Bonjour à tous et bonne lecture !
Avec hâte, Sirius sortit de l'âtre de la cheminée dès que la cuisine du Square Grimmaurd se matérialisa devant lui. Il s'arrêta juste assez longtemps pour remarquer la poêle abandonnée sur la gazinière – Kreattur était apparemment parti en urgence – avant de se mettre à courir dans les escaliers, de glisser sur le parquet et de se lancer dans l'escalier principal, métamorphosé en Patmol. Il se coupa une patte sur du verre – qui provenait de lampes cassées – en montant dans les étages, mais la chose qui le perturba le plus fut de constater que la magie de Harry avait continué à se déchaîner même après qu'il soit arrivé à la maison, au lieu de s'affaiblir, fatiguée d'avoir défait les protections de Poudlard.
Plus Sirius montait dans les étages, plus l'environnement devenait bruyant. La raison à cela devint visible lorsqu'il réussit à reconnaître la voix crissante de sa mère Harry avait apparemment dérangé les portraits. Et plutôt deux fois qu'une, car ils étaient entassés en pile sur le sol du placard de Kreattur, maudissant « Potter, le morveux ». Kreattur était là aussi et Patmol se retransforma en Sirius en l'apercevant. Le vieil elfe alternait entre se cogner la tête contre le mur et fixer la porte fermée de Harry d'un air inquiet.
« On a dit à Kreattur de ne pas s'inquiéter, couina Kreattur, misérablement. Mais Kreattur s'inquiète, oh oui. Le morveux ne va pas bien, oh non, même s'il dit qu'il va bien, mais on a dit à Kreattur de rester dehors, oh oui, et Kreattur écoute- »
« Je vais m'en occuper. » promit Sirius, avant d'être frappé par la pensée désagréable qu'il ne serait peut-être pas capable de le faire cette fois.
Ce n'était pas un problème de confiance en lui pour Harry ou quelque chose qui manquait d'explications. C'était de la faute de Sirius. Il aurait du attendre que Harry soit parti avant de se lancer dans une discussion avec Dumbledore à propos des conséquences après le procès et il n'aurait pas du laisser Rogue le provoquer comme il l'avait fait et il n'aurait sûrement pas du lui répondre. Lily m'aurait jeté un sort pour m'être comporté comme je l'ai fait aujourd'hui, pensa-t-il avec amertume. Et Cornedrue aussi. Lunard l'aurait fait aussi, j'en suis sûr, mais après, il se serait senti aussi mal que moi.
« Harry ? appela-t-il en tapant à la porte. Je peux entrer ? »
Aucune réponse.
« Harry ? Gamin ? »
Toujours rien.
« Harry, dit Sirius. Si tu ne veux pas parler, pas de problème, mais est-ce que tu peux juste me dire si ça va ? »
Sirius se tritura les doigts.
« Harry ? Gamin, je vais rentrer. »
Sirius n'obtint aucune protestation en guise de réponse et tourna la poignée, surpris de constater que la porte n'était pas fermée. Elle s'ouvrit largement. Ce n'était pas aussi bordélique qu'il s'y était attendu il y avait des vêtements sur le sol, mais ils avaient l'air d'avoir été abandonné là, pas jeté par une magie accidentelle. Le bureau était toujours en bazar et apparemment pas affecté par la magie non plus. Le lit de Harry était défait, mais il ne le faisait jamais de toute façon, et Harry lui-même était emmitouflé dans ses couvertures au bout du lit, immobile.
« Harry. » dit Sirius en s'approchant.
Harry ne bougea même pas un cil. Sirius jura dans sa barbe et s'approcha du lit. Harry était en fait inconscient. Il était très pâle, recouvert de transpiration, et il perdait du sang à cause d'une coupure sérieuse à la base du cou.
Désartibuler, pensa Sirius en grimaçant. Il souleva Harry et le reposa sur le lit de manière à ce qu'il soit plus confortable – il dut forcer pour retirer la baguette de son filleul de son poing fermement serré, après avoir manqué de la prendre dans l'œil. Il soigna ensuite la coupure et lava le sang en quelques mouvements de baguette.
Quelques diagnostics supplémentaires lui indiquèrent qu'il n'y avait rien de vraiment grave chez Harry – rien d'autre que de l'épuisement. Il plaça alors un sort pour l'informer lorsque les pieds de Harry toucheraient le sol – un sort qu'il avait trouvé dans le livre sur l'éducation que Remus lui avait offert à Noël – et il quitta la pièce. Kreattur attendait toujours sur le palier.
« Il dort. » dit Sirius d'une voix qui sembla sinistre même pour ses propres oreilles.
« Il faut réveiller le petit morveux. » suggéra Kreattur avec un air inhabituellement rusé.
Sirius se tourna et jeta un œil à la porte de Harry. Alors il secoua la tête sans croiser les yeux de Kreattur. Kreattur s'offusqua et montra les escaliers.
« Kreattur va faire du thé. » décida-t-il.
Sirius ne l'en empêcha pas il descendit les escaliers et se sentit encore plus coupable lorsque Kreattur refusa de le laisser réparer les dommages que Harry avait causé.
Trois heures, sept tasses de thé et une conclusion – que Remus avait du rentrer chez lui ou qu'il était resté à Poudlard, car il n'était pas revenu – plus tard, Sirius sursauta en sentant sa baguette vibrer Harry était debout. Sirius vida d'une traite le restant de thé et se leva – Kreattur lui lança un regard avant de se retourner vers la planche à découper – en se sentant nerveux et aussi incroyablement honteux et embarrassé.
A cause de Rogue ? se demanda Sirius en montant les escaliers. Ou à cause de ma façon d'agir ? Il n'avait toujours pas décidé lorsqu'il atteignit la porte de Harry – qui était toujours fermée – et frappa.
« Harry ? »
Il n'obtint aucune réponse, mais cette fois, Sirius était sûr que Harry l'ignorait.
« Gamin, je peux entrer ? »
« Si je dis non, tu vas entrer quand même ? » demanda Harry.
Il y avait plus d'amertume que d'humour dans sa voix et Sirius hésita.
« Non » répondit-il après une pause.
Il y eut un silence – durant lequel Harry réfléchissait à ça – et un soupir.
« Très bien. » dit Harry.
Sirius entra dans la pièce. Harry était recroquevillé sur sa chaise de bureau, fixant la fenêtre avec une expression distante sur son visage d'enfant et sa baguette tenue fermement dans sa main. Sirius leva sa propre baguette pour faire apparaître une chaise, mais préféra finalement éviter. Il resta debout.
« Merci d'avoir soigné mon cou. » dit Harry sans le regarder.
Sirius leva la main nonchalamment.
« Tu te sens bien ? »
« Fatigué. » offrit seulement Harry pour toute réponse.
« Je peux te parler ? »
« Tu le fais déjà. » répondit Harry, toujours sans le regarder.
« Je suis désolé. » dit Sirius.
« Je ne veux pas d'excuse ! » lui dit Harry en tournant sa chaise de bureau vers lui.
« C'est dommage, dit Sirius. Parce que tu en auras quand même. »
« Mais tu ne m'as rien fait. » marmonna Harry en le regardant fixement pour la première fois.
Sirius leva les yeux au ciel, mais fut attristé de voir la méfiance sur le visage de Harry. Il essayait visiblement de rester impassible, mais il échouait lamentablement il serrait la mâchoire régulièrement comme pour se rappeler à lui-même qu'il était furieux et il ne pouvait dissimuler la déception qui traversait ses yeux verts et brillants.
« Je t'ai fait du mal. » dit-il.
Harry haussa les épaules, essayant de paraître indifférent.
« Je suis désolé d'avoir être un crétin avec Rogue- »
« Je me fiche de ça. » lança Harry.
Sirius arqua un sourcil.
« Enfin un peu, mais pas tant que ça. Il le mérite. »
« Ce n'est quand même pas une excuse. » dit Sirius, désormais un peu perdu.
Qu'avait-il fait exactement pour perturber son filleul ? Il attendit. Harry déglutit bruyamment, passa sa baguette de sa main gauche à sa main droite et serra la mâchoire. Ses yeux, qui jusque là essayaient d'éviter le regard de Sirius, se posèrent finalement sur son visage.
« Tu as vraiment essayé de tuer Rogue ? » demanda-t-il en allant directement au but, répondant aux attentes silencieuses de Sirius.
Ah. Sirius prit une inspiration profonde.
« Je- »
Harry le fixa avec un regard critique et bougea sa baguette presque imperceptiblement, de manière à ce qu'elle soit pointée vers Sirius. Il a peur de moi, réalisa-t-il. Avec cette pensée vint la honte et cela faisait mal.
« Ne mens pas, dit Harry. S'il te plaît. »
Sirius acquiesça lentement et s'assit au bout du lit de Harry.
« C'était un accident. »
« Donc c'est vrai. »
« Ce n'était pas mon but, expliqua Sirius en laissant échapper un souffle bruyant. C'était une pleine lune. James et Peter m'attendaient dans le dortoir pour qu'on aille tous les trois rejoindre Remus et lui tenir compagnie. Rogue était … Rogue. »
Les yeux de Harry se plissèrent légèrement.
« Je n'essaye pas de me défendre, je le promets. J'essaye juste de replacer les choses dans leur contexte. Rogue nous suivait toujours partout, en essayant de nous faire renvoyer – Merlin sait pourquoi – et habituellement, ce n'était pas un problème, mais puisque je devais rejoindre les autres et qu'on devait retrouver Lunard, j'étais pressé. Rogue n'arrêtait pas de faire des hypothèses idiotes sur l'endroit où se trouvait Lunard et ça m'a énervé au point que j'ai fini par lui dire comment passer le Saule Cogneur. Je n'avais pas prévu de le faire. J'étais énervé, ça m'a échappé et c'était trop tard. »
Il sourit sans joie.
« Tu as envoyé Rogue droit sur un loup-garou ? » demanda Harry.
« Écoute, j'étais jeune, j'étais stupide, je voulais que Rogue dégage et me laisse tranquille … Je n'ai pas réfléchi du tout. »
Harry ne le contredit pas. Sirius ne s'attendait pas à ce qu'il le fasse.
« Bien sûr, la première chose que j'ai essayé de faire, ça a été de lancer à ce crétin un sortilège d'Amnésie. La deuxième, ça a été de le dire à James. »
« Je parie qu'il a trouvé ça drôle. » murmura Harry.
« Drôle ? Pas du tout ! »
Harry eut l'air surpris et … plein d'espoir ?
« Il a rejoint Rogue. Il lui a sauvé la vie. »
Il y avait des détails supplémentaires, bien sûr, mais le reste n'était pas très pertinent.
« Et t'es resté assis à attendre ? » demanda Harry, un peu férocement.
« Bien sûr que non. C'était le boulot de Peter il s'est assis sur son lit et il a fait ses devoirs. Non, je suis allé dire à McGonagall ce que j'avais fait et je suis descendu aider James à porter Servilus – il s'est évanoui quand il m'a entendu arriver. »
« Oh. » dit Harry.
« Oh ? » répéta Sirius, amusé malgré lui.
Harry rougit, mais il baissa légèrement sa baguette.
« Alors c'était un accident ? »
« Je n'ai pas déjà dit ça ? »
Harry se mordit la lèvre.
« Comment était vraiment mon père ? »
« Qu'est-ce que tu veux dire par comment il était vraiment- »
« Est-ce qu'il était désagréable ? lança Harry, l'air triste. Rogue a dit qu'il était capable de tuer à l'âge de seize- »
« Jamais, répondit fermement Sirius. Désagréable, peut-être – on l'était tous, en fait. Capable de tuer … absolument pas. »
« Il ne voulait pas que Rogue meurt ? »
« Tu n'écoutes pas ce que j'ai dit ? James a sauvé Rogue. Et je- je lui ai dit comment descendre, bien sûr, mais je ne voulais pas vraiment qu'il soit blessé. Je suis un abruti, gamin, mais je ne suis pas un monstre. »
Le visage de Harry s'éclaira un peu et Sirius se demanda quelle partie l'avait rassuré. Un instant plus tard, cependant, Harry eut l'air frustré.
« Pourquoi il le déteste autant ? » demanda Harry, agacé.
« Qui ? »
« Rogue, et Papa. »
« C'est un peu de tout, gamin. La jalousie pour la plupart James était un joueur de Quidditch – Poursuiveur ou Attrapeur, il excellait dans les deux postes – il était intelligent, populaire, tout le monde l'aimait. Rogue était étrange. Lily était sa seule amie et même elle, a arrêté de l'être après la cinquième année – il lui a dit certaines choses et il était trop intéressé par les forces du mal pour qu'elle puisse lui pardonner … Je ne te mentirais pas en disant que James et moi n'avons pas mené la vie dure à cet idiot, mais il n'était pas du genre à s'asseoir et à subir – on a reçu autant qu'on a donné, je peux te l'assurer. »
Harry ne semblait pas savoir s'il était réconforté par ça ou non.
Après un instant, ses yeux redevinrent distants et il sembla se perdre dans ses pensées. Sirius attendit patiemment, prêt à répondre à la moindre question qu'il pourrait avoir, mais rien ne vint. C'est difficile de se souvenir qu'il n'a même pas dix ans encore, pensa-t-il en soupirant doucement. Harry était indépendant et très mature dans sa façon de parler et de se comporter.
« Patmol ? »
Il utilise toujours le surnom, pensa-t-il, soulagé. C'est bon signe.
« Ouais ? »
« Tu as toujours des furoncles sur le front. »
« Je sais. »
Ils le démangeaient affreusement d'ailleurs, mais ils pouvaient attendre.
« Patmol. » dit encore Harry.
« Ouais ? »
« Désolé d'être parti comme ça. »
« A Poudlard ? »
Harry acquiesça. Il leva les yeux au ciel.
« Gamin, tu n'as pas besoin de t'excuser pour ça. On a déjà conclu que je me suis comporté comme un imbécile. C'est de ma faute si tu es parti … Par contre ... »
« Oui ? »
« La prochaine fois que tu le verras, tu devrais probablement t'excuser auprès de Dumbledore pour avoir ruiné ses protections. »
« Je voulais pas. » murmura Harry.
« Personne ne te le reproche, lui assura Sirius. Ce serait juste poli de le faire. »
Harry hocha la tête.
« Alors, dit Sirius, hésitant. Ça va entre nous ? »
Harry l'observa un instant et acquiesça.
« Voilà Maman. » dit la fillette en les menant jusqu'à la cuisine.
Une femme – probablement Aislinne – les regarda par-dessus son épaule lorsqu'ils entrèrent. Elle était en équilibre avec un pied sur le plan de travail et l'autre sur une chaise bien fragile. Tonks s'attendait à la voir tomber à chaque instant, mais elle avait l'air parfaitement confortable.
« Bonjour. » dit-elle d'une voix aussi rêveuse que celle de sa fille.
Elle ajouta quelques éclats jaunes de plus au dragon qu'elle peignait sur le placard de la cuisine, avant de glisser son pinceau derrière son oreille – et Tonks sut enfin d'où venait l'étrange manie de sa fille.
« Je suis l'Auror Maugrey. » dit Fol-Oeil de sa voix bougonne, lui montrant son badge.
Tonks l'imita.
« Voici l'apprentie Tonks. Nous avons quelques questions à vous poser. »
Aislinne descendit de son échafaudage – Tonks savait que si c'était elle qui avait du faire ça, elle serait tombée et se serait cassée quelque chose, mais Aislinne maîtrisa la chose avec l'aisance de l'expérience – essuya ses mains sur son jean à fleurs et regarda curieusement le Sidekick de Fol-Oeil.
« Intéressant. » dit-elle en le détaillant.
Les lèvres de Fol-Oeil se pincèrent et Tonks constata qu'il commençait à s'agacer.
« Ce n'est pas réalisé avec de l'or de leprechaun, n'est-ce pas ? »
« Non, Maman, dit la fillette. J'ai vérifié. »
Elle et sa mère échangèrent un sourire qui donna l'impression à Tonks qu'elles partageaient un secret important un secret duquel elle et Fol-Oeil étaient exclus. Elle tourna le regard vers Fol-Oeil, qui avait l'air aussi confus que Tonks par les événements de la journée.
« Les joncheruines vous ennuient ? » demanda sérieusement Aislinne.
Tonks et Fol-Oeil échangèrent un autre regard confus et Aislinne balaya l'air autour d'eux d'un revers de main.
« La cuisine en est remplie, je le crains ils aiment l'odeur de la peinture. Venez, allons plutôt dans mon bureau. Peux-tu lancer la bouilloire, Luna, ma chérie ? »
Luna acquiesça et se dirigea directement vers un placard, sortant de celui-ci la plus étrange bouilloire que Tonks avait vu elle ressemblait un peu à une méduse. Elle et Fol-Oeil eurent à nouveau le temps d'échanger un regard perplexe avant de se rendre dans une autre pièce, entourée d'étagères pleine de livres. Un large bureau, soigneusement sculpté, occupait une grande partie de l'espace – Tonks remarqua plusieurs écorchures sur le bois – et le reste de l'espace au sol était occupé par des instruments étranges qui rappelaient à Tonks le bureau de Dumbledore. Ils étaient en bois, cependant, et non en argent.
« Asseyez-vous, je vous en prie. » dit Aislinne en désignant deux chaises dépareillées.
Une était un fauteuil large et moelleux et l'autre était une espèce de tabouret de bar. Aislinne remarqua que Tonks les observait et reprit la parole.
« Je trouve qu'avoir des sièges différents m'aide dans mes recherches. » expliqua-t-elle, s'asseyant sur une chaise de bureau plutôt normal.
Tonks commençait à se sentir si confuse à propos de tout ça qu'elle attendit pour une fois que Fol-Oeil lance ses sorts de contrôle avant de s'asseoir.
« Que savez-vous de Fenrir Greyback ? » demanda Fol-Oeil.
« Ooh, énormément, dit Aislinne, l'air impressionnée par la tournure que prenait la conversation. Il est – ou était – le loup-garou le plus connu- Saviez-vous qu'un loup-garou peut sentir si vous êtes heureux ou triste, à la manière des chats ou des chiens, même quand ils sont humains ? »
« Oui, nous le savons. » lui indiqua Fol-Oeil.
« Ce serait sacrément utile, vous ne pensez pas ? poursuivit-elle, l'air pensif. Mon mari a publié à un article dans son magazine à propos de ça, mais nous avons conclu que les avantages de ces sens sur-développés ne compensaient pas la douleur de la transformation. Pour autant, ça interroge, n'est-ce pas ? »
« Je suppose. » dit Tonks, lorsque Fol-Oeil ne répondit pas.
« Désolé. » dit Aislinne en grattant une tâche de peinture sur son poignet.
Elle fendit l'air de sa main à nouveau, comme elle l'avait fait dans la cuisine.
« Encore des joncheruines. Cette pièce est protégée contre eux, mais occasionnellement, il y en a un qui passe à travers, en s'accrochant à l'un de nous. »
Elle observa Fol-Oeil.
« Je crois que celui-là était à vous. Vous sentez-vous différent d'il y a quelques instants ? »
« Restons sur le sujet, s'il vous plaît, Lovegood. » dit Fol-Oeil.
Tonks suspecta que s'il avait répondu à sa question, la réponse aurait pu ne pas être appropriée pour une conversation polie.
« Oh, Greyback, dit Aislinne. Bien sûr, désolé. Et bien, je pense que c'est plutôt un sale type et je dois dire que c'est probablement une bonne chose qu'il soit mort- »
« Vous êtes heureuse qu'il soit mort ? »
« Heureuse est un bien grand mot, dit-elle en secouant sa tête blonde. Je crois qu'enthousiaste correspondrait mieux. Il a fait tant de mal … Le pauvre homme a commencé en promouvant l'égalité, ce qui est, à mon avis, une cause plutôt admirable, mais il s'est perdu en chemin. Très facile de se perdre, malheureusement, et il a blessé beaucoup de monde. Il prendra peut-être un nouveau départ dans la mort, tout comme les personnes qu'il a blessé. Dans la vie, dans leurs cas. »
« Et votre travail consiste à créer des sortilèges ? » demanda Fol-Oeil.
« En effet. » répondit Aislinne, curieuse.
« Un métier dangereux, ça. » commenta Fol-Oeil.
« Oh, ça peut l'être, je suppose, dit-elle. Mais quelqu'un doit bien le faire et j'apprécie les enchantements- »
« Les enchantements ? » demanda Fol-Oeil.
« J'ai toujours été plutôt mauvaise en métamorphose, confia-t-elle, l'air ennuyé. C'est triste, vraiment, parce que ça veut dire que je dois trouver toutes sortes d'autres façons, bien plus compliquées, de faire des choses qui pourraient être simples. Mais je n'ai jamais été très douée pour les transformations. »
Tonks et Fol-Oeil échangèrent un long regard.
« Mme Lovegood, les articles de votre mari sont très détaillés, dit Tonks en jetant un coup d'œil à Fol-Oeil, qui lui fit signe de poursuivre. Nous nous demandions d'où vous tiriez vos informations- »
« Je vous confirme qu'il y a énormément de recherches, dit-elle, un peu froidement. Comme dans l'ensemble du travail de Xenophillius. »
« C'est ce que nous voulions dire, répliqua rapidement Tonks. C'est évident que vous avez une source interne – peut-être l'une des victimes de Greyback ? »
« Peut-être, dit Aislinne en souriant soudainement, mais elle eut l'air déçu l'instant d'après. Je ne peux pas vous offrir de nom, j'en ai bien peur. Notre source est absolument fascinante pour nos recherches et adorable pour ce qui est des discussions- »
« Nous aurions des questions pour elle. » dit Fol-Oeil.
Aislinne eut l'air troublé, puis secoua la tête.
« Je ne peux pas vous aider, je le crains. »
« C'est une enquête officielle- »
« Et je m'efforce de répondre honnêtement à vos questions, dit-elle sereinement. Mais je ne peux pas et je ne vous donnerais pas ma source. »
Elle claqua des mains, l'air décidé, mais sincèrement désolé.
« Je suis désolée de vous bloquer. Si vous avez d'autres questions, je serais heureuse d'y répondre, mais dans le cas contraire, je dois retourner à la cuisine. »
Il y eut un petit coup sur la porte et Tonks se retourna pour apercevoir Luna, qui portait un plateau avec des tasses fumantes.
« Voudriez-vous du thé avant de partir ? » demanda-t-elle.
Tonks renifla – le thé était bleu éclatant, ce qui était inquiétant – et elle plissa le nez. Son odorat n'était pas aussi bon que celui de Remus, mais il était suffisamment bon pour reconnaître quelque chose qui ne devait définitivement pas être ingéré.
« Euh. » dit-elle en regardant Fol-Oeil, qui semblait être parvenu à la même conclusion.
« Non, nous sommes attendus ailleurs, dit-il. Merci pour vos réponses. »
« Aucun problème, dit Aislinne en prenant une gorgée de sa propre tasse. Bonne chance pour votre enquête. »
Luna leur indiqua le chemin de la sortie et les salua joyeusement de la main avant de retourner à l'intérieur. Tonks se tourna vers Fol-Oeil.
« Intéressant, pas vrai ? » demanda-t-elle faiblement.
Fol-Oeil renifla et agita sa baguette.
« Qu'est-ce- »
« Ça m'indiquera si elle envoie des lettres et à qui. » dit Fol-Oeil.
« Alors tu ne penses pas que c'est ? » demanda Tonks.
« Et toi ? demanda Fol-Oeil, avant qu'elle ne secoue la tête. Bien. Tu as de l'instinct. »
Tonks rayonna, mais elle commença aussi à se sentir mal de nouveau. Si ce n'était pas Aislinne, elle avait des idées concernant le véritable meurtrier et elle n'aimait pas plus l'idée maintenant que plus tôt dans la matinée.
« Patmol. »
Sirius se réveilla en sursaut en sentant une main sur son épaule.
« Par Merlin, Kreattur ! » grogna-t-il. On a déjà parlé- »
« C'est Harry. » dit-il.
La petite forme sombre debout près du lit bougea un peu.
« Harry, c'est le milieu de la nuit. »
« Je sais. J'ai juste … Désolé. »
Sirius s'assit en soupirant et se frotta les yeux.
« Qu'est-ce qui t'ennuie ? »
Harry resta silencieux pendant un long moment. Sirius bailla et tapota le lit près de lui. Harry accepta l'invitation et s'assit.
« Tu te sens bien ? Est-ce que ton cou- »
« Ça va. »
« Erm … Un cauchemar ? » demanda Sirius en laissant échapper un autre bâillement.
« Tu vois Papa et Maman à travers moi ? » lança-t-il finalement.
Sirius plissa les yeux dans sa direction, mais il faisait trop sombre pour discerner l'expression de Harry. Il envisagea d'allumer sa baguette, mais il imagina qu'il ne ferait rien d'autre que les aveugler tous les deux. Au lieu de ça, il renifla et fut déconcentré en découvrant que Harry était inquiet, mais aussi un peu coupable.
« Qu'est-ce qui te fait dire ça ? » demanda-t-il finalement.
« Quelque chose que Rogue- »
Sirius grogna avant même qu'il ait pu finir et Harry frissonna.
« Gamin, non, dit-il. Je ne vais pas te mentir et te dire que tu ne me les rappelles pas de temps en temps … Mais non. Plus souvent que l'inverse, je te regarde et je vois les différences … Il ne faut pas regarder longtemps pour savoir que tu n'es pas une copie de James et la baguette de Lily ne te correspond pas, encore moins que celle de Cornedrue. »
« Tu dis toujours que je leur ressemble, pourtant. »
Sirius sourit un peu tristement. C'était juste pour lui-même, et peut-être pour James et Lily s'ils regardaient de là-haut, parce qu'il était impossible que Harry puisse le voir.
« Tu leur ressembles et c'est probablement le plus beau compliment que je pourrais te faire. »
« Alors je leur ressemble, mais pas vraiment ? » demanda Harry en bougeant un peu contre lui.
« C'est ça, dit Sirius. Tu étais si petit quand je suis venu te chercher chez les Dursley que j'ai du être celui qui se montrait responsable. »
Il sourit avec ironie et lorsqu'il réalisa que Harry ne pouvait pas voir ça, il renifla. Harry avait l'air amusé.
« Ça a fait une énorme différence, parce que j'ai toujours été celui qui avait besoin qu'on s'occupe de lui. »
Harry resta silencieux.
« Au risque de passer pour un complet abruti, ajouta Sirius, content que ce fut Harry avec qui il avait cette conversation et non James. Vous avez des ressemblances, comme je l'ai dit – particulièrement dans ton apparence, mais si tu étais si ressemblant que je pourrais me tromper – à l'un ou l'autre, d'une façon ou d'une autre – alors ils ne me manqueraient pas autant qu'ils manquent. »
Harry s'enferma dans un silence pensif après ça, mais s'endormit avant même de pouvoir partager ses conclusions. Sirius pouffa de rire, l'emmitoufla dans les couvertures et se tourna sur le côté, espérant se rendormir sans beaucoup d'espoir les pensées qui se bousculaient dans sa tête étaient trop bruyantes pour réussir à les ignorer.
Sirius prit une inspiration profonde et frappa une fois, doucement, sur la porte en bois sombre du bureau de Rogue. Il se balança sur ses talons, patientant, et lorsque personne ne répondit en presque une minute, il frappa de nouveau.
« Oui ? » entendit-il, tandis que la porte s'ouvrit.
Les yeux sombres de Rogue se posèrent sur son visage et Sirius eut juste le temps d'ouvrir la bouche avant que la porte se referme brusquement, manquant son nez de peu.
« Rogue ! » appela-t-il.
Il entendit des bruits de pas s'éloigner de la porte et il grogna dans sa barbe.
« Rogue ! »
Il frappa encore et s'arrêta pour écouter le bureau était redevenu silencieux. Sirius soupira et traversa le couloir, s'adossant contre le mur froid et humide des donjons et croisant les bras.
« J'aimerais te parler si tu as un moment, dit fortement Sirius, ne recevant aucune réponse. J'aimerais m'excuser. »
La porte s'ouvrit et le visage meurtrier de Rogue apparut dans l'encadrement. Sirius leva immédiatement ses mains pour montrer qu'il n'avait pas de baguette.
« Viens-en aux faits, alors. » cracha-t-il.
C'était un ton qui faisait toujours réagir Sirius, mais pas aujourd'hui. Il prit une grande inspiration et adressa à l'autre homme un regard impassible. Pendant un moment, Rogue sembla perdu.
« Quelques-uns d'entre nous ont des choses importantes à faire aujourd'hui. »
« Je suis désolé. » dit Sirius avec sincérité, se demandant ce que James aurait pensé de lui s'il avait pu le voir.
Le fait de ne pas savoir ce qu'aurait été l'opinion de James était encore plus dérangeant que la tâche en elle-même. Il déglutit et essuya ses mains sur sa robe.
« Je- On était des enfants quand ça a commencé, dit-il en agitant la main entre eux deux. Et les enfants peuvent être stupides. Les adolescents aussi, mais ils devraient s'améliorer. Les adultes, en revanche- »
« La conclusion, Black. »
« La conclusion, Rogue, soupira Sirius. C'est que cette stupide querelle dure depuis nos onze ans ! Les préjugés entre maisons ont conduit à des maléfices, des insultes, à ce que je finisse presque par te tuer parce que je ne réfléchissais pas et à toi qui ne m'a pas aidé lorsque tu as su où était Peter- »
« Je n'ai jamais rien su de tel- »
« Harry t'a entendu parler à ma cousine. Tu savais. » dit Sirius.
Le visage de Rogue était insondable.
« Je dis juste que c'est fini, lança Sirius. Je suis désolé et- »
« Fini ? Désolé ? railla Rogue. Tu penses que tu peux te contenter de t'excuser et que tout sera pardonné ? J'ai subi pendant des années à cause de tes petits amis et tu as presque réussi à me tuer- »
« Un service que tu t'es efforcé de rendre pendant la guerre, répondit froidement Sirius, avant de soupirer. Non, je ne pense pas qu'une excuse soit suffisante pour tout réparer. Je ne pense que rien ne suffirait James t'a sauvé la vie et tu le hais encore. »
Rogue le fusilla du regard.
« Et je ne pense pas qu'on puisse jamais être amis, ou même s'apprécier, mais j'en ai assez de me ridiculiser. Lily a détesté James pendant des années parce qu'il se ridiculisait dès que tu étais dans le coin et je préférerais mourir plutôt que laisser Harry me détester pour la même raison- »
« Ah, donc le Potter miniature t'a dit de t'excuser- »
« Il ne sait même pas que je suis là. » s'écria Sirius.
Il prit une grande inspiration.
« Et je compte garder ça pour moi. Je ne veux pas de félicitations pour ça. C'est une excuse qui ne devrait même pas être nécessaire en premier lieu, puisque les choses n'auraient jamais du aller aussi loin. »
Rogue l'observa pendant un long moment.
« Je ne rigole pas. » dit Sirius.
« Apparemment pas. »
La lèvre de Rogue se retroussa.
« Puis-je te demander pourquoi cette pathétique tentative de réconciliation est importante pour toi ? Je suis un Mangemort, tu te souviens ? Tu ne me fais pas confiance et notre amitié imaginaire n'a aucune importance pour toi- »
« Tu as eu un procès. » dit doucement Sirius.
« Oh, oui, répondit Rogue avec ironie. Alors tout à coup, tu fais confiance au Ministère- »
« Je me fiche de ce que pense le Ministère, dit Sirius. Mais Dumbledore te fait confiance. »
Il sourit d'un air narquois.
« Et je déteste ça, avoua-t-il. Je déteste qu'il se soit porté garant pour toi et je déteste le fait que tu aies été innocenté après tout ce que tu as fais. Mais tu sais ce que j'ai réalisé ? Tout le monde pensait que j'avais fait quelque chose de terrible et c'est tout ce qui a suffit pour Dumbledore arrête de me faire confiance. »
Sa voix était un peu amer, mais il ne pouvait pas s'en empêcher.
« Toi, en revanche, poursuivit Sirius. Tu n'avais pas sa confiance. Et il s'est porté garant pour toi. Il ne m'a pas défendu – un homme qu'il connaissait et à qui il faisait confiance – mais il l'a fait pour toi. Et tu peux dire que Dumbledore est vieux ou sénile ou n'importe quel autre qualificatif, mais il n'est pas bête. Et s'il était prêt à te faire suffisamment confiance pour se mettre en avant et se porter garant, alors ce que tu as fait ou ce que tu as dit devait être suffisamment important pour- »
« Je n'ai aucune idée de ce dont tu parles. »
« Oh, bien sûr que si. » dit Sirius.
Rogue se détourna, l'air mal à l'aise pour la première fois.
« Je ne te dirais rien. » dit-il.
« Je ne te l'ai pas demandé. »
Rogue cligna des yeux.
« Non. » constata-t-il lentement.
Ils se dévisagèrent pendant un long moment. Ils étaient toujours rivaux – la quantité d'aversion venant de Rogue menaçait de faire éternuer Sirius – mais la haine avait disparu, ou du moins était absente de la conversation. L'odeur de Rogue changea brusquement, passant à une confusion curieuse.
« Alors que veux-tu après ça, Black, sinon mon pardon ? »
Le ton moqueur était de retour, mais Sirius s'en fichait.
« Je veux que tu saches que j'en ai fini avec cette stupide rivalité et que je suis désolé. »
« C'est tout ? »
« C'est tout. » confirma Sirius.
« Pas de services ? Pas d'attentes ? »
« Pas du tout, aucune. » dit Sirius en levant les mains.
Il patienta, espérant à moitié que Rogue s'excuse aussi, mais il ne le fit pas. Il semblait toujours digérer l'idée que Sirius n'avait pas d'objectif caché. Sirius passa une main dans ses cheveux, se demandant encore ce que James aurait pensé. Bien conscient que ce geste serait sûrement ignoré, Sirius lui tendit la main.
« Pas ennemis ? » dit-il.
Rogue fixa la main, comme s'il n'avait jamais entendu parler de poignée de mains de sa vie. Sirius bougea un peu d'un pied à l'autre et après presque une minute, s'éclaircit la gorge et commença à la baisser … Et alors, Rogue la serra très brièvement, et avec un air révolté sur le visage, mais il la serra et il n'essaya même pas de briser les doigts de Sirius en le faisant.
« Pas amis non plus. » cracha Rogue.
Il lâcha la main de Sirius, s'essuya sur sa robe et s'engouffra de nouveau dans son bureau. La porte claqua derrière lui.
