Chapitre 14 : Jeux d'eau

Résumé :
Après la mésaventure de la MGU et celle de l'ambassade d'Esthar, tout le monde essaye de souffler et comprendre ce qui se passe.

C'est sans compter le talent indéniable de leur plus jeune recrue pour attirer les ennuis sans même le faire exprès.
Personnages :
Team Avalanche, Team MGU, OC, Ansem (Kingdom Heart),
Tags spécifiques au chapitre :
PTSD, Vincent&Cid, peut-être peut-être pas, Cid est un hérisson émotionnel, mais il essaye, Shera est une grande sœur, Cid/Nooj sous-entendu, rarepair hell, Shera a l'habitude des histoires de cul de Cid, Yuffie&Squall, ennemies to friend, Seifer&Zell, torture mentale et physique, planquez vos chouchous Ansem est là, OC


Vincent devait l'admettre, c'était assez étrange de travailler sur du renseignement dans une pièce qui sentait le gâteau pour le dessert du soir. A plusieurs reprises, il s'était retrouvé à annoter un dossier avec un des crayons de Marlène, ou à remettre Cait par terre quand celui-ci décidait qu'il devait absolument poser son derrière sur les dossiers en cours[1].
Après la réouverture de la MGU et une fois les remous de l'affaire de l'ambassade disparut, habilement justifié par un des attentats apparemment courant contre le Président Loire, les membres d'Avalanche les plus versés dans l'analyse d'informations se retrouvèrent à tenter de faire le tri dans ce que Cid appelait communément : Le bordel des dernières semaines.
Autrement dit : Jessie, Shera, Barret et Vincent s'installèrent dans la salle commune, à trier, classer et analyser les différentes sources d'informations.
"Comment les squames sont entrées dans la MGU sans se faire voir ? " demanda Barret le nez dans les rapports de Shera.
"Quelqu'un leur a ouvert" répondit Vincent en lisant une lettre de la directrice de la MGU.
"Pardon ? " fit Shera, ses lunettes sur le front.
"Quelqu'un à l'intérieur a détruit des caméras de surveillances à l'aide d'un sort de foudre avant de faire subir le même sort à la porte."
Vincent tendit une photo à Barret qui l'observa d'un air soucieux avant de la passer aux deux femmes.
"La personne qui a fait ça a été prudente et est restée hors de portée de la caméra avant sa destruction. Enfin, presque."
La photo représentait une paire de pieds en basket. Le pantalon était long et cachait sa peau, empêchant toute identification supplémentaire, que ce soit l'âge, le sexe ou l'ethnie d'origine du suspect.
"Comment as-tu eu ces informations ? " s'exclama Jessie, jalouse.
"Je ne révèle pas mes sources," répondit Vincent.
Yuffie lui transmettait régulièrement des lettres de la directrice, cachées dans ses interrogations écrites. L'adolescente prenait comme un jeu le fait d'arriver à glisser des informations sous le nez des Turks, la satisfaction de les flouter n'étant ternie que par le fait qu'ils ne le sauraient jamais.
"Ça ne permettra pas d'identifier de qui il s'agit," soupira Shera en faisant glisser ses lunettes à leur place d'un geste pour observer la photo de plus près.
"Les autres caméras n'ont rien, c'est le seul moment où elle ou il apparait avant la destruction."
"Un pro ? "
Vincent haussa les épaules.
"J'ai trop peu d'informations pour en savoir plus. Les sorts ont été parfaitement dosés pour la destruction par contre."
"Mage natif alors ? "
"Ou un élève ayant accès à une G-Card. Ou un professeur. Ou juste un espion introduit dans la MGU auparavant."
"Une impasse, quoi", soupira Barret. "Et pour l'ambassade d'Esthar ? "
"Squall dit que l'enquête est en cours," répondit Jessie, "et à propos de nos bien aimés voisins, j'ai enfin des réponses d'Esthar concernant les numéros de séries des cartes de Gabbiani, apparemment, le département scientifique bloquait les réponses à nos demandes," annonça Jessie en tendant un dossier à Vincent.
C'était probablement pour ça que la famille de Squall était actuellement trop occupée pour s'assurer que le jeune garçon ne désobéissait pas à l'ordre direct de ne pas rendre visite à Avalanche.
Ce qu'il ne faisait pas exactement.
Pas officiellement.
La presse-people était en train de, selon le terme consacré, péter un plomb sur la potentielle romance entre l'héritière de l'Empire de Wutai et le fils du Président d'Esthar.
Yuffie et ses amis trouvaient ça hilarant.
Squall un peu moins.
Mais au moins les relations entre les deux adolescents s'amélioraient et ils se criaient moins dessus. Squall venait même parfois s'entraîner avec Yuffie et avait commencé à enseigner aux jumeaux quelques techniques plus avancées d'escrime.
Barret lui avait interdit de se mesurer directement à un des Strife, à sa grande déception.
Parfois, Vincent ne comprenait pas les escrimeurs. De son point de vue, le but d'un combat était d'éviter de se prendre une lame en pleine tête, pas d'encourager celui en face à la lui envoyer.
"Alors ? "
"Ce sont des cartes qui ont été déclarées perdues lors de batailles, l'ifrit à Terra, la shiva à Junon, les autres ont été volées dans un avant-poste à Besaid il y a quelques mois."
"Hm… on savait déjà qu'Hojo pillait les villes qu'il attaquait. Ce n'est pas étonnant," commenta Barret.
"Non…"
"Mais ça implique qu'il y a une certaine organisation dans Sin quand même pour récupérer les cartes et les redistribuer."
"Et Odine ? " demanda Vincent.
"Toujours rien, faudra que Yuffie redemande à Squall."
"Le modus operandi d'Hojo ne fait aucun sens," soupira Shera.
"J'ai l'impression qu'il s'organise, cela dit," nota Barret alors que sa fille escaladait ses genoux, lui montrant son dernier dessin.
Tout le monde retourna ou cacha aussitôt les photos les plus graphiques d'un geste rodé par l'habitude.
"Papa ! J'ai dessiné Jessie et Shera et Vincent et toi qui travaillent ! "
"Montre-moi, Marlène ? Ah, effectivement, c'est très ressemblant."
Vincent jeta un coup d'œil à la feuille. C'était…
Hm.
Il identifiait bien les quatre personnages, disons. Celui en rouge et noir devait être lui.
Barret félicita sa fille et l'invita à afficher le dessin sur le frigo, ce qu'elle fit avec joie, le montrant au passage à Elmyra.
"Est-ce que… nous devrions peut-être travailler ailleurs ? " suggéra Vincent quand Marlène revint, se précipitant vers la TV où se trouvait Wedge, Cloud et Zack, devant un match de blitzball endiablé.
"Où ? " demanda Jessie, "dans le bureau de Reeve ? "
"J'aimerais bien," soupira Barret avec un regard à sa fille, debout sur la cuisse de Zack et qui essayait de le coiffer, "ça lui éviterait des cauchemars."
"Ta moto est utilisable, attend juste que la batterie ait fini de se charger ! Et de votre côté, vous avancez ? " demanda Cid en entrant, couvert de taches d'huile et de poussière, s'essuyant les mains sur un chiffon.
"Ha, merci, Cid," fit Vincent.
"Cid ! T'es pas propre ! " protesta Marlène du canapé.
"Tu vas pas commencer à être une mini Elmyra, non ? " rétorqua Cid d'un ton amusé.
"Dis-le-lui encore plus fort, Marlène" ajouta Shera, faisant la grimace quand son frère vint très délibérément étaler une trace de noir sur sa joue. "Yuck ! Siddhe ! "
"Gabbiani a dit qu'Hojo prévoyait de gros mutants. Tu penses qu'il parlait des Sorcières ? " suggéra Jessie
"Non," jugea Vincent, "Adel a été libérée bien après la mort de Gabbiani. Et qu'est-ce qu'il a voulu dire par gros ? En taille ? En puissance ? "
"On parle de quelqu'un qui bossait sur des aéronefs, notre notion de petit et gros est très relative," rétorqua Cid en se penchant pour lire les notes de Vincent.
"Du clonage en masses aussi. Mais du clonage de qui ou de quoi ? " demanda Vincent en glissant un rapport vers Cid.
"Personnellement, je suis plus inquiet au sujet de..."
Barret s'interrompit et jeta un petit regard au canapé, au moment où Wedge et Zack se levaient, Marlène dans les bras du grand brun, hurlant tous les trois un 'BUUUUT' bien senti.
"Zack, Wedge ! N'apprenez pas à Marlène à crier comme ça ! " protesta Elmyra de la cuisine.
"Pardon, Elmyra ! " s'exclama Wedge.
"Au sujet des Remnants," acheva Barret.
"Les copies de Sé…" commença Vincent avant d'être interrompu par la main de Cid devant lui.
Il leva les yeux vers Cid qui secoua la tête dans un mot avant de montrer la tête de Cloud qui dépassait du dossier du canapé.
D'eux tous et Zack mis à part, Cid et Shera étaient ceux qui géraient le mieux ce que tout le monde appelait 'la procédure Cloud'. Autrement dit : L'art d'éviter de mettre les pieds dans le plat des traumatismes des membres les plus destructeurs de l'équipe, et ainsi éviter une réaction brutale et immédiate. Vincent se demandait parfois où ils avaient appris à faire ça.
"De son projet principal," acheva Vincent à la place.
"Un seul ne doit plus lui suffire," soupira Cid en s'appuyant à nouveau sur la table.
"Ou alors, Numéro Un a dû être abimé lors de... " commença Jessie.
Cette fois, la main de Cid se posa fermement sur l'épaule de Vincent et celui-ci sursauta, tournant la tête vers lui.
"Qu'est… qu'est-ce que j'ai dit ? " demanda Jessie d'une petite voix.
"De... quoi ? "
"Donne-moi ta main" demanda Cid d'une voix ferme, tendant la sienne vers Vincent, "la droite" précisa-t-il comme Vincent le regardait sans comprendre.
Vincent baissa les yeux sur sa main droite.
Son stylo avait explosé, enfonçant des échardes de plastique dans sa peau.
"Tu t'es fait mal ? " demanda la petite voix de Marlène dans le silence de la pièce, à peine troublé par le commentaire sportif en arrière-plan.
"C'est de l'encre, Chocobébé," répondit Cid d'une voix joviale pendant que Shera se levait à son tour, venant retirer les morceaux de plastique de la peau de Vincent.
"Je suis désolé," s'excusa Vincent par réflexe.
Jessie se leva pour aller chercher de quoi nettoyer la main de Vincent pendant que Barret s'interposait entre le Turk et sa fille, lui posant des questions sur le match.
"Qu'est-ce qui l'a provoqué ? " se contenta de demander Cid.
Vincent essaya de se souvenir ce qui s'était passé dans les minutes précédant l'incident.
"Numéro" finit-t-il par répondre, la gorge sèche, "numéro un."
"C'est tout ? " s'étonna Jessie en tendant la mini trousse de secours de la cuisine à Shera.
Vincent ne se demanderait plus pourquoi il y en avait une par pièce.
"Ce n'est pas lui. Le numéro un" précisa Vincent pendant que Shera nettoyait sa paume.
"Tu peux en parler ? " demanda-t-elle d'un ton égal.
Vincent chercha ses mots.
"Professeur... Crescent. Le sujet volontaire pour l'expérience Cetra. C'était elle."
"Le troisième professeur ? " demanda Shera en vérifiant qu'elle avait retiré toutes les échardes. "Qu'est-ce qui lui est arrivé ? "
"Elle est morte en mettant S... En le mettant au monde."
"Bellâtre aux cheveux gris ? " demanda Cid.
"T'as un don avec les mots, Cid" grommela Jessie.
"Ekki nefna Djöfulinn,"rétorqua le burmécien.
"Ne nomme pas le Diable," traduisit Shera en lâchant la paume de Vincent, "ça commence déjà à guérir."
"Mako" murmura Zack derrière eux, la tête tournée pour les voir faire.
"Ok, donc, lui c'est le numéro deux... oh allez, c'est quoi son numéro ? " reprit-t-elle, exaspérée quand Vincent secoua la tête.
"Trois," répondit le Turk avant de se lever, rassemblant les dossiers, " je dois sortir."
"Laisse-les, on reprendra plus tard," offrit Barret.
"Et le deux c'est qui ? " insista Jessie.
"C'est moi," répondit Vincent.
Il quitta la pièce aussi rapidement que possible sans donner l'impression de se précipiter et les autres entendirent son pas dans l'escalier.
"Jessie," soupira Shera.
"Oui, je suis désolée, c'était pas très subtil, mais ça peut être utile ! "
"Pourquoi ? "
"Parce que Gabbiani…"
"Numéro 46" murmura Cid, "c'était le numéro tatoué sur son poignet."
"49 pour moi"
Ils se tournèrent vers Zack, un brin alarmé par son ton grave...
Le brun posa Marlène sur les genoux de Wedge, qui s'affaira aussitôt à demander à la petite qui était son blitzballer favori[2].
Il se leva et retira la manchette de cuir qu'il portait toujours sur le poignet gauche, montrant le chiffre tatoué dessus.
49.
"Cloud est 48[3]," précisa-t-il
"Si on peut avoir le numéro d'Adel, qui est la dernière en date, on pourra au moins évaluer la taille de son armée," expliqua Jessie.
"Envoie un message à Yuffie, qu'elle demande à Squall s'il sait quelque chose. Shera vérifie quels squames avaient un tatouage."


S'il y avait vraiment un moment de l'année pendant lequel Yuffie appréciait les Taudis, c'était pendant les mois les plus chauds.
D'abord parce qu'elle préférait les températures plus élevées, comme à Wutai.
Et ensuite parce qu'à ce moment-là, il faisait assez chaud pour qu'elle puisse aller nager.
Dès que le temps se refroidissait, la seule chose qui pouvait survivre dans l'eau glacée du canal, c'était les anguilles et les poulpes d'eau douce, et ça ne durait en général que le temps qu'ils se fassent pécher et griller pour être vendu sur le marché.
Mais dès qu'il faisait chaud, elle passait une grande partie de ses weekends avec ses amis de l'équipe de Blitzball, à nager dans la sphère d'eau qui leur tenait lieu de terrain de jeu.
D'ailleurs, elle et Zell arrivaient en vue du canal et de ses docks quand la sphère se remplit d'un coup, aidée par les matérias d'eau qui la composait et sa structure légère.
Ils eurent le même cri de joie en voyant leur arène de sport favorite se remplir et accélérèrent le pas. Les autres membres de l'équipe étaient déjà présents. Le capitaine, Wakka, Tidus, bien sûr, les jumelles et quelques autres joueurs qui s'échauffaient en les attendant. Il y avait aussi des spectateurs, assis sur les gradins qui encerclaient la sphère. Yuna et Lulu, les petites amies respectives de Tidus et Wakka, mais aussi quatre têtes que Yuffie reconnut immédiatement.
"Tiens, t'es là toi ? " s'exclama Yuffie en voyant Squall assis sur les bancs de l'arène, tourné vers Seifer assis en face de lui, le regard fixé sur leur partie de Triple Triad.
"Comme tu vois," répondit Squall en posant une carte.
Sur le banc du dessous, Raijin et Fujin se préparaient à assister au spectacle, chacun une glace à la main, Yuffie vint immédiatement les embrasser, volant un morceau de glace à Raijin qui se laissa faire, comme d'habitude. Le jeune homme faisait en général peur quand on le voyait pour la première fois, entre sa haute taille, ses muscles et son air revêche, mais il ne fallait en général que cinq minutes pour que tout le monde réalise qu'il était un gros nounours paisible.
Tant qu'on ne s'attaquait pas à Fujin et Seifer, bien sûr.
"Depuis quand tu as cette carte, putain ? " grommela Seifer.
"Depuis que je te l'ai prise y'a trois mois," répondit Squall en le fixant d'un regard pensif.
Yuffie commença à retirer son sac à dos et jeta un coup d'œil à son PHS avant de se tourner vers Squall.
"Un job pour toi, Squall," déclara Yuffie en lui mettant son PHS sous les yeux.
Squall lut le message.
"95," répondit-il aussitôt.
"T'es sur ? "
"Certain, je l'ai vu en gros plan."
"Ok, merci ! " rétorqua Yuffie en répondant au message avant de poser ses affaires près de celles de Squall et Seifer, "vous surveillez mes trucs ? "
"Ouip," répondit Seifer en posant une carte à son tour.
"Yuff ! " appela Wakka.
"J'arrive ! " s'exclama Yuffie en faisant passer son tee-shirt par-dessus sa tête, le jetant sur ses affaires, avant de faire subir le même sort à ses armes.
Squall tourna la tête en voyant un tee-shirt avec le logo des Irabu Jiru[4] atterrir près de lui, manquant de bousculer ses cartes. Il allait protester quand il réalisa que Yuffie était tout bonnement en train de se déshabiller en public…
Pour dévoiler une combinaison de plongée qui s'arrêtait à ses coudes et genoux.
Ouf.
Il avait passé trop de temps à Esthar avec leurs costumes traditionnels qui ne dévoilait que les mains et le visage, il oubliait toujours à quel point les habitants des Taudis avaient tendance à envoyer voler leurs vêtements aux quatre vents en été.
Zell le prouva en se désappant de la même manière, ne portant lui qu'un bas de tenue de plongée et ses tatouages. Tatouages qui avaient visiblement accueilli un petit nouveau sur son dos. Seifer n'allait pas pouvoir se concentrer sur leur jeu de Triple Triad, parti comme c'était.
D'ailleurs il ne regardait déjà plus leurs cartes.
"Y'a des cabines pour ça ! " protesta Squall en désignant lesdites cabines, un peu plus loin.
"Je me mets pas à poil, y'a pas besoin," répondit Yuffie avant d'enfiler ses lunettes de plongée, retirer ses baskets sans défaire les lacets et se précipiter vers la sphère d'eau comme une fusée, suivie de Zell avec au moins autant d'enthousiasme.
"Bon : Vous êtes ensemble ou vous l'êtes pas ? " demanda Seifer en désignant la sphère dans laquelle les blitzballers se séparaient par équipe pour commencer leur partie.
Squall lui jeta un regard agacé avant de regarder à nouveau leur jeu.
"On fait un pari ? " finit-t-il par répondre en regardant les cartes.
"Toi ? Tu aimes pas les paris ! "
"Si tu gagnes, je t'explique tout ce qui se passe avec Yuffie."
"Ok, et si tu gagnes je…"
"Tu n'utilises pas de G-Force pendant une semaine entière."
Seifer se redressa, intrigué par la demande.
Enfin, pas tant que ça, ça faisait plusieurs semaines que Squall semblait avoir développé une certaine aversion, pour ne pas dire une violente répulsion des G-forces et tout ce qui s'en rapprochait. Il s'assurait que dans leur classe, tout le monde retirait ses associations une fois le cours fini et que personne ne les utilisait hors de la MGU sans une bonne raison.
Comme une balade dans les Taudis par exemple.
"C'est quoi ce pari ? "
"Tu as peur de perdre ? "
"Mon cul, je vais te laminer, commence à réfléchir à ce que tu vas me dire sur Yuffie."
Trois tours plus tard, Seifer avait perdu.
"Dès qu'on est à la MGU, tu défais ton association et tu passes ta carte à Fujin pour ne pas être tenté de la remettre," déclara Squall en levant les yeux vers lui.
Il claqua de la langue, attirant l'attention de Fujin et lui expliqua la situation en quelques gestes.
Et cette traîtresse accepta.
"Je préférais quand tu ne comprenais pas la langue des signes ! " grommela Seifer.
Squall qui rassemblait ses cartes, lui jeta un regard furibond.
"Oncle Ward a commencé à me l'apprendre quand j'avais cinq ans."
Il soupira puis se pencha en avant vers son ami.
"Tu as oublié que je connaissais la langue des signes, tu ne sais plus jouer à Triple Triad alors que tu étais un des meilleurs de la MGU, et je suis sûr que tu as oublié des choses au sujet de Zell ! "
"Qu'est-ce que Crête de Coq a à voir là-dedans ? "
Cette fois Squall resta silencieux, puis se tourna vers Fujin, signant furieusement. Laquelle lui répondit.
Et Seifer sentit son cœur se serrer en réalisant qu'il ne comprenait pas tout ce qu'elle disait.
"Une semaine, Seifer. A compter de ce soir."
Le blond ronchonna, mais finit par admettre sa défaite et ramassa son paquet de cartes. Au moins, Squall ne lui avait pas pris une nouvelle carte. Il se rassit correctement, vers la sphère cette fois et observa les blitzballers évoluer dans l'eau, se percutant ou esquivant avec violence ou grâce, selon les manœuvres en cours. Yuffie passa en trombe, ne ralentissant que lorsque Tidus l'attrapa par la cheville, lui subtilisant la balle blanche et bleue.
"Mais tu es avec Yuffie ou pas, alors ? "
Squall grogna. D'accord, la prétendue 'amourette' entre eux était une excellente excuse pour que personne ne lui fasse de remarque sur ses visites à Avalanche, mais il aurait aimé être consulté avant que Yuffie mette son plan en action.
"Non."
"Vous êtes super copains depuis quelques semaines, vous ne vous criez plus dessus et vous arrivez même à avoir des discussions presque cordiales."
/Ça nous fait du repos/, admit Fujin, assise en face d'eux pour pouvoir communiquer.
/Je n'ai pas besoin de commentaires, merci,/ rétorqua Squall.
/Non, seulement de coups de pieds au derrière./
Il y eut un grand splash quand Tidus, Zell et Yuffie furent brutalement éjectés de la sphère. Seifer et Squall se levèrent d'un bond et les rejoignirent, mais les trois sportifs se contentèrent d'en rire et de se relever mutuellement avant de chercher la balle du regard.
"Je l'ai ! Je l'ai ! " s'exclama Zell en la ramassant aux pieds de Raijin pour la lancer d'un geste puissant dans la sphère.
Wakka vint reprendre son souffle, sortant la tête de l'eau un peu plus haut que ses équipiers.
"On la refait, mais essayez de pas sortir de la sphère cette fois ! "
"Yuffie est trop légère, c'est sa faute ! " rétorqua Tidus en se penchant pour faire la courte échelle à Yuffie.
"Woohoo ! Fastball special ! " s'exclama la wutane avant que le blond ne la propulse tête la première dans la sphère.
"Les blitzballers sont tous barges," grommela Squall.
"Ça fait partie du sport ! " rétorqua Zell avant d'être à son tour propulsé dans la sphère par Tidus.
"Ça et la tenue sexy" ajouta Tidus avec un sourire entendu aux deux épéistes avant de se jeter dans l'eau de lui-même.
Les deux amis échangèrent un regard perplexe.
"Fujin dit que vous êtes deux abrutis et que vous feriez mieux de profiter de la vue au lieu de vous poser des questions" déclara Raijin.
"La vue ? " répéta Seifer.
Fujin montra l'intérieur de la sphère, où les Blitzballers se remettaient à leurs positions, prêt à retenter la manœuvre. Yuffie et Zell se tenaient dos à eux, nageant sur place.
"Histoire éterneeeelle qu'on ne croit jaaaamaiiiiis[5]" chantonna Raijin, accompagnant le chant de gestes dramatiques.
"RAI ! " Protesta Seifer.
"De deux inconnuuuuus qu'un geste imprévuuu ! Aïe aïe ok j'arrête Fu, j'arrête ! "
Fujin avait beau être en train de bourrer le mollet de Raijin de coups de pieds, elle était tout autant en train de pleurer de rire.
/On était d'accord pour être subtils, Raijin ! / finit-t-elle par signer.
/Je SUIS subtil ! / rétorqua Raijin, /c'est juste qu'ils ont besoin d'une subtilité un peu plus lourde./
/Je vous COMPRENDS ! / leur rappela Squall en approchant.
A nouveau un grand splash et cette fois, Zell fut éjecté de la sphère seul, droit dans les bras de Seifer qui le rattrapa par réflexe.
Dans la sphère, Yuffie et Tidus échangèrent un high-five satisfait avant de feindre l'innocence quand Zell se tourna vers eux.
"Hé ! A deux contre un c'est pas juste ! " protesta-t-il en essayant de descendre des bras de Seifer.
"Ça va ? "
"Ouais, je vais juste avoir un bleu sur le cul vu comment Tidus m'a foncé dessus" répondit Zell avant de réaliser qui le tenait debout.
Seifer venait d'avoir un pet au cerveau aux mots de Zell et ne réagit pas quand celui-ci se dégagea et retourna précipitamment dans la sphère, écarlate jusque sur les épaules.
/Yuffie et Tidus ont été subtils sur ce coup-là, peut-être ? / protesta Raijin.
"Vous avez tous les deux besoin d'un passe-temps," marmonna Squall en retournant s'asseoir.
/On fait les commères, ça compte pas ? / demanda Fujin.


Une fois tout propre d'une nouvelle douche, rhabillé mais toujours pieds nus, Cid arriva comme une fleur dans le laboratoire, poussant la porte sans même frapper.
Ce n'était pas comme si Shera n'avait pas l'habitude de le voir débouler sans prévenir, et ce depuis l'âge de dix ans, il n'y avait guère qu'à la porte de sa chambre qu'il toquait, et encore, uniquement par respect pour Elmyra.
"Shera ? "
"Qu'est-ce que tu veux ? " répondit aussitôt sa sœur, levant le nez de son ordinateur où elle comparait les dossiers des squames.
Cid se tourna vers les étagères de livres de sa sœur et prit note qu'il allait devoir rajouter une équerre. L'une d'elle commençait à ployer sous le poids de sa collection. Il commença à chercher dans les titres, la tête penchée.
"Le bouquin que tu m'as emprunté le mois dernier, pour Gip…"
"Etagère du dessus, à ta gauche" indiqua Shera. "Tu veux le relire ? Tu le connais presque par cœur."
Cid tendit le bras et sortit un livre de son emplacement, empêchant le reste de retomber de l'autre main.
"Pas pour moi. Je vais essayer de le prêter à Vincent."
Shera soupira.
Il se tourna vers elle, le livre à la main.
"Quoi ? "
"Rien."
"Ouais, et mon cul c'est du cuir de dragon[6]. Crache le morceau."
Shera se redressa en se frottant un œil sous ses lunettes avant de reprendre en Burmécien.
"Promets-moi de ne pas essayer de le réparer, Siddhe."
"De quoi tu parles, encore ? "
"Je te connais. Je connais ton faible pour les belles gueules un peu fêlées."
"Je vais juste lui prêter un livre qui pourra l'aider ! "
"Encore faut-il qu'il veuille être aidé," rétorqua Shera en se tournant à nouveau vers son travail.
Cid chercha un moment une réplique bien sentie avant d'abandonner et tira le tabouret glissé sous le bureau pour les visiteurs, s'asseyant à côté de Shera, posant le livre près de sa souris.
"Il n'y aura pas d'autre Nooj. Ok ? "
Shera secoua la tête avec un petit sourire fatigué.
"Tu dis ça, tu ne peux pas t'empêcher d'essayer de réparer ce qui est cassé. Que ce soient des machines ou des gens."
"Je vais lui prêter le bouquin, lui proposer de parler à Cid et c'est tout," déclara Cid avant de lui prendre la main, tournant sa sœur vers lui, "je ne m'impliquerais pas plus, Shera, c'est promis."
"Vraiment ? " fit-elle en lui adressant un regard dubitatif.
"Tu crois que j'en ai pas eu assez avec un suicidaire ? "
Elle soupira puis hocha la tête avant de reprendre sa main.
"Il faut que tu écrives à Freya," déclara-t-elle en changeant de sujet.
"Demain…" répondit Cid en se redressant, son expression se refermant.
"Ça fait deux semaines que tu dis demain, Siddhe, elle se marie l'année prochaine et tu ne lui as pas dit si tu viendras ou pas."
"Je croyais qu'on était d'accord pour que je ne remette plus les pieds à Burmécia ? " répliqua Cid d'un ton acerbe.
"Je le suis toujours. Mais ce n'est pas à moi de lui expliquer pourquoi."
"Shiera…"
"Elle a bientôt vingt-trois ans, tu crois qu'elle n'est pas assez grande pour comprendre ? "
"C'est la journée pour les discussions désagréables, hein ? "
"Si tu n'étais pas tout le temps en train de les esquiver je n'aurais pas à toutes les faire d'un coup ! " s'exclama Shera en se tournant vers lui, levant les mains.
"Et bien, regarde-moi esquiver encore une fois ! " rétorqua Cid en se levant, sortant de la pièce en trois pas et fermant la porte derrière lui.
Shera le regarda faire avant de soupirer.
"Ton LIVRE ! "
Cid rouvrit la porte, revint vers le bureau et prit le livre oublié là.
Il hésita une demi-seconde avant de se pencher et déposer un baiser sur le crâne de sa sœur.
"Je t'aime quand même, peste."
"Pareil, crétin."


Vincent était sur le toit.
Ce n'était pas exactement une surprise, depuis la veillée funéraire de Setzer, le brun avait lui aussi pris l'habitude d'aller prendre l'air sur le toit de Seventh Heaven, dès qu'il avait besoin de respirer ou d'être un peu seul. Zack faisait pareil, mais dans la cour, préférant le plancher des chocobos plutôt que la hauteur pour calmer ses crises de claustrophobie.
En général, Cid laissait Vincent tranquille quand celui-ci était sur le toit, et inversement, mais cette fois, Cid n'hésita pas à le rejoindre, s'asseyant à quelques pas du brun avant de lui tendre son livre.
"Tiens."
"Qu'est-ce que c'est ? "
"Un bouquin que m'a offert Shera. Je pense que tu devrais le lire."
Vincent prit le livre. C'était un tome épais, avec une couverture sobre en carton n'indiquant que le titre et l'auteur. Plusieurs morceaux de papiers colorés avaient été insérés à différents endroits, couverts de l'écriture nette de Cid et celle nettement plus brouillonne de Shera.

Comprendre le syndrome de stress post-traumatique chez le soldat.

"Cid… le navigateur du Haut-Vent, a fait une formation pour gérer ce genre de choses chez les soldats. C'est lui qui l'a conseillé," expliqua Cid en s'allumant une cigarette sans se tourner vers Vincent.
Vincent ouvrit le livre à la première page. En effet, Shera avait gentiment noté, en guise de dédicace, que Cid ferait mieux de le lire ou qu'il le mangerait page par page.
"Qu'est-ce que c'est ? "
"Ah, heu… A ton époque… attends, file-le-moi, y'a un chapitre sur l'histoire du terme..."
Vincent s'exécuta et Cid le feuilleta rapidement, passant d'un marque page à l'autre avant de le lui tendre ouvert.
"Choc de bataille ? Ou… obusite ? "
Vincent fronça légèrement les sourcils. Gast avait tenté d'aborder le sujet, quelques mois plus tôt mais avait vite abandonné devant les assurances de Vincent qu'il allait bien et qu'il irait encore mieux dès qu'il aurait autre chose à faire de ses journées que de rester assis sur un lit d'hôpital.
Encore la mentalité Turk de 'tant que c'est attaché, c'est que ça va'.
"Pourquoi veux-tu que je lise un livre à ce sujet ? "
"Putain, pourquoi c'est toujours moi qui dois expliquer ces trucs" marmonna Cid en se frottant le visage.
"Je vais bien," rétorqua Vincent.
"Tu veux qu'on parle de cercueil ? " demanda le blond sans le regarder.
Vincent se figea. Et se demanda un bref moment comment Cid savait ça.
"Je suis désolé," reprit Cid d'une voix plus calme, "mais il faut que tu lises ce bouquin. Ça t'expliquera pourquoi tu réagis comme ça à certains mots. Ou dans certaines situations."
Il lui tendit le livre, mais Vincent ne le prit pas, le regardant avec une expression vide d'émotion. Le pilote hésita, un moment ébranlé dans ses convictions avant de poser le livre entre eux.
"Presque tout le monde ici à un syndrome post-traumatique," finit-t-il par dire, "diagnostiqué ou pas…"
Il s'allongea sur le toit, les mains derrière la tête et contempla le dessous de la plaque. Des ouvriers étaient en train de faire l'entretien d'un des ventilos.
Pas trop tôt, Août arrivait, ce n'était pas le moment de ne plus avoir de ventilation sous la plaque.
Qu'est-ce que le ciel pouvait lui manquer parfois. Même juste pour le regarder.
"Le plus évident, c'est Cloud. Il a presque tous les symptômes. Zack aussi. Barret, évidemment. Red... C'est compliqué. Y'a pas d'études sur les créatures intelligentes non humaines. Je crois qu'Aérith commence aussi à en avoir."
"Aérith ? " s'étonna Vincent.
"Tu crois que ça lui fait du bien de voir l'intérieur de nos corps aussi souvent ? Tu sais qu'elle était fleuriste avant d'intégrer Avalanche ? "
Vincent l'ignorait. Connaissant le père, il avait pensé que la fille serait aussi orientée science et magie et avait logiquement suivi la voie de la guérison vu sa magie native.
"Quoi ? "
"Elle cultivait des fleurs avec sa mère dans les Taudis de Secteur 5. Elle a insisté pour aider Avalanche quand Zack et Cloud ont décidé de l'intégrer. Reeve n'a accepté que si elle commençait à suivre des cours pour guérisseur à la MGU. Ils ont un psy là-bas qui prépare les élèves à la réalité des champs de bataille. Un truc que j'aurais bien aimé avoir, moi…"
"Toi aussi ? "
Cid resta silencieux si longtemps que Vincent crut qu'il ne répondrait pas.
"Ouais. J'étais sur le front à Junon," finit par répondre le pilote en s'asseyant.
Il tira sur sa cigarette pensivement, cherchant ses mots pour expliquer au décalé temporel.
"Je faisais partie de la ligne de défense contre les assauts des squames. Ils sortent de la mer de temps en temps, faut les buter avant qu'ils approchent trop de la ville. Et… Un jour qu'on était de sortie pour…"
Cid fronça les sourcils, cherchant ses mots, avant de secouer la tête et se tourner vers Vincent.
Le sniper le regardait toujours, inexpressif.
"C'est dingue… presque deux ans et demi après, je n'arrive toujours pas à me souvenir de l'ordre de mission. On était en vol. Le Falcon X-12, Lady Luck. Aéronef de guerre avec double canons et..."
Cid s'auto coupa la parole avant de commencer à citer toutes les caractéristiques de son ancien vaisseau de combat. Vincent n'y comprendrait rien et c'était juste… c'était juste retarder l'inévitable.
"On s'est pris un moissonneur. C'était au moment où ces salopards ont commencé à muter pour sauter plus haut. On a crashé. Je suis le seul à m'en être sorti intact… enfin, physiquement. Edgar a perdu sa jambe, Gippal un œil, Cid les deux, Balthier et Fran ont été gravement brûlés, lui aux mains et elle au dos… Et j'ai ... j'ai perdu deux hommes."
"Et Shera ? " demanda Vincent d'une voix basse.
"Pas avec nous ce jour-là. Heureusement… comme d'habitude, c'est elle qui m'a sorti des emmerdes."
C'était à peu près à ce moment-là qu'il avait arrêté d'être… et bien, un trou du cul avec elle, à l'obliger à le suivre partout et à prendre des décisions à sa place.
Sa sœur avait toujours eu plus de bon sens que lui et il lui avait fallu un an sans elle pour qu'il réalise à quel point elle le gardait en vie depuis l'âge de seize ans.
"Après ça… Ça a été un an et demi à ne pas dormir, à cumuler les cauchemars et ne plus supporter l'odeur du bacon frit."
"Du…"
C'était toujours ce détail qui faisait tiquer les gens. Elmyra n'avait pas compris la première fois qu'il avait refusé l'aliment, alors qu'il était pratiquement carnivore, et avait pris l'affront de façon personnelle.
Shera avait dû la prendre à part pour lui expliquer.
Depuis, elle prenait un luxe de précaution avec la nourriture autour de lui.
Et de Zack.
"Ça semble idiot, hein ? "
"Pourquoi le bacon ? "
"Tu sais ce que ça sent la peau brûlée ? "
Vincent savait. Pour des raisons Turk que Cid ne voudrait probablement jamais connaître.
"J'ai dû porter Fran pour la sortir de l'aéronef, j'avais l'impression de toujours sentir l'odeur de... de sa peau, même dix douches après… C'est là que Cid a pris les choses en mains et a lourdement conseillé à Shera de me faire lire ce bouquin," acheva Cid en montrant le livre, toujours posé entre eux.
Le sniper semblait moins fermé à l'idée d'aborder le sujet. Apparemment, l'astuce était d'attiser sa curiosité. Cid avait remarqué à quel point il pouvait être curieux sans le montrer, une déformation professionnelle Turk affirmait Aérith en roulant des yeux.
Mêle-tout sans scrupule, était le terme exact qu'elle avait utilisé.
"Et ça t'a aidé ? "
"Un peu. Je suis censé voir un psy, mais on a un peu tendance à les faire fuir."
Ou plutôt, ils avaient tous tendance à les fuir. Surtout ceux accrédités par la Shinra pour écouter les confidences de leurs employés. Il n'y avait vraiment qu'au Professeur Gast qu'ils faisaient confiance et celui-ci était biologiste, certainement pas psy. Les médicaments qu'il fournissait aux jumeaux pour les aider à surmonter l'hyperactivité de Zack ou l'apathie de Cloud étaient déjà le mieux qu'il pouvait et il devait constamment changer le dosage ou les molécules pour s'adapter à eux.
"Je ne vois pas comment… je pourrais expliquer à un psychologue ce qui m'est arrivé."
"C'est ce que Zack dit aussi."
Cid avait assez souvent partagé des nuits d'insomnie avec Zack au début d'Avalanche, à rester tous deux dans le garage avec une radio qui fonctionnait pour meubler le silence. Zack n'avait pas réussi à parler de Sin au début, passant parfois des heures à chercher les mots qu'il n'arrivait pas à mettre sur ce qui lui était arrivé. Ça aurait étonné beaucoup de monde de savoir qu'ils avaient tous les deux passé des heures ensemble à ne rien dire[7].
"Ecoute, si tu ne le lis pas pour toi, lis-le au moins pour Yuffie."
"Je… Yuffie ? " répéta Vincent, instantanément sur ses gardes.
Ah. Il aurait dû commencer par là.
Évidemment, Vincent avait beau jouer les solitaires, il tolérait visiblement Yuffie plus que le reste de l'équipe. Peut-être parce qu'elle était plus jeune, ou qu'ils avaient la même langue natale, ou parce qu'elle avait décidé qu'elle aimait bien le sniper et qu'elle n'allait pas lui laisser le choix d'être sociable avec elle ou pas.
"Elle est… depuis... la mort de Tifa, elle cumule les nuits blanches.
"Elle ne devrait pas être ici," déclara Vincent.
"Je suis d'accord. Reeve comptait juste lui donner une leçon sur la réalité des combats contre les squames. Problème : elle s'est attachée à Tifa et à sa… à sa mort elle a décidé de prendre sa place."
Barret l'avait senti venir et avait refusé net que Yuffie intègre Avalanche, mais Reeve avait insisté, le Président aussi et le vice-président était même venu à Avalanche argumenter que la présence de la Princesse serait un formidable outil de propagande et une preuve d'union des deux pays contre Hojo.
Ils n'avaient pas augmenté le budget d'Avalanche pour autant.
"Encore quatre mois et son contrat se termine. D'ici là, je voudrais essayer qu'elle ne finisse pas traumatisée à vie[8]."
"Hm."
"Tu penses pouvoir aider ? "
Vincent jeta un regard dubitatif vers le blond, visiblement pas dupe de la manœuvre grossière.
Toutefois, il finit par tendre la main et prendre le livre.
"Je vais le lire."
"Bien."


Quand Vincent revint dans la salle de vie de Seventh Heaven, une demi-heure plus tard, Barret, Shera et Jessie semblaient avoir changé de tactique. Les dossiers avaient été réempilés, sauf ceux que Vincent avait été en train de consulter, et une ligne de feuilles blanches avaient été scotchées ensemble, portant des dates, des numéros de missions et plusieurs post it colorés. Shera ajoutait des numéros, correspondant probablement aux tatouages des squames.
"Ok, où on en est ? " demanda Jessie.
"Février."
"Merde. Secteur 7. Plaque et Taudis," soupira Jessie.
Pour que cet évènement soit mentionné, les jumeaux devaient être sortis, un rapide regard au planning des rondes confirma que c'était leur tour de se promener dans les Taudis et s'assurer que rien ne menaçait les habitants. Cid faisait du thé et du café, le gâteau d'Elmyra refroidissait sur le plan de travail entre la cuisine et la salle de vie, quant à Marlène, elle faisait la sieste sur le canapé, Red en guise d'oreiller. Vincent était toujours surpris de voir l'enfant parvenir à dormir au travers de leurs discussions, des matchs de Blitzball ou de la musique de Jessie, mais son père lui avait expliqué qu'elle avait grandi dans un bar et qu'elle pouvait s'endormir au milieu d'une chanson à boire.
Il lui avait ensuite demandé de ne JAMAIS en parler aux services sociaux s'ils décidaient de venir mener une enquête à Seventh Heaven sur les conditions de vie de Marlène.
Ledit père leva les yeux et vit Vincent immobile près du panneau d'affichage. Il ne sursauta presque pas.
"Ho, Vincent, ça va mieux ? "
"Oui. Que faites-vous ? " demanda-t-il en approchant.
"On mets toutes les attaques de squames au même niveau," répondit la jeune femme.
"J'aimerais essayer de voir s'il y a un… un truc qui en ressort," déclara Barret.
"Comment vous classifiez ? "
"Rouge pour les monstres, bleu pour les bienheureux, orange pour les mutants," répondit Jessie en lui tendant un crayon de cire orange[9].
"Secteur 7" reprit Cid en approchant, tendant un café à Vincent et Barret. "Ça a commencé par une invasion de squames dans les taudis. Une bonne vingtaine de squames, à peu près autant de Bienheureux. Pendant qu'on était occupés, Séphiroth a été signalé sur le pilier et Cloud et Tifa s'y sont rendus. C'est la plus grosse bataille qu'on ait eue avant la MGU."
"C'est là que votre équipière est..." commença Vincent.
"On a retrouvé son… une partie de son corps avec Cloud en fouillant les débris," répondit Barret, fronçant les sourcils d'un air sombre. "On n'a jamais su ce qui s'était passé au juste. Cloud est resté catatonique plusieurs semaines et… il n'a jamais vraiment refait surface depuis."
"Vraiment ? "
"C'était déjà pas joyeux aux débuts d'Avalanche, ça ne s'est pas arrangé," confirma Jessie.
Et la mort de la jeune femme était visiblement encore un sujet sensible chez Avalanche. Ce qui n'était pas vraiment étonnant, ça ne faisait que cinq mois.
Autant de temps qu'il avait passé réveiller.
"D'accord… et la suivante ? "
Penchée sur la table de la pièce principale, son stylet à la bouche, Jessie plissa les yeux.
"Hmmmmm… C'était la bombe bio sur la plaque secteur 4. Le 18 mars, le jour de ton arrivée. Quatre squames."
Vincent ajouta une note d'une couleur sur la ligne de feuilles placée au milieu de la table pendant que Cid tendait un autre café à la jeune fille.
"Et ensuite ? "
"Plaque secteur 3. 20 avril." répondit Cid, "la première fois où tu as été grand, noir, rouge et en pétard."
Vincent jeta un regard las à son collègue mais ne protesta pas. L'expression était passée dans le langage commun de l'équipe et il ne pourra pas l'en déloger. Il savait comment ça marchait.
Il avait été le 'petit mignon' chez les Turks pendant des années après tout[10].
"Trois makonoïdes, un mutant."
"Et ensuite Gabbiani, en mai. Réacteur secteur 2," continua Vincent en ajoutant des notes, "une seule personne."
"La MGU. Une Sorcière, une douzaine de bienheureux, un Al Bhed et les gobelins. début juin. Puis Adel, dix jours plus tard, avec une équipe d'humains."
"Cette attaque ne colle pas avec les autres," nota Vincent en se penchant.
"Comment ça ? demanda Barret.
"Jusqu'à présent, aucun humain n'aidait volontairement Hojo. Soit, ils sont contraints, comme Gabbiani, soit ils sont manipulés comme les Bienheureux. Et de ce qu'ont dit Squall et Yuffie, le but d'Adel n'était pas d'aider Hojo mais de reprendre le contrôle d'Esthar."
"Mais on est bien sûrs qu'Adel collaborait avec Hojo ? " demanda Jessie.
"Il lui a injecté de la mako, en effet… mais les appeler alliés me semble un peu exagéré. Adel n'avait pas d'alliés du temps où elle était dictatrice, je la vois mal essayer d'accommoder un autre ego que le sien."
"Donc... elle n'aurait pas agi sur les ordres d'Hojo."
"Je n'ai aucune certitude, mais ça me semble improbable. Elle a dû vouloir profiter de la défaite d'Ultimécia pour reprendre ses pouvoirs et son pays."
"En lien avec Hojo, mais sans rapport avec ses plans," conclut Shera tout en ajoutant un numéro près du nom d'Adel.
Vincent hocha la tête et décala légèrement la fiche portant le nom d'Adel du reste de la chronologie. Il relu rapidement la frise, plissant les yeux.
"Pourquoi… N'a-t-il fait appel à Séphiroth qu'une seule fois ? "
"Parce qu'il s'est pris une raclée ? " suggéra Jessie.
"Vous en êtes sûrs ? " demanda Vincent en se tournant vers elle.
"L'épée de Cloud a été retrouvée couverte de sang," répondit Shera. "On pense qu'il s'agit de celui de Séphiroth, en tout cas, le groupe sanguin correspond, mais le... heu… prélèvement était trop dégradé pour être plus précis. Et puis Shinra me laisse pas utiliser leurs labos," ajouta-t-elle d'un ton vexé.
"Hm," murmura Vincent.
"Ah, toi tu as quelque chose qui vient," nota Cid, en levant sa canette vers lui.
"Si Séphiroth a été blessé… Hojo a dû décider de ne plus le mettre en danger."
Barret fronça les sourcils ramassant la tablette au milieu des dossiers et l'allumant rapidement.
"Tu penses ? Il tiendrait à lui ? "
Vincent laissa échapper un petit reniflement dédaigneux.
"J'en serais surpris. Mais, non, pas comme ça. Hojo est extrêmement vaniteux et Séphiroth est son chef-d'œuvre. Son fils."
"Pardon ? " fit Cid, les yeux écarquillés.
Vincent le fixa avec étonnement.
"Ce n'est pas connu ? "
"Que dalle," rétorqua le blond, "tu peux m'expliquer comment Hojo s'est reproduit avec sa gueule et a donné un demi-dieu comme Séphiroth ? "
"Il tient de sa mère."
"Non, là il va falloir que tu m'expliques comment tu sais ça ! "
"Nibelheim."
"Attends, tout à l'heure tu as dit…" commença Jessie avant de recevoir un regard d'avertissement de la part de Shera.
"A quel sujet ? "
"Sa mère… à Séphiroth… C'était... le premier sujet d'expérience de Hojo…" reprit Jessie en pesant soigneusement ses mots.
"En effet. Elle était volontaire pour le projet Cetra."
"Il a expérimenté sur sa… compagne ? " murmura Barret, horrifié.
"Femme. Elle a gardé son nom de jeune fille après leur mariage."
"Putain, il a expérimenté sur son fils ? " réalisa Cid.
Vincent hocha la tête.
"Un malade," murmura le pilote en avalant une gorgée de bière.
Vincent confirma du fond du cœur.
"Et… il en est un ? " demanda Barret.
Vincent leva les yeux vers lui, un sourcil froncé.
"Séphiroth," précisa Barret. "Il est un Cetra ? "
"Je l'ignore," avoua Vincent, "je ne connais rien des Cetra à part les légendes et ce que j'entendais à Nib… "
Il s'interrompit, fronçant les sourcils.
Tout le monde se tut, dans l'expectative.
"Je ne vais pas exploser," soupira Vincent.
"On sait jamais."
"J'ai juste l'impression de… d'oublier quelque chose d'important."


Quand ça arrivait, il pouvait perdre des heures entières.
Un moment il était dans la chambre qu'il louait dans une pension du Taudis de secteur 4, à faire ses devoirs pour le lendemain et l'instant d'après…
Il y avait la voix dans sa tête, comme une fleur de cactuar qui s'ouvre, comme une araignée qui étend ses pattes et il se levait d'un bond, obéissant à ses ordres.
Quand il arriva enfin à réfléchir de nouveau, à penser comme il le fait d'habitude, il n'était plus dans le secteur 4, mais dans le 5, au niveau des usines de traitement de l'eau.
Après quelques instants de confusion, il réalisa qu'il était DANS l'usine.
Et que les corps inertes autour de lui étaient...
Il lâcha son épée qui disparut dans un tourbillon de poussière noire.
Oh.
Oh, non.
Pas encore.
Il porta les mains à sa tête et réalisa que quoi que soit l'araignée, elle avait le réflexe de mettre sa capuche, cachant ses cheveux et son visage, comme il le faisait toujours quand il sortait dans la rue.
Elle faisait des choses qu'il ferait quand elle le contrôlait, il ignorait si c'était parce qu'elle les connaissait ou parce qu'en réalité, elle était un peu lui.
Il fallait qu'il reparte avant qu'Avalanche arrive, s'il était trouvé ici avec tous ces employés morts, ils ne feront certainement pas dans la subtilité.
Ce n'était pas leur genre.
Surtout Zack.
Mais il n'était jamais venu ici et il ne connaissait pas les lieux et il ouvrit plusieurs portes à la recherche de la sortie, en se demandant pourquoi il avait été envoyé ici tuer ces gens.
Il comprit en arrivant par accident dans la zone de traitement des eaux.
Il y avait des squames, entrant et sortant des flots, certains en train de dévorer les corps des employés. Hojo les affamait dans Sin, faute d'un approvisionnement régulier, et parce que ça les rendait encore plus méchants.
Il voyait des créatures aquatiques pour la plupart, des sahagins déformés, luisant de mako, quelques makonoïdes adaptés à la vie marine, et, s'aperçut-il avec un frisson, des sans-cœurs qui trainent partout.
S'il y avait des sans-cœur, alors qu'Ultimécia était morte (ou du moins il espérait qu'elle l'était vraiment), ça signifiait qu'un des Remnants était là. Et il ne savait pas lequel il préférerait voir.
Avec sa chance, ce serait Kefka. Ou Yazoo. Ou même… Ansem.
Il essaya de se faire petit et discret, ce n'était pas difficile, il avait l'habitude sur Sin, et chercha la sortie avant d'être repéré.
C'est en passant près du canal qu'il remarqua une anomalie.
Il y avait quelque chose au fond, juste sous l'eau.
Quelque chose de tellement grand qu'il le voyait même à travers l'eau grise, à peine quelques dizaines de centimètres sous la surface.
Et il savait qui c'était.
Il savait toujours qui avaient été les monstres qui sortaient des labos d'Hojo. Même quand ils ne ressemblaient à plus rien d'humain.
"Haru ! "
Oubliant la discrétion, il courut le long du canal, remontant vers la tête et envoyant bouler les squames qui le croisaient.
L'un d'eux essaya de l'intercepter, mais il le percuta avec une telle force qu'il entendit les os du monstre se briser.
Quand il arriva au niveau de la tête d'Haru, il s'agenouilla au bord de l'eau, l'appelant.
"HARU ! Haru c'est moi ! "
Il vit un œil immense s'ouvrir et…
Haru le reconnut.
La grande tête pointue se redressa, tentant de sortir de l'eau, mais de grosses chaînes le retenaient, le maintenant sous l'eau et il avait beau tirer, elles étaient solidement arrimées aux bornes de chaque côté du canal.
Comment avaient-t-ils réussi à faire entrer Haru sans qu'il se fasse voir ? Il devait faire une bonne centaine de mètres de long maintenant et…
Et elle lui a fait tuer les employés.
Il avait dû remonter tout le canal depuis la mer.
Ils avaient dû tuer tout le monde dans le bâtiment pour empêcher l'alerte d'être donnée. Qui surveillerait l'usine de purification d'eau ? Ce n'était pas la cible habituelle d'Hojo.
Ça, c'était un plan de ce MALADE de Kefka, il en jurerait.
"Haru, ça va, je vais te libérer. Laisse-moi juste…"
Une des vibrisses sur le côté du crâne d'Haru se détendit soudain, l'évitant de peu pour frapper quelque chose derrière lui. Il entendit le choc, puis vit la vibrisse se tendre comme une corde.
"Je vois que vous êtes toujours à vous protéger l'un l'autre."
Il se figea au son de la voix.
Il avait vraiment une chance pourrie, dommage que Setzer n'ait pas pu lui en filer de la sienne.
Il se releva vivement, s'éloignant de quelques pas et se tournant vers le Remnant qui venait de parler.
Il reconnut sa peau mate, ses yeux dorés et ses cheveux argentés rabattus en arrière.
Il n'en avait pas eu besoin pour savoir qui c'était. La voix avait suffi, elle hantait ses cauchemars.
"Ansem…"
Le Remnant sourit, la vibrisse enroulée autour du bras. On pouvait entendre ses os craquer sous la pression, mais il souriait.
Haru s'agita dans le canal, essayant d'entraîner le Remnant sous l'eau, mais celui-ci s'arc-bouta sur ses pieds et abattit un poing couvert d'éclairs noirs sur la vibrisse, forçant Haru à le lâcher, ramenant son appendice sous l'eau.
Pour la beauté du geste, Ansem ajouta un second éclair qui se répandit heureusement dans le canal, amortissant l'impact pour Haru.
"Laisse-le ! " hurla l'adolescent en se précipitant vers lui pour le bousculer.
Ansem se détourna de la torture d'Haru pour diriger son regard doré vers lui. Il tenta immédiatement de reculer, mais la main gantée d'Ansem se referma sur le col de l'adolescent, le soulevant.
"Et ben, ça te réussis de voir le soleil, tu as bonne mine… "
Il tenta de lui donner un coup de pied, mais cela ne fit que sourire le Remnant.
"Laisse Haru tranquille ! Hojo avait promis ! "
"Et toi, tu avais promis d'aider à la capture de la MGU. Où étais-tu à ce moment-là ? "
"J'ai ouvert les portes ! "
"Ho, mille mercis de ton aide dans ce cas ! Pourquoi tu crois qu'Hojo a fait venir ton précieux Haru ? "
Ansem le jeta brutalement au sol, à genoux et l'attrapa par la nuque, le forçant à regarder la créature qui s'agitait au fond de l'eau.
"C'est parce que l'attaque a échouée qu'on est ici ! Tu aurais mieux fait d'obéir ce jour-là. Hé ! Princesse ! "
Une des chaînes lâcha sous les gestes furieux de la créature marine et Haru se redressa en sifflant, sortant sa tête du canal, ses crocs étincelant dans la lumière artificielle. Son mouvement fut bloqué par l'autre chaîne, qui tenait encore bon, et il resta quelques secondes immobile, la tête penchée, sifflant furieusement.
Il y avait un collier fixé autour de son cou, juste sous sa tête. Un épais collier de métal, auquel était attaché les chaînes.
Du sang coulait de dessous, la peau écailleuse entaillée par l'effort fourni pour briser une des chaînes.
"Oh, fais pas ta princesse," rétorqua Ansem "on va te relâcher… Mais si tu essayes quoi que ce soit… d'héroïque."
Son épée double apparut dans sa main et il plaça une des lames sous le menton de l'adolescent qu'il tenait toujours.
"C'est ton gamin qu'on tue en premier."
Le serpent d'eau géant se figea, ses nageoires frémissantes dans l'air chaud, ses vibrisses claquant derrière sa tête de colère.
C'est là que l'adolescent comprit.
Il n'avait pas été amené là pour aider. Mais pour être l'appât, le moyen de pression pour faire obéir Haru.
"Tu connais le plan. Avance ! " ordonna Ansem en désignant le canal.
La seconde chaîne tomba, défaite par un des squames et Haru sembla hésiter quelques secondes, ses yeux gris passant alternativement d'Ansem à son otage.
La lame du Remnant mordit légèrement la gorge pâle.
Haru plongea aussitôt, se dirigeant vers son but, suivi par les squames aquatiques.
"Et ne vous ratez pas ! Ou Hojo va encore être furieux."
"Haru ! " appela l'adolescent en essayant de se relever.
"Oh, non j'en ai pas fini avec toi ! " gronda Ansem en le retenant.
L'adolescent poussa un cri de peur et de colère, se débattant contre la prise qu'avait Ansem sur lui, mais l'homme était plus fort que lui, plus grand et bien plus lourd, l'obligeant à rester à genoux au sol.
"Tu vas te calmer, oui ? Tu es encore pire que Loz."
"Va crever ! " rétorqua l'adolescent alors que les sans-cœurs approchaient en piaillant dans leur langage d'oiseaux, entourant Ansem et sa victime.
"Oh ? Comme ton cher Setzer ? "
L'adolescent tourna vivement la tête vers lui.
Ansem ne dû sa vie qu'aux réflexes apportés par la mako. Il recula.
La lame de l'adolescent ne trancha que quelques mèches de cheveux et traça une fine plaie en travers de sa gorge, miroir de celle qu'il venait de lui faire.
Mais le geste emporta la moitié des sans-cœurs, tranchés net par la lame noire.
Une aile blanche aux rémiges rouges s'ouvrait sur le dos de l'adolescent, se dépliant au-dessus d'eux .
"Qu'est-ce que… "
"Je vais te bouffer ! " s'exclama son adversaire en se relevant, ramenant son arme pour asséner un second coup.
Ansem leva la sienne pour parer, mais l'adolescent se figea soudain.
Ses iris verts se fendirent d'une pupille de chat noire.
Et il se redressa plus calmement, abaissant lentement son épée.
Ansem recula d'un pas prudent et observa plus attentivement l'aile qui se déployait sur l'épaule droite de l'adolescent, les cheveux argentés libérés par sa capuche et les yeux de chat qui étincelaient.
"Oh, alors les rumeurs sont vraies…"
Il fronça les sourcils, et leva son épée pour l'abattre sur le cou de l'adolescent, avant de grimacer, comme une voix stridente résonnait sous son crâne, envoyant une douleur comme une fleur de cactuar dans sa tête.
"Oui… oui, Mère, très bien. J'y vais."
Il se détourna, sifflant les sans-cœurs qu'il lui restait avant de s'éloigner, guérissant la plaie sur sa gorge.
L'adolescent resta seul dans l'usine vide de vie. Il se passa de longues minutes silencieuses, pas même troublées par son souffle léger.
Et soudainement, tout aussi vite qu'elle était apparue, l'aile se dissipa, laissant une poignée de plumes après elles, tandis que l'arme de l'adolescent disparaissait à nouveau dans une poignée de poussière.
Il tomba à genoux.
Et vomit une poignée de chair grisâtres à moitié putréfiée.
Il essaya de reprendre son souffle, s'essuyant la bouche d'un revers de main.
L'araignée avait brutalement relâché son emprise. Pourquoi ?
Non. Il n'avait pas le temps de réfléchir à ça.
Il fallait qu'il trouve un moyen de sauver Haru.
Il y avait bien un téléphone en état de marche dans ce bâtiment ? !


"Bonjour, numéro de secours de la Shinra, je vous écoute ? "
-Il y a une invasion de squames à l'usine de traitement des eaux, secteur 5. Ils vont passer par le canal. Faites venir Avalanche, vite.-
L'opératrice voulut interroger son interlocuteur, mais celui-ci raccrocha aussitôt son message transmis. Elle n'avait pu que localiser l'appel.
Secteur 5.
Usine de traitement des eaux.
Elle enfonça la touche d'urgence.
"Jessie ! J'ai eu un appel louche, il y aurait une invasion de squames à l'usine des eaux secteur 5 ! "


"Ok, commence à emmerder la sécurité publique, qu'ils envoient quelqu'un, on va aller vérifier ! Merci et rappelle-moi s'il y a autre chose ! "
Jessie bondit sur ses pieds et se tourna vers Biggs et Wedge qui attendaient qu'elle ait fini, assis sur son canapé, mais prêt à se lever.
"Préparez mon matos, je reviens ! REEVE ! BARRET ! "
Elle se précipita hors de son bureau, traversa la salle commune en trombe et enfonça presque la porte du bureau de Reeve.
"Grabuge au secteur 5 ! Un appel anonyme, invasion de squames par l'usine de traitement des eaux ! "
Reeve enfonça le bouton de l'alarme avec un soupir, suivant Jessie quand elle se précipita à nouveau dans la salle commune. Ses hommes n'avaient pas attendu que l'alarme soit déclenchée pour commencer à se préparer, tout le monde sautant dans leurs bottes et empoignant leur équipement pendant que Biggs et Wedge distribuaient les modules.
"Où est Yuffie ? " demanda Reeve.
"Au canal, elle est partie… HO PUTAIN ! " jura Barret.
"Papa, t'a dit un gros mot ! " s'exclama Marlène alors que Barret la mettait dans les bras d'Elmyra.
"Purin, j'ai dit purin," corrigea Barret, "mon PHS ! Elle est au secteur 5 ! "
"Mais comment elle fait ? " s'étonna Zack, "elle a un instinct pour être toujours au mauvais endroit au mauvais moment, ou quoi ? "
"Ça ou sa limite porte la poisse," rétorqua Cid.


L'équipe de Blitzball avait fini leur partie.
Leurs parties, même.
Et comme à chaque fin d'entrainement, ils flottaient tous à la surface de la sphère, reprenant leur souffle.
C'était toujours impressionnant de les voir flotter comme ça, collant à la surface arrondie comme des araignées d'eau, comme si la gravité n'avait pas de prise sur eux.
"Comment font-ils ça ? " marmonna Seifer.
Squall haussa les épaules. Il savait décemment nager, mais la façon qu'avaient les blitzballer d'évoluer dans l'eau le dépassait. Ce n'était pas pour rien que la grande majorité d'entre eux étaient des artistes martiaux, Zell, Wakka[11] et Yuffie faisaient des bonds assez phénoménaux au sec, une fois dans l'eau, ils étaient inarrêtable. Quant à Tidus, c'était une tradition familiale d'être blitzballer et Yuna avait plus d'une fois plaisanté que s'ils avaient un enfant un jour, il naîtrait probablement avec des branchies. La jeune invokeuse était d'ailleurs en train de rejoindre Tidus, évoluant elle aussi gracieusement dans l'eau maintenant que l'entraînement était fini.
"Oh, le PHS de Yuffie sonne," nota Seifer.
Squall baissa les yeux sur le sac de Yuffie avant de se redresser, sifflant entre ses doigts.
La ninja, en train de flotter en haut de la sphère, se redressa, le fixant d'un regard agacé.
"Squall, Fujin te rappelle qu'on ne siffle pas les filles comme ça, surtout quand elles sont princesses," intervint Raijin, faisant ricaner Seifer.
C'était une habitude que Squall avait pris de Ward, d'attirer l'attention de sa famille d'un claquement de langue ou d'un sifflement avant de leur parler en langue des signes.
Eeeeeet c'était quelque chose qu'il fallait vraiment qu'il arrête de faire. Il ne réalisait pas toujours à quel point ça agaçait les gens autour de lui, qui le prenait comme une marque de mépris.
Une autre des choses que Linoa lui avait reproché.
Différentiation culturelle, quoi.
"Ton PHS sonne ! " continua-t-il en montrant le sac.
Yuffie hocha la tête et se laissa couler comme une pierre, avant de ressortir de la sphère par le bas, secouant la tête pour essorer ses cheveux. Elle rejoignit ses amis sur le gradin, ramassant son sac et prenant son téléphone pour le consulter.
"Ah," murmura-t-elle en se relevant, éteignant le compte à rebours qu'elle avait enregistré dans son téléphone, "fin de ma pause, faut que je rentre."
"Déjà ? " fit Seifer.
"Le devoir m'appelle," expliqua-t-elle en s'essuyant rapidement de sa serviette avant d'enfiler de nouveau son tee-shirt, directement sur sa combinaison humide.
"Tu rentres seule ? " demanda Squall en la regardant enfiler ses chaussures.
Yuffie lui jeta un regard amusé et ouvrit son fuma shuriken d'un geste du poignet.
"Tu te souviens du carnage dans le bureau de ton père ? " demanda-t-elle.
Squall oublierait difficilement. Le tapis avait dû être brûlé.
"Et puis Reno est pas loin. N'est-ce pas, tête de con ? ! "
Un 'va te faire foutre' lointain se fit entendre, quelque part sur les quais. Squall tourna la tête, cherchant son origine. Il avait réussi à semer ses propres gardes du corps quelque part entre la gare et le canal, mais n'avait pas repéré le Turk.
Kiros allait râler quand il l'apprendra, fierté professionnelle oblige.
Le téléphone de Yuffie sonna à nouveau et elle le sortit en soupirant, jetant un regard au nom qui s'affichait.
"Barret, j'ai encore vingt minutes pour rentrer, bon sang… Allo ? "
Squall se leva en voyant le sourire de Yuffie disparaître.
"Non, j'y suis toujours. Quoi ? "
Elle se tourna vers Squall, écoutant toujours Barret, et l'attrapa par le revers de sa veste.
"Alerte," souffla-t-elle à mi-voix, "ici. Oui, compris Barret ! " reprit-t-elle plus haut en regardant autour d'elle...
Les trois autres s'étaient levés à leur tour et l'observaient avec inquiétude. Dans la sphère, certains des blitzballers avaient cessé de flotter pour descendre, alarmé du brusque changement d'humeur de la jeune fille.
"Je vous attends et j'organise l'évacuation, compris ! "
Un cri collectif la fit sursauter et elle vit la sphère de blitzball commencer à trembler sur elle-même, provoquant la fuite immédiate des nageurs vers la terre ferme.
"Qu'est-ce que…" fit Squall alors que Seifer se précipitait là-bas, suivit de Fujin et Raijin.
"Ça c'est un mage natif d'élément eau qui est pas loin et énervé," murmura Yuffie, "Barret, ils sont là je…"
Un hurlement strident la fit sursauter, suivi de cris d'horreur venant des deux rives.
Un immense serpent d'eau bondit hors de l'eau au milieu du canal, fendant les flots et entraînant le contenu du canal après lui, comme s'il le suivait.
"Barret, on a un léviathan sur les bras," annonça Yuffie sans détourner le regard de la créature.
Puis elle lâcha son téléphone, ne prenant pas la peine de raccrocher.
Il serait fichu dans une minute de tout façon.
"EVACUEZ ! ! " hurla-t-elle à plein poumons en serrant son autre main sur le col de Squall.
"Que…"balbutia Squall.
Le mur d'eau qui suivait le léviathan balaya les quais, emportant tout ce qui n'était pas fixé au sol.


[1] C'est un chat, quoi. Ils avaient de la chance que Red n'ait pas ce genre d'instinct. Ou qu'il soit trop poli pour ça.
[2] Kulukan, des Kilika Beasts. Parce qu'elle a des bras presque aussi musclés que ceux de Papa.
[3] Je sais, je sais, le fait que Cloud n'ait pas de numéro est plutôt important dans le jeu originel, mais avec le développement de l'histoire, j'ai réalisé que ça ne collait pas dans le scénario d'Avalanche.
[4] Équipe de blitzball de Wutai Nord. Wutai sud, ce sont les Adamantaimai. D'où les tee-shirts qu'Aérith offre à Vincent.
[5] Alors pour les archives fanfic, est-ce que ça compte comme un cross-over?
[6] Variante Burmécienne de: Et mon cul, c'est du chocobo. Avec la variante locale de Midgar: Mon cul, c'est du cuir de Zolom
[7] Voir Boules de Neige chapitre 6 : Cauchemar : Zack et Cid
[8] Note de la fanficeuse: HA HA HA HA HA HA. Ha.
[9] Subtil, Jessie, subtil.
[10] Ça avait été remplacé par 'petit con' assez vite, ceci dit.
[11] Je suis désolée, mais je refuse que la spécialité martiale de Wakka à la MGU soit le ballon prisonnier.