Chapitre 23 : Sous l'océan

Résumé :
Il est temps de découvrir ce que Riku a laissé à Avalanche.
Ils croyaient avoir vu le pire concernant le gamin, c'était oublier un peu vite qu'Hojo était là.

Personnages :
Team Avalanche, Team Remnant, Team Sin (des nouveaux, mais ne vous y attachez pas !), OC

Tags spécifiques au chapitre :
Angst FULL SPEED, flashback, référence à de l'expérimentation humaine, Révélation Dramatique, la vie à Sin c'était pas la croisière s'amuse, référence au cannibalisme mais rien de graphique, Hojo, Harumi a été la figure paternelle principale de Riku, Setzer était la secondaire, c'était pas une bonne idée.


Une fois la télévision allumée, et Elmyra et Marlène sorties pour faire des courses, accompagnées de Biggs et Wedge, l'équipe d'Avalanche s'installa pour le débrief. Jessie était allée chercher toute la documentation qu'elle avait accumulée concernant Riku et l'avait étalée sur la table. Entre les cahiers, les lettres et tout ce qu'elle avait trouvé qui complétait les données, la table entière était couverte.
"Alors pour commencer, on ne peut qu'admirer la fausse identité qu'il a fourni en arrivant à Midgar," annonça Jessie en manipulant la télé.
"Meilleure que le travail de mon père ? " suggéra Aérith avec un petit sourire.
"C'est pas dur," rétorqua Jessie en connectant sa tablette à la télévision, affichant une photo de Riku, tirée de son dossier scolaire.
"Riku Makani, né le 14 août 2960. Il aurait vécu à Zanarkand avant qu'elle soit ravagée par une attaque de squames. J'ai vérifié, et de façon très pratique, toutes les archives de Zanarkand ont aussi été détruites. Parents décédés dans l'attaque, grand-père abusif, il dit avoir émigré à Midgar pour lui échapper. Officiellement mineur isolé, il obtient une bourse d'étude à la MGU. C'est un élève brillant, calme la plupart du temps, sauf quand il est appelé Mini Séphiroth et là, il tabasse. Très bon escrimeur mais sait aussi mordre, cogner, donner des coups de pieds et de genoux avec le brio d'un gamin des Taudis. Il venait d'être enregistré comme mage natif de glace après l'attaque de la MGU et il vivait dans les Taudis du secteur 4, dans un immeuble avec chambres pour mineur isolé."
"Et personne n'a remarqué que sa carte d'identité était fausse ? " s'enquit Reeve.
"C'est là la magie des choses : Elle est authentique. Elle a été délivrée en 2962 quand il était tout petit, au moment où son existence a été révélée."
"Son existence ? " répéta Barret.
"On va passer à sa vraie identité du coup ! " déclara Jessie avant de soupirer. "Il était pupille de la Shinra."
Vincent regarda ses collègues émettre des grognements désabusés ou horrifiés, selon leurs âges. Cid, Reeve et Shera semblaient les plus touchés, même si Barret et les jumeaux avaient aussi l'air mal à l'aise à cette nouvelle.
"Merde, il avait quel âge ? " marmonna Cid.
"Qu'est-ce que c'est un pupille de la Shinra ? " demanda Vincent en regardant la photo sur l'écran, essayant d'ignorer tous les sous-entendus que cela pourrait signifier.
"C'est un euphémisme," déclara poliment Shera.
C'est ce qu'il craignait. Les euphémismes autour de la société Shinra, c'était toujours un délice.
"Pourquoi ? "
"Pour tous les pauvres paumés qu'Hojo récupérait dans les taudis de Midgar pour faire ses expériences, les employés prometteurs ou les SOLDATs particulièrement brillants," expliqua Cid.
"Ils étaient enregistrés comme résidents de la Tour Shinra sous ce nom," ajouta Jessie. "En réalité… Hojo les utilisaient comme sujets d'expériences au sein du département scientifique. Lorsque le Directeur Morrow a révélé leur existence en 2962, ça a été le début de la fin pour Hojo."
Vincent ne savait pas exactement ce qui était le plus difficile à croire. Que Morrow soit devenu Directeur des Turks ou qu'il ait trahi la compagnie. Ce n'était pas qu'il n'avait pas apprécié le Turk, mais son tempérament avait été encore plus volcanique que celui de Cid et Barret combiné. Il n'aurait jamais pensé qu'il arriverait à un tel niveau de responsabilité… Ni qu'il survive aussi longtemps comme Turk, quoiqu'il suspectait Ash d'y être pour quelque chose. Elle avait toujours eu une influence apaisante sur son partenaire.
Quant à savoir pourquoi il avait décidé de trahir la compagnie et dévoiler les crimes d'Hojo au grand public…
"Sa mère était pupille de la Shinra aussi," continua Jessie en affichant une seconde photo près de la première. "Tsubame Makani. J'ai retrouvé sa trace sur plusieurs listes et aucune n'est joyeuse : Adolescente fugueuse disparue à Midgar en 2959 à 15 ans, pupille de Shinra à partir de là et elle était sur la liste des personnes disparues en même temps qu'Hojo en 63."
Vincent observa attentivement la photo. Tsubame Makani était métisse, visiblement d'origine wutane, et avait des yeux bridés gris bleus et des cheveux sombres, en partie décoloré et teint en bleu sur la photo d'avis de recherche qu'avait trouvé leur opératrice.
Il y avait une ressemblance, en effet, la forme du visage peut être, les lèvres… Elle avait le même âge que son fils sur la photo après tout.
"Il est né dans le laboratoire d'Hojo," comprit Vincent.
"Merde," murmura Zack en cherchant quelque chose dans le tas de dossier sur la table, sortant la lettre de Riku pour la relire. "MERDE ! "
"Qu'est-ce qu'il y a ? "
"Le Vieux Taré le considère comme un échec," cita Zack, "il a fait des expériences sur lui."
"Alors, je ne sais pas," temporisa Jessie, "Riku ne mentionne pas qu'il ait subi des expériences, juste qu'il était bébé et ne se souvient pas de grand-chose de la vie au labo. Je pense que c'est plutôt lié à son père."
"On sait qui est son père ? " demanda Vincent.
Jessie soupira en hochant la tête d'un air las.
"Vous n'allez pas le croire," ajouta-t-elle avec un petit sourire amer.
"Vas-y, je suis prêt à tout ! " clama Zack avec désinvolture.
Elle afficha une autre photo sur l'écran de la télé, de l'autre côté de celle de Riku.
Un autre jeune homme avec les mêmes cheveux, les mêmes yeux et la même peau pâle de ceux qui ne voient pas assez la lumière du jour.
"Séphiroth."
"J'étais pas prêt," avoua Zack.
Vincent non plus.
En fait, personne autour de la table ne l'avait été.
"Parce qu'il s'est reproduit ? ! ! " s'exclama Cid.
Jessie fit tourner une copie d'un certificat de naissance que Vincent s'appropria aussitôt.
Le papier avait l'air vrai.
Même si la signature d'Hojo figurait en bas du document.
Riku Makani, né le 14 août 2960.
Mère : Tsubame Makani, pupille de Shinra.
Père : Séphiroth Hojo, SOLDAT première classe.
"Montre ? " fit Cid en prenant le certificat de naissance de Riku.
"Attendez, attendez…" commença Shera en comptant rapidement, "2960, ça veut dire que le général avait… quinze ans ? "
"Et elle seize, " précisa Cid après un rapide calcul mental.
"Qui est prêt à croire à une romance cachée ? " murmura Zack.
"Avec Hojo qui trainait dans le coin ? " rétorqua Barret.
Vincent contemplait tour à tour les trois photos à l'écran. Jessie avait réussi à trouver une photo de Séphiroth à l'âge de quinze ans et la ressemblance avec son fils était frappante. Effectivement, Riku avait le menton et la bouche de sa mère, mais tout le haut du visage était celui de son père.
Parfois, ses trente ans d'oubli lui revenaient en plein visage avec la force d'un accident de voiture.
Le fils de Séphiroth.
Le petit fils de Lucrecia.
Oh, bon sang, oui, il avait les yeux de sa grand-mère, c'était évident maintenant qu'il y pensait.
Tout comme Séphiroth… enfin, pour la couleur, mais il avait les yeux bridés comme Hoj...
"Grand-frère ? Ça va ? " demanda Yuffie dans leur langue natale en lui tiraillant la manche, alarmée par le regard fixe de Vincent.
Il hocha la tête rapidement.


"Tsu ! Tsubame ! On en a un autre de vivant ! "
"J'arrive ! Dites-lui : ochitsui te, yoku naru wa ! "
Harumi écouta l'échange, abasourdi.
Il ne comprenait pas.
Il y avait eu ce monstre dans le port… Kasumi, le reste de la famille et lui étaient sortis le combattre, laissant Godo s'occuper de l'évacuation des habitants…
Et puis…
Et puis il y avait eu cette gueule énorme, monstrueuse, plus grande encore que celle des dragons de mers.
Il avait été…
Et maintenant il était…
Un homme le releva, répétant la phrase en Wutan qu'on lui avait annoncée avant de le pousser vers le fond de la pièce, où quelqu'un d'autre l'attrapa par le bras.
C'était une jeune femme, un peu plus âgée que lui, une vingtaine d'années, grand maximum. Elle était vêtue d'un vieux pantalon et d'un tee-shirt usé, et faisait à peu près sa taille.
Elle était sang-mêlé, remarqua-t-il. Ses yeux étaient trop clairs pour qu'elle soit entièrement Wutane et sa peau trop blême. Et quand elle ouvrit la bouche pour parler, son wutan était maladroit et teinté d'un accent estérien.
"Bonjour, je suis Tsubame."
"Bon... bonjour, je... Harumi… où…"
"J'ai bonne nouvelle : Vous êtes vivant. J'ai mauvaise. Vous êtes dans Sin."
"Sin ? Qu'est-ce que c'est ? "
La jeune femme eu un petit sourire triste avant de le lâcher, ramassant des débris qu'elle fourra dans son sac. Elle déshabilla le corps d'une femme, s'appropriant son kimono avec un sourire satisfait, à la grande horreur d'Harumi.
"Sin, c'est... Euh... Poisson bateau ? Baleine bateau ? "
"Je ne comprends pas…"
"Sin c'est…" reprit Tsubame avant de se tourner vers le reste de la pièce, l'englobant d'un geste.
Harumi se tourna.
Ils se trouvaient dans une cavité irrégulière aux murs d'un gris rosé, vaguement ronde, à moitié remplie d'eau de mer, encombrés de débris et de cadavres humains ou monstrueux. Des vivants fouillaient les décombres, cherchant de quoi manger, dépouillant les cadavres de vêtements et d'objets personnels.
"On fait vite ! " ordonna un homme en commun, hissant un sac sur son épaule, " Sin va ouvrir l'accès à son estomac principal, décanillez ou vous vous ferez bouffer ! "
"Qu'a-t-il dit ? " demanda Harumi, perdu.
Tsubame le prit par la main, empoigna son propre sac de l'autre et l'entraina à la suite des gens qui évacuaient, passant par une porte enchâssée dans le mur de chair.
"Sin va manger ! " expliqua-t-elle.
Le dernier vivant avait à peine franchi le seuil que le sol s'ouvrit, comme une valve géante et tout ce qui restait dans la pièce fut englouti dans un énorme trou sentant le reflux gastrique.
"Urk, l'odeur ne s'arrange pas," marmonna un autre homme.
"C'est quoi ce délire ? [1] ! " s'exclama Harumi.
"C'est Sin. Bienvenue," déclara Tsubame, accroupie au sol.
Il se tourna vers elle, au moment où elle se levait, un enfant dans les bras. Pendant quelques secondes, Harumi resta stupéfait.
Cheveux argentés, yeux vert, peau pâle.
On aurait cru le Général Séphiroth. Le Démon de Wutai.
Mais en tout petit. Et avec un pouce dans sa bouche.
"Harumi. Lui, c'est mon fils. Riku."


"Donc, il est arrivé à la MGU ? Et après ? " demanda Reeve.
"C'est bien lui notre informateur mystère. Il a ouvert les portes de la MGU à Ultimécia, était présent lors de l'invasion de l'usine de traitement des eaux au secteur 5 et au pilier du secteur 8. C'est lui qui nous a prévenu et laissé des indices."
"Alors pourquoi a-t-il attaqué le réacteur ? "
Zack lui tendit la lettre de Riku.
Toute l'équipe d'Avalanche l'avait relue, chacun leur tour, à différents moments. La lettre avait été dépliée et repliée une bonne centaine de fois, et Jessie l'avait photocopiée par sécurité, au cas où elle serait un jour trop abîmée pour être relue.
Reeve la lu soigneusement, son expression aussi neutre que lors d'un conseil d'administration de la Shinra. Il acheva sa lecture, ses yeux cessant de passer d'une ligne à l'autre et resta quelques instants silencieux avant de replier soigneusement la feuille.
"Je vois," finit-t-il par déclarer. "Ça… va dans le sens de la théorie de Shera. Quels ont été les résultats de l'autopsie ? "
"Il... n'y a pas eu d'autopsie," avoua Shera, "tout ce qu'on a sur lui, ce sont quelques plumes et des témoignages visuels."
"Pourquoi ça ? "
"Les Turks ont volé son corps," expliqua Barret, "Wedge a failli percuter Reno avec la camionnette."
"Oh, c'est pour ça qu'il boitait," nota Reeve distraitement.
Aérith se leva calmement.
Tous les habitués de l'infirmerie grimacèrent, soudain pris de compassion pour le jeune turk roux.
Mère Nature était en colère.
"Je reviens," déclara-t-elle en sortant son PHS.
"Paix à l'âme de Reno," murmura Zack.
"Mais ça confirme que la substance mystère est liée à l'état de Riku Makani, Setzer, les clones et une grande partie des mutants qu'on a combattu depuis un an," reprit Shera.
"Tu pourras en parler au Professeur Falmis ? "
"J'ai juste besoin de ton autorisation," répondit Shera avec un petit sourire.
"Je te la signe dès qu'on a fini. Vincent, tu pourrais accompagner Shera à la Tour ? "
Vincent hocha la tête. Il en profiterait pour parler à Gast au sujet de Riku.
"On n'a rien d'autre sur lui ? " reprit Reeve.
"Tout ce que Riku mentionne après, c'est qu'à la mort de sa mère, c'est Harumi Kisaragi qui l'a élevé."


"Pas question ! " tempêta le chauve debout devant les Remnants.
"Haru," murmura Tsubame, accrochée à Harumi, quelques mètres plus loin.
"Tsu, prend Riku," répondit Harumi, s'interposant entre sa compagne et leur fils, "allez-vous cacher dans le côlon, vite…"
La jeune femme empoigna son fils par l'épaule prête à s'enfuir, mais ne bougea pas.
"Il... Séphiroth barre la route," expliqua-t-elle d'une voix tremblante.
Harumi quitta le chef des Parasites des yeux, jetant un regard par-dessus son épaule.
Il était là, en effet, debout devant l'accès aux intestins, son immense odachi à la main, fixant les Parasites d'un regard vide. Il y avait déjà deux cadavres à ses pieds, deux Parasites qui avaient tenté de fuir quand les Remnants étaient entrés dans l'estomac. La voix de Reddas reprit et Harumi se tourna de nouveau vers lui.
"Je ne vous livrerais pas les femmes ! "
"On ne te demande pas, Reddas, on te l'ordonne," rétorqua son interlocuteur, un homme presque aussi grand que Séphiroth, ses longs cheveux maintenant presque argentés.
Depuis que Garland avait accepté la proposition d'Hojo, depuis qu'il avait reçu les cellules de Séphiroth, ses cheveux devenaient graduellement argentés et ses yeux aussi lumineux que ceux du SOLDAT.
Du démon de Wutai.
"Alors tu vas bien gentiment ordonner à toutes les filles de nous suivre, ou le Général se fera un plaisir de tous vous passer par le fil de l'épée," continua Garland avec un sourire sadique.
"Va crever," rétorqua Reddas.
Reddas était un ancien soldat de Fort Condor. Un des guerriers les plus rapide des Parasites, qui s'attaquait sans hésiter aux squames affamés qui traînaient trop près de l'estomac.
Mais il n'était pas augmenté.
Il se précipita sur Garland, son poignard en os de Sin à la main. Garland le saisit par le poignet avec un sourire sarcastique.
L'autre poignard d'os, dans la main gauche de Reddas, lui lacéra la joue gauche, ratant son œil de peu.
La seconde suivante, Séphiroth était près d'eux.
Reddas n'avait plus de tête.
Harumi attrapa Riku, lui cachant le visage contre son torse quand le corps de Reddas tomba à genoux, puis s'effondra au sol, uniquement retenu par la main de Garland. Celui-ci le lâcha, visiblement furieux de ne pas avoir pu se faire justice lui-même et jeta un regard noir à Séphiroth, mais le Général ne le regarda pas, rengainant son arme sans un mot.
"Merci, Mère," finit par marmonner Garland.
Il porta la main à sa joue, jetant un regard furieux au sang qui tachait sa paume avant de marcher sur le corps de Reddas, donnant un violent coup de pied dans sa tête.
"Quelqu'un d'autre veut faire le héros ? " gronda-t-il.
Personne n'osa bouger.
"Très bien. Allez les filles, par ici ! " ordonna-t-il en désignant la porte derrière lui, qui menait aux poumons.
Aucune ne voulut avancer en premier.
"ALLEZ ! " s'écria Garland.
Il approcha d'Harumi et de Tsubame, les faisant reculer d'un mouvement de panique.
"Non..." commença Harumi.
"Dégage, Princesse," maugréa Garland en attrapant Tsubame par le bras.
"Maman ! "
"Riku, chut ! " ordonna Harumi, retenant le petit garçon contre lui.
Riku ne se laissa pas faire, essayant de se débattre contre l'étreinte d'Harumi.
"Maman ! Haru, fais quelque chose ! "
"Oh oui, Haru, fais quelque chose," répéta Garland d'un ton moqueur, posant la main sur la garde de son épée, "je serais curieux de savoir ce que valent les Kisaragi…"
"Harumi ! Non ! " protesta Tsubame.
Si Harumi était dans l'eau...
S'il pouvait se noyer là, maintenant…
S'il pouvait devenir un des dragons d'eau protégeant Wutai...
Il broierait le Remnant entre ses mâchoires comme un vulgaire poisson et recracherait ses os pour en faire les tablettes funéraires de Reddas et de leurs morts.
Mais il ne l'était pas.
Il était humain, sans sa limite, sans ses armes, sans sa famille, en face d'un homme qui devenait l'égal du Démon de Wutai.
"Haru ! Occupe-toi de Riku ! " supplia la jeune femme.
Il recula d'un pas, serrant Riku contre lui. Garland secoua la tête, presque déçu.
"Je m'en serais douté. Une poule mouillée."
"Je vais te BOUFFER ! " cracha Riku avant qu'Harumi le bâillonne d'une main.
"De même, gamin. Essaye juste de ne pas grandir comme la Princesse."


"Maintenant, passons aux infos que Riku nous a transmises ! " déclara Jessie en retirant les photos de la famille de l'écran.
"De quoi s'agit-t-il ? "
"On tuerait pour tout ce qu'il a donné. Même si… Bon, gardez en tête que Riku avait quinze ans, aucune formation scientifique et n'était jamais allé à l'école. Il interprète pas mal de choses mais ça reste utile. Commençons par Sin ! "
"Jessie," coupa Shera, "penses-tu que Zack et Cloud devraient rester et écouter ? "
La jeune fille resta silencieuse quelques secondes, contemplant les jumeaux pensivement avant de secouer la tête.
"Je vais voir Aérith ! " déclara Zack en attrapant Cloud par le bras, "Mettez la musique, hein ! "
Après un rapide débat sur qui choisirait la musique de camouflage, Barret finit par imposer sa propre playlist et les explications reprirent.
"Bon, alors reprenons, comme le pense le Professeur Falmis, Sin est bien une créature biotechnologique et deux trois autres trucs jetés dedans pour faire joli. Pour commencer, Sin est… je ne sais pas trop comment le dire avec tact et délicatesse, donc allons-y franco : Sin est à la fois mâle et femelle."
"Je… quoi ? " fit Cid.
"Et une grande partie des squames sont ses enfants," acheva Jessie, "ou ses petits. Les Moissonneurs déjà, mais aussi d'autres, qu'on a eu la joie et le bonheur de rencontrer lors d'autres missions. Apparemment une fois l'an, Sin… Ça va être glauque," prévint Jessie, "Sin s'auto féconde et met au monde des centaines de squames. Pour la plupart, ils restent accrochés à elle... lui… et se détachent seulement pour attaquer les villes."
"On se demandait comment Hojo faisait pour les créer, on a notre réponse," soupira Shera, "une arme vivante qui s'auto-reproduit."
"Ceci étant, la période de reproduction de Sin demande une grande quantité d'énergie, et au moment où Riku écrivait les carnets, Sin arrivait au bout de sa réserve de bébés et de la méga matéria volée à Besaid."
"Et malheureusement, il en a une toute neuve maintenant…" soupira "Reeve. Est ce qu'on sait combien de temps mettent les squames à naître ? "
"Selon les types, entre deux et quatre mois, à peu près autant pour être mature," précisa Jessie, "on était à deux doigts d'avoir une pause de la guerre faute de combattants."
"Voilà pourquoi Hojo était désespéré de trouver de nouvelles méga matérias," nota Reeve.
"Et pourquoi les attaques s'accéléraient."
"Vous pensez que ça va diminuer maintenant ? " demanda Vincent.
Barret soupira, réfléchissant rapidement.
"Pas... exactement. Ce sera différent. Il faudra recouper les précédentes attaques pour vérifier, mais cette dernière année, il y a eu plus d'attaques à Midgar qu'ailleurs dans le monde."
"Il n'y a pas d'autres réacteurs avec des méga matérias ? " s'enquit Vincent.
"Pas que je sache," répondit Reeve. "les méga matérias ne sont pas un développement maîtrisé. Ça arrive ou ça n'arrive pas. Nous ne serions pas en pleine guerre, j'adorerais étudier ça, mais tout ce que je peux te dire c'est qu'il y en a peu et qu'elles mettent quelques années à se développer pour atteindre leur plein potentiel. Depuis Guelnika, les informations les concernant sont extrêmement contrôlées."
"Comment Hojo a su que celle du réacteur Tonberry était prête alors ? " s'étonna le sniper.
Le silence retomba.
"Oh, merde," murmura Cid. "un espion ? "
"J'ai peut-être une explication," risqua Jessie, "mais…"
"On ne va pas aimer ? " suggéra Barret.
"Oh non… Ça a un rapport avec Sin lui-même. Enfin… C'est pas les mots que j'aurais dû utiliser…"
Jessie se tourna vers la télévision, affichant une autre image, apparemment un dessin scanné des carnets de Riku. Shera s'approcha en ajustant ses lunettes, déchiffrant les mots qui entouraient le dessin, représentant Sin vu de coupe.
"Riku disait dans ses carnets qu'il n'était pas sûr que Sin ait une conscience," commença Jessie, "déjà… parce qu'il n'y a pas moyen de communiquer avec lui, mais aussi et surtout parce qu'il n'a quasiment plus de cerveau."
"Comment ça quasiment plus ? " s'étonna Barret.
"Hojo a graduellement remplacé le cerveau de Sin par… par une famille d'Al Bhed Bienheureux."
"Avec les sondes ? " demanda Cid.
"En tout cas, Riku dit que ce sont eux qui pilotent Sin, donc c'est probable."
"Et s'ils peuvent se connecter à un ordinateur avec la même facilité que celui de la MGU…" commença Shera, "Il leur suffit de trouver un des câbles sous-marin du mognet pour accéder à n'importe quel ordinateur sur Gaïa, tant qu'il est aussi connecté."
"Et maintenant, on sait comment Hojo fait pour être au courant de ce qui se passe hors de Sin," conclut Barret.
"Attends, mais si Sin n'a plus de cerveau, comment fait-il pour vivre ? " s'étonna Yuffie.
"A ce stade-là, je pense que Sin doit être une espèce de Bienheureux aussi," marmonna Shera, les yeux plissés.
"Je suis content que Zack et Cloud ne soient pas là," murmura Red.
"Etage des labos…" lu Shera sur l'écran, " gynécée… Premier estomac, deuxième estomac… Utérus... On dirait que le cœur est intact, mais il n'y a pas de poumons…"
Jessie sortit une photocopie qu'elle tendit à la biologiste.
"Pas de poumons."
"Pas de poumons ? " répéta Shera.
"Il a fallu les retirer pour faire de la place. Hojo a mis un système de branchies artificielles, ça filtre l'oxygène de l'eau et ça permet aux habitants de Sin d'avoir de quoi respirer."
"Et ça, ça explique pourquoi Sin ne vient à la surface que pour les attaques," marmonna Barret.
"Et dans l'espace libéré, Hojo a installé plusieurs niveaux de laboratoire, des espaces pour les spécimens, son logement, même si Riku dit qu'il passe sa vie dans le labo…"
"Ça n'a pas changé," maugréa Vincent.
Tout le monde se tourna vers lui, intrigué par son intervention.
"Nibelheim," déclara Vincent en guise d'explication.
Il avait parfois dû aller chercher Hojo dans le labo en pleine nuit pour le ramener dans sa chambre manu militari. Lucrecia avait pris le relai à leur mariage, mais au bout d'un moment, même elle n'avait pu détourner son mari de ses recherches.
C'était pour ça qu'il avait pu trouver Hojo seul dans son laboratoire un soir et…
Vincent se secoua. Il pensait trop à Nibelheim, il ferait mieux d'écouter.
"C'est aussi là qu'on trouve les endroits où vivent les habitants de Sin. Enfin, vivre… Il faut le dire vite. Il n'y a pas d'organisation dans Sin. Rien de centralisé en fait. Hojo s'en fiche et les laisse se débrouiller comme ils peuvent. Ils se nourrissent des poissons et mammifères marins que Sin avale et ils récupèrent ce qu'ils peuvent des pillages de moissonneurs. Et même là, il y a des bagarres pour les ressources entre les deux factions principales dans Sin."
"Deux factions ? " s'étonna Shera.
"Les Parasites, pour commencer."
Tout Avalanche resta brièvement confus de l'utilisation du mot.
"Est-ce que je veux savoir ce que veut dire ce nom ? " s'enquit Barret d'un ton prudent.
"Plusieurs choses selon Riku. Ça désigne les derniers survivants des pupilles de Shinra, même si Riku dit qu'il est un des derniers, les autres sont morts depuis longtemps. Mais aussi une partie des disparus lors d'attaques de Sin, soit parce qu'ils ont été emmenés par les Moissonneurs, soit parce qu'ils ont été avalés par Sin. Il y a aussi quelques sujets d'expériences qui se sont enfuis mais qui n'ont pas réussi à sortir de Sin, comme Gabbiani."
Jessie approcha de nouveau de l'écran et afficha un autre plan de Sin, désignant un espace sous les poumons.
"Les Parasites vivent en communauté dans un des estomacs de Sin qui a été vidé. C'est plus ou moins bien organisé, selon qui est le chef du moment. En ce moment, c'est un certain Tarask qui dirigent les Parasites."
"Setzer avait mentionné ce nom, " nota Cid, "Tarask. Un pote apparemment."
"Apparemment, Riku a grandi parmi eux après la mort de sa mère et a été élevé par Harumi Kisaragi. Riku a fait une liste de tous ceux qu'il se souvenait, plus une autre de tous ceux qui sont morts depuis et j'admire la mémoire de ce gamin."
"Fais-moi une copie des listes, je vais recouper avec celle des disparus," demanda Reeve.
Jessie opina en se mettant une note sur sa tablette.
"Par contre ça change régulièrement, parce que Hojo vient allègrement se servir dans leur groupe pour ses sujets d'expériences ou faire des Bienheureux et personne n'ose moufter de peur d'être le prochain."
Jessie feuilleta un des carnets, l'ouvrant à une page avant de le montrer à Reeve.
"Ceci étant, ils ne se laissent pas faire non plus. Même si officiellement, ils ne sont pas autorisés à aller dans les labos, ils ne se gênent pas."
"Pourquoi faire ? "
"Saboter des expériences, nourrir ceux qui sont enfermés, abréger les souffrances d'un sujet ou le libérer, selon son état de santé…"
"Et Hojo ne fais rien ? "
Jessie secoua la tête.
"Pourquoi faire ? ils ne peuvent pas sortir de Sin, s'ils deviennent gênants ou qu'il veut en récupérer un, il envoie les Remnants.


Riku avait encore disparu. Et personne dans l'estomac ne l'avait vu. Il n'était pas dans leur abri, creusé dans la paroi desséchée de l'organe, il n'était pas en train d'aider à la cambuse, ni au butin des pillages ou à ce qui tenait lieu d'infirmerie.
Il fallait d'Harumi le retrouve rapidement, avant qu'un des Remnants ne le fasse.
"Haru ! " appela un des Parasites, "viens vite ! C'est Riku ! "
Et voilà, qu'est-ce qu'il disait ?
Harumi se précipita dans la direction indiquée par le Parasite.
Il vit d'abord un homme nu aux longs cheveux argent, qui avançait d'un pas furieux, fendant la foule des Parasites par sa rage pure.
Puis il vit Riku, calé sous le bras de l'homme, qui se laissait faire. C'était suffisamment étonnant de la part de son gamin pour que le cœur d'Harumi s'affole.
"RIKU ! " s'écria-t-il.
L'homme se tourna vers lui.
Le cœur d'Harumi stoppa.
Il était couvert de cicatrices, d'un sang qui ne lui appartenait pas et de pas grand-chose d'autre.
"C'est à vous ça ? " grommela l'homme d'une voix agacée.
"Euh... salut Haru," murmura Riku.
L'homme changea sa prise sur l'enfant, l'attrapant sous les aisselles pour le brandir sous le nez d'Harumi.
"C'est à vous ? " répéta l'homme.
"C'est à moi, en effet," finit par répondre Harumi.
L'homme fit un pas en avant, lui fourrant Riku dans les bras avant de baisser les mains vers le sol. Harumi saisit aussitôt Riku, le mettant à l'abri derrière lui tout en reculant.
Il ne connaissait pas cet homme, mais avec des cheveux de cette couleur et un regard mako aussi intense, il y avait de grandes chances qu'il soit un Remnant. Et ce n'était jamais une bonne chose que quelqu'un se balade nu et en sang dans Sin.
"Vous le laissez se balader seul ? Vous savez qu'il a failli se faire bouffer ou violer ou je sais pas quoi par un… C'était quoi d'ailleurs ce truc ? " demanda-t-il au gamin.
"Garland. Il a tué Garland, Haru ! " s'exclama Riku, visiblement ravi.
"Voilà ! Garland ! J'ai tué Garland ! C'était qui ? "
"Il a quoi ? " répéta Harumi avant de se tourner vers son fils.
Oh.
Oh non. Tsubame allait l'étriper quand il la rejoindra dans la Rivière de la Vie.
Elle allait les étriper tous les deux.
Ces derniers mois, Garland avait été officiellement déclassé en tant que Remnant. Il avait dégénéré rapidement après une énième injection de cellules de Séphiroth, et devenait peu à peu un makonoïde. Sa dégénérescence physique s'était accompagnée d'une mentale et les Parasites l'évitaient autant que possible, craignant de se faire tuer et dévorer.
Tarask envisageait une expédition punitive pour abréger ses souffrances et cherchait des combattants volontaires.
Au moins, le problème était réglé.
"Riku, je t'ai déjà dit de ne pas approcher des Remnants ! "
"Lui c'est pas un Remnant ! Il était dans une cage, il fait partie de la série pour les paramètres de régénération mako, je leur donnais juste à manger ! "
"Ouais, d'ailleurs c'était dégueu," rétorqua l'homme avant de tourner la tête vers la foule qui s'amassait autour d'eux, le fixant avec méfiance. "Quoi ? Vous avez jamais vu un cul de votre vie ? "
"Qui êtes-vous ? " commença Harumi.
"Capitaine Setzer Gabbiani, pilote du Blackjack, front de Junooooon…"
Il baissa les yeux.
"Pourquoi je suis à poil ? " réalisa-t-il soudain.
Il releva les yeux, regardant le plafond de chair qui respirait lentement.
"Où est-ce que je suis ? " ajouta-t-il d'un ton moins assuré.
"Vous êtes dans Sin. Nous sommes dans un de ses estomacs," répondit Harumi d'une voix aussi rassurante qu'il pouvait dans la situation.
Le capitaine Gabbiani tourna la tête vers lui.
"Dans Sin."
"Dans Sin."
Le Capitaine porta la main à son autre bras. Harumi remarqua que la peau était plus pâle, symptôme évident d'une régénération. Une fois assuré de la présence de son bras, il baissa les yeux vers ses jambes, puis enfonça ses doigts sur sa hanche droite, grattant la peau toute neuve.
"Mon tatouage… Je l'ai plus…"
"Vous avez été régénéré ! " expliqua Riku, "Hojo vous as mis dans un tube et…"
"Chut ! Chut chut chut… " ordonna Gabbiani en levant un doigt vers l'enfant, "j'en suis toujours à être dans Sin là."
Il jeta de nouveau un regard au plafond qui choisit ce moment pour se convulser.
"Oh, merde," murmura-t-il avant de baisser les yeux sur Harumi, "avant tout, je tiens à dire que je ne m'évanouis pas comme une gonzesse."
"Euh, très bien," commença Harumi.
Et le Capitaine s'effondra. Riku se dégagea des bras d'Harumi et s'approcha, posa sa petite main sur le front de l'homme aux cheveux argent.
"Il est vivant ! " annonça-t-il.
"Pour de bon ? " demanda un grand homme à la peau d'un blanc presque bleu, aux longs cheveux rouge grossièrement nattés qui couvraient son visage.
Après la mort de Reddas et l'assassinat de celui qui avait suivi, c'est Tarask qui avait prit le relais à la tête des Parasites, en grande partie par accident. Aussi indépendant que soit Tarask, il prenait de bonnes décisions pour assurer la survie des Parasites. Enfin, il prenait une décision et les autres suivaient, faute d'une meilleure idée.
Harumi ne savait pas exactement ce qu'était Tarask et n'osait pas demander. Ses bras étaient trop longs pour son corps, ses ongles poussaient comme du chiendent, allongeant encore des doigts d'une bonne phalange et ses cheveux n'avaient ni une couleur, ni une texture naturelle. Quant à ce qu'il cachait dessous...
"Il est en bonne santé," répondit l'enfant, "juste fatigué et affamé."
"Tarask, on en fait quoi ? " demanda Harumi.
"Dès qu'Hojo va apprendre qu'il a buté Garland, il va vouloir le récupérer et savoir comment," répondit-t-il en s'agenouillant près de lui.
Tarask posa une main sur le visage du Capitaine, levant délicatement une paupière dévoilant un iris mauve et lumineux.
"D'un autre côté, il est augmenté et a buté un Remnant. Ça peut nous être utile…"
"On le garde, alors ? " demanda Riku.
"On le garde," déclara Tarask avant de se lever. "Trouvez un coin où le mettre le temps qu'il se réveille, je vais aller voir si on a des affaires à lui dans le butin de… Il a dit Junon, c'est ça ? "
"Oui, je crois bien," répondit Harumi.
"D'ici là, c'est toi qui t'occupes de lui, Haru," ordonna Tarask.
"Pourquoi moi ? " protesta le Wutan.
"Parce que je te le dis ! " rétorqua Tarask en s'éloignant, dispersant les autres Parasites.
"Tu pourrais au moins me donner un coup de main pour le porter ! Il fait une tête de plus que moi ! " protesta Harumi dans son dos.
"Démerde-toi, Princesse."
"Arrêtez de m'appeler comme ça ! ! "


"Donc, c'est aux Parasites que nous devons les coups de main de l'intérieur ? "
"Exactement, ils s'ingénient à mettre des bâtons dans les roues d'Hojo. L'évasion de Zack et Cloud a été un gros évènement pour les Parasites. Certains ont essayé d'en profiter pour fuir aussi, mais les Remnants sont vite intervenus pour refermer la brèche. C'est là qu'Harumi Kisaragi a été capturé et emmené dans le laboratoire d'Hojo."
"Je peux sortir ? " demanda Yuffie.
Vincent tourna la tête vers elle, réalisant qu'elle était devenue toute blanche et serrait sa main assez fort pour qu'il le sente.
"Faisons une pause," suggéra Barret.
"Bonne idée," renchérit Reeve.
Yuffie lâcha sa main et sortit quasiment en courant dans la cour.
"J'y vais," déclara Vincent.
Il trouva Yuffie assise sur les marches du porche, Aérith à ses côtés. La jeune femme avait visiblement fini d'enguirlander Reno au téléphone et s'était accroupie devant Yuffie, une main sur l'épaule, lui parlant d'une voix douce. Elle leva les yeux quand Vincent approcha.
De tous les habitants de Seventh Heaven, Aérith était une de ceux qu'il n'arrivait pas à surprendre. Red le sentait venir à l'odeur, les jumeaux arrivaient à l'entendre une fois sur deux, mais Aérith savait toujours quand il était là, même quand elle ne le voyait pas.
Ça faisait partie des étrangetés de la jeune femme, celles que personne à Seventh Heaven n'expliquait, ni ne cherchait à comprendre.
"Que se passe-t-il ? demanda Aérith, "elle ne veut rien me dire."
"Jessie a parlé de son oncle," expliqua Vincent en s'asseyant près de Yuffie, posant sa main humaine sur son dos.
"Je suis désolée," murmura Yuffie, " je pensais le supporter…"
"Yuffie," murmura Aérith.
"Ce n'est pas supportable," déclara Vincent.
Les deux femmes levèrent les yeux vers lui, surprise.
"Tu n'as pas à essayer."
"Mais…"
"Non. Ce n'est pas supportable. C'est tout. Il… Il y a une raison pour laquelle… Les jumeaux et moi…"
Il s'interrompit, cherchant ses mots. L'autre main d'Aérith se posa sur son genou et…
Il se sentit mieux.
Plus calme.
Ses idées étaient plus claires.
"Je ne peux pas en parler," avoua-t-il, "c'est comme le revivre."
Yuffie se redressa, lui jetant un regard désemparé.
"N'essaye pas de le supporter, Yuffie. Tu n'as pas à le faire."
Yuffie hocha la tête avant de lever les bras lentement, les nouant autour du cou de Vincent.
"Tu devrais pas avoir à le supporter non plus, Grand Frère."
"Hojo ne m'en a pas laissé le loisir."
"Lui foutrait un coup de shuriken entre les deux yeux," marmonna Yuffie, le nez contre l'épaule de Vincent.
"Attend que je lui ai explosé les genoux," rétorqua Vincent.
"Autant j'apprécie votre esprit de famille," soupira la guérisseuse, "un peu moins d'humour noir vous ferait du bien."
L'expression désabusée d'Aérith les fit ricaner tous les deux en chœur.
Quand Aérith, Yuffie et Vincent revinrent tous les trois dans la pièce principale, Jessie reprenait ses explications.
Des tasses de café et de thé avaient été faites, des chocobonbons sortis et Red grignotait un os de chocobo, aidé par Cait.
"Et l'autre faction dont tu parlais ? " demandait Reeve devant un café frais.
"Il s'agit de nos amis les Remnants, qui sont relativement libres de se promener partout. Ils ne sont pas nombreux mais très puissants et sèment la terreur dans Sin quand ils ne sont pas sous les scalpels d'Hojo.
"Jessie," s'exclama Cid d'un ton ferme.
La jeune fille sursauta, et suivit du regard la direction qu'indiquait Cid, vers Vincent qui revenait, un bras autour des épaules de Yuffie.
"Je… Désolée," marmonna Jessie en piquant un fard.
"Ça va," répondit Vincent en reprenant sa place, suivi par Yuffie qui resta accrochée à lui, sans un mot.
Elle avait repris des couleurs, mais gardait une expression abattue. Shera tendit une tasse de thé à l'adolescente, ainsi qu'un café à Vincent, avec un petit sourire.
Jessie afficha une autre image sur l'écran, cette fois une liste de noms et de numéros.
"Selon Riku, il s'agit d'une expérience de longue durée dont il a été une première version."
"C'est à dire ? "
"Hojo essaye de copier Séphiroth."
"C'est ce que Setzer avait déjà mentionné, je crois," intervint Shera.
"Oui, mais ça ne marche pas, ou en tout cas, pas suffisamment au goût d'Hojo. Il a commencé à la Tour Shinra, avec une tentative de reproduction entre Séphiroth et la mère de Riku. Selon Riku, c'est un échec, il n'a même pas eu de numéro pour la peine. D'après Hojo, il ne tient rien de son père."
"A part le visage, les cheveux, les yeux et les capacités physique, magique et de destruction ? " remarqua Cid d'un ton narquois.
"Si ce n'est pas ça qu'Hojo voulait, qu'est-ce que c'était ? " ajouta pensivement Vincent.
"Je ne suis pas sûre de vouloir savoir," marmonna Jessie, "ensuite, il a tenté le clonage direct. C'est aussi un échec."
"De quel point de vue ? "
"Les clones sont… identiques à Séphiroth, mais ne sont pas stable."
"Défini 'stable' ? " demanda Barret.
"Toujours vivants, cohérents et humains au bout de quelques années ? " suggéra Jessie.
"Je n'arrive pas à croire qu'il soit arrivé à cloner un être vivant," murmura Vincent pensivement.
"Comment ça ? " demanda Barret.
"A mon époque, ce n'était qu'une théorie."
"Non seulement il y est arrivé," intervint Shera, "mais il a aussi mis au point une méthode pour les faire vieillir plus rapidement. Je veux dire avec les clones du pilier… Elles ne pouvaient pas avoir plus de cinq ou six mois et certaines avaient l'air plus âgées que Tifa."
"Ouais enfin, mettre au point c'est vite dit," reprit Jessie, "déjà, pour faire naître les clones il a besoin d'utérus. Il ne sait toujours pas faire naître un bébé sans ça."
"Et ou les trouve-t-il ? " demanda Barret.
"Oh, je vais pas aimer," marmonna Aérith en pâlissant.
"Le Gynécée," répondit Jessie en approchant de la télévision, affichant de nouveau le plan de Sin, "ici. C'est une pièce où sont rassemblées toutes les femmes qui arrivent à Sin. Riku raconte qu'il y a quelques années, Hojo a fait rassembler toutes les femmes des Parasites, dont sa mère, et les a enfermées là."
"Je n'aime pas…" confirma Aérith.
"Riku précise qu'elles sont dans des cuves à mako et ne sont plus conscientes," répondit Jessie d'un ton aussi détaché que possible, "mais il n'explique pas comment il sait. Il dit juste que de temps en temps, les Parasites s'introduisent dans le Gynécée pour essayer de saboter les clonages en cours, soit en jetant quelque chose de pourri dans une cuve, soit en essayant d'empoisonner la mako, soit en achevant la mère porteuse."
Jessie soupira et jeta un petit regard las au reste de l'équipe.
"Hojo essaye de les faire vieillir artificiellement pour qu'ils passent du statut de bébé à adulte rapidement, mais le procédé n'est pas tellement au point et la plupart meurent de vieillesse ou de dégénérescence en quelques années. Riku dit qu'il y en a trois pour le moment, connus sous le surnom des triplés : Loz, Yazoo et Kadaj. Petit aparté rigolo ou pas : Les clones appellent Hojo 'papa'."
"Définitivement pas rigolo," confirma Barret.
"Numéro des triplés, Kadaj 90, Yazoo 91 et Loz 92."
"Et on sait maintenant à qui appartient le bras mystère," nota Barret.
"Et question stabilité, ces trois-là n'ont pas gagné à la loterie. Loz réagit comme un enfant, un enfant avec la force et la rapidité de Séphiroth, mais un enfant. Coup de pot, il ne peut pas utiliser la magie, personne ne sait exactement pourquoi. Kadaj, par contre, est très doué en magie, moins fort physiquement que les deux autres, mais aussi beaucoup plus volatil niveau caractère et peut passer d'un calme froid à une furie meurtrière en dix secondes top chrono. Quant à Yazoo… Il est joueur."
"Joueur ? "
"Vous vous souvenez la fois où Cait a ramené une souris ? "
"J'ai bon, j'ai compris," déclara Barret.
"Riku l'appelle le Sadique," précisa Jessie.
"J'ai compris," répéta Barret d'un ton plus ferme.
"Et enfin, il y a la troisième et dernière version des Remnants, ceux que Riku surnomme les Infusés."
"Infusé ? Comme du thé ? "
"Ouais, avec entre autres : transfert de pouvoirs de sorcière, greffe de cellules de Séphiroth, injection de mako, et autre joyeuseté du genre. Dans la liste actuelle, nous avons d'abord Ansem Xehanort, alias 81. Hojo en a fait un Remnant pour le 'remercier'. Apparemment, ça faisait plusieurs années qu'il espionnait Esthar pour Hojo et faisait des aller-retour entre Esthar et Sin."
"Comment ? "
"Pouvoir de Sorcières qu'il s'est transféré. Il peut… Il appelle ça 'voyager par les couloirs des ténèbres', de ce que Riku en dit, ça ressemble à l'effet d'une matéria quitter mais à plus longue distance."
"Je confirme," déclara Vincent en se souvenant du mal qu'il avait eu à attraper le Remnant pendant leur duel.
"C'est lui qui a fourni toutes les recherches à ce sujet à Hojo, ainsi que l'emplacement de plusieurs sorcières qui ont servi pour transférer leur magie aux Remnants."
"Dont Ultimécia ? "
"Numéro 93. La seule à avoir survécu au siphonnage de ses pouvoirs et à l'injection mystère. Ça l'a rendue… disons, plus faible, mais aussi instable que Kadaj."
"Attend, siphonnage de ses pouvoirs… Ça veut dire qu'elle était encore plus puissante avant ? " demanda Shera.
Barret déglutit nerveusement, la bouche sèche. Ultimécia avait été considéré comme affaiblie et utilisait des sorts capables d'ébranler Cloud et Vincent. Ça n'était pas de bon augure.
"Sa magie a été infusée dans Kefka entre autres. Et à propos… Kefka Palazzo, numéro 94, et auto-proclamé général d'Hojo. C'est lui qui a planifié toutes les attaques depuis qu'Hojo l'a récupéré et soigné après la bataille d'Alexandria de l'année dernière. Et comme Kadaj, il est volatil et violent. Mais il est aussi extrêmement intelligent. Par contre, et c'est bon à savoir : Les Remnants ne sont pas unis. A part les triplés qui font tout ensemble, ils se tirent tous dans les pattes pour être le premier après Séphiroth."
"Ça, c'est intéressant."
"De quels genres de pouvoirs de Sorcières bénéficient les Infusés ? "
"Des qui font mal" marmonna Jessie, "magie native, surtout élémentaire, la capacité de voyager par les couloirs des ténèbres, même si tous ne la maîtrisent pas aussi bien qu'Ansem et... ah oui ! Les mini mage noirs ? On a du nouveau sur eux ! "
"Oh ? Alors que sont-ils ? "
"De la magie pure et incarnée. En gros, c'est comme si un sort avait des jambes et une intelligence très limité. Riku les nomme des Sans-cœur et ils peuvent être invoqués par tous ceux qui ont des pouvoirs de Sorcières. Encore une fois, c'est Ansem le plus doué avec, mais c'est probablement surtout parce qu'il est celui qui a été infusé le plus longtemps."


"Setzer, j'ai un mauvais pressentiment…"
"On s'attardera pas, juste le temps de trouver Haru et on file se cacher dans l'intestin," répondit Setzer, penché sur la serrure, à tenter de la forcer avec un fil de fer.
"Hojo le saura…"
"Hojo peut aller se faire foutre par Sin ! " rétorqua Setzer en perdant patience avec le crochetage, se contentant de briser la serrure d'un coup de poing.
Ils se glissèrent tous les deux dans le labo, Riku se tenant au bras de Setzer.
"J'espère qu'il est pas dans un tube, j'ai aucune idée de comment sortir quelqu'un de ces trucs sans danger," marmonna Setzer en passant accroupi entre deux cuves creusées dans le sol.
Il ne s'habituait pas à ce mélange d'organique et de métal, à voir parfois les murs ou le sol saigner quand une porte se fermait violemment, ou qu'un objet tombait par terre.
Il ne s'habituait pas non plus à voir des corps flotter dans la mako ou les liquides non identifiés. Ça lui rappelait trop les cuves à mako. Il en voyait un à ses pieds, replié sur lui-même, flottant entre deux eaux. Il allait continuer quand il sentit la main de Riku le retenir.
Le gosse avait une sacré poigne, il ne savait pas d'où ça venait. Il avait entendu des rumeurs chez les Parasites, mais entre les hypothèses que Riku soit un Remnant, un clone, ou un fils de Séphiroth, il ne savait pas quoi penser.
Il ne voulait pas y penser.
Riku était le gamin d'Haru, point.
"Riku ? "
"Il est là," murmura Riku en désignant le corps qui flottait.
Setzer devint encore plus pâle, si c'était seulement possible et se laissa tomber à genoux, fouillant la pénombre du regard pour tenter de voir le visage du parasite.
"Haru ? " appela-t-il, "Haru ! "
Le corps se déplia lentement comme s'il se réveillait. Setzer plongea la main dans le liquide, se sentant soulagé de ne pas sentir le froid de la mako sur sa peau. Il attrapa Haru par le col et le hissa à la surface.
Il manqua de le lâcher en voyant ce qu'il ramenait.
Il était plus grand. Haru avait toujours été plus petit que lui et là, soudainement, il faisait une tête de plus. Ses cheveux étaient plus longs, ses bras couvert d'écailles et s'achevant sur des mains palmées aux griffes impressionnantes, il avait des... des petites ailes de chauve-souris sur les oreilles ? Et d'autres plus bas sur les reins et…
Il n'avait plus de jambes.
Juste une longue queue de serpent.
C'était trop tard.
Hojo l'avait changé.
"Haru ? " murmura-t-il d'une voix cassée.
Haru poussa un petit cri désemparé, comme un dauphin blessé. Il avait un collier de métal autour du cou, doté d'une chaîne reliée au fond de la cuve. Pas assez longue pour qu'il sorte entièrement de la cuve, juste assez pour qu'il puisse émerger.
"Merde ! " jura Setzer, cherchant frénétiquement comment l'ouvrir, " ne bouge pas Haru, je... je te sors de là."
Haru s'agrippa des deux mains au bord de la cuve et essaya de reprendre son souffle, son expression se faisant de plus en plus paniquée.
"On va te sortir de là ! " répéta Riku.
Haru tenta de parler, mais ne put rien émettre d'autre que des sifflements. Il se dégagea des mains de Setzer, retombant dans l'eau et y resta quelques dizaines de secondes, son torse se soulevant et s'abaissant régulièrement.
"Merde… il ne peut pas respirer…" murmura Setzer.
Leur ami remonta à la surface et tenta à nouveau de parler, sans y parvenir.
"Il faut couper la chaîne," commença Riku.
"J'essaye de la casser ! " s'exclama Setzer en la saisissant, "mais c'est conçu pour résister aux squames, cette saloperie et…
La main d'Haru se posa sur sa bouche et le Wutan secoua la tête.
"Quoi ? "
Il leur fit signe de partir.
"Ah, non, pas question, Princesse, ton gosse a besoin de toi ! " protesta Setzer, écopant d'une baffe qui lui fit brièvement voir double.
"T'sais bien qu'il aime pas quand on l'appelles comme ça," marmonna Riku.
"Ow, il tape encore plus fort qu'avant," gémit Setzer.
Haru replongea dans sa cuve pour reprendre son souffle. Setzer vit un petit nuage de sang se disperser dans l'eau avant que l'autre homme ne remonte, lui tendant quelque chose.
Une écaille.
Prise sur son épaule.
"Haru… non, écoute, on va revenir. On va revenir avec Tarask, on te sortira de là…"
Haru lui mit l'écaille dans la main en secouant la tête.
"Non... Ecoute je... je te fais un échange," marmonna Setzer, sortant son jeu de cartes, lui en donnant une, "Tiens, tu… tu gardes ça, on fera l'échange dès qu'on revient, ok ? "
Haru posa une main sur la joue de Setzer avec un sourire triste, hochant doucement la tête et glissa la carte dans le col de son kimono. Il voulut se tourner vers Riku mais son regard se figea et son expression afficha une terreur complète mêlée de colère. Il se redressa dans la cuve de toute sa hauteur en sifflant, regardant par-dessus la tête de Riku, mais la chaîne se tendit, le faisant retomber dans l'eau sous le choc.
"Haru ! " S'exclama Riku alors qu'une main l'attrapait par les cheveux.
"Je me doutais que vous alliez nous faire un truc du genre," s'exclama Ansem en tirant Riku vers lui.
Il prit un coup de pied dans le torse de la part de Setzer. C'était satisfaisant d'arriver à frapper Ansem, d'habitude, ce fils de pute disparaissait en un éclair.
Ce qui était encore plus satisfaisant, c'est qu'au bruit, il lui avait cassé plusieurs côtes.
"Bas les pattes ! " s'exclama Setzer, lui arrachant le gamin des mains.
Il se retrouva plaqué au sol à son tour, sous le poids de deux hommes aux cheveux argent qui lui tordaient les bras dans le dos.
"Bonjour Setzer, ça faisait longtemps " murmura le premier, aux longs cheveux argentés.
"Yazoo ! Dégage pauvre taré ! " rétorqua Setzer en essayant de se débattre.
Riku tenta de se débattre aussi, donnant un coup de pied à l'autre Remnant, aux cheveux plus courts, mais celui-ci lui mit une telle gifle que l'adolescent retomba prostré au sol.
"Kadaj va te faire FOUTRE ! " tempêta Setzer.
"Tu n'as pas honte de proposer ça à un enfant ? " rétorqua Yazoo en se penchant à l'oreille de Setzer.
Il dû reculer vivement quand Haru revint à la charge, tendant ses griffes vers lui et manquant de l'éborgner.
"Cette fois je vais les buter tous les deux," gémit Ansem, une main sur les côtes pour se soigner.
"Les enfants, les enfants", marmonna une voix venant de l'autre côté de la cuve.
Haru se tourna vivement, tentant d'attaquer le nouveau venu, mais Ansem lui lança un sort de foudre noire qui le fit retomber dans l'eau dans une grande éclaboussure. L'homme qui avait parlé approcha à petit pas. Il semblait presque frêle, perdu dans sa blouse blanche, ses longs cheveux noir noués sur sa nuque et ses petits lunettes ronde retombant au bout de son nez.
Setzer fut à la fois pris d'une nausée et d'une fureur meurtrière en le reconnaissant.
Hojo.
"Doucement avec le sujet 85, Ansem."
"Je m'excuse, Professeur," répondit Ansem d'un ton aussi peu contrit que possible.
"Les injections je te prie ? "
"Oui, Professeur," répéta Ansem, ramassant un pistolet à injection sur un des meubles de la pièce, avant de se pencher sur Riku.
"VA BAISER IFRIT ! " Hurla Setzer en tentant de se dégager.
"C'est possible ? " s'enquit Kadaj, venant s'asseoir sur le dos de Setzer pour aider son frère à le retenir.
"Aucune idée, mais j'aimerais essayer," répondit Yazoo d'un ton doucereux.
Riku poussa un hurlement quand Ansem fit l'injection et tenta de s'enfuir, réveillé par la douleur.
"Loz ! " appela Ansem, "tiens le gamin ! "
Pendant que le dernier triplé s'occupait de l'adolescent, Ansem approcha de Setzer et lui fit subir le même sort.
Ow.
Ce n'était pas de la mako cette fois. Ça ne brûlait pas tout en étant glacé.
C'était.
Il ne savait pas comment le décrire autrement que douloureux.
"Voyons voir," murmura l'homme en blouse blanche, "qu'est-ce qu'elle pourra nous dire sur toi ? "
Setzer ouvrit la bouche pour vomir une nouvelle litanie d'insultes quand il sentit quelque chose lui enserrer le cerveau, lui coupant le souffle.
L'homme en blouse blanche fit le tour de la cuve d'Harumi, arrivant devant Setzer, toujours plaqué au sol sous les Remnants.
"Capitaine Gabbiani… je pense que nous pouvons trouver un accord…"
"Je... je fais pas... de pacte avec le diable ! " gronda Setzer malgré la douleur dans sa tête.
"Même si je vous propose de ramener Darril ? "
Setzer se figea. Il entendit Harumi siffler doucement, recroquevillé à l'autre bout de la cuve, Riku gémir dans les bras de Loz, sa propre respiration, saccadée.
"Q… quoi ? "
"Darril… Votre ami dans la cuve… l'enfant… Je vous laisserais partir tous les quatre. A une condition."
Hojo se pencha sur Setzer, ses lunettes parvenant à refléter un éclat de lumière dans la pénombre.
"Ramenez-moi une méga matéria."


Jessie afficha la dernière diapositive de sa présentation, une autre photo de Séphiroth, prise juste avant sa disparition cette fois.
Il avait tout juste dix-huit ans.
Prisonnier dans le laboratoire d'Hojo, Riku aurait eu trois ans.
"Et enfin… il y a Séphiroth."
"Qu'est-ce qu'en dit Riku ? "
"Apparemment, Séphiroth ne se mêle pas au reste des habitants de Sin. La grande majorité du temps, il est dans le laboratoire principal d'Hojo."
"Est-ce que Riku savait qu'il était son fils ? " demanda Vincent.
"Oui. Il le mentionne dans le carnet sur les Remnants. C'est pour ça que j'ai vérifié," expliqua Jessie. "Mais les Parasites ne savent pas."
"Pourquoi ? "
"Parce que le sport local dans Sin, c'est pas le blitzball, c'est l'assassinat. Les Remnants s'amusent à chasser les Parasites, et les Parasites s'y mettent à plusieurs pour buter un Remnant isolé. Ils ont eu plusieurs clones et infusés comme ça."
"Riku aurait été en danger s'ils avaient su qu'il était le fils de Séphiroth," conclut Vincent.
"Séphiroth est craint. Par tout le monde, Parasites comme Remnants et apparemment, même les Squames le fuient. Le seul à qui il obéit, c'est Hojo. C'est pour ça que les jumeaux ont leur petite réputation chez les Parasites."
"Les jumeaux ? Nos jumeaux ? " répéta Barret.
"Ce sont les seuls à avoir réussi à blesser Séphiroth a deux reprises. Quand Riku a quitté Sin, la rumeur chez les Parasites était que Séphiroth n'était pas remis de ses blessures du secteur 7."
"C'était quand ? "
"Fin mars, début avril. Lui et Gabbiani ont quitté Sin en même temps, il a aidé Riku à s'installer à Midgar et à s'inscrire à la MGU."
"En Avril ? Setzer a attaqué le réacteur en Mai, qu'est-ce qu'il a fait pendant un mois ? " s'étonna Shera.
"Guadosalam, " répondit Cid, "il a dit qu'il était allé voir Darril là-bas."
"Donc il était toujours blessé il y a six mois," nota Shera, "c'est étrange si Hojo peut les régénérer avec les cuves à mako… Riku a mentionné l'étendue de ses blessures ? "
"Quelque chose au sujet d'être coupé en deux," répondit Jessie d'un ton sarcastique.
"Ça doit prendre un moment de faire repousser des jambes," marmonna Barret.
Reeve soupira.
"Tu t'es mis au sarcasme ? "
"Je m'adapte," grommela le lieutenant d'Avalanche d'un ton fataliste.
Tout le monde avait l'air abattu. Ce qui était compréhensible, vu les nouvelles.
"Qu'est-ce qu'on fait ? " demanda Jessie d'une petite voix.
"Il va falloir transmettre tout ça à l'état-major de Shinra," déclara Reeve.
"Heidegger ? " répéta Barret, "il préféra y mettre le feu que faire quoique ce soit d'utile ! "
"Malheureusement, même si je suis officiellement de nouveau votre Directeur, je ne suis plus autorisé à prendre de décisions importantes concernant Avalanche," annonça Reeve d'un ton froid.
"Hein ? Mais je croyais que…" commença Yuffie.
"Pour calmer l'opinion publique, j'ai en effet repris les fonctions de Directeur d'Avalanche. Officieusement, je dois référer de tout à Heidegger."
"Rien n'a changé, alors," soupira Barret.
"Dans un esprit de transparence et de coopération, nous devons transmettre toutes les informations que nous recueillons sur Hojo, Sin et les Squames au Département de la Sécurité Publique," continua Reeve.
Il les regarda un à un, s'assurant qu'il avait été bien compris.
"Et comme je désapprouve poliment cette décision, qu'ils aillent se faire foutre."
Il fallut quelques secondes à ses hommes pour enregistrer la réplique, mais quand tous l'eurent saisie, Reeve fit un grand sourire de chat, croisant les mains sur les dossiers devant lui.
"Si cette mésaventure de dix jours m'a appris quelque chose, c'est que personne de haut placé à Midgar ne nous aidera quand nous en aurons besoin. L'opinion publique est quelque chose de puissant, mais Shinra fera des pieds et des mains pour garder le contrôle sur la ville. Nous avons besoin de plus. Plus d'alliés. Plus de soutien. Jessie ? "
"Oui, Chef ? " répondit la jeune femme, quasiment au garde à vous.
"Fais des copies de tout ça, une pour nous, une pour Heidegeer, qu'il se torche avec, une autre pour Squall, qu'il la transmette discrètement à son père. Yuffie, tu es amie avec la princesse d'Alexandria, n'est-ce pas ? "
"Garnet ? Oui, pourquoi ? "
"Une copie pour elle aussi, qu'elle les transmette à sa mère. Ah, et une pour ton père, tant qu'on y est. Qui d'autre ? "
"Les fondateurs de la MGU ont des contacts diplomatiques avec presque toutes les puissances mondiales," intervint Vincent.
"Une copie pour la MGU aussi. Qui d'autre pourrait être intéressé ? "
"Si on est sûr qu'ils n'iront pas baver auprès d'Heidegger, les Généraux des lignes de défenses adoreront avoir des renseignements sur Sin et ses points faibles," intervint Cid.
"Bon point, à vérifier avant de leur envoyer une copie."
"Mon père," suggéra Aérith, "Shinra ne lui filera surement pas ce genre d'infos, ça risquerait de l'aider dans son travail."
"Bien vu Aérith," répondit Reeve.
"Tu es sûr de toi, Reeve ? Shinra risque…" commença Barret.
"C'est justement parce que Shinra nous menace qu'on a besoin d'autres alliés. Il nous a dans le collimateur maintenant, si Heidegger ne s'était pas raté avec la bombe du mur, Avalanche serait toujours sous son contrôle direct. Yuffie ? "
"Oui, R... Chef ? " fit l'adolescente.
"Peut-être que tu devrais inviter tes amis à venir faire leurs devoirs à Seventh Heaven de temps en temps."
L'adolescente resta quelques secondes silencieuse avant qu'un grand sourire machiavélique ne fleurisse sur ses lèvres.
"Ça tombe bien, Garnet a promis de me filer des cours de soutien en commun."
"Parfait, préviens-nous juste quelques jours avant. Cid."
"Oui, Boss ? "
"Le Haut-Vent doit être prêt à partir en permanence, au cas où Shinra essaye encore de nous empêcher d'agir, quitte à être enfermé quelque part, autant que ce soit à un endroit de notre choix et avec plus de place qu'à Seventh Heaven."
"Bien reçu," répondit Cid avec un grand sourire.
Reeve se tourna à nouveau vers son assistante qui pianotait frénétiquement sur sa tablette.
"Jessie ? Dès que tu as fini les copies du dossier Riku Makani, tu te lances dans la recherche de TOUS les travers des autres départements. Je veux connaître le moindre détournement de fond, la moindre indiscrétion du Président, même la marque de croquettes de la bestiole du vice-président. Je veux pouvoir les faire chanter sopranos au moindre regard noir qu'ils me lancent."
"J'ai toujours les ressources d'urgence," proposa Jessie avec une lueur sadique dans le regard.
"Je pourrais y jeter un coup d'œil ? " demanda Vincent.
"Seulement si tu as plus de dix-huit ans," rétorqua la jeune hackeuse avec un sourire sarcastique.
"J'ai un multiple de dix-huit ans."


Quelques jours plus tard, Vincent amena sa copie du dossier Makani à Gast.
Ou pour être plus exact, il profita que son vieil ami le serrait dans ses bras pour lui glisser une clef USB dans la poche.
Depuis que Vincent était revenu dans le monde des vivants, Gast tenait à l'inviter à déjeuner au moins une fois par mois, et Aérith encourageait vivement Vincent à en profiter ne serait-ce que pour obliger son père à s'arrêter de travailler de temps en temps. Aussi se retrouvaient-t-ils souvent dans les petits restaurants du secteur 8, sur la Plaque, au pied de la Tour Shinra.
"Comment s'est passé l'assignation à résidence ? " demanda Gast une fois leur salut habituel échangé.
"Mieux que pour les Turks," répondit Vincent en s'asseyant à la table, vérifiant presque par réflexe l'absence de micro.
Le vieux professeur eut un petit rire en s'asseyant à son tour, retirant ses lunettes pour se frotter les yeux.
Il avait l'air... plus vieux que quelques semaines auparavant.
Plus fatigué.
"Tout va bien, Gast ? " s'inquiéta Vincent.
Le vieil homme soupira avant de remettre ses lunettes.
"Aussi bien qu'on peut à mon âge…"
"Que se passe-t-il ? "
Le professeur secoua la tête.
"Rien, rien, je commence juste à réaliser que… je ne suis plus aussi fringant qu'avant. Quand je suis dans mon laboratoire, ça va, mais dès que j'en sors… j'ai du mal à dire ce sur quoi je travaille."
"C'est peut-être la fatigue. Tu dors bien ? "
"Et toi ? Tu dors tout court ? " rétorqua Gast avec un petit regard par-dessus ses lunettes.
Vincent laissa échapper un petit soupir amusé.
"Aérith est allée baver, je vois."
"Je suis toujours ton médecin, au cas où," rétorqua Gast.
"Je vais bien."
"Tu vas mieux qu'en février mais ce n'est pas un exploit," corrigea son ami en ouvrant le menu, "surtout avec toutes les fois où tu finis à l'infirmerie."
"Aérith exagère…"
"Je t'ai vu après l'incident avec Esthar," lui rappela Gast avec un petit regard désapprobateur.
Vincent leva les yeux du menu entre ses mains. Il ne se souvenait pas avoir vu Gast après...
Il n'avait pas de souvenir de l'attaque de l'ambassade, ni de son retour d'ailleurs. Il savait qu'il avait été là quand les hommes d'Adel avaient tenté de capturer Squall mais une fois Yuffie et lui à l'abri…
Il ne se rappelait rien.
Juste d'ouvrir les yeux le lendemain.
Yuffie lui avait parlé, Cid lui avait parlé, mais il ne pouvait pas se souvenir de ce qu'ils lui avaient dit.
"Tu sais… Le manque de sommeil, les crises de panique, les reviviscences… Ce sont des symptômes de stress post-traumatique…"
"Je sais. Cid… le Capitaine Highwind m'en a parlé."
Cette fois, le regard de Gast sembla étonné, puis soulagé.
"Et ? "
"Il... m'a proposé de parler à quelqu'un…"
"Et tu vas accepter ? "
"Ce n'est pas simple…" commença Vincent.
"Et en quoi ce n'est pas simple de parler à quelqu'un ? "
"J'étais Turk," lui rappela Vincent, "c'était fortement déconseillé de se confier."
"Et les psychologues Shinra ? "
Le regard dubitatif de Vincent fit ricaner le vieux scientifique. Oui, il était bien placé pour avoir la même opinion sur leur employeur officiel.
Ils interrompirent leur conversation quand la serveuse approcha, posant une carafe d'eau et une bouteille de vin sur leur table. Elle prit leurs commandes et récupéra les menus avant de repartir, jetant un regard langoureux à Vincent.
"Ça, ça n'a pas changé," nota Gast avec une lueur taquine dans les yeux.
"Le charme Valentine," rétorqua Vincent.
"Et de ce que j'entends d'Aérith, tu n'en profites pas beaucoup."
"Aérith devrait se mêler de son propre couple," rétorqua Vincent en se redressant.
"Tu es jeune Vincent, profites un peu de la vie avant de devenir un vieux gâteux comme moi."
"Tu n'as que six ans de plus que moi."
"Tu sais très bien ce que je veux dire. Le Docteur Highwind est une jolie fille, non ? "
"Outre le fait que j'ai presque deux fois son âge : son frère est un dragon."
Le professeur eut un petit rire en admettant que l'argument était recevable. Il avait eu de la chance qu'Ifalna soit fille unique, surtout avec leur différence d'âge qui avait fait jaser à la naissance de leur fille.
"Et puis, les relations avec une scientifique, j'ai déjà donné…" marmonna Vincent en détournant le regard.
Gast, qui remplissait leurs verres de vin, arrêta son geste, dévisageant le jeune homme devant lui. Il avait eu des doutes à l'époque mais ça confirmait ce qu'il avait cru deviner.
"Je m'en doutais. Lucrecia et toi…"
"Tu le savais ? " s'étonna Vincent.
"Oh, pour commencer, nous avons été prévenus par ton chef que tu avais tendance à apprécier les belles femmes et qu'il ne fallait pas te laisser seul avec elle…"
Vincent roula des yeux. Il aurait dû se douter que Trigger aurait dit quelques mots à Gast concernant ses… habitudes de l'époque. Surtout dès qu'une belle femme était dans les environs. Il se demanda s'il avait aussi prévenu Hojo et Lucrecia.
"Et je me doutais de quelque chose," expliqua Gast, "ton regard s'illuminait quand Lucrecia entrait dans une pièce. "
"Je pensais être plus discret," avoua Vincent.
"Je ne suis peut-être pas très observateur, mais je te rappelle que nous étions à Nibelheim et qu'il n'avait rien d'autre à faire…"
"A part cette foutue expérience."
Il y avait eu l'expérience, en effet, les découvertes fantastiques qui s'enchaînaient, à un rythme trop effréné pour qu'ils prennent le temps de réfléchir sur ses implications. Hojo et Lucrecia avaient été tellement enthousiastes, qu'il s'y était laissé prendre aussi.
Et ce n'était que quelques années plus tard, en voyant Séphiroth revenir d'une évaluation d'Hojo avec une lueur mako dans les yeux, qu'il avait réalisé à quel point il avait eu tort.
Séphiroth avait six ans à l'époque.
Il avait tenté de tout arrêter, mais le projet SOLDAT venait de commencer, le Président planifiait déjà un jeu d'échec militaire avec les autres pays. Le projet Jenova avait été clôturé, les recherches mises sous scellées. Le but de la société Shinra n'était plus l'exploitation de la Terre Promise, mais la domination mondiale.
Il avait essayé d'enrayer le processus, de demander la garde de Séphiroth, mais elle avait été refusée. Hojo était son père, Shinra avait le brevet sur Séphiroth (et c'était peut-être ça qui l'avait terrifié le plus, le fait qu'un brevet sur un être vivant avait été déposé) et on lui avait bien fait comprendre qu'il n'avait aucun intérêt à rendre les choses publique.
Au final, il avait démissionné, espérant, par cet acte, faire prendre conscience de la gravité des choses au Président.
Quelques jours après, il avait échappé à une tentative d'assassinat. Le Turk qui l'avait sauvé l'avait quasiment jeté dans un aéronef de fret en direction de Canyon Cosmo, avec une fausse identité et assez d'argent pour survivre un an, ainsi que l'ordre de ne jamais revenir à Midgar.
Il ne l'avait jamais revu.
Quelques années plus tard, alors qu'il était à Icicle, Aérith sur les genoux, il avait vu reconnu sa photo dans le journal.
Quand le Directeur Morrow avait trahi Shinra en dévoilant les crimes d'Hojo.
Il avait questionné tous les événements depuis Nibelheim après ça.
La mort de Vincent.
Celle de Lucrecia.
Les expériences d'Hojo.
Quand Sin et Hojo avaient refait surface, il avait d'abord voulu s'enfuir avec Ifalna et Aérith, aller encore plus au Nord, plus au froid, loin de Shinra.
Mais c'était Ifalna qui l'en avait dissuadé.
C'est elle qui l'avait convaincu de réparer ses erreurs, de retourner à Midgar et laisser Aérith rejoindre Avalanche.
Et une nuit, après un cauchemar particulièrement horrible, elle lui avait tendu un plan griffonné du Manoir, des indications sur comment parvenir au lieu marqué d'une croix et lui avait demandé d'aller aider Vincent.
Pour être honnête, jusqu'au moment où il avait ouvert le cercueil, il avait pensé qu'elle voulait juste qu'il aide son âme à retrouver la paix et retourner à la Rivière.
Huit mois plus tard, Vincent était toujours là, devant lui, comme si à peine un an avait passé depuis sa mort, la seule différence étant la longueur de ses cheveux, les cicatrices horribles sur son corps et cette lueur mako dans le regard.
Leur repas arriva. La serveuse allait mériter un très bon pourboire, son service était impeccable, même si Gast soupçonnait que c'était probablement dû à la présence de Vincent, vu comment elle battait des cils chaque fois qu'elle baissait les yeux sur lui. Il attendit qu'elle soit repartie avant de reprendre.
"Lucrecia et toi…" répéta Gast, "je ne l'aurais jamais parié."
"Trop bien pour moi ? " taquina Vincent en prenant ses couverts.
"Non, non, vous auriez fait un joli petit couple, aussi beau l'un que l'autre," répondit Gast sur le même ton, "non, c'est juste… elle n'en a jamais rien montré."
"Elle… n'était pas très démonstrative. Et ça n'a pas duré."
"Qu'est-ce qu'il s'est passé ? " demanda doucement le vieil homme.
Son ami détourna le regard, se plongeant dans la contemplation de son assiette. La cuisine moderne le désarçonnait parfois un peu, aussi Gast choisissait soigneusement les restaurants où il l'emmenait pour une cuisine plus traditionnelle.
"Je ne voulais pas … qu'elle se porte volontaire pour la phase de renaissance… nous nous sommes disputés et…"
Gast grimaça légèrement. Trente ans après, il se demandait encore pourquoi il avait accepté cette suggestion d'Hojo et Lucrecia. Et pourquoi il n'avait pas écouté Vincent quand celui-ci avait protesté à cette idée.
"Je ne sais pas trop," finit par admettre Vincent. " Mais quelques jours plus tard, c'était fini."
"Tu l'aimais ? "
"Je crois. Je… le pensais à l'époque. Maintenant, je ne sais pas."
Si Vincent avait été moins têtu, ou Gast plus convaincant, il serait toujours à l'hôpital. Loin de l'agitation de Midgar, loin des squames, avec les meilleurs médecins et psychologues que Gast pourrait trouver et supplier d'aider son ami. Les jumeaux étaient pareils, cherchant de l'action alors qu'ils auraient dû être au repos aussi. Aérith n'essayait plus de les convaincre de se reposer et il ne comprenait pas pourquoi elle se contentait de les ramasser et les remettre sur pieds plutôt que les arrêter.
Elle avait probablement réalisé avant lui qu'elle ne pourrait pas.
La seule chose qu'il pouvait, c'était peut-être convaincre Vincent de recommencer à vivre plutôt que de se forcer à survivre.
"Peut-être que tu devrais recommencer à avoir des habitudes déplorables avec les demoiselles, non ? "
"Habitudes déplorables ? " répéta Vincent d'un ton incrédule, "c'est comme ça que mon chef le présentait ? "
Gast ricana. Il paraphrasait un peu, c'est vrai.
"Les demoiselles en question ne s'en sont jamais plaintes," déclara le brun.
Les jeunes hommes non plus, d'ailleurs, mais Vincent n'était pas sûr de la façon dont Gast prendrait cette révélation-là.
"Donc, le Docteur Highwind…" reprit Gast.
"Je suis trop vieux pour Shera."
"Ce n'est pas moi que ça choquera, Vincent, Ifalna et moi avons vingt ans de différence d'âge."
L'expression scandalisée de Vincent était parfaitement imitée.
Sauf pour le petit haussement de sourcil sarcastique.
Parfois, il revoyait son vieil ami, au détour d'une réplique, dans un froncement de sourcil agacé, dans son demi-sourire amusé. Et il espérait qu'il n'aurait plus à guetter ces moments un jour.
"Il faudra que je la rencontre, ne serait-ce que pour la remercier de m'habiller décemment"
"Ce n'est pas encore le bon moment."
"Ça fait des mois que tu dis ça et j'ai l'impression que tu me caches quelque chose."
"Rassure-toi, ce n'est pas qu'une impression," marmonna Gast.
"Gast…"
Le vieil homme secoua la tête d'un air fatigué.
"Je te jure que c'est… Je te promets que c'est pour ton bien. Ifalna pense que… que tu n'es pas prêt à la rencontrer."
"Pourquoi ? "
Gast chercha ses mots soigneusement. Vincent était un Turk. Avait été un Turk. Il savait deviner les vérités qu'on lui cachait et… Même si Ifalna avait ses raisons, et de bonnes raisons, de ne pas vouloir rencontrer Vincent maintenant...
"Parce que tu devrais parler à un professionnel d'abord."
Vincent fronça les sourcils, intrigué.
"Ta femme pense que la voir… serait néfaste pour mon mental ? " résuma Vincent.
"Oui."
Vincent posa ses couverts doucement, jetant un regard calculateur à son vieil ami.
"Gast. Qui as-tu épousé ? "
"La question devrait plutôt être : qu'est-ce que j'ai épousé," rétorqua Gast avant de refermer vivement la bouche, mortifié.
Il jeta un regard paniqué à Vincent mais celui-ci se contentait de le regarder, les yeux plus écarquillés qu'il ne l'avait jamais vu. Une lueur de compréhension traversa le regard de son ami et celui-ci hocha brièvement la tête, retournant à son repas.
"Compris. Je ne poserais plus de question sur elle."
"Qu'est-ce que tu as compris ? "
"Qu'il y a des choses dont elle et moi n'avons pas le droit de parler," répondit Vincent, "des histoires de familles."
Cette fois, ce fut Gast qui dévisagea Vincent, longuement. Son regard glissa sur son bras gauche, celui qui était devenu monstrueux et avec lequel Vincent était pourtant étrangement à l'aise.
"Oh."
"On en reparlera ? " suggéra Vincent.
"Dès qu'elle donnera son feu vert."
"J'amènerais une bouteille."
"Vincent..."
"Je la paierais, promis."


[1] De qui croyez-vous que Yuffie le tienne ?