précédente. Contrairement à la première qui était surélevée par rapport à la salle principale, celle-ci devait en plus de cela englober le sous-sol. Tout comme dans celle qu'elle venait de quitter, des blocs de pierre taillés avaient été laissés à l'abandon, rangés dans un ordre incongru. Sauf que cette fois-ci, avec eux, même en leur centre le plus parfait, trônait, dans toute sa gloire poussiéreuse, une bien triste machine.
Une catapulte.
Taketi entra dans la pièce alors qu'elle admirait la chose étonnante. Juju était pacifiste. Les marques d'usure racontaient une toute autre histoire. Un frisson la parcourut, elle ne savait pas pourquoi. Pourquoi ces pierres taillées n'avaient pas fini d'être brisées pour en faire un rond, une sphère destructrice et roulante, prête à écraser tout ce qui se trouvait sur son passage. Pourquoi cette chose avait été construite, pourquoi elle aurait bien pu servir.
Elle se détourna finalement de cette machine de guerre pour regarder le reste de la pièce. Des plate-formes en bois surplombaient les lieux. Toutefois, elles n'avaient pas été conservées partout. Le bois était friable, au mieux pourri, certaines planches étaient tombées. Des pans entiers du plancher avaient été retirées, ne laissant de leur passage que des murs légèrement sculptés.
Taketi s'installa contre le cadre de la porte et la fixa. Les yeux des Takeihs l'avaient toujours dérangés, complètement noirs à l'exception de cette étincelle prédatrice qui ne ressortait que dans certaines situations. Heureusement pour sa concentration, la femme ailée ne lui jeta qu'un regard réflexif. Aussi l'enfant ne lui accorda qu'un coup d'œil avant de s'intéresser à l'autre côté. Une nouvelle trappe lui faisait face, mais la porte du rez-de-chaussée était fermée par une planche de bois. Donc très clairement condamnée.
- Ah, en fait...
Link baissa les yeux vers la femme. Son sourire habituel avait laissé place à un regard soucieux.
- T'aurais pas vu un gosse Rosarien ? Il était censé être avec les Bongos, mais il semblerait qu'il ait disparu.
La petite blonde fronça les sourcils.
- Je n'ai vu personne...
Si un enfant Rosarien devait avoir bougé, ce ne pouvait être que celui qu'elle avait aperçu durant le procès. Celui qui était plus jeune qu'elle. Son front se froissa. Juju avait été utilisé comme cadre du procès en raison de sa position proche de la neutralité durant les conflits, ce qui n'était pas le cas du territoire Bongo. La guerre Hylienne avait vu bien des choses, l'une des plus notables étant malheureusement la déchirure des trois tribus Sheikahs. A cause de cela, de nombreux Bongos ressentaient encore du ressentiment envers les Rosariens. Hinné avait eu peur pour l'enfant. Contrairement aux autres, il était fondamentalement sans défense.
- Pourquoi il était avec les Bongos ?
Taketi grinça. Ce n'était pas un beau son.
- Exigences. Le roi Rosarien doit présenter ses excuses aux autres peuples avec une cour prédéfinie. Il devait y avoir un gosse avec eux.
- Pourquoi ?
- J'en sais rien.
La Takeih ébouriffa ses plumes, la mine grise.
- Bref, si tu le vois, tu t'en occupes, d'ac ?
Elle hocha la tête, se rappelant sans mal de l'enfant plus petit qu'elle, avec sa cape trop grande et sa timidité à l'égard de tous ceux qui s'approchaient de lui. Dommage pour lui, elle devait encore trouver Petra.
S'échappant de sa position précaire, elle testa les planches. Beaucoup grinçaient sous son poids. Le bois était dans le même état que la tourelle, les deux bâtiments devaient avoir été construits et abandonnés dans la même période.
Link sautilla jusqu'à la prochaine planche, puis la suivante. Taketi entra dans la salle, ses plumes s'aiguisant aux alentours de la machine de guerre. Cela, les enfants d'aujourd'hui ne le savaient pas, mais cette arme était la plus récente de toutes. La guerre avait duré plus longtemps que ce que tous pensaient. Accompagnés de leurs célestriers, les Hyliens avaient tenu leurs frontières des mois durant. Les trois peuples Sheikahs, à cela, avaient choisi des lignes différentes. Les Rosariens avaient préféré attaquer le peuple assiégé. Les Bongos, alliés des Hyliens depuis longtemps, s'étaient naturellement rangés à leurs côtés. Les Jujus s'étaient retrouvés complètement démunis.
Les Sheikahs étaient toujours restés unis, jusque là et malgré tous les bouleversements rencontrés depuis la création du monde. Ils devaient rester unis. Mais voilà qu'un massacre - car ce ne pouvait être autre chose, quand tant de monde s'alliait contre un seul et même peuple - déchirait leurs liens centenaires.
Le cœur lourd, le peuple qui vénérait la déesse verte avait fermé ses frontières, armés ses troupes. Pacifistes ne voulait pas dire faibles. Nombreux avaient été ceux à s'en rendre compte, quand les premiers Hyliens commencèrent à fuir vers eux. Les Jujus s'ouvrirent à ceux qui couraient, mais attaquèrent ceux qui les envahissaient. Ils construisirent des bunkers, se cachèrent dedans. Ils bâtirent des tourelles, surveillèrent les horizons. Les parents de Taketi l'avaient emmenée ici, alors qu'ils échappaient à l'effort de guerre auquel se livrait leur race. Ce fut par un hasard pur qu'elle rencontra Vaati, un orphelin perdu aux frontières. Quant à Demise, sa mère avait rejoint les landes verdoyantes dès le début des conflits.
La guerre avait détruit des années de paix. Taketi avait été jeune, au tout début de celle-ci, mais elle avait été en âge de tuer à la toute fin. Le massacre des Hyliens était encore dans tous les esprits, les belligérants étaient chassés, et, désormais, à l'image de ces immenses oiseaux tombés par les coups ennemis, c'était à la jeune génération de souffrir des actes passés. Le jeune Rosarien, pour commencer. Mais Link serait la suivante.
Hinné n'avait pas tout raconté, mais la réalité était simple à deviner. Et la petite fille blonde était la preuve de la cruauté à laquelle pouvaient se livrer certains.
Link, pendant que Taketi repartait dans les méandres de ses souvenirs, se retrouva confrontée à un problème. Le trou était trop grand pour sauter, elle devait trouver un autre moyen de passer. Le rebord du mur était légèrement rebondi, elle pouvait s'y accrocher. Elle commença par s'asseoir, les jambes pendantes dans le vide. Puis, elle se rapprocha du mur. Enfin, ce fut le plus compliqué. A tout moment, elle pouvait tomber. Mais si elle ne le faisait pas, elle n'arriverait pas à rejoindre Petra. Ce qui n'était absolument pas une option.
Elle agrippa le rebord, testant nerveusement sa solidité. Cela semblait être assez résistant, de ce qu'elle pouvait dire. Plus maladroitement, elle posa sa deuxième main. Prenant une profonde inspiration, elle hésita encore un instant. Mais tout cela était pour Petra.
Alors elle sauta.
- Putain de merde !
Link sentit son corps tomber de tout son long, ses doigts glissèrent. Dans un glapissement tendu, elle affirma la prise de sa seconde main. Elle se retrouva bientôt dans un équilibre précaire, plusieurs mètres au dessus du vide. Taketi se trouvait désormais juste en dessous d'elle, son teint coloré avait blêmi. Son cri résonnait encore dans la salle. Une nouvelle chose qu'elle ne devrait pas répéter à Hinné, la jeune femme ne voulait aucune injure dans les environs des enfants. Bien qu'entre la chute et les injures, le choix n'était pas à discuter.
La petite fille serra la mâchoire et reprit prise. Une fois qu'elle fut sûre de pouvoir bouger, elle se déplaça d'un centimètre. Deux centimètres. Trois. A petits pas, cela prit un temps interminable, mais la seule fois où elle tenta d'aller plus vite fut celle où elle manqua de tomber à nouveau. Entre sa propre peur et le cri perçant de la Takeih, cela la dissuada rapidement de changer de rythme.
Quand enfin elle parvint de l'autre côté, ses bras étaient en mousse. Avec un gémissement pathétique, elle se hissa sur les planches noires. Taketi trilla d'un rire soulagé.
- Faut faire plus d'exercices, gamine !
Elle ne prit même pas la peine de répondre. A la place, elle se tourna vers la trappe qui se trouvait désormais toute proche. Les planches étaient tout aussi fragiles qu'elles ne l'étaient de l'autre côté, elle avança à pas légers. Une fois face à la petite entrée, elle jeta un dernier regard à la catapulte. La chose était énorme, occupant une grande partie de l'espace disponible. Mais elle savait, même si ce n'était pas par des mots ni des images mais par une certitude fortement ancrée, que le fort était bien plus vaste que la petite partie qu'elle explorait, que certaines pièces étaient encore plus étendues que celle-ci. Il pouvait bien y avoir d'autres catapultes, peut-être plus anciennes, avec bien plus de marques d'usure que celle-ci.
L'enfant sentit un frisson désagréable la parcourir.
Juju était terre de Courage, pas de faiblesse.
Elle passa la trappe rapidement, pour regarder une nouvelle pièce. Il n'y avait rien de spécial, cette fois-ci, si ce n'était la réserve massive d'armes, à l'étage du bas. L'endroit où elle avait atterri était le haut d'une armoire. En en descendant, elle se rendit compte qu'un battant était tombé, révélant ce qui s'y cachait. Des livres à ne plus savoir qu'en faire, dans un état pire que la pourriture.
Cela voulait dire deux choses : une, que des Hyliens étaient passés par là. Deux, que quelqu'un avaient un jour cherché à les détruire.
Où étaient les Hyliens ?
Un frisson la chassa de l'armoire. Son regard se porta sur les armes exposées. Des lances, des épées, des boucliers, même des pièces d'armure. Certaines avaient semblé plus utilisées que d'autres, un casque avait même une bosse qui le défigurait.
Sa curiosité rassasiée, elle ouvrit la dernière porte.
- Petra !
La pièce dans laquelle était tombée Petra était petite. L'oiseau rouge piaffa dans sa direction, toutes ailes ouvertes, des plumes éparpillées près de la fenêtre. Le célestrier sautilla les quelques mètres qui les séparaient jusqu'à plonger dans ses bras. Pourtant, avant même que Link ne puisse dire quoique ce soit, son amie se retourna vers un bloc sculpté et roucoula un air rassurant.
- Petra ? Demanda la petite fille. Que se passe-t-il...
Ses mots moururent dans sa gorge quand une toute petite silhouette se détacha des ombres. Un enfant, plus petit qu'elle, avec une cape trop grande recouvrant une peau très sombre, quasiment noire, et camouflant presque des yeux gris comme la pierre ainsi que des mèches blanches immaculées. Elle cligna des yeux exactement deux fois, l'esprit perplexe tourbillonnant dans des directions abstraites alors qu'elle parvenait à reconnaître les vêtements Rosariens.
Elle avait trouvé l'enfant disparu. Non. Petra avait trouvé l'enfant disparu.
Remarquant l'incertitude du plus jeune et les vaines tentatives de réconfort de son amie, elle se reprit avec un sourire.
- Bonjour ! Je suis Link, et toi ?
Le petit garçon cligna des yeux, serrant fort les bords de sa tunique.
- Je...
Il déglutit visiblement, mal-à-l'aise.
- Je suis... Ikana.
Elle ne pouvait pas savoir que cette rencontre serait l'une des plus importantes de sa vie.
Elle se rapprocha lentement du petit garçon, Petra sautant de ses bras pour encourager l'enfant à sortir de sa cachette, mais, avant qu'elle ne puisse dire quoique ce soit, un craquement sonore les fit tous sursauter. Trois paires d'yeux se tournèrent vers la porte principale.
Taketi souriait comme une folle.
- Bah alors, vous attendez quoi pour venir ?
Alors que la Takeih s'éloignait, Link sentit sa bouche s'ouvrir de surprise.
- Tu...
Ikana lui jeta un regard étrange.
- Tu pouvais casser la porte depuis le début ?!
Un rire cinglant lui répondit.
Petra voleta jusqu'à la porte désormais ouverte, piaillant dans leur direction avant de suivre la Takeih. Link gonfla ses joues mais reprit bien vite un sourire en prenant la main de son nouvel ami.
- On y va ?
Alors que les quatre s'éloignaient d'un fort à moitié caché sous les broussailles du Sud de la vallée de Juju, sous les rires et les plaintes des enfants, la flamme rouge d'une torche éclatait de mille feux au sommet du souvenir d'une guerre désormais passée, à l'image de l'éclat de la terre elle-même.
