Hello hello! Bon j'ai pas mis six mois cette fois. ^^ Toujours pas de Poudlard dans ce chapitre, je sais que certains attendent ça avec impatience... Tout vient à point à qui sait attendre ;)
Enjoy & Review!
You need people like me, you need people like me so you can point your fucking finger and say, 'That's the bad guy'. So what does that make you? Good ? You're not good, you just know how to lie. Me ? I don't have that problem. I always tell the truth, even when I lie.
Scarface.
Il faut des gens comme moi, il faut des gens comme moi pour que tu puisses pointer ton putain de doigt et dire 'C'est le méchant'. Qu'est-ce que ça fait de toi, alors ? Le gentil ? Tu n'es pas gentil, tu sais juste mentir. Moi ? Je n'ai pas ce problème là. Je dis toujours la vérité, même quand je mens.
Scarface.
Chapitre 8 : What Does That Make You ?
Son expelliarmus fut paré avec un détachement tel que Tonks vit rouge. Elle enchaina avec un stupefix et un incarcerem qui furent écartés avec la même négligence. Le Mangemort avançait toujours droit sur elle et elle se demanda pourquoi il ne l'achevait pas directement. Avaient-ils reçu l'ordre de la ramener à sa tante Bellatrix ou à Greyback ? De la main qui ne tenait pas sa baguette, elle se tira en arrière aussi loin qu'elle le put en s'aidant de sa jambe non blessée, mais il n'y avait rien à faire.
Lorsque le Mangemort lui arracha sa baguette des mains – sans même s'encombrer de magie, ce qui était d'autant plus humiliant – Tonks était acculée contre le mur et avait l'autre main sur sa cheville, prête à tirer sa dague et à se défendre aussi brutalement qu'il le faudrait. La main gantée de noir l'homme agrippa son poignet avant qu'elle ait pu esquisser un geste défensif, comme s'il pouvait lire dans ses pensées.
« Me poignarder serait une bien piètre manière de me remercier, Miss. » lâcha le Mangemort, en s'accroupissant auprès d'elle. Il lui rendit sa baguette.
Tonks expira brusquement sous le coup du soulagement. Le masque lisse ne laissait rien deviner de l'identité de l'homme mais les deux yeux noirs et la voix grave et dangereuse étaient, eux, inimitables.
« Espèce d'idiot, vous m'avez fait peur ! » gronda-t-elle, en frappant son bras.
Il se figea. « Je vous prierais de réfréner vos tendances agressives. » exigea-t-il sèchement, avant de marmonner qu'on aurait pu la confondre avec un Gryffondor.
« Vous m'avez débarrassée de Bellatrix. » déduisit-elle, tandis qu'il se penchait pour examiner la plaie de sa cuisse. Elle le laissa faire parce qu'il devait sans doute s'y connaître beaucoup mieux qu'elle sur le sujet. Elle avait beau avoir une mère Médicomage, elle n'avait jamais éprouvé le moindre intérêt pour la question.
« Je ne pouvais pas vraiment la laisser vous tuer, si ? » grinça-t-il. « Serrez les dents. » Il positionna le bout de sa baguette au bord de la plaie et se lança dans une litanie latine. Elle enfourna son poing dans sa bouche et mordit les doigts à peine guéris pour ne pas hurler et trahir leur position. Elle avait l'impression qu'il était en train de lui refermer la jambe au fer à souder. « Il y aura une cicatrice. » avertit-il, lorsqu'il eut terminé.
« Une de plus, une de moins… » Elle balaya l'argument d'un geste. Haletante, elle laissa tomber sa tête contre le mur derrière elle et s'efforça de reprendre le contrôle de sa respiration. « Peut-être que Remus n'a pas tort. » lâcha-t-elle. « Je ne suis pas de taille à affronter ma chère tante Bella. »
Il était perturbant de s'adresser à de l'ivoire lisse qui ne trahissait rien des sentiments de son interlocuteur.
« D'autres que vous sont morts avant d'avoir eu le temps de lever leur baguette. » répliqua-t-il. « Le loup ferait mieux de garder ses opinions pour lui. » Il lui fallut quelques secondes pour déterminer que c'était un compliment. Elle l'aurait volontiers remercié mais il était déjà passé à autre chose. « Avez-vous alerté Dumbledore ? »
Elle secoua la tête. « Non, mais Remus a envoyé un Patronus à tous les membres de l'Ordre. » Elle tenta de prendre appui sur sa jambe et grimaça lorsque sa cuisse lui donna l'impression de s'enflammer. Elle ne laissa pas cela l'arrêter, toutefois, et prit appui sur le mur pour se redresser. Snape se releva et l'aida à faire de même avec autant de délicatesse que si elle avait été un sac de pommes de terre. « Pourquoi ne nous avez-vous pas alertés ? » Cela sonna comme une accusation mais elle n'avait pas véritablement le temps de faire dans la finesse. « C'est forcément un coup préparé à l'avance, Professeur. Vous deviez être au courant, c'est… »
« Seul le cercle intime du Seigneur des Ténèbres était dans la confidence. » la coupa-t-il froidement. « J'ai été convoqué avec tous les autres Mangemorts, à peine le Seigneur des Ténèbres nous avait-il expliqué le plan que nous étions en route. Je n'ai pas eu l'opportunité de prévenir qui que ce soit. »
Le croyait-elle ? De quel côté était-il véritablement ? « Il aurait dû y avoir davantage d'Aurors qu'il n'y en a là-dehors. » lâcha-t-elle. « L'équipe de Lisa sur les toits et David dans le… »
« Tous vos Aurors sont morts. » l'interrompit-il une nouvelle fois, sans douceur. « Vous avez raison sur un point, Nymphadora, cette attaque a été préparée en amont. Le Seigneur des Ténèbres n'ignorait aucun détail. »
Les échos de la bataille qui faisait toujours rage au bout de la ruelle ne l'aidait pas à réfléchir de manière claire. Elle refusait de penser que ses amis puissent être… Et pourtant… Si ce que Snape disait était vrai – et elle ne doutait pas que cela le soit parce que dans le cas contraire ses collègues auraient tous rejoint le combat – alors… Tonks se passa une main sur le visage puis dans les cheveux et affronta finalement les yeux noirs qui n'avaient jamais cessé de la scruter.
« Professeur, c'est impossible. » Son ton était presque suppliant. « Les quatre chefs d'équipe étaient les seuls au courant de tous les détails et… »
« Deux sont morts. » grinça-t-il. « Les deux autres ? »
« Kingsley et moi. » répondit-elle immédiatement. « Mais… C'est impossible. »
Son regard était pénétrant et Tonks eut toute la peine du monde à le soutenir, cependant, elle craignait que si elle s'avisait de le détourner, il se mettrait à penser qu'elle avait trahi et ça… Kingsley non plus n'avait pas pu les vendre, c'était impossible. Et puis, cela la frappa. Il n'y avait pas eu que quatre personnes au courant des moindres détails. C'était faux. Ils avaient présenté le plan, les solutions préventives et les mesures d'urgence à la dernière réunion de l'Ordre. Les dossiers étaient au Square Grimmaurd. N'importe qui ayant accès à la maison avait pu les consulter.
« Il y a un traître. » lâcha Snape, comme s'il pouvait lire dans ses pensées.
Le cœur de Tonks se mit à battre la chamade, ses mains étaient moites. Un traître ? Dans l'Ordre ? L'idée était écœurante.
« Ce n'est pas moi. » se défendit-elle.
Elle s'en voulut de cette affirmation hâtive. Si l'un d'eux avait à se justifier, ce n'était certainement pas elle. Si l'un d'eux avait eu l'occasion de trahir… Après tout, il aurait pu trouver un moyen de les avertir avant que l'enfer ne déboule sur le Chemin de Traverse. Le doute flasha-t-il sur son visage ou bien perçut-il son changement d'attitude à la manière dont elle agrippa plus fermement sa baguette ? Toujours était-il qu'elle n'avait pas besoin qu'il ôte son masque pour deviner qu'il arborait une expression exaspérée.
« Oh, s'il vous plait, Miss… » soupira-t-il. « Vous êtes loin d'être aussi idiote que vos chers amis Gryffondors, ne vous abaissez pas à leur niveau aujourd'hui. »
Il ne fit aucun geste agressif mais elle savait qu'il était bon duelliste, tout le monde le savait. Et contrairement à ce qu'en disait Remus, elle avait une bonne idée de ce qu'elle valait au combat. Si Snape avait voulu la désarmer, elle serait déjà vulnérable. Et pourquoi la sauver s'il était véritablement avec les Mangemorts ?
« Pourquoi devrais-je vous faire confiance ? » insista-t-elle.
« Parce que vous n'avez pas le choix. » répliqua-t-il, avec un amusement amer.
Elle se demanda, brièvement, depuis quand quelqu'un ne lui avait pas volontairement fait confiance, depuis quand quelqu'un n'avait pas décidé de le croire par choix davantage que par obligation, mais elle mit cette pensée à l'écart parce qu'elle n'avait pas le temps de se pencher sur des problèmes philosophiques qui n'étaient pas les siens.
« On a toujours le choix. » haussa-t-elle les épaules malgré tout. Dumbledore faisait confiance à Snape… Il était probablement le seul, cependant, et elle n'était plus très sûre que les décisions du Directeur soient aussi judicieuses qu'elle avait pu le penser par le passé mais…
Un hurlement de douleur couvrit les bruits de bagarre. Elle était suffisamment proche de Snape pour sentir tout son corps se tendre d'un coup.
« Minerva… » lâcha le Professeur, dans un murmure horrifié, avant qu'elle ait pu seulement tenter d'identifier la voix.
Ce fut à cette seconde qu'elle décida de lui faire confiance. Il s'était tourné en direction du hurlement, baguette au poing, chacun de ses muscles contracté comme s'il crevait d'envie de se lancer au secours de la sous-directrice, comme si ne pas s'élancer vers le Chemin de Traverse était un exploit herculéen… Pour quelqu'un qui, selon la rumeur, n'aimait personne, il semblait évident à Tonks que l'homme était attaché à la vieille sorcière. Elle reconnut l'angoisse et l'inquiétude pour ce qu'elle était, elle l'avait éprouvé cent fois lorsque Fol'Œil s'était retrouvé en mauvaise posture.
« Cessez le feu ! » beugla la voix de Dumbledore, amplifiée par un sonorus.
Elle échangea un seul coup d'œil avec Snape et ils étaient partis, sans même se consulter sur la marche à tenir. Ils rasèrent les murs de la ruelle et se dissimulèrent dans l'ombre de manière à pouvoir observer sans être vus.
Si la situation avait été catastrophique jusque là, elle venait juste de basculer dans le cauchemardesque.
Tonks sut, à la minute où elle vit McGonagall fermement maintenue contre la poitrine de Bella, le bout de sa baguette enfoncée dans la gorge, et Dumbledore une main levée vers Bellatrix et l'autre vers Voldemort, qu'ils avaient perdu. Le Directeur se tenait devant Scrimgeour, qui était tombé au sol à un moment donné et peinait à se relever, et faisait barrage de son corps pour le protéger du mage noir.
Tous les duels qui avaient fait rage sur le Chemin de Traverse s'étaient arrêtés. Tout le monde n'avait d'yeux que pour l'étrange triangle qui se tenait devant Gringotts.
« Bien. » déclara le mage noir avec un plaisir évident. « À présent, vieil homme, il va te falloir faire un choix. Qui de ton chat ou de ton Ministre vas-tu sauver ? »
°°O°°O°°O°°O°°
« Bill ! Bill ! »
Bill roula sur le dos avec l'impression désagréable que son crâne était sur le point de se fendre en deux. Ou bien peut-être s'était-il déjà fendu en deux. Cela aurait certainement expliqué la douleur.
« Bill, si tu meurs je ne te le pardonnerais jamais ! » La voix était haut perchée, extrêmement familière et le fort accent qui teintait chacun des mots lui fit ouvrir les yeux plus vite que les menaces que la jeune femme grommelait dans avec une maîtrise approximative de la langue. « Bill… » souffla-t-elle avec un soulagement évident, en le voyant réveillé. Ses grands yeux bleus étaient pleins de larmes, ses longs cheveux blonds cascadaient par-dessus son épaule… Elle n'avait jamais été aussi belle. Il tenta de caresser sa joue mais sa main retomba mollement avant qu'il ait pu la soulever tout à fait.
« Ne bouge pas. » ordonna-t-elle. Elle regarda autour d'elle d'un air désorienté mais personne ne leur vint en aide. Curieux.
« Charlie ? » croassa-t-il, la bouche pâteuse. Un inventaire rapide révéla qu'il sentait ses jambes, son bras gauche était également opérationnel quoi que son épaule ait pris le gros de la chute et le fasse souffrir mais son bras droit… Son bras droit était très visiblement cassé, il pouvait même voir l'os. Ce n'était pas très bon. Il tourna la tête du côté où Fleur était agenouillée, tâchant de repérer son frère. La jeune feùùe lui bouchait la vue et ce n'est qu'en voyant l'attroupement à l'autre bout du hall que Bill comprit que c'était à dessein.
« Reste tranquille. » répéta-t-elle, en appuyant sur son torse pour qu'il cesse de gigoter. Ce fut une mauvaise idée. Il rajouta une côte probablement cassée à sa liste de fractures. « Anthony s'en occupe. »
Cela ne lui suffisait pas. Il prit une profonde inspiration et roula sur le côté gauche pour se relever, ignorant tous les avertissements, insultes et invectives que Fleur murmura dans un mélange incompréhensible de langage.
« Aide-moi. » exigea-t-il. Il coinça son bras blessé contre son torse. Visiblement à contrecœur, Fleur fit apparaître une attèle qui lui permit de garder son bras en écharpe.
« Ton frère est un crétin. » décréta-t-elle, en le soutenant jusqu'à la masse de sorciers et de gobelins. « Il aurait pu vous tuer. »
Bill s'appuya plus lourdement sur elle et serra les dents, incapable de parler et de marcher à la fois. Il n'était pas loin d'être d'accord avec elle, pourtant. Charlie était un idiot qui aurait mieux fait de réfléchir à deux fois avant de vouloir jouer les cow-boys d'opérette. Les gens s'écartèrent pour les laisser passer ce que Bill prit comme un mauvais signe.
Il aperçut la lumière bleutée avant de distinguer son frère et son petit-ami. Charlie était allongé à plat dos, inconscient, et Anthony était agenouillé juste derrière sa tête, les deux bras tendus devant lui, paumes des mains dirigées vers le bas, une expression apeurée sur le visage. La lumière dansait autour de ses doigts et descendait de sa main gauche droit vers le torse de Charlie et semblait remonter de Charlie vers sa main droite dans un drôle de cercle.
Gloröm se tenait à côté d'Anthony, l'air grave.
« Vous, sorciers, êtes vraiment des créatures stupides. » déclara le Gobelin.
« Son cœur s'était arrêté ! » protesta Anthony, au milieu des chuchotements de la foule. « Je ne savais pas quoi faire. Bill… »
Bill s'affaissa davantage encore contre Fleur. « C'est un sort extrêmement dangereux. Qu'est-ce qui t'est passé par la tête ? » gronda-t-il, en se frottant le front. Mauvaise idée. Ce ne fit que raviver la douleur et ses doigts en ressortirent pleins de sang.
« Je ne sais pas. » siffla Anthony entre ses dents. « J'ai paniqué. C'est en train de drainer ma magie. »
Anthony transpirait à grosses gouttes, ses doigts tremblaient…
« Qu'est-ce qui se passe ? » demanda Fleur, perdue. « Qu'est-ce qu'il a fait ? »
« Un sort de partage. » répondit Bill. « C'est… Il a relié leur magie, il le maintient en vie avec sa propre… C'est compliqué et illégal. » Il n'avait pas véritablement le temps d'expliquer à Fleur que le sortilège requérait une implication émotionnelle qui n'était jamais certaine. En d'autres termes, il valait mieux être certain que le lanceur et le récepteur du sort aient l'un pour l'autre une profonde affection.
« Pas en Roumanie. » répliqua le dragonnier tandis que Fleur aidait Bill à s'asseoir près de son frère. « Inutile de me rappeler qu'on n'est plus en Roumanie, j'ai remarqué. Tu vas m'aider, oui ou non ? »
« Volontiers. » grinça-t-il, non sans ironie. « Comment ? »
Les yeux d'Anthony s'agrandirent sous le coup de l'horreur. « Tu es conjureur de sorts ! »
« Pas de genre de sorts. » soupira Bill, agacé. Il tenta d'analyser froidement la situation, comme il l'aurait fait face à un maléfice ou un sortilège dans le cadre de son travail, mais il n'y parvint pas. C'était son petit frère qui était étendu là – et il ne fallait pas croire qu'il avait oublié son autre petit-frère en train de se battre derrière les portes closes de Gringotts – et à la seconde où la magie d'Anthony cesserait d'alimenter le sort… Il y avait fort à parier qu'ils se retrouveraient avec deux cas critiques sur les bras.
Il n'avait pas la plus petite idée de comment remédier à la situation.
« Il nous faut un Médicomage. » lâcha-t-il, en levant les yeux vers Gloröm. « Il faut ouvrir les portes. »
Le gobelin ne cilla même pas. « Non. »
°°O°°O°°O°°O°°
« À présent, vieil homme, il va te falloir faire un choix. Qui de ton chat ou de ton Ministre vas-tu sauver ? »
La voix sifflante du Seigneur des Ténèbres raviva des mauvais souvenirs que Severus dut enfouir au plus profond de son esprit. Le chat. Combien de fois avait-il observé la scène lorsqu'il entraînait Harry à l'Occlumencie ? Un éclat vert et Minerva s'écroulait dans la poussière, toute dignité dérobée par la mort. Ce n'était pas la vraie Minerva. Ce n'était qu'un écho. C'était ce qu'il avait répété au gamin, ce qu'il s'était répété à lui-même pendant des mois. Ce n'était pas la vraie Minerva qui était morte en 75.
Et pourtant, c'était bel et bien la vraie Minerva qui était plaquée contre la poitrine de Bella, la lèvre fendue et le chignon en désordre.
Severus avait le cœur au bord des lèvres.
« Si on prend Bellatrix à revers… » proposa Tonks sans grande conviction. Le problème n'était pas seulement Bellatrix, c'était également les Détraqueurs qui flottaient autour d'eux et, surtout, le Seigneur des Ténèbres et son rictus triomphant. L'indécision évidente d'Albus n'était pas non plus à négliger.
Scrimgeour était vital à l'effort de guerre, il fédérait la communauté magique et elle ne se relèverait probablement pas de sa perte. Albus le savait et ne ferait rien qui leur ferait perdre l'avantage. On ne sacrifiait pas un cavalier pour un pion. Ou un chat.
« Non. » objecta-t-il, la voix dénuée d'émotion. « La priorité est de protéger Scrimgeour. »
« Et comment vous voulez faire ça ? » s'énerva Tonks. « Au cas où vous n'auriez pas remarqué… »
Severus pivota brusquement, tous les sens en alerte. La jeune femme se tut et fit elle aussi volteface, baguette pointée vers l'obscurité. Il fut plus lent à lever sa baguette, principalement parce qu'il avait ses soupçons. De fait, un énorme chien noir émergea silencieusement de l'ombre et l'Auror soupira de soulagement.
« Sirius. » lâcha-t-elle.
La transformation de chien à homme ne prit qu'un quart de seconde. Le Maître des Potions ne put empêcher un soupçon de jalousie, il lui fallait bien entre cinq et six minutes pour se transformer en sombral, mais ce moment d'envie passa vite lorsque Black braqua sa baguette sur lui. Sous son masque, il ne put réfréner un rictus haineux.
« Non ! » chuchota Tonks, en s'interposant. « C'est Snape ! »
« Oh, je sais. » Black grimaça. « Si tu crois que je connais pas son odeur nauséabonde… » Abaisser sa baguette parut lui demander un effort inimaginable. Sans doute l'était-ce. « On est dans la merde jusqu'au cou. »
« Aussi poétique qu'à l'accoutumée, je vois. » se moqua Severus. Il se tourna vers la jeune femme. « Il faut évacuer le Ministre. »
La pluie ruisselait sur l'Auror, collant ses cheveux trempés à son visage en forme de cœur, ses vêtements semblaient adhérer à sa peau et le Professeur se demanda vaguement pourquoi diable elle n'avait pas jeté un impervius avant que le déluge n'éclate. Black n'avait apparemment pas su davantage anticiper et était dans le même état. Il ressemblait à un chien mouillé. La métaphore était très certainement adéquate.
« Gringotts était le point de repli prévu. » expliqua Tonks. « Si on peut le mettre à l'abri dans la banque… »
« Ils ont scellé les portes. » Black secoua la tête. « Saletés de gobelins, ils… »
La voix d'Albus résonna jusqu'à eux mais un coup de tonnerre avala ses paroles et Severus s'efforça de réfléchir plus vite et plus efficacement. Il voulut se passer une main sur le visage et avorta son geste, ne se souvenant du masque d'ivoire lisse qu'au tout dernier moment. Il n'avait rien avalé depuis le repas que Minerva l'avait forcé à ingurgiter la veille au soir, il avait à peine dormi et n'avait pas eu le loisir de prendre un philtre de force, ses doigts tremblaient sur la hampe de sa baguette et il avait été bien plus maladroit au combat durant la dernière demi-heure qu'il ne l'avait été de toute sa vie.
« On ne peut pas ! » râla Black. Severus se rendit compte, dans un sursaut, qu'il avait raté un bout de la conversation. « Remus est au milieu de la rue, lui aussi ! »
Il jeta un coup d'œil à la rue principale, cherchant le loup-garou des yeux. Le loup-garou ou ce qu'il en restait… Il parvenait à peine à apercevoir l'homme derrière les trois Détraqueurs qui menaçaient de fondre sur lui, à peine tenus en respect par le Patronus fléchissant de McGonagall. Combien de temps avant que le chat argenté ne disparaisse ? Peu, très certainement.
« Il faut évacuer Scrimgeour. » répéta-t-il. C'était la solution la plus logique. Lorsque l'équation était insolvable, autant supprimer une des variables.
« Oui, et comment ? » aboya Black. « Tu peux t'envoler au dessus du champ de bataille, attraper Scrimgeour et disparaître dans le soleil couchant ? »
S'envoler au dessus du champ de bataille serait sans doute possible. Y survivre était une toute autre histoire.
« Pourquoi ne garderais-tu pas tes commentaires inutiles pour toi ? » siffla-t-il, avant de fusiller la jeune femme du regard. « Pourquoi les protections anti-transplannages n'ont-elles pas cédées ? »
Tonks haussa les épaules en signe d'ignorance. « Elles sont reliées à Kingsley. Tant qu'il ne les ôte pas… »
Shacklebolt. La dernière fois qu'il avait aperçu Shacklebolt, l'homme était en train de voler dans les airs. Il ne devait pas être mort, cependant, où ils auraient tous été libres de disparaître et de réapparaître où il leur chantait.
« Très bien. » lâcha Severus, une ébauche de plan se dessinant dans son esprit. « Si nous pouvions transplanner, nous pourrions mettre le Ministre en sécurité. »
« On peut prendre le contrôle des protections, non ? » suggéra Black. « Il suffit de détourner le sort, ce n'est pas bien différent des sorts de protections sur une maison… »
La jeune femme approuva d'un hochement de tête avant de grimacer. « Je n'ai jamais fait ça. L'un de vous deux sait le faire ? »
Severus et Black échangèrent un coup d'œil.
« En théorie. » hésita l'Animagus. « Snape ? »
Au diable les apparences, Severus retira son masque pour se frotter les yeux. Ils le brûlaient atrocement. Trop de potions, pas assez de repos. Il ne parvenait pas à réfléchir de manière suffisamment efficace.
« Les protections sont partout autour de nous. » déclara-t-il. « Le Seigneur des Ténèbres et Dumbledore le sentiront, ils reconnaîtront ma signature magique. Je ne peux pas le faire sans renoncer à ma couverture. »
Black et Tonks le dévisagèrent en silence, l'espace de quelques secondes, l'un avec un air indéchiffrable et l'autre avec une expression de pitié qui aurait blessé son égo s'il n'avait pas été aussi épuisé. Sa fatigue se reflétait-elle sur son visage ? Était-ce l'usure gravée sur ses traits qui empêchait Black de l'insulter ou de remettre ses allégeances en cause comme il l'aurait fait d'ordinaire ?
« Mieux vaut ne pas risquer d'alerter le Seigneur des Ténèbres. Black échouera inévitablement et nous ne serons pas davantage avancés. » continua-t-il en remettant son masque en place. « Il nous faut Shacklebolt. »
« Il est près de la banque. » L'Animagus passa une main dans ses cheveux trempés de pluie. « Il n'avait pas l'air bien en point. »
« Transforme-toi et rejoins-le. » ordonna Snape. « D'une manière ou d'une autre, il faut abaisser les protections. Nous ferons diversion. »
« Je n'aime pas que tu me donnes des ordres, Servillus. » gronda Black.
« Regrettable. » ironisa-t-il. « Tu n'es bon qu'à en recevoir. »
« Ça suffit. » intervint Tonks, avant que l'homme ait pu répondre. « Sirius, vas-y. »
Les yeux gris du Sang-Pur voyagèrent de Severus à la jeune femme avec méfiance. « Tu es sûre que tu es en sécurité avec lui ? »
La jeune femme leva les yeux au ciel. « Franchement, Snape est le dernier de mes soucis. Dépêche-toi ! »
Celui lui déplaisait visiblement mais Black redevint un chien et se fondit à nouveau dans l'ombre.
« Bien. » lâcha l'Auror, en posant une main sur son bras pour s'assurer de son attention. « Diversion. Une idée ? »
Plusieurs, en vérité.
Il dégagea son bras avec douceur et fit rouler sa baguette entre ses doigts plusieurs fois afin d'être sûr de l'avoir bien en main.
On ne pouvait pas sacrifier un cavalier pour un pion. Toutefois quelle différence existait-il entre un pion et un autre pion ? Entre le chat et le caméléon incapable de changer de couleur ?
Sa mission prioritaire était de sauver Scrimgeour quel qu'en soit le coût.
Mais s'il pouvait également sauver Minerva, il était prêt à saisir sa chance. Quel qu'en soit le coût.
« Je regrette profondément, Nymphadora. » offrit-il, avec sincérité.
Elle fronça les sourcils. Ce fut tout ce qu'elle eut le temps de faire avant que son sortilège ne la projette au milieu de la rue principale, mettant un terme aux tentatives de parlementer d'Albus. Elle atterrit au milieu de la chaussée, dans le no man's land entre les deux camps, pas très loin du loup-garou.
Les yeux rouges du Seigneur des Ténèbres se tournèrent vers elle et Severus écrasa dans l'œuf tout sentiment de culpabilité.
°°O°°O°°O°°O°°
Percy referma brusquement la bouche lorsque Tonks apparut en plein milieu de la rue, son incantation inutile déjà oubliée. Les portes de Gringotts demeuraient closes en dépit de toutes ses tentatives. Il n'y avait pas d'issues, ils étaient piégés.
« Qu'avons-nous là ? » interrogea la voix sifflante de Voldemort.
Percy frissonnait à chaque fois que le mage noir prononçait un mot.
« Ma nièce ! » couina Bellatrix avec un sourire extatique. « Oh, puis-je la tuer, Maître ? » Le bout de sa baguette rougeoya et McGonagall laissa échapper un grondement lorsque sa peau se mit à fumer. « Vous m'avez promis. »
« Assez ! » commanda Dumbledore, les yeux rivés sur sa sous-directrice.
« Bella. » L'ordre claqua dans l'air froid, sec et définitif. Voldemort examina l'Auror du regard avec une grimace de dégout. Percy n'aurait su dire ce qu'il le dérangeait le plus, l'accoutrement de la jeune femme ou le fait qu'elle soit une Sang-mêlée.
Tous les regards étaient fixés sur Tonks mais Percy était tellement préoccupé par l'idée de trouver une porte de sortie que ses yeux furent naturellement attirés par l'ombre mouvante qui se coulait vers le corps immobile de Shacklebolt. La pluie était tellement drue qu'il pensa un instant que ses lunettes lui jouaient des tours… Sauf que ce n'était pas le cas.
Le Sinistros.
°°O°°O°°O°°O°°
« Si vous n'ouvrez pas ses portes, ils vont mourir tous les deux. » grinça Bill, en se redressant. Il aurait aimé pouvoir se remettre debout, toiser Gloröm de toute sa hauteur et le menacer physiquement s'il l'avait fallu… Il aurait eu du mal à rester assis sans le bras que Fleur avait passé autour de ses épaules.
Preuve qu'il n'était pas véritablement un danger, les gardes n'avaient même pas bronché.
Anthony était très pâle à présent. Il respirait vite et fort. La lumière bleue qui dansait autour de ses doigts s'affaiblissait de seconde en seconde.
« Cela leur épargnera au moins l'humiliation d'être remercié par Gringotts. » déclara très sérieusement Gloröm dans un haussement d'épaules.
Oh, Bill n'aurait rien voulu de plus que de glisser ses mains autour de son cou et serrer.
°°O°°O°°O°°O°°
Tonks resta figée d'horreur sous le regard reptilien du mage noir.
Connard, songea-t-elle avec fureur. Elle jeta un coup d'œil en direction de la ruelle mais si Snape était toujours là, il était vraiment bien caché. Connard.
« Je te déconseille de faire quoi que ce soit d'inconsidéré, Tom. » déclara calmement Dumbledore.
Elle n'osa pas bouger le moindre muscle. Elle était assise sur les fesses, entre les deux sorciers les plus puissants au monde, sous une pluie torrentielle qui l'avait trempée jusqu'aux os et elle n'osait pas bouger ne serait-ce que le petit doigt.
°°O°°O°°O°°O°°
Personne ne lui prêta attention lorsqu'il s'élança en direction de Shacklebolt. Qui aurait bien pu se préoccuper de Percy ? Il jeta un sort du bouclier préventif autour du corps inconscient du chef du Département des Aurors et pria pour qu'il s'agisse d'un chien errant attiré par le sang. Il pourrait sans doute repousser un chien errant…
°°O°°O°°O°°O°°
Sirius laissa échapper un grondement mécontent lorsque Tonks se retrouva propulsée au cœur de la mêlée. Il se promit de le faire payer à Snape plus tard. Ou mieux, peut-être laisserait-il Remus le faire. Peut-être même que des retrouvailles entre Servillus et la forme sauvage de Lunard seraient de mise.
Il parvint finalement auprès de Shacklebolt alors que Voldemort et Dumbledore reprenaient leur petite joute verbale, il se demanda vaguement s'il n'était pas davantage question d'un duel d'égo que de magie. Distrait, il ne sentit pas le bouclier avant de le percuter de plein fouet.
Patmol couina de douleur et secoua la tête sans parvenir à se défaire d'une mauvaise sensation dans la truffe. Il reprit forme humaine pour se frotter le nez au moment où Percy Weasley déboula devant lui, baguette levée. Il l'abaissa avec une expression confuse.
« Mais… Mais, il y avait un chien. » balbutia le garçon.
« Et voilà les idiots qui nous gouvernent… » marmonna Sirius en levant les yeux au ciel. Il s'agenouilla auprès de Kingsley et lança un enervate qui n'eut aucun résultat.
« Comment va-t-il ? » s'enquit Percy, en s'agenouillant à son tour.
« Il pète la santé, ça ne se voit pas ? » répliqua-t-il distraitement, en fronçant les sourcils. Il n'arriverait pas à ranimer Kingsley, il le pressentait. Il jeta un coup d'œil angoissé vers Tonks qui restait prostrée au sol face au Mage Noir. Un Mangemort se détacha soudain du groupe des serviteurs de Voldemort et lança un informulé en direction de la jeune femme. Ça eut le mérite de la faire réagir. Elle roula sur elle-même et se releva tandis que le Mage Noir laissait échapper un ricanement. Dumbledore ne cilla même pas.
°°O°°O°°O°°O°°
Une pulsation désagréable l'empêchait de réfléchir de manière très cohérente. Si Fleur ne l'avait pas soutenu, il se serait probablement écroulé. Charlie n'était pas le seul à devoir consulter un Médicomage et si Gloröm ne voulait pas ouvrir les portes… Il leur fallait transplanner.
Bill serra les dents lorsqu'il se rendit compte que les protections anti-transplannage entourant le Chemin de Traverse était toujours en place.
Il n'allait pas laisser mourir son frère pour un si petit détail.
°°O°°O°°O°°O°°
« Maître ! Elle est à moi, vous m'avez promis… » couina Bellatrix alors que Tonks parait un deuxième informulé qui la fit reculer d'un bon mètre. La jeune femme répliqua par un sortilège plus ou moins légal, fusillant du regard le masque d'ivoire. Snape allait lui payer cette petite en scène, très, très, très cher. Il ne retenait pas ses coups – pour que le duel ait l'air authentique, supposait-elle.
Sa jambe à peine soignée n'aidait pas non plus, elle boitillait à droite à gauche, esquivant les traits de différentes couleurs qui fusaient vers elle et répliquant au mieux. Elle ne s'en sortait pas si mal pour le moment mais elle avait la distincte impression que le duel était curieusement mis en scène. Ni le Mage Noir ni Dumbledore ne levait le petit doigt alors qu'il était impossible qu'ils n'aient pas reconnu le Mangemort qui l'attaquait. Elle se demanda vaguement si la couverture de Snape venait de sauter et ce qui avait bien pu lui passer par la tête. La projeter au milieu de la rue aurait été une distraction suffisante, pourquoi s'exposer ainsi ?
Elle trouva la réponse lorsqu'il para un stupefix si brutalement que le sort ricocha tout droit en direction de McGonagall et Bellatrix.
La coïncidence était trop grande pour en être une.
Malin, eut-elle le temps de penser avant que sa tante ne s'écarte brusquement, laissant son flanc exposé. Tonks vit le sortilège de Snape lui arriver droit dessus mais elle devina instinctivement que, quel qu'il fut, il serait très certainement plus douloureux que mortel. Elle n'hésita pas une seconde à viser Bellatrix.
Le trait rouge heurta Bella pile au moment où le sort de Snape la toucha aux côtes.
Elle eut la sensation que son corps explosait en un millier de fragments.
°°O°°O°°O°°O°°
« Putain, merde ! » s'énerva Black, en frappant le sol du point, après avoir tenté sans grand succès de ranimer Shacklebolt.
Au milieu de la rue, Tonks et un Mangemort se livraient un duel acharné qui, Percy n'en doutait pas, se terminerait par la défaite de la jeune femme. Tout semblait perdu.
« Il faut briser les protections anti-transplannage. » marmonna Black, en se passant une main sur le visage. « Okay, okay… Ça ne peut pas être si compliqué que ça. »
« Eh bien, en fait… » hasarda-t-il. « C'est un procédé très délicat et… »
Il se retrouva la cible d'un regard gris à l'intensité dérangeante et se tut instinctivement.
« Tu pourrais le faire ? » demanda Black avec espoir.
Le pouvait-il ? Percy n'eut besoin que d'une poignée de secondes pour hocher la tête. Il n'excellait peut-être pas en Défense mais les Sortilèges avaient toujours été son domaine…
« Fais-le. » ordonna Black sans plus attendre alors même que Tonks hurlait de souffrance et s'écroulait dans une flaque de pluie. « Vite et bien, Weasley, et dès que tu as fini, tu évacues le Ministre. Tu m'entends ? »
Mais Black n'attendit pas de réponse de sa part. Avec un aboiement rauque, l'animal que Percy avait pris pour le Sinistros s'était élancé. Le jeune homme observa le chien se camper au-dessus du corps inanimé de l'Auror, les babines retroussées sur des crocs jaunâtres, puis ferma les yeux et se concentra sur ce que l'ancien prisonnier lui avait demandé.
Il se souvenait encore des mots que le Professeur Flitwick avait employé pour décrire ce genre de sortilèges. Il fallait se concentrer et tâcher de concevoir l'invisible. Percy prit une longue inspiration puis expira doucement en faisant de son mieux pour bloquer les bruits du nouveau duel qui venait de démarrer. Laissez votre magie vous guider, avait dit Flitwick, et Percy fit précisément cela, laissant sa magie tâtonner à la recherche du verrou magique.
°°O°°O°°O°°O°°
Severus maudit Black sur les cent prochaines générations – rien qu'il n'ait pas déjà fait un bon milliard de fois cependant et cela se révélait toujours aussi peu efficace. L'énorme chien noir bondit sur le corps de Tonks au moment précis où le Chemin de Traverse en entier semblait retenir son souffle.
Bellatrix inconsciente, Minerva en avait profité pour s'en éloigner, rampant sur les pierres froides. Il semblait à Severus que quelque chose clochait avec sa jambe mais il ne pouvait pas en être sûr et il ne pouvait pas non plus s'élancer pour l'aider bien qu'il n'eut rien souhaité d'autre. Black était une distraction malvenue alors qu'il était clair que les combats étaient sur le point de recommencer.
Oh, l'espion ne se faisait aucune illusion, l'Animagus savait pertinemment quel Mangemort il avait en face de lui. Sans doute attendait-il cette occasion depuis des années…
Il perçut le léger mouvement du Seigneur des Ténèbres et dressa instinctivement un bouclier mais ce n'était pas vers lui que la colère de son Maître s'était tournée. Albus s'interposa juste à temps entre Minerva et le Mage Noir, laissant Scrimgeour sans son bouclier humain.
Severus n'eut pas l'occasion de s'en préoccuper.
Le sortilège offensif de Black déchira sa manche et une bonne portion de sa chair au passage.
Il était éreinté, n'avait pas assez mangé et dormi ces derniers jours, et le duel contre Tonks l'avait laissé vide de toute énergie. Pourtant, lorsque Albus lança le premier sort offensif et que le Chemin de Traverse redevint un champ de bataille, Severus puisa dans ses dernières forces et s'élança contre Black.
Oh, il ne le tuerait pas. De une, Harry ne le lui pardonnerait jamais, de deux, il doutait d'en avoir l'occasion, mais Merlin ce qu'il avait attendu ce duel là…
°°O°°O°°O°°O°°
La protection anti-transplannage avait la forme d'une toile d'araignée tissée de magie pure qui formait des entrelacs comme une toile de peintre. Lorsque Percy la décela enfin, cherchant la faille qui lui permettrait de la dérouler, il se rendit compte qu'il n'était pas le premier arrivé.
Quelqu'un d'autre essayait de faire sauter les protections.
Et la signature magique était familière.
°°O°°O°°O°°O°°
Remus revient à lui au milieu d'un carnage.
Le chat argenté qui allait et venait sur son torse était pratiquement transparent et ne tenait plus vraiment à distance les Détraqueurs qui se massaient au dessus de lui. Aussitôt, il ressentit le besoin de replonger dans le doux néant de l'inconscience. Pourtant, le bruit des hurlements et les sorts jetés à pleins poumons firent battre son cœur plus vite. Le sentiment de panique et la drôle de langueur infligée par les Détraqueurs s'affrontaient en lui et il resta prostré au sol, incapable de décider lequel des deux vaincrait, jusqu'à ce que l'instinct animal ne prenne le dessus.
Péniblement, il tâtonna à la recherche de sa baguette sans la trouver.
Il se promit d'en acquérir une deuxième – dut-il emprunter de l'argent à Sirius – afin de ne jamais plus être pris au dépourvus de la sorte. Il repéra le corps d'un Mangemort non loin de là et s'y traina, suivi par le nuage de Détraqueur ainsi que par le chat qui s'estompait de seconde en seconde. Le Mangemort était mort ou inconscient, il ne prit pas le temps de le vérifier, s'emparant plutôt de la baguette qui avait chut près de sa main.
Son premier sort fut un patronus. Le loup était faiblard mais toujours moins que le chat.
Autour de lui, c'était la cohue et il s'efforça de se relever. Quelqu'un, non loin, jeta un sort de lumos maxima qui éclaira cette portion du Chemin de Traverse comme un jour d'été et laissa tous les combattants plus ou moins aveuglés. Cela eut l'effet salutaire de faire fuir les Détraqueurs et laissa Remus libre de chanceler à la recherche de… Il ne savait pas bien de quoi ou de qui.
Sirius ? Tonks ?
La rue était jonchée de cadavres. Certains étaient vêtus de noir, d'autres de robes colorées. Les gens les piétinaient.
Sa vision était floue, du sang coulait le long de sa tempe jusqu'à son menton. Il vit un sort fuser vers lui et il le para instinctivement. La baguette obéissait mal, son bouclier fut à peine suffisant pour stopper le sortilège, le recul le renvoya au sol.
C'est comme ça qu'il la vit.
« Non… » murmura-t-il sans avoir conscience. « Pitié, non… »
Oubliant toutes ses blessures, il se mit à ramper en direction de Tonks. Le loup était étrangement silencieux à l'intérieur de son crâne, pas de hurlement à la lune, pas de grognement agressif, rien qu'un silence de mort. Remus ne s'était jamais senti aussi seul de sa vie.
Il ne mit pas plus de quelques minutes à l'atteindre. La première chose qu'il attrapa fut sa manche et il tira dessus autant pour se hisser vers elle que pour l'attirer vers lui. Ses vêtements étaient trempés, ses cheveux bruns aussi, sa peau était froide… Les doigts de Remus tremblaient lorsqu'ils coururent sur son cou à la recherche d'un pouls.
Son cœur battait. Faiblement mais il battait.
Il s'écroula presque de soulagement.
Son manque d'attention lui fut fatal. Il était tellement préoccupé par l'état de la jeune femme qu'il ne vit le trait vert fuser vers lui que trop tard. Il n'essaya même pas de lever sa baguette.
°°O°°O°°O°°O°°
Percy enroula sa magie autour de celle, étrangement faible de Bill, se contentant de prêter ses forces à son frère plutôt que de tenter de briser lui-même les protections. La souffrance physique de Bill était comme une douleur fantôme dans son propre corps : la tête, le bras droit, l'épaule gauche…
Que s'était-il passé ? Où étaient Bill et Charlie ? Ils auraient dû être en sécurité à l'intérieur de la banque… Ils n'auraient pas dû être blessés, ils n'auraient pas…
La toile magique qui s'étendait au dessus du Chemin de Traverse devint brûlante et Percy n'eut plus le loisir de penser à rien qu'à la tâche qu'il avait devant lui.
°°O°°O°°O°°O°°
Minerva aperçut l'Avada Kedavra foncer droit sur Remus et agita la main. Sa baguette était Merlin savait où et elle n'était pas en mesure de faire grand-chose mais la Métamorphose avait toujours été un don. Les pavés devant le loup-garou s'empilèrent en un mur d'enceinte sur lequel l'Impardonnable vint s'écraser.
Deux fois ce jour là, ne put-elle s'empêcher de penser, en recommençant à ramper loin du duel qui opposait Albus à Voldemort. Les deux sorciers ne faisaient pas dans la dentelle et le Chemin de Traverse à peine reconstruit était à nouveau en ruines. Les gens qui avaient trouvé refuge dans les bâtiments s'étaient vu obligés d'en fuir et s'était retrouvés pris en étau, forcés de se battre ou de risquer leur peau pour une bonne cachette.
Minerva n'aurait rien eu contre trouver une bonne cachette à l'instant…
Sa cheville refusait de soutenir son poids et, sans baguette, elle ne pouvait prodiguer qu'une aide minimale. Albus lui serait sans doute plus reconnaissant de survivre à ce combat que de rester plantée à attendre que quelqu'un ne l'achève.
C'était un vrai champ de bataille, se rendit-elle compte avec effroi, lorsqu'un homme s'écroula juste en face d'elle. Elle avait espéré ne jamais plus avoir à revivre ça.
La nausée lui tordit l'estomac mais elle s'efforça de continuer à avancer en direction d'une ruelle qui se trouvait à quelques mètres sans faire attention aux cadavres qu'elle dépassait. Elle était vieille et usée, elle n'aurait pas dû avoir à revivre ça. Des larmes inopportunes lui brûlèrent les yeux mais elle les chassa d'un revers de manche. Sa robe était déchirée, nota-t-elle. C'était curieux les choses que l'on remarquait dans ce genre de circonstances.
Plus curieux encore qu'on ne remarque pas les choses plus importantes avant qu'il ne soit trop tard. Minerva vit le Mangemort se dresser devant elle avec une seconde de retard. Il était trop proche pour qu'elle ne se défende sans sa baguette et elle en éprouva une rage sans précédent. L'idée de mourir allongée dans la boue, ruisselante de pluie, les cheveux épars, était humiliante.
Pourtant, au lieu d'en finir tout de suite, le Mangemort approcha à grands pas et agrippa ses bras pour la relever. Elle se débâtit avec fureur, songeant qu'on cherchait une fois encore à se servir d'elle comme d'un objet de pression contre Albus ce qui était encore plus humiliant, peut-être, que de mourir couchée dans le caniveau.
« Cessez donc vos idioties avant de nous faire repérer. » siffla une voix familière et elle s'abandonna aux bras qui cherchaient à l'aider, le cœur battant à vive allure.
« Folie. » protesta-t-elle faiblement. « Si quelqu'un vous voit… »
« Ils penseront que je cherche à marcher dans les pas de Bellatrix. » répliqua Severus, en soutenant le plus gros de son poids. Il l'entraina vers la ruelle qu'elle avait repérée. « Que vous a-t-il pris de… »
Minerva n'aurait su dire ce qui lui fit le plus mal, la chute brutale ? Ou le cri de douleur que Severus ne parvint pas à masquer.
Ils s'écroulèrent tous les deux et Minerva commençait sérieusement à en avoir assez de se vautrer dans des flaques de pluie à la propreté douteuse. Severus eut suffisamment de présence d'esprit pour dresser un bouclier qui scintilla dans la pâle lumière que l'orage laissait percer. Trois sorts s'écrasèrent dessus en rafale.
« J'ai dit… Assez ! » râla Severus, en répliquant d'une vague de magie brute qui fit dresser les cheveux sur la tête de Minerva. Cela ne suffit pas à arrêter le chien qui zigzagua vers elle et se posta entre elle et le Professeur de Potions en montrant les crocs. « Stupide cabot. Tu vas tous nous faire tuer. »
Minerva en avait assez entendu. Elle asséna une tape sur le postérieur de l'animal qui couina de surprise et lui jeta un regard noir.
« Oh, attendez que je retrouve ma baguette, Mr Black. » grinça-t-elle. « Là, vous pourrez vous plaindre. »
Elle cilla et, au lieu d'un chien, elle se trouva face à un homme accroupi. « Il a pratiquement tué Tonks ! »
« Je faisais diversion. » répliqua sèchement Severus.
« En essayant de la faire tuer ? » aboya Sirius en retour.
Severus, elle en était certaine, était en train de grimacer derrière son masque d'ivoire. Il se releva avec autant de dignité qu'il le put, épousseta ses robes de la main qui ne tenait pas sa baguette et dévisagea son éternel rival qui s'était lui-aussi redressé. Minerva avait volontiers envie de leur faire remarquer qu'elle n'aurait rien eu contre l'idée de se retrouver debout elle aussi.
« Tu veux en finir ? » demanda Severus de son ton le plus dangereux. « Ici ? Maintenant ? Après tout, il s'agit de l'endroit rêvé… Personne ne pourra dire qui a achevé l'autre… Harry n'aura jamais besoin de le savoir. »
« Ne me tente pas. » cracha Sirius, le fusillant de ses yeux gris.
Minerva leva les yeux au ciel et força ses vieux os à s'agenouiller. Elle agrippa le bras de Sirius puisqu'il était le plus proche et se hissa sur ses pieds, pinçant les lèvres contre la douleur qui irradiait de sa cheville. Inutile de préciser que sa lèvre fendue ne lui en fut pas bien reconnaissante. Sirius s'empressa de l'aider.
« Avez-vous fini de vous chamailler comme des adolescents ? » gronda-t-elle.
« Il… » commença Sirius uniquement pour se taire tout aussitôt. « Vous avez senti ça ? »
Minerva l'avait senti, en effet. Un bourdonnement dont elle n'avait pas eu conscience s'était éteint.
« Ce sont les protections anti-transplannage. » déclara Severus avec soulagement. Même dissimulé par le masque, Minerva vit son regard passer de Sirius à elle. « Ramène Minerva à Poudlard. Elle a besoin de Pomfresh. »
« Si tu crois que je vais obéir à tes ordres, tu te… » lâcha Sirius mais Severus ne le laissa pas terminer.
« Ramène Minerva à Poudlard. » grinça le Maître des Potions. « S'il lui arrive quelque chose, je t'en tiendrais pour responsable et je ferais en sorte qu'Harry le sache. »
« Ne me menace pas. » cingla l'Animagus.
« Plus vite nous serons partis, plus vite vous serez revenu. » suggéra Minerva, s'avouant vaincue. Ces deux là ne feraient jamais la paix.
Sirius dut reconnaître la sagesse de cet argument parce que, après avoir lancé un dernier regard noir au Mangemort, il amorça le transplannage.
°°O°°O°°O°°O°°
À la seconde où Percy rouvrit les yeux, il réalisa que la situation venait de basculer. Les protections anti-transplannage disparues, les renforts commencèrent à apparaître. Des Aurors, des sorciers et sorcières probablement inquiets pour leurs familles… Les Mangemorts commencèrent à reculer, à s'enfuir…
Percy s'élança plus vite qu'il n'avait jamais couru, sautant par-dessus les corps inanimés pour atteindre le Ministre qui était toujours là où il était tombé. Il se jeta sur lui et transplanna sans plus réfléchir. Il lui sembla entendre un cri de rage venant du Mage Noir ainsi que plusieurs cris de rappels des Aurors qui venaient d'apparaître. Percy n'en tint pas compte, il abandonna le chaos du Chemin de Traverse pour un endroit sûr.
Ce ne fut qu'en apercevant la silhouette familière du Terrier se dessiner au loin, Scrimgeour dans les bras, qu'il se rendit compte à quel point il avait été terrifié à l'idée de ne plus jamais rentrer chez lui.
