Chapitre 18

La découverte inattendue de tous les ingrédients de l'antidote avait jeté Hermione dans un état d'euphorie difficilement contrôlable. Même Isobel s'en était rendue compte, et n'avait dès-lors cessé de lui poser des questions plus ou moins gênantes concernant ses entrevues avec Rogue. Pour désamorcer ses fantasmes, elle s'était résolue à lui donner plus de détails quant à leurs recherches, notamment concernant leur succès imminent. Elle avait volontairement omis Bellatrix de son récit et s'était contentée de mentionner les antidotes aux composants réguliers de sa potion. Elle n'avait pas, non plus, parlé du perce-neige, ni des baies de jujubier. Si Isobel avait su qu'elle avait le choix entre demeurer dans ce monde, ou partir, elle n'aurait cessé de la cribler d'interrogations.

Le rythme des révisions s'était encore intensifié et, bien qu'Hermione n'avait que deux matières à peaufiner, elle ne put s'empêcher de regarder du côté des cours d'Isobel en runes, arithmancie et métamorphose. Les effets excitants de la potion de stimulation avaient atteint un plateau, et si sa libido demeurait importante, elle avait au moins cessé d'augmenter. Parfois, Hermione croisait Ginny, et elles discutaient un peu. Elle avait osé lui parler des derniers éléments de la potion. En fait, elle n'avait simplement pas pu se retenir : renouer avec cette amitié si précieuse lui avait presque fait oublier que leur relation était toute nouvelle, dans ce monde... Leur soudaine complicité était considérée comme suspecte, si l'on prenait en compte les rivalités de leurs deux maisons. Aussi se contentaient-elles, la plupart du temps, de faire un bout de chemin ensemble entre deux cours de l'une ou de l'autre. Début avril, le cinquième match de la Coupe de Quidditch des Quatre Maisons opposa les maisons Poufsouffle et Serpentard. Ces derniers, qui n'avaient cumulé qu'une cinquantaine de points depuis le début du tournoi, avaient intérêt à briller s'ils souhaitaient éviter la dernière place du classement. Chose fut faite, quand Malefoy couronna de la capture du Vif d'Or les soixante points marqués par ses coéquipiers. A présent, les serdaigles étaient sûrs de finir au moins seconds de la compétition. La première place était conditionnée à une victoire avec une avance d'au moins soixante points sur les gryffondors, qui tenaient pour l'instant la tête du classement.

Le mercredi qui suivit le match entre serpents et blaireaux, la corvée de nettoyage des vestiaires valut à Hermione de rejoindre le château bien après le reste de l'équipe. L'air était frais, agréable, et la nuit n'avait pas encore avalé les couleurs du parc.

- Granger !

Hermione sursauta, et repéra Ginny, qui semblait venir des serres.

- Retenue chez Chourave... expliqua-t-elle en trottinant vers elle.

- Ah oui ?

- J'ai enfoncé une gousse de Snargalouf dans la narine de Harper.

La Serdaigle éclata de rire.

- Vraiment ? Mais c'est très gros, une gousse de Snargalouf !

- Harper a de très grosses narines, justifia Ginny, un sourire taquin sur les lèvres. Proportionnelles à sa très grosse tête, en fait.

- Je suis d'accord, acquiesça Hermione, en jetant un regard vers le château.

Un silence doux s'installa entre elles, uniquement rythmé par les bruissements de leurs pas dans l'herbe haute déjà humide.

- Tu n'hésiteras pas à me viser, pendant le Serdaigle-Gryffondor, fin mai, n'est-ce pas ?

- Moi ? Oh, non, sûrement pas, ironisa Hermione. Je ne voudrais pas qu'il y ait des suspicions de copinage. C'est sûrement Zacharias Smith qui commentera le match. Je ne tiens pas franchement à lui donner matière pour appuyer sur mes supposées faiblesses.

- Quel sac de pus, celui-là, lança la rousse en secouant la tête de dépit.

En éclatant de rire, Hermione sentit un tiraillement au niveau de son bas-ventre. Cette douleur-là, elle l'expérimentait régulièrement, une fois par mois, au moment de son ovulation. "Mince", songea-t-elle en posant sa paume sous sa ceinture.

- Ça va ? questionna Ginny, qui n'avait pas manqué sa grimace.

- C'est... en lien avec la potion. Il faut... je dois vite monter au septième étage.

- Je t'accompagne, j'y vais aussi. Evitons le couloir de l'infirmerie, ou tout le monde voudra t'y envoyer, lança-t-elle, décidée, balayant les alentours du regard. Descendons directement aux cachots pour passer par le raccourci d'Elizabeth.

- Bonne idée, grinça Hermione, dont la douleur était brutalement devenue difficile à supporter.

Arrivées dans le hall d'entrée, elles plongèrent aux cachots. Par chance, le château était désert, la plupart des élèves et des professeurs étaient réunis pour le dîner, dans la Grande Salle. Elles parcoururent le passage secret aussi rapidement que l'état d'Hermione le permettait.

- Ça ira ? questionna Ginny, la mine concernée, en s'apprêtant à sauter du passage ouvert par le pivotement du portrait.

- Oui, garantit Hermione, beaucoup moins sûre d'elle que le ton qu'elle employa.

- Bon. A plus tard, alors. Je passe devant.

La serdaigle patienta quelques minutes avant de rejoindre, elle aussi, le couloir du septième étage. Elle chemina tant bien que mal vers la Salle sur Demande, qui s'ouvrit devant elle. La pièce était vide, silencieuse, rassurante. Par les fenêtres, on apercevait l'indigo du ciel, marbré de griffures écarlates. Quelques braises crépitaient paresseusement dans l'âtre. D'un coup de baguette, elle les fit flamber joyeusement, avant de se débarrasser de son pantalon boueux. Puis elle se saisit d'un plaid avant de s'écrouler sur le sofa, seulement vêtue de son sweat-shirt de Quidditch et d'une culotte déformée. Elle observa le plafond voûté et les tiraillements se suspendirent pendant un temps. Profitant de cette accalmie, elle bondit sur son sac, et en extirpa le parchemin à duplication instantanée. Lui fallait-il prévenir Rogue ? Evidemment, bon sang, tant que ses capacités le lui permettaient. Anticipant une douleur bien plus vive, elle se saisit de sa plume et traça : "Salle sur Demande", et, regardant sa montre, elle ajouta : "20h30". Elle attendit, en comptant les salves, qui se répétaient environ toutes les deux minutes. Autour de vingt et une heure trente, un cliquetis lui parvint depuis l'entrée, et Rogue pénétra brusquement dans la pièce.

- Est-ce que vous allez bien ? questionna-t-il en s'approchant, jetant sa cape sur l'une des chaises de travail et roulant ses manches juste au-dessous de ses coudes.

Elle s'imagina, vautrée sur le canapé, enroulée dans son plaid, le visage rougi.

- Ça pourrait aller mieux, murmura-t-elle.

Elle était au sommet de l'un des pics de douleur, et se tordit légèrement, une grimace sur le visage.

- Je vais vous remplir une bouillotte.

"Par Morgane, Circé, Breira et Cliodhna réunies, c'était l'idée du siècle", songea Hermione. Elle se maudit de ne pas y avoir pensé plus tôt. Rogue se saisit de la petite bouillotte prévue par la Salle sur Demande, et y versa de l'extrémité de sa baguette un liquide fumant. Puis, fouillant dans la cassette en métal qui trônait sur l'une des étagères murales, il en sortit plusieurs fioles d'un liquide vert brillant, les potions antidouleur.

- Granger, si je ne vous avais pas rejointe, vous vous seriez laissée mourir, j'imagine ?

- Sûrement pas, mais souffrir, très probablement.

Repoussant ses jambes, il prit place au pied du sofa et lui tendit la bouillotte, qu'elle posa sur son ventre avec un gémissement soulagé.

- Potion antidouleur, annonça-t-il en glissant entre ses doigts l'un des petits flacons.

Tout comme il l'avait déjà fait, elle retint à son tour légèrement sa main, en saisissant la fiole. Leurs regards ne se croisèrent pas. Puis elle finit par avaler la potion, et posa ses doigts tout près de ceux de Rogue. Quand elle s'en saisit finalement, à l'occasion de l'une des nombreuses vagues de douleur qu'elle aurait à subir, il ne broncha pas. Et une fois les tiraillements repartis… elle ne lâcha pas sa main. Ainsi, ils étaient là, elle, allongée en chien de fusil autour de sa bouillotte, souffrant par intermittence et lui, assis à ses pieds, le bras tendu pour que leurs mains se serrent légèrement. Durant les moments où elle n'avait plus mal, elle remuait à peine ses doigts, pour être sûre qu'il ne s'agisse pas d'un malentendu, et ses doigts voyagèrent pour commencer à tracer un lent chemin sur la face interne de son avant-bras, elle sut que leur contact n'était pas le fruit du hasard. Aucun des deux ne commenta la situation.

- Est-ce que c'est de plus en plus douloureux ? questionna-t-il finalement, alors qu'elle lui broyait les phalanges.

- Pas vraiment, se crispa-t-elle. C'est seulement exactement la même atrocité lancinante à chaque fois.

Quand le flot passa, elle se redressa pour s'assoir à ses côtés, sans pour autant lâcher sa main. Ce fut alors à son tour de tracer des arabesques dans sa paume ouverte. Le geste était hypnotique, et la potion antidouleur commença à faire effet. Lentement, elle osa reposer sa tempe sur l'épaule du maître des potions. Avec tout autant d'égards, il remplaça sa main gauche par la droite, et étendit son bras pour le placer autour de ses épaules. Si elle n'avait pas autant souffert, nul doute que son bas ventre aurait explosé d'excitation. Mais à présent, la situation était seulement douce. Douce et rassurante, comme un thé aux épices accompagné de biscuits à la cannelle.

- Je me sens furieusement impuissant, formula-t-il en secouant la tête alors qu'elle se contractait une fois de plus.

- C'est le lot des hommes… Regarder les femmes souffrir.

Il eut un rire bref et la détailla un moment. Du bout des doigts, il écarta une longue mèche de cheveux frisottants qui barrait le visage d'Hermione, pour la glisser derrière son oreille. Elle, se saisissant de l'aubaine, posa sa main sur la sienne alors qu'elle s'attardait à proximité de sa joue, et l'y appuya plus franchement. Sa paume était tiède, à peine rugueuse, et très légèrement moite. Lentement, elle vint y enfouir sa bouche, humant le parfum de cuir boisé qui se trouvait là.

- Miss Granger, je…

- Non. Non, ne dites rien.

Alors qu'elle tournait le visage vers lui, leurs lèvres se retrouvèrent si proches qu'ils inspirèrent un instant le même air. Rogue eut un long soupir. Il y avait quelque chose de mentholé dans son souffle, et une autre note, plus corsée. Du café, peut-être. Oui, du café très noir.

- Par Circé, Miss Granger… Hermione…

Le souffle de la serdaigle se suspendit un instant quand son prénom passa les lèvres du maître des potions.

- Aidez-moi à vous résister, compléta-t-il, presque suppliant.

Elle eut un rire étouffé dans sa gorge.

- Alors là. Aidez-vous vous-même… Severus, rétorqua-t-elle.

Hermione s'était sentie presque moqueuse, mais ce « Severus » sur sa langue y laissa une saveur particulière, faite de désir contenu, d'interdit et… de détermination. Les yeux du maître des potions, sombres, mais bien plus brillants qu'à l'ordinaire, ne quittèrent pas les siens, sauf pour tomber vers sa bouche.

- Est-ce que je peux…

- Oui.

- Granger, vous n'avez aucune idée de ce que j'allais demander, chuchota-t-il vivement.

- Peu m'importe, honnêtement.

Millimètre par millimètre, son visage s'avança, et leurs lèvres se frôlèrent. Le gémissement qu'elle ne put museler fut long, long… et tordu par la douleur.

- Merde… fulmina-t-elle en posant son front sur son épaule.

Rogue avait perdu une main dans ses cheveux, et massait à présent la base de son crâne.

- C'est passé, lança-t-elle avec un soupir. Je… Pouvez-vous…

Il eut un sourire pâle et s'approcha d'elle de nouveau. Encore une fois, leurs bouches s'entrouvrirent à l'orée l'une de l'autre, partageant un souffle. Finalement, ce fut Rogue qui céda et posa ses lèvres sur les siennes, simplement.

- Merlin… nous enfreignons… à peu près… tous… tous les points du règlement de… Poudlard… chuchota-t-elle contre sa bouche, entrecoupant sa phrase de baisers appuyés. C'est… c'est très illégal…

Elle se replia sur sa bouillotte, le temps d'un élancement plus fort que les précédents.

- À l'évidence… répondit Rogue, dans ses cheveux. Mais… ne pensez-vous pas que nous avons déjà bien progressé jusqu'ici dans l'exploration de l'illégalité ?

Sa voix était rauque.

- Vous voulez dire… oui… un peu plus, un peu moins…

- Il me semblerait effectivement que nous ne soyons plus à cela près, confia-t-il en embrassant la commissure de ses lèvres entrouvertes. Et croyez-moi… j'y ai suffisamment réfléchi.

Hermione eut un sourire voilé de douleur.

- Mes sous-vêtements sont immondes… je suis encore couverte de boue.

- Vous ne pouvez pas imaginer à quel point cela m'est égal.

Il avait rétorqué ces mots en souriant à peine contre sa joue, une main brûlante posée sur son bas-ventre nu, sous son pull bleu et argent.

- Je ne sais pas combien de temps ce calvaire va durer mais… j'en ai déjà assez, maugréa-t-elle, la voix crispée.

Pendant plusieurs heures, elle alla de tiraillement atroce en élancement insupportable, le tout ponctué par quelques baisers qu'ils arrachaient à tour de rôle à la bienséance et à la légalité. Et soudain, alors qu'aucun des deux n'avait osé franchir la limite de ces étreintes au demeurant toujours très chastes, Hermione se retrouva à califourchon sur le maître des potions. Lui, avait posé ses mains tout en haut des cuisses nues de la Serdaigle, et glissé ses pouces sous l'élastique de son sous-vêtement, sans ambition supplémentaire apparente. L'étreinte était brûlante, la position hautement érotique. Le bassin d'Hermione, négligemment appuyé contre le bas ventre de Rogue, créait à son contact un point incandescent, fait d'empressement et de désir en fusion. Il y avait-là le noyau-même de la Terre, le centre de leurs envies enfin dévoilées. La scène avait été permise par un répit bien plus long que les précédents entre deux vagues de douleurs. Leurs respirations étaient devenues erratiques, leurs gestes moins précis. Les paumes d'Hermione remontèrent le long de ses avant-bras, brossant la légère toison sombre qui se trouvait là, butant finalement contre ses manches roulées. Alors qu'elle songeait à lancer ses doigts à l'assaut des boutons de sa chemise, elle sursauta, rompant un baiser qui était allé bien plus loin que leurs lèvres.

- Attendez. Je n'ai plus mal.

- Tant mieux, rétorqua-t-il sans réfléchir, un peu sonné, la bouche tendue vers elle.

Puis il fronça les sourcils.

- Par Morgane, c'est terminé ? questionna-t-il finalement, alors qu'elle se redressait.

- Il me semble que oui. Je ne suis plus fébrile.

Elle rendit ses mains devant elle.

- Je ne tremble plus, je n'ai plus l'impression d'être prise dans une congère.

Enfin, elle posa ses paumes sur son bas-ventre.

- Et ce n'est plus comme si j'allais d'un instant à l'autre me déchirer de part en part. Accio ! s'exclama-t-elle. Je dois le faire de suite ! Et la potion... Professeur, mettez le chaudron en chauffe.

C'était bien la première fois qu'elle prenait l'initiative de lui donner un ordre. Cela sonnait tout aussi étrangement que l'appellation « professeur » suite aux effusions qu'ils venaient de partager. Alors qu'elle s'engouffrait dans la petite salle de bain prévue par la Salle sur Demande, Rogue se dirigea vers la table de travail. A sa proposition d'assistance, elle répondit par la négative, et referma la porte derrière elle. La vieille culotte qu'elle avait portée toute la soirée, trempée du désir inassouvi provoqué par leur étreinte, fut délaissée sur le tapis aux bouclettes bleu nuit. Évidemment, elle devait être nue. Hors de question de faire jaillir toute la série de ses cellules reproductrices à travers la paroi de son abdomen. Non, sa semence devait sortir via le chemin le plus naturel prévu, son vagin. Elle s'assit sur l'extrémité glacée d'un bidet, cuisses largement ouvertes. Sans réfléchir plus en avant, pour éviter l'angoisse et le stress, elle se représenta tous les ovules expulsés comme autant de sphères à extraire. Bellatrix avait été évasive sur le sujet, mais claire quant à la nécessité de bien se représenter la finalité désirée à l'issue du sortilège. Dans sa main droite, elle tenait une fiole assez grande, et de l'autre, elle pointa sa baguette juste sous ses petites lèvres :

- Accio, murmura-t-elle, en visualisant le chemin de ses cellules au travers des trompes, de l'utérus, du vagin.

Et soudain, sans aucune sensation supplémentaire que celle d'une masse molle passant l'entrée de ses lèvres, elle attira du bout de sa baguette une quantité incroyable d'une substance étrange, plutôt visqueuse, transparente et zébrée de filets blancs opaques. Elle guida le butin vers le contenant qu'elle avait prévu à cet effet, et le posa au sol. Par Morgane… c'était fini et ça n'avait pas été plus compliqué que cela. Cette partie de l'antidote, la plus engageante, était finie ! Et Merlin, la session d'expulsion avait été insupportable, elle avait clairement eu l'impression d'être un gros crapaud pondant ses œufs par chapelets. Mais, d'un autre côté… il y avait eu Rogue et… leurs rapports… étonnamment… naturellement… compatibles. Elle n'avait pas vraiment intégré l'évidence jusqu'ici, elle avait embrassé Severus Rogue. Nom d'un Boullu goulu, ils avaient même passé la soirée à s'étreindre comme deux adolescents dans un coin de la Grande Salle pendant le Bal de Noël. Hermione secoua le visage et passa sur ses épaules un peignoir plutôt fin, mais chaud, qui pendait derrière la porte. Se saisissant de la flasque qui contenait l'ingrédient capital de son antidote, elle revint dans la pièce principale. Le maître des potions avait aligné tous les antidotes concoctés par Hermione sur la table de travail. Il avait pris place sur l'un des deux tabourets de bois, devant un chaudron vide sous lequel ronronnait quelques flammes.

Était-ce dû à son peignoir ? A leurs baisers dont elle rougissait encore ? Toujours est-il que le regard qu'il lui lança fut complètement nouveau.

- Vous avez réussi, souffla-t-il.

- Oui.

- Ce n'était pas une question.

Elle esquissa un sourire et vint prendre place près de lui, sur le second tabouret prévu par la Salle sur Demande. Bellatrix avait conseillé de mélanger au plus vite la semence à une potion, quitte à la mettre en stase ensuite, s'il était besoin d'ajouter des éléments ultérieurement. La composition de son antidote fut simple. D'après les dires de Rogue, la pratique de la Magie Noire nécessitait davantage d'écoute de son instinct que du suivi rigoureux d'une recette. Elle faisait fi du nombre de tours dont on remuait la préparation, il n'y avait pas de minutage… Tout reposait sur l'implication de la préparatrice, d'où l'importance de préparer soi-même son propre antidote. Hermione mélangea dans l'eau du fleuve Léthé, les préparations à base de fève de calabar, de fleurs de cannabis sans graines, de passiflore. Après avoir jeté un regard à Rogue, en quête d'un assentiment et d'un peu plus de courage, elle versa l'intégralité de la fiole qui contenait ses propres cellules. Toutes ses cellules.

- Il ne reste plus qu'à…

Le maître des potions s'éclaircit légèrement la gorge.

- … faire la lumière sur le dernier ingrédient sous-entendu par Bellatrix Black.

Hermione sursauta.

- Par Merlin, j'aurais dû vous le dire ! Je l'ai vu, dans le premier monde, c'était évident… tout comme la semence est une réponse au sang, il y a une réponse aux larmes… les plus précieux souvenirs des proches !

Rogue la dévisagea, incrédule.

- En effet. Vous auriez dû me le dire.

Après avoir pris un air boudeur, il lui lança un regard par-dessous ses sourcils broussailleux froncés, et esquissa l'ombre d'un sourire. Hermione, elle, sentit son cœur s'alléger si intensément, qu'elle éclata d'un grand rire, de soulagement et de joie mêlée. Soudain, sans que ni l'un, ni l'autre, ne se rende compte de la tournure que prenaient les événements, un cliquetis se fit entendre derrière eux, et la porte s'ouvrit à la volée sur Harry Potter, baguette brandie, qui beugla :

- Ne bougez plus !