Stiles se regarda dans le miroir et soupira. C'était dingue comme rien ne lui allait tant il avait un teint pâle par nature. Du rouge ? A côté, sa peau ressemblait à celle d'un cadavre. Du bleu ? Stiles semblait définitivement refroidi depuis des heures. Du noir ? Ah, là, on dirait Void. Du gris ? Il avait l'air en phase terminale. Du jaune ? Berk. Du violet ? Il paraissait malade. Du vert ? Stiles n'était pas un creeper. Du blanc ? Le but était de lui donner un air vivant, comme il l'était en général ! Mais sans trop savoir pourquoi, il n'avait jamais réellement pu bronzer et ce n'était pas en automne qu'il allait commencer à le faire.

Stiles laissa tomber les vêtements qu'il tenait dans ses bras. Il ne voulait pas se faire une beauté, essayer de sortir du lot – surtout pas !... Il désirait seulement être présentable. Les soirées meute, il n'y en avait pas souvent et à chaque fois, il se sentait tout petit parce que l'intégralité de ses amis étaient toujours bien habillés sans aller dans le tape à l'œil. Ils étaient tous beaux, superbes, classes sans faire trop d'efforts. Et il y avait lui, l'hyperactif toujours mal fagoté à qui rien n'allait réellement. Après, il relativisait en se disant que ses amis partaient avec une avance non négligeable : leur beauté. Si chacun partait avec de belles bases, le surnaturel n'avait fait qu'ajouter à leur glow-up de l'adolescence. Lui, il restait humain. Avec sa croissance d'humain. Son corps d'humain. Ses défauts d'humain. Pas qu'il s'en plaignait réellement, juste… Il ressentait la différence, savait pertinemment qu'il ne serait jamais à leur niveau et que peu importe ce qu'il mettrait, il ressemblerait à un sac. Néanmoins, il tenait à limiter les dégâts. Ainsi, il éviterait les critiques, tout en ne se faisant pas remarquer. Alors, il finit par enfiler un pantalon anthracite, un t-shirt blanc surmonté d'une chemise rouge et noire et termina en mettant ses nouvelles baskets blanches. Simple, sobre et… Tant pis pour son teint toujours aussi pâle. Rien ne lui allait, de toute façon. Il n'avait pas non plus de vêtements extrêmement sophistiqués : dans sa garde-robe, tout se ressemblait. Comment faire la différence avec sa tenue pour la soirée et celles qu'il avait l'habitude de porter ? Stiles prit le soin de repasser le col de la chemise, pour faire plus propre. Ensuite, il passa un coup dans ses cheveux, démêla les nœuds et… Les organisa comme il le put pour qu'ils aient l'air un peu moins en bataille que d'ordinaire, juste pour… Avoir l'air d'y avoir fait quelque chose. Certains aimaient faire dans le coiffé-décoiffé : Stiles comptait faire semblant, faire comme si sa coupe de cheveux était finement travaillée alors que la vérité était bien moins… Attrayante. Il avait l'habitude de se battre avec ses cheveux. Pour autant, il n'avait encore jamais réussi à les dompter.

Enfin, il souffla un bon coup, avala ses cachets d'Adderall histoire de ne pas trop faire le zouave et prit son sac à dos, dans lequel il fourra des affaires pour la nuit. Un t-shirt, un bas de jogging, des chaussettes, une poche plastique et, au cas-où, un boxer propre. C'était stupide, mais Stiles voulait ne manquer de rien : il suffisait que quelqu'un renverse un verre quelconque sur lui, que le liquide passe à travers son pantalon, et c'était l'inconfort assuré. L'hyperactif était certain de parer à toute éventualité. C'était le stress et l'excitation qui faisaient ça. Parce qu'il appréhendait toujours ce genre de soirées, tout en sachant qu'il allait s'amuser.

Ainsi, il finit par sortir de chez lui et s'engouffrer à l'intérieur de la Jeep.

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Scott avait une coiffure qu'il jugeait parfaite. Son reflet lui renvoyait l'air d'un tombeur. Un tombeur confiant car se trouvant bien apprêté. L'alpha avait bien l'intention de se présenter à celui qu'il souhaitait conquérir sous son meilleur jour. Il avait légèrement revu son plan : d'abord, il allait essayer simplement, en draguant son meilleur ami et si cela ne marchait pas, eh bien… Il finirait tout de même par lui tomber dans les bras. L'issue serait unique, quel que soit la manière dont il agirait. Parce que c'était écrit – selon Scott. Et qu'on ne pouvait changer le destin. Jamais auparavant il ne s'était laissé prendre par une telle vision de la vie, à la fois belle et réductrice, comme si elle ne laissait pas sa place au libre arbitre. Il était persuadé que son meilleur ami lui appartenait déjà et qu'il ne manquait que la concrétisation de ce fait pour qu'ils coulent des jours heureux entre deux affaires surnaturelles. Scott en avait eu des expériences au niveau sentimental, fut un temps pas si lointain que cela où il enchaînait les filles, parce qu'il était incapable de rester seul. Célibataire depuis peu – Malia n'appréciait pour l'instant pas l'idée de se poser avec un seul homme –, Scott ne voyait plus sa vie qu'avec Stiles, comme si sa solitude sentimental avait grandement accéléré l'accroissement de son obsession pour lui.

Scott se mit du parfum tout en sachant qu'il allait agresser les narines lupines de ses amis, mais qu'importe. Ce n'était pas pour eux qu'il voulait sentir bon. Cette soirée, il n'y allait que pour une seule personne, la seule à qui il plairait quelle que soit la situation, parce qu'il était certain que son charme faisait déjà effet sur son meilleur ami qui, simplement, n'osait rien lui dire. C'était du Stiles tout craché : il pensait beaucoup, mais parlait peu. En cours, il l'avait repoussé… Parce qu'il était timide, voilà tout. Ils n'étaient pas « potes » ni « frères ». Pour Scott, Stiles n'osait juste pas s'avouer la vérité, cette attirance qui les liait déjà.

Si l'alpha était timbré ? Bien sûr. Voilà des mois déjà qu'il avait vrillé. Que pouvait-on y faire ? Presque rien, à part attendre que les choses se passent.

Scott ajusta sa veste et défit légèrement son col de chemise, avant de se lancer un regard séducteur à travers le miroir. Il se trouvait splendide. Irrésistible. Et il savait que Stiles le serait également. Qu'inconsciemment, il chercherait aussi à lui plaire. Parce que si l'hyperactif n'était pas conscient de ses soi-disant sentiments envers l'alpha, il se savait beau et en jouait. Tout lui allait ! Tout. Il était beau comme un ange, et même un sac poubelle ne suffirait pas à ternir sa beauté. Ce n'était pas un top model, mais il avait du charme. Un charme particulier. Un charme qui l'avait envoûté.

Un charme dangereux.

Stiles finirait bien par faire cet effet-là à d'autres et c'était pour cette raison que Scott devait agir ce soir. Il devait revendiquer son humain avant qu'un autre ne pose ses sales pattes sur lui, sur cette peau laiteuse qui lui donnait des envies peu avouables, certaines purement érotiques, d'autres à la limite de la décence.

Scott vérifia une dernière fois son image dans le miroir de sa salle de bain et mit son petit flacon dans son sac à dos, qui ne comprenait pas grand-chose, si ce n'est quelques affaires et un peu d'alcool. Stiles ne buvait pas beaucoup, il n'aimait pas vraiment ça, mais… Il accepterait bien de prendre un verre ou deux avec son meilleur ami, non ? Puis un autre, et un autre, encore un autre… Après tout, il ne craignait rien avec lui. Scott ne voulait rien de plus que faire avancer les choses entre eux. Le posséder n'était que la suite logique des choses. Une relation amoureuse incombait forcément des relations charnelles et autant dire que l'alpha, de par son statut et son ego de pacotille, ne comptait pas endosser le rôle du passif. Stiles s'en chargerait et il apprécierait parce qu'il était humain et qu'un humain, c'était inférieur à un loup-garou, soumis.

Le pire, c'était que cette obsession transformait littéralement toutes ses pensées, effaçait ses anciennes valeurs, déformait sa vision du genre humain, auquel il appartenait encore quelques jours plus tôt. Scott perdait toujours un peu plus la raison. Les jours qui passaient n'avaient rien arrangé et maintenant qu'il avait de quoi satisfaire ses plus sombres desseins… Le mal en lui empirait.

Il sourit, de ce genre de sourires qui faisait froid dans le dos.

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Stiles souffla un bon coup avant d'appuyer sur le bouton de la sonnette. Il savait très bien qu'il pouvait d'ores et déjà ouvrir la porte et que le loft tenait plus du moulin à vent que de l'appartement, mais… Non, il préférait attendre, se comporter comme le parfait invité.

Ce fut Lydia qui lui ouvrit, pimpante comme à son habitude. Elle lui fit un sourire éclatant et, telle la meilleure amie qu'elle était pour lui, réajusta le col de sa chemise rouge, parce qu'il était un peu mal mis. Stiles lui fit un sourire timide mais reconnaissant. La banshee le tira par le bras, pour qu'il vienne dire bonjour à tout le monde : il manquait encore des gens, mais elle savait qu'il avait un peu de mal, ces temps-ci. Il se remettait régulièrement en question ces derniers temps et… Il faisait un peu moins semblant. Disons qu'arborer un air sans arrêt sur de lui était fatiguant et qu'il voulait juste… Être lui-même. Ses insécurités le bouffaient et Stiles avait décidé de se prendre en main : agir naturellement et abandonner sa fausse assurance, pour entreprendre d'avancer. Et Lydia savait tout ça, alors, elle lui fit un compliment sur sa personne, sa tenue car même si cela ne sortait pas de l'ordinaire, il essayait. Passer du temps à ne serait-ce que tenter de prendre soin de sa personne était un effort qu'autrefois, il ne prenait pas la peine de faire. C'était Lydia qui l'avait convaincu, au bout d'une fort longue discussion ayant eu lieu quelques semaines plus tôt. Elle savait tout de ses pensées, de ses insécurités, de sa manière de penser, du véritable lui qu'il camouflait comme il le pouvait. Stiles n'était pas aussi lumineux qu'on ne le pensait. Pas parce qu'il était malheureux, simplement… Il avait du mal à prendre confiance en lui. Alors, elle l'aidait.

Néanmoins, elle ignorait une chose, et pas des moindres : le comportement qu'avait eu Scott à l'égard de l'hyperactif en classe. Stiles ayant été fort occupé par la suite, il n'avait pas eu le temps de lui en parler, mais cela ne saurait tarder.

De son côté, le châtain s'était tranquillement mis à discuter avec ses amis, mais restait préoccupé. Pas beaucoup, mais assez pour qu'Isaac lui demande si tout allait bien, ce à quoi il répondit par la positive. Stiles allait bien, il appréhendait juste l'arrivée de Scott. Quoique, cette soirée tombait bien : il pourrait le prendre à part et, éventuellement, discuter avec lui pour essayer de comprendre pourquoi l'alpha avait eu ces gestes envers lui. Ces gestes quelque peu ambigus et… Dérangeants.

Mis à part ce détail, il sourit au bouclé et reprit sa conversation avec Lydia, Jackson et lui, sans savoir que l'origine de sa préoccupation se rapprochait dangereusement du loft.