Clash sous la plaque
Le makonoïde était mort.
Pas de doute.
Ainsi que les meubles et les ordinateurs présents dans le bureau.
Ça n'avait pas pris longtemps, la créature n'avait pas exactement eu le temps de se cacher avant que Cloud ne le débusque.
Barret avait juste eu le temps d'attraper Yuffie par le bras et la garder avec lui que les jumeaux avaient déjà tranché le makonoïde en deux. Chacun.
Il ne restait qu'à calmer Cloud qui parcourait la pièce, cherchant une autre victime pendant que son frère essayait de l'attraper et de lui faire nettoyer son épée.
Parfois, Barret avait l'impression que diriger Avalanche était plus du baby sitting pour psychopathe que de la tactique militaire.
"Heu… Vous avez fini ?" demanda Red en passant la tête par la porte de la pièce.
"RED ! Mais personne ne m'écoute ici ?" Tempêta Barret, "tu devais rester avec Aérith et Cid !"
"On a eu le dernier squame," déclara Red. " Mais vous, vous avez fini ?"
"Zack calme Cloud" répondit Yuffie " on a… heu... du hachis." acheva-t-elle en montrant le cadavre de leur makonoïde.
Le fauve entra et s'assit sur le pas de la porte, bloquant très délibérément le passage.
"Bien. Très bien" déclara-t-il.
"Red, que se passe-t-il ?" demanda Barret d'un ton suspicieux.
"Aérith n'est pas blessée ?" s'inquiéta aussitôt Zack, accroupi près de Cloud.
"Elle va très bien" le rassura le fauve. "Cid a été touché. Elle s'occupe de lui."
"On les rejoint" déclara Barret en avançant vers le fauve.
"Non non non non !" protesta Red en se levant, se campant sur ses pattes.
Cette fois, Barret en était convaincu, Red lui cachait quelque chose.
Le lion de Cosmo mentait rarement.
C'était un compagnon de combat honorable, honnête parfois au point d'être un peu brutal, mais d'une sagesse rare et doté d'une magie puissante.
Et qui, de toute façon, ne savait pas mentir.
Barret inspira profondément, rassemblant toute son autorité de père dans son regard et sa voix.
"Red. Qu'est-ce qui se passe ?"
"Vincent est avec nous" répondit le fauve.
"Bien ! Et ?"
"Tu dois promettre de ne pas lui tirer dessus d'abord"
"Mais pourquoi je lui tirerais dessus ?" s'exclama Barret alors que ses amis se rassemblaient autour de lui.
"C'est Aérith qui m'a dit de te dire ça" répondit Red.
"Red. Pousse-toi"
"Promet."
Barret se frotta le visage de la main et inspira avant de répondre.
"Je promets."
"Mets la sécurité sur ton barillet" ajouta le lion de cosmo après un regard à la prothèse martiale.
Barret s'exécuta.
Red hocha la tête et lâcha sa dernière révélation d'une voix hésitante.
"Vincent est transformé en démon de trois mètres de haut et je crois qu'il est blessé mais il a pas l'air dangereux."
L'instant d'après, le fauve était reparti, ne laissant derrière lui que les étincelles de sa flamme caudale, trois membres d'Avalanche abasourdis et un indifférent.
"QUOI ?!" Rugit Barret.
Quand Barret rejoignit le reste de son équipe dans le couloir, il vit d'abord Aérith achever de soigner Cid, qu'elle avait adossé au mur. Le lancier blond le vit approcher et leva une main en guise de salut. Il était pâle, visiblement encore sous le choc de sa blessure, mais semblait conscient et cohérent.
Puis Barret vit le démon accroupi derrière eux. Même ainsi, il prenait toute la largeur du couloir, ses ailes drapées comme il pouvait sur ses épaules. Il ne semblait pas être dans une position confortable, ses jambes repliées sous lui, un bras qui pendait mollement. Il leva les yeux et Barret fit un pas en arrière, levant les bras sur les côtés pour empêcher ses équipiers d'avancer.
Oui, c'était bien les yeux de Vincent.
Le reste par contre...
"Par les couilles de Fenrir" murmura le colosse
"Ha, alors ça, c'est approprié comme juron" ricana Cid.
"Pourquoi dis-tu" commença Barret avant de baisser les yeux "HO ! Yuffie n'approche pas !" s'exclama-t-il.
"Bah, pourquoi ?"
"Red, emmène Yuffie et Cloud à l'autre bout du couloir !" ordonna Barret en levant un pouce vers l'arrière.
"Heu… oui Barret" obéit Red avant de pousser Cloud du bout du museau.
Barret se frotta le visage en grommelant avant de se tourner à nouveau vers Vincent, fixant obstinément son visage.
"Je croyais avoir TOUT vu depuis que suis à Midgar, j'avais tort."
"Là, c'est sûr, on voit tout." renchérit Zack.
Le démon eut un long grondement agacé qui mit de nouveau Barret sur ses gardes, mais il ne bougea pas de sa position.
Je pourrais avoir des photos ? demanda Jesse.
"Non" répondit Barret.
Bon. Ne pas paniquer. Une chose à la fois. Le plus urgent d'abord.
"Cid. Comment vas-tu ?"
"Comme une brochette," répondit le pilote.
"Il faut l'évacuer" déclara Aérith. J'ai coupé la tentacule mais je préfère l'extraire à l'infirmerie."
"Pas de poison ?" s'enquit Barret.
"Je n'ai pas vu de symptôme, mais j'ai déjà utilisé un esuna au cas où."
"Bien."
Deuxième urgence.
"Pourquoi ? Comment ? Peux tu redevenir humain ?" demanda-t-il au démon en le pointant du doigt.
"Il ne peut pas parler comme ça" expliqua Aérith sans se tourner, occupée à poser un bandage sur le mollet de Cid.
"Comment ça ?"
Elle haussa les épaules en achevant les soins et s'assura que Cid tenait le coup avant de se tourner vers Barret.
"Il n'a pas parlé en tout cas. Il grogne et il gronde, mais Red dit que ça ne ressemble pas au langage des lions de Cosmo."
Elle fixa le démon qui, rendu nerveux par les regards, essaya de s'envelopper dans ses ailes. Il poussa un grognement de douleur et son aile gauche retomba, pendant qu'il agrippa son bras de la main droite.
"Je crois qu'il est blessé" déclara Aérith en se levant pour approcher de lui.
"Aérith, non !" s'exclama Barret en faisant un geste pour la retenir.
Le démon recula en sifflant et elle stoppa net, montrant ses mains.
"Est-ce… est-ce que tu peux redevenir humain ?"
Le démon la fixa quelques secondes puis secoua la tête avant de montrer son épaule.
"Je vois. Laisse-moi regarder" demanda-t-elle doucement en approchant.
Vincent ne recula pas, mais se redressa, tendant la tête en arrière.
Exactement comme Cait essayait d'esquiver les caresses quand il n'était pas d'humeur, réalisa Barret. Il sentit Zack le pousser pour passer la tête entre le mur et lui et interpeller Aérith.
"Mon ange ? Je crois que tu le gênes !"
"Le gêner ?" répéta Barret.
Zack fit signe à Aérith de regarder en bas.
Ce qu'elle fit.
"Ho." fit-elle avant de relever les yeux vers le visage de Vincent. "C'est bon, je suis guérisseuse, crois moi, j'en ai vu d'autres."
"De cette taille ?" demanda Zack, incrédule.
Cette fois, le grognement qui échappa au démon était du pur embarras.
Ça signifiait que Vincent était donc probablement conscient de ce qui se passait autour de lui.
Conscient et avec assez de crocs et griffes pour faire deux Red.
Des années de guerre contre les squames n'avaient absolument pas préparé Barret à cette situation.
Cid laissa échapper un petit rire fatigué et un brin hystérique tout en dénouant l'écharpe qu'il portait toujours autour du cou, la jetant à Vincent.
"Couvre ta dignité."
Le démon lui jeta un regard abasourdi, mais ramassa le tissu entre deux griffes et l'observa d'un air dubitatif avant qu'Aérith le lui prenne, le couvrant rapidement.
"Voilà. C'est mieux ?"
Devant son hochement de tête, Aérith passa les mains sur l'épaule de Vincent, palpant avec précaution. Le démon se laissait faire, même si des grondements de douleur lui échappaient parfois et qu'elle voyait ses mains se convulser par à coup.
"Ce n'est pas cassé. Par contre c'est démi. Et très inflammé. Qu'est-ce que tu t'es fait ?"
Le démon la regarda fixement.
L'expression était exactement la même que Vincent affichait quand Yuffie ou Zack tentaient de le faire rire.
"Ha, c'est vrai. tu répondras plus tard. Je vais avoir besoin d'aide" déclara Aérith "je ne crois pas avoir assez de force pour te remettre l'épaule en place. Barret, tu peux poser ta main ici ?"
"Attends, ma belle" intervint Zack en enjambant les jambes de Cid.
Il s'agenouilla devant Vincent et lui présenta les paumes.
"Est-ce que je peux te tenir les mains ?"
Vincent le fixa d'un air pensif quelques instants.
"Tu risques d'avoir un réflexe" expliqua Zack "et avec tes griffes, ça peut être dangereux pour l'amour de ma vie."
Le démon glissa un regard rapide à la frêle guérisseuse et hocha la tête. Zack prit sa main droite puis ramassa la gauche avec autant de délicatesse qu'il put. Le mouvement arracha un sifflement de douleur au démon qui tenta de se dégager, mais Zack le tint fermement, croisant ses poignets pour mieux les tenir.
"Compte jusqu'à trois" conseilla Aérith en plaçant la main de Barret puis saisissant elle-même le biceps du démon.
Vincent baissa la tête en fermant les yeux, poussant un petit grognement.
Aérith et Barret poussèrent en même temps.
Les os du démon se replacèrent avec un ploc satisfaisant, accompagné du cri de douleur de Vincent ainsi que du bruit de ses ailes frappant le mur. Zack banda ses muscles pour le retenir et l'empêcher de se relever, grimaçant de l'effort. Il vit la queue de Vincent fouetter l'air, ses barbes acérées lacérant le mur derrière lui.
"Bienvenue au club du 'compte jusqu'à trois'" déclara-t-il " elle nous a tous fait ce coup là."
"Zack ?" fit la voix de son frère, visiblement alarmé par le cri de Vincent.
"C'est rien, Cloud ! je peux te lâcher ?"
Vincent hocha la tête et...
Se dégonfla.
Enfin, c'était l'interprétation de Zack. Ses cornes se scindèrent en plusieurs mèches qui retombèrent, ses ailes se drapèrent autour de lui, redevenant son éternel manteau rouge et Zack sentit les mains de Vincent se faire plus légère, moins griffues et surtout, beaucoup plus maigre.
Il le lâcha, voyant son image se troubler, sa silhouette rétrécir jusqu'à redevenir l'homme aux cheveux noir auxquel il était habitué.
"Comment ça se fait que tes fringues réapparaissent ?" s'étonna-t-il en soulevant un pan du manteau.
"C'est une limite" répondit Aérith en coupant la parole à Vincent, repoussant son manteau pour ouvrir sa chemise. "Tu ne pouvais pas attendre quelques minutes que j'ai fini ?"
Zack ricana en se levant, laissant sa fiancée houspiller son patient. Il jeta un petit regard à Cid qui semblait hésiter entre le fou rire et tourner de l'œil, puis à Barret qui mâchonnait visiblement quelques mots choisis sur la situation actuelle. Il passa à nouveau par-dessus Cid, effleurant l'épaule d'Aérith au passage, et s'interposa entre Barret et les blessés, le poussant en arrière d'une main aussi douce que possible.
"Barret. Attends. Plus tard, pas maintenant"
"Zack"
"Ni lui ni Cid ne sont en état" objecta Zack " et on n'a pas encore sécurisé le bâtiment."
Pour une fois, le hérisson brun était la voix de la raison et Barret dû l'admettre.
"Très bien. On en reparle à Seventh Heaven. Valentine ?"
Vincent releva les yeux, son expression soigneusement neutre.
"Oui, Lieutenant ?"
"Tu peux te lever ?"
"Oui, Lieutenant."
"Toi et Aérith, aidez Cid à s'installer dans l'ambulance. Toi, tu reviens après" ajouta Barret en pointant Aérith du doigt " toi, tu reste avec lui" acheva-t-il en pointant ensuite Vincent puis Cid.
La manœuvre fut assez pénible, particulièrement pour Cid.
Particulièrement dans l'escalier. Même appuyé sur l'épaule valide de Vincent et sur Aérith, il lui fallut plusieurs minutes pour descendre les quelques marches, jurant et pestant encore plus qu'à son habitude.
"Besoin d'une pause ?" suggéra Vincent une fois en bas.
"Je ferais une pause dans l'ambulance" marmonna Cid entre ses dents "plus vite on sera sorti de là, plus vite je serais posé."
Aérith eut un soupir mais ne le contredit pas et les trois équipiers furent vite dehors. Les SOLDATS étaient toujours là, empêchant maintenant les journalistes d'approcher.
"Ho… Il faut que j'appelle Shera avant qu'elle voit ça à la TV" marmonna Cid en ignorant les questions qui fusaient autour d'eux.
Elle est déjà au courant le prévint Jesse par l'entremise de leur module de communication.
"Drekaskítur 1" jura le pilote.
"Appelle-là en attendant que je revienne" lui conseilla Aérith en laissant Cid s'appuyer sur Vincent, le temps d'ouvrir la porte de l'ambulance et tirer le brancard en position. Il aidèrent le blond à s'installer dessus et Aérith vérifia que le bandage temporaire qu'elle avait posé tenait avant de tenter de remettre le brancard à sa place.
"Putain, j'y crois pas, il est là !" s'exclama une voix qui fit se tourner Vincent. "Rude ! Elena ! J'ai retrouvé Valentine !"
"Reno, tu tombes bien ! Aide-moi !" l'appella Aérith.
Le rouquin, étonnement, obéit aussitôt à l'ordre.
"Et bah Cid, c'est pas courant que tu te retrouves là !"
"Vas chier, Reno !"
"C'est bon, il va bien" plaisanta Reno en se tournant vers Vincent. "Où étais-tu passé ? On t'a cherché partout !"
"Il nous as rejoint à l'intérieur" répondit Aérith "avec le bras démi, si je peux ajouter."
Reno et Rude se mirent aussitôt quasiment au garde à vous sous le regard de la jeune femme.
Elle avait l'air déçue.
Ca semblait être très efficace sur les deux hommes.
"Est-ce que je peux savoir ce qui s'est passé au juste ?"
Reno balbutia quelques secondes avant de désigner Elena.
"C'est sa faute ! Elle a oublié de lui filer l'armure !"
"Reno !" protesta Elena.
"Tu es son aîné, c'est à toi de faire attention" déclara Aérith d'une voix douce, mais apparemment bien plus efficace que n'importe quel hurlement de colère.
"Mais.. maiiiiis" reprit Reno.
"Allez, laissez-moi les embarquer tous les deux, je dois y retourner, la zone n'est pas encore sécurisée."
"On vient" déclara aussitôt Reno.
"Mais, notre rôle" commença Elena avant que Reno ne l'interrompt.
"Tu en parleras à Tseng" grommela Rude en tendant galamment le bras à Aérith pour l'aider à monter dans l'ambulance.
Elle vérifia que Cid était bien installé, relevant le dossier du brancard, puis assit Vincent sur le siège à côté.
"Comment te sens-tu ?"
"Ça va" commença-t-il en faisant jouer ses doigts.
"Tst ! Interdit d'utiliser ton bras jusqu'à ce que j'ai pu y regarder de plus prêt" déclara la jeune fille.
"Comment ça se fait que tu aies de l'autorité sur les Turks ?"
"Tseng est… disons un ami d'enfance." répondit Aérith avec un petit sourire malicieux "surveillez vous mutuellement, si l'un de vous d'eux à un malaise, appelez moi sur le PHS ou avec les modules."
"Oui, Aérith" marmonna Cid, déjà en train de composer un numéro sur son propre PHS. "Já, Shiera ? Já, já nei, Shi… Shiera… Róaðu þig 2."
Aérith s'éclipsa et referma la porte de l'ambulance derrière elle, laissant ses deux équipiers dans un calme relatif.
Relatif car la discussion entre Cid et Shera semblait orageuse. Il entendit son nom à un moment, la voix de la jeune femme à travers le haut-parleur du téléphone se fit plus émotive et…
Il décida de cesser d'écouter.
Il n'avait pas réalisé à quel point son audition était devenue sensible depuis qu'il était sorti du Ma… de l'hôpital. Désormais, dès qu'il n'y avait pas de bruit parasite, il pouvait entendre ses équipiers parler à l'autre bout de Seventh Heaven.
Les Anciens savaient pourtant à quel point des années en tant que sniper chez les Turks avaient endommagé son audition. Même avec un silencieux, certaines armes faisaient beaucoup trop de bruit.
La voix de Cid se calma, la conversation se faisant plus cordiale, selon les critères des Highwinds, et il finit par raccrocher avec un soupir, appuyant son front sur le téléphone dans son poing.
"Ça va ?"
"Oui… Oui, ça ira. Ça fait un mal de chien, mais ça ira."
Le pilote inspira profondément pour se calmer et tourna légèrement la tête vers Vincent.
"Merci pour tout à l'heure"
"Ce n'est rien."
"Hm, rien qu'il dit." marmonna Cid avant de laisser échapper un autre grognement de douleur.
"Tu veux que j'appelle…"
"Non, non" le coupa Cid " d'habitude je jure comme un lancier pour supporter la douleur, mais je voudrais pas te choquer."
Vincent haussa un sourcil amusé.
"Cid."
"Hm ?"
"J'étais Turk" lui rappela le brun.
Cid tourna la tête vers Vincent, un peu étonné que celui-ci lui parle de son passé.
"Tu aurais dû m'entendre la première fois que mon partenaire a dû m'extraire une balle" expliqua Vincent avec un petit sourire.
Quand Aérith revint à l'ambulance, elle constata avec surprise que les SOLDATS postés autour s'étaient légèrement éloignés.
"Que se passe-t-il ?"
"Mademoiselle, je n'entrerais pas si j'étais vous, on a entendu des choses… inappropriées."
Ha. Cid.
"Il est Burmécien," déclara Aérith en rouvrant la porte arrière de l'ambulance. "Ça va vous deux ?"
Cid était toujours pâle, mais semblait moins nerveux et lui adressa un petit sourire pour la rassurer. Vincent, lui, n'avait pas bougé et gardait sagement sa main mutante sur ses genoux. Il avait toutefois l'air… pas si innocent que ça. Le genre d'expression subtile qu'Aérith avait déjà vu chez Tseng quand il buvait un verre avec ses collègues 3.
"Vous avez choqué les SOLDATS" déclara la jeune femme en grimpant, venant inspecter leurs bandages "je ne savais même pas que c'était possible."
"Il m'a appris quelques insultes en Wutan." ricana Cid. "Je pensais pas ça d'eux, ils ont toujours l'air tellement coincés."
"La mission ?" s'enquit Vincent.
"C'est fini. Pas de squames supplémentaires, mais j'ai commis une légère erreur tactique" admit Aérith en grimaçant.
"Du genre ?" demanda Cid.
"Reno et Rude ont mis le feu aux corps des squames. Le seul morceau qu'on pourra récupérer, c'est celui-là" expliqua Aérith en désignant le fragment de tentacule dans le mollet de Cid.
"Je me sens honoré"
"C'est courant, ça ?"
"Heu… Barret m'a interdit de répondre à tes questions tant que tu ne te seras pas expliqué" s'excusa Aérith avec un sourire. "Tenez le coup, on rentre."
Le retour à Seventh Heaven fut rapide. Aérith avait visiblement appris à conduire à Midgar 4 et malgré le gabarit de l'ambulance, maniait le klaxon avec autant de dextérité que le volant. Grâce à la sirène de l'ambulance et sa peinture facilement reconnaissable, les Midgariens s'écartèrent obligeamment de son chemin et ils furent rapidement dans les Taudis du secteur 6. Toujours avec délicatesse, Aérith gara l'ambulance en marche arrière et sortit du véhicule, au moment où la porte arrière s'ouvrait sur une Shera un brin fébrile.
"SIDDHE HAIFIN !"
"Tu m'as déjà gueulé dessus, Shera" marmonna Cid.
Aidée par Aérith, Shera sortit le brancard de ses rails, déplia ses roues et le sortit de l'ambulance.
Vincent les suivait, fermant la porte après lui. Les deux jeunes femmes poussèrent le brancard vers l'infirmerie, Shera continuant de houspiller Cid.
"Vincent, vient !" lança Aérith par-dessus son épaule.
Il obéit à contre-coeur, poussant la porte battante après les deux femmes, se préparant à affronter une infirmerie stérile et immaculée.
Et il resta stupéfait sur le pas de la porte.
Les murs étaient bleu pâle, couverts de fresques un brin naïves, de fleurs et de chocobos. Il y avait des autocollants un peu partout, divers porte-bonheurs suspendus au cadre des fenêtres et qui tintaient sous l'effet du ventilateur de la pièce.
Les deux lits n'étaient pas des lits d'hopitaux, mais similaire à ceux des chambres, couvert de draps non pas d'un blanc immaculé ou de ce vert qui donnait désormais la nausée à Vincent, mais à motifs, rayés, à carreaux ou à fleurs.
Ça ne ressemblait pas à un laboratoire.
Ça ne ressemblait même pas à une infirmerie.
Et c'est avec un léger soulagement que Vincent s'assit sur un des lits, pendant qu'Aérith et Shera transféraient Cid sur l'autre. Aérith s'affairait à se désinfecter les mains et à rassembler le matériel médical ( ou avait-elle trouvé des scalpels à manche rose 5 ?!) pendant que Shera défaisait le pansement de Cid et lui retirait ses godillots.
"Ho, Bahamut" jura-t-elle en voyant la blessure.
"Vas te désinfecter les mains" déclara Aérith en approchant une desserte en bois.
Elle prépara une injection et Vincent détourna vivement le regard, observant attentivement un autocollant de Mog collé sur la tête du lit à la place. Shera revint, enfilant ses gants.
"Tu n'en rates pas une" lança- t-elle au blond.
"Ça n'arrive pas si souvent !" protesta Cid.
"Vous pourriez arrêter de vous disputer cinq secondes ?" réclama Aérith en reposant la seringue après injection. "Cid ? Tu sens quand je touche là ?"
"Non" répondit le pilote.
"Allonge-toi et ne regarde pas"
"Faudrait me payer cher" grommela Cid en s'allongeant, aidé par Shera.
Vincent ne vit pas les deux femmes extraire la tentacule, ou pour être plus exact, il refusa de regarder les deux femmes opérer, mais il aperçut Shera s'éloigner rapidement, un haricot en inox dans les mains et disparaître à nouveau par la porte battante. Pendant ce temps-là, Aérith faisait appel à la magie, ses mains illuminées d'un vert scintillant.
Esuna. Soin. Récupérer peut-être ?
Vincent n'avait jamais réussi à faire évoluer sa matéria de guérison au-delà du sort de base, il n'arrivait pas à identifier ce que la guérisseuse faisait exactement, mais Cid sembla se détendre et reprit des couleurs rapidement.
"Interdiction formelle de te lever jusqu'à demain."
"Je peux au moins…"
"Non." répliqua Aérith avec douceur et un sourire.
Shera revint en retirant ses gants et jeta un petit regard à Vincent avant de venir aider Aérith à débarrasser le lit du matériel de soin. Pendant qu'Aérith jetait les compresses tachées de sang et rassemblait ses affaires, Shera aida Cid à se débarrasser de son uniforme, l'aidant à se mettre à l'aise.
"C'est bon Shera, pas le pantalon !"
"Tu as un caleçon en dessous, non ? Où est passée ton écharpe ?"
Vincent sursauta et plongea la main dans sa poche, sortant l'écharpe du pilote. C'était en général là qu'échouaient les objets qu'il ramassait quand il… bref.
"C'est moi qui l'ait" intervint-t-il en la tendant à Shera.
"Il peut la garder !" s'exclama précipitamment Cid avant d'étouffer un bâillement.
Shera fixa alternativement les deux hommes, sans comprendre l'échange et se tourna vers Aérith qui tentait, sans trop faire d'effort, de camoufler son fou rire derrière sa main.
"Je t'expliquerais" promis-t-elle "tu peux dormir, Cid."
"Hmmm" marmonna le pilote, déjà bien assoupi.
Shera posa le tas des vêtements de Cid sur un des bureaux pendant qu'Aérith se tournait vers Vincent.
"A toi !"
Vincent hocha la tête avec appréhension, commençant à déboucler les attaches de son manteau.
"Tst ! Qu'est-ce que je t'ai dit ? Ne bouge pas le bras !" l'arrêta Aérith en chassant ses mains, prenant le relais.
"Que s'est il passé ?" demanda Shera en venant l'aider.
"Il s'est démis l'épaule"
"Comment as-tu fait ?"
"En tirant avec une arme des Turks. Deux fois" précisa Vincent.
Aérith laissa échapper un petit son désapprobateur tout en achevant de retirer le manteau. Elle essaya ensuite de défaire la griffe sur le bras gauche de Vincent mais celui-ci eut un geste de recul, par réflexe.
Immédiatement, les deux femmes reculèrent d'un pas, levant les mains devant elles. Il les regarda faire, légèrement confus.
"Que…"
"Nous n'allons pas te faire de mal. J'ai juste besoin de voir à quel point ton épaule est abîmée" reprit Aérith d'une voix douce. "Est-ce que je peux retirer ta veste ?"
C'était… étonnamment similaire à la façon dont Zack lui avait proposé de le tenir. Et Vincent avait l'impression que dans les deux cas, s'il avait refusé, ils l'auraient écouté. Il finit par hocher la tête d'un mouvement sec et Aérith avança à nouveau, retirant les attaches de la griffe pendant que Shera déboutonnait sa veste.
"Pas… être beau à voir" marmonna-t-il, la gorge sèche.
"Comment ça ?" demanda Shera en ouvrant le tissu.
Il l'entendit étouffer une exclamation d'horreur quand son torse fut dévoilé. Cid releva la tête à ce son et elle se tourna vers lui, le rassurant à mi-voix en Burmécien. Aérith resta quelques secondes immobiles, suivant les différentes cicatrices du regard, une expression neutre sur le visage. Les traces de balles au niveau de son coeur étaient les plus évidentes, rondes, larges comme la main et cernées de tissus cicatriciels, contrastant avec les longues lignes tracées sur sa peau. Les deux femmes détaillèrent les cicatrices en silence, la forme de Y sur son torse, les différentes cicatrices sur ses bras, identiques à gauche et à droite malgré les différences de morphologie. Shera s'écarta d'un pas et se détourna. Vincent crut qu'elle allait être malade, mais elle se contenta de retirer sa blouse sans un mot, la jetant en boule sur le tas de vêtements avant de revenir, son expression soigneusement composée et professionnelle.
"Est-ce que ça va mieux ?" demanda-t-elle en exposant bien ses mains.
Vincent réalisa qu'en effet, ça allait mieux. Il était impossible de se sentir oppressé en face de quelqu'un avec un pull jaune chocobo.
Il laissa échapper une expiration explosive en passant sa main droite dans ses cheveux.
Il n'avait même pas réalisé qu'il retenait son souffle.
Aérith acheva de retirer les pièces d'armures pendant que Shera enlevait sa veste, jetant un petit coup d'œil dans son dos avant de se redresser, pliant le vêtement pensivement.
"Je te jure que Tseng va en entendre parler" grommela Aérith en palpant l'épaule de Vincent.
"De quoi ?" s'inquiéta le brun.
"La boulette des Turks" répondit Aérith " c'est pas un bleu que tu as, c'est la carte de Gaïa."
Vincent jeta un coup d'œil à son épaule et admit intérieurement que la comparaison se valait. Les impacts de recul n'avaient pas exactement frappé au même endroit, donnant de gros bleus sombres. La main d'Aérith n'arrivait même pas à couvrir le plus petit, au niveau de sa clavicule. Elle usa d'un de ses sorts de guérison et les bleus se dissipèrent, passant du mauve au vert jaune.
"Je suis étonnée que tu n'ais rien de cassé" nota t-elle en palpant avec précaution "lève doucement le bras ?"
Vincent obéit, faisant quelques mouvements suivant les indications d'Aérith qui se redressa, posant pensivement son index sur ses lèvres.
"L'articulation est bien en place, mais tu dois avoir mal… Je parie que si je te parle de l'échelle de douleur, ça ne te dira rien ?"
"En effet."
"Est-ce que tu veux un analgésique ?" proposa-t-elle.
"C'est une injection ?" demanda Vincent.
"Oui"
Vincent déglutit.
"Alors non."
"Est-ce que les pilules fonctionnent sur toi ?" demanda Shera.
"A très haute dose seulement"
"Celles de Zack ou celles de Cloud ?" demanda Aérith à sa collègue.
"Zack. L'anti douleur de Cloud ferait planer le secteur 6 en entier, Wall Market compris."
Aérith hocha la tête et alla ouvrir un placard, fouillant dedans pendant que Shera sortait de quoi bander l'épaule de Vincent. La porte de l'infirmerie s'ouvrit à ce moment sur Zack et Barret, visiblement mécontent et toujours en uniforme.
"Valentine, il faut que je te…"
Il stoppa dans son élan en voyant Vincent torse nu et le sniper entendit le juron de Zack quand celui-ci, sur les pas de Barret, ne put s'arrêter à temps et lui rentra dedans.
"Barret ! Zack !" s'exclama Aérith en se redressant. "Ouste !"
"Oui, Mamour" répondit Zack.
"Emmène Barret !" ordonna la guérisseuse.
"Tout de suite !"
"C'est bon Vincent" reprit Aérith, plus calmement après que les deux hommes soient repartis, si vite que la porte se balançait encore après eux. "Tout va bien."
Vincent s'aperçut qu'il s'était de nouveau tendu, prêt à bondir hors de la pièce et se força à se calmer. Shera approcha à son tour, montrant les bandages qu'elle avait sorti.
"Il va falloir t'immobiliser le bras un jour ou deux. Je peux approcher ?"
Vincent hocha la tête, laissant les deux jeunes femmes s'affairer autour de lui. C'était étrange de les entendre commenter tout ce qu'elles faisaient, le prévenant à l'avance qu'elles allaient le toucher, s'assurant qu'il n'était pas surpris par leurs gestes.
C'était étrange mais… bienvenue. Il ne se sentait pas à leur merci et avait l'impression de rester en contrôle de la situation.
Ce qui amenait l'autre question: Ou avaient-elles appris à agir comme ça ?
Avec les jumeaux ?
"Voilà" finit par déclara Aérith en admirant son travail. "Ordre du docteur: interdit d'utiliser ton bras jusqu'à demain. Avale ça"
Elle déposa un cachet dans la main de Vincent puis alla lui chercher un verre d'eau.
"Qu'est ce que c'est ?" demanda Vincent.
"Un anti douleur pour SOLDAT " répondit Shera avant de se tourner vers le tas de vêtements sur le bureau. "Spécialement dosé pour les organismes augmentés."
"C'est ce que Zack utilise. Il en prend habituellement deux, mais je préfère commencer avec un et voir si ça suffit ou si tu en a besoin d'un deuxième."
Aérith lui tendit le verre d'eau et il hésita brièvement avant d'accepter. Il prit le cachet, bu le verre d'eau et le rendit à Aérith.
"Tu devrais retirer tes bottes et t'allonger, l'effet est en général rapide."
Vincent se pencha pour atteindre ses pieds et commença à retirer ses bottes d'une main, comme il pouvait.
"Rapide com…"
Aérith et Shera le retinrent de justesse comme il s'effondrait en avant.
"On aurait peut-être dû ne lui en donner qu'un demi ?" suggéra Shera.
Vincent se réveilla il ne savait pas combien d'heures plus tard.
Un moment, il crut être de retour dans le cercueil, sentant son bras bloqué par quelque chose mais quand il ouvrit les yeux, ce fut pour voir un plafond couleur crème et un large ventilateur qui brassait l'air.
Il s'assit.
Le regretta.
Se recoucha avec un grognement et resta quelques secondes à tenter de maîtriser sa nausée.
Son bras gauche était toujours bloqué et il tenta de le redresser, mais une pointe de douleur et un petit bruit de déchirure le firent stopper et baisser les yeux.
Ah. Oui. La bande.
Son bras avait été démi.
Il s'était transformé.
Les autres l'avaient vu.
C'était un désastre.
Mais au moins, sa nausée s'était dissipée et il se rassit, plus lentement cette fois.
Quoi qu'il y ait eu dans la pilule qu'Aérith lui avait donnée, c'était la dernière fois qu'il la prenait.
Une des deux infirmières avait dû lui retirer son bandeau avant de le coucher et ses cheveux lui tombaient dans les yeux. Il les rabattit en arrière de sa main libre, regardant autour de lui.
Cid dormait dans le lit d'à côté.
Mais pas seul.
Shera était avec lui.
Elle était encore toute habillée et blottie contre le blond, mais elle s'était allongée par-dessus les couvertures, la tête au creux de l'épaule de Cid et un bras passé autour de lui.
Cid, lui, dormait sur le dos, une main posée sur le bras de Shera, l'autre dépassant de sous elle. Il allait probablement se réveiller avec des fourmis jusque dans les doigts.
Ni l'un ni l'autre ne semblaient complètement détendus dans leur sommeil.
Vincent repoussa sa couverture et fit passer ses jambes par-dessus le lit, notant qu'il avait été débarrassé de ses chaussures et chaussettes, mais que les deux femmes n'avaient pas jugé bon de lui retirer son pantalon. Tant mieux.
Il entendit un miaulement désespéré venant du couloir.
Cait.
Ce chat avait un talent incroyable pour savoir quand il était réveillé et venir réclamer nourriture, jeu ou calin. Il se leva, décidé à aller intercepter le chat avant qu'il n'arrive à ouvrir la porte battante.
Ce fut à ce moment que Cid se réveilla, avec les mots qu'il grommelait à chaque réveil depuis un mois:
"Valentine, ton chat…"
"J'y vais" répondit Vincent.
Il poussa la porte de l'épaule et baissa les yeux sur le chaton qui laissa échapper un miaulement perçant, le regard amoureusement levé vers son maître.
"Shhh.. shhh baka neko 6" murmura Vincent en le ramassant d'une main, retournant dans l'infirmerie.
La petite créature se calma aussitôt et se pelotonna au creux de son coude, ronronnant comme un générateur miniature. Comment une aussi petite chose faisait autant de bruit dépassait Vincent.
Il ne réalisa qu'il était retourné dans l'infirmerie qu'en voyant Cid à demi tourné vers Shera, lui caressant les cheveux d'un air inquiet. Le blond releva la tête en entendant Cait ronronner puis baissa de nouveau les yeux vers Shera, triturant les mailles de son pull, semblant hésiter à parler.
"Elle… s'inquiète quand je suis blessé. C'est la seule façon qu'elle a d'arriver à dormir quand je suis à l'infirmerie" expliqua-t-il d'un ton bougon.
Vincent hocha la tête. Il n'arrivait pas vraiment à déterminer quelle était la relation entre Cid et Shera. Elle portait son nom de famille, en plus du sien mais n'était définitivement pas Burmécienne. Elle n'avait pas leur peau de lait ou leurs cheveux et yeux clairs, mais parlait couramment leur langue. Il avait pensé qu'ils étaient époux, mais ils faisaient aussi chambre à part et ne partageaient que rarement un geste tendre, passant en général leurs journées à se disputer. Cid lui apportait du thé quand elle travaillait tard, et elle l'aidait parfois dans ses réparations, ou ils s'arrangeaient toujours pour faire leurs corvées ensemble, le tout en se chamaillant ou en Burmécien.
Parfois les deux.
Et elle était endormie dans ses bras, dans son lit, dans l'infirmerie.
Plus pour longtemps, car elle s'étira en murmurant avant de lever la tête à son tour, clignant des yeux.
"Hm… Siddhe ?"
"Ja, Shiera" répondit Cid en se tordant le cou, cherchant quelque chose autour de lui. "Hvar eru gleuraugun thin 7?"
"Á skrifborthinu 8" répondit la jeune femme en se frottant les yeux.
"Vincent, tu peux lui passer ses lunettes ?" demanda Cid en montrant le bureau.
Le sniper suivit le geste des yeux et obtempéra, mais du poser Cait le temps de prendre les lunettes soigneusement posées sur une pile de livres médicaux. Les miaulements déchirants du chaton achevèrent de réveiller Shera qui s'assit, louchant sur l'animal d'un air mal réveillé. Vincent lui apporta les lunettes et elle plissa de nouveau les yeux avant de les reconnaître et de les enfiler.
"Merci, Vincent" déclara-t-elle en les ajustant avant de lever les yeux vers lui "comment te sens tu ?"
Le brun s'agenouilla de nouveau pour ramasser Cait tout en cherchant ses mots.
"A ce point là ?" murmura Shera, glissant ses pieds dans ses chaussures. "Nausée ? Migraine ?"
"Nausée. Mais c'est passé." répondit Vincent.
"Et ton bras ?" demanda-t-elle en se levant, tirant sur son pull.
"Ça va mieux"
Cette fois, la jeune femme eut un regard dubitatif mais ne posa pas d'autres questions, se tournant vers Cid pour lui faire subir le même interrogatoire.
"Ça va, ça va, je vais bien" finit-t-il par ronchonner "c'est rien…"
"Tu veux que je tape sur le trou pour voir ?"
Et ils étaient repartis dans leurs disputes.
La porte se rouvrit, sur Aérith cette fois, qui tenait des vêtements dans les bras. Elle eut un regard amusé pour le couple qui se disputait avant d'approcher de Vincent.
"Réveillé ?"
"Oui. Ça va" déclara-t-il rapidement avant qu'Aérith ne commence à lui poser des questions.
La jeune femme sourit et donna une rapide caresse à Cait, lui ébourrifant la fourrure avant de reprendre.
"Je suis désolée, Vincent, mais Barret et Reeves veulent te parler. Je n'ai pas réussi à les faire attendre plus longtemps."
Vincent hocha la tête. Il n'avait plus le choix visiblement. Il vit Aérith choisir un des vêtements qu'elle tenait et le tendit à Shera.
"Tiens. J'ai amené des vêtements pour vous deux."
"Merci" fit Shera avant d'enfiler le tee shirt d'autorité à Cid.
"Je peux encore m'habiller seul" protesta le blond.
"Besoin d'aide ?" demanda Aérith en levant les yeux vers Vincent.
Elle tenait un de ses tee shirt, qu'elle avait elle-même amené un matin avec les vêtements promis par Gast. La grande majorité ne lui appartenait pas à l'origine, remplaçant probablement ceux qui avaient été jugés trop vieux ou abimés pour être portés.
Celui-ci portait le logo de l'équipe des Adamantaimai sur le devant et était assez large pour deux comme Vincent. Il regarda son bras bandé et le bougea légèrement. La douleur était supportable.
"Peut être que je n'ai plus besoin de…"
Aérith sourit, le regard inflexible.
Vincent soupira et se pencha en avant, la laissant lui enfiler le tee shirt.
Il en avait connu une comme ça, ce n'était pas la peine d'essayer de la faire changer d'avis.
Une fois Vincent plus décent, Aérith l'emmena hors de l'infirmerie.
Ils passèrent devant le bureau de Jessie et Aérith y toqua par la porte entrouverte. La jeune femme, assise à un banc de travail, se tourna et vit Aérith lui faire un signe de tête. Elle se leva, reposa son blouson sur Wedge qui sommeillait sur le canapé et les suivit.
"Quelle heure est-il ?" demanda Vincent après un regard par la fenêtre, réalisant que les lumières du Taudis étaient éteintes.
"Presque onze heures du soir" répondit Jesse.
Cinq heures de sommeil donc.
Cinq heures à ne pas savoir ce qui se passait autour de lui.
Il ne reprendrait plus jamais cet analgésique.
Aérith l'accompagna dans la salle commune où se trouvaient déjà les jumeaux et Barret, assis devant la TV.
"Zack. Barret." appela doucement Aérith pendant que Jessie disparaissait dans le bureau de Reeve.
Les deux hommes se tournèrent et le colosse se leva lentement, dardant un regard méfiant sur Vincent. Zack, par contre, semblait inquiet et jetait des petits coups d'œil à son frère, endormi contre le dossier, Red blottit sur ses genoux. Zack posa un doigt sur ses lèvres et Vincent hocha la tête.
"Bureau de Reeve" marmonna Barret en le montrant du pouce.
Il fronça les sourcils, fixant quelque chose derrière Vincent, lequel se tourna à demi, à temps pour voir Yuffie passer près de lui, pieds nus et silencieuse.
"Quoi ?" murmura-t-elle quand Barret lui fit les gros yeux.
"C'est pas le spectacle, ici" gronda son aîné.
"Tu vas pas aimer, alors, Shera et Cid arrivent" rétorqua l'adolescente.
Et en effet, les voix des deux derniers de l'équipe s'élevèrent dans le couloir.
"Tu ne devrais pas marcher !"
"Pas moyen que je rate les explications !"
"Par les boules de Ramuh, ça suffit vous deux, Cloud DORS" siffla Zack entre ses dents en allant vers la porte.
Jessie ressorti du bureau et fit signe à Vincent de venir, lui prenant délicatement Cait des bras quand il fut assez proche.
Vincent entra.
Le bureau lui sembla soudain minuscule.
Il y était déjà entré, il savait combien il était étroit, malgré le peu qu'il y avait dedans, mais il dû se forcer à prendre plusieurs profondes respirations avant d'avancer, sous le regard inquisiteur de Reeve.
Leur chef semblait épuisé. Il avait retiré sa veste et sa cravate, relevé ses manches et une cafetière lui servait de presse papier à sa droite, mais il se redressa quand Vincent approcha.
"Vincent. Assieds toi."
"Je ne préfère pas. Monsieur" ajouta Vincent.
Le bureau sembla encore plus petit quand Barret entra à son tour, passant entre Vincent et le bureau pour se tenir près de Reeve, croisant les bras.
Lui avait l'air plus furieux que fatigué. Ça allait être houleux.
Vincent recula d'un pas, son dos touchant le mur d'en face.
"Faites moi de la place" grommela Cid en entrant à son tour, boitant malgré Shera qui tentait de le faire s'appuyer sur elle.
Il se laissa tomber sur le siège le plus proche de la porte avec un grognement de soulagement et Shera leva les mains au ciel avant de tourner les talons, ressortant du petit bureau.
Vincent commençait à sentir le début d'une crise de panique l'envahir et il prit à nouveau une profonde respiration, tentant de se calmer.
"Je ne sais même pas par où commencer" déclara Reeve.
"Moi si. Tu es dangereux ?" demanda Barret.
"Barret !" s'éleva la voix d'Aérith.
Vincent tourna la tête vers la porte, restée ouverte.
Aérith s'y tenait avec Zack, Yuffie et Jessie essayant de voir par-dessus son épaule, tous quatre affichant différents degrés d'inquiétude.
"Il s'est transformé en… je ne sais pas quoi" déclara Barret en montrant Vincent du doigt "je te rappelle que quand les gens se transforment dans cette ville, c'est notre BOULOT de les achever."
"C'est une limite !" protesta Aerith.
Ce qui était vrai.
Ce qui n'était pas non plus quelque chose de très connu hors de certains cercles.
"Comment le sais-tu ?" s'étonna Vincent.
"On l'a étudié en cours" répondit Aérith, ce que Yuffie confirma de moult hochements de tête.
"En…" répéta Vincent, abasourdi.
On apprenait ce genre de choses à l'école maintenant ?
"Entre se transformer en… en démon et avoir un sursaut de force désespéré, il y a un monde !" protesta Barret.
"Certains peuples ont une limite différente" intervint Cid à son tour tout en massant sa cheville, posée sur son genou. "Il y en a c'est magique, d'autres physiques. D'autres les deux."
Tout le monde se tourna vers Cid, surpris de son intervention en faveur de Vincent.
Y compris Vincent.
Il ne s'était pas attendu à ce que Cid en sache autant sur les limites de clan. D'un autre côté, Vincent n'avait jamais vu la limite des Burméciens, mais connaissant leur pouvoir destructif en temps normal, il préférait ne pas titiller le dragon.
"Alors ?" reprit Barret.
"C'est… C'est une limite" admit Vincent en repoussant son rideau de cheveux en arrière, essayant de se souvenir comment respirer.
"Tu la maitrises bien ?" ajouta le blond.
Encore une question délicate. Une que Vincent se posait depuis qu'il était sorti du Manoir Shinra.
"Avant… Avant oui. C'est plus… difficile maintenant."
"Ton bras…. c'est lié ?" demanda Reeve en désignant le bras bandé caché sous le tee shirt trop grand.
"Je ne comprends pas." commença Vincent. "Je n'arrive pas à le… Ça ne disparaît plus depuis…"
"Depuis quoi ?" reprit Barret.
"Hé."
Tout le monde se tourna vers Zack. Le brun entra à son tour, s'approchant de la chaise de Cid.
"Allez-y doucement avec lui."
"Zack, ce bureau est une carte postale" rétorqua Reeve d'une voix fatiguée, "on y met un timbre et une adresse, encore moins cinq personnes. Sors."
Zack obéit à contre-coeur, rejoignant Aérith qui posa sa main sur son bras, l'implorant de se calmer du regard.
"Vincent" reprit Reeve en sortant une pile de dossier de sous la cafetière "je sais que tu nous mens. Je sais que tu as un lien avec un Turk dénommé Makoto Hamasaki, naturalisé sous le même nom que toi il y a presque quarante ans."
Allons bon. Il fallait qu'il ait une petite discussion avec Gast concernant la procédure pour faire disparaître une identité quand on en créait une nouvelle. Ceci dit, il n'avait pas pensé que Reeve irait jusqu'à fouiller aussi loin dans les fichiers de l'immigration.
"Un Turk qui a été déclaré mort à la suite d'une mission à Nibelheim il y a trente ans. Et dont le certificat de décès est signé par Hojo en pers…"
Le bruit que firent la bande de maintien et le tee shirt de Vincent en se déchirant firent bondir Barret en avant, interposant son bras cybernétique entre Vincent et Reeves.
Vincent sentit une douleur vive dans son épaule et une main lui attraper le poignet, les deux sensations le stoppant net. Il se figea, laissa échapper une expiration explosive et tourna la tête vers celui qui le retenait.
C'était Cid.
Sa prise était ferme, mais il ne serrait pas, se contentant de retenir Vincent par le poignet. Le brun le regarda, surpris de son intervention et le blond se contenta de secouer doucement la tête de gauche à droite, sans faire de geste brusque avant de se tourner vers Barret.
"Barret, recule."
Le colosse plissa les yeux, mais obéit, retournant près du bureau de Reeve. Cid tira doucement sur le bras de Vincent, attirant son attention à nouveau.
"Calmé ?"
Le brun inspira et hocha la tête. Sentant qu'il se détendait, Cid le lâcha avant de se tourner à nouveau vers Reeve et Barret.
"Je… je m'excuse…" commença Vincent.
"Je crois qu'il faut appliquer la procédure Cloud autour de Vincent" déclara Cid.
"Ouais "renchérit Zack du pas de la porte. "Définitivement. Laissez le tranquille."
"Zack, j'ai besoin de réponses..." commença Reeves
"Mais vous avez pas compris ?" s'exclama Zack en faisant un pas en avant. "Il sort d'un labo !"
Les murs se refermèrent sur Vincent.
Il vit rouge.
"Zack, recule !" Ordonna Cid.
"Oh, merde !"
"Barret ! Non"
"Ecartez-vous" ordonna soudain Aérith.
Une main, petite, et délicate se posa sur son bras humain, l'entrainant à sa suite.
"Par ici, vite !"
Vincent obéit. Il devait sortir. La boite se refermait sur lui, les murs devenaient blancs et froids. Il bouscula la chaise de Cid, sentit un choc sur son épaule quand il se cogna à Zack en passant, vit Yuffie reculer d'un bond, mais la jeune fille qui lui tenait le bras ne stoppa pas, le tirant à sa suite.
"Dehors. On va dehors," répétait-elle sans le lâcher "on y est bientôt, on arrive."
La porte de la cour s'ouvrit et Vincent tituba à l'extérieur, manquant de rater les marches du porche. Il sentit Aérith lui lâcher la main, le laissant s'éloigner de quelques pas.
Il était dehors.
Le peu de son cerveau qui parvenait encore à réfléchir lui signala qu'il n'était que sous un toit très haut, mais le reste fut simplement soulagé que celui-ci n'allait pas lui tomber dessus. Il baissa les yeux, regardant ses mains.
Noires toutes les deux.
Son dos craquait, réalisa-t-il. Ses ailes tentaient de sortir.
Les morceaux de son masque tentaient de se rassembler sur son visage, flottant à la lisière de son champ de vision.
Ça recommençait.
"Vincent" l'appella doucement Aérith.
Il se tourna vers elle, réalisant qu'il la voyait parfaitement malgré les ténèbres. Elle s'était agenouillée sous le porche, empêchant d'un geste les autres de sortir avant de se tourner à nouveau vers lui, un sourire paisible aux lèvres.
"Viens t'asseoir."
Vincent essaya de répondre que ce n'était pas prudent, mais sa mâchoire refusa de coopérer, ses crocs s'étirant dans sa bouche.
"Viens" répéta Aérith, plus fermement cette fois.
Il fit un pas vers elle.
Puis un autre.
Elle le fit asseoir, s'interposant entre lui et le reste d'Avalanche.
"Respire. Nous sommes dehors. C'est bon…"
"Les.. voisins…"
"Ont l'habitude d'entendre des bruits bizarres venant de la maison. Il fait trop noir, ils ne voient rien. Respire."
Il fallut plusieurs minutes à Vincent pour parvenir à reprendre le contrôle de sa respiration et le double pour réussir à inverser sa transformation. Il grogna quand son bras gauche refusa de redevenir humain, restant obstinément celui d'un démon.
"Du calme. Ne force pas" lui conseilla Aérith posant ses mains fraîches sur son épaule douloureuse.
"Ça.. ne devrait pas…" grogna Vincent, frustré du manque de coopération de son propre corps.
"Plus tu forceras, moins tu y arriveras" renchérit Zack.
Vincent leva vivement la tête, cherchant le brun du regard.
Zack se tenait dans la cour à quelques pas de lui, laissant un large espace vital entre eux, ou en tout cas, suffisamment de place pour pouvoir s'éloigner au besoin. Il le regardait calmement, les mains dans les poches, feignant la décontraction.
"Comment… comment tu as su ?" demanda Vincent.
"Tu sens comme là-bas" répondit Zack avec un geste de tête vague vers où pouvait être 'la-bas'.
La mako augmentait vraiment tout, réalisa Vincent. Et si Zack pouvait sentir… quoi qu'il sente, ça signifiait...
"Tu savais depuis le début ?"
"Ouais."
"Tu n'as rien dit ?" s'exclama Barret.
"Parce que ce n'est pas à moi de le dire" rétorqua Zack d'un ton agressif. "vous marchez tous sur des œufs autour de Cloud, Red et moi, alors laissez-le respirer."
Protecteur. Pas agressif, protecteur, réalisa Vincent.
"Je déteste être la voix de la raison" déclara la voix de Cid venant de l'intérieur de la maison, "mais c'est pas faux."
"On va tous essayer de se calmer" ajouta Aérith " et reprendre peut être plus tard…"
"Non" la coupa Vincent. "Non. Je vous dois une explication. C'est vrai. Mais pas dans… Pas dans le bureau."
"Ça me va !" S'exclama Zack "le clapier de Reeve me donne des sueurs froides de toute façon."
"Zack" appela Yuffie " Cloud est réveillé."
"Merde, j'arrive !"
Le brun retourna rapidement à l'intérieur, suivi par Reeve et Barret, sur les indications pressantes d'Aérith. Une fois de nouveau seul dans la cour, Aérith désigna les pans du tee shirt déchiré.
"Montre-moi ton épaule."
Vincent la laissa faire, tenant le tissu pour dévoiler les bleus mais détournant résolument le regard.
"Tu t'es refait mal" soupira-t-elle en lançant un sort de soin.
"Désolé."
La jeune fille secoua la tête d'un air navré avant de reprendre.
"Tu n'as pas besoin de tout dire"
"Le Lieutenant..."
"Barret n'aime pas les surprises, ca ne veut pas dire que lui doive toute ta vie privée."
"Qu'est-ce que ton père t'as dit ?" s'enquit Vincent.
Aerith se releva, époussetant ses genoux d'un revers de la main.
"Pas grand chose" admit-t-elle. "Que tu étais un vieil ami. Qu'il ne t'avait pas aidé quand tu en avais besoin. Et qu'il le regrette."
Elle l'aida à se relever et à monter les marches du porche. Il avait encore les jambes tremblantes, mais ça ne semblait plus être la rage, ni la peur.
La fatigue peut être.
"Et aussi que tu es capable d'éborgner une chauve-souris à cent pas avec un lance-pierre."
"Une fronde, et c'était un pari stupide" corrigea Vincent en secouant la tête, étonné que Gast se souvienne encore de cette histoire et qu'il l'ait raconté à sa fille.
"Mais que tu as gagné" nota Aérith en l'accompagnant dans la salle commune, une main au creux de son bras indemne.
Leurs collègues et amis les y attendaient. Zack était sur le canapé avec Cloud et Red, les deux encore à moitié réveillés, leurs crinières respectives pointant dans tous les sens. Le brun essayait de les convaincre d'aller dormir dans la chambre des jumeaux, mais Red ne semblait pas assez cohérent pour comprendre le concept et refusait de se lever des genoux de Cloud.
A la table, Shera s'affairait à aider Cid à s'installer malgré ses protestations, lui surélevant le pied sur une des chaises. Reeve s'était assis et Barret se tenait à nouveau derrière lui, affichant toujours une mine renfrognée.
Dans la cuisine, par contre, Yuffie s'affairait en chantonnant, fouillant le frigo sous le regard dubitatif de Jessie.
"Yuffie ? Que fais-tu ?" demanda Barret, suspicieux.
"L'estomac de Cid a grogné comme un chien de l'enfer" répondit la voix de la Wutane "je prépare quelque chose pour le calmer."
"Elle tourne Maman Chocobo elle aussi ?" maugréa Cid, s'attirant une tape sur l'épaule de la part de Shera.
"Hé, je sais peut-être pas cuisiner vos plats de barbares" déclara Yuffie en sortant des assiettes couvertes du frigidaire, refermant la porte d'un petit coup de talon. "Mais je sais quand même utiliser un micro-onde !"
Quelques minutes plus tard, Vincent et Cid étaient attablés devant deux assiettes chaudes, et Jessie s'était portée volontaire pour préparer une tournée de café, servant tout le monde.
"Crème glacée ?" proposa Yuffie en sortant un pot de Shiva Delight 9 du congélateur.
"Non, merci" répondit Vincent.
"Sans façon, trop sucré" ajouta Cid.
"Ça en fait plus pour moi !" déclara la ninja en s'asseyant avec une cuillère.
"Tu t'es déjà lavé les dents" grommela Barret.
"Je me les relaverai !"
Le flegme dont certains membres d'Avalanche faisaient preuve après avoir vu un de leur équipier se transformer en démon était déstabilisant. Yuffie aurait été complètement en droit de s'enfuir en courant au lieu de manger de la crème glacée à même le pot. Mais Vincent reconnaissait ce qu'elle tentait de faire, à son niveau et de façon grossière.
Désamorcer une situation potentiellement explosive.
En tant que Turk, il avait déjà utilisé ce genre de technique.
Avec moins de nourriture et de glace à la vanille, ceci dit.
Il fallait qu'il se lance à un moment ou un autre.
"Je suis Makoto Hamasaki. Et j'étais Turk sous le nom de Vincent Valentine. Je suis effectivement mort à Nibelheim."
On n'entendit même plus la cuillère de Yuffie racler les bords de son pot de glace.
"Je devais escorter et surveiller une équipe de scientifiques de la Shinra dans leur étude du corps d'un organisme inconnu. Mon rôle était de m'assurer que les secrets de la Shinra soient bien gardés et que les scientifiques puissent mener leurs recherches sans être dérangé… Ou dévoyés."
"Un boulot de Turk quoi" marmonna Barret.
"Chut-euh" fit Zack.
"L'équipe était constituée des Professeurs Crescent, Falmis et… et Hojo. Et leurs recherches étaient d'une très grande importance pour la Shinra. L'organisme découvert était celui d'une Cetra. Une fois qu'elle a été identifiée comme tel, le but est devenu de… de recréer un Cetra à partir d'elle.
"C'est quoi au juste un Cetra ?" demanda soudain Yuffie.
"Ben, c'est un peuple qui a disparu y'a des siècles, non ?" suggéra Zack.
Vincent se creusa la cervelle à la recherche du terme Wutan. Yuffie avait été élevé à Wutai, elle ne devait pas connaître les termes orientaux.
"Hm… Kodai-shu, je crois."
"Han ? Mais c'est une légende ça !" s'exclama Yuffie.
"Qu'est ce que tu as dit ?" s'étonna Aérith.
"C'est le nom qu'on leur donne à Wutai."
"Il s'agissait d'un peuple de nomades qui révérait la planète" expliqua Red de sa place sur le canapé, la tête posée sur le dossier entre les jumeaux. "Ils étaient réputés avoir de grands pouvoirs, pouvoir parler à la planète et utiliser son énergie."
"Son énergie ?" répéta Barret.
"Bref. Qu'est ce qui s'est passé ?" Reprit Reeve, sentant bien que l'on commençait à s'éloigner du sujet.
"La phase de renaissance a commencé. Avec des sujets humains."
"Déjà à l'époque" marmonna Zack.
"Non, pas exactement. Le sujet principal s'est porté volontaire pour recevoir des cellules de la Cetra. La procédure visait à lui transférer des cellules jusqu'à ce qu'elle devienne une Cetra elle-même. Toutefois, l'expérience ne s'est pas déroulée comme prévu. Un peu après le début de la phase de renaissance, elle est tombée enceinte et… Sa santé s'est détériorée. J'ai voulu faire stopper les recherches, craignant pour sa vie et je suis allé confronter Hojo."
"Et ?"
"Il m'a tiré dessus à deux reprises."
Shera avala son thé de travers.
"Ce sont.. les impacts ?" demanda Aerith en désignant le torse de Vincent.
Le sniper hocha la tête.
"Vincent ça… ça aurait dû te tuer…" Risqua Shera.
"Avec ce que j'avais chargé dedans, je suis étonné que ça ne m'ai pas coupé en deux."
"Tu l'avais chargé ?" répéta Barret
"C'était mon arme" expliqua Vincent; " je l'avais posée pour ne pas être tenté d'abattre ce.."
Il jeta un petit regard à Yuffie, jugea qu'elle n'avait pas besoin d'apprendre des insultes supplémentaires et la présence de diverses créatures répugnantes dans l'arbre généalogique d'Hojo, et reprit.
"Il l'a prise quand la discussion a commencé à être houleuse. Je ne me suis pas méfié."
Il glissa un petit regard à Aérith.
"Merci de ne pas mentionner ça à Tseng."
"Je saurais me taire," promis la jeune fille avec un sourire qui disait bien qu'elle ne le ferait pas.
"Je crois que je suis mort, ne serait-ce que quelques minutes. Je ne suis pas... certain de savoir combien de temps s'est écoulé. Je me suis réveillé des mois plus tard. Il m'avait ramené et tentait de régénérer mon corps dans une cuve à mak…"
Un craquement retentissant coupa Vincent qui se redressa vivement, jetant un regard inquiet aux jumeaux, vite imité par le reste de la troupe. Assis sur le canapé, les deux Strife se tenaient immobile, les muscles tendus à trembler. La main de Zack posée sur le dossier avait serré la structure au point de rompre le bois qui la composait. Red fixa les dégâts à quelques centimètres de sa truffe et décida sagement d'écarter un peu la tête, la posant plutôt sur l'épaule de Cloud.
"Zack ?" fit Reeve en s'écartant autant qu'il put sur sa chaise.
"Il… c'est sur toi... qu'il a mis au point ces... trucs ?" parvint à articuler Zack, tremblant de colère.
Vincent hocha la tête.
"Ca pue les cuves" renchérit Cloud.
Zack força sa main à lâcher la mousse et le bois qu'il maltraitait. Il plia et déplia les doigts, cherchant à se calmer avant de poser la main sur le bras de son frère, lui serrant brièvement le poignet.
"Comme la mort" renchérit il. "En pire."
"Voulez-vous qu'on arrête ?" demanda Vincent.
"Non. Non, vas-y" déclara Zack en se redressant.
"Il… Non il n'y a pas grand chose d'autre à dire…Il a... fait ses recherches sur moi… J'ai failli m'enfuir après une diss... une expérience et il a prit peur. J'étais… un peu énervé ce jour-là."
"Grand, noir, rouge et en pétard ?" essaya de plaisanter Zack avant de se racler la gorge.
Vincent hocha la tête.
"Après ça, il a abandonné l'idée d'expérimenter sur moi. Il m'a injecté quelque chose et… je ne me souviens de rien. Ga.. Le professeur Falmis pense qu'il a tenté de m'empoisonner mais que… que ce qu'il m'avait fait avant m'a permis d'y survivre, me plongeant en animation suspendue. Il m'a trouvé il y a quelques mois et m'a remis sur mes pieds."
"Et il t'a recommandé pour Avalanche" acheva Reeve.
"Son idée. Il… pensait que j'y serais utile."
Le directeur resta pensif, sirotant son café. Son PHS vibra et il le prit pensivement, lisant le message qui s'y affichait.
Vincent jeta un petit regard à Jessie qui, s'en apercevant, cacha rapidement son propre téléphone derrière elle.
Comme s'il ne l'avait pas vue envoyer un message derrière Reeve.
Il n'avait peut-être pas connu l'arrivée des PHS et des messages instantanés mais il avait vite compris le principe.
"Quel est ton but exactement ?" demanda Reeve.
"Hojo."
"Pourquoi faire ?"
"Pour la même raison que Cloud et moi" répondit Zack le dos tourné au reste de l'équipe.
"Et moi" renchérit Red, le menton toujours posé sur l'épaule de Cloud.
Aérith soupira et approcha du brun, caressant ses cheveux délicatement, mais le jeune homme ne sembla même pas la remarquer, fixant le mur à côté de la TV comme s'ils pouvaient le détruire de la seule force de son regard.
Un miaulement indigné s'éleva soudain et Vincent se pencha aussitôt, ramassant Cait qui protestait d'être ainsi ignoré.
Des petits rires soulagés s'élevèrent quand la bouille du chaton apparut par-dessus le bord de la table, même Reeve s'autorisa un petit sourire en voyant l'animal pointer son museau.
"C'était y'a combien de temps tout ça ?" demanda Barret. "Si Hojo faisait encore partie de la Shinra… quand est ce qu'il a été viré déjà ?"
"Viré ?" répéta Vincent.
"En 63" répondit Reeve " il avait été arrêté l'année précédente pour expérimentations illégales, mais Shinra avait réussi à le faire libérer" expliqua-t-il à Vincent.
"Donc c'était il y a douze ans" calcula Barret, "tu as passé douze ans en stase ?"
"Non."
"Quinze ?"
"Trente."
Le silence régna autour de la table.
"C'est long" finit par dire Cloud.
Vincent observa ses équipiers un à un. Reeve envoyait un message, à Jessie probablement. La colère de Barret avait disparu et il le regardait maintenant avec un mélange d'horreur et de pitié. Yuffie était figée, une cuillère de glace fondue à mi chemin entre le pot et sa bouche. Vincent regretta soudain de ne pas l'avoir envoyée se coucher. Elle était encore trop jeune pour entendre ce genre d'horreur. Et à sa gauche, Cid et Shera étaient silencieux. L'appétit de Cid s'était aussi visiblement coupé et il tenait la main de la jeune femme, posée sur son épaule.
"Merde," finit par dire le pilote en reposant sa fourchette et poussant son assiette vers Vincent, "tiens, prend ma part."
Vincent s'apprêta à rétorquer qu'il n'avait pas faim avant de réaliser que sa propre assiette était vide. Il fixa confusément la vaisselle. A quel moment avait-il commencé à manger ?
Aerith, assise sur l'accoudoir du canapé, se tourna vers lui, les sourcils froncés et comptant sur ses doigts.
"Papa t'a réveillé quand ?"
"Cette année, en Février."
"C'était il y a trois mois" s'exclama Aérith avant de se lever, outragée. "Tu devais être encore au repos ! Papa va m'entendre !"
"Chérie ?" fit Zack, sorti de sa torpeur par le cri de la jeune fille.
"Où est mon PHS ?"
"Ha, Mamour, il est minuit passé, là," objecta Zack.
"Il mérite que je le réveille et l'enguirlande !" répondit la guérisseuse en fouillant les poches de sa veste.
"Je vais la calmer" déclara Zack avant de partir à la suite de la jeune fille.
"On va dormir ?" demanda Cloud à Red en s'apercevant du départ de son frère.
"C'est une excellente idée" marmonna Barret. "Yuffie. Les dents et au lit !"
"Mais…"
"Au lit ! Et range moi ce pot de glace !"
Reeve se leva à son tour et contourna la table pour approcher de Vincent, hésitant avant de stopper à une longueur de bras.
"Je te présente mes excuses, Vincent."
Vincent se leva en secouant la tête.
"Il n'y pas besoin d'excuses, Monsieur. Vous êtes… vous aviez raison de demander la vérité. Gast… le professeur Falmis m'a expliqué pour… les précédents démineurs."
"Quand ?"
"Tout à l'heure. Hier" corrigea Vincent après un coup d'œil vers l'horloge.
"Ces scientifiques" maugréa Reeve. "Plus de cervelle que de bon sens."
Il sembla hésiter à nouveau avant de reprendre.
"Tu as désormais accès à toutes les informations sur les activités d'Avalanche. Jessie te briefera dès qu'elle aura dormi un peu. Ceci étant… J'aimerais que… que tu nous informes sur..."
Reeve hésita sur la tournure de phrase à utiliser. Cid la fournit.
"Ce qui risque de te rendre grand, rouge, noir et en pétard."
Cid n'avait visiblement que très peu de filtres entre le cerveau et sa bouche. Surtout pas celui étiqueté tact.
"Se faire attraper un bras en miette par un squame marche assez bien, on dirait", rétorqua Vincent sans avoir pu se retenir.
Ha. C'était contagieux.
Ou bien c'était qu'il était vraiment très fatigué.
Shera gémit et posa le front sur le crâne de Cid, disant quelque chose en Burmécien qui le fit ricaner.
"Au lit" ordonna-t-elle en se redressant "Je vais avoir besoin de dormir pour affronter votre sarcasme en stéréo."
"Reeve" interpella Zack en passant la tête par la porte du couloir restée entrouverte "Aérith reste dormir !"
"Dans ta chambre ?"
"Oui ?"
"Non. Dans la chambre de Yuffie."
"D'accooooord" répondit Zack en disparaissant à nouveau, d'un ton absolument pas crédible.
"La mère d'Aérith va me tuer" marmonna Reeve. "Shera, je peux dormir à l'infirmerie ?"
"Non, Cid et Vincent vont y passer la nuit." répondit la brune en aidant Cid à se lever.
"Mais je…" commença Vincent.
"Prend mon lit Reeve, tu pourras surveiller Zack et Aérith comme ça" proposa Cid.
"Merci, Cid" répondit Reeve en se dirigeant vers le couloir "bonne nuit à tous."
"Mais…"
"Vincent, aide-moi à porter Cid"
Ce fut ainsi que Vincent se retrouva de nouveau à l'infirmerie, soigneusement bordé, Cait roulé en boule sur ses pieds.
Shera avait décidé de retourner dormir avec Cid, sous la couverture cette fois et après une dernière chamaillerie sur qui avait les pieds froid et qui avait les coudes pointus, ils s'endormirent comme des masses.
Vincent entendit les dernières portes se refermer, une discussion entre Aérith et Zack qu'il s'efforça de ne pas écouter puis…
Juste le bourdonnement du générateur.
Le ronronnement de Cait.
La journée avait été longue.
Il s'endormit à son tour.
1 Merde de dragon. A savoir que le dialecte Burmécien est inspiré par de l'Islandais version Google Trad.
2 Calme-toi.
3 Après plusieurs années à être le garde du corps d'Aérith, Tseng avait décidé qu'il était plus prudent qu'elle le suive partout plutôt que l'inverse et elle avait donc, à l'âge tendre de seize ans, découvert les afterworks des Turks.
Lesquels s'étaient tenus sages jusqu'à ses dix-huit ans.
Ils ont commencé à se lâcher lors de son dix-huitième anniversaire.
4 Encore une fois: Tseng. Et un peu Rude
5 Cadeau d'anniversaire de Reno quand elle était entré en major de guérison à la MGU
6 Idiot de chat
7 Où sont tes lunettes ?
8 Sur le bureau.
9 Existe en parfum vanille, chocolat, fraise, noix de pepio, fruit de reagan, baies d'O'Ghomoro et citron Han.
