Chapitre 36 : Colère parentale
Résumé :
Retourner à Gongaga en hiver devrait être un plaisir. Il y fait chaud, la nature y est encore luxuriante (sauf à Gongaga Village, catastrophe écologique oblige) et un certain ex-Turk y a encore de la famille.
Sauf qu'il n'a pas donné de nouvelle en plus de trente ans…
Et il a au moins deux unités parentales à Gongaga qui vont éprouver le besoin de le lui reprocher...
Personnages :
Team Avalanche, team Haut Vent, Maduin
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Vincent à trois papas, euh, non, deux papas et deux mamans. Non. Deux papas, une maman et Maduin, ( pour ceux qui comptent, dans l'ordre, son père biologique, Trigger, sa mère biologique et Maduin), le père de Vincent est en gros Indiana Jones version Ancien, Vincent à 58 ans mais il n'échappera pas à la fessée, rencontre avec la belle-famille prise 2, cette fois c'est Cid qui s'y colle !
Le voyage jusqu'à Gongaga fut long, surtout pour Yuffie et Cloud, qui furent tous les deux malades et envahirent l'infirmerie chacun leur tour. Heureusement, les deux apprentis, désignés maître-queux du navire, avaient refait le stock de thé au gingembre.
Et cette fois, Vincent avait prévu de la lecture.
Il fallut s'organiser pour l'organisation des cabines, mais avec les quarts de service de l'équipage et en partageant, tout le monde put entrer.
Les jumeaux furent d'office envoyés dans la cabine de Darril et Setzer, et vite rejoints par Aérith et Red. L'une dans le lit, l'autre dessous, une fois certain que la structure serait suffisamment résistante pour deux augmentés et une guérisseuse. Shera accueilli Yuffie dans la sienne avec l'aide d'un matelas gonflable, pendant que Luca proposait généreusement la sienne à Vincent et Barret, préférant passer le voyage en compagnie de son petit ami. Cid avait bien proposé à Vincent de partager sa cabine, mais un regard à Shera, qui les surveillait d'un air sévère, dissuada Vincent de tenter le coup.
Trois jours à bord du Haut Vent avec Shera sur le dos allait être compliqué à gérer. Il espérait que Gippal détournerait son attention à un moment ou un autre.
Le trajet fut aussi plus détendu qu'avec les SOLDATs, l'équipage du Haut Vent était déjà plus familier avec Avalanche et se mêlait plus volontiers à eux pendant leurs quarts de pause.
Et surtout, sans personne à devoir secourir à l'arrivée, le voyage fut moins stressant. Vincent était d'ailleurs en train de lire dans le poste de pilotage, assis près des verrières, quand ils arrivèrent en vue du Cap de l'Espoir.
-Ici Balthier, on arrive au Cap. Quelqu'un sait où on peut atterrir dans le coin ?-
"Si ça n'a pas changé, il y a une esplanade encore pavée après ce bâtiment," indiqua Vincent en se levant, désignant une espèce de pyramide.
Balthier manœuvra prudemment pour approcher du point de repère que désignait Vincent. Ils furent vite rejoints dans le poste de pilotage par Zack qui vint coller son nez à la verrière, observant les ruines.
"Ça n'a pas changé," murmura Vincent.
"Je suis jamais venu," admit Zack, "on a pris la Caravane au printemps, alors qu'ils quittaient le Cap…"
Les ruines avaient déjà été abandonnées quand Maduin avait y installé son clan, plusieurs siècles auparavant et se situaient non loin de la mer, à moitié envahie par la végétation de la jungle. Certaines avaient été réinvesties et réparées, surtout pour accueillir les enfants plus jeunes, mais d'autres avaient été laissées à l'abandon. La Caravane n'était pas assez grande pour avoir besoin d'une ville entière, après tout, même quand tous les maduins étaient rassemblés pour l'hiver.
Les champs n'avaient pas été entretenus depuis des années, mais ils étaient encore délimités, malgré leur état d'abandon, et même les arbres fruitiers centenaires étaient encore là, bien que leur verger soit envahi de l'habituelle végétation luxuriante de Gongaga.
Vincent avait grimpé certains d'entre eux, pour se gaver de dattes.
S'ils avaient le temps, il apprendrait à Yuffie l'escalade de palmiers. Elle adorerait.
Cid arriva à son tour, visiblement tout juste réveillé de son quart de repos. Il enfilait sa veste, les cheveux en bataille, ses lunettes autour du poignet pendant qu'il achevait de se réveiller. Il approcha de Balthier, jetant un regard aux contrôles avant d'hocher la tête et lui mettre une tape approbatrice sur l'épaule.
"Bien. Bonne méthode, Balth. Vous voyez quelque chose de suspect tous les deux ? "
"Rien," répondit Zack.
"Ok, attends avant d'atterrir Balth," déclara Cid en prenant le micro autour du cou du jeune homme, -Fran, prend ton arc et va sur le pont extérieur avec Vincent, sécurisez l'atterrissage.-
Vincent hocha la tête, allant chercher son arme avant de rejoindre Fran à leur poste.
Il faisait chaud dehors.
Enfin, comparativement à Midgar, en tout cas.
Vincent se débarrassa de sa veste avant de sortir mais Fran s'était déjà changée, reprenant ses habits d'été avec plaisir.
"Enfin, un coin chaud," déclara-t-elle succinctement.
Vincent ne pouvait s'empêcher d'être d'accord.
En revanche, Aérith et Cid protestèrent, une fois le Haut Vent amarré et toute l'équipe de combat au sol.
"Oh, Rivière," gémit Aérith en tendant son sceptre à Zack pour retirer ses couches en trop.
"Je vais mourir," grommela Cid en se débarrassant de sa veste, nouant son pull autour de sa taille.
"Je t'avais prévenu," rétorqua Vincent en le regardant se déshabiller sous les sifflets enthousiastes d'Edgar et Fran.
Avec ses différentes couches de pull, de blouson et autres atours servant à tenir chaud, l'uniforme d'hiver d'Avalanche était trop chaud pour le climat tropical de Gongaga et une fois que tout le monde se fut séparé des épaisseurs en trop, l'exploration des ruines put commencer.
"C'est beau," déclara Cloud.
"C'est encore mieux avec les Maduins dedans," objecta Vincent.
"T'y a vécu longtemps ? " demanda Zack, à la surprise des autres membres d'Avalanche.
"Un peu moins d'un an, mais j'y revenais de temps en temps..."
"T'es maduin ? " s'étonna Barret.
"De manière purement accidentelle," assura Vincent avec un micro sourire.
S'il y avait bien une personne à Avalanche que Barret n'aurait jamais soupçonné d'être un Vagabond, c'était bien leur Turk. Les maduins étaient de paisibles nomades (tant qu'on ne les cherchaient pas), qui faisaient de leur mieux pour ne pas se mêler des affaires des autres clans (à moins que le bien être d'un enfant soit compromis) et étaient généralement respectés à Centra (sauf pour leur sens des propriétés plutôt élastique) … Réflexion faite, si, Vincent était un maduin.
Nanaki, qui s'était éloigné de quelques pas, le nez au vent, revint vers Barret au petit trot.
"Ça sent le squame par-là," indiqua le fauve.
"Ok, on te suit. Aérith, Yuffie, vous restez au centre, Zack, Cloud à l'avant de chaque côté, Cid et moi en arrière, Vincent, tu nous couvres de plus loin."
Les traces étaient évidentes. Les squames n'avaient visiblement pas pris la peine d'être discrets ou de les effacer. Les jumeaux trouvèrent les premiers les empreintes de pas humains dans la terre des chemins.
"Remnants ? " suggéra Barret.
"Ça ou des Bienheureux," répondit Zack en se relevant.
"Ça fait trop longtemps", intervint Nanaki en secouant la tête, "je n'arrive pas à différencier les odeurs."
"Par où allaient-t-ils ? " demanda Barret.
Les jumeaux suivirent les traces du regard avant que Cloud ne montre la pyramide qu'ils avaient survolés à l'atterrissage.
"Là-bas."
"Vincent ! Qu'est-ce qu'il y a là-dedans ? " interpella Barret.
Le sniper approcha, épaulant son arme et observa la pyramide, les sourcils froncés.
"Je… ne suis pas sûr. Je crois que je n'y suis jamais entré. Ça devait être interdit."
"C'est pas bon signe," intervint Yuffie.
"Bon, allons-y," soupira Barret.
L'entrée était à quelques mètres au-dessus du sol, mais les escaliers de pierre y menant étaient encore relativement en bon état, et à part Nanaki qui grommela de devoir escalader des marches, ils furent tous rapidement devant la porte, contemplant les débris qui s'amoncelaient sous leurs pas.
"Ah, ça avait été muré," se souvint Vincent en ramassant un morceau.
Il y avait eu une fresque dessus, un dessin fait par les maduins pour interdire l'entrée, mais le mur avait été détruit récemment. Il reposa le débris avec un soupir et se releva.
"On change de formation," annonça Barret. "Vincent et les jumeaux en avant en éclaireurs, vérifiez qu'il n'y a personne."
"Oui, Lieutenant," répondit Vincent en passant la porte, les jumeaux sur les talons.
Leur vision s'adapta immédiatement aux ténèbres de la pyramide.
La première pièce était assez grande, tapissée de fresques et les empreintes des squames se découpaient nettement dans la poussière du sol.
"C'est quoi comme bâtiment ? " demanda Zack.
"Ça ressemble à un temple," répondit Vincent.
"Comment tu sais ? "
"Pas de partie commune. Ce n'était pas un lieu d'habitation."
Vincent leva les yeux et désigna le plafond de l'index avant de porter deux doigts à son cœur, puis vers le sol.
"Et il y a Minerva."
Les jumeaux l'imitèrent, apercevant les fresques du plafond.
Plusieurs femmes oiseaux étaient peintes en hauteur, mais l'une d'elle était plus grande que les autres, et d'apparence entièrement humaine, les mains jointes devant elle en signe de prière, ses multiples ailes étendues sur le plafond, alors que les autres étaient mi-femme, mi-oiseau, dotées de serres impressionnantes en guise de mains et de pieds, leur ailes et cheveux de différentes teintes de verts.
"Garuda," indiqua Vincent avant de reprendre son chemin, "ce devait être un temple de son clan."
La pièce suivante était un long corridor, le plafond orné de profondes gravures imitant un ciel étoilé, mais un corps humain s'y trouvait toujours, étendu au début du couloir, percé de nombreux trous et, malheureusement pour le nez des trois augmentés, puant comme le cadavre qu'il était.
"Oh, qu'est-ce qui s'est passé ? "
Cloud fit un pas en avant.
Et se retrouva un mètre plus haut, suspendu par la ceinture à la main de Vincent.
"Vincent ? ! "
Le sniper le tendit à son frère sans un mot puis s'accroupit, tendit le bras au maximum et appuya sur la large dalle poussiéreuse en travers du chemin.
Des pics de métal sortirent du plafond, empalant de nouveau le cadavre du bienheureux dans un bruit de chair déchirée répugnante. Puis, après quelques secondes immobiles, les pics commencèrent à reculer avec un bruit de mécanique se remontant. Les jumeaux clignèrent des yeux lentement avant de se tourner vers Vincent.
"Comment tu as su ? " demanda Cloud.
Vincent désigna la dalle sur laquelle il avait appuyé. A part la trace de sa main, il n'y avait qu'une seule ligne d'empreintes, les autres squames étaient restés à l'entrée et ne l'avaient pas passée.
"Selon mon père, tous les temples abandonnés sont piégés."
"Et comment il sait ça ? " ajouta Zack.
"Parce que c'est un passe-temps de sa part de les visiter et d'entretenir les pièges."
"Ton père est bizarre," déclarèrent les jumeaux d'une même voix.
"Je ne serais pas surpris qu'il soit passé par ici un jour," ajouta Vincent en approchant d'un des trous.
Il cogna doucement sur les murs de la main, jusqu'à entendre un son creux. Glissant ses doigts dans l'interstice, il tenta de faire sauter la pierre scellée, mais dû laisser Zack s'en charger de la pointe de l'épée, dévoilant un trou dans le mur. Vincent parvint à y glisser le bras et tira sur quelque chose.
Après avoir vérifié que la dalle ne déclenchait plus le piège, ils purent avancer de nouveau.
"Comment ont-ils fait pour passer ? " s'étonna Zack quand ils arrivèrent en bout de couloir.
Vincent haussa les épaules, mais quand ils arrivèrent dans la pièce du fond, ils tombèrent nez à nez avec un grand trou dans le mur du côté. En se penchant, ils purent sentir un courant d'air venant de l'extérieur.
"Ils y sont allés à la magie, visiblement," soupira Vincent.
Et à voir les parois à moitié fondue, avec fournaise probablement. Il ne pouvait qu'y avoir eu un Remnant dans l'expédition pour utiliser un sort aussi puissant et suffisamment longtemps pour creuser le mur plein du bâtiment.
La pièce était vide, mais donnait sur un escalier qui descendait encore plus profond dans le sol de la pyramide.
Mais quand ils arrivèrent, ce fut sur une grande pièce, vide elle aussi.
Ou presque.
Un tas de pierres se trouvait au fond de la pièce et quand Vincent s'en approcha, il réalisa qu'il s'agissait d'un coffre réduit en morceaux par un coup violent. Une tache de sang avait séché juste devant et Vincent s'accroupit, effleurant la dalle. Des piques de métal, longues comme sa main, étaient dispersées à ce niveau.
"Un autre piège, le coffre devait lancer des piques."
"Je crois que ceux qui ont fait ces pièges ont sous-estimé les squames," déclara Zack.
"Ils ne pouvaient pas prévoir des augmentés aux pouvoirs de sorcières et presque increvables," nota Vincent en se relevant. "allons chercher les autres."
Quand tout le monde fut rassemblé dans la pièce et des éclairages de secours allumées par ceux qui ne voyaient pas dans le noir, Vincent et les jumeaux purent admirer les fresques qui avaient été à moitiés cachées par l'obscurité. Comme celle de l'entrée, elles représentaient Minerva, des Garudas, mais aussi des textes dans une langue que même Vincent ne pouvait lire.
"C'est tout ? " demanda Barret une fois qu'il eut exploré la pièce.
"Ils ont dû prendre ce que ce coffre contenait," suggéra Vincent.
"Et on n'a pas le moindre indice à ce sujet ? "
Vincent secoua la tête, mais Yuffie et Cid, qui s'étaient penchés sur le tas de gravats, commencèrent à le fouiller, classant les morceaux.
"Une matéria ? " suggéra Cid en assemblant quelques pièces, dévoilant un socle creusé d'une forme ronde.
"Une grosse alors, de la taille d'une méga matéria," indiqua Yuffie en posant son poing entier dans le creux.
"Qu'est-ce que ça pourrait être ? " demanda Barret.
Vincent et les jumeaux ne l'écoutaient pas.
Ils avaient tous les trois le nez levé vers le plafond.
Un rapide regard à Nanaki lui apprit que le fauve faisait pareil, ses oreilles s'orientant dans une direction.
"Quelqu'un vient," finit par dire Cloud.
"Tout le monde vers les murs, préparez-vous," ordonna Barret en reculant vers Aérith pour la protéger.
Cid se leva, attrapant Yuffie à bras le corps et s'éloigna, suivit par Vincent qui sortait son arme.
Quelqu'un commença à descendre les marches menant en bas.
Barret vit d'abord des longs pieds, d'une taille peu commune, la peau aussi brune que la sienne.
Puis ce furent les vêtements, de longs voiles qui voletaient légèrement à chaque geste de leur propriétaire, faits de fragments cousus et raccommodés, de multiples jupes, kilts et sarong noués autour de ses hanches.
Aérith vit une main pâle, et qui tenait gracieusement une poignée de vêtements, relevant le bas pour ne pas marcher dessus.
L'autre main apparut à son tour et Cid la vit saisir le bord de l'entrée, ses longs doigts métalliques se repliant avec des gestes saccadés.
Et enfin, des épaules larges, une tête voilée et deux hautes cornes gracieuses qui obligèrent la personne qui arrivait à se pencher pour pouvoir entrer.
Il se redressa.
Puis elle les regarda de son paisible regard vert, ses yeux étincelants entre les fentes de ses voiles.
Les iris bruns se plissèrent sur un sourire.
"Ah," fit la créature d'une voix calme, "vous voilà."
"Maduin ! " s'exclama Zack en laissant tomber son épée, sautant par-dessus pour courir à la rencontre de la haute silhouette.
La créature ouvrit les bras, laissant Zack la percuter sans même fléchir sous le choc.
"Zack, mon petit… Mon petit plus si petit," ajouta l'Ancien en l'enlaçant, posant sa joue sur son torse. "Est-ce que les coups de pieds aux fesses ont fini par te faire pousser ? "
"Ça et la soupe de Maman, Maduin ! Tu m'as manqué," marmonna Zack en fourrant son nez contre les cheveux blonds de l'Ancien.
Cloud avait approché avec plus de retenue, prenant le temps de poser son épée et celle de Zack hors du chemin avant de venir enlacer l'Ancien lui aussi. La main pâle de Maduin se posa dans ses cheveux, les ébouriffant avant de l'attirer à son tour contre lui.
"Bonjour, Petit Nuage."
"Ouais, je sais, j'étais trop sage, j'ai pas eu assez de coups de pieds aux fesses pour me faire grandir," murmura Cloud en passant ses bras autour de la taille de l'Ancien.
"Je suis désolé de la disparition de Sky. Le ciel est moins bleu par son absence," murmura Maduin à l'oreille des jumeaux.
"Makoto, c'est qui ? " demanda Yuffie en tirant sur la manche de Vincent.
"Maduin. L'Ancien de la famille," répondit Vincent.
Il se redressa en sentant soudain le regard de Maduin sur lui.
Disparut les yeux changeants, cette fois, le regard de l'Ancien était devenu deux orbes dorés sans iris, ni pupille.
Il fit un pas en arrière, par réflexe, quand la créature repoussa très délicatement les jumeaux de gestes mesurés, ses griffes s'allongeant sur ses mains et ses pieds, les mèches s'échappant de ses voiles se teintant de mauve. Maduin dépassait maintenant les jumeaux, ses longues cornes ajoutant encore à sa taille démesurée.
Maduin était suffisamment furieux pour en reprendre sa véritable apparence.
La seule fois où Vincent l'avait vu ainsi, c'était quand Chaos avait tenté de le ramener après sa fugue de Daguerreo et avait attaqué la Caravane pour le récupérer.
La correction que lui avait mis Maduin avait fait trembler le ciel et la terre et tous les feux de camp de la Caravane. Chaos était reparti sans demander son reste et Maduin avait reçu une lettre de leur père par la suite, présentant ses excuses pour l'attitude de son aîné et lui demandant de mettre un peu de plomb dans la cervelle du benjamin.
"Makoto Hamasaki de Daguerreo," gronda une voix plus froide que toutes les tempêtes de Nibelheim.
Cid attrapa par réflexe Yuffie par le coude et commença à s'éloigner, faisant signe à Vincent de le suivre, mais le sniper ne s'exécuta pas, rangeant son arme et restant dos au mur.
"Bonjour Maduin, je peux…." commença Vincent.
"Bonjour ? " rétorqua la créature en fendant le groupe pour approcher de Vincent d'un pas déterminé, "BONJOUR ? ! Trente ans à passer pour mort et non seulement tu ne me préviens pas mais tout ce que tu trouves à dire c'est : Bonjour ? ! "
"Maduin…" commença Vincent en levant les mains en signe de paix.
"Je crois que Makoto se fait enguirlander," balbutia Yuffie, les yeux écarquillés.
"Tu crois, seulement ? " rétorqua Zack qui observait la scène en ricanant, pendant que Cloud grimaçait.
L'Ancien agitait les mains devant Vincent, prenant autant le ciel que la terre à partie, invoquant les noms de Minerva et de multiples autres anciens, dans un mélange de gongan, maduin, commun et wutan que même Vincent semblait avoir du mal à suivre.
"Maduin, décides toi pour une langue…"
"Il n'y a pas assez de langues sur Gaïa pour te faire comprendre à quel point ce genre d'attitude est… je pensais t'avoir appris ce qu'était la Famille, jeune homme ! Et attends un peu que ton Père découvre que tu es en vie ! Tu réalises… Est-ce que tu réalises que c'est moi qui lui ai appris ta disparition ? ! "
"Je suis désolé…"
"J'espère bien que tu l'es ! A quoi pensais-tu ? ! "
"Je… je ne pensais pas," admit Vincent, "je me suis réveillé il y a moins d'un an, ma mémoire n'est pas… J'avais oublié Déa, Maduin, je ne me suis souvenue d'elle qu'en la retrouvant par hasard…"
"Est-ce qu'on doit intervenir ? " s'inquiéta Barret.
"Surtout pas ! " s'exclama Cloud.
L'Ancien tendit la main pour la poser derrière le crâne de Vincent.
La main de démon de Vincent se referma sur son poignet, stoppant net son geste avant que les doigts griffus aient pu toucher sa tête.
"Makoto ? "
"Je… Pas là, Maduin. Je... réagit violemment… quand on me touche..."
Il hésita quelques secondes avant de poser la grande main sur son épaule et Maduin le fixa de son regard d'or pur avant de serrer très délicatement sa main et d'attirer Vincent contre son torse.
La tête de l'Ancien ne lui arrivait plus qu'à l'épaule, l'obligeant à lâcher l'épaule de Makoto pour nouer ses bras autour de sa taille. Maduin ferma ses yeux noir et bridé, posant sa joue sur le torse de son fils adoptif.
"Tu vas devoir m'expliquer ce qui s'est passé, Makoto."
"Oui. Mais pas maintenant. Pas maintenant, s'il te plait."
L'Ancien se redressa, maintenant de haute taille et aux longs cheveux noir et Yuffie vit Makoto grimacer fugacement avant de détourner le regard de celui de Maduin, aussi rouge que le sien.
"Et si vous me disiez maintenant ce que vous faites ici ? " reprit l'Ancien en se tournant vers le reste d'Avalanche, sa peau ondulant sous leurs regards, changeant de couleur ou de forme selon ceux qui croisaient son regard.
"Je pourrais te poser la même question," rétorqua le sniper, "je vous croyais à Canyon Cosmo…"
"Pour que la Vieille Flamme essaye encore de me convaincre d'établir mon clan à Cosmo ? " rétorqua Maduin en croisant les bras, "il en rêve depuis des siècles. Non, nous campons dans la Forêt Ancienne."
"Les monstres là-bas…"
"Je suis pire," rétorqua Maduin en ajustant un de ses voiles d'un geste élégant. "Edéa m'a dit que vous alliez au Cap de l'Espoir, je suis venu le plus vite possible."
"Ça aurait pu être dangereux s'il restait des squ…"
Vincent tressauta quand les yeux de Maduin redevinrent des globes dorés et il décida sagement d'arrêter de parler.
"Il faut que j'apprenne à faire ça," marmonna Barret.
"Des siècles d'expérience et un bon millier d'enfants élevés," déclara Maduin sans détourner son regard de Vincent, "même si je dois avouer qu'il a été un des plus difficiles."
Ce devait être sa punition, décida Vincent. Il n'était pas sûr pour laquelle de ses erreurs exactement, mais c'était sa punition.
"Tu as entendu parler d'Hojo ? " finit-t-il par demander.
Maduin eut un reniflement méprisant et fort peu digne d'une créature ancienne et surpuissante.
"L'espèce de mégalomane qui a rendu la moitié de mes enfants orphelins de leurs parents de sang, ravage Gaïa avec ses créatures génétiquement modifiées et sème la terreur sur la planète entière ? "
"Lui-même."
"Je n'ai jamais eu le plaisir de pouvoir mettre mes griffes sur lui."
Cid se serait attendu à un peu plus de décorum de la part d'un Ancien, mais contrairement à Fenrir et Bahamut, Maduin ne semblait pas vouloir inculquer la peur des Anciens chez les humains.
Sauf si on s'appelait Makoto Hamasaki de Daguerreo, visiblement. C'était bien la première fois qu'il voyait Vincent aussi penaud.
"Nous pensons qu'il n'a pas attaqué le Cap par hasard."
"Hm. il serait venu chercher quelque chose ? "
"Oui, mais quoi ? Tu sais ce que contenait ce coffre ? "
Maduin approcha du coffre fragmenté, penchant la tête sur le côté. L'Ancien était petite et brune à lunettes en passant près de Cid.
Puis quadrupède et à la fourrure rousse en s'agenouillant devant les fragments de pierres, à côté de Red.
Bahamut, c'était perturbant, Cid avait l'impression de voir un vieil écran déréglé qui déformait les images.
"Pas la moindre idée," finit par avouer Maduin en se redressant, passant sa longue main dans la crinière de Red, "je sais juste que ce bâtiment ne devait pas être habité. C'était la seule condition que ma grand-mère des Cieux m'a donnée pour que je puisse installer l'hivernage ici."
"Qu'est-ce que c'était comme bâtiment ? " demanda Yuffie.
"Un temple en mémoire de Minerva et des Cetras," répondit Maduin en tournant la tête vers elle.
Ses yeux étaient d'un très beau gris bleu, comme ceux de Squall. Et il y avait la même cicatrice sur son front.
"Des Cetras ? " répéta Aérith.
L'Ancien hocha la tête, levant une main pour la poser sur l'épaule d'Aérith.
Ses doigts étaient petits, presque délicats, mais les ongles courts incrustés de terre fertile, comme les mains de sa mère.
"C'est un honneur de te rencontrer enfin, petite fleur," murmura Maduin en glacian.
"Nous nous connaissons ? "
"Non, mais Zack t'aime. Alors je t'aime."
Et Maduin lui fit un clin d'œil, ses iris aussi bleus et lumineux que ceux de Zack. La main de l'Ancien glissa jusqu'à celle d'Aérith et la saisit avec délicatesse, l'entrainant vers les fresques sur les murs, rejoignant Vincent. Barret voulut intervenir, mais Zack le retint d'une main sur le bras, secouant la tête avec un petit sourire.
"Elle ne craint rien avec Maduin, ne t'en fais pas," expliqua le brun.
"Je peux demander à ma grand-mère des cieux si elle en sait plus," reprit Maduin en désignant les peintures, "mais sa mémoire n'est plus ce qu'elle était... et ça doit faire deux siècles qu'elle n'a pas repris forme humanoïde. Ça n'aide pas."
"Garuda," précisa Cloud au regard interrogatif d'Aérith.
"Le seul indice que vous pourriez avoir, ce sont ces fresques," déclara Maduin en désignant les peintures colorées aux murs.
"Tu sais lire ça ? " demanda Vincent.
"Makoto, tu surestimes mon âge," protesta l'Ancien en posant sa main libre sur sa hanche, "cette écriture était déjà oubliée des siècles avant ma naissance."
"C'est ce que je craignais," soupira Vincent.
"Mais il y a une personne sur cette planète qui serait capable de la lire et tu le sais."
Vincent garda le silence un long moment.
"J'espérais ne pas y retourner," finit-il par soupirer.
"Où ça ? " demanda Cid.
"Daguerreo."
Yuffie, juchée sur les épaules de Zack, prit une série de photos des fresques, tâchant d'avoir tous les panneaux, avec le plus de détails possibles, puis Avalanche et l'Ancien sortirent, reprenant le chemin inverse.
Maduin avait bouché le tunnel des Remnants, réalisa Vincent quand ils passèrent devant l'accès.
Et une fois dehors, l'Ancien réitéra son exploit en reconstituant le mur derrière eux d'un geste de la main.
"Il faudra que je revienne maçonner tout ça," murmura l'Ancien dans ses voiles.
"Peut-être que Reeve pourrait envoyer quelqu'un ? " suggéra Zack.
"Si c'est un temple Ancien, il ne vaut mieux pas, le moins de personnes possibles doit être au courant de son emplacement," rétorqua Vincent, pendant que Maduin acquiesçait d'un signe de tête.
"Logiquement, je devrais même me débarrasser des témoins," ajouta Maduin en tendant un index vers Barret.
Le Lieutenant se raidit, prêt à se défendre, mais les jumeaux s'interposèrent aussitôt, le regard implorant de mako.
"Tu vas pas faire ça ? ! " protesta Zack.
"Barret sait garder des secrets ! " renchérit Cloud.
"Allons, allons, les garçons, vous pensez vraiment que je ferais ça ? "
"Le Vieux Père le ferait," finit par marmonner Zack d'un ton penaud.
"Fort heureusement, je ne suis pas le Vieux Père," rétorqua Maduin. "Vous allez repartir ? "
"Il faudrait nous rendre à Daguerreo… mais…"
"Parfait ! " s'exclama Maduin en claquant ses paumes l'une contre l'autre, "vous me déposerez à la Forêt Ancienne en passant, je suis curieux de voir comment fonctionnent les aéronefs modernes …"
"Tu es toujours aussi sans-gêne, toi," déclara Vincent avec un petit sourire amusé.
"Pour quelle raison devrais-je changer ? "
Maduin apprécia le Haut Vent.
Et l'équipage du Haut Vent fut à deux doigts de l'adopter quand l'Ancien posa le pied sur le pont de l'aéronef.
Contrairement aux craintes de Cid, aucun n'eut de geste ou de mot déplacé quand Vincent et les jumeaux les présentèrent à Maduin. La plus entreprenante fut Fran, qui, voyant les cheveux blancs et la peau sombre de l'Ancien, ainsi que les deux longues oreilles veloutées qui perçaient de sa chevelure, vint aussitôt se blottir sous son bras en roucoulant dans sa langue natale.
Et Maduin n'hésita pas à la laisser faire, caressant ses cheveux et ses oreilles avec la tendresse d'une mère.
"Comment elle fait ? " s'étonna Balthier.
"Je ne suis même pas sûr que Maduin le sache," répondit Cloud.
Vincent le regarda commencer à materner les occupants du Haut Vent avec amusement. Les originaires de Centra connaissaient Maduin au moins de réputation, mais la grande majorité de l'équipage était estériens et peu préparé à une tornade d'amour parental aux traits changeants.
Cid et Shera en particulier restèrent à plusieurs reprises désemparés à se retrouver devant leur mère et leur sœur, voire devant leurs propres doubles.
Quand un deuxième Gippal apparut près de Shera, Vincent se demanda s'il faudrait expliquer à Cid sur quel critères Maduin prenait les traits d'un proche plutôt qu'un autre. Mais avant que Cid ait pu s'en soucier, Barret rejoignit Vincent, lui montrant la salle de commandement du pouce.
"Vincent, on doit appeler Reeve. Peux-tu venir ? "
"J'arrive," répondit Vincent.
Barret referma derrière Vincent et lui et sortit son PHS, hésitant quelques instants à composer le numéro.
"Qu'est-ce qu'on dit à Reeve ? " s'enquit Barret.
Vincent se tourna vers lui, une main sur le dossier d'une des chaises qui entouraient la table, lestées pour rester en place pendant les mouvements de l'aéronef.
"Comment ça ? "
Barret fit des gestes de sa main de métal, hésitant sur la façon d'aborder le sujet.
"S'il faut garder le temple secret… Qu'est-ce… qu'on a le droit de dire ? "
"Je m'en charge," offrit Vincent avant de sortir une matéria d'un rangement fixé au mur.
La salle de commandement était équipée d'encoche à matérias, une procédure classique pour une pièce où des informations sensibles pouvaient être échangées et Barret regarda Vincent inspecter les matérias une à une avant de se décider pour une verte.
Il était toujours étonné par la capacité de leur Turk à reconnaître les matérias simplement en les touchant. La magie de Vincent était surhumaine, tout comme celle des jumeaux, et seule celle d'Aérith leur était supérieure. Même Red, pourtant mage né, n'était pas à leur hauteur, probablement en raison de son jeune âge.
Mais parfois, Barret se demandait si l'aisance de Vincent avec la magie était réellement due à ses augmentations où à… ce qu'il cachait.
Son père était mage, avait-il dit.
La magie se passait de parents à enfants.
Comme les limites.
"C'est bon," déclara Vincent, une fois la matéria sceller enclenchée.
Barret se secoua et lança l'appel tout en prenant place près de Vincent et activant le haut-parleur.
A Midgar, il devait être près de vingt-deux heures. Il espérait que Reeve soit bien chez lui.
-Reeve à l'appareil. Un instant, je sécurise la pièce.-
"Je t'en prie," marmonna Barret.
-C'est bon. Tout va bien de votre côté ?-
"On a un maduin à bord," déclara Vincent.
-Qu'est-ce qu'il fait là ?- s'étonna leur chef.
"Edéa l'a envoyé pour nous guider. Ne t'en fais pas, c'est quelqu'un de confiance."
-Si tu le dis, je te crois. Vous avez trouvé quelque chose ?-
"Oui, on a exploré le but des squames, mais ils ont emporté quelque chose, peut-être une matéria."
-Aïe, de quel genre ?-
"Impossible de savoir, " répondit Barret.
"Nous avons peut-être un indice, mais… il faudrait pouvoir traduire des textes que nous avons trouvés."
-En quelle langue c'est ?- s'enquit leur chef, -je peux essayer de trouver quelqu'un…-
"Ce n'est pas la peine, je sais où trouver un traducteur compétent," coupa Vincent, "par contre, nous allons devoir faire un détour pour le trouver."
-Vous allez où ?-
"Dans ma famille," répondit Vincent.
Le long silence qui suivit intrigua Barret. La réponse que finit par faire Reeve aussi.
-Je vois. Qui ira ?-
"Je dois encore décider ça avec Barret."
-Combien de temps ça prendra ?-
Cette fois, Vincent hésita à répondre avant de soupirer.
"Je l'ignore. Je… En fait je ne suis pas sûr qu'ils coopéreront."
Barret entendit Reeve soupirer, de cette façon qu'il avait toujours quand il sentait que la situation échappait à son contrôle.
-Pas d'imprudence.-
"J'essayerais."
-Contactez-moi régulièrement pour les nouvelles. Essayez d'être de retour après-demain.-
"On le fera," répondit Vincent.
"Va te coucher Reeve," ajouta Barret.
-On y veillera !- lança la voix de Jessie en arrière-plan.
-Je veux bien le mettre au lit, il est en train de nous laminer au poker !- ajouta Wedge.
-Heureusement on parie des bonbons,- soupira Biggs.
-Le trio squatte mon canapé,- soupira Reeve avec toutefois une touche chaleureuse dans la voix, -ils prétendent que c'est plus sûr pour moi.-
"Passez une bonne soirée, alors," déclara Barret avant de raccrocher.
Il s'assura d'avoir bien raccroché avant de soupirer, attirant l'attention de Vincent.
"Qu'est-ce que Reeve sait que j'ignores ? "
Vincent baissa brièvement les yeux.
Barret était loin d'être idiot. Ce n'était pas pour rien qu'il était le chef de l'équipe de combat. Il savait analyser une situation sur le vif, trouver des solutions rapidement et retomber sur ses jambes pour assurer la réussite d'une mission sans dégât[1].
Et il ne devait pas aimer être mis à part.
"Je n'ai pas le droit de révéler les secrets de Reeve."
"C'est encore un secret de famille ? " demanda Barret, prouvant qu'il était effectivement plus sagace que Vincent le pensait.
"Oui."
"Et tu ne pourras emmener que ceux qui ont des secrets de familles ? "
"Oui, " souffla Vincent.
"Pourquoi ne me fais-tu pas confiance ? " demanda Barret d'un ton blessé.
"Si quelqu'un de mon clan apprend que tu es au courant de ma limite, tu seras, au mieux, prisonnier à vie de Daguerreo."
"A vie ? Ça me semble… extrême."
"L'autre extrême est la mort."
"Et c'est eux que tu veux aller voir ? "
"Si j'avais le choix, j'éviterais," admit Vincent.
"Vincent, putain ! Je ne te demande que de me faire confiance ! "
"J'ai confiance en toi mais pas en eux," rétorqua Vincent.
"Tu parles de ta famille comme si c'étaient des monstres ! "
"Et si c'était le cas ? ! "
Le colosse sursauta, prit de court par le ton furieux de Vincent. Le Turk inspira profondément, ouvrant et fermant ses mains en inspirant pour se calmer.
Cinq secondes en inspiration.
Cinq à l'expiration.
C'était comme ça que Cid se calmait parfois et un bref instant, Barret se prit à se demander ce qui arriverait le jour où Cid ne pourrait plus se calmer.
"Barret," reprit Vincent, d'une voix plus contrôlée, "le monde n'est pas divisé en catégories claires. Ce ne sont pas les humanoïdes et les non humains dotés de conscience d'un côté et tout le reste des monstres et des animaux de l'autre. Il y a quatre siècles, Fran aurait été considérée comme un monstre. Il y a encore des gens à notre époque qui pensent que Gippal n'a pas d'âme et ne retournera pas à la Planète à sa mort."
"Qu'est-ce que tu es ? "
"Hume."
Barret ferma les yeux en secouant la tête. C'était fini. Vincent ne lui dirait jamais la vérité s'il décidait de mentir aussi visiblement.
"A moitié," acheva Vincent avec un soupir.
Barret resta quelques secondes surpris du brusque changement d'avis du sniper qui lui, ne le regardait pas, la tête tournée sur le côté.
"L'autre moitié ? "
"Ça dépend des interprétations. Dieu. Démon. Protecteur. Arme de la planète. Monstre."
Barret s'assit à la table, tentant d'assimiler ce que Vincent venait de lui révéler. Qu'est-ce qui pouvait être à la fois un dieu, un démon, un monstre et un protecteur ?
"Ancien…" finit par murmurer Barret, baissant instinctivement la voix malgré le sort de silence, "tu es à moitié Ancien."
Le Turk hocha la tête.
"Cetra ? "
"Non. Non, les Cetras… C'était le peuple de Minerva. Ses enfants."
"Tout ce que tu nous as dit sur ton passé. Ton père. Ta mère… Les Turks…"
"C'est vrai. Tout est vrai. J'ai… de l'âge de dix à dix-sept ans, j'ai vécu… Dans une société d'Anciens. J'en suis parti dès que possible."
"Pourquoi ? "
"Disons que des siècles de consanguinité n'ont pas fait du bien dans notre famille. L'aîné de mes frères était violent et s'attaquait souvent aux demi-sang. Un de nos frères a perdu son bras par sa faute. J'ai préféré partir avant… que ça m'arrive."
"Putain…" murmura Barret, "et tu veux y retourner ? "
"Pas vraiment," admit Vincent, "je crains l'accueil."
Quarante et un an sans donner de nouvelles. Si Chaos ne le trouvait pas en premier, l'engueulade qu'il avait pris de Maduin pâlirait face à ce que lui réserverait son père.
"Yuffie. Aérith. Cid ? " énuméra Barret.
Si Barret avait deviné pour Cid, le secret était bien éventé.
"Qui d'autre ? "
Vincent soupira, vaincu.
"Je soupçonne que les jumeaux le savent, mais... je ne sais pas si c'est parce qu'ils sont comme nous ou si c'est parce que Maduin les a en partie élevés."
"Et Reeve."
Vincent hocha la tête.
"Ne m'en demande pas plus. Plus tu en sais, plus tu es en danger. Plus nous sommes en danger."
"Vincent, tu parles de vos familles. Vos parents…"
"Parfois, il vaut mieux sacrifier un membre du clan plutôt que le clan entier."
Barret se redressa, stupéfait par les paroles de Vincent.
"C'est inhumain," balbutia-t-il.
"Je vois que tu commences à comprendre le problème," assena Vincent.
Et à son expression perturbée, il semblerait que les avertissements de Vincent soient enfin entrés dans la tête de chocobo de Barret. Il espérait vraiment que ça suffise et qu'il n'ait rien à ajouter de plus.
Il ne voulait pas risquer la sécurité de Barret.
Ou de Marlène.
"Vincent ? " appela Barret, le sortant de ses pensées.
Il releva les yeux et secoua la tête.
"Désolé. Il... vaudrait peut-être mieux que j'y aille seul…"
"Pas question. Surtout si tu es en danger là-bas."
Et le syndrome du papa chocobo frappait encore. Parfois, Vincent se demandait si Barret réalisait qu'il était assez vieux pour être son père.
Et il venait de lui avouer être à moitié ancien, bon sang !
"Je ne dirais pas en danger…"
"Qui peux-tu amener ? "
"Je veux en discuter avec eux d'abord."
Barret s'apprêtait à protester mais Vincent leva la main alors que la bulle de silence autour d'eux explosait, les petits bruits de l'aéronef semblant soudain assourdissants.
La porte s'ouvrit sur Zack qui entra d'un pas joyeux.
"Vincent ! Barret ! Le repas va être servi ! "
"Nous arrivons."
"Reeve à dit quoi ? "
"D'être sage," répondit Vincent en suivit le jeune homme.
"Rien d'intéressant alors," décida Zack, "Maduin a fait la soupe aux gyshals de Maman ! Il a même dit qu'il pourrait nous donner la recette ! "
"Qu'est-ce qu'elle a de particulier cette soupe ? " s'enquit Vincent, curieux.
Barret suivit les deux amis du regard, se perdant dans leur discussion.
Ils étaient à moitié anciens. Ou en partie, du moins.
Il connaissait les légendes bien sûr. Tous les enfants de Centra étaient élevés dans le respect et la crainte des Anciens, surtout de ceux qui protégeaient leurs terres.
Il avait entendu les chants des Titans quand il descendait dans les mines avec Dyne et les autres mineurs de Corel. Les hurlements de Fenrir avaient retenti dans les montagnes pendant les hivers les plus froids.
Il avait entendu les histoires d'enfants nés de l'union d'humes et d'Anciens, qui devenaient des héros, des fondateurs de clans, mais pour lui, c'était une légende.
Un mythe.
Et il avait encore du mal à le croire, à voir ceux qui, à Avalanche, pouvaient s'en targuer.
Il ne pouvait pas les voir autrement qu'humain.
Il ne les voyait pas autrement qu'humain.
Même Aérith et ses intuitions.
Même Vincent qui tuait aussi facilement qu'il respirait.
Même les jumeaux et leurs yeux trop lumineux.
Il n'aurait pas besoin de prétendre que ses hommes étaient humains.
Ils l'étaient.
Il inspira profondément et suivit Vincent et Zack, donnant une petite tape amicale sur l'épaule de Vincent en passant.
"Constitue l'équipe qui partira avec toi et reviens me voir qu'on en parle."
Vincent lui jeta un regard presque surpris mais hocha la tête en guise d'assentiment.
"Pourquoi une équipe ? " s'enquit Zack.
"Je t'expliquerai plus tard, allons manger d'abord."
La soupe aux gyshals fut effectivement excellente et votée à l'unanimité pour être adoptée à Seventh Heaven sous le nom de Soupe Strife. Et après le repas, alors que la moitié de l'équipe était assignée à la vaisselle et au nettoyage, Maduin en profita pour attraper son fils adoptif, lui tendant une tasse de café avec un regard sévère.
"Makoto, puis-je avoir les explications maintenant ? "
Vincent soupira mais hocha la tête, avant de suivre Maduin jusqu'au pont extérieur.
Le temps du repas, le Haut Vent avait été placé en vol stationnaire et ils purent profiter de l'air frais au calme. Après des mois avec le nez dans la pollution de Midgar, ça faisait du bien à Vincent de respirer un air frais, non-saturé de mako.
Il n'avait pas réalisé à quel point Gongaga lui avait manqué, alors qu'adolescent, il n'avait eu comme seul but que de s'en éloigner le plus vite possible.
"Trente ans, Makoto," reprit Maduin en sirotant sa tasse.
"Je suis désolé."
"Tu l'as déjà dit. Dis-moi plutôt ce qui s'est passé, et pourquoi tu ne l'as pas expliqué à ta sœur non plus ? "
La discussion allait être difficile. Entre la curiosité naturelle de Maduin, sa manie de surprotéger ses enfants, même une fois adultes et la tendance de Vincent à garder ses problèmes pour lui, il allait y avoir des étincelles.
Il aimait Maduin. Il ne pouvait le dénier, depuis le jour où Maduin l'avait ramassé à la frontière des terres de Daguerreo, boitant encore et à moitié affamé, il avait aimé l'Ancien autant que l'Ancien l'avait aimé. Il ne lui avait pas rendu les choses faciles, à refuser de se laisser approcher et cajoler mais ça avait été là dès le premier jour.
Maduin l'avait probablement pleuré, comme chaque fois qu'un de ses enfants mourrait.
Vincent lui devait bien des explications.
"Tu te souviens… quand je t'ai contacté en… 2944 ? Pour te demander quand est-ce que la Caravane passait près de Nibelheim ? "
"Oui."
"Il y a eu… un imprévu…"
"Ils m'ont dit que tu étais mort dans un accident de chasse."
Vincent sentit un frisson lui remonter la colonne vertébrale. Ils ? Qui ? Les chasseurs de Nibelheim ou...
"Tu y es allé ? "
"Je te cherchais, nous étions censés nous retrouver hors de Nibelheim et tu n'es jamais venu…"
"Qui te l'as dit ? "
"Un homme brun avec une moustache, Estérien, à l'accent Alexandriote…"
"Professeur Falmis. C'est un ami…"
"L'autre était un Wutan, longs cheveux noir, lunettes rondes… la trentaine tous les deux."
"Et Hojo," reprit Vincent, se sentant à nouveau glacé d'effrois.
L'Ancien fronça légèrement les sourcils, son expression se troublant.
"Alors c'est lui…"
"Il ne t'a pas touché ? " demanda Vincent, le cœur battant.
"Non. Il m'a déshabillé du regard probablement jusqu'aux os, mais il n'a pas posé la main sur moi."
C'était un soulagement. Hojo n'avait pas dû oser s'attaquer à un maduin à l'époque, pas avec une Caravane entière de Vagabonds aux portes de Nibelheim.
Il espérait qu'il avait oublié cette rencontre et qu'il n'essayerait pas de le retrouver trente ans plus tard.
"C'est lui qui… qui m'a tué."
"J'aurais dû étriper ce petit-fils de valron," déclara calmement l'Ancien.
Ses griffes étaient sorties, épaississant les doigts serrés autour de sa tasse, similaires à celles des ifrits qui nichaient dans les volcans. Similaire à celles de son grand-père.
"C'est ce que je me dis tous les jours," rétorqua Vincent, prenant une gorgée de sa boisson.
Maduin tendit la main, drapant un de ses voiles autour des épaules de Vincent.
L'intérieur était tapissé de plumes.
Ou plutôt, le voile était une de ses ailes, au duvet vert et confortable, presque trop chaud sous le soleil d'hiver de Gongaga. Vincent avait été trop grand pour être couvé quand il était arrivé à la Caravane, mais ce n'était pas faute d'avoir essayé de la part de Maduin. L'Ancien s'appuya contre l'épaule de Vincent, fourrant son nez dans ses cheveux.
"Les morts ne reviennent pas," murmura Maduin, " et tu n'es pas un errant, je peux sentir ton odeur…"
Vincent se dégagea doucement, ne voulant pas vexer son parent et se tourna pour lui faire face.
"Il m'a ranimé… Et il a… Il a conçu une technique de soin avec le… avec de la mako, ça m'a… guérit, mais maintenant…"
Il fit un geste vers ses yeux.
"Je suis différent."
Maduin lui tendit sa tasse vide, qu'il prit, intrigué, et l'Ancien posa ses longues mains de chaque côté de son visage. Vincent tâcha de ne pas le regarder dans les yeux, mais les mains l'obligèrent à lever le regard vers lui.
Les yeux qui le regardaient étaient aussi rouge que les siens, mais moins lumineux et il esquiva le regard à nouveau, sans chercher à savoir si celui qui le regardait était son père, Hel ou Gigas.
Il n'y avait pas grand risque que ce soit Chaos.
"Les jumeaux…" commença Maduin d'une voix tendue.
"Pareil. Le travail d'Hojo."
Il ferma les paupières quand Maduin caressa doucement sa tempe du pouce.
"Vous avez été infusé de force avec le sang de la planète, avec des connaissances et des compétences que vous n'auriez jamais dû avoir. Pas étonnant que ta mémoire fonctionne mal."
"Cloud a… du mal à rester présent parfois. Zack… a des limites étranges."
"Si Hojo retombe un jour sous mes griffes, je le tuerais de trois façons puis danserais sur ses restes," déclara l'Ancien avant de lâcher Vincent et reprendre sa tasse.
"S'il te plait ne… ne le cherche pas. Il a des hommes à son service…. Ils ont été augmentés, comme nous et… ont des pouvoirs de sorcières."
"Des mâles avec des pouvoirs de sorcières ? " s'étonna Maduin.
"Oui. Hyne doit se retourner dans sa tombe."
"Il fait la toupie tu veux dire," grommela l'Ancien.
"Il faudrait s'assurer qu'Hojo ne sait rien de ça."
"Je passerais vérifier dans sa Tombe que les sceaux tiennent toujours."
"Merci de les avoir appris à Edéa au fait, ça l'a sauvée."
Maduin hocha la tête avant de soupirer, jetant un petit regard à son fils.
"Je comprends que tu n'en as pas parlé à Edéa. Elle a fait des cauchemars du laboratoire d'Esthar pendant des années."
"Je… lui en parlerai peut-être un jour. Quand la Sorcière qui la possède sera définitivement morte."
"Tu fais bien, elles risqueraient de se mettre d'accord pour écarteler Hojo sur le plus haut sommet de Grand Glacier."
Vincent grimaça et remercia Minerva qu'Edéa ait une telle tête de chocobo qu'Ultimécia ne pourrait pas arriver à l'influencer.
S'il posait la question à Maduin, celui-ci répondrait qu'elle le tenait d'un certain demi-wutan de Daguerreo qui avait été une très bonne influence sur elle.
"Pourquoi n'es-tu pas parti avant qu'Hojo ne te tue ? " s'étonna Maduin avec un regard soupçonneux. "tu es très capable de te débrouiller seul dans la nature, tu étais un des meilleurs chasseurs de la Caravane."
Eeeeet, ça devait vouloir dire qu'il fallait qu'il parle de Lucrécia à Maduin.
"Il… y avait quelqu'un d'autre…" commença-t-il.
Maduin se contenta d'attendre la suite, ses iris dorés étincelants d'amusement à voir son fils soudain embarrassé.
"Elle s'appelait Lucrécia…" avoua Vincent.
"Une femme. Je l'aurais parié," soupira Maduin avec un petit sourire.
"Qu'est-ce que tu veux dire ? "
"Que comme ton père, tu ne réfléchis plus dès qu'une jolie fille est dans les parages."
Touché. C'était de famille. Sauf pour Hel.
"Ça marchait aussi avec les jolis garçons," avoua Vincent.
"Que s'est-il passé ? "
"Ça me semble pathétique maintenant. Nous étions amants. Elle m'a quitté pour Hojo. Elle l'a laissé expérimenter sur leur enfant quand elle était enceinte. Je… n'ai pas réussi à l'arrêter."
"Sur leur propre enfant ? " murmura Maduin.
"C'est pour elle que je voulais attendre la Caravane. Je voulais te l'amener et que tu lui parles. Que tu la fasses changer d'avis..."
"Était-ce elle ? " demanda Maduin en dévoilant son visage.
Vincent détourna vivement le regard.
"Makoto ? "
"Remets ton voile. S'il te plait," l'implora Vincent.
L'Ancien obtempéra, puis, voyant son fils toujours obstinément tourné, tenta de le prendre par l'épaule pour le diriger vers lui. Il le sentit se tendre sous ses doigts, lutter pour ne pas bouger, il vit sa main gantée se serrer sur la rambarde jusqu'à la déformer.
Makoto n'avait pas été d'un naturel tactile. Après des mois à la Caravane, il avait fini par accepter des bras autour du sien ou de ses épaules, par apprendre à tenir des enfants dans ses bras ou sur son dos, mais il lui avait fallu longtemps pour laisser Maduin le prendre contre lui.
Et là, Maduin avait l'impression de retrouver l'adolescent blessé et terrifié qu'il avait ramassé à Daguerreo.
"Qu'est-ce qu'elle t'a fait ? " demanda-t-il doucement.
"J'aimerais le savoir," répondit son fils, "je…quand j'essaye d'y penser, ma limite…"
"Dois-je la trouver elle aussi ? "
"Non. Non," répéta Vincent, "elle est morte."
"Je n'aime pas te voir ainsi," murmura Maduin en posant sa joue sur le crâne de son fils.
"Pathétique ? " suggéra Vincent.
"Blessé," corrigea l'Ancien en tendant la main pour desserrer celle que Makoto avait sur la rambarde, "perdu. Traumatisé."
Il desserra doucement les doigts de Makoto autour de la barre de métal avant de lui tenir la main contre lui. Maduin ne voulait rien de plus que prendre Makoto contre lui comme s'il était un enfant, l'envelopper de ses ailes et ne plus jamais laisser qui que ce soit lui faire du mal, mais…
Il ne se laissait pas faire in y a trente ans, ça n'avait probablement pas changé.
"Retourne avec moi à la Caravane," proposa l'Ancien d'une voix douce.
"Je ne peux pas."
"Tête de chocobo."
"La faute à qui ? "
"Tous les parents qui t'ont élevé," rétorqua l'Ancien, "moi compris. Que vas-tu faire ? "
"Rester avec mon Vol. Débusquer Hojo. Débarrasser Gaïa de lui. Après… Après il y a Yuffie… Elle va changer les choses… elle aura besoin..."
Vincent gardait les yeux fermés, refusant de regarder son parent adoptif. Il ne voulait pas voir les yeux de sa famille, ni ceux de Lucrécia. Pas maintenant.
"Elle… a décidé que j'étais son frère…"
"Ça me rappelle quelque chose, tiens," murmura Maduin.
"Moi aussi," admit Vincent.
Les mains de Maduin étaient petites, mais couvertes de callosités dues au maniement des armes. Vincent sentit sa tête se glisser sous son menton, les cheveux courts et soyeux lui chatouillant la peau et il entrouvrit les yeux.
Le visage de Yuffie le regardait, une lueur amusée dans le regard.
"Est-ce que tu vas nous présenter officiellement ? "
Vincent hocha la tête et se dégagea doucement, gardant quelques secondes la main serrée autour d'un des voiles de Maduin avant de le lâcher, le laissant glisser entre ses doigts.
"Elle va t'aimer."
"Je sais. Je l'aime déjà."
Quand Cid stoppa le Haut Vent au-dessus de la Forêt Ancienne, la nuit tombait petit à petit. Entre le sol sec de Cosmo derrière la Forêt Ancienne et le ciel qui commençait à se teinter de rouge, le contraste avec la forêt luxuriante perchée au sommet de sa mesa était frappant.
Aérith était bouche bée, contemplant la forêt à ses pieds. Plus le Haut Vent se rapprochait, plus l'immensité de la forêt était évidente, plus grande encore que Midgar. Ayant été élevée d'abord à Grand Glacier puis à Midgar, Aérith n'avait jamais vu autant de plantes au même endroit. Même l'air lui semblait plus… accueillant ?
Elle n'avait pas les mots pour le décrire.
C'était la même chose que quand elle était au milieu des fleurs de l'église, comme les voix qui lui parlaient dès qu'elle approchait d'un arbre.
Mais tellement plus vaste.
Tellement plus… présent.
"Qu'est-ce que c'est que cet endroit ? "
"Ceci est la Forêt Ancienne," répondit Maduin en désignant l'étendue verte, "une des jungles les plus impénétrables de Gaïa. Avec la Jungle de Golmore, bien sûr. Elle date d'avant la création de Grand Glacier et n'a cessé de pousser depuis."
"Même la végétation est carnivore ici, comment faites-vous pour camper ? " s'étonna Vincent, accoudé près d'Aérith et de l'Ancien.
"On les mange en premier. Le rilfsak braisé, c'est pas mauvais."
Sous leurs pieds, les maduins se rassemblaient, le regard levé vers le Haut Vent. Certains des protecteurs du camp escaladaient les arbres, venant plus près pour évaluer le danger que présentait l'aéronef, mais ceux parmi la Caravane avec les meilleurs yeux avaient déjà reconnu leur Ancien et lui lançait des saluts enthousiastes.
C'était rassurant de voir la foule chamarrée des maduins. Vincent ne retrouverait probablement pas beaucoup de têtes connues parmi eux, mais il reconnaissait l'organisation. Il voyait les cavaliers chocobo qui protégeaient la Caravane, lourdement armés, les artisans qui entretenaient et réparaient tentes et véhicules, les chasseurs, les nourriciers qui prenaient soin des enfants, les enfants eux-mêmes, les mains levées vers Maduin, appelant leur parent.
Il y avait tant de couleurs de peaux différentes, de couleurs de cheveux, autant de griffes que d'ongles, de cornes que d'oreilles pointues ou rondes.
Il avait passé des mois, presque un an avec eux, mais les souvenirs de la Caravane restaient brouillons. Il se souvenait leur avoir amené Edéa, il se souvenait être passé les voir et avoir fait un bout de chemin avec eux lors de ses "vacances[2]", et la vie avait été paisible.
Trop peut-être pour lui, qui avait les pieds qui lui démangeait dès qu'il était dans un endroit trop tranquille.
Il se demandait parfois comment il avait tenu neuf ans chez les Turks, mais il soupçonnait que le rythme de vie effréné et les voyages fréquents l'avaient suffisamment occupé pour qu'il reste aussi longtemps dans la ville.
"Je vais rentrer," déclara Maduin comme l'aéronef stoppait à une dizaine de mètres du sol, juste à la cime des arbres, secouant leurs branches du souffle de ses hélices.
"On a une échelle de corde," proposa Cid.
"Merci, mais je n'en ai pas besoin."
Zack serra l'Ancien contre lui des deux bras, posa sa tête sur son crâne. L'apparence de Maduin vacilla à plusieurs reprises, passant par tout un éventail de cheveux, blonds, châtains, courts, longs ou en épis désordonnés avant qu'il le lâche.
"Prends-soin de ton frère," demanda l'Ancien avant de faire la même demande à Cloud, qui opina, récoltant un baiser sur le front. "Et essayez de surveiller Makoto."
Le dit Makoto soupira pendant que les jumeaux acceptaient avec enthousiasme. Maduin tendit la main vers l'aîné de ses enfants présent, lui faisant signe d'approcher. Il s'exécuta, daignant se laisser enlacer avant de s'écarter.
"Makoto," reprit Maduin d'un ton sérieux.
"Oui, Mad…"
L'Ancien avait retiré son voile, mais ce n'était pas le visage de Lucrécia. Ce n'étaient pas ses cheveux châtains, ses yeux verts et sa peau délicate.
C'étaient des yeux bleus intelligents, une peau bronzée par le soleil, des cheveux blonds ébouriffés par le vent, un nez cassé à plusieurs reprises.
C'était Cid.
Avant que Vincent puisse protester, l'Ancien posa sa main sur sa joue, un baiser sur l'autre et remit son voile tout en enjambant la rambarde.
"Passe-nous voir avec les jumeaux et Edéa dès que tu te seras vengé."
"Maduin ! Espèce de…" commença Vincent.
Avec un rire ravi d'avoir embarrassé son fils devant son béguin du moment, l'Ancien se laissa tomber du haut de l'aéronef, ouvrant deux paires d'ailes vertes pour ralentir sa chute vers la foule de ses enfants en contrebas.
"Espèce de Dioui Fénon ! " Lança Vincent dans son dos.
"Heu, pourquoi il avait mon visage ? " s'étonna Cid.
Vincent jeta un regard noir aux jumeaux qui ricanaient en chœur.
"Pour rien, allons à la salle de commandement."
"Il n'y a pas de carte plus précise de cette région," déclara Luca en affichant une carte sur l'écran de la salle de commandement.
Vincent y jeta un coup d'œil. En quarante ans, les cartes n'avaient pas beaucoup évolué, visiblement. Son père y avait probablement veillé.
"Et je ne pourrais pas aider sur ce coup-là, la seule fois que j'ai survolé le coin, c'est quand j'ai été déployé à Wutaï et ça a été un cauchemar," ajouta Maître Cid, assis sur sa chaise, la main sur une carte en relief posée sur la table.
"Pourquoi ? " s'enquit Cid.
"Des vents très puissants qui rendent le vol difficile, les montagnes contiennent de la magnétite qui faussent tous les instruments et il y a aussi la putain de faune locale."
"Les Quetzalcóatls sauvages," précisa Zack avec un petit sourire.
"Les Touche-moi," ajouta Cloud.
"Et les insectes Kimara," renchérit Vincent.
"La région n'a jamais intéressé Shinra," continua Maître Cid, "la mako n'est pas assez abondante pour justifier l'installation d'un réacteur, du coup, il n'y a eu aucun aménagement, pas de route, pas de voie ferrée, pas de piste d'atterrissage."
"Et où est Daguerreo dans tout ça ? " demanda Barret en cherchant la ville sur la carte.
"Je sais pas, c'est pas indiqué," expliqua Luca en se grattant le crâne.
"On ne trouverait Daguerreo que sur les vieilles cartes," expliqua Vincent tout en inspectant celle sur l'écran cherchant des points de repères, "la ville a été détruite. Il ne reste que des villages et des ruines."
"J'ai une carte d'il y a vingt ans", proposa l'apprentie.
"Trop récent, il en faudrait une datant de trois cents ans au moins."
"Vincent, par curiosité, tu fais marcher mon apprentie ? "demanda Maître Cid.
"Il faudra descendre à un village à peu près ici, " indiqua Vincent en montrant un emplacement sur la carte, "et aller à pied jusqu'aux ruines pas loin de cette montagne, un ancien volcan pour être plus précis."
"Si on peut appeler ça précis," maugréa Maître Cid. "Il va falloir naviguer à vue et je ne serais d'aucune utilité. Luca, ça va être ton baptême du feu."
"Oui Maître ! Je ferai de mon mieux ! " s'exclama la jeune fille.
"Où est-ce qu'on pourra atterrir ? " demanda Cid.
"Il faudra descendre par l'échelle de corde au village. Il n'y aura rien d'assez grand, vide et plat pour poser le Haut Vent."
"On ne peut pas faire ça directement aux ruines ? " s'enquit Zack.
"On se fera attaquer par des Quetzalcóatls. Si on a de la chance."
"Et si on n'a pas de chance ? " demanda Cid.
"Par mon clan," répondit Vincent avec un soupir.
"Je répète : tu es sûr de vouloir retourner là-bas ? " soupira Barret.
Le passage de relais se faisait de plus en plus aisément. Bahamut, merci (enfin, il se comprenait), Balthier commençait à avoir assez confiance en lui pour être longtemps seul à la barre. Ça permettrait à Cid de prendre un peu de repos avant la prochaine partie de la mission.
Et aussi de parler à Vincent, qui errait à la porte de la salle de pilotage depuis la dernière réunion d'état-major, attendant que Cid soit disponible.
Et à voir sa tête, ce n'était pas pour une séance de visite de la salle des machines. Mauvaise idée avec Fran dans le coin, d'ailleurs, elle l'avait l'ouïe aussi fine que celle des jumeaux et ne se priverait pas pour venir mater.
"Je peux te parler ? " demanda Vincent à voix basse quand Cid arriva à proximité.
"Je suis tout à toi," répondit Cid.
"Un endroit tranquille ? "
"La salle des machines ? " suggéra Fran, debout de l'autre côté du poste de commande, en train de vérifier des mesures sur les cadrans de la console.
Qu'est-ce qu'il disait ?
Après avoir généreusement conseillé à sa mécanicienne favorite (après Shera) d'aller se faire foutre et non, Balth, tu restes à ton poste, Cid emmena Vincent à la salle de commandement.
Inviter Vincent dans sa cabine, c'était un peu trop tentant à son goût. Entre la surveillance constante de Shera, le manque d'intimité à Seventh Heaven et surtout, les problèmes de Vincent avec les contacts physiques, on ne pouvait pas dire que leur relation avançait beaucoup.
Et peut-être que c'était ce dont ils avaient tous les deux besoins pour l'instant. Il devait avouer que voir Maduin prendre l'apparence de Nooj lui avait fait un choc. Surtout un Nooj détendu et souriant, ce qu'il n'avait jamais vu quand ils étaient sur le front.
A ce rythme-là, il n'allait jamais réussir à tirer un trait sur lui, bordel.
Il ferma la porte derrière eux et s'adossa dessus pendant que Vincent activait la matéria sceller, toujours dans l'encoche.
"Qu'est-ce qui se passe ? " demanda Cid.
Vincent lui jeta un petit regard rapide avant de se diriger vers la table, s'appuyant dessus, sa main gantée tapotant distraitement sur le bord renforcé.
"Nous allons à Daguerreo."
"Ouais ? "
"Voir mon père."
Cid fixa Vincent du regard quelques secondes avant de grimacer. Le Roi Démon. Merde, ça lui était presque sortit de la tête. Vincent disait que ce n'était qu'une réputation mais vu sa réticence à retourner à Daguerreo, il devait y avoir du vrai dans la façon dont tout le monde sur Gaïa percevait Diablos.
"Ah. Merde. Comment on va faire avec les autres ? "
"J'ai… convaincu Barret de me laisser constituer une équipe."
"Comment as-tu fait ça ? "
Il n'y avait aucun moyen de mentir à ce sujet-là tout en restant crédible, aussi Vincent garda le silence.
Cid soupira.
"Tu lui as dit. Putain, Vince, on n'est pas censé..."
"Il commençait à deviner…"
"Tu peux me dire qui ne s'en doute pas à Avalanche ? "
"Je suis à peu près sûr qu'Elmyra et le trio…"
"C'était rhétorique," grommela le pilote.
Bon sang, Vincent choisissait toujours ses moments pour les révélations. Et en général le plus mauvais.
"Je viens," déclara Cid.
Vincent grimaça.
"Ton clan n'aime pas les Burméciens ? " demanda Cid en voyant son expression.
Ce n'était pas ça qui inquiétait le plus Vincent. Au contraire, les Daguerriens seraient absolument ravis d'avoir un Burmécien comme invité et le questionneraient sans relâche sur ses traditions et sa ville. Cid serait probablement le premier Burmécien à venir à Daguerreo depuis… En fait, Vincent n'était même pas sûr qu'il y ait eu des relations diplomatiques entre les deux villes.
Surtout pas avec l'inimité que nourrissait Bahamut à l'égard des siens et dont il soupçonnait son père d'en être la cause.
"Burmécia risque de ne pas apprécier s'ils apprennent que tu es venu."
"Et je suis censé en avoir quelque chose à foutre ? " rétorqua Cid.
Vincent laissa un petit sourire lui échapper en secouant la tête d'un air las.
Baha… Drekkaskìtur, Cid savait les choisir. Dès qu'il souriait, Vincent passait de très regardable à beau à couper le souffle. Cid tendit la main, l'attrapant par le poignet avant de l'attirer doucement vers lui, nouant ses mains autour de sa taille.
S'ensuivirent quelques minutes de pelotage prudent durant lesquelles Cid découvrit que si le ventre de Vincent était toujours terra non grata, son dos était très disponible, surtout le bas. Et wow, Vincent n'avait aucun problème à glisser les mains sous SON tee-shirt et... Cid stoppa toutefois net en sentant soudain Vincent se redresser avec un juron à voix basse.
"Vince ? "
"Yuffie," se contenta de murmurer Vincent en s'écartant, réordonnant rapidement ses vêtements.
Cid l'imita en jurant à son tour et s'éloigna de la porte, quelques secondes avant que Yuffie l'ouvre, visiblement toujours patraque et le teint verdâtre.
Leurs frangines voulaient la peau de leur vie sexuelle, c'était pas possible autrement.
"Urg," gémit la Princesse, une tasse de thé au gingembre dans la main.
"Ça ne va pas mieux ? " demanda Vincent.
"J'arrive plus à dormir, j'ai trop fait la sieste," gémit l'adolescente en venant s'asseoir, posant sa tasse avant de s'effondrer sur ses bras croisés.
"Comment ça se fait que tu n'es pas malade sur la MGU ? " s'étonna Vincent en passant la main dans ses cheveux.
"Elle est immobile en général," répondit Yuffie, laissant Vincent repousser ses cheveux en arrière, "et la seule fois où elle a bougé, j'étais trop préoccupée pour être malade."
"Va à l'infirmerie…" conseilla Cid, légèrement agacé.
"Cloud y dort avec Nanaki," marmonna l'adolescente en se redressant et se frottant les yeux. "Aniki ? "
"Oui ? "
"Zack a dit que tu constituais une équipe ? "
Vincent soupira. D'un côté, Zack ne savait pas vraiment se taire, mais de l'autre, ça lui évitait d'avoir à refaire les explications à tout le monde.
"En effet, pour aller à Daguerreo."
"Pourquoi on n'y va pas tous ? "
Vincent coula un regard prudent à Cid qui baissa les mains vers le sol d'un air dépité. Vincent soupira et alla vers la porte, réactivant la matéria sceller, désactivée par l'arrivée impromptue de Yuffie.
"Daguerreo… est sous la protection d'un Ancien. Tout le monde n'y sera pas accepté."
"Oh," souffla Yuffie avant de glisser un regard calculateur à Cid.
C'était quelque chose que Yuffie avait souvent fait quand elle était arrivée à Avalanche. Pendant quelques semaines, avant que Tifa arrive à l'apprivoiser à grands coups de petits plats, chaque fois que Yuffie devait leur parler, elle restait d'abord quelque seconde silencieuse à les observer, les jaugeant avant de se décider à ouvrir la bouche. Ça ne l'avait pas rendue moins langue de vipère, surtout au début, mais tant qu'elle n'avait pas été sûre de leurs intentions, elle était restée sur ses gardes.
Il avait fallu la mort de Tifa et l'arrivée de Vincent pour qu'elle se laisse approcher plus facilement.
Au point de révéler le secret qu'elle cachait.
"Je suis le fils de Bahamut," annonça Cid.
Yuffie en oublia d'être malade et le fixa, la mâchoire pendante et les yeux écarquillés. Vincent jeta un petit regard amusé à Cid qui lui répondit d'un doigt d'honneur.
"T'as rien à dire, Monsieur J'en Parle à Barret," grommela-t-il.
"T'as parlé des Kodai-shu à Barret ? " s'exclama Yuffie, horrifiée.
"Il commençait à s'en douter. Reeve sait aussi. C'est un des nôtres," précisa Vincent à l'expression outragée de Yuffie.
"Reeve ? " répéta Yuffie, abasourdie.
"Un clan disparu."
"Oh... Wasure rareta[3] ? "
Vincent hocha la tête. C'était à des moments comme ça que Cid se demandait ce qu'il avait raté en quittant Burmécia aussi jeune. Il y avait tout un pan de sa culture qu'il ignorait, tout ce qui concernait les Anciens et que visiblement, Yuffie et Vincent connaissaient.
Mais d'un autre côté… Sa seule et unique interaction avec Bahamut ne lui donnait pas envie d'en savoir plus.
"Bon. Eh bien, je vais à Daguerreo alors," déclara-t-elle.
"Pas question," répondit aussitôt Vincent d'un ton impératif.
"Pourquoi ? " s'exclama Yuffie en se levant, butant contre le poids de la chaise, "tu crois que je ne suis pas capable de me défendre ? "
"Yuffie, je suis la preuve vivante que mon père aime les petites femmes de Wutaï," coupa Vincent d'un ton las.
Yuffie cligna des yeux avant de grimacer.
"Ton père est pas... genre… super vieux ? Si t'a presque soixante ans il doit avoir au moins..."
"Il a connu l'époque de Sora Kara Kita Yakusai[4]."
Yuffie écarquilla les yeux, réalisant ce que ça signifiait. Cid était définitivement perdu.
"C'est lui, l'Ancien de Daguerreo," précisa Vincent.
Yuffie prit mécaniquement une gorgée de son thé, réfléchissant quelques secondes avant de reprendre.
"Si je viens en tant que représentante de Dame Da Chao, il gardera ses mains pour lui ? "
Vincent dû admettre que oui. Son père saurait se tenir dans ce contexte. Yuffie avait montré qu'elle savait naviguer dans des événements diplomatiques et elle était visiblement au courant de certaines affaires des Anciens. En fait, d'eux trois, elle était probablement la plus apte à rester diplomate face à son père. Il avait vu comment Cid parlait au Seigneur Bahamut.
"Tu ne me lâches pas d'une semelle là-bas et tu n'interviens pas si…" commença-t-il avant de s'interrompre brusquement, cherchant comment finir sa phrase sans alarmer Cid ou Yuffie.
"Si ? " reprit Cid d'un ton soupçonneux.
"Je… Je n'ai pas quitté Daguerreo sous de bons auspices," admit Vincent, évitant le regard de Cid et Yuffie.
"Qu'est-ce que tu as fait comme bêtise ? " demanda Yuffie avec une lueur taquine dans le regard.
"J'ai fugué à dix-sept ans," répondit Vincent, "c'est là que Maduin m'a récupéré."
Il jeta un petit regard à Cid qui le dévisageait avec surprise et détourna tout aussi rapidement les yeux.
"Je n'ai pas eu de contact avec eux depuis. Ça risque d'être houleux."
"Tu vas prendre une de ces raclées," murmura Yuffie, horrifiée.
"N'intervenez pas. Cid, je suis sérieux."
"Putain Vince, tu…"
"Promet."
"Pas avant que tu aies expliqué exactement ce que tu risques bordel ! "
"Je peux vous laisser si vous voulez ? " proposa Yuffie avant de boire une gorgée de thé.
Vincent et Cid tournèrent la tête vers elle avant de mutuellement réaliser leur position équivoque, la main de Cid serrée autour du coude gauche de Vincent et l'attirant vers lui pour l'obliger à le regarder.
"File au lit."
"Oui, Grand Frère, vous voulez une capot…"
"Au lit."
"Bonne nuit ! " s'exclama Yuffie en ricanant, sortant précipitamment de la salle de commandement.
Vincent soupira tout en se massant l'arête du nez.
"Ma sœur a des capotes sur elle[5]," finit-t-il par déclarer.
"Tu détournes la conversation. Qu'est-ce que tu risques ? "
Vincent hésita longuement et Cid resserra la main autour de son poignet, l'attirant de nouveau contre lui. Vincent se laissa faire. Cid avait remarqué que dès que quelqu'un touchait son bras démon, Vincent avait pris l'habitude de ne pas lutter, de se laisser aller, probablement de peur de blesser celui ou celle qui le touchait en réagissant trop brutalement.
Par contre, dès qu'il voulait toucher quelqu'un de lui-même, c'était toujours du bras droit, le bras humain.
Comme là, quand les doigts de Vincent glissèrent dans ses cheveux.
"Un de mes frères est un…"
Décrire Chaos en un mot était impossible. Il allait avoir besoin d'au moins trois.
"Trou du cul."
"Chaos ? "
Minerva. Parfois, Vincent aimerait bien que sa mémoire arrête d'être aussi fragmentaire. Il comprenait pourquoi Nibelheim était difficile à se remémorer, mais il avait aussi du mal à se souvenir de détails plus récents.
Comme quand est-ce qu'il avait parlé de Chaos à Cid ?
Et qu'est-ce qu'il lui avait dit ?
"Tu m'as dit que vous vous battiez," lui rappela Cid.
Vincent soupira et hocha la tête.
"C'était… grave ? "
"Il m'a cassé la jambe."
A nouveau, Cid prit une profonde inspiration pour se calmer.
"N'interviens pas, s'il te plait."
"Je te ferai la même promesse que tu m'as faite : Je ne le tuerais pas mais je promets rien pour les os cassés."
Vincent soupira. Apparemment, lui et Cid prenaient des tours pour être ridiculement protecteurs l'un envers l'autre. Et c'était probablement quelque chose auquel Vincent devrait réfléchir un peu plus, ainsi que tout ce qui avait un rapport avec leur relation, ou tentative de, en tout cas.
Mais pas la veille de revoir son père et ses frères.
Pas la veille de revoir Chaos.
La main de Cid remonta le long de son dos, avant d'effleurer sa nuque, pendant que le blond déposait un baiser sur sa gorge.
"Je serai avec toi demain. Yuffie aussi."
Avec Chaos.
"Oui. Tu as raison. Merci," souffla Vincent.
"Tu veux rester dormir cette nuit ? " proposa Cid.
C'était tentant, très tentant. Surtout maintenant, avec les mains de Cid sur lui, ses cheveux sous ses doigts et ses lèvres sur sa gorge.
Mais...
"Shera m'a à l'œil."
"Elle peut pas sauter Gippal et foutre la paix à ma vie sexuelle ? " soupira Cid en s'appuyant du front sur l'épaule de Vincent.
Vincent laissa échapper un petit rire et se redressa, relâchant les cheveux de Cid.
"Et tu as besoin de dormir. On aura de la marche demain."
Cid poussa un soupir exagéré avant de lever les yeux vers Vincent, un sourire canaille aux lèvres.
"J'ai droit à un dernier baiser de bonne nuit ? "
"Ça peut s'arranger."
[1] Enfin, pas trop, quoi.
[2] Quand Trigger lui hurlait de se faire oublier quelques temps après une de ses grosses conneries par exemple
[3] Les oubliés
[4] La calamité venue du ciel
[5] La faute à Seifer
