Chapitre 59 : Sur la route de Golmore
Résumé :
Le but est d'arrêter Hojo, détruire Sin, anéantir la moindre cellule de la Calamité.
Simple, non ?
Et ça le serait nettement plus s'il n'y avait pas d'abord tout un peuple de Fran à convaincre d'écouter.
Et en plus de ça, Vincent doit aussi gérer Zéphyr, Riku et tous les cadets d'Avalanche qui semblent soudain le considérer comme la voix de la raison. Ce qu'il n'a jamais été.
Personnages :
Team Avalanche, Team Haut Vent, Le clan Cetra, Jote (FFX)
Tags spécifiques au chapitre :
Séph VS l'équipage du Haut Vent, il n'est pas prêt, Séph VS les jumeaux, il n'est pas prêt non plus, Séph VS son héritage génétique, toujours pas prêt, Séph VS la tête de mule d'Aérith, il n'est pas prêt mais il fera de son mieux, L'équipage du Haut Vent est très protecteur les uns envers les autres, protect the bunny, Vincent est un adulte responsable à son insu.
"C'est pas juste," maugréa Riku deux jours plus tard, installé au fond du fourgon, entre Cloud et Yuffie.
Cid se gara devant la maison des Falmis et échangea un regard avec Vincent, assis près de lui sur le siège passager.
Ça recommençait.
"On en a déjà parlé, Riku," déclara Vincent en se tournant vers l'adolescent.
"Je veux venir ! "
"Non," répéta Zéphyr pour ce qui devait être la centième fois en deux jours, "pas question."
"Je peux me battre ! "
Vincent se leva, ramassant le sac de Riku posé à ses pieds.
"Ce n'est pas la question."
"C'est trop dangereux," reprit Zéphyr en se levant à son tour, ouvrant la porte pour descendre du fourgon.
Lulu arriva à sa rencontre, emmitouflée dans un châle épais. Elle le salua d'un signe de tête avant de jeter un coup d'œil dans le fourgon, cherchant et trouvant Riku.
"Madame Falmis vous attend."
"Merci, Lulu," répondit Vincent.
Riku finit par descendre à son tour, prenant le sac que lui tendait son grand-père.
"Riku, je sais que tu veux te venger, mais Golmore va être un champ de bataille et ce n'est pas la place d'un adolescent."
"Yuffie et Nanaki y vont bien," rétorqua Riku.
"Si j'avais le choix, ils seraient tous les deux à Seventh Heaven," maugréa Barret pendant que Yuffie et Nanaki tentaient de se faire oublier, au cas où Barret change soudain d'avis et les oblige à rester à Midgar.
"Reste avec Ifana et Gast," reprit Vincent, "tu pourras en profiter pour apprendre à maîtriser tes pouvoirs."
Riku hocha tristement la tête avant de lever les yeux sur son père et son grand-père devant lui.
"Si vous croisez Hojo, vous lui en mettez une de ma part ? "
"Plus d'une si tu veux," répondit Vincent avec un petit sourire, posant sa main sur son dos pour le faire avancer vers la maison des Falmis.
Rude attendait à un coin de la maison, discutant avec une jeune femme au teint mat des condoriens, ses cheveux d'un blond roux incandescents à moitié caché sous un foulard brodé. Elle jeta un rapide regard à Vincent avant de continuer sa discussion avec Rude. Vincent ne comprenait que très peu de condorien, mais les deux jeunes gens n'avaient pas l'air de parler philosophie.
Il y avait d'autres personnes autour d'eux, que Vincent ne connaissait pas. Un homme à la solide carrure était assis sur un porche plus loin dans la rue, buvant un soda en les surveillant du coin de l'œil. Vincent avait aussi sentit un regard sur lui venant d'un des toits, mais quand il leva les yeux, il ne vit rien.
Visiblement, certains Anciens avaient déjà envoyé leurs enfants protéger les cetra.
Aérith sortit de la maison, en uniforme d'Avalanche, ses cheveux attachés serrés pour ne pas la gêner au combat. Elle remonta son sac sur son dos, accepta son sceptre des mains de sa mère et déposa un dernier baiser sur les joues de ses parents avant de bondir vers ses amis. Elle gratifia Riku d'un baiser sur le front et d'une rapide étreinte.
"Tu dormiras dans ma chambre," déclara-t-elle.
"Ok," soupira Riku.
"Bonjour Vincent, bonjour Zéphyr," déclara Ifalna en approchant, suivie de Gast qui semblait prêt à partir au travail, sirotant une dernière tasse de thé.
"Ifalna, Gast" salua Vincent.
"On échange les enfants ? " plaisanta Gast.
"Merci de vous occuper de Riku," déclara Vincent, une main sur l'épaule de l'adolescent.
"J'ai toujours voulu un fils en plus d'Aérith."
"Prenez soin d'elle," ajouta Ifalna avec un petit soupir.
"Promis," répondit Zéphyr.
L'expression soucieuse d'Ifalna s'approfondit et elle sembla prête à dire quelque chose pendant quelques minutes avant de secouer la tête, posant sa main sur le bras de Zéphyr.
"Toi aussi, sois prudent."
"Maman, je serais avec lui, ne t'inquiète pas," déclara Aérith. "Qu'est-ce qui pourrait lui arriver ? "
"L'équipage du Haut-Vent," intervint Vincent.
"Ah. Non. Là, sur ce coup, il est tout seul," admit Aérith, le tout sous le regard intrigué de Séphiroth.
"Sois sage avec Ifalna," ajouta Séphiroth.
"Il n'aura pas le choix," marmonna Gast dans sa barbe.
Séphiroth gratifia Riku d'une dernière étreinte. L'adolescent se laissa faire, serrant son père contre lui et resta un moment silencieux, une main sur son ventre.
"Papa ? " murmura-t-il, à la surprise de la famille Falmis.
Séphiroth ne s'y habituait pas encore. Chaque fois que Riku l'appelait comme ça, il avait l'impression…
Il ne savait pas. C'était comme si son torse s'ouvrait et que son cœur était soudain à la vue de tous.
Comme quand il avait retrouvé Rufus et Umbra à son retour de Wutaï.
"Oui, Riku ? "
"Tu… fais gaffe, hein ? "
"Promis."
"Ifalna, je crois qu'il faudra que tu parles à Riku de votre héritage," murmura Vincent.
"Je le crains, oui…" soupira Ifalna.
Riku finit par lâcher son père et s'approcha d'Ifalna qui passa un bras autour de ses épaules, laissant les deux hommes escorter Aérith au fourgon.
"Vous ne me quitterez pas du voyage, hein ? " ronchonna la guérisseuse en grimpant dans le fourgon.
"Les Strife non plus," confirma Zéphyr.
"On leur laissera la garde de nuit," ajouta Vincent.
Les dit Strife accueillirent Aérith avec leur enthousiasme habituel et prouvèrent leur qualité de gardes du corps en l'asseyant d'autorité entre eux, Cloud gratifiant même Séphiroth d'un regard noir au passage.
"Je n'ai pas compris l'allusion au fait que l'équipage du haut Vent serait un danger pour moi ? " reprit Zéphyr en mettant sa ceinture de sécurité.
"Oh, ils vont le manger vivant," ricana Zack.
Séphiroth mit un pied dans le Haut Vent.
Et se fit immédiatement siffler par au moins trois personnes différentes[1].
"C'est la raison précise pour laquelle je préfère avoir les cheveux devant les yeux," soupira Séphiroth à l'attention de son père qui le suivait.
"Au moins, j'aurais la paix," rétorqua Vincent.
"Pas de panique," intervint Edgar en descendant l'escalier de la coursive, "je suis casé, je regarde juste le menu."
"Zéphyr," présenta Vincent, "voici le chef-mécanicien du Haut Vent, Edgar."
"Edgar Roni Figaro, enchanté," déclara Edgar en tendant la main au SOLDAT. "Zéphyr, c'est ça ? "
"Le père de Riku," ajouta Vincent pendant que Séphiroth obtempérait, serrant la main tendue avec délicatesse.
"Ah, je me disais qu'il y avait une ressemblance. Vous êtes frères, donc ? "
"Famille compliquée. Disons oui, par souci de simplification."
Par moment, Séphiroth était abasourdi par la façon dont son père parvenait à cacher la vérité sans mentir ouvertement une seule fois. Lui n'avait jamais su faire, Hojo avait toujours su quand il ne disait pas la vérité.
Basch aussi.
"Le petit n'est pas là ? " continua Edgar en cherchant Riku du regard.
"Pas aujourd'hui."
"ED ! " brama Cid du haut de la coursive, "rassemble tout le monde au poste de commandement ! "
"Oui, Capitaine ! " répondit Edgar avant de s'excuser et se diriger vers le micro le plus proche, enfonçant son bouton du pouce. Tout le monde en salle de commandement, je sais pas qui a fait une connerie mais le Capitaine veut nous parler !
"C'est pas moi ! " répondit la voix de Gippal venant de l'armurerie.
"Je n'ai même pas commencé ! " protesta Balthier, suivant Fran qui rangeait des outils à sa ceinture.
Elle leva les yeux, vit Vincent et à sa grande surprise, vint déposer un baiser sur sa tempe avant de se tourner vers Séphiroth, hésitant brièvement avant d'incliner respectueusement la tête.
"Ok," marmonna Balthier, "vous, vous êtes adopté," déclara-t-il en se tournant vers Vincent, "mais lui, à part être encore plus canon que vous, je vois pas ce qu'il a fait pour mériter ça."
"Viens," murmura Fran en prenant Balthier par la main.
"Attends ! Laisse-moi tenter le coup ! "
"Li estas la patro de Riku," ajouta Fran.
"Han ? " rétorqua Balthier. "Vous êtes le père du petit ? "
Séphiroth n'étant pas aussi doué en mensonge que son père, il se contenta de marmonner une réponse évasive.
"Longue histoire. Zéphyr Hamasaki."
"Balthier Strahl, enchanté, il y a une madame Hamasaki ? "
"Non," répondit Séphiroth, perplexe.
"Parfait ! " renchérit le jeune homme, "vous êtes libre donc ? "
Séphiroth jeta un regard décontenancé à son père qui se contentait d'assister à l'échange, impassible.
Mais Séphiroth ne pouvait s'empêcher de le trouver amusé. Pourtant son expression était toujours aussi neutre que d'habitude, comment…
Mana.
Il aurait dû demander à Ifalna comment se blinder pour ne pas ressentir les émotions des autres.
"Par curiosité : Ce genre d'approche fonctionne ? " demanda son père.
"L'honnêteté brutale ? Plus qu'on ne le pense," rétorqua Balthier.
"BALTH, FRAN ! " tonna la voix de Cid.
"Allons-y," reprit Fran, saluant une dernière fois Séphiroth avant d'entraîner Balthier après elle.
Séphiroth les regarda s'éloigner avant de se tourner vers son père.
"Ils sont… toujours comme ça ? "
"Le meilleur équipage d'aéronef d'Estérie," précisa Shera en approchant, suivie d'un jeune homme blond et borgne, "mais les pires couillons que je connaisse."
"D'Estérie, seulement ? " rétorqua Gippal.
"Je proteste," continua un adolescent en passant à côté d'eux, tenant une jeune fille aux cheveux rose par la main.
"C'est vrai, notre réputation est sans frontière," confirma celle-ci par-dessus son épaule.
Vous bougez vos culs à la salle de commandement, oui ? reprit la voix de Cid dans l'interphone.
Le navigateur arriva bon dernier, son casque toujours autour du cou, à temps pour entendre les joyeuses spéculations au sujet de Zéphyr.
"Qu'est-ce que j'ai raté ? " demanda-t-il en passant entre ses collègues qui s'écartèrent obligeamment, lui ouvrant le passage.
"Un putain de canon ! " s'exclama Balthier, "grand, brun, baraqué, sexy et augmenté ! "
"Tout à fait votre genre, Capitaine, pourquoi vous ne lui avez pas sauté dessus ? " demanda Edgar.
"C'est le frère de Vincent ! " protesta Cid en guidant leur aîné vers une chaise d'une main sur le coude.
"Ah, bas les pattes, c'est ça ? " déclara Balthier.
"C'était un SOLDAT," rétorqua Cid avant de se placer à l'extrémité de la table, Shera à sa droite, Maître Cid à sa gauche.
"Comme si ça allait les arrêter," rétorqua sa sœur avec un soupir.
"Bon, calmez-vous maintenant ! J'ai à vous parler sérieusement ! "
L'équipage se tourna vers leurs capitaines, se préparant à écouter aussi sagement qu'ils en étaient capables.
"On va à Golmore. Une attaque de squames est pressentie dans ce coin."
L'équipage perdit immédiatement sa bonhomie et son enthousiasme, reprenant leur sérieux en écoutant leurs capitaines. Balthier jeta même un regard alarmé à Fran qui ne releva pas, restant aussi impassible qu'à son habitude.
"Il y a des chances que ça tourne à la bataille rangée au sol," continua Cid, "si vous préférez vous abstenir et rester à Midgar, je comprendrais."
"D'ailleurs, Luca et Mustadio resteront ici," ordonna Shera.
"Mais, Capitaine ! " protesta le jeune homme.
"Votre contrat d'apprentissage stipule bien que vous ne devez en aucun cas être déployé au front. Vous restez ici," continua Shera sans s'émouvoir.
Luca voulu protester à son tour, mais son tuteur posa la main sur son bras.
"Luca. Obéit."
"Maître Cid…"
"Shera a raison. Vous êtes tous les deux d'excellents mécaniciens, mais pas des soldats. Vous n'avez pas à vous battre sur le front."
"Mais vous avez besoin de moi pour les communications et…"
"Qui t'as appris tout ce que tu sais ? " rétorqua le vieil homme d'une voix ferme.
Luca rougit d'embarras et baissa les yeux, tortillant ses doigts sur la table usée.
"Je suis désolée," finit-elle par murmurer.
"Ce n'est rien," répondit son tuteur d'un ton plus doux.
"Vous vous tournerez pas les pouces pour autant," ajouta Cid, "vous irez à la Tour Shinra, Jessie installe un poste d'opération là-bas, et on aura besoin de quelqu'un au micro vingt-quatre heures sur vingt-quatre. Elle vous formera aux procédures et vous l'aiderez."
"Oui, Capitaine," répondit Mus, bien que d'un ton déçu.
"Vous autres, que faites-vous ? " demanda Cid.
Balthier tourna la tête vers sa femme, donnant une petite tape affectueuse sur sa cuisse pour attirer son attention.
Fran lui jeta un petit regard, puis tourna les yeux vers leur Capitaine avant d'hocher la tête.
"Fran," commença Balthier avant de changer de langue, passant dans son alexandriote natal, "tu es sûre ? C'est Golmore…"
"Le Capitaine a besoin de moi."
"Okéééé," murmura Balthier en posant sa main sur ses reins, juste au-dessus de sa queue, l'orientant vers un coin de la pièce, "quelques minutes, Capitaines et je réponds à votre question ! Maintenant, crache le morceau, Fran."
"Elle ne lui avait pas dit," constata Cid avec un soupir.
"Nope," confirma Shera sur le même ton.
"Il y a un problème avec Fran ? " demanda Edgar d'un ton inquiet.
"Golmore est la patrie des viéra."
Edgar inspira longuement, portant ses mains jointes devant sa bouche avant d'arriver à parler d'une voix calme.
"Cid. Bordel."
"Je sais," rétorqua Cid, "si nous pouvions nous en passer, je le ferais. Mais nous devons négocier avec les viéras et…"
La voix de Balthier tonna soudain dans la pièce et tout le monde se tourna vers le couple qui se tenait à distance.
"Ne… Ne, ne, ne, NE ! Capitaines on reste ici ! " s'exclama-t-il en se tournant vers eux, étant aussitôt ramené face à Fran par la main de la viéra qui commença à murmurer à son oreille d'un ton ferme.
"Capitaine," reprit l'autre Cid.
"Elle ne sera jamais seule là-bas," gronda Cid. "Que ce soit moi, Vincent ou quelqu'un d'autre d'Avalanche."
Balthier soupira rageusement, jetant un regard à Fran qui hocha la tête.
"Ou moi," ajouta Balthier.
"Ou l'un d'entre nous," trancha Edgar. "Je viens."
"Pareil," renchérit Gippal, "Maître Cid ? "
"J'en suis," répondit le navigateur.
"Ta fille va me tuer," soupira Cid.
"Alors on ferait mieux de partir avant qu'elle l'apprenne."
Séphiroth acheva de s'installer dans ce qui était la cabine d'un des deux apprentis. Il n'avait pas grand-chose avec lui de toute façon. Masamune, toujours cassée, ses matérias, un uniforme de rechange, fourni par une Elmyra très fière d'avoir réussi à en trouver à sa taille, des affaires de toilettes.
Son PHS, qui chargeait sur la prise près du lit.
Quelques dossiers d'Avalanche qu'il n'avait pas encore fini de lire.
Et c'était tout.
Il observa le lit d'un regard critique. Il détestait les meubles standard, surtout maintenant qu'il était, de l'avis de tous, y compris du sien, un géant. La couchette était trop courte pour lui et aurait même été étroite pour quelqu'un de taille moyenne, il ne pourrait probablement pas dormir sur le côté.
Heureusement, dormir par terre ne le dérangeait pas.
Attention tout le monde, on décolle, posez vos culs et gardez-le sur votre siège tant que je vous ai pas donné le feu vert !
Séphiroth obéit à la voix de Cid, s'asseyant sur sa couchette et prêt à subir le décollage de l'aéronef.
Qui se passa, de manière surprenante, tout en douceur. Séphiroth avait suffisamment de vols en atomos sous la ceinture pour craindre le pire, mais Cid était visiblement un pilote d'exception. Il ne serait peut-être même pas nauséeux cette fois.
Une fois en vol et le Capitaine ayant donné l'autorisation de se déplacer, sauf dans mes putains de moteurs, oui, toi aussi, Vince, fin de citation, Séphiroth put sortir explorer un peu le Haut Vent.
Il n'avait pas vu les nouveaux aéronefs du département aéronautique construits, seulement les plans et les maquettes pendant les présentations, et il devait admettre que l'engin était impressionnant. Il regrettait de ne pas avoir vu le Blackjack achevé, peut-être qu'il pourrait demander à Cid si…
"Place ! "
Séphiroth s'aplatit contre le mur de l'escalier qu'il descendait, laissant un membre de l'équipage dévaler les marches quatre à quatre, quelque chose d'électronique à la main.
Le blond borgne. L'Al Bhed. L'amant du docteur Highwind. Gippal avait dit les autres.
Séphiroth était habitué à un environnement multiculturel, mais même chez les SOLDATs, il n'y avait pas eu d'Al Bhed. Lors de la sélection des candidats pour le projet SOLDAT, les troopers faisant partie de ce peuple avaient fermement refusé la procédure mako et tous disparus du jour au lendemain. Le service de la protection publique avait parlé de désertion en masse, mais certains avaient été retrouvés parmi les pupilles de la Shinra lors de l'ouverture du Tambour.
Séphiroth craignait qu'ils soient toujours sur Sin.
S'ils étaient encore en vie.
Il arriva au pont supérieur et s'esquiva à nouveau quand la princesse traversa rapidement devant lui, une main plaquée sur la bouche, suivie par son père qui semblait…
-amusé, dépité, inquiet inquiet inq-
Il sentit la main d'Aérith sur son bras et ne sursauta presque pas.
"Tu sais que c'est une mauvaise idée de surprendre un augmenté," déclara-t-il sans se tourner vers elle.
"Tu étais pris dans la boucle des émotions de Vincent," rétorqua Aérith, passant plus franchement son bras autour de celui de Séphiroth, posant sa tête contre son biceps.
Elle avait les mains fraîches.
Et il ne pouvait plus sentir les émotions de son père, il y avait quelque chose autour de lui qui l'en empêchait.
Sacre ?
Comparer avec ce qu'il connaissait, avait dit son père.
Ca ressemblait un peu à une barrière, mais au lieu de protéger des agressions physiques ou magiques, c'était son esprit qui était isolé.
Avec une impression de fraîcheur qu'il n'arrivait pas à ne pas comparer avec un dentifrice à la menthe.
Il sentit la sensation s'effacer un peu, comme par réflexe, Séphiroth s'y cramponna.
Comment, il ne savait pas, mais c'était comme empêcher un sort de partir ou…
Aérith le lâcha.
La sensation perdura.
Quelques secondes.
Et il perdit le contrôle, sentant la barrière s'effilocher comme un pull déchiré, se faisant presque gifler par l'inquiétude de son père.
"Je déteste ça," souffla Séphiroth en inspirant profondément.
"C'est difficile au début," admit la jeune fille en reprenant son bras, l'isolant à nouveau.
Séphiroth fronça les sourcils et baissa les yeux sur la jeune femme à ses côtés.
"Je suis arrivée à Midgar à dix ans, en n'ayant connu que l'isolement de Grand glacier," expliqua Aérith. "La première année, je n'arrivais pas à supporter la proximité d'autant de gens. J'ai mis des mois à apprendre à m'isoler."
Oh. Il n'avait pas pensé… Il avait cru qu'étant née guérisseuse, la maîtrise de ses pouvoirs lui était venue naturellement.
"C'est pour ça que je me suis accrochée à Tseng tout de suite. Il était le seul à être émotionnellement neutre de tous ceux que j'ai rencontrés."
"Tseng ? "
"Tu le sens quand il passe ? "
"Je n'ai... Je ne sais pas… contrôler ça," admit Séphiroth entre ses dents.
"Maman m'a demandé de t'apprendre. Si tu le souhaites," ajouta Aérith, le regardant d'un air plein d'espoir.
C'était plus sage. Il fallait qu'il apprenne avant de perdre le contrôle. Avant qu'il ne risque d'accidentellement manipuler les émotions de quelqu'un.
D'être pris au piège dans leurs émotions.
Est-ce que c'était ce que Rufus ressentait en permanence ?
Pas étonnant qu'il souffre autant de migraines carabinées.
"Je… Je veux juste… ne plus sentir les autres."
"On s'entrainera à nouveau tout à l'heure, d'accord ? "
Séphiroth hocha la tête doucement. Il n'avait pas le choix. Il n'aimait pas la magie de sacre, mais il ne maîtrisait rien. Aérith le gratifia d'une petite tape sur le biceps avant de s'écarter légèrement, gardant sa petite main au creux de son coude.
"En attendant : Comment sont tes compétences en cuisine ? "
"Utilitaire."
"Parfait, tu vas pouvoir nous aider ! " s'exclama Aérith en commençant à le traîner vers l'arrière du Haut Vent en direction d'une pièce qui sentait la nourriture, "tout l'équipage est occupé, on va préparer le repas ! "
Riku tomba amoureux de la serre d'Ifalna en quelques secondes. Elle l'avait persuadé de venir l'aider avec le désherbage et l'entretien de ses plantes et il était resté immobile dans la petite pièce vitrée, les yeux écarquillés, respirant le parfum de la terre et des plantes à pleins poumons.
"Pourquoi c'est encore vert ici ? " finit-il par demander en finissant par la rejoindre devant la jardinière qu'elle désherbait.
"La serre est chauffée et irriguée, ça permet de faire pousser des plantes, même hors saison," expliqua Ifalna en lui tendant son panier plein de mauvaises herbes.
"Il faut de la chaleur pour les plantes ? "
"Ça dépend desquelles," répondit Ifalna, "mais pour ces plantes-là, oui."
"Qu'est-ce qu'elles ont de particulier ? "
"Ce sont des plantes médicinales, j'en ai besoin toute l'année pour soigner les gens."
"Tu peux pas les soigner avec ta magie ? " s'étonna Riku, la regardant choisir soigneusement les pousses à arracher.
Ifalna prit quelques secondes pour lui montrer la différence entre les deux plantes et l'incita à l'aider, tout en réfléchissant à sa réponse.
Avant la disparition de Minerva, les cetra avaient pu soigner les maladies, qu'il s'agisse d'un simple rhume ou d'une maladie plus grave, mais petit à petit, leurs pouvoirs s'étaient amoindris. Il ne restait de leurs pouvoirs phénoménaux que la capacité de guérir les blessures, purifier les maléfices, entendre les voix de la Planète et sceller le mal.
C'était déjà beaucoup, et jusqu'à présent, Ifalna s'en était contenté.
Mais Riku… Il était la Voix de Minerva. Il avait soigné des amputations, fait disparaître des cicatrices, est-ce qu'il saurait faire ça ?
"Est-ce que tu peux soigner les maladies ? " finit-t-elle par demander.
"Hu," commença Riku, tirant sur une mauvaise herbe.
"Essaye d'attraper la base de la tige, sinon tu vas laisser les racines."
Il obéit, brandissant fièrement la mauvaise herbe avant de la poser dans le panier, avec délicatesse.
"Pas toujours," finit-il par admettre, "des fois ouais, quand c'est quelque chose que Hojo a fait."
"Quand c'est une maladie due à une lésion ? Une blessure ? "
"Ouais, mais quand quelqu'un est malade sans ça, ça marche pas."
"C'est normal. C'est pour cela que je fais pousser ces plantes," expliqua Ifalna, "ou que j'utilise des médicaments."
"Tu peux pas utiliser que des plantes ? " s'enquit Riku, la suivant quand elle se leva pour passer à un autre pot.
Comme son père, son grand-père et les jumeaux, Riku n'aimait pas tout ce qui était lié à la science apparemment. Surtout la biologie. Gast lui avait dit à quel point il était méfiant envers les médecins et qu'il avait fallu que Shera et lui retirent leurs blouses pour qu'il s'habitue enfin à eux.
Ifalna commençait un peu à craindre ce que ça pouvait vouloir dire.
"Elles ont leurs limites. Parfois, il n'y a rien qu'on puisse faire avec les plantes. Parfois, même les médicaments ne peuvent rien."
"Ni la magie," ajouta Riku d'un ton sombre.
"Ça fait longtemps que tu as ta magie ? "
"Laquelle ? "
"Laquelle ? " répéta Ifalna.
"La glace, j'avais dix ans quand elle est arrivée. Y'a eu la foudre après, et le feu aussi, mais ils sont arrivés plus tard, je sais pas trop les maîtriser. La glace c'est mieux, ça bouge pas dans tous les sens quand je l'utilise."
Il avait de la magie élémentaire. Minerva, un mage né avec plusieurs magies en même temps, cela devait faire des siècles que ça n'était pas arrivé.
Et il n'avait pas l'air d'avoir la maîtrise nécessaire pour se contrôler, si elle comprenait bien ce qu'il essayait de dire.
D'un autre côté, qui lui aurait appris ?
"La magie de guérison, Riku," finit-t-elle par préciser.
"Oh ! Euh, en fait je sais pas. Je crois que c'était toujours là."
"Heureusement que Hojo ne s'en est pas aperçu."
Riku laissa échapper un petit rire sarcastique, tout en arrachant une mauvaise herbe.
"Ça le mettait en rage que je sois pas le 'digne héritier de la perfection de Séphiroth'," annona Riku, imitant une voix qu'Ifalna ne reconnaissait pas mais qu'elle avait l'habitude d'entendre dans ses cauchemars.
Il s'arrêta, observant les fleurs devant lui d'un air buté.
"Quand la glace est arrivée, Garl… un des Remnants le lui a dit. Il a voulu faire des trucs sur moi."
"Comment le Remnant a sut ? "
"C'est lui qui a pris mon premier bloc de glace dans la tronche."
"Hojo ne t'as pas touché, n'est-ce pas ? " demanda Ifalna d'un ton prudent, se blindant déjà à l'idée d'entendre une réponse positive.
"Il a pas put. Haru… To-san et les parasites m'ont protégé. Et puis les triplés sont nés, Yazoo et Kadaj ont eu leur magie très vite et Hojo a déclaré qu'ils étaient les dignes héritiers des Cetra et les futurs maîtres cetra du monde. J'étais plus assez intéressant pour lui."
Ifalna n'était pas particulièrement encline à la violence. Elle préférait l'éviter tant que possible et ne pas se mêler des conflits, comme le voulait la tradition des cetra depuis la guerre contre le Fléau.
Mais là, elle se sentait presque d'humeur à gifler quelqu'un.
"Les cetra ne sont pas les maîtres du monde," finit-elle par déclarer d'un ton aussi calme que possible.
"Je savais même pas ce que c'était un cetra," admit Riku, "jusqu'à ce que 'Ji-san m'explique, je croyais que c'était un délire d'Hojo ou un type de spécimen."
"Que t'as dit Vincent ? " demanda Ifalna en se relevant, prenant doucement le panier des mains de Riku.
Riku se laissa faire et la suivit jusqu'à la table au fond de la serre, là où Ifalna rangeait ses outils, les pots vides et ses semences.
"Hu… qu'ils sont le peuple de… de l'Autre. Ses enfants. Qu'ils la servaient et suivaient ses enseignements. Et qu'ils sont tous guérisseurs."
Ifalna laissa échapper un petit rire qui intrigua son petit-neveu.
"C'est pas ça ? "
"C'est…. Réducteur, disons," expliqua-t-elle avec un petit sourire. "mais je ne suis pas étonnée. Beaucoup ont oublié ce qu'étaient les Cetra."
Elle posa le panier de côté et commença à sortir les plateaux de semences, sous le regard curieux de Riku.
Il était toujours curieux. Elle l'avait remarqué pendant le dîner de fête, à le voir regarder, fasciné, le fonctionnement de leur samovar, ou quand Gast avait allumé le chauffage, quand elle avait sorti le pain du four.
Gast avait confirmé que Séphiroth avait été pareil étant enfant, mais à voir son neveu toujours impassible et presque au garde à vous, elle avait du mal à le croire.
Même maintenant, il restait sur ses gardes autour d'eux.
Riku, lui, commençait vraiment à s'ouvrir.
"Les cetra sont les gardiens de la planète. Pas dans le sens où ils la possèdent, mais dans celui ou ils la protègent. Ils étaient le peuple de la Déesse, issus d'elle, infusés de Sacre et communiquant avec la Rivière de la Vie. Mais ceux qui s'étaient spécialisés dans le sacre guérisseur, ce n'était que la lignée Crescent. Notre lignée. "
"La lignée Crescent ? "
"Du nom de notre ancêtre."
"... Elle ? "
"Non," corrigea gentiment Ifalna. "Lui. Un hume. Le père d'un de ses enfants. De plusieurs en fait de ce que disent nos histoires."
Riku resta bouche bée quelques instants, stupéfait. Il n'avait visiblement pas fait le rapport entre les Anciens et le fait que leur peuple étaient leurs enfants.
"Il était médecin, ou guérisseur, les termes changent selon les versions, mais il était venu demander à la Déesse de lui enseigner à soigner. Elle lui aurait donné des connaissances tirées de la Rivière de la Vie et leurs descendants ont fondé la lignée Crescent."
Elle prit un des pots et le posa devant Riku avant de commencer à lui rouler les manches au-dessus des coudes.
"Il y avait d'autres lignées. Par exemple, la lignée Heavensward était des paladins, des combattants consacrés, dont le but était d'éradiquer les monstres et protéger Minerva. Ils utilisaient le Sacre comme les Crescent, mais pour se battre, non pas pour soigner."
"Où sont- ils maintenant ? "
Ifalna soupira, prenant un sac de graines pour les poser entre eux.
"La Calamité a vite réalisé que leur utilisation du sacre contre elle pouvait la blesser, ils ont été les premiers à tomber."
"Comment elle a fait s'ils étaient si forts ? "
"Elle a pris les dragons. Elle a tordu leurs esprits jusqu'à ce qu'ils ne soient plus que des animaux sauvages et elle les a lâchés sur les paladins. Ils se sont mutuellement décimés, il ne reste qu'un seul dragon, le Seigneur Bahamut."
"Et plus un seul Heavensward."
"Plus un seul," confirma Ifalna.
Pendant quelques minutes, ils gardèrent le silence, Riku l'imitant machinalement quand elle prépara ses semences. Elle pouvait presque sentir les rouages tourner à toute vitesse dans la tête de l'adolescent alors qu'il prenait conscience de l'histoire de sa famille.
"Il… y avait d'autres lignées ? " finit-il par demander.
Ifalna hocha la tête.
"Les Madain Sari. Les passeurs d'âme."
"Les quoi ? " répéta Riku.
"Est-ce que tu connais la Rivière de la Vie ? "
"Oui," répondit Riku, "c'est ce qui est puisé pour donner la mako. C'est là que vont les souvenirs et la mémoire des créatures de Gaïa quand elles meurent."
"C'est ça, en effet. Eh bien, les Madain Sari étaient capables de communiquer avec la Rivière de la Vie."
Le regard intrigué de Riku s'illumina soudain et il brandit le plantoir qu'il tenait à la main.
"Ah ! C'est ce que tu as dit au palais ! Que tu entends les voix dans la Rivière ? ! "
"C'est cela."
Et visiblement, Cloud aussi. Elle n'avait toujours pas résolu CE mystère là, mais elle soupçonnait que Vincent avait malheureusement raison et qu'Hojo s'en était mêlé.
Avec tout ça, elle se demandait comment il avait fait pour ne pas réaliser le secret des Anciens.
"Mais… T'es pas une madain sari, t'es une crescent…" reprit Riku, confus.
"Les lignées sont spécialisées, ça ne veut pas dire que nous n'avions pas tous les mêmes pouvoirs. Les Heavensward faisaient des guérisseurs médiocres, mais suffisant pour soigner une blessure au combat. Quant aux Madain sari, ils étaient réputés pour être des combattants…"
"Nul ? "
"Pacifiste."
"Ah. Pas efficace, quoi."
Ifalna hocha la tête d'un air amusé avant de continuer ses explications.
"Leur spécialité était de communiquer avec la Rivière. Ils pouvaient lui parler et la comprendre mieux que nous le pouvons, ils pouvaient extraire un souvenir des flots, appeler les pouvoirs d'un Ancien mort et parfois, ils aidaient les morts à rejoindre la Rivière de la Vie."
Riku ouvrit la bouche.
Puis la referma et resta quelques instants à murmurer pour lui-même. Un rapide regard d'Ifalna aux yeux de l'adolescent la rassura.
Pas de brillance suspecte.
La Déesse n'était pas là.
"Les histoires de Tarask sont vraies," sembla réaliser Riku.
"Tarask ? "
"Un… un pote à Maman. Chaque fois que quelqu'un mourrait à Sin, il me racontait une histoire de la Rivière de la Vie. Il disait… On naît, on vit, on meurt…"
Ifalna était un peu curieuse de savoir où le dénommé Tarask avait appris cette formule. Un descendant d'Ancien peut-être ? Ou un pratiquant du culte de Minerva ?
"Alors… les morts sont dans la Rivière ? "
"La vie est dans la Rivière," corrigea doucement Ifalna. "À la naissance, qu'on soit hume, ancien, monstre, plante ou animal, tant qu'on naît, on reçoit des connaissances de la planète. Les instincts. La magie native. Les talents, tout ça nous est distribué à la naissance. Nous vivons, nous cumulons d'autres connaissances, d'autres savoirs en grandissant, en évoluant. Nous mourrons et tout retourne à la Rivière. Et puis, quelqu'un d'autre vient au monde, avec une partie de ces instincts, de ces talents, une partie de ceux d'un autre et ainsi de suite."
Riku était bouche bée, l'écoutant en osant à peine respirer.
"Mais parfois… Parfois l'âme ne rejoint pas la Rivière," acheva Ifalna en creusant soigneusement la terre dans le pot devant elle.
"Pourquoi ? "
"Quelque chose l'en empêche. Elle peut avoir des regrets ou un sentiment d'inachevé qui l'empêche de partir et elle devient un Errant. Certains rituels peuvent aussi empêcher le départ d'une âme, comme la création d'un Fayth ou d'une magicite."
"Et... et les madain sari les aidaient ? "
"Tout à fait. Ils voyageaient pour trouver les Errants, les apaisaient et leurs offraient des funérailles appropriées après leur départ."
"Qu'est-ce qui leur est arrivé ? "
"Ils ont disparu. Beaucoup sont morts sur la Terre Fertile quand elle est devenue Grand Glacier, en essayant d'apaiser les morts du cataclysme. Ils ont tenté d'accomplir leur devoir jusqu'à la fin. Certaines histoires disent que les survivants ont fini par se mêler à la population hume et ont petit à petit perdu leur culture et leurs pouvoirs."
"Alors… il ne reste que les Crescent," murmura Riku.
"Et d'ici quelques décennies, j'espère, il n'y aura plus de cetra du tout."
Le visage de Riku prit une expression dubitative et il se montra du pouce en haussant un sourcil.
Oh, Minerva. Il était adorable. Elle avait décidé après la naissance d'Aérith qu'elle n'aurait plus jamais d'autres enfants, pour ne pas fournir de chair à canon à Hojo, mais elle regrettait soudain un peu cette décision.
Dans un autre monde, elle aurait rempli leur maison d'enfants aux yeux verts, de cris, de chamailleries, Aérith aurait eu une pelletée de frères et sœurs avec qui elle aurait lentement rendu Tseng et les Turks fous.
C'était trop tard maintenant.
"Je suis la dernière cetra vivante. Aérith est à moitié humaine, comme ta grand-mère l'était. Même si ton père et toi engendrez des dizaines d'enfants, le sang cetra, leurs pouvoirs, se dilueront petit à petit. Ils s'éteindront comme les Madain Sari. Petit à petit, paisiblement."
"T'es… pas triste ? "
Ifalna essuya ses mains sur son tablier avant de se tourner vers Riku, pour lui caresser doucement la joue.
"Non. C'est l'ordre naturel des choses. Rien n'existe pour toujours. Les mauvaises herbes que nous avons arrachées aujourd'hui fertiliseront d'autres plantes que nous consommerons. Un jour, nous serons morts, toi et moi et nos corps nourriront plantes et créatures, nos âmes en formerons d'autres et le cycle recommencera."
"On naît, on vit, on meurt," murmura Riku.
Il resta longtemps silencieux, effritant du terreau entre ses doigts avec une expression pensive, digérant la découverte de ses origines.
Bon, elle n'avait pas vraiment eu l'intention de parler de sujets aussi lourds avec Riku, mais l'adolescent avait semblé étonnement ouvert à cette discussion et elle en avait profité.
Aérith avait eu cet âge quand elle lui en avait enfin parlé, pour l'aider à accepter la mort et les tragédies autour d'elle. La disparition des jumeaux par exemple, que ni elle, ni Ifalna n'avaient pu percevoir sur Gaïa, les croyant tous deux morts.
Mais c'était peut-être un peu… beaucoup. Et tragique. Ifalna ouvrit un sachet de graines et en prit une, prenant le plantoir des doigts de Riku avant d'enfoncer la graine dans son pot.
"Mais il y a un pouvoir que nous n'avons jamais perdu," déclara-t-elle.
"Lequel ? "
Ifalna lui sourit gentiment et attrapa les mains de Riku, déjà aussi grandes que les siennes, les posant sur le pot. Elle mit ses mains par-dessus et lui fit signe de fermer les yeux.
Il obéit.
Il sentit les mains fraîches d'Ifalna, la magie de sacre sur les siennes, mais ce n'était pas comme pour la guérison, ce n'était pas quelque chose qui entrait sous la peau, cherchant les plaies et les blessures pour les soigner.
Elle appelait.
"Rouvre les yeux."
Riku obtempéra.
Une pousse verte pointait entre ses doigts. Il retira ses mains lentement, estomaqué, observant les petites feuilles fragiles.
"Voilà ce que nous pouvions tous faire. Les Heavensward, les Madain Sari, les Crescent."
Riku effleura doucement la pousse du bout des doigts, fasciné par sa fragilité.
"Nous sommes les gardiens de Gaïa. Nous la protégeons, l'entretenons et l'ensemençons pour que le cycle de la renaissance ne s'arrête jamais."
"Ça… ça, je crois que j'aime bien," murmura Riku.
"Est-ce que tu veux en apprendre plus ? "
Riku leva les yeux vers elle, hésitant avant d'hocher la tête.
"Alors je vais t'en parler tout en finissant les semences, d'accord ? "
"Ouais ! "
Les jumeaux étaient déjà dans la cuisine du Haut Vent et Séphiroth hésita à entrer, mais Aérith ne lui en laissa pas le loisir, l'entrainant à sa suite.
Le Strife brun était en train de faire chauffer de l'eau, son frère était affalé sur la table visée au sol, la tête sur ses bras croisés et le lion de cosmo couché sur ses pieds, sous sa chaise.
"Oh, Cloud," soupira Aérith en lâchant Séphiroth pour caresser les cheveux du blond qui laissa échapper un gémissement misérable.
"Mettez-moi un sort de sommeil," réclama-t-il.
"Essaye au moins un thé au gingembre d'abord," rétorqua son frère en tendant une boite à thé à Aérith, "Mamour ? "
La jeune fille l'ouvrit et la lui tendit à nouveau et il la remercia d'un baiser avant de retourner à sa préparation du thé, jetant de temps en temps des regards qu'il devait croire discrets à Séphiroth.
"Qu'est-ce qu'il a ? " demanda Séphiroth.
"Mal des transports dès qu'il est pas à pinces ou sur un chocobo," répondit Zack en remplissant un mug de métal d'eau chaude pour y plonger le sachet de thé.
Cloud s'était vivement redressé en entendant la voix de Séphiroth mais grimaça presque aussitôt et s'effondra de nouveau en avant en gémissant.
"Ou au volant," ajouta Aérith en reprenant ses caresses sur le crâne de Cloud.
"Et on est tous les deux interdits de conduire le fourgon, encore moins le Haut Vent" ajouta Zack en posant la tasse près de Cloud.
"Trois," corrigea Séphiroth, "le lieutenant m'a informé que je n'étais plus autorisé à conduire un des véhicules d'Avalanche tant que je n'ai pas passé le permis en bonne et due forme."
"Je vais à l'infirmerie," déclara soudain Cloud en se levant, emportant sa tasse avec lui.
"Je te suis," déclara le lion en rampant sous la chaise avant de pouvoir se lever.
"Attends, je…" commença Zack.
"Nan, reste avec Aérith, je vais juste dormir de toute façon," rétorqua Cloud avec un regard entendu en direction de Séphiroth.
Aérith jeta un regard désolé à Séphiroth une fois que Cloud soit ressorti avec Nanaki, fermant la porte derrière eux. Elle faisait des efforts pour tenter d'arrondir les angles entre eux, il le voyait bien, mais les Strife étaient encore réfractaires à sa présence.
Surtout le blond.
"Je suis désolée," finit par dire Aérith.
"Aérith…" commença Séphiroth , "il… il ne va pas… ce que j'ai fait à Mademoiselle Lockhart…"
"Tu t'en rappelle vraiment pas ? " demanda l'autre Strife tout en préparant une autre tasse de thé.
Séphiroth hésita à répondre mais…
Le Directeur Tuesti avait dit qu'elle était l'amie d'enfance des Strife.
Il lui devait probablement des excuses à lui aussi. Ou au moins des explications.
"Non. Juste…"
Cette fois, les yeux du Strife se posèrent franchement sur lui, le fixant de l'intensité habituelle des SOLDATs, sans une seule trace de la bonhomie habituelle du jeune homme.
"Juste…" reprit Séphiroth, cherchant ses mots. "Après que Strife… que votre frère… après qu'il m'ait…"
Il passa la main sur son ventre, là ou la fine cicatrice entourant son abdomen.
"J'ai repris conscience, quelques minutes… Je ne sais pas pourquoi, la…Jénova a dû penser que j'étais… trop blessé pour être utile…"
Il sentit la main d'Aérith sur son coude et la magie de sacre se déployer.
Oh, c'était comme quand Ifalna l'avait calmé après sa dispute avec Rufus.
Il n'avait pas le choix que d'être calme.
Il se dégagea aussi doucement qu'il put.
"Il… empêchait les moissonneurs d'emporter la dépouille de Mademoiselle Lockhart. Il l'a… Il a dû trancher son corps pour… pour ne pas qu'ils..."
La tasse se froissa dans la main du Strife comme si elle avait été faite de papier aluminium. Aérith porta les mains à sa bouche, horrifiée.
"C'est… Cloud qui l'a…" reprit l'augmenté d'une voix blanche.
"Vous l'ignoriez ? "
"Il n'a jamais… il n'a rien dit. J'ai toujours cru que c'était toi qui…"
"Zack," souffla Aérith.
"Putain," marmonna Zack en posant la tasse froissée sur le plan de travail avant de passer ses deux mains dans sa crinière, "putain, tu m'étonnes qu'il ait…"
"Strife, je suis..."
"Ouais, ouais je sais, je sais," rétorqua le brun d'un ton rogue avant de grimacer. "Je veux dire… Putain, c'est pas ta faute."
Il jeta un regard dépité à la tasse avant d'ouvrir un placard et en sortir d'autre, servant à nouveau du thé, de geste plus délicat cette fois.
"Il a foutu ta vie en l'air autant que les nôtres, si pas plus…"
Quand Séphiroth était arrivé à Wutaï, il avait réalisé que sa vie au laboratoire n'était pas normale.
Il avait subi les lubies et les expériences d'Hojo depuis son enfance, il ne s'était jamais rebellé malgré la douleur, la détresse, la peur. Hojo avait été tout-puissant et il n'aurait jamais osé lui tenir tête, ne serait-ce que pour que Rufus et Umbra soient épargnés.
Mais il avait cru que c'était… normal. Que c'était comme ça que les pères traitent leurs enfants.
Et il avait rencontré les SOLDATs. Basch, Vossler, Reks, Vaan et les autres.
Ceux qui l'avaient vu, qui avaient remarqué le tatouage sur son poignet, qui avaient écouté ce qu'il disait sur Hojo, sur le laboratoire et qui avaient été les premiers à lui dire non, ce n'est pas normal.
Les premiers à reconnaître que ce qu'il avait vécu n'aurait jamais dû arriver et qu'il avait besoin d'aide.
Les premiers à lui dire qu'ils le protègeraient si jamais Hojo s'approchait à nouveau de lui.
Les premiers auxquels Séphiroth s'était désespérément raccroché comme modèle pour être humain.
Et les premiers qu'il avait tenu à bout de bras quand Hojo s'en était pris à eux pour le récupérer.
Strife lui tendit une tasse.
Il la prit.
"Merci, Strife."
"De rien. Sucre ? "
"Vas-y, Jessie," s'exclama Gippal.
Barret jeta un regard abasourdi à l'installation de l'Al Bhed dans l'armurerie. Cid lui avait demandé de préparer un relais pour les modules et le poste de commande de la Tour et l'artificier avait accepté le défi avec joie.
L'ordinateur assemblé en bout de table était étrangement déstructuré, étalé partout, ses composants apparents, des câbles répandus un peu partout et la seule chose normale que Barret reconnaissait, plus habitué aux machines de Jessie, c'était le clavier et la souris posés devant l'Al Bhed.
Il n'était pas sûr que Gippal les utilisaient vraiment en fait, même s'il avait une main sur chaque.
L'écran scotché au mur s'alluma. Jessie apparut, les deux apprentis penchés par-dessus ses épaules.
/Ça marche !/ s'exclama Luca.
/Salut Gip !/ ajouta Mus.
/Gippal, si ce truc tient jusqu'au bout, on dépose le brevet !/ renchérit Jessie.
"Quoi, jouer à saute-mouton avec les fréquences pour rester en contact même sans ligne directe ? " rétorqua Gippal, "Jessie, je faisais ça sur le bateau de mon père quand j'étais pas plus haut que Luca."
/Va chier ! /s'exclama l'apprentie.
"Luca, surveille ton langage, tu vas choquer Barret," ricana Cid.
"C'est de ta faute ? " marmonna Barret avec un regard torve au Capitaine du Haut Vent.
"Le langage des apprentis est notre faute commune," admit Gippal.
/De notre côté, on est paré,/ reprit Jessie,/ qui gèrera les coms sur le Haut Vent ?/
"Gip et Cid ont été désignés volontaires," répondit Cid.
"On a du neuf pour l'opération de protection de Golmore ? " demanda Barret.
Les deux apprentis grimaçèrent de concert tandis que Jessie soupirait.
/Le Président essaye de convaincre Fort Condor, Bevelle et l'Archipel de nous soutenir, mais on manque de preuve tangible. Il faudrait la version des viéra pour les persuader que ce n'est pas une invasion militaire en bonne et due forme,/ ajouta Jessie.
/J'espère que Fran va arriver à les convaincre,/ ajouta Mustadio.
/Elle va bien ? /s'inquiéta Luca.
"Fidèle à elle-même," répondit le Capitaine.
/C'est pour ça que Reeve part dans une heure pour Fort Condor, /ajouta Jessie avant de retirer précipitamment son casque.
"QUOI ? " s'exclamèrent d'une même voix Cid et Barret, faisant sursauter leur opératrice et les deux apprentis.
/J'ai cru entendre Papa en stéréo,/ marmonna Mustadio.
"Seul ? ! " continua Barret sans même s'émouvoir de la remarque de Mustadio.
/Presque, Rude part avec lui. Elena et Tseng restent protéger le Président,/ expliqua Jessie en remettant son casque.
"Et pourquoi il part là-bas ? " ajouta Cid en soupirant.
/Fort Condor a fermé son espace aérien et il y a des rumeurs comme quoi ils veulent quitter l'alliance./
/Il faut prévenir Maitre Cid, Capitaine !/ ajouta Luca, /le plan de vol qu'on a prévu hier n'est plus valide !/
"Putain, je m'en charge," marmonna Cid en se détournant pour sortir.
"Pourquoi Reeve ? " entendit-t-il Barret continuer.
/Parce que c'est lui ou Palmer ?/ rétorqua Jessie.
Cid dû admettre que n'importe qui d'autre serait plus apte à la diplomatie que Palmer.
Bordel, si Fort Condor essayait de se désengager de l'Alliance, ça allait faire un gros trou dans la défense de l'Estérie, juste au moment où Sin pataugeait dans le coin.
Il fallait qu'il prévienne Vincent aussi, et qu'il le laisse utiliser les communications du Haut Vent pour contacter Hel.
Putain depuis quand ils étaient passé de petite unité locale dépassée par les évènements à acteur majeur de la lutte contre Hojo ?
Il se dirigeait vers le poste de pilotage quand il avisa une silhouette perchée sur la passerelle qui donnait au-dessus de la salle des machines, assise près de sa boîte à outils.
Fran.
C'était bien la première fois qu'il voyait sa mécanicienne favorite (après Shera) rester les bras ballants au lieu de les avoir jusqu'aux coudes dans les entrailles de l'aéronef.
Elle était assise au bord d'un des chemins d'acier, accoudée aux barreaux les plus bas du garde-fou, les pieds pendant dans le vide.
Elle était pieds nus, comme d'habitude, mais la forme de ses orteils- digitigrade, avait dit Shera un jour - ainsi que la taille de ses griffes, l'empêchaient d'utiliser des chaussures humes[2].
En hiver, les chaussettes épaisses et informes étaient un de ses cadeaux favoris de la part de l'équipage.
Toutefois, avec la chaleur qui régnait dans la salle des machines, elle avait abandonné sa veste et ouvert le haut de sa combinaison de mécanicienne, dévoilant son soutien-gorge en dentelle noire.
Ca, c'était probablement un cadeau de Balthier.
Cid vit une de ses oreilles bouger dans sa direction avant qu'elle se tourne vers lui, l'observant sans un mot.
"Je peux te parler ? " demanda-t-il à voix basse.
Elle ne répondit pas tout de suite, réfléchissant avant d'hocher la tête et reprendre sa position initiale.
Les premières semaines à la connaître, Cid s'était demandé si elle comprenait bien le commun, à la voir toujours réagir après un temps de pause, à réfléchir longuement avant de parler, quand elle se décidait même à parler.
Elle n'était jamais impulsive, les seuls moments où Cid la voyait réagir vivement, c'était quand elle se battait ou qu'elle tirait à l'arc.
Ou quand elle approchait d'une pyroluciole.
Même sur le front, au plus fort des batailles, elle était restée tête froide, opérant des réparations d'urgence en plein vol avec un flegme que lui aurait envié beaucoup de soldats aguerris.
Il vint s'accroupir à ses côtés, posant un genou à terre.
"Je vous présente mes excuses," commença-t-elle.
"Y'a pas besoin."
"Madame Falmis m'a dit que le père des cauchemars a la clef du Temple," déclara-t-elle de sa voix calme. "si j'avais plus parlé de Golmore, vous auriez…"
"Tu n'as probablement pas le droit d'en parler aux étrangers, n'est-ce pas ? " coupa Cid.
Elle secoua lentement la tête.
"Je m'en doutais," souffla Cid.
Elle le regarda longuement, ses oreilles frémissantes, avant de reprendre, baissant les yeux vers les machines sous ses pieds.
"Comment ? "
"Pour les mêmes raisons que je ne peux parler des secrets de Burmécia."
Elle cligna des yeux, ce qui, pour elle, était un sursaut de surprise.
"Oh."
Et ça, c'était un cri d'étonnement.
"Qu'est ce qui va se passer si tu retournes là-bas ? "
Elle inspira longuement et expira tout aussi longuement, sans parvenir à se détendre totalement.
"Je ne sais pas," finit-t-elle par avouer.
"Tu seras en danger ? "
Elle secoua la tête. Puis se ravisa et commença à hocher avant de soupirer à nouveau.
"Je l'ignore. Les viéras ne doivent pas quitter le Bois."
Elle s'accouda à nouveau aux barreaux du garde-fou, les griffes de ses mains cliquetant sur le métal.
"Et celles qui partent… ne reviennent jamais."
"Mais tu es partie," reprit Cid.
"Le Bois est grand. Mais il était trop petit pour moi."
Elle leva les yeux, vers le plafond de la salle des machines, regardant quelque chose qu'elle seule pouvait voir, plongée dans ses souvenirs.
"Même les arbres les plus grands n'étaient pas assez hauts."
Elle glissa un regard à Cid qui se laissa observer.
"Je voulais voler," souffla Fran.
Cid lui sourit.
"C'est pas moi qui t'en empêcherait, Fran."
Il fut récompensé par un sourire qui dévoilait ses crocs effilés comme des aiguilles et ses incisives pointues.
"Tu fais partie de mon Vol, Fran," répondit Cid, "tu sais ce que ça veut dire ? "
"Nous volons ensemble."
"Ouais. Nous volons, nous combattons, nous vivons ensemble. Et si une seule viéra vient te chercher des puces, elle devra d'abord trouver les miennes."
Fran hocha doucement la tête avant de se pencher vers Cid, posant son front sur son épaule.
"Pourquoi faut-il que vous soyez homosexuel ? " soupira-t-elle.
"Si j'étais hétéro, on ne quitterait probablement jamais la chambre assez longtemps pour voler, Fran," rétorqua Cid avant de déposer un baiser sur son crâne, profitant que, pour une fois, il était plus haut qu'elle, "allez, faut que je parle à Cid et que je relève Balthier, histoire que vous tentiez une nouvelle approche de Zéph."
"On peut ? "
"Tact, doigté et délicatesse et s'il dit non, vous lui foutez la paix ! "
"Oui, Capitaine."
Vincent était en train de lire, adossé au mur près du lit de la cabine du Capitaine, Cid lové contre sa cuisse, quand la voix de Balthier sortit du hautparleur de la cabine.
Debout tout le monde, nous arrivons à Golmore, la température est bien trop chaude pour la saison et les arbres sont verts, ce qui n'est pas normal, bienvenue dans un nouvel épisode de la quatrième dimension avec Avalanche.
"Balthier a l'air contrarié," nota Vincent.
"Il aime pas savoir Fran en danger," répondit Cid avant de s'étirer et ouvrir les yeux.
Vincent baissa le regard vers son amant, glissant ses doigts dans ses cheveux pour les réordonner. Ça repoussait, nul doute que dès que Cid allait retrouver où Shera cachait la tondeuse, il allait à nouveau tenter de se raser le crâne. Et cette fois, Vincent aiderait Shera à l'en empêcher.
"Elle l'est ? "
"Peut-être. Peut-être pas. Elle a fait le même coup à sa tribu que nous."
"Partir sans prévenir ? "
"Yup," répondit Cid avant de repousser la couverture et s'asseoir au bord du lit, cherchant ses habits du regard.
"Je vois."
"Vince ? "
Vincent referma son livre avant de se tourner à nouveau vers Cid, qui le regardait par-dessus son épaule.
"Je sais que… Fran et Balthier te dérangent un peu avec leurs avances, mais… Garde un œil sur elle, s'il te plait."
Vincent se glissa jusqu'au bord du lit, s'asseyant près de Cid avant de déposer un baiser sur la cicatrice sur sa tempe.
"Je fais partie de son Vol, elle fait partie du mien."
Le reste de l'équipe était déjà rassemblé dans le poste de pilotage, observant Golmore d'en haut, quand Vincent et Cid les rejoignirent.
"Qu'est-ce qu'on a ? " demanda Cid.
"Je crois qu'on voit le temple," déclara Barret en se poussant de devant la verrière, désignant la forêt.
Vincent approcha, observant l'île devant eux.
Elle était immense, aussi grande que la région de Midgar. Une chaîne de montagne au nord-est coupait l'accès au reste de l'Estérie, mais le reste de l'île n'était que savanes et plaines désolées, sans même un village ou une cabane à portée de vue.
En fait, la jungle semblait posée par-dessus, comme un énorme champignon de verdure.
Et en son centre, cerné de toute part par les arbres qui le surplombait, un temple s'élevait, similaire en taille et en forme à celui du Cap de l'Espoir.
"Discret," nota Zack.
"Vu la taille des arbres, on ne doit pas le voir du sol," objecta Barret.
"Heureusement, Hojo n'a pas donné d'ailes à Sin," ajouta Yuffie.
"Kadaj peut voler," intervint Zéphyr.
"Et même sans ça, les Moissonneurs bondissent comme des sauterelles," ajouta Cid, "Fran ? "
La viéra se détourna des réglages sur le poste de commande, regardant son capitaine.
Il faisait aussi chaud à Golmore qu'il avait fait à Gongaga, elle avait abandonné sa combinaison de mécanicien et était vêtue d'un de ses shorts qui dévoilait ses longues jambes et d'un bolero qui, à contrario, couvrait le haut de son dos, une natte épaisse achevant de cacher les brûlures qui dépassaient de son col.
Habituellement, Fran se souciait peu de qui pouvait voir ses cicatrices, mais cette fois, pas un centimètre n'apparaissait.
"Tu sais où on peut se poser, ou il va falloir utiliser l'échelle pour descendre ? "
"Non. Les viéra tenteront d'abattre tout aéronef qui approcherait," répondit Fran, approchant de la verrière à son tour. "Ce sont les ordres," ajouta-t-elle avant de désigner un arbre.
Les jumeaux, Vincent et Zéphyr suivirent son geste, jusqu'à voir une carcasse de dirigeable encastrée dans les branches d'un des arbres, son armature envahie par les feuilles et la végétation.
Vincent avait vu des modèles similaires en son temps. Cela devait faire trente ou quarante ans qu'il était là.
"Je vois un avion," ajouta Yuffie en désignant un autre arbre.
"Et il y a un Atomos dans la plaine," ajouta Cid, le regard fixé sur une longue balafre qui barrait la savane et au bout de laquelle se trouvaient les débris d'un des vieux cubes volants. "Balthier, barre à bâbord et prend de l'altitude, évite de voler au-dessus de la jungle."
"Oui, Capitaine," répondit le jeune homme en manœuvrant.
"Tu as une idée de comment les contacter ? " demanda Cid à leur viéra.
Fran hocha la tête, ramassant son carquois, accroché à la chaise du navigateur. Elle sortit une flèche qu'elle tendit à Cid. La munition était neuve, et dotée d'une grosse pointe à moitié évidée, visiblement taillée à la main.
"Flèche sifflante. Elles sauront qu'une viéra est à bord."
"Besoin d'aller sur le pont pour tirer ? "
"Oui."
"File et arrime-toi. Vincent ? "
"Je vais avec elle."
Fran empoigna son arc et précéda Vincent sur le pont, s'encablant soigneusement avant d'encocher sa flèche.
Sa propre arme à la main, Vincent la regarda tendre son arc, soigneusement immobile, patientant jusqu'à ce que le Haut Vent soit suffisamment stable pour qu'elle puisse tirer.
Le son du sifflet était sinistre et perçant et dura tout le temps que la flèche fut en vol, jusqu'à ce qu'elle disparaisse dans la futaie.
"Et maintenant ? "
"On attend," déclara la viéra en s'accoudant sur la rambarde.
Ils attendirent.
Et au bout d'une quinzaine de minutes, une série de sifflements similaires s'éleva de la jungle, quelques flèches sortant des feuilles avant de retomber. Vincent jeta un petit regard à Fran qui restait impassible, ses oreilles s'orientant d'un sifflement à l'autre.
Le son semblait se déplacer comme une vague, jusqu'à arriver vers le sud de la forêt avant de s'arrêter. Fran enfonça du doigt le micro du système de communication le plus proche d'elle.
"Capitaine. On peut se poser. La péninsule au sud. Balthier, reste hors de portée de flèches."
Mi ne ŝatas ĝin[3], grommela le jeune homme avant de manœuvrer pour atterrir.
Quand Vincent et Fran rejoignirent le reste d'Avalanche au pont inférieur, près de la sortie au sol, ils se préparaient à débarquer, vérifiant mutuellement leurs équipements. Yuffie cachait des armes sur elle, mais ne put s'empêcher de ricaner en voyant Vincent arriver sur les pas de Fran.
"Faut vraiment que tu apprennes à te coiffer," plaisanta-t-elle, fouillant ses nombreuses poches jusqu'à trouver un élastique, "tiens, ta couleur favorite."
Vincent accepta l'élastique rouge et jeta un regard à l'armure dorée qui couvrait à nouveau son bras démoniaque, hésitant à perdre du temps à la retirer et la remettre pour se coiffer.
Il allait demander à Yuffie de l'aider quand il sentit une main sur son coude démoniaque et tourna la tête, voyant Séphiroth près de lui.
"Laissez… Laisse-moi faire, Makoto."
Vincent échangea un rapide regard avec Yuffie qui lui fit un grand sourire avant de lui attraper les mains, les tenant devant lui d'une poigne ferme, mais douce.
"Si je réagis brutalement…" commença Vincent en essayant de dégager les griffes de la main de sa sœur.
"Alors reste calme et respire," ordonna Yuffie, "Ne touche pas l'arrière de son crâne," ajouta-t-elle à l'attention de Zéphyr.
"Je vais lui faire une natte," déclara Séphiroth en se mettant dans le dos de Vincent, une main sur son épaule, "je ne sais rien faire d'autre de toute façon."
Vincent obtempéra, laissant son fils rassembler ses cheveux sur sa nuque et faire une natte rapidement, prenant garde à ne pas toucher son crâne.
"Jolie technique," commenta Aérith en grande connaisseuse de la coiffure.
"J'ai l'habitude. Le… Le professeur m'interdisait de couper mes cheveux. Il disait que…"
Les mains de Séphiroth stoppèrent quelques secondes, puis reprirent leur tâche, accompagnées d'un petit rire bas.
"Quoi ? "
"Il disait que je ressemblais à ce fichu Turk débraillé avec les cheveux courts," expliqua Séphiroth, tendant la main à son père pour récupérer l'élastique et le nouer.
Vincent se tourna vers lui, un sourcil haussé. Séphiroth luttait visiblement pour ne pas sourire, les mains dans les poches.
"J'ai toujours pensé qu'il parlait du directeur Morrow… maintenant, je me demande."
"Ravi de savoir que j'ai marqué Hojo à ce point," déclara Vincent d'un sarcasme probablement létal à cette dose.
Un moissonneur était écartelé sur le rocher le plus proche, percé de flèches comme un hérisson, ses pattes déboitées, sa gueule maintenue grande ouverte par des branches encore vertes.
"On arrive trop tard ? " s'inquiéta Yuffie.
Zack était en train de retenir des hauts le cœur, une main plaquée sur son nez, pendant que Vincent et Cloud grimaçait de l'odeur, mais Zéphyr approcha sans sembler incommodé.
"À l'odeur, ça date de deux jours. Peut-être moins, avec cette chaleur."
"Comment tu fais pour supporter cette infection ? ! " s'exclama Zack, laissant Aérith tamponner sous son nez à l'aide d'un baume parfumé.
Fran aussi était restée à distance du monstre supplicié, Nanaki derrière elle. Elle était descendue avec son arc et un carquois chargé de flèches, mais contrairement à Avalanche, elle ne faisait pas un geste pour prendre ses armes. Ses doigts étaient fourrés dans la crinière du lion, lui grattant doucement le crâne du bout des griffes, mais elle ne quittait pas le moissonneur du regard.
Cid approcha d'elle, désignant la créature.
"Les viéra ? "
"Probable. C'est… traditionnel."
"Exposer les cadavres pour dissuader les attaquants de revenir ? " demanda Vincent.
Fran hocha la tête pendant que Cid dévisageait Vincent, horrifié.
"Daguerreo avait cette tradition aussi," expliqua son amant.
"L'a toujours," renchérit Zack d'un ton bougon.
"C'est efficace. En général," déclara Fran en jetant un coup d'œil à la muraille que formait la forêt devant eux.
"Tu penses qu'Hojo a déjà trouvé le temple ? " demanda Aérith.
La viéra secoua la tête, ses yeux passant d'un point à un autre comme si elle suivait quelqu'un du regard.
"Le Bois est intact."
"Ce devait être une avant-garde," comprit Barret.
"Mais les viéra sont là," ajouta Fran.
Vincent n'avait pas l'habitude des forêts, encore moins des jungles de cette envergure. Certes, Daguerreo était entourée d'une jungle, et il avait crapahuté dans les bois de pins de Wutai Sud et Nibelheim, mais par rapport à la jungle de Golmore, ces trois forêts faisaient figure de prairies clairsemées.
En fait, passé quelques dizaines de mètres, on ne pouvait plus voir l'intérieur de la jungle, encombré de troncs, de fougères hautes comme un hume, de l'ombre des arbres que projetait le soleil sur les sous-bois.
Et le Temple n'était pas visible.
Ni les viéra dont parlait Fran d'ailleurs.
"On nous observe," ajouta la jeune viéra, détachant le carquois de sa ceinture.
Elle tendit son arme et la poche à Cid qui les prit avec un froncement de sourcil intrigué.
"Fran ? "
"N'intervenez pas."
Elle avança vers la forêt, levant ses mains en signe de paix.
Vincent entendit un sifflement.
Avant qu'il ait pu bouger, Séphiroth était déjà près de Fran, retenant une flèche d'une main ferme. Fran resta immobile, observant le projectile avant de tourner la tête vers Séphiroth.
"Merci. Mais elle ne m'aurait pas touchée."
"Je préfère ne pas courir ce risque," rétorqua Séphiroth.
Fran hocha la tête, puis leva à nouveau les yeux vers les arbres avant de prendre la parole dans une langue que même Vincent n'avait jamais entendue. C'était étrangement fluide, les syllabes se suivant comme de l'eau qui coulait, ou un oiseau qui roucoulait et il pouvait reconnaître l'accent que Fran avait toujours, qu'elle parle en commun ou en alexandriote.
Elle acheva sa requête, se tut et ouvrit grand ses oreilles. Séphiroth, toujours debout près d'elle, fit de même, quoique de manière moins impressionnante.
"Qu'y a-t-il ? " demanda Cid en approchant à son tour.
"Le Bois ne me parle pas," répondit Fran. "Je ne peux plus l'entendre."
Séphiroth semblait perturbé en revanche et il se tourna vers Aérith, lui faisant signe d'approcher, non sans garder un œil vers la forêt.
"Que se passe-t-il ? " demanda Aérith.
Séphiroth lui fit signe d'écouter et elle obtempéra, les sourcils froncés.
"Oh," finit-t-elle par murmurer.
"Vous l'entendez," comprit Fran.
"Il y a quelque chose dans ce bois ? " demanda Aérith, "ou quelqu'un ? "
Avant que Fran puisse répondre, les arbres qui bouchaient le chemin commencèrent à s'écarter.
Il y avait beaucoup de choses étranges que Barret avait vu depuis qu'il était à Avalanche, mais les arbres qui bougeaient, c'était une première.
Et pourtant, c'était ce qu'ils faisaient. Les troncs se courbaient, les branches se levaient, les petits buissons s'éloignaient en bruissant comme une famille de lapins, laissant place à une petite troupe de femmes en armes.
Des viéra.
Et Séphiroth avait déjà vu celle qui les menait, bien qu'elle soit vêtue d'une armure de cuir plutôt que des soieries qu'elle portait à leur première rencontre.
Dame Jote.
Elle fit signe à son escorte de stopper à la lisière du bois et approcha seule, baissant les yeux sur Fran, qu'elle dépassait de quelques centimètres.
Séphiroth commençait à comprendre pourquoi Riku avait confondu Dame Jote et Fran. À part les taches brunes aux bouts des oreilles de Fran, les deux femmes se ressemblaient de manière troublante. Dame Jote était plus grande, et un peu plus âgée, mais Séphiroth était incapable de déterminer son âge. Était-ce la mère de Fran ? Sa sœur ? Sa…
Perdu dans ses réflexions, il fut surpris d'entendre soudain le son d'une gifle. Aérith poussa un petit cri de surprise, et Cid tendit la main vers Fran, mais la viéra lui fit signe de ne pas bouger, restant impassible malgré sa joue qui devait être en feu.
Heureusement, Dame Jote n'avait pas utilisé ses griffes.
"Tu oses revenir."
"Jote."
"Repars. Le Bois n'a que faire de toi désormais."
"Je ne suis pas là pour le Bois."
Jote leva à nouveau la main, mais cette fois, Fran l'intercepta, la fixant droit dans les yeux.
"J'ai accepté la première gifle, je la méritais," déclara Fran, "mais tu ne me frapperas pas une seconde fois."
Elle repoussa la main de Jote et se figea quand le bruit grinçant d'une douzaine de cordes d'arcs tirés en même temps s'éleva.
Séphiroth leva lentement les yeux, cherchant les tireurs. L'escorte de Dame Jote n'avait pas bougé, restant en arrière sans bouger. Il devait y avoir d'autres viera dans les arbres, prêtes à tirer au moindre de leurs gestes de travers mais il ne les voyait pas. À peine quelques ombres sur les feuilles, là où le soleil parvenait à toucher les branches.
Fran recula d'un pas, baissant les yeux.
"Dame Ifalna, Cetra de la lignée Crescent m'envoie."
L'expression de Jote vacilla brièvement, un rictus de rage lui venant avant qu'elle parvienne à se calmer.
"Toi ? "
"Dame Jote," intervint Aérith, "ma... ma mère souhaite que le temple soit protégé. Elle a demandé à Fran de nous guider…"
La grande viéra tourna la tête vers Aérith, puis leva les yeux vers Séphiroth avant de dévisager soigneusement les autres membres d'Avalanche. Son regard s'arrêta sur Vincent qui inclina la tête en guise de salut avant d'approcher à son tour.
"Salutations de Daguerreo, Dame Jote."
"Salutations d'Eruyt, Seigneur," répondit la viéra baissant ses yeux bruns. "J'ignorais votre venue."
"Malheureusement, les choses ont changé. Hojo et Sin se déplacent dans votre direction et de ce que nous avons vu," ajouta Vincent en désignant le cadavre de la squame, "il a déjà touché terre à Golmore."
"Nous l'avons repoussé," rétorqua la viéra.
"Il reviendra à l'assaut."
"Et nous le repousserons à ..."
Jote se tut soudain, se tournant vers l'intérieur de la forêt, les oreilles aux aguets. Les viéra de son équipage semblaient aussi écouter quelque chose, toutes immobiles, le nez et les oreilles levées, écoutant quelque chose d'inaudible pour Avalanche.
Sauf pour Aérith et Séphiroth.
"Qu'est-ce que c'est que ça ? " s'étonna Séphiroth à voix basse.
"Je ne sais pas," répondit Aérith sur le même ton, "ce n'est pas une voix de la Rivière en tout cas."
Elle se tourna vers Fran pour lui demander, mais contrairement aux autres viéra, Fran ne semblait pas écouter, contemplant Jote d'un air triste.
"Fran, qui parle ? "
"Il veut vous voir," déclara Jote, empêchant Fran de répondre.
"Qui ça ? " marmonna Cid.
"Notre Père," répondit Jote avec un regard troublé.
"Le seigneur Carbuncle," murmura Vincent.
La grande majorité d'Avalanche n'avait entendu parler de Carbuncle que comme un lapin magique qui apportait des cadeaux aux enfants ou que les invokeurs faisaient venir pour soigner et protéger.
Ça n'aurait pas dû être surprenant qu'il soit lié aux viéra, et pourtant…
Barret toqua du doigt sur l'épaule de Vincent pour attirer son attention.
"Tu en penses quoi, on y va ? " murmura-t-il, pas assez bas pour échapper à l'ouïe des viéra.
"Pas vous", corrigea Jote, "Juste les cetra."
Cela voulait dire Aérith et lui seulement, comprit Séphiroth quand la viéra se tourna vers eux.
"Non," rétorqua aussitôt Vincent.
"Aucun mal ne leur sera fait," assura Jote d'un ton qui aurait pu être plus convaincant.
"Y'a intérêt ! " lança Zack derrière Vincent.
"Elle ne part pas sans nous," ajouta Cloud d'un ton vindicatif.
Les viéra restées en arrière semblèrent toutes se mettre en garde à la menace dans la voix des jumeaux et Vincent fut presque sûr d'entendre à nouveau la corde des arcs se tendre dans les feuilles. Il fallait faire descendre la tension mais... comment ?
Yuffie se glissa près de lui, lui donnant un petit coup de coude avant de désigner les jumeaux d'un signe de tête.
"Allez calmer les jumeaux Cid et toi, je m'en charge."
"Tu es sûre ? "
"Non, mais je bluffe bien."
Et elle attrapa le coude de Barret avant de s'incliner devant Dame Jote, incitant leur lieutenant à faire de même. Vincent hésita quelques secondes supplémentaires, content de ne plus avoir à faire le diplomate et en même temps inquiet du déroulement de la situation. Il recula vers les jumeaux, faisant signe à Cid de le suivre, ce que le pilote fit à regret, s'éloignant de Fran.
"Cloud, Zack, calmez-vous," murmura Vincent en arrivant près d'eux, levant les mains pour les retenir au cas où ils décideraient de retourner récupérer Aérith.
"Elle n'emmène pas Aérith," gronda Zack.
"Je t'assure que ça me plait aussi peu qu'à toi," répondit Vincent.
"Elle n'a qu'à prendre le général seulement," ajouta Cloud d'un ton ronchon.
Cid lui mit une petite bourrade sur l'épaule, fronçant les sourcils en désignant Vincent.
"Cloud, que tu n'aimes pas Zéph, ok, mais ne dit pas ce genre de chose devant Vincent."
Le blond rougit d'embarras, se frottant le crâne d'une main d'un air penaud.
"Pardon, Makoto."
"Pourquoi ils veulent tous les cetra ? " gronda Zack.
"C'est symbolique," répondit Vincent, surveillant Yuffie qui tentait d'expliquer diplomatiquement le refus des jumeaux de laisser partir Aérith. "Ils sont tout ce qui reste de Minerva."
Séphiroth observait alternativement la forêt et la discussion entre Yuffie, Dame Jote et le lieutenant, jetant de temps en temps des regards à son père avant de se décider, s'éloignant de quelques pas pour le rejoindre.
"Je vais y aller."
"Il n'en est pas question," gronda Vincent à l'intention de son fils.
"Si nous parlons à… au … Comment dois-je appeler Carbuncle ? "
"Seigneur est en général le terme approprié," soupira Vincent, "Zéphyr…"
"Il faut convaincre les viéra de nous laisser les aider. Le Seigneur Carbuncle nous écoutera peut-être."
"Aérith ! " appelèrent d'une même voix les jumeaux.
Séphiroth se tourna à temps pour voir la jeune femme sursauter, surprise. Elle avait déjà fait quelques pas dans la forêt et se tenait derrière Dame Jote.
"Je…" hésita-t-elle, "je dois y aller."
"C'est ce genre de chose que ta mère voudrait éviter," déclara Vincent.
La guérisseuse jeta à nouveau un regard au fond de la forêt avant de se redresser, carrant ses épaules.
Vincent soupira. Il avait déjà vu Lucrécia avec le même genre d'expression, généralement avant qu'elle refuse de l'écouter.
"Je ne serais pas en danger," déclara Aérith. "Je dois y aller."
Zéphyr et Vincent échangèrent un regard puis le SOLDAT soupira.
"Je la suis. Ne serait-ce que pour la surveiller."
"Hey ! " protesta Aérith.
"Non," répéta Vincent, "pas seuls."
"J'irais avec eux," proposa Fran.
Tout le monde se tourna vers Fran, y compris Jote qui la foudroya du regard.
"Non," déclara-t-elle d'un ton ferme.
"Je suis d'accord," décida Aérith au même moment, s'attirant un regard surpris de la grande viéra.
Jote baissa les yeux sur elle, Aérith leva les siens, papillonnant presque des cils.
"Mère a demandé à Fran d'être notre guide, vous ne vous opposeriez pas à la décision de la dernière des cetra ? "
Vincent réprima la soudaine envie de se mettre une gifle sur le front. C'était le pire des scénarios possibles. Aérith, la plus grande manipulatrice de tout Avalanche, qui réalisait soudain le pouvoir et l'autorité que lui conférait le sang cetra sur le reste des Anciens.
Ils étaient tous fichus.
Et Dame Jote la première.
Confuse, partagée entre la tradition de son peuple et l'ordre d'une cetra, celle-ci alterna entre ouvrir les mains et les croiser à nouveau. Habitué à la gestuelle d'une viéra, Cid en déduisit qu'elle était en train de paniquer à la recherche d'une réponse. Une de ses oreilles frémit en direction de la forêt et elle hésita encore brièvement avant de soupirer.
"Très bien. Elle peut venir avec les cetra."
Aérith posa sa petite menotte sur la grande main de Jote avec un sourire éclatant.
"Merci, Dame Jote."
Et voilà. À partir de maintenant, la viéra ne pourra plus jamais rien lui refuser.
Vincent soupira en se tournant vers Séphiroth.
"Tu es sûr ? "
"Oui."
"Sois prudent, ne faites pas de promesses, surveille-les toutes les deux."
"Oui, Makoto."
"Fran," lança Cid, "pareil, tu les empêches de faire des conneries ! "
"Oui, Capitaine," répondit Fran par habitude, sous le regard médusé de Jote, ou ce qui passait pour tel chez les viéra.
"Aérith ! " reprit Zack.
"Oui, je les surveille ! " soupira Aérith d'un ton agacé.
"Non, tu es sage ! " rétorqua son fiancé.
"Ou on le dit à ta mère," renchérit son frère.
"Pourquoi vous devez me surveiller et pas le contraire ? " protesta la guérisseuse quand Séphiroth les rejoignit, Fran et elle.
"Tu te poses vraiment la question ou c'est rhétorique ? " demanda Séphiroth.
Pendant que les cadets d'Avalanche se chamaillaient, Vincent approcha à son tour, s'arrêtant devant Dame Jote, levant les yeux vers elle. La viéra dû immédiatement baisser les siens, tachant de ne pas croiser son regard. Habituellement il détestait ça. Pour une fois, ça allait lui servir.
"Ils devront être de retour rapidement," déclara-t-il.
"Aucun mal ne…"
"Vous ne comprenez pas," coupa Vincent malgré le coup de coude que lui assena Yuffie pour le faire taire. "La Calamité Venue du Ciel fera tout son possible pour mettre la main sur eux et elle est alliée à Hojo."
Il désigna le cadavre de la squame, toujours écartelé sur son rocher.
"Ils sont proches. Ils sont peut-être déjà dans votre forêt."
Le regard de la viéra glissa vers le corps du monstre, puis à nouveau, très brièvement, sur Vincent avant de s'abaisser vers le sol.
"J'en informerai le Bois."
"Aérith, Fran et Zéphyr devront être de retour rapidement, en bonne santé."
"Oui, Seigneur," répondit Jote avant de s'incliner respectueusement devant Vincent.
Elle ne désarma pas les trois jeunes gens. Même Fran put récupérer ses armes des mains de Cid qui lui grommela des dernières recommandations tout en serrant son carquois à sa taille.
Puis Jote les guida jusqu'à la troupe de viéra qui patientait.
Les arbres se refermèrent sur eux comme le rideau d'une scène de théâtre.
Le silence retomba sur Avalanche.
Vincent laissa échapper un soupir explosif qui fut le signe pour que tout le monde se remette à bouger, grogner ou parler.
"Tu commences à comprendre ce que je ressens ? " marmonna Barret en posant sa main de chair sur l'épaule de Vincent.
"Je te présentes toutes mes excuses, Barret."
"Acceptées."
[1] Balthier, Edgar et Luca.
[2] Désolée, chers créateurs des viéra, mais l'excuse : "leurs pieds ne sont pas formés de la même façon, elles sont obligées de porter des talons aiguilles" est pourrie et sexiste, bisous !
[3] J'aime pas ça
