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«Croc'cœur d'âme.»

~ Chapitre 1 ~

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Deux jours qu'Harry planchait sur son clavier. Sans succès. La page de traitement de texte restait affreusement vide. Péniblement, il crachait des lignes, supposées ébauche d'une trame à son premier et unique manga, qu'il effaçait aussitôt. Merlin ! Perdait-il l'esprit ? Pourquoi avait-il parié sur une telle aberration ? Sincèrement, était-il une once capable d'illustrer une œuvre dégoulinante de romantisme à l'occasion des fêtes de fin d'année ? Surtout quand Monsieur muscles se complaisait généralement à vivre dans l'action pure et dure ! Luna Lovegood, excentrique et amicale éditrice autoproclamée, l'avait assurément contaminé avec sa loufoque folie douce pour en arriver à pareille extrémité. Plus jamais Harry ne se laisserait corrompre par elle. Ni par l'alcool !

Sacrée merde ! Non content, comme si c'était pas suffisamment corsé d'épancher des sentiments, difficilement maitrisés voir nullement !, il s'empoisonnait à retranscrire son script dans le style sexuel du yaoi. Y a pas, il était définitivement aliéné ! Devait-il réellement s'étonner de son improductivité latente ? Jadis, pour romancer sa propre enfance, il s'était révélé trop maladroit. Un comble pour le célébrissime Harry Potter, jugé autrefois par tout à chacun comme excellent et habile. D'ailleurs, songer à féliciter Joanne K. Rowling, la romancière moldue s'en étant brillamment chargée pour lui à l'époque, serait fortement recommander. Afin d'éviter d'être taxé de gougea, malotru.

Or, sans fausse modestie, depuis avait-il fait ses armes en littérature. Enfin, en matière de journalisme plutôt. « Griffe d'Or », son piquant et redoutable nom de plume, fortement inspiré et mâtiné de souvenirs d'une ancienne vie magique, devint plus bankable au fil des mois. Flattant admirablement l'égo. Et gonflant un compte bancaire loin d'être chétif déjà ! Pourtant, actuellement, si l'écrivaine de génie lui abandonnait, éphémèrement, une bribe de talent, il en serait merveilleusement satisfait. A l'instar d'elle, au travers des mots, avait-il le désir d'octroyer du rêve. De la joie. D'autant plus vrai avec ce défi haut-en-couleur, où il aimerait distraire, émouvoir, ne serait-ce que pour d'infimes secondes. Cerise sur le gâteau, pourquoi ne pas se perdre lui-même au travers de ses divagations ? Histoire d'oublier combien sa vie était désormais calme. Terne.

Avoir été, tour à tour, héroïque sauveur providentiel lors d'une guerre assassine, puis fervent et acharné partisan, combattant ardemment l'injustice et les ennemis de la paix, au sein de l'élite des Aurors, lui laissait un goût âpre. Amertume particulièrement désagréable à l'analyse de sa récente piètre existence. Lui qui, autrefois, priait ardemment pour une vie monotone, quand mille tourments le submergeaient, en venait à se blâmer. N'était-il pas un bel et instable égoïste, peu reconnaissant des cadeaux de la vie ? Certes, sa reconversion n'était pas délibérée. Aucunement intentionnelle. Indéniablement forcée en vérité. Sa jambe furieusement boiteuse dorénavant, qu'Hermione avait soignée au mieux de ses capacités, était une douloureuse preuve. Cruel verdict de n'être plus apte au service actif. Aussi, durant sa convalescence, décida-t-il d'un revirement professionnel inopiné. Trop éprouvant d'assister à l'amusement des collègues lors de trépidantes missions. Offices qui lui seraient formellement interdits.

- « Maitre Potter devrait s'accorder une pause. … Un crâne épilé serait hideux sur lui. » lui conseilla brusquement la voix moqueuse de l'instruit et vil Kreattur, déposant sur la table basse, trônant au centre du bureau privé, sa légère collation du soir.

Depuis que sa précieuse Ginny, petite sœur chérie de son meilleur ami d'enfance, demeuré à Londres avec son épouse Hermione, avait quitté leur foyer voilà trois ans, suite à une overdose d'absentéisme à ses côtés, Kreattur était ce qui se rapprochait le plus d'un membre familial. Sa fulgurante et brève carrière chez les Aurors fut au détriment de sa vie conjugale. Assurément, était-il conscient d'avoir toujours privilégié les missions à sa patiente moitié. Aujourd'hui, Harry regrettait son manque d'implication dans leur couple. Exemptant intégralement la benjamine Weasley de tout reproche. Fatalement, le bonheur et lui n'avaient jamais été de grands complices. Martyre est une vocation de chaque jour ! Sincèrement, lui donnait-il raison de s'être enfuie au bras d'un autre. Un joueur de quiddich lui ayant offert deux enfants. Acte d'amour et de bravoure qu'il n'aurait, à l'évidence, jamais pu lui donner. Même avec la meilleure des volontés.

- « Merci de ta sollicitude pour ma santé … et beauté. » rétorqua-t-il, avec une fausse bonhomie, stoppant son triturage capillaire, intensifiant involontairement son côté échevelé inné.

« Ne me dérange plus. J'ai besoin de faire le vide pour me concentrer. » conclut-il, prêtant un sourire revêche pour chasser l'elfe de maison, magnanimement accueilli à la mort de son parrain Sirius Black et qui ne le lui rendait absolument pas. Dobby lui manquait terriblement parfois. Atrocement !

- « Naturellement, le cerveau de Maitre Potter est déjà vide de tout. » murmura narquoisement l'irascible serviteur, réajustant sa nouvelle marotte : d'immaculés gants blancs jugés légèrement excessifs pour son poste. Par cette comédie signifiait-il ne vouloir jamais entrer en contact avec l'indigne personne ? Définitivement irrespectueux. Pourquoi ce tyran ne revendiquait-il pas son indépendance ? Jusqu'à sa mort lui ferait-il payer de s'être opposer à certains Sang-Purs ?

Cherchant désespérément l'inspiration, le fuyant malicieusement après l'impertinent échange, l'apprenti mangaka se leva laborieusement. Abandonnant, momentanément derrière lui, le luminescent et pratique Ron-Pocket. Ingénieux présent, généreusement offert pour ses 25 ans, et véritable bijou high-tech au look rétro avec son clavier en forme de vieille machine à écrire. Grâce à ses remarques affutées, ce judicieux système était toujours en phase d'amélioration dans la réputée firme sorcière « Weasley Corporation ». L'œuvre de son fidèle ami, rattrapé par l'amour d'un père pour le monde moldu, concurrençait presque les brillantes inventions non-magiques dans le domaine informatique. Reléguant, inexorablement, la bonne vieille plume à papote au musée des antiquités !

Tel un papillon, inexorablement attiré par le florilège de lumières vives à l'extérieur, Harry se dirigea vers l'une des nombreuses baies vitrées longeant une majeure partie de son hôtel particulier. Oui, l'ancien orphelin avait un pécule suffisamment pharamineux pour s'assurer une vie convenable au sein de sa Tour d'ivoire ! Loin de la misère. Ou de vautours tournant continuellement autours de lui. Ses magnifiques pupilles émeraude, pourtant excessivement fatiguées, dévièrent et plongèrent instantanément sur la foule grouillante en contrebas. La nuit, le quartier de Shibuya était intensément animé. Frénétique. Le cosmopolite Tokyo, son exil salvateur, était incontestablement à des années lumière du royal et si british Londres. Néanmoins affamé, son regard lassé survola hâtivement le plus grand carrefour au monde, Hachikō, pour parvenir à son but ultime : l'établissement où sévissait le redoutable « Croc'cœur d'âme ».

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********** à suivre ? **********

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