Résumé:
Après l'attaque du pilier du secteur 8, il faut ramasser les morceaux.
Et les morceaux d'Avalanche ont l'air bien difficile à assembler sans celui portant le nom de Tifa.
Personnages :
Team Avalanche + Tifa,
Tags spécifiques au chapitre:
Procédure médicale, angst, les Highwinds aiment bien le Valentine, Shera bas les pattes des plates-bandes de Cid, j'ai déjà assez de mal à les jeter dans les bras l'un de l'autre, Vincent/Cid, slow-burn, mais genre slooooooow-burn, ils commencent à peine, deuil, alcool, référence à la vie sexuelle de Cid, oh boy, il s'ennuyait pas le coquinou, référence à un ménage à trois, non aucun rapport avec Cid, Reeve est un papa, politique interne de la Shinra, quoi c'est un warning nécessaire je trouve.
"Tu sais, un analgésique…"
"Non."
"Tête de bois."
"C'est le plus poli qu'on m'ait jamais insul…"
Crac
"Ow ! "
A peine arrivés, Aérith avait ordonné à Vincent de l'attendre dans l'infirmerie pendant qu'elle aidait Shera à emmener le corps du clone au labo.
Elle était revenue en affichant son expression de docteure en colère, celle qui rappelait au monde entier que Mère Nature était omnivore, en pétard et prête à remettre en place des morceaux d'os cassés.
"Je peux dire pire, si tu veux" déclara Aérith, "compte jusqu'à trois."
"Trois[1]."
Crac
"OW"
"Encore un et c'est fini. Comment tu t'es fait ça ? "
"Coup de pied."
Crac
"Chikushô[2] ! "
"Si elle avait la moitié de la puissance de Ti... Tifa, c'est un miracle que tu ais encore ta main." murmura Aérith en insérant une matéria sur son bracelet.
"Elle avait… huit ? Neuf ans ? " répondit Vincent en haletant, essayant de chasser de la main les fragments de masque qui réapparaissaient autour de lui.
Les mains d'Aérith se figèrent brièvement sur ses doigts, avant que la guérisseuse ne reprenne la pose de l'attelle.
"C'est nécessaire ? " demanda Vincent en regardant le dispositif.
"Oui. Il faut laisser le temps à ton corps de réaliser qu'il est guéri et qu'il n'a plus besoin d'envoyer de signaux de douleur."
La lueur caractéristique d'un sort de soin s'éleva des mains d'Aérith et le sniper sentit la fracture se résorber.
Vincent poussa un soupir en posant son front sur le bureau d'Aérith.
"Je déteste les fractures," murmura-t-il.
"Combien de fractures tu as eu pour… Non je veux pas savoir finalement," marmonna Aérith, "tête de Turk."
La main de démon de Vincent se déplia, cherchant à tâtons l'épaule de la guérisseuse, la tapotant aussi délicatement qu'il pouvait.
"Ça, c'est plus approprié comme insulte."
Aérith soupira, faisant voler ses mèches.
"Une moitié de cachet, Vincent."
"Non. J'ai... J'ai encore des choses à dire à Reeve dès qu'il sera là."
Il se redressa et grimaça, tenant sa main humaine dans la démoniaque.
"Tu n'as pas à souffrir inutilement…"
"Je n'aime pas… La façon dont ça m'endort."
"Et pourtant, tu as besoin de dormir, de ne plus avoir mal et de manger quelque chose."
"Dans cet ordre ? "
"Je crois que je préférais quand tu n'avais pas le sens de l'humour," marmonna Aérith en notant quelque chose dans le dossier de Vincent.
"C'est de la faute de ton père," rétorqua Vincent.
Ils se tournèrent tous les deux quand Shera entra, poussant la porte battante de l'épaule. La biologiste tenait une petite bassine d'inox dans une main et retirait son masque et ses lunettes de protection de l'autre.
"Bonne nouvelle, ce n'était pas un fœtus," annonça-t-elle.
Vincent poussa un soupir de soulagement pendant qu'Aérith grimaçait.
"Tu vas devoir m'expliquer comment tu as su qu'il y avait quelque chose ? " continua Shera en approchant d'eux.
"Elle me l'a dit. Qu'est-ce que tu as trouvé ? "
"Ça" déclara Shera en posant un plat d'inox sur le bureau, entre Vincent et Aérith.
Ça étant une capsule transparente longue comme une moitié de pouce et remplie d'une espèce de liquide organique gris.
"Elle avait ça dans l'estomac. Je pense qu'elle a dû l'avaler il y a maximum une heure."
"Pourquoi avaler la capsule ? " demanda Aérith, confuse.
"Pour que seuls ceux au courant puissent la trouver et personne d'autre," répondit Vincent, "c'est une tactique d'espion ou de vendeurs de drogues."
"Tu sais ce que c'est ? "
"Je n'aime pas ça" répondirent d'une même voix Vincent et Aérith.
"Shera, ne l'ouvre pas ici, j'ai un mauvais pressentiment," demanda Aérith.
"Je colle ça au frigo et je contacte le professeur Falmis pour qu'il me prête un labo demain."
"Discrètement ? "
"Je faisais ça avant que tu sois à Avalanche, Vincent," rétorqua Shera avec un regard blasé.
"Désolé…" soupira Vincent en se frottant le front du dos de sa main de démon.
"Un quart," supplia la guérisseuse.
"Aérith," soupira Vincent.
"S'il te plait."
"Il ne veut pas d'anti-douleur ? " comprit Shera.
"J'ai réduit trois fractures sur ses doigts et appris un gros mot en Wutan," répondit Aérith.
"J'ai trouvé pire que Cid," soupira Shera, "je vais te chercher un pack de glace."
La biologiste reprit son butin et ressortit, laissant la guérisseuse et sa victime seuls. Vincent jeta un petit regard à sa main en train de guérir avant de se tourner à nouveau vers Aérith, qui rangeait son dossier médical.
Un de ces jours, il faudrait qu'il y jette un œil, par curiosité.
"Comment as-tu tué le clone ? " demanda-t-il.
Aérith soupira en se rasseyant et se tourna sur son siège, reprenant son sceptre qu'elle avait posé contre le mur le temps de donner des soins. Elle détacha une matéria et la tendit à Vincent. Celui-ci la prit délicatement de sa main démoniaque.
Et manqua de la laisser tomber.
"C'est…"
"Destruction. Niveau maître. Avec le sort Mort."
"Où as-tu eu ça ? "
"Wall Market. Ou pour être plus précise, Tseng l'a confisquée lors de la fermeture d'un tournoi de combats clandestin. Je te rassure, je l'utilise rarement. Elle me prend trop d'énergie… je préfère la garder pour les urgences."
Une guérisseuse avec un sort mortel. Qu'est-ce que Tseng avait dans la tête ?
Probablement les meilleures intentions possibles, mais ça venait d'un Turk. Et il était mal placé pour faire des critiques vu ce qu'il apprenait à Yuffie.
Et puis, ça avait probablement sauvé la vie d'Aérith ce soir.
"Je préfèrerais que tu n'en dépendes pas…"
"Toi et Tseng, vous êtes vraiment les mêmes," maugréa Aérith en se levant, reprenant sa matéria pour la remettre à sa place.
Shera revint tout en enveloppant un pack de glace dans une serviette éponge.
"Tiens, mets ça sur ta main, en attendant qu'on te convainque de prendre un analgésique."
"Les autres sont arrivés ? " demanda Aérith.
"Elmyra aussi. Elle est en train d'essayer de les réconforter."
Aérith hocha la tête d'un air distrait, regardant Shera poser le pack de glace d'autorité sur la main de Vincent qui se laissa faire.
"Tu nous rejoins ? "
"Je ne suis pas sûr d'être le bienvenu en ce moment," répondit Vincent sans lever les yeux.
La guérisseuse ouvrit la bouche pour répondre mais se ravisa et secoua la tête. Elle prit son sceptre et sortit sans un mot de l'infirmerie.
"Idiot," murmura Shera d'un ton épuisé.
Il leva les yeux vers elle et remarqua qu'elle avait retiré sa blouse, restant en pantalon de pyjama et en débardeur à fines bretelles. Il garda le regard soigneusement fixé sur son visage. Il était assez grand et elle assez petite pour qu'assis, il ait le visage à la hauteur de son décolleté. Cid n'apprécierait probablement pas s'il le trouvait dans cette situation avec sa sœur.
"Je suis désolé de t'avoir obligée à..."
"Vincent, tais-toi," ordonna Shera.
Si Shera décidait un jour d'avoir des enfants, ils auraient intérêt à savoir se tenir, elle avait des années d'entraînement à donner cet ordre à son frère et ça s'entendait.
Trigger n'avait pas eu autant d'autorité sur lui, et le Turk avait eu trois enfants en plus d'avoir géré Vincent depuis l'âge de dix-neuf ans.
"Vincent," reprit-t-elle d'un ton plus doux, "j'ai ouvert le corps de mon meilleur ami il y a quelques mois pour savoir ce qu'un sociopathe lui avait fait subir, je peux encaisser."
"Jessie…"
"Laisse-lui quelques jours et elle comprendra qu'elle te doit la vie de…"
"Ses petits amis ? " acheva Vincent.
Shera eu un petit sourire amusé.
"Ah. Tu sais."
"Ils ne sont pas vraiment discrets."
"Ils avaient peur que tu ne comprennes pas un ménage à trois."
"Je suis vieux, pas un moine," soupira Vincent.
Et un de ces jours, il faudrait qu'il explique à ses jeunes équipiers qu'ils devraient faire de gros efforts pour essayer de le choquer avec leur vie sexuelle.
Il faudrait probablement impliquer un chocobo.
"C'est probablement ton côté gentleman qui les impressionne…"
Vincent laissa échapper un petit rire narquois. Ses anciens collègues Turk devaient être en train de hurler de rire dans la Rivière de la Vie. Surtout Ash.
"Je ne plaisante pas," rétorqua Shera avant de montrer sa tenue d'un geste, "je porte un haut qui a déjà fait ses preuves sur un homme[3] et tu te contentes de me regarder dans les yeux."
"Cid me tuerait."
"Cid est la chose la plus néfaste qui soit jamais arrivé à ma vie sexuelle," marmonna Shera d'un ton las, "et il y a eu de sacrés tocards dans cette vie sexuelle."
Il aurait vraiment adoré connaître Shera trente et un ans plus tôt.
Il aurait même essayé d'être discret pour préserver le tempérament de dragon de Cid.
"Mais merci de l'avoir sauvé, Vincent."
Elle posa le bout de ses doigts sur son épaule de démon.
"Merci de les avoir tous sauvés."
Puis son expression changea, elle eut un petit sourire et pointa le pouce en direction de la pièce de vie.
"Et maintenant, tu te lèves de cette chaise et tu viens boire quelque chose et manger un truc avec nous avant d'aller te coucher."
"Oui, Shera."
Quand il arriva dans la salle de vie, il hésita néanmoins à obéir à Shera.
Le silence régnait dans la pièce.
Ce n'était pas normal. Même être sur les rotules n'empêchait pas Zack de parler, ou Cid et Shera de se chamailler.
Il n'y avait pas de blagues, pas de réprimandes d'Aérith sur leur manque de prudence, pas de grommellements de la part de Jessie sur les modules perdus ou abimés. Pas de dispute pour savoir qui prenait les douches en premier, personne ne ronflait sur le petit canapé pendant que Red protestait que c'était son lit.
Ils portaient encore tous leurs uniformes, tachés de sang pour la plupart, de la poussière du pilier, leurs armes posées contre le mur, les matérias encore insérés dans les encoches de leurs équipements.
Cid était sur le grand canapé pour une fois. Et quand sa soeur approcha pour voir s'il allait bien, au lieu de la laisser le houspiller et l'ausculter comme à chaque retour de mission, il l'attrapa par les bras et l'assit sur ses genoux avant de la serrer contre lui, comme un naufragé s'accrochant à une bouée de sauvetage.
Cloud était sur le canapé de Red, tournant le dos au reste de la place, sauf au lion, blotti sur ses genoux, il semblait réveillé, mais ne bougeait pas, respirant à peine. De là où il était, Vincent ne voyait pas son visage, ni les cicatrices du coup de griffes du clone.
Les autres étaient assis autour de la table. Marlène était dans les bras de son père et dormait à poings fermés, un pouce dans sa bouche. Le colosse contemplait son visage d'un air grave, caressant ses cheveux sans dire un mot. A côté de lui, Zack était accoudé sur la table, le visage au creux des bras et Aérith appuyée sur son épaule, sa petite main dans une des siennes. Wedge était assis à côté de Jessie, épaule contre épaule, Biggs de l'autre côté. Le brun vit Vincent arriver et retira sa main de sous la table, probablement du genou de Jessie.
"Vincent ? "
Il se tourna vers Elmyra. Leur gouvernante avait mis son tablier et préparait des boissons chaudes, maniant le thé et la cafetière comme des potions de soins avec un meilleur goût.
Elmyra croyait en l'adage que tout irait mieux après une tasse de thé et l'appliquait avec détermination à chaque fin de mission. C'était peut-être la seule chose normale ce soir et, étonnement, ça le rassénérait un peu.
"Café ? Thé ? " proposa-t-elle avec un petit sourire.
"Café. S'il te plaît."
"Ça arrive, va t'asseoir."
Vincent se laissa tomber sur sa chaise plus durement qu'il l'aurait voulu. Yuffie tourna la tête vers lui et il tenta d'avoir un petit sourire rassurant mais elle ne répondit pas, retournant à la contemplation de ses mains.
"... Parlez-moi d'elle."
Cette fois tout le monde se tourna vers Vincent.
"Parlez-moi d'elle" répéta-t-il. "Dites-moi comment elle était."
"Tu crois que c'est le moment ? " aboya Barret.
"Oui. Oui, c'est le moment. C'est maintenant qu'il faut que vous me disiez quel était son plat favori. Comment est-ce qu'elle se coiffait. Ce qu'elle ne pouvait pas voir en peinture. C'est maintenant qu'il faut que vous vous souveniez d'elle, avant que... que ce qui s'est passé ce soir ne gâche vos souvenirs. Dites-moi quelle était sa plus grande qualité ? Quel était son pire défaut ? "
Le silence retomba sur la pièce.
Ce fut la voix de Zack qui le brisa.
"Elle était d'une timidité maladive."
A nouveau le silence, mais abasourdi cette fois.
"Tu te fous de moi ? " rétorqua Cid d'un ton stupéfait. "On parle la même nénette qui m'a mis une gifle en me voyant la clope au bec devant Marlène à notre première rencontre ? "
"Elle a fait ÇA ? " s'exclama Wedge, les yeux ronds.
"Elle visait la clope," expliqua Zack en relevant le visage, un petit sourire aux lèvres pendant que Shera laissait échapper un petit rire au souvenir de la scène, "elle s'est excusée pendant au moins vingt minutes après."
"Tu n'avais qu'à pas fumer devant Marlène," grommela Barret.
"Je le fais plus ! " protesta Cid, "une baffe m'a suffi ! J'ai eu l'impression de prendre un train dans la tronche ! "
"Quand on était enfants, c'était encore pire," précisa Zack en se redressant, prenant la main d'Aérith dans les siennes. "La première fois qu'on l'a vue… Elle est restée planquée derrière son père pendant une demi-heure avant d'oser venir jouer avec nous… Tu te rappelles, C…"
Il se tut, observant son frère qui ne réagissait pas. Il allait baisser les yeux à nouveau quand la voix de Cloud s'éleva.
"Elle avait le plus joli sourire que j'ai jamais vu."
Zack releva les yeux.
"Et... et pourtant, il lui manquait une dent," ajouta Cloud en tournant légèrement la tête vers eux.
"On avait… neuf, dix ans ? Et elle, un an de moins ! " expliqua Zack précipitamment devant les regards stupéfaits de leurs équipiers.
"Sa maman venait de mourir. Elle était toujours triste," continua Cloud, se dégageant doucement de sous Red pour pouvoir se tourner vers eux, gardant une main sur le dos du fauve.
"Oui, oui…"
"Et du coup, Zack faisait pleins de bêtises pour la faire rire."
"Ou... Cloud ! Tu les faisais avec moi je te rappelle ! " protesta le brun.
"Fallait bien que quelqu'un s'assure que tu y survives," déclara le blond avec un petit sourire en coin.
Il tourna la tête vers les autres, les regardant tour à tour avant de continuer.
"C'était… c'était la meilleure guide de montagne de Nibelheim à quatorze ans. Elle connaissait la montagne comme sa poche. Les cavernes, les pics, les sentiers, tout ! "
"Et on était tous les deux toujours collés à ses basques," précisa Zack, "c'est comme ça qu'on gagnait notre argent de poche. Elle faisait le guide auprès des touristes, Cloud et moi on faisait peur aux monstres et on partageait en fin de journée."
"J'ai jamais compris pourquoi elle avait quitté Nibelheim," ajouta Cloud en fronçant les sourcils, "on peut pas sortir Nibel de ses loups."
Cette fois, ce fut Barret qui eut un petit rire et vers qui tout le monde se tourna. Il avait posé Marlène sur ses genoux, la petite tête de l'enfant au creux de son coude et savourait une tasse de thé.
"Elle est partie de Nibelheim dès qu'elle a eu dix-huit ans pour vous chercher," expliqua le colosse.
Au regard abasourdi des jumeaux, Vincent comprit qu'ils n'avaient pas été au courant.
Barret continua.
"Je l'ai rencontrée quand j'étais encore ferrailleur. Son précédent patron a essayé d'être un peu trop… familier avec elle et je l'ai aidée à trouver un boulot au bar d'un ami."
"Elle ne nous l'avait pas dit, ça," déclara Zack avec un regard dangereux, imité par son frère.
"Elle s'est débrouillée toute seule pour lui faire comprendre que c'était un comportement inapproprié," assura Barret.
"Le mec a survécu ? " demanda Cid.
"Les deux bras cassés. Elle m'a dit à l'époque qu'elle cherchait des amis d'enfance qui avaient disparu à Winhill."
"Mais ça faisait… des années qu'on avait disparus…" balbutia Zack, échangeant un regard avec son frère.
"C'est ce que tout le monde lui disait, mais elle n'a jamais perdu espoir de vous retrouver. C'est moi qui ai trouvé les autorisations de sortie de Midgar pour Aérith et elle."
"Trouvé," murmura Aérith en gloussant.
"Toi ? Tu as 'trouvé' des autorisations ? " s'exclama Jessie pendant qu'Elmyra distribuait des tasses, un petit sourire aux lèvres.
"Je n'ai pas eu trop le choix, Aérith pleurait."
Zack dédia un regard stupéfait à sa fiancée qui rosit.
"Elle a déboulé dans le bar de Jecht, en larmes, et a demandé à voir la fille de Nibelheim qui était là avant de lui hurler que Cloud et Zack étaient en vie," expliqua Barret en acceptant sa tasse.
"Je... je venais d'avoir une intuition que Cloud et toi étiez en vie après cinq ans sans nouvelles, je n'étais pas très cohérente," se justifia Aérith.
"Tseng est arrivé juste après et a emmené Aérith. A deux heures du mat, le lendemain, j'avais Tifa qui tambourinait à ma porte, avec Aérith sous le bras et un sac sur le dos, pour me demander comment elles pouvaient sortir de Midgar pour vous trouver."
"Ah, c'est pour ça qu'elle n'aimait pas Tseng ? " nota Shera.
"Ça a été toute une aventure," admit Aérith avec un petit rire, essuyant une larme au coin de l'œil," road trip à Alexandria avec les Turks à nos trousses, ses poings et aucun autre indice que mon intuition…[4]"
"Je comprends mieux pourquoi elle m'a mis un pain quand je l'ai traité d'hallucination," murmura Zack.
"Elle t'a frappé ? " s'exclama Yuffie.
"Elle m'a cassé deux dents ! "
"Je confirme, j'ai dû le soigner," ajouta Aérith.
Derrière elle, Cid et Shera étaient écroulés de rire l'un sur l'autre.
"Timide, hein ? " répéta Vincent.
"Disons plutôt réservée." corrigea Zack, "jusqu'au moment où tu la prenais à rebrousse-poil et qu'elle montrait les crocs."
"Oh, bon sang. Cornéo," murmura Barret.
"Que s'est-il passé ? " s'inquiéta aussitôt Vincent, trop familier des méthodes de Cornéo père.
"Tifa était…" commença Barret.
"Avait…" ajouta Wedge en faisant quelques gestes évocateurs.
"Un tour de poitrine assez impressionnant," finit par expliquer Zack, "des jambes jusqu'aux yeux et un visage de poupée. Pas un bon mélange dans les Taudis avec Cornéo qui flaire les jolis petits lots à deux secteurs de là."
"Il a…" commença Elmyra en plissant les yeux.
"Abandonné quand elle a tabassé une dizaine d'hommes à elle toute seule," expliqua Barret avec un petit rire, "dans la rue et en public, pour leur apprendre les bonnes manières. Jecht et moi, on s'est contentés d'applaudir et de prendre les paris."
"Barret ! " s'exclama Zack, outré et mort de rire.
"Ouais, ça lui ressemble bien," ajouta Cloud.
"Impressionnant," admit Vincent.
"Elle prenait déjà des cours avec... euh… comment il s'appelle déjà le prof de la MGU qui vient aider les mômes ? " demanda Wedge.
"Professeur Harcourt," intervint Yuffie. "C'est aussi mon prof."
"Tu finiras par taper aussi fort qu'elle ? " s'inquiéta Biggs.
"J'espère," déclara Yuffie avec ferveur.
"Ouais, mais elle avait commencé à dix ans à Nibelheim avec un moine voyageur…" expliqua Zack avant de froncer les sourcils en claquant des doigts, "comment il s'appelait déjà ? "
"Zangan," répondit Cloud.
"C'est ça ! " s'exclama Zack, "son père voulait qu'elle apprenne à se défendre au cas où les deux bons à rien d'à côté commencent à se faire des idées à son sujet."
"Les bons à rien ? "
"Nous," répondirent les jumeaux d'une même voix.
"'Fin, surtout Zack", ajouta Cloud.
"C'est TOI qui t'es fait des idées à son sujet," grommela Zack, d'un ton bon enfant en désignant son frère de l'index.
"Attends, vous étiez déjà ensemble à Nibelheim ? " s'exclama Shera.
Cloud vira au rouge vif en un clin d'œil, à la grande surprise de Vincent.
"Déjà ? "
"Quand Cid et moi sommes arrivés, ils étaient collés l'un à l'autre," expliqua Shera en se tournant vers lui.
"Exactement comme ces deux-là," précisa Cid en montrant Aérith et Zack.
"Ils ont commencé à roucouler dès l'âge de treize ans," soupira Zack, "Cloud lui envoyait au moins deux lettres par semaine quand on est arrivé à Midgar."
"T'en envoyait trois par semaine à Aérith quand on a été déployé à Winhill," rétorqua Cloud avec un regard noir.
"Je les ai gardées," précisa Aérith avec un petit sourire, regardant son fiancé s'empourprer à son tour.
"Ah, tu veux un défaut Makoto ? " s'exclama soudain Yuffie, "en voilà un : Elle savait pas faire la grasse matinée ! Tous les matins, debout à six heures du mat ! Elle dormait dans ma chambre, j'avais pas le choix, j'étais debout en même temps qu'elle ! "
"Au moins tu étais à l'heure en cours" rétorqua Barret.
Cloud hocha tristement la tête.
"Impossible de rester dormir au chaud avec elle," confirma-t-il.
"Je croyais qu'elle dormait dans la chambre de Yuffie ? " s'étonna Vincent.
"J'allais régulièrement sur le canapé ou à l'infirmerie," grommela Yuffie, les bras croisés, d'un air faussement ronchon.
Zack et Cid se mirent à rire quand le blond piqua un fard derechef.
"Le pot-au-feu de Zuu" intervint Elmyra en posant une théière au centre de la table. "C'était son plat favori."
"Avec substitution de chocobo vu que c'est impossible de trouver de la viande de Zuu dans le coin" nota Zack.
"J'ai... j'ai sa recette. Elle me l'avait donnée… Je pourrais essayer de la refaire, ce ne sera pas la même chose mais…"
"Oh oui ! " s'exclama Wedge. "S'il te plait Elmyra ! "
"Oh, ses saucisses de béhémoth aux lentilles, elles étaient divines", murmura Biggs.
"Elle adorait cuisiner, et elle le faisait très bien" ajouta Elmyra "ça lui arrivait de me mettre hors de la cuisine en me disant qu'elle s'en chargeait ce jour-là."
"Oui, elle se chargeait de la cuisine au bar, aussi," se souvint Barret, "ça nous a sauvé de la faillite plus d'une fois. Je crois qu'Auron a encore quelques-unes de ses recettes, je les lui demanderais si tu veux, Elmyra…"
"C'est elle qui a repeint l'infirmerie", intervint soudain Reeve.
Tout le monde se tourna vers lui. Vincent l'avait vu entrer, quelques minutes auparavant, mais n'avait rien dit, le laissant écouter les souvenirs échangés. Il arrivait tout juste de la Plaque, Rude debout derrière lui, tous les deux encore en manteau.
Il approcha et se servit un café tout en continuant.
"Sans demander la permission, j'ajouterais. N'est-ce pas Aérith ? "
"C'était une très bonne idée et en tant que guérisseuse de l'équipe, il est de mon devoir de faire mon possible pour l'amélioration de la morale du groupe," déclara Aérith d'un ton pompeux.
"Fallait repeindre de toute façon," intervint Barret.
"Zack avait cassé un mur d'un coup de pied," expliqua Jessie.
"Quelle idée de foutre du contreplaqué dans un mur, aussi."
"Voyez le bon côté des choses, j'avais suggéré du rose pour les murs" intervint Aérith.
"C'était elle aussi les fleurs ? " demanda Vincent.
"Oh non, c'est moi, Cloud et Marlène," expliqua Aérith.
"Tifa était une amie d'enfance, ma future belle-sœur et presque une petite sœur pour moi, mais elle avait le talent artistique d'un loup de Nibel," déclara très sérieusement Zack.
"Par contre, c'est elle qui a mis des autocollants partout," intervint Shera.
"Rude avait un faible pour elle ! " ajouta Yuffie en montrant Rude qui pâlit soudain quand Cloud lui jeta le mauvais œil mako.
"En tout bien tout honneur," déclara précipitamment le Turk. "je n'avais jamais rencontré une artiste martiale capable de me mettre par terre au saut du lit."
"Road trip à Alexandria," murmura Aérith.
"Tseng en fait probablement encore des cauchemars," marmonna Rude dans la tasse de café qu'Elmyra lui avait offerte.
"Oh ! " s'exclama soudain Wedge en se levant d'un bond, "attend Vincent, je vais chercher l'album souvenir, tu pourras voir à quoi elle ressemblait ! "
"J'en serais ravi," déclara Vincent avant de se tourner vers Zack.
Le brun avait retrouvé le sourire. Son frère s'était levé et se tenait près de lui, tous deux échangeant des anecdotes sur la vie à Nibelheim avec Tifa.
Ils souriaient tous les deux.
Et avec eux tout Avalanche.
Quand Barret finit par envoyer tout le monde au lit, il était au moins trois heures du matin. Yuffie s'était endormie sur la table depuis un moment et avait été délicatement relocalisée sur le canapé avec Red.
Vincent connaissait le plat préféré de Tifa, sa coiffure favorite, la façon dont elle faisait les gros yeux à Cid quand une grossièreté lui échappait, son tic de taper le sol du bout du pied quand elle attendait quelque part. Il savait que seuls les augmentés de l'équipe étaient capable de la battre au bras de fer et qu'elle avait baby-sitté Marlène avant même d'entrer à Avalanche.
Biggs et Wedge avaient sorti l'album souvenir de sa cachette et Vincent avait découvert toutes les photos qu'ils avaient pris depuis leur arrivée à Avalanche, celles des jumeaux (et il comprenait Elmyra et son entêtement à engraisser les membres d'Avalanche, voir les Strife aussi maigre était un crève-cœur), des pages entières de photos d'Aérith et Tifa en train d'hurler de rire ou réprimander leurs hommes, d'une toute petite Marlène dans les bras de son père, Red roulé en boule contre Cloud, les anniversaires, Marlène portant la couronne de bougies traditionnelle des Jours Carbuncle.
Ils avaient aussi ajouté des photos de Vincent. Le Turk qu'il avait été lui hurlait de faire disparaître ces preuves de son existence, mais il ne put se résoudre à le leur demander.
Il devait reconnaître que Wedge avait été discret pour prendre les photos, il n'avait rien vu.
Il y en avait une de Yuffie et lui, dans la rue. Tous les deux les bras chargés de courses, lui penché vers elle, l'écoutant probablement raconter une de ses aventures à la MGU et elle se tenant à sa manche de sa main libre.
Une autre de Cid et lui de dos en train de travailler sur sa moto, épaule contre épaule.
Sur la plus récente, il avait été plongé dans les dossiers des précédentes missions, le regard rivé sur la tablette.
Il n'avait pas réalisé à quel point il ressemblait à son père avant de voir cette photo.
Il tenta d'aider Elmyra à ranger les tasses, mais celle-ci le chassa vers le couloir, lui intimant d'aller se coucher.
Il allait obéir quand il croisa Barret, qui revenait de l 'étage après avoir couché Marlène.
Le lieutenant d'Avalanche stoppa devant lui, l'empêchant de continuer.
Habituellement, c'était le signe du début d'une réprimande verbale et sonore, mais cette fois, le colosse ne semblait pas vouloir crier.
"Merci," murmura-t-il au bout d'un moment de silence, "tu avais raison… c'était le bon moment pour parler d'elle."
Vincent hocha la tête, mais Barret n'avait pas fini.
"Je crois… qu'elle t'aurait bien aimé."
"Malgré mes mensonges ? "
Le colosse eut un petit sourire en coin.
"Elle aurait compris. Elle m'aurait empêché de te crier dessus tant que tu n'aurais pas fini tes explications."
"J'ai toujours des secrets," admit Vincent.
Barret garda le silence quelques secondes avant de secouer la tête.
"Je te fais confiance pour les révéler si et quand ce sera nécessaire."
"Merci."
La main de Barret lui tapota l'épaule avec autant de délicatesse que possible.
"Pour un Turk, tu as du cœur," ajouta-t-il avant de partir vers la salle de vie.
Turk au cœur tendre.
Vincent frissonna.
Le toit était frais sous ses mains.
Après la chaleur étouffante de la journée et la nuit éprouvante, cela faisait du bien.
Cid y était déjà, contemplant le pilier du secteur 8 où ils avaient combattu, quelques heures plus tôt. Il avait fini par se changer, abandonnant son tee-shirt couvert de sang séché pour un propre et un pantalon de pyjama.
"Comment tu as fait pour monter ici avec ton ventre ? " demanda Vincent en se hissant sur le toit.
"Dit celui qui a trois doigts de cassé."
Vincent accepta la critique avec dignité et un petit sourire.
"Je ne dirais rien à Aérith si tu ne dis rien à Shera" proposa Cid.
"Vendu."
Il rejoignit le dragoon, s'installant à côté de lui.
Il y avait une photo de Tifa entre eux, un petit verre d'alcool posé sur un coin et une bouteille rectangulaire pas loin.
"Veillée Burmécienne ? "
"Avec liqueur de Nibelheim. Ils font un tord-boyau assez costaud dans leurs montagnes."
Cid remplit son propre verre et le tendit à Vincent.
"Tifa m'avait offert la bouteille. Tu en as déjà bu ? "
"J'ai été à Nibelheim. Ils considèrent que c'est une bonne blague à faire aux touristes" répondit Vincent avant de vider le verre d'une traite.
Il grimaça. Le goût n'avait pas changé. C'était toujours aussi atroce. On aurait dit une potion.
"On n'en parle pas à Shera et Aérith, non plus ? " suggéra Cid avec un sourire moqueur.
"Non. Promis."
"Santé, Tifa," ajouta Cid en levant la bouteille en direction de la photo.
Il avala une petite gorgée et grimaça.
"Fallait vraiment que je l'aime cette petite pour vouloir finir cette bouteille," plaisanta-t-il à moitié.
"Elle avait l'air d'être facile à aimer, en effet."
Cid hocha la tête avant de regarder Vincent.
"Comment ça va, toi ? "
"Aérith m'a soigné…"
"C'est pas ce que je veux dire."
Vincent tourna les yeux vers Cid qui roula des siens en réponse.
"Tu viens de tuer une dizaine de clones à toi tout seul alors qu'on étaient tous complètement dépassés, je peux au moins te poser la question."
"J'étais un Turk, Cid. Je tuais et j'étais payé pour ça."
"Alors pourquoi tu es dans cet état ? " demanda simplement Cid.
"Je ne sais pas de quoi tu parles."
"Arrête ça," ronchonna le pilote en secouant la tête, "personne n'est dupe."
"Je ne com…"
"Ta main de démon tremble."
Vincent baissa les yeux sur ses mains. Sa main de démon tremblait et se convulsait, les longs doigts se pliant et dépliant nerveusement sur le petit récipient fragile. Il reposa précipitamment le verre avant de risquer de le lâcher. A côté de lui, Cid posa la bouteille à son tour sur un coin de la photo.
"Comment ça va ? " répéta le pilote.
"J'ai tué un enfant," répondit Vincent, le regard fixé au loin, sur le pilier central.
"J'en déduis que ce n'est pas une activité Turk normale ? "
Vincent eut un reniflement méprisant à cette idée.
"Si… Si, ça arrive mais… quand… Quand tu deviens Turk. Quand tu deviens un des hommes de main de la Shinra… On t'autorise une chose que tu peux demander et que jamais… jamais ils ne te demanderont de faire pour eux. "
Il attrapa la bouteille de sa main humaine, grimaçant quand son corps lui rappela qu'il avait eu trois doigts cassés il y a quelques heures et qu'il était censé avoir mal.
La mako l'empêchait d'être saoul, mais le goût de la liqueur de Nibelheim lui remettrait les idées en place.
"Ça peut être… une phobie, une limite morale… n'importe quoi, mais cette chose-là, ils ne te le demandaient jamais. De mon temps on appelait ça le tabou. C'était la seule façon de refuser une mission."
Il avala une longue gorgée avant de reposer la bouteille.
Étonnant comme il pouvait encore avoir des réflexes d'alcoolique malgré le temps passé.
Ça lui venait de ses années Turk.
Mission agitée ? Laisse ton partenaire te recoudre, mets un pansement, boit un verre ou dix et au lit, seul ou accompagné.
Tant que c'est toujours attaché, ça va.
Pas étonnant qu'il y ait autant de 'retraite anticipée à leur initiative' chez les Turks.
"J'avais demandé à ne jamais tuer d'enfant. Et je ne l'avais jamais fait. Des femmes, des hommes, des personnes âgées, des mutants, des animaux, mais jamais… jamais d'enfants."
Jusqu'à aujourd'hui.
"Il sait que je suis à Avalanche, Cid. Il a envoyé une enfant vers moi pour que je n'arrive pas à la tuer, possiblement pour qu'elle me tue. Il savait qui était Tifa pour vous et il a envoyé des clones avec son visage pour vous déstabiliser, pour qu'elles vous détruisent plus facilement. Ce n'est pas un accident."
Mais qu'est-ce que Hojo avait contre Vincent à la fin ?
Pourquoi est-ce que le but dans la vie de ce malade était de pourrir, encore et encore, la vie du Turk ?
"Comment Hojo aurait pu le savoir ? " s'étonna Cid.
"Je lui ai dit."
"Hein ? "
Cid tourna la tête vers le Turk. Le niveau de la bouteille avait encore baissé. Il n'avait jamais vu une descente pareille. Même chez Setzer après la mort de Darill.
Il y avait une raison pour laquelle ce truc se buvait dans des petits verres.
A part le goût, bien sûr.
"Quand nous étions à Nibelheim…"
Cid se redressa légèrement, se tournant vers Vincent. Il n'aimait pas quand le sniper parlait de Nibelheim, une fois sur deux, ça finissait en crise de claustrophobie.
"Il n'y a rien à faire à Nibelheim," expliqua Vincent, "c'est aussi perdu que Gongaga. Du coup, le soir, on discutait. Tous les quatre. Et ils ont tous posé LA question."
"Comment ça ? "
L'expression du Turk se fit plus amère. Cid se fit la réflexion qu'il devait être bien secoué, il avait l'air encore plus expressif que quand il parlait à Yuffie.
"Ça arrive à chaque fois. Chaque fois qu'un Turk sert de garde du corps, il a droit à la même question. 'Est-ce que tu as déjà tué quelqu'un ? ' Minerva ! Même Gast a posé la question. Luc… Le Docteur Crescent a posé la question, le prof… le... kusoyarô[5], a posé la question. Et je leur ai dit. Oui… mais jamais d'enfants. Jamais. Et tu sais ce qu'il a répondu ? "
Cid secoua doucement la tête.
"Ah, un Turk au cœur tendre."
Vincent tourna la tête vers Cid, croisant son regard.
"Elle m'a dit la même chose avant que je la tue."
Cid était à peu près certain qu'aucun des livres sur la psychologie qu'il avait lu ne l'aiderait pour cette discussion.
Il avait espéré que Vincent s'ouvre un peu et partage ses problèmes mais…
Mais pas avec lui.
Avec Cid, l'autre, qui avait la formation pour.
Ou Aérith peut être, qui saurait le calmer.
Ou même Yu...
Non, non, pas Yuffie. Surtout pas elle. Trop jeune et pas du tout équipée pour ça.
Déjà que lui ne se sentait pas équipé pour aider Vincent.
En pensant à Yuffie. Que lui avait-t-elle dit, déjà, sur le pilier, pendant qu'elle tentait de finir les soins sur son ventre ?
Un accident.
Vincent n'avait pas voulu tuer l'enfant, comme il n'avait pas tiré en voyant celles qui l'avaient attaqué. Il n'avait pas compris en voyant la scène. Le Turk était resté immobile, lui qui canardait sans ciller tout ce qui bougeait, qui partait au corps à corps dès qu'il devenait grand, noir, rouge et en pétard, qui pouvait passer des heures en position de sniper, à guetter le bon moment pour tirer une balle dans sa cible.
Il n'avait pas bougé devant deux enfants, dont une couverte de sang.
Vincent fit un geste pour reprendre une gorgée d'alcool mais Cid l'arrêta. Il lui reprit doucement la bouteille, la posant à sa droite, hors de portée du Turk qui le regarda faire avec un sourire caustique.
"Tu sais que ça n'a plus d'effets sur moi, hein ? "
"J'essaye de préserver tes papilles gustatives," rétorqua Cid, une excuse qu'il avait fréquemment sorti à Setzer lors de ses pires beuveries.
Et Vincent était aussi peu dupe que Zer l'avait été.
"Comment est-elle morte ? " demanda Cid.
"Quoi ? "
"Le clone qui t'a fait ça," demanda Cid en montrant l'attelle sur la main de Vincent, "comment est-elle morte ? "
"Cid…"
"Dis-moi."
Il pouvait voir le moment où Vincent redevenait un Turk, maintenant. Le moment où son regard se faisait vide, où son attitude changeait, où il redevenait celui qu'il était au pilier. Le moment où Vincent redevenait le tueur insensible de la Shinra.
C'était comme quand Cloud replongeait, se transformant en Bienheureux, quand la réalité devenait trop dure et qu'il préférait ne plus rien ressentir que de la subir.
Comme quand Zack se taisait, et qu'il fixait le vide, ou quelque chose qui lui rappelait Sin, les cages, qu'il n'entendait plus que les hurlements des mutants autour de lui.
Comme quand Red se cachait sous une couverture, ou sous un meuble, ou même sous les pilotis de Seventh Heaven, jusqu'à essayer de disparaître.
Quand il reprit la parole, la voix de Vincent était froide, inexpressive, parfaitement articulée, comme quand il était arrivé le premier jour.
"... une balle en pleine tête. Ça lui a arraché la mâchoire."
Il n'en demandait pas tant. Merci.
Putain d'imagination visuelle.
"Comment c'est arrivé ? " répéta Cid.
"Je lui ai tiré dessus."
"Non. Dis-moi comment c'est arrivé."
Le masque glissa. Juste un peu, mais Cid put le voir.
Une hésitation sur la réponse, suffisante pour que Vincent commence lui-même à douter.
"Elle... elle a saisi le canon de mon arme…"
"Et tu as tiré par réflexe ? "
"Non ! "
Sa main recommença à trembler.
"Comment t'es-tu cassé les doigts, Vincent ? "
Il essaya de repousser ses cheveux de sa main cassée et grimaça, y jetant un petit coup d'œil.
"Elle… a donné un coup de pied."
"Et c'est là que la balle est partie ? Quand elle t'a cassé trois doigts d'un coup de pied ? "
"Je... je… oui… " avoua Vincent.
"Elle s'est suicidée comme les autres alors. C'est dommage qu'elle t'ai utilisé comme arme. Mais ce n'est pas toi qui l'a tuée."
"Les… les autres ? "
"Vincent, elles se sont suicidées."
Le Turk tourna lentement la tête vers Cid.
"Tu as pas remarqué ? Tu parles d'un Turk. Les squames… depuis quelque temps, ils nous laissent les tuer. Setzer a senti qu'il allait exploser et s'est éloigné. L'oncle de Yuffie… tu as vu sa taille ? Il a laissé Yuffie le vaincre. L'Al Bhed à la MGU ? Il a tout fait pour contrer le contrôle de Hojo. Et là, les clones ? "
"La première… elle a menacé Yuffie pour que je la tue… mais elle l'a poussée au dernier moment," murmura Vincent.
"Les deux qui m'ont attaqué se sont jetées du pilier."
"Celle qui menaçait Barret et Red… elle aurait eu le temps de les tuer dix fois avant que j'arrive. Elles obéissaient à un contrôle mais…"
"On verra ça demain au débriefing," le coupa Cid avant de poser la main sur le dos de Vincent.
Il se figea en réalisant ce qu'il faisait.
Oups. Procédure Cloud.
Mais visiblement, plusieurs mois à subir les démonstrations d'affections vigoureuses de Yuffie avaient un peu désensibilisé le Turk. Il se laissa toucher sans réaction violente, à peine un frisson qu'il maîtrisa vite.
"Il a échoué, Vincent. On l'a arrêté encore une fois. Et on continuera."
Il eut d'abord l'impression de toucher un arbre. Le sniper semblait enraciné sur le toit, la colonne vertébrale raide, le regard fixé dans le lointain. Il allait le relâcher, le laisser reprendre ses distances quand il sentit soudain les épaules de Vincent se détendre sous sa main.
Tellement vite qu'il crut un moment qu'il avait tourné de l'œil et s'effondrait en avant, et Cid leva l'autre main pour le retenir.
Il sentit la main de démon se refermer sur son coude, sa poigne étrangement chaude à travers le gant de cuir et tenir le bras de Cid contre le torse de Vincent.
Il ne voyait pas le visage du sniper, penché en avant et caché par son épaisse chevelure, mais la main de démon tremblait moins.
"Quand je ne pourrais pas me battre, tu le feras pour moi, quand ce sera ton tour, c'est moi qui frapperai, quand Cloud ne pourra pas bouger, on sera deux à le faire, c'est ça, le travail d'équipe. Arrête un peu de faire cavalier seul, Vincent. Arrête de nous aider et de faire volteface quand on essaye de faire pareil."
Vincent hocha la tête, sans arriver à répondre.
Minerva, il ne s'était pas attendu à ce que le contact humain lui manque à ce point.
Il n'avait pas été d'un naturel tactile avant, ni sa mère, ni son père n'avaient été d'un tempérament exagérément tendre et les relations… disons 'humaines', chez les Turks étaient normalement soigneusement interdite par le règlement[6].
Même Lucrecia n'avait pas été affectueuse en public. Même quand ils avaient été amants, elle ne se laissait pas toucher quand quelqu'un d'autre pouvait les voir.
Elle ne l'avait jamais fait quand ils n'étaient pas en privé.
Et maintenant, il avait du mal à accepter qu'on le touche après… Nibelheim.
Mais il ne voulait pas s'éloigner.
Le bras de Cid était chaud, sa main sur son épaule ferme, il sentait toute la tension, toutes les horreurs du pilier disparaître, ses épaules se relâchant au fur et à mesure.
"Je sais vraiment pas quoi faire de vous deux.[7]"
Cid et Vincent firent un bond à la voix de Shera, s'écartant l'un de l'autre.
"Shera ? " s'exclama Cid d'un ton énervé, la cherchant du regard.
"Je suis en bas," répondit sa sœur, venant de la chambre, "est-ce qu'Aérith et moi devons vous interdire le toit aussi, maintenant ? "
"Je voudrais bien voir ça," rétorqua Cid en essayant de se lever.
Vincent se hissa sur ses jambes et lui tendit la main pour l'aider. Avec tout ça, il oubliait que le blond avait été éventré il y a quelques heures.
Redescendre dans la chambre fut… compliqué. Vincent fut le premier à la fenêtre, restant assis sur le bord, le temps d'aider Cid à descendre.
Les Anciens bénissent la multiplication des matérias de soin, si Cid avait eu des points de sutures…
Bon, il n'aurait probablement pas pu monter tout court.
Du moins pas sans hurler des imprécations au lieu de les murmurer.
Il aida le pilote à s'asseoir sur son lit, adossé au mur de la fenêtre, et referma celle-ci, tirant le rideau.
"Ça va ?
"Já. Merci pour le coup de main."
"Je t'en prie," répondit Vincent avant de tourner la tête, cherchant Shera du regard.
Elle était assise sur le lit de Cid, la veste de son frère autour des épaules. Elle avait déjà retiré ses lunettes et le regardait d'un air à moitié endormi.
"Pourquoi vous aimez autant être sur le toit ? " soupira-t-elle.
"Pour respirer, Shiera" répondit Cid.
Vincent l'aida à nouveau à se lever, gardant une main sur son dos le temps que le pilote ait put rejoindre son lit.
Il les regarda se retrouver, Shera nouant ses bras autour du cou de son frère, Cid se tortillant en jurant à mi-voix pour ouvrir le lit et rabattre les couvertures sur eux. Il entendit les habituels reproches sur la température des pieds et la pointe des coudes pendant qu'ils s'installaient en se chamaillant.
Vincent éteignit la lumière et se tourna vers son lit, remarquant que Cait avait profité de son absence pour s'y blottir aussi. Il se pencha, poussant délicatement le chat endormi pour ouvrir le lit à son tour.
"Vincent ? " reprit la voix ensommeillée de Shera.
"Oui ? "
"Aérith m'a donné quelque chose pour toi, sur le bureau."
Il se tourna, cherchant du regard de quoi la biologiste parlait.
Il aurait dû s'y attendre
Un demi-cachet avec un verre d'eau.
"C'est…" la jeune femme bailla derrière sa main avant de reprendre "c'est juste la moitié, ça devrait moins t'assommer. Mais elle dit que ça serait bien que tu le prennes."
Il ramassa le demi-cachet entre deux griffes.
Il pouvait le laisser tomber dans la corbeille à papier.
Ou le réduire en poudre d'une simple pression des doigts.
Les filles ne le sauraient jamais.
Il l'avala puis le fit descendre d'une gorgée d'eau.
"Merci, Shera."
Ce fut effectivement moins brutal.
Il eut le temps de s'allonger. Cait, réveillé par le mouvement, vint se coucher contre lui, roulé en boule au creux de son bras gauche.
Il entendit des murmures de l'autre côté du mur, là où Cloud dormait habituellement.
Il toqua doucement sur le plâtre du dos des doigts.
Un des jumeaux lui répondit de la même manière.
Barret ronflait.
Il n'entendait pas la respiration de Yuffie d'ici, mais elle était toujours dans la salle de vie, avec Red.
Aérith… Il chercha un instant avant d'entendre son pas léger et la porte de la chambre des jumeaux s'ouvrir.
Elmyra devait être…
Et il s'endormit.
Quand Cid se réveilla le lendemain matin, Shera dormait toujours et ce fut toute une manœuvre pour réussir à s'extraire du lit sans la réveiller, mais fort heureusement, quand sa sœur dormait, elle DORMAIT. Il y avait eu des moments à Burmécia où il avait été plus simple de porter ses sœurs hors de leurs lits et de les poser devant leur petit déjeuner.
Vincent dormait toujours et c'était rare que Cid soit réveillé avant lui, il en profita pour observer le sniper. Il avait basculé sur le côté pendant la nuit, roulé en chien de fusil et ses cheveux étaient en bataille. Quelqu'un allait encore râler qu'il fallait couper ses cheveux ce matin. Cait avait honteusement[8] profité que son maître soit ko pour se rouler en boule sous son menton, ronronnant comme le moteur de la Chocomobile.
Vincent n'avait pas pris de douche avant d'aller se coucher et allait probablement le regretter en se réveillant. Les draps étaient couverts de la poussière du pilier, de poudre et de sang séché.
Elmyra allait les tuer. Ou au moins leur faire les gros yeux.
Mais bon, la soirée avait été rude pour tout le monde, y compris Vincent et il espérait vraiment que leur discussion de la veille l'avait aidé.
Dormir ne pouvait lui faire que du bien.
Cid le regarda dormir avec un petit sourire avant de se redresser, pensif.
Sur le coup, il aurait étranglé Shera hier, mais… Ouais, elle avait bien fait d'intervenir.
Blessure au bide ou pas, il avait été à deux doigts de sauter sur Vincent[9].
Et ça n'aurait PAS été une bonne idée.
Enfin, si, il était à peu près sûr que Vincent, déstabilisé comme il l'était, l'aurait laissé faire, mais… Justement.
Profiter du besoin de chaleur humaine de quelqu'un, ça ne fonctionnait jamais. Il l'avait appris sur le front.
Officiellement, les relations sexuelles et/ou amoureuse, étaient formellement interdites dans les divers camps militaires où lui et Shera avaient crapahutés.
Officieusement, ha ha. Son cul oui.
Son cul avait été beaucoup plus occupé pendant ces quelques années que pendant toute son adolescence, merci beaucoup.
Hm. Mauvais choix de mots. Ou pas.
Mais profiter de l'état de détresse, ou de quoique ce soit d'autre de son partenaire pour juste du cul, c'était toujours une mauvaise idée. C'était toujours une meilleure idée de se rhabiller, offrir un thé et une épaule compatissante et éventuellement, remettre ça à un autre jour.
Cid descendit lentement l'escalier, tâchant de le faire grincer le moins possible. Quelle heure pouvait-il être ?
Jour, décida-t-il en entrant dans la salle commune, baignée de lumière.
Matin probablement, ajouta-t-il mentalement en remarquant le petit déjeuner encore sur la table.
Dix heures trente, presque onze quand il leva enfin les yeux sur l'horloge.
Biggs prenait son petit déjeuner, la cicatrice sur sa joue encore rouge, mais déjà presque effacée.
Qu'est-ce qu'il aimait les pouvoirs d'Aérith, parfois.
Biggs le salua d'un signe de tête tout en croquant ses céréales.
Red mangeait aussi, le nez dans sa gamelle et leva l'œil quand Cid passa près de lui, lui tapotant le dos au passage.
Lui aussi avait une nouvelle cicatrice, qui barrait son épaule, laissant une zone nue dans sa fourrure.
Pourquoi la limite d'Aérith ne faisait pas repousser les poils, c'était un mystère. Red allait en garder la trace plus longtemps qu'eux, mais au final, elle sera invisible une fois sa fourrure revenue.
Cid se redressa, grimaçant légèrement de sa propre blessure et prit le stylo suspendu au tableau blanc de la cuisine, ajoutant son nom à la corvée de lessive.
"Ce n'est pas la peine" objecta Elmyra de derrière lui.
"On a encradé tes draps, Elmyra" rétorqua Cid en se tournant vers elle.
"Shera a dormi avec toi ? "
"Oui, elle dort encore, Vincent aussi."
"Je vais laisser un buffet sur la table pour la journée. Servez-vous tous."
"Tadaima ! Surtout que personne ne sorte ! " lança Yuffie en entrant dans Seventh Heaven, refermant précipitamment derrière elle, coupant la parole aux personnes qui la suivait.
"Journaleux ? " fit Biggs.
"Ils sont enragés ! " expliqua Yuffie en entrant dans la cuisine, déposant le pain qu'elle avait été acheter sur le bar entre la cuisine et la pièce de vie. "Apparemment, y'a déjà des rumeurs comme quoi l'un d'entre nous serait m... mort cette nuit."
"T'es pas en cours ? " s'étonna Cid.
"J'ai décidé d'abuser d'un des jours de repos auquel j'ai droit après les missions d'Avalanche" rétorqua Yuffie en s'attablant.
Elle portait son sweat à capuche de la MGU, qu'elle avait reçu en arrivant en classe de junior, noir avec le logo sur le devant, vert mako.
Il devenait trop petit pour elle, réalisa Cid quand elle tira sur les manches, elle avait grandi.
Oh, il fallait qu'il parle à Reeve.
L'accord avec le père de Yuffie s'achevait dans quelques mois. Il fallait qu'il trouve un moyen d'empêcher l'adolescente de le renouveler, comme elle avait l'air bien partie pour le faire.
Est-ce que c'était comme ça que pensait Barret en permanence ?
Et en parlant du loup… Il entendit le colosse dévaler les escaliers et entrer en panique, enfilant un pull dans le même mouvement. Il s'était tellement précipité qu'il n'avait pas remis sa prothèse et sa manche droite flottait sous son coude.
"Elmyra ! Je n'avais pas vu l'heure ! Marlène…"
"Elle est à l'école. Je l'ai accompagnée ce matin. Elena nous a escortées" répondit la gouvernante en préparant une tasse de café qu'elle lui tendit, "elle mange à la cantine ce midi et la maman de Rina la ramènera ce soir."
"Barret," soupira Cid en se servant en thé, "Vincent et Shera dorment encore et je ne suis pas sûr que les jumeaux soient réveillés."
"Ils le sont maintenant" intervint Aérith en entrant à son tour, la natte en bataille.
"Et toi par la même occasion ? " taquina Cid.
"Pas le choix, je dormais sur Zack."
"Désolé," marmonna Barret, confus.
"Aérith ! " protesta Elmyra, occupée à rouler le bas de la manche de Barret, "qu'est-ce que c'est que cette tenue ? "
Effectivement, Aérith était vêtue en tout et pour tout d'un des tee-shirts de Zack qui, fort heureusement, était suffisamment long pour lui descendre à mi-cuisse.
"J'ai un caleçon en dessous" expliqua Aérith en soulevant le bas du tee-shirt pour le prouver, à la grande gêne de Barret.
"Ah, je savais bien que j'avais un tee-shirt de prêt, hier" marmonna Zack en entrant à son tour, en pantalon de jogging et rien d'autre, "tu as tes pyjamas dans l'armoire, mon cœur."
"Oui, mais ce n'est pas pareil, mon chéri" répondit Aérith en passant les bras autour du cou de Zack.
Et il y avait des cicatrices qui ne disparaissaient pas.
Celle qui barrait le torse de Zack par exemple. Et un de ses bras. Il avait vu le brun paniquer, après une mission agitée, demander pourquoi son bras était revenu et Cid avait sagement décidé de ne jamais mentionner cet épisode à nouveau. Maintenant qu'il connaissait l'existence des cuves à mako, il comprenait mieux.
"Trop tôt pour la guimauve, "protesta Cloud en passant près de son frère et sa fiancée.
Cela faisait longtemps que Cloud n'avait pas été ronchon aussi tôt.
Ou même juste ronchon tout court.
"Comment ça va ? " demanda Cid quand le blond s'assit, tendant la main vers les paquets de céréales.
"Je veux pas être là, mais Tifa m'enguirlanderait" répondit Cloud en secouant une boite de Honey Moogles au-dessus de son bol.
Il arrêta son geste et fronça les sourcils avant de se redresser, voyant les regards horrifiés de ses amis.
"Ah… désolé. Rien de personnel, je voulais dire... être... là… ici" précisa Cloud en montrant son front.
Bon. Bon et bien il craignait que Cloud replonge après le combat d'hier, mais visiblement, parler de Tifa lui avait fait plus de bien qu'il ne l'aurait pensé. Il était presque revenu au niveau de présence d'avant secteur 7.
Peut-être qu'ils l'avaient un peu trop ménagé à éviter de parler d'elle ces derniers mois… Mais c'était dur à dire, parfois, un rien pouvait déclencher une crise de fureur ou de dépression chez le blond.
"Comment va Vincent, au fait ? " demanda Zack en s'asseyant, tournant la tête vers Cid.
"Hein ? "
"Ouais, on vous a entendu hier sur le to... aïe ! Cloud ! "
Zack se frotta le tibia sous la table, jetant un regard trahit à son frère qui secouait la tête d'un air désapprobateur.
"Vous nous avez entendus ? " répéta Cid.
"Augmentation mako" répondit Cloud.
"Si vous voulez partager un secret ou lutiner quelqu'un ici, mettez la radio," ajouta Zack avant de jeter un regard amusé à Barret et Elmyra qui se plongèrent tous deux dans la contemplation attentive de leurs tasses.
Une minute... La mako marchait aussi sur l'audition ?
Il avait VRAIMENT bien fait de ne pas sauter sur Vincent la veille.
"Qu'est-ce qui s'est passé sur le toit ? " demanda Yuffie d'un air soupçonneux.
Oh, Bahamut, mais elle n'allait pas s'y mettre, elle aussi ? Il avait déjà assez à faire avec une sœur hyperprotectrice, merci !
"Rien," rétorqua Cid, "on a parlé. Ça ira. Je pense" ajouta Cid après coup.
"Sur le toit," répéta Aérith en se frottant les yeux, "dès que j'ai fini mon café, on va rediscuter de ce que tu faisais sur le toit alors que tu viens d'être à moitié éventré."
"Je faisais une veillée à... Bahamut, j'ai laissé la bouteille là-haut ! " jura Cid en posant sa tasse dans l'évier.
"Une boutei… Ha parce que tu buvais en plus ? Cid ! Revient ! "
"Je ne t'entends plus Aérith, j'ai pas l'audition augmentée ! " lança Cid de l'escalier.
La bouteille était intacte.
Il n'était pas sûr que l'avoir laissée débouchée toute la nuit allait faire du bien à son contenu, mais de toute façon, ça ne pouvait pas être pire.
Shera manifesta aussi son mécontentement à sa virée nocturne, pendant que Vincent feignait l'innocence avec un talent incroyable mais peu crédible.
"Je n'avais pas vu la bouteille."
"Tu sais, j'espérais que tu serais une bonne influence sur Cid ! "
"Shera, j'étais un Turk," répondit Vincent d'un ton offensé.
Une fois la bouteille rangée, lesté d'un vrai petit déjeuner pendant lequel Shera et Aérith les avait encore une fois sermonnés, Vincent et lui, Cid put enfin aller faire son débrief auprès de Reeve.
"Sur le toit, vraiment ? " déclara Reeve.
Il y avait de nouveaux dossiers sur son bureau, la pile de droite menaçant de s'effondrer à tout moment et le téléphone sonnait à peu près toutes les cinq minutes, uniquement pour que l'appel soit transféré sur la ligne de Jessie. Visiblement, Reeve avait aussi dormi à Seventh Heaven, comme en témoignaient sa chemise froissée et sa barbe mal taillée.
"On parle d'autre chose ? " coupa sèchement Cid.
"Comme par exemple boire avec une blessure au ventre ? " rétorqua Barret.
"Hé, je suis majeur et vacciné, c'est bon ! On passe à ce débrief, oui ? "
"Oui. Et met une musique de fond, Reeve."
"Pardon ? "
"Les jumeaux nous entendent probablement quand on parle dans ce bureau" expliqua Cid.
Un hurlement de rire venant de la part de Zack s'éleva, trop à propos pour être une coïncidence. Les trois hommes échangèrent un regard d'adultes fatigués par leurs enfants respectifs.
A quel moment Cid avait-il commencé à être un des papas du groupe au juste ? Il préférait être le grand frère indigne, l'autorité, il avait donné sur le front.
"Red et Vincent aussi je présume ? " déclara Reeve en prenant son PHS, naviguant sur l'écran du pouce.
"Probablement."
"C'est bien d'apprendre ce genre de choses au bout de plus d'un an de cohabitation" commenta Reeve en choisissant une playlist.
Barret soupira.
De la techno.
"Playlist de Jessie ? "
"Certains morceaux sont très mélodieux, c'est surprenant" déclara Reeve avec un petit sourire.
"A propos d'un an" coupa Cid, "Reeve, Yuffie est censée arrêter les missions à Avalanche après Novembre, c'est ça ? "
Leur directeur soupira longuement.
"Oui. Mais elle a resigné pour un an."
"Quoi ? ! " s'exclama Barret en décroisant les bras.
"Son père est d'accord ? " s'étonna Cid.
"TU es d'accord ? " ajouta aussitôt Barret.
Reeve serra les lèvres, visiblement mécontent, non pas des questions, mais de la situation.
"Elle… Elle a rempli une demande d'émancipation anticipée, qui lui a été accordée pour 'circonstances exceptionnelles'. Et elle a signé le nouveau contrat directement avec le Vice-Président Shinra pour que je ne puisse pas refuser. Ça me fait mal de le dire, mais Yuffie est techniquement une adulte."
"Je peux toujours la retourner sur mes genoux pour une fessée" maugréa Barret.
"Elle a menacé de lutter contre les Squames en freelance si je la renvoyais au pensionnat de la MGU."
Cid laissa échapper un petit rire qui lui valut un regard noir de ses deux collègues. Il leva les mains d'un geste apaisant.
"J'aime pas ça non plus, mais vous devez avouer qu'elle a des couilles."
"On parle de la future Impératrice de Wutai" lui rappela Barret.
"Si elle doit faire des conneries, elle les fera, qu'on soit là ou pas pour la rattraper. Alors autant qu'on soit là."
"Comme hier ? " contra Barret.
Cid se rembrunit, fronçant les sourcils.
"Vincent pense que ce n'était pas le secteur 8 qui était visé hier."
"Comment ça ? "
"C'était Avalanche la cible. Ce n'était pas un hasard que… que le Psycho en chef ait choisi de cloner Tifa."
"Heureusement, il n'avait pas prévu que Vincent ne la connaissait pas…" commença Reeve,
Cid secoua la tête.
"Vincent pense qu'une des clones d'hier a été envoyée spécifiquement contre lui."
"Comment ça ? "
"Vincent ne tue pas d'enfants, il en avait parlé avec… le Cher Docteur, il y a trente ans. Et apparemment, le clone… l'enfant qu'il a dut tuer hier a dit quelque chose que le Psycho lui avait dit à l'époque à ce sujet."
"Ça pourrait être un hasard…"
"La phrase 'Turk au cœur tendre' n'est pas très courante."
"...et ça décrit pourtant tellement bien Vincent" soupira Reeve.
"Il nous vise spécifiquement. Envoyer Setzer était peut-être un hasard, mais Tifa ? L'oncle de Yuffie ? Il essaye de se débarrasser de nous et j'ajouterais, de la façon la plus sadique possible."
"Ça signifie que Hojo a accès à des informations venant hors de Sin." conclut Barret. "Il sait qu'Avalanche existe, il sait que Vincent en fait partie, il savait pour Adel et les Sorcières."
Reeve se massa les tempes d'un air découragé.
"Il va falloir renforcer la sécurité autour de vos familles. De vos amis. Je vais annuler toutes les interviews prévues et faire remonter ça au Président Shinra."
"Il n'en a rien à foutre" grommela Barret.
"Je vais prévenir mon équipage," déclara Cid, "ils s'occuperont d'organiser la sécurité de l'aérodrome."
"Ils peuvent faire ça ? " s'étonna Barret.
"Fran n'a qu'à rouler du cul pour obtenir quelque chose de tous les hommes au sang chaud de l'aérodrome, le sien compris."
"On continuera ce briefing dès que Shera aura fini ses analyses. Elle m'a dit qu'elle devait aller à la Tour Shinra, je l'y emmènerais tout à l'heure."
"Prenez Vincent avec vous," intervint Barret, "tu es en danger aussi."
"Si Aérith l'autorise," répondit Reeve avec un petit sourire, "de votre côté, prenez tous votre journée, vous en avez besoin."
"Dis celui qui n'a pas pris de jour de repos depuis trois semaines," marmonna Cid dans sa barbe en sortant.
"Hé ! J'ai dîné avec mes parents le weekend dernier ! " Protesta Reeve
"Ouais, après ta journée de travail et tu t'y es remis dès le lendemain," renchérit Barret avec un regard sévère avant de sortir à son tour.
"C'est Jessie qui vous l'a dit, hein ? " demanda Reeve dans leur dos.
"Bien sûr que je leur ai dit," rétorqua Jessie en entrant à son tour, un dossier entre les mains, " j'ai besoin de renfort dans ma quête sans fin pour t'éviter le burn-out".
Elle ferma derrière elle, approcha du bureau de Reeve et posa son fardeau devant lui avant de se redresser.
"Tu as un message d'Heidegger," annonça-t-elle avec une expression agacée.
"Qu'est-ce que Gyahaha veut encore ? "
"Discuter de tous les manquements à la sécurité dans l'opération de cette nuit. Le Président Shinra a demandé une réunion cet aprèm."
Reeve soupira et se rabattit en arrière sur son fauteuil, accablé.
"Il a déjà eu le temps de faire la liste ? "
"Et j'ai pris celui de te préparer tous les contre arguments," annonça Jessie en désignant le dossier avec lequel elle était entrée.
"Je t'augmente," déclara Reeve en l'ouvrant immédiatement.
"Avec quel budget ? "
"Je t'achète un nouveau canapé-lit, assez grand pour vous trois."
"Encore une fois : Avec quel budget ? Reeve… J'ai entendu des bruits de couloirs à la Tour."
Le directeur leva les yeux de son dossier, intrigué par le ton de son espionne favorite.
"Qu'est-ce qu'il y a ? "
"Julia dit que le vice-président te souffle dans le cou ? "
Reeve soupira. En effet, depuis quelque temps, il avait l'impression de voir le vice-président partout où il allait dès qu'il mettait un pied dans la Tour.
Lui ou sa bestiole en tout cas.
"En effet, je ne sais pas ce qu'il veut, il est juste là, à me regarder de loin."
"J'espère que c'est juste qu'il te trouve sexy…"
"Oh, Jessie ! " protesta Reeve.
"... mais vu qu'il a l'air aussi asexuel que toi, j'en doute."
"Il est asexuel ? " s'étonna Reeve, brièvement distrait par la réplique.
"En tout cas, il n'a jamais montré la moindre attirance pour qui que ce soit, contrairement à son père qui saute sur tout ce qui respire, a des seins et la moitié de son âge, si pas moins."
"Jessie, je SUIS asexuel et je n'ai pas besoin d'en savoir autant sur la vie amoureuse des résidents de la Tour Shinra, merci."
"J'aime te voir mal à l'aise. Plus sérieusement, il y a des rumeurs comme quoi Heidegger essaie de prendre la main sur Avalanche."
Le directeur roula des yeux d'un air las.
"Sans rire ? Il a commencé à suggérer que je n'étais pas apte à gérer une unité de combat à peu près… A la création ? "
"Les secrétaires m'ont dit que ça avait commencé comme ça avec les Turks."
Le bras du petit chat wutan sur le bureau de Reeve commença à cliqueter plus vite et il posa sa main sur la figurine pour l'arrêter.
Il leva les yeux vers la jeune femme. Elle se tenait devant lui, sa tablette à la main, vêtue de son vieux pantalon treillis et un tee-shirt Gamer Girl. Parfois, il oubliait à quel point elle était jeune. Trop jeune pour avoir connu le Grand Chambardement, comme les plus anciens des employés de la Tour l'avaient surnommé.
Quand, en 2962, le directeur des Turks de l'époque avait révélé au grand public les divers scandales éthiques du département scientifique, l'organisation interne de la tour Shinra avait été secouée. Après l'arrestation d'Hojo, puis sa disparition, ainsi que du contenu entier de son laboratoire et de ses sujets d'expériences favoris, tout avait été réorganisé, de manière aussi sensée et logique que pour une mise à mort.
La 'disparition' du chef des Turks et celle de Séphiroth avait laissé leurs départements sans personne à leur tête et Heidegger avait immédiatement réquisitionné les deux branches, arguant qu'étant déjà à la tête de la milice, il était le plus apte à gérer la sécurité de Midgar.
Au fil du temps, des missions dangereuses et du dédain Heidegger pour leurs compétences, les effectifs des Turks étaient passés d'une douzaine d'individus hautement spécialisés à une poignée qui se démenaient comme ils pouvaient pour continuer d'assurer les secrets et la sécurité de la Shinra. Ils venaient tout juste d'arriver à engager un nouveau membre et Heidegger l'avait déjà envoyée à plusieurs reprises dans des missions dangereuses[10], compte tenu de son niveau d'expérience. Jusqu'à présent, elle en était revenue vivante, mais bon sang, elle avait l'âge d'Aérith !
Quant aux SOLDATS, le nombre d'engagés volontaires diminuait d'année en année. Le scandale des expérimentations d'Hojo sur les plus prometteurs d'entre eux avait coupé net l'envie de beaucoup de s'engager, et la découverte d'effets secondaires beaucoup plus grave que prédit initialement décourageait beaucoup de troisième et deuxième classe de gravir les échelons. Il restait encore beaucoup de SOLDATs, certes, mais trop peu de première classe qui pourraient rivaliser avec les jumeaux ou Séphiroth. Désormais, les SOLDATs restaient cantonnés à Midgar ou dans les rares opérations spéciales, comme l'évacuation de villes attaquées par SIN ou la dissolution des laboratoires cachés.
Et dans les deux cas, Heidegger s'en foutait. Il avait toute la sécurité publique ou privée dans les mains et jusqu'à présent, Reeve le pensait surtout en pleines manœuvres pour s'accaparer le département de l'armement.
Pas Avalanche.
Son seul espoir était que lui et Scarlet continuent à se faire la guerre.
Et surtout, d'éviter le moindre faux pas qui permettrait à Heidegger de prendre le contrôle de sa petite unité.
"Je ne le laisserais pas faire, ne t'inquiète pas."
Jessie hocha la tête, peu convaincue.
"J'ai envoyé Biggs te chercher un costume propre et repassé, tu lis tous les contre arguments, tu fais une sieste et tu manges un vrai repas avant d'y aller. Et je m'occupe de briefer Vincent sur l'affaire Heidegger."
"Jessie…"
"C'est un bâtard, mais c'est notre bâtard. Et il a été Turk, il couvrira tes arrières."
"Jessie ! "
"Et rase-toi ! "
"Oui, Maman ! "
Jessie sortit après un petit salut moqueur.
Puis revint, passant la tête par la porte entrouverte.
"Pourquoi tu écoutes ma playlist techno, au fait ? "
[1] Il s'est fait avoir UNE fois.
[2] Une des nombreuses façon de dire merde en japonais.
[3] Gippal avait jeté un regard à son décolleté, continué de marcher et s'était pris un mur qu'il n'avait pas vu venir. Shera n'avait du coup plus le droit de porter un décolleté quand ils étaient en vol. Trop dangereux.
[4] Aérith, poulette, dès que j'ai fini ce chapitre, tu m'en diras un peu plus sur ce road trip, parce que j'ai bien envie de l'écrire.
[5] Trou du cul
[6] Insérez ici le rire des ex-collègues de Vincent qui diront qu'il n'avait probablement jamais lu le règlement. Et eux non plus.
[7] RAAAAH SHERA !
[8] Honteusement à la manière chat, c'est-à-dire qu'il en profitait sans aucune honte ni regret.
[9] Je sais pas quoi faire de ces deux là, franchement, jamais vu deux abrutis être autant sur la même longueur d'onde et ne pas se comprendre.
[10] Si vous vous demandez comment il sait, c'est simple : Il a l'accréditation de sécurité niveau Aérith.
