Hey ! Je suis contente j'ai réussi à écrire ce chapitre assez rapidement. Après ça, je ferai une pause pour les fêtes.
Comme je l'ai dit, ce chapitre là est un flashback. Allons faire un petit coucou au King de 19 ans.
Et les flashbacks de King étant ce qu'ils sont, je me permets :
cw : violence graphique, meurtre, sang.
28 ans auparavant.
— Levons nos verres !
Des cris de joie et des éclats de rire suivirent l'invitation de Kaido. Un sourire se dessina sur le visage de King, isolé dans la pièce d'à côté. Il se serait bien joint à la liesse générale mais il avait du travail. Il fêterait l'évènement plus tard, seul avec Kaido. Les réunions le mettaient toujours mal à l'aise.
Depuis qu'ils avaient établi leur base sur Wano, les célébrations étaient de plus en plus nombreuses. Ils avaient l'argent pour et de plus en plus de recrues pour gonfler leur équipage. Mais ce soir, l'ambiance était particulièrement enjouée : Kaido était papa. Et il était ravi à l'idée d'avoir un successeur qui pourrait continuer de terroriser le gouvernement mondial après sa disparition.
King n'avait pas encore vu le bébé, il n'en avait pas eu le temps. Il était simplement content de voir son capitaine en pleine forme. Même s'il enchaînait un peu trop les soirées festives à son goût ces derniers temps. Mais il pouvait lui pardonner; les affaires marchaient bien et il se débrouillait parfaitement comme un chef pour gérer l'équipage. Il s'était découvert un vrai talent de régisseur et il était très fier de lui.
Sans doute le devait il à la peur qu'il inspirait aux gens autour de lui. A cause de ça, il avait parfaitement conscience d'être détesté par le reste de l'équipage mais il s'en moquait. Tant qu'on lui obéissait et tant qu'il avait l'estime de Kaido, le reste lui était égal. C'était pour lui qu'il faisait tout ce qu'il faisait, les autres n'avaient aucune espèce d'importance.
Il avait toujours le nez dans les livres de comptes quand Kaido entra dans la pièce, une bouteille à la main, joyeux comme tout.
— Tu veux pas faire une pause, cinq minutes ? Râla-t-il. Tu vas avoir besoin de lunettes à force de fixer ces papiers. Viens t'amuser !
— J'ai presque fini, répondit King. Et j'en profite pour rester un peu à l'air libre.
La plupart du temps, King arborait un masque intégral qu'il ne retirait qu'en de rares occasions. Seul Kaido était autorisé à voir son visage. Et maintenant qu'il l'avait ôté, il n'avait pas envie de le remettre avant un moment.
— Allez, trinque avec moi. Tu t'occuperas de ça plus tard. Je suis riche, c'est tout ce que tu as besoin de savoir.
— Si tu veux qu'on reste riche, je ne dois pas me laisser distraire.
Il l'ignora, lui déposa un verre devant le nez — en laissant une belle tâche d'humidité sur ses feuilles de calcul — et alla se vautrer dans le seul fauteuil de la pièce. King abandonna. Visiblement, l'alcool était monté à la tête de son capitaine et il était inutile de chercher à discuter. Heureusement, il n'y avait rien d'urgent à traiter pour l'instant. Il pouvait s'accorder une pause de quelques minutes pour faire plaisir à Kaido. Il était toujours content de ces petits tête à tête. C'était son privilège.
Il prit son verre et partagea avec lui l'avènement de sa paternité.
/
Quelques jours plus tard, Kaido annonça une nouvelle fête.
King s'en étonna. Il s'était passé trop peu de temps depuis la dernière à son goût. Il n'avait rien contre le fait que l'équipage s'amuse mais il aurait préféré dépenser leur trésor dans autre chose que des gueuletons et des orgies. Les beuveries trop nombreuses étaient source de problèmes. Ce n'était pas parce que Kaido était puissant et respecté que ses sbires pouvaient se permettre d'être soûls sur leurs heures de travail. Pourtant, ça arrivait très souvent ces derniers mois. Et King, du haut de ses dix neuf ans, était compétent mais il n'était pas apte à tout régler lui-même. Il ne pouvait pas se dupliquer.
Si Kaido avait l'intention de continuer sur cette voie là, il allait avoir besoin de plus de bras pour porter tout ce beau monde. Il était parfaitement hors de question que l'honneur de son capitaine soit entaché par des idiots, venus pour profiter des boissons et du garde manger.
Il s'était levé ce matin là avec la ferme intention de lui en parler. Il le trouva sous le crâne géant d'Onigashima, au pied de son futur château, toujours en construction. Des ouvriers venus de Kuri travaillaient d'arrache-pied pour dresser le plus grand bâtiment possible, au sommet duquel Kaido pourrait triompher. Pour l'instant, il n'était composé que de poutres et d'échafaudages mais il promettait d'être assez haut pour permettre à des gens de leur stature de s'y sentir petits.
Kaido le vit arriver et le salua d'un petit signe de la main.
— Qu'est-ce que t'en penses ? Demanda-t-il en levant le nez pour contempler les hauteurs.
Pour le moment, il n'en pensait pas grand chose.
— Ça va prendre un temps fou pour le bâtir.
— Pas quand on a suffisamment de main d'œuvre.
King ne releva pas cette phrase. Il y a trois ans, peut-être que tout cela l'aurait dérangé, mais aujourd'hui : il n'en avait plus rien à faire. Il prenait grand soin d'ignorer l'exploitation des gens de Wano. C'était un mal nécessaire et l'ascension de Kaido comptait plus que tout pour lui, le reste ne le regardait plus. Il avait perdu foi en l'humanité à seize ans.
Comme il était venu pour une raison, il en vint aux faits sans plus tarder.
— J'ai vu que tu prévoyais une nouvelle soirée ?
— Ouais. Pour fêter l'arrivée de notre nouvelle recrue.
— Une nouvelle recrue ?
C'était inhabituel. Personne dans l'équipage n'avait jamais eu de fête de bienvenue. Il ne savait pas ce qu'il devait en penser.
— C'est toi qui m'a réclamé quelqu'un pour t'aider pour l'autre jour, reprit Kaido.
— C'est vrai, admit King, qui n'était pas sûr que ce soit un reproche ou un cadeau.
— Et ben voilà, il arrive ce soir et je compte l'accueillir comme il convient.
King aurait dû être soulagé de savoir qu'il n'allait plus être le seul à s'occuper de leurs affaires mais ce n'était pas le cas. Il était un peu vexé que quelqu'un d'autre entre dans les bonnes grâces de Kaido, au point d'être célébré avant même d'avoir fait ses preuves. Il n'aimait pas l'inconnu et il n'avait confiance en personne. Mais ça lui passerait. Il était méfiant de nature, il se ferait une idée de l'homme qui allait s'occuper de l'équipage à ses côtés au cours de la soirée.
— Je comprends, dit King en réponse. Mais après ça il faudra ralentir sur les fêtes, si on en fait trop, les gars vont se relâcher et ne plus nous prendre au sérieux.
— S'ils dépassent les bornes, tu leur feras peur un bon coup. Ca suffira. Tu sais bien le faire ça, le flatta Kaido avant de s'éloigner.
C'était vrai et ce petit compliment chassa ses appréhensions. Il trouvait toujours déraisonnable de faire une fête pour une seule personne mais la confiance que Kaido plaçait toujours en lui — avant tout le monde — expliquait sa tranquilité d'esprit. C'était ça, d'être l'homme de confiance ; c'était à lui de s'assurer que tout se passerait bien. Et puis, avec un peu de chance, son nouvel associé saurait calmer le jeu le premier.
/
C'était la plus grosse fête qu'ils avaient jamais organisé jusqu'à présent.
La musique était si forte qu'aucun endroit sur l'île ne permettait d'y échapper. King s'était éclipsé en hauteur un instant. Il n'avait toujours aucune envie de se mêler aux autres et ses sens étaient surchargés par le bruit et la lumière. De plus, il avait très chaud sous son cuir, malgré la neige qui tombait depuis que la nuit était tombée. Il aurait bien filé plus loin encore mais il ne voulait pas laisser Kaido seul, à la merci de son propre équipage. Il fallait bien que quelqu'un garde la tête froide.
Car leur nouvelle recrue était tout à fait disposée à profiter de la bonne compagnie et des boissons dans la joie et la bonne humeur, sans se soucier d'avoir l'air trop insouciant pour le job. Il s'était si bien intégré à la fête que King n'avait même pas eu le temps de l'interroger sur ses futures fonctions, car Kaido n'avait pas été très clair sur ce point. Il lui avait affirmé que sa présence dans l'équipage serait un avantage considérable, sans aller plus loin. King ne savait pas quoi en penser.
Il était égoïstement contrarié par son nom. Queen.
Kaido n'avait rien à voir avec ça, il ne l'avait pas baptisé lui-même, mais King n'aimait pas ce que sous-entendait ce "hasard". Il ne voulait pas être associé à lui en permanence ou fonctionner en duo. Il voulait rester au sommet de la chaîne. Malheureusement, il n'avait plus le choix. Queen était en train de danser avec les autres et il savait comment galvaniser une foule : le reste de l'équipage l'avait déjà adopté. Il avait récupéré des poutres destinées à la construction du château et avait bricolé une estrade, sur laquelle il était monté et avait improvisé un concert.
C'était un homme immense, bien plus imposant que lui, et il savait comment se servir de son corps pour avoir l'air à la fois agile et puissant. Il émanait de lui une confiance absolue en ses mouvements et son charisme scénique marchait à la perfection sur son public.
King ne pouvait pas nier qu'il avait une certaine présence mais il commençait à craindre que Kaido ne l'ait choisi pour ce seul talent. Il avait envie de descendre pour lui poser la question mais le capitaine était inapprochable pour le moment. Il prenait du bon temps et profitait volontiers du spectacle alors que des admirateurs roucoulaient autour de lui. Bientôt, il disparaitrait avec l'un ou l'une d'entre elle et on ne le reverrait pas avant le lendemain.
Comme de coutume, King était bien le seul à se tenir éloigné de l'agitation générale. Pendant un instant, il envisagea de descendre du perchoir où il s'était réfugié et de faire la fête lui aussi. Puis il s'imagina, raide comme un piquet, au milieu des danseurs et des soûlards, et il renonça. Il ferait tâche.
Il attendrait le retour du calme pour avoir une discussion importante avec Kaido. Il avait confiance en ses choix mais la vision de Queen qui improvisait une chorégraphie devant tout le monde ne lui permettait pas de savoir exactement ce qu'il allait pouvoir leur apporter. Au moins, il avait l'air puissant. Rares étaient les gens qui pouvaient regarder King et Kaido sans savoir à lever la tête et lui n'avait pas à le faire. Il était aussi gigantesque que la profession l'exigeait et, malgré un sourire et des manières amicales, son bras mécanique témoignait de son potentiel meurtrier.
L'estomac de King grogna. Il n'avait rien mangé depuis son réveil à l'aube, il n'en avait pas eu le temps. Et l'odeur des grillades en contrebas étaient alléchantes. Il n'allait pas avoir d'autre choix que de descendre et de se mêler à la foule cinq minutes s'il voulait manger quelque chose. Il ouvrit ses ailes et plana discrètement sous le dôme, droit sur le banquet. Son vol silencieux n'attira pas l'attention. Il se posa au niveau des tables de nourriture et chassa distraitement les ivrognes qui tournaient autour à l'aide ses flammes. Personne ne lui tint tête. Sa réputation de grincheux suffisait à tenir les curieux hors de son champ de vision et personne n'avait la moindre envie de s'infliger sa compagnie.
Mais il y avait au moins un nouveau qui ne savait rien de lui et son mauvais caractère.
Alors qu'il s'emparait d'un plat garni de brochettes de viande — toujours plus pratiques à manger pour lui quand il portait son masque — une énorme main gantée et inconnue lui saisit l'épaule. La surprise le força à s'enflammer, par pur réflexe.
— Oh ! Du calme ! Je viens en paix, gloussa une voix qui ne lui était pas encore familière.
King fit volte face et se retrouva nez à nez avec son nouveau collègue, qui lui souffla la fumée nauséabonde de son cigare directement au visage. C'était une très mauvaise façon de l'aborder mais il ne voulait pas lui tomber dessus dès le départ. En revanche, rien ne l'obligeait à lui lécher les bottes, surtout quand il se tenait bien trop près de lui à son goût.
— Qu'est-ce que tu me veux ? Grommela-t-il sans quitter le banquet des yeux.
Queen paraissait surpris d'être accueilli aussi sèchement mais King estimait qu'il valait mieux pour lui qu'il comprenne à qui il avait à faire dès le premier jour.
— Ben. Juste faire connaissance, répondit-il, désarçonné. Normal quoi. Alors relax, je vais pas te la voler ta bouffe.
— Je sais déjà qui tu es.
Il aurait pu faire un effort pour être plus aimable mais si Queen n'était pas capable de supporter son impolitesse, sa place n'était pas ici. Et il était impossible qu'il se "relaxe" en se sentant aussi acculé. Il pouvait observer la moustache de son interlocuteur sous les moindres détails et c'était : bien trop près à son goût.
— Moi aussi je sais déjà qui t'es, se moqua-t-il. Ça n'empêche pas de faire connaissance. T'es bien coincé pour un mec qui se balade en cuir moulant.
— Je ne vois pas le rapport.
Il voyait très bien. Il avait l'habitude et il en avait entendues de bien pire. Mais ça ne l'aidait pas à éprouver de la sympathie pour son nouvel acolyte.
Queen souffla un nouveau nuage de fumée. Lui non plus ne cherchait pas à cacher sa déception. Il espérait une conversation amicale et il se retrouvait en face de quelqu'un qui ne répondait absolument pas à son humour ou à son charme.
— Bon, on ne va pas partir sur de mauvaises bases. On est censé bosser ensemble, non ?
— Je ne me suis forgé aucune opinion pour le moment si ça peut te rassurer, se moqua King, satisfait d'avoir eu le dessus si facilement. Mais la prochaine fois, garde tes mains chez toi.
— C'est comme ça, je suis un tactile !
Ce n'était pas la réponse qu'il attendait. Il avait envie de fuir mais puisqu'il avait l'occasion d'en découvrir plus sur ce "petit" nouveau, il devait en profiter. Il dévora une brochette, prêt à l'assaillir de questions.
— Wow, c'était quoi ça ? S'exclama Queen.
— Quoi donc ?
— Ce pouvoir, t'es quel genre d'oiseau ?
King avait tellement l'habitude de sa forme hybride qu'il avait tendance à oublier que ça pouvait surprendre. Comme Queen lui tendait la perche, il fut incapable de se retenir de se jeter sur un sujet qu'il maîtrisait.
— Je ne suis pas un oiseau. Je suis un ptéranodon — et pas un ptérodactyle, je précise. Un reptile donc. Ce n'est pas la même chose. Normalement mon bec sert à pêcher mais j'avoue que je m'en sers surtout pour manger sans avoir à défaire ma combinaison. C'est plus pratique.
Queen ne répondit pas. Il tira sur son cigare et le dévisagea derrière ses lunettes noires. Même sans voir ses yeux, King pouvait les sentir se balader sur lui et il eut soudain un mauvais pressentiment.
— Donc : tes ailes n'ont aucun rapport avec ton pouvoir.
— Non, se risqua-t-il à confirmer dans l'espoir que l'avidité de sa voix était en rapport avec son pouvoir, et rien d'autre.
— Et ben, ça alors. Je comprends mieux pourquoi tu te planques sous un déguisement pareil.
Son malaise grandit encore.
— Je pensais pas qu'il restait encore un lunaria vivant, dit-il avec un sourire.
King faillit tomber à la renverse. Il n'était pas censé craindre pour sa sécurité sur le territoire de Kaido. Personne ne l'avait plus identifié comme tel depuis qu'il se cachait sous un masque. Comment ce type, qui n'avait fait que picoler et danser comme un idiot depuis le début de la fête, l'avait-il percé à jour ?
— Comment... Comment est-ce que... Bégaya-t-il maladroitement.
— Ça va détends toi, je risque pas de te balancer, ricana Queen. Le scientifique que je suis apprécie sa chance de te rencontrer en chair et en os, c'est tout. Ça me change des fossiles. J'ai cru que c'était pour la déco au départ, ajouta-t-il en pointant ses ailes du doigt. Je me disais que t'avais juste un look bizarre, mais non. T'es un vrai lunaria !
— Scientifique ? Répéta King avec mépris.
Queen ne sembla pas s'apercevoir que l'atmosphère s'était alourdie et en profita pour se vanter.
— Ouais ! Tu as devant toi une sommité. J'ai peut-être, dans ma jeunesse, fréquenté les plus grands noms de la science ! Dont encore une fois peut-être un certain Vegapunk, mais c'est un détail...
Un silence glacial accueillit sa tirade.
— Vegapunk.
King reposa aussitôt son plat sur le buffet, d'un geste furieux, et s'éloigna en plantant Queen là, sans ajouter un mot de plus.
/
Il faisait les cent pas dans la salle depuis maintenant un quart d'heure et il commençait à perdre patience. Plus les secondes passaient, plus sa colère montait et plus il avait du mal à la contenir. Le plancher brûlait sous ses pieds et l'odeur de la fumée alertait de pauvres serviteurs qui n'avaient toujours pas compris qu'il ne fallait pas l'approcher quand il était dans cet état. Dès que l'un d'entre eux osait entrer dans la pièce, pour s'assurer qu'il n'y avait pas d'incendie à déclarer, il en profitait pour passer ses nerfs.
Trois d'entre eux avaient déjà été brûlés vif mais Kaido ne se montrait toujours pas.
Son retard était certainement dû à sa gueule de bois mais King n'acceptait pas une telle excuse. Il était vert de rage.
Il n'en revenait toujours pas. Comment avait-il pu accepter un homme pareil dans leurs rangs ? Il était forcément passé à côté de l'information, il en était persuadé. Mais il n'arrivait pas à comprendre comment quelque chose d'aussi capital avait pu lui échapper. Et qu'est-ce qui avait pu l'attirer chez ce type en premier lieu ? Il méritait une explication !
Et il devait ramener son capitaine à la raison de toute urgence. Le poison des soirées arrosées finissait par avoir une sale influence sur lui.
Kaido le rejoignit enfin, au bout d'une heure. Il avait les cheveux en pétard et la tête de quelqu'un qui avait cruellement besoin de dormir et de manger des fibres. Il ne salua pas King et ne remarqua pas non plus les nombreuses traces de brûlures noires qui zébraient maintenant sa cabine. Il traîna des pieds jusqu'à lui, sans remarquer à quel point il était tendu.
— J'espère pour toi que ce que tu as à me dire est très important, bailla-t-il en se rallongeant aussitôt sur le sol, prêt à reprendre sa nuit. Je déteste commencer ma journée avec une réunion...
— C'est important, oui, confirma King sans cacher à quel point il était fâché. Il faut qu'on parle de Queen.
Kaido accueillit la remarque avec un sourire satisfait, totalement hermétique à l'irritation de King.
— Ah, Queen, soupira-t-il avec un sourire de benêt. Il a bien mis l'ambiance hier soir. Des fêtes aussi réussies, on n'en voit pas souvent...
— Pourquoi est-ce que tu l'as recruté ?
Son ton était très sec et il le regretta un peu devant le regard que Kaido lui rendit en réponse. Il n'avait pas l'habitude de parler comme ça à l'homme qu'il respectait le plus au monde, il avait perdu son sang-froid à force de ruminer seul dans son coin. Il n'avait pas à lui s'adresser à lui de cette façon mais il ne pouvait pas non plus faire semblant de n'avoir rien appris sur leur nouvel élément.
— Je te l'ai déjà expliqué, dit Kaido, de mauvaise humeur.
— Non, pas vraiment en fait.
Kaido se racla la gorge, agacé d'avoir été tiré du lit pour tenir une discussion aussi futile.
— C'est un ingénieur militaire de renom et un cyborg. Il va me fabriquer de nouvelles armes encore jamais vues et gérer toute la production des usines. Comme tu le sais, c'est celui qui possède la plus puissante armée qui domine.
— Oui, je sais mais...
— Alors qu'est-ce qui te pose problème ? Le coupa Kaido, irrité. Que ce soit un fêtard ? C'est ça ?
Maintenant que Kaido avait haussé la voix, King se sentait ridicule. Il avait dépassé les bornes en parlant à son capitaine comme à un enfant mal-élevé. Sa colère s'atténua un peu, Queen n'avait pas été choisi au hasard, c'était déjà ça, mais comment avait-il pu faire l'impasse sur son curriculum ?
Il s'en voulait d'être celui qui devait le mettre face à ses erreurs, mais c'était cela aussi, être son bras droit.
— Est-ce que tu sais qu'il a travaillé avec Vegapunk ? Dit-il dans un souffle, redoutant sa réponse. Kaido haussa les épaules, très peu concerné par ses inquiétudes.
— Bien sûr que je le sais, confirma-t-il. C'est bien pour ça que je le voulais parmi nous. Les MADS étaient tous des prodiges de l'armement et Queen avait une spécialité intéressante. C'est un avantage énorme d'avoir l'un d'entre eux parmi nous ! Tu verras, d'ici peu de temps, on aura une armée capable de rivaliser avec celle de la Marine et ils n'oseront même plus nous approcher. Il est vraiment très, très bon.
Cette réponse stupéfia King. Alors il savait.
Il resta muet quelques secondes, incapable de réagir. Il n'arrivait pas à comprendre comment il pouvait rester aussi indifférent à la présence d'un ami de Vegapunk parmi eux. Pourtant il savait aussi bien que lui le genre de danger qu'il pouvait représenter.
— Quoi ? C'est ça qui te pose problème ? s'impatienta Kaido.
— On ne peut pas lui faire confiance, répondit King avec nervosité. Il a été proche du gouvernement mondial...
— Sa tête est mise à prix, imbécile. Il se planque ici autant que toi.
Fatigué d'avoir à se disputer, Kaido se releva avec difficulté et dépassa King sans le regarder, pressé de retourner à son repos. King, complètement stupéfait de le voir aussi indifférent à sa détresse, s'emporta avant qu'il ne puisse sortir de la pièce :
— Je ne veux pas de lui ici !
Il avait crié sans réfléchir.
C'était un caprice puéril, guidé par la colère et la crainte qui lui rongeaient les entrailles depuis son réveil. Il n'avait pas d'autre choix que de l'exprimer. Il aurait préféré que cela sorte autrement mais l'urgence l'avait poussé à s'épancher. Il était hors de question qu'il côtoie un proche de Vegapunk.
Kaido le dévisagea avec incrédulité. Il n'avait pas l'habitude qu'on lui crie dessus et il n'aurait jamais imaginé King capable de lui faire une scène.
— Tu me fais quoi là ? S'étonna-t-il.
King serra les poings. Il ne comprenait décidément pas comment il pouvait rester aussi impassible.
— Si il t'a énervé, mets lui ton poing dans la gueule, reprit Kaido. Tu es assez fort pour te faire respecter tout seul, ne me mêle pas à vos différends.
— Mais... !
Il perdait patience. Cette nonchalance était incompréhensible. Kaido avait subi un sort similaire au sien, il ne pouvait pas ignorer ce que Queen avait pu faire de ses jeunes années chez les MADS.
King craqua.
— C'est un ami de Vegapunk ! Tu sais ce que...
Ce qu'il m'a fait, voulut-il ajouter. Mais la phrase mourut dans sa bouche avant de franchir ses lèvres. Entendre son propre ton geignard et suppliant lui avait fait réaliser sa bêtise.
— T'es quand même pas en train de chialer ?
Une ignoble bouffée de chaleur paralysa King. Voir cette expression presque dégoûtée sur le visage de Kaido fit monter en lui un sentiment de honte si gigantesque qu'il lui coupa toute envie de poursuivre. Il trouva un minuscule réconfort en son masque, qui cachait sa gêne spectaculaire aux yeux de son bienfaiteur. Mais il ne l'empêchait pas de se sentir misérable et ridicule. Il se demanda soudain ce qui lui avait pris. Depuis quand était-il un tel trouillard ? Qu'est-ce qu'il avait espéré recevoir après une telle démonstration de faiblesse ?
Il bredouilla un "non" maladroit qui lui donnait encore plus l'air d'un adolescent en pleine crise. Il avait envie de se carboniser lui-même et disparaître en un petit tas de cendre, mortifié d'avoir été aussi stupide.
— Ah bon, grogna Kaido. Tant mieux.
Il se dirigea vers la porte, bien décidé à mettre fin à cette discussion ridicule. Avant de franchir la porte, il se tourna une dernière fois vers King, le regard sévère et — il fut mortifié de le constater — sincèrement déçu.
— Ça fait trois ans. Il est temps que tu passes à autre chose. La présence de Queen est indispensable à mon projet, alors tu fais avec ou tu pars. C'est assez clair pour toi ?
King opina du chef en baissant les yeux, toujours plus mort de honte, et Kaido disparut de l'autre côté de la porte.
Quand le bruit de ses pas fut assez lointain, il se précipita lui aussi en dehors de la pièce. Il devait fuir, n'importe où, pourvu que la sensation de souillure qui lui embrouillait les sens disparaisse ! Il ne pleurait pas mais il s'en voulait tellement d'avoir agi comme il l'avait fait, que ce n'était qu'une question de temps avant que les larmes ne fassent leur apparition.
Il aurait dû le savoir, il avait laissé la colère guider son comportement et il n'avait pas réfléchi. Bien sûr que Kaido s'était remis de son séjour sur Punk Hazard. Bien sûr qu'il était capable de faire la part des choses alors que lui était encore rongé par la peur, des années plus tard. Et depuis quand se souciait il de l'éthique de son capitaine ? Comment avait-il osé remettre en cause son jugement ? Ce à quoi il aspirait était plus important que tout ! Ses petites contrariétés n'avaient rien à faire là.
Il avait été bête au point de penser qu'exposer sa vulnérabilité serait, un : utile. Deux : pertinent. Connaissait il si mal Kaido ? Il n'avait que faire de ses faiblesses. Les exhiber devant lui comme il l'avait fait était totalement déplacé.
Pourtant, en dépit de l'humiliation, il continuait de désapprouver la présence de Queen. Son cœur ne pouvait pas le supporter. Mais il allait devoir faire avec. Il allait devoir travailler chaque jour aux côtés d'un homme qui souhaitait sans doute le disséquer pour satisfaire sa curiosité.
Il devrait vivre sous le même toit que lui et ne plus jamais relâcher sa vigilance.
La peur qu'il ressentait faisait remonter des souvenirs dont il se serait bien passé : le contact froid du métal sur sa peau, la douleur des sangles trop serrées, la lumière aveuglante des spots, l'indélicatesse des aiguilles dans ses veines, le grincement répugnant des mains gantées de latex...
Il aurait bien tué Queen sur le champ pour s'épargner la venue d'autres pensées intrusives. Mais ce serait trahir la volonté de son capitaine et ralentir son ascension sociale.
Quand sa vue se brouilla, il fonça vers la fenêtre la plus proche. Il ne voulait pas pleurer, surtout pas. Même si personne ne pouvait rien voir sous son masque, il en avait déjà bien assez fait et verser ne serait-ce qu'une seule larme aurait scellé à tout jamais son statut de pleurnichard. Il devait se reprendre et se calmer.
Mais il avait tellement honte... !
Il ouvrit grand les volets et une bourrasque enneigée vint lui donner la gifle glacée dont il avait besoin pour reprendre ses esprits. Il profita de ce bref instant de lucidité pour faire la chose la plus à même de lui rendre le contrôle de ses émotions. Il se transforma.
Ses muscles et son squelette se firent plus légers et ses glandes lacrymales disparurent au profit de doubles paupières, beaucoup plus confortables. Son besoin urgent de pleurer disparut. Sa forme animale avait cet avantage incroyable de transformer ses émotions complexes en gestes et expressions discrètes qui n'avaient plus rien d'humain. A moins d'être un expert en ptéranodon, personne ne serait en mesure de voir à quel point il était affligé.
A peine se fut-il transformé qu'un chant plaintif s'échappa de son bec. Il en fut gêné. Il avait besoin de s'isoler. Au moins le temps de reprendre ses esprits. Il bondit du balcon et plana jusqu'à trouver un endroit calme et suffisamment éloigné de l'agitation générale. Sa propre chambre était trop proche de celle de Kaido, il préférait ne pas s'en approcher tant que sa honte ne serait pas retombée. Il n'oserait pas le regarder dans les yeux avant des jours après ce qui s'était passé.
Il se posa sur une corniche, de laquelle il aurait une belle vue sur tout le domaine. Au loin, se trouvait le crâne géant sous lequel Kaido bâtissait son futur château mais King préférait le calme de leur base actuelle. Trop petite pour accueillir les fêtes mais suffisamment solide pour supporter la neige. La plupart des gens qui résidaient ici étaient les travailleurs rapatriés depuis Wano. Ils étaient calmes et ne posaient aucune question, tant qu'ils avaient la vie sauve. King savait qu'il pouvait se permettre d'exprimer sa peine ici. Personne n'en soufflerait un mot.
Et d'après ce qu'il voyait, la plupart des gardes étaient encore en train de cuver toute la bière qu'ils avaient bu la veille. Un sifflement agacé lui échappa. Comme s'il avait besoin d'être davantage convaincu par l'influence néfaste de Queen sur leur équipage. Ces ivrognes avaient de la chance qu'il soit trop peiné pour songer à les punir.
La neige reflétait parfaitement son humeur. Les flocons tournoyaient joyeusement autour de lui sans jamais le toucher, ils fondaient à son contact, sans avoir le temps de toucher le sol. Il aurait aimé que ses flammes constituent une réelle protection en toute circonstance même ce n'était pas le cas.
Une fois la honte atténuée et l'envie de pleurer disparue, il se sentait comme anesthésié. Son corps de ptéranodon le soulageait de bien des maux.
Il se concentra sur le paysage autour de lui, pour se calmer. Ses grands yeux lui permettaient d'observer la zone avec une précision qui ne nécessitait aucun effort de sa part. Parfois, il songeait à passer toute sa vie sous sa forme animale. Il savait que d'autres que lui utilisaient leur fruit du démon pour cacher leur identité. Cette perspective le séduisait beaucoup en cet instant mais ç'aurait été une nouvelle lâcheté de sa part. Et il avait trop longtemps été traité comme un animal pour se contenter d'en être un.
Il allait devoir se rattraper auprès de Kaido et lui prouver, une fois encore, qu'il n'avait pas fait erreur en lui sauvant la vie. Il se montrerait plus froid et plus cruel encore afin de passer à autre chose, comme il le lui avait recommandé. Il supporterait Queen et serait sur son dos en permanence s'il le fallait. Il veillerait à ce que tout se déroule comme Kaido le souhaitait. Il resterait ce limier impossible à tromper, toujours dans l'ombre de son capitaine, à les protéger : lui et ses intérêts. Et alors, peut-être qu'il lui pardonnerait sa maladresse d'aujourd'hui.
Il fit claquer son bec pour sceller le pacte qu'il venait de passer avec lui-même, et s'ébroua un instant pour chasser la neige fondue qui commençait à peser lourd sur son dos. En reprenant ses esprits, il aperçut la lueur d'une bougie émaner de la fenêtre de la maison d'en face. Ses yeux perçants pouvaient discerner ce qui se tramait à l'intérieur de la pièce sans la moindre difficulté ; c'était la chambre du bébé.
Il n'était pas surpris qu'elle soit là — Kaido ne tenait pas à avoir son enfant dans les pattes, s'en occuper était le travail des femmes de Wano — en revanche, il se demandait qui avait été assez idiot pour laisser la fenêtre grande ouverte alors que le vent et la neige faisaient rage. Ce n'était pas son travail de s'en préoccuper mais il imagina une seconde ce que Kaido dirait si on lui rapportait que son rejeton était mort de froid sans que qui que ce soit n'intervienne.
Alors qu'il calculait la distance entre son perchoir et la maison pour prendre son envol, l'ombre de plusieurs silhouettes se dessinèrent sur le mur de la chambre. De ce qu'il voyait, ces ombres étaient trop grandes et trop larges pour n'être que des gouvernantes, chargées de nourrir l'enfant. Il s'alarma. D'un bond, il plana discrètement jusqu'à la fenêtre et agrippa le mur de ses serres, comme une chauve-souris. La chambre n'était qu'à un mètre de lui, les conversations lui parvenaient avec clarté.
— Chhhht, 'faut pas le réveiller !
— On devrait peut-être pas être là...
— Ça va, on va pas rester longtemps ! Je veux juste voir.
— Vous croyez qu'il a des cornes ? Imaginez, un bébé avec des cornes.
— Et est-ce qu'il est aussi énorme que son père ? Ça existe, un bébé aussi gros ?
— Bah ouais, les géants ça existe crétin.
— Naaaan mais pas un géant, tu vois ce que je veux dire !
La débilité de cette conversation convainquit King qu'il ne s'agissait pas des gens de Wano mais de simples membres de l'équipage, encore soûls de la soirée de la veille et suffisamment stupides pour penser qu'approcher en cachette la progéniture de Kaido n'était pas un crime aussi grave.
— Ooooh il est trop mignon, gloussa la seule voix féminine de la bande.
— 'Y ressemble pas à son père.
— C'est un petit gars ou une petite fille au fait ?
— Aucune idée.
— Je veux le prendre, poussez vous !
Le sang de King ne fit qu'un tour. D'un geste, il bondit jusqu'au balcon et força le passage à travers la fenêtre. Son entrée fracassante cassa les rembardes du balcon et enfoncèrent les lattes du plancher. Sa silhouette, toute en pointes, qui de dessinait maintenant dans l'encadrement de la fenêtre fit hurler les curieux qui tombèrent tous à la renverse. Le bruit réveilla le bébé qui se mit à hurler, effrayé par ce chahut inattendu.
— Qu'est-ce que c'est que ça ? Qu'est-ce que c'est que ça ?! Hurlèrent plusieurs personnes à l'unisson, incapable de reconnaître la silhouette de King alors qu'il avançait sur ses quatre pattes, claquant du bec et sifflant comme un serpent, droit sur eux.
Les curieux étaient quatre et il n'en reconnut aucun. Ils étaient jeunes, trop jeunes pour réaliser l'ampleur de leur erreur. L'un d'entre eux murmura un "oh non" paniqué et rampa sur le sol pour s'échapper. King, rendu plus vif par son instinct de prédateur, le coinça aussitôt dans ses serres monstrueuses. Toute la rage qu'il avait ressentie tantôt refit surface, presque au point de lui faire perdre la tête. Un gargouillis monstrueux s'échappa de sa gorge alors qu'il resserrait sa prise sur son prisonnier qui gémissait de douleur.
— Pardon ! Pardon ! S'exclama la femme, en pleurs. On voulait juste voir le bébé ! C'est tout !
Il ne savait pas si elle l'avait reconnu ou non. Il s'en fichait. Un croassement rauque suivit d'un coup de bec bien placé la réduisit au silence à tout jamais. Il avait frappé assez fort pour la transpercer de part en part. Ses amis suppliaient pour ne pas subir le même sort, il n'écoutait pas. D'un mouvement de tête il se débarrassa de son corps.
King se sentait d'humeur vengeresse. Aucun d'entre eux ne sortirait de la pièce vivant.
— Personne ne touche à ce bébé ! Gronda-t-il de sa voix de dragon.
Ses serres et son bec firent le reste. La violence du zoan carnivore en lui s'accordait parfaitement avec sa frustration. Il déchiqueta sans effort ceux qui l'avaient contrarié, insensible aux hurlements, et balança leurs restes par la fenêtre.
Il se força à reprendre une forme humaine pour ne pas complètement ravager le bâtiment et se recroquevilla dans un coin, la sa tête entre les genoux. Il ne savait plus très bien ce qui l'avait mis en colère, leur intrusion dans la chambre et la mise en danger du bébé... ou ses propres souvenirs.
Il resta là à patauger dans le sang qu'il avait répandu, l'esprit toujours aussi embrumé et honteux. Sa rage meurtrière aurait dû l'aider à se sentir mieux, d'habitude cela fonctionnait. Mais il avait été trop chamboulé quelques minutes plus tôt. Il se sentait toujours plus sale.
Il sentit qu'il avait retrouvé son calme quand il réalisa que le bébé continuait de pleurer de toutes ses forces. Le vacarme l'avait certainement terrorisé. Coupable d'avoir perturbé le sommeil de l'enfant de Kaido, King se releva en hâte pour s'assurer qu'il n'avait pas été touché par quoi que ce soit. Si sa colère avait mis en danger la vie de l'héritier, il n'avait plus qu'à se suicider pour expier sa faute.
Heureusement pour lui, ni le bébé, ni même le berceau n'avait subit le moindre dégât. Le choc de l'exécution des curieux avait poussé le lit contre le mur, mais il était intact. King le remit en place, avec maladresse. Ainsi que la table de nuit et le bougeoir qui y était posé quelques minutes plus tôt. Il y avait quelque chose de comique dans cette situation, il se voyait remettre vaguement en ordre une pièce dont le sol était maintenant maculé du sang qu'il avait lui-même versé. Et le bébé criait toujours. Inquiet d'avoir manqué une blessure, il fit le tour du berceau et se pencha sur lui, afin d'être vraiment sûr qu'il était en bonne santé.
Le bébé, sentant sa présence, cessa une seconde de pleurer et ouvrit les yeux pour observer le géant qui l'observait. Au lieu de se calmer, il se mit à hurler de plus belle. En effet, le masque de King n'avait pas été conçu pour inspirer confiance.
Au moins, le bambin était en pleine forme. Il était tout rouge a force de hurler, agitait ses petits poings dans tous les sens et s'était débarrassé du linge qui lui servait de couverture à force de gigoter mais à part ça, rien. King se rappela alors de la raison pour laquelle il s'était inquiété à l'origine et se dépêcha de fermer les volets de la chambre — il les avait gravement endommagés mais ils était encore aptes à le protéger de la neige. Si son intervention pouvait au moins l'empêcher d'attraper une pneumonie, c'était aussi bien.
Le calme était revenu mais l'enfant continuait de pleurer de toutes ses forces, sans perdre la voix.
King songea un instant à le prendre dans ses bras, pour le rassurer — c'est ce qu'on est censé faire avec un enfant — mais il chassa très vite cette pensée.
— Désolé, dit-il dans un souffle. Mais tu vas devoir être beaucoup plus fort que ça et le plus tôt sera le mieux.
Il le regarda pleurer pendant quelques minutes, se demandant si cette créature vagissante serait un jour capable de satisfaire les ambitions de son père. Contrairement à lui.
La porte s'ouvrit brusquement et deux femme se présentèrent. Elles avaient sûrement entendu les pleurs et venaient s'occuper de l'enfant mais toutes les deux poussèrent un cri en trouvant King à côté du berceau, dans une pièce qui était maintenant inondée de sang. L'une d'elle fit un pas en arrière, l'autre se précipita sur le bébé.
— Qu'est-ce que vous lui avez fait ?! S'exclama-t-elle avec colère, moins effrayée qu'elle aurait dû l'être.
— Rien, dit-il. Et vous, ou étiez vous ? Parce que c'est l'enfant de Kaido vous vous attendiez peut être à ce qu'il soit capable de se défendre tout seul contre les intrus ?
Personne ne lui répondit. Il insista.
— Et si on l'avait enlevé pendant que vous preniez votre pause ? Mh ?
La servante le foudroya du regard et se plaça entre lui et l'enfant, n'hésitant pas une seconde à le protéger de cet inconnu. Cette dévotion le persuada de laisser ces femmes tranquilles, elles se souciaient assez du bébé pour qu'il leur fasse confiance. Mais il se permit un petit sermon.
— Personne ne doit pouvoir approcher cet enfant sans autorisation, c'est compris ?
Elles restèrent silencieuses. Elles étaient trop occupées à contempler le sang dans lequel trempaient leurs vêtements.
— C'est compris ?! Insista-t-il.
Elles hochèrent la tête à l'unisson, soudain stupéfaites d'être encore en vie.
La plus téméraire des deux se pencha sur le bébé, le prit dans ses bras et lui susurra des mots rassurants qui calmèrent un peu ses pleurs.
King, satisfait par leur réaction, quitta enfin la pièce. A la fois soulagé de s'être prouvé à lui-même qu'il était toujours le monstre dont Kaido pouvait être fier et jaloux de la liberté de ce malheureux bébé.
Toujours la bonne ambiance chez Kaido.
J'avais hâte d'écrire ce moment là parce que si ça en a pas l'air, c'est très important pour la compréhension de la suite ce qui vient de se passer. King est malheureux. C'est capital.
Avec Queen, je me suis permis des libertés, comme j'avais déjà dit dans un autre chapitre qu'il n'avait jamais vu le visage de King, je n'ai pas dit qu'il le connaissait peut-être déjà. (Alors que c'est probable qu'il connaisse le passé de cobaye de King, puisqu'il se moque de son soi-disant goût pour la torture.)
Je me suis aussi permis de mettre un petit tâcle à Vegapunk (si vous n'êtes pas à jour dans le manga, spoiler alert) parce que ce mec mérite de se faire traîner devant une cours de justice pour tous les crimes qu'il a commis. Ca me saoule TELLEMENT que tout le monde oublie comment les séraphims ont été créés. Les recherches de Vegapunk c'est la mort de l'éthique, le gars il a plein de sang sur les mains (dont le sang de King) mais tout le monde lui pardonne. Alors qu'il vaut pas mieux que César. Moi, évidemment, je soutiens mon blorbo. OKAY c'est un méchant qui a du sang sur les mains aussi, mais si on l'avait pas traité comme une boîte de pétri pour le gouvernement mondial, bah il en serait pas là.
Vu le petit bout de chou que c'était. Comment on a pu lui faire du mal.
Bon, bref. Pardon.
Le prochain chapitre sera aussi un flashback, du côté de Kata cette fois. Mais il sortira pas avant le 7 Janvier je pense. Parce que les repas de famille, tout ça...
Tenez bon, 2024 va être sympa pour cette fic. A la prochaine !
