Chapitre 12 : Un nouveau jeu

Je lui proposai de poser des questions, puis de donner la réponse que l'on pense que l'autre donnerait et il accepta. Je lui dis également que, d'ici à la prochaine fois qu'on se voit, je répondrais à la question qui demeurait toujours sans réponse : que veux-tu sexuellement?

On commença avec un coup de pratique sur le sport. Évidemment, je savais que le sport était pour lui vital, ce qu'il confirma. De son côté, il pensait que le sport n'était pas vraiment dans mes priorités, ce qui n'était pas tout à fait le cas. J'avais essayé de recommencer, mais j'avais arrêté à cause des fuites urinaires, mais ça me manquait énormément.

Il me posa ensuite une question sur les bars et j'appris qu'il détestait ça. Cela me surpris, mais je fus contente de voir que nous avions un autre point commun – encore.

Ce fut enfin mon tour, mon vrai tour. Je posai la question qui m'avait motivé à proposer ce jeu.

Je lui posai une question en trois parties : 1- Quelles sont tes pensées par rapport à l'identité de genre 2- comment tu t'identifies 3- comment tu accordes/quels sont tes pronoms?

J'essayais une réponse :

« Je crois que tu es une personne vraiment inclusive qui respecte les autres. Tu crois qu'on ne devrait jamais prétendre savoir le genre de quelqu'un et que c'est toujours mieux de demander, mais tu ne demandes pas toujours; tu utilises plutôt un langage inclusif à la place.

Je ne crois pas que tu aimes l'idée de devoir répondre à la question de comment tu t'identifies au regard du genre, parce que ça peut évoluer et changer. Si j'avais à choisir, je dirais que tu te situes dans le spectre non binaire, quelque part entre genderfluid, genderqueer ou peut-être agender.

Je crois aussi que, comme tu maitrises bien la langue et les accords, tu adores accorder au féminin quand tu parles de toi à l'écrit (en sachant certainement que plusieurs ne le remarqueront pas parce que ce n'est pas tout le monde qui accorde/écrit correctement), mais je pense que dans des contextes sociaux, tu vas laisser les gens croire ce qu'ils veulent et les laisser tout accorder au masculin, potentiellement que toi aussi tu accordes au masculin à l'oral? Je pense que n'importe quel pronom serait correct avec toi, mais ça dépend peut-être de ton état d'esprit. Je croirais que si tu pouvais choisir la fréquence de chaque pronom ça serait quelque chose autour de 40% he/him-il, 40% she/her-elle et 20% they/them-iel (ou peut-être un autre?). »

Je savais que je ne pouvais pas m'être beaucoup trompé et sa réponse le confirma. Il me dit en quelque mot que tout était vrai dans ce que j'avais dit, même la partie des accords inaudibles.

Sur ces mots, j'avais toute l'information dont j'avais besoin. Je le laissai faire de même à mon sujet. Sans surprise, il pensait que je m'identifiais comme « femme », mais, contrairement ce que j'aurais cru, il pensait que c'était « à défaut » d'autres chose. Ce n'est pas si faux de dire que je suis quand même bonne pour prétendre et vivre comme si je m'identifiais comme « fille » parce que j'y ai été habitué, mais, au plus profond de moi, je ne sais que ce n'est pas tout à fait moi.

Je lui répondis un long texte dans lequel j'expliquai exactement comme je me sentais. Je lui dis que, moi « aussi », j'accordais différemment à l'écrit (sous-entendu quand c'est non audible) et que c'était probablement pour ça que j'avais remarqué qu'il le faisait aussi. À partir de ce moment, sans avoir rien à demander, il se mit à accorder au masculin lorsqu'il parlait de moi et que le mot était inaudible. C'était la première fois que je sentais que ce que j'avais dit avait été non seulement entendu, mais compris.

Cette magnifique personne allait certainement changer ma vie! Autant pour explorer l'identité de genre que la sexualité, je me sentais 100% à l'aise avec lui. C'était peut-être en parti parce que les deux étaient indissociable pour moi.

Nous continuâmes les questions et je lui demandai ce qu'il pensait des chirurgies de genre et des hormones. J'appris qu'il prônait le minimaliste au regard des médicaments alors il ne prendrait jamais d'hormones, puis qu'il considérait la vasectomie comme une chirurgie liée au genre. C'est vrai, en y pensant, que c'était logique. Je crois qu'il fut surpris d'apprendre que j'avais déjà pris des hormones et que j'avais déjà pensé aux chirurgies, mais que j'avais décidé de ne pas le faire. En quelque part, c'était comme si lui dire que j'avais déjà pris des hormones me faisait croire que mon sentiment de me pas être 100% fille était valide, mais pour lui, je crois que ça ne changeait rien. À partir du moment où je lui avais dit, il m'avait accepté comme je le disais, même si je portais des vêtements de fille, même si je m'affichais comme fille, même si j'évitais toute conversation sur l'identité de genre au quotidien. Encore une autre chose que j'appréciai de lui.

Comme il n'avait pas d'idée de question et que j'avais une liste déjà établie, j'enchainai en lui demandant combien de partenaire sexuel il avait eu et quelle information le surprendrait. De mon côté, je lui dis que je pensais que ça se situait entre 200 et 800 et que je serais surprise d'apprendre que c'était moins de 25 ou plus de 2000 ou qu'il connaisse le nombre exact. Il me répondit que cela tournait autour de 120 et que le trois quart avait été dans les trois dernières années. Ça me surprit un peu.

Pour moi, il pensait que ça devait être autour de 10 et il serait surpris si c'était moins de 5, plus de 30 ou si j'avais augmenté de 2 en une seule fois. Oh qu'il allait être surpris. C'était en fait plus pour ça que je posais la question. Évidement j'étais curieuse de savoir son nombre, mais je voulais surtout qu'il sache le mien.

Je lui dis que c'était bien en bas de 5, que c'était 2. Qu'il ait compris ou pas qu'il comptait dans le 2 m'importait peu (2 ou 3, rendu là, ça ne changeait rien). Il me dit qu'il était surpris puisque, dans sa tête, quelqu'un qui avait eu si peu de partenaire n'aurait pas eu de relation sexuelle la première fois qu'on s'est vu. Pourtant, la première fois qu'on s'est vu était parfaite! Évidement j'étais stressé, mais je crois que je l'aurais été peu importe le contexte et, honnêtement, j'aime bien les relations sexuelles, c'est simplement que je suis très difficile sur mon choix de partenaire alors ça n'arrive pas souvent.

J'enchainai ensuite avec une question pour savoir quelles étaient ses pensées et impressions par rapport à moi. Un mot domina sa réponse : sympathique. Il mentionna aussi que je semblais avoir plus le besoin de parler que lui. Il me dit aussi qu'on était différent sur plusieurs plans, mais qu'on avait des ressemblances profondes.

Je fus absolument contente de sa réponse. Pas trop peu, mais pas trop. Pour ce que je pensais de lui, il dit simplement que je devais en quelque part le trouver de mon gout puisque je n'arrêtais pas de dire que j'étais difficile. Je lui proposai de donner une réponse plus longue et il accepta. Cela fut tellement long à rédiger qu'il eut le temps de penser à sa prochaine question entre temps, mais je lui envoyai tout de même. Cela faisait partie des choses que je trouvais qu'il devait savoir. Je savais qu'on n'avait pas les mêmes sentiments et je voulais mettre carte sur table parce que cela me stressait.

« J'imagine que je vais commencer en disant que je crois vraiment que toutes les personnes qu'on rencontre peu importe le contexte, peu importe le temps qu'on les côtoie, ont une influence sur notre vie, mais qu'il y a certainement des gens qui ont un plus grand impact/qui marquent plus notre vie (que ce soit des gens qui ont été longtemps dans notre vie comme des meilleurs amis ou de la famille ou des gens qui sont demeurés des simples connaissances, mais qui ont été ou marquants) et je crois que tu fais clairement parti de la catégorie des gens qui auront marqué ma vie.

Pour le moment, j'ai l'impression d'avoir avec toi l'exact même feeling que j'ai eu avec un de mes meilleurs amis quand on a commencé à être ami, j'imagine un petit peu différent quand même là parce que avec lui il y a jamais eu aucune attirance sexuelle (ni romantique d'ailleurs) d'un bord comme de l'autre. J'imagine que si j'avais à mettre un nom à ce feeling ça serait de dire qu'autant lui que toi vous êtes des soulmates (bah oui, je crois qu'on peut en avoir plus d'un et je crois certainement que ce n'est absolument pas lié à un quelconque aspect sexuel ou romantique ou, du moins, pas forcément). J'imagine qu'un soulmate pour moi c'est quelqu'un qui te fait être la meilleure version de toi-même simplement en le côtoyant. Absolument pas quelqu'un qui te fait changer de par sa volonté à lui, mais qui t'inspire toi-même à changer parce que tu le veux. C'est aussi une personne avec qui tu es toujours bien quand tu la vois, clairement quelqu'un qui fait en sorte que tu souris toujours en sa présence. (Honnêtement, je dois dire que même maintenant que ça fait plus de 10 ans que je connais mon meilleur ami et qu'il y a eu des moments où on se voyait plusieurs fois par semaine et d'autres années où on se voyait une fois dans l'année, ce sentiment là est toujours présent). Puis tous les deux vous avez cette capacité à juste accepter l'autre, même si on est vraiment différent et je pense que ça fait partie de la raison pour laquelle j'ai ce sentiment là avec vous deux.

Je dois ajouter que autant avec lui que avec toi j'ai franchement pas l'impression que ce soit un sentiment réciproque, mais ça me dérange absolument pas. C'est exactement ça un soulmate: quelqu'un avec qui tu peux avoir ta vie/tes sentiments et lui aura les siens, mais en quelque part ils sont compatibles même s'ils sont différents.

Fait que ça c'est pas mal le ressenti par rapport à juste notre relation en général et par rapport à toi en général

Pour ce qui est de ce que j'ai pensé quand on a matché, et bien tu as clairement fait partie des absolument rare personnes que je me suis rappelé d'avoir liker quand tu m'as liker je suis absolument certaine que quand je t'ai liker je me suis dit: aucune chance qu'on match, et quand on a matché, je me suis dit: aucune chance qu'on se parle, autant quand on a matché que maintenant, j'ai toujours eu le sentiment que, honnêtement, si j'avais eu à créer ma personne parfaite, ça serait toi et ça ne fait qu'empirer (positivement je veux dire) à chaque infos que j'apprends sur toi hahah. En allemand on dirait « you're juste too perfect for this world » (je sais pas si ça semble adéquat pas en allemand haha).

Même si je ne veux pas être en couple (et je ne vois pas le jour où cela viendra) - fait que le genre de relation qu'on a est parfaite - (clairement si tu faisais partie des gens qui veulent être en couple, je ne t'aurais jamais écrit) et même si j'ai le sentiment que je continuerais à être super heureuse même si on ne se voyait/parlait pu jamais, j'imagine que tout ça mis ensemble font que j'ai quand même parfois des craintes/réserves par rapport à toi/ à nous. Majoritairement du stress je dirais.

Je suis absolument d'avis que deux personnes n'ont pas besoin d'avoir les mêmes sentiments, les mêmes besoins, les mêmes désirs et volontés pour qu'une relation (peu importe le type de relation) soit positive, tant que le sentiment des 2 personnes sont compatibles, ce que je crois que nous avons malgré tout!

J'ai malgré tout l'impression que pour le moment nos sentiments sont quand même similaires, mais j'avoue que ça me stress parce que j'ai absolument aucune idée comment les miens vont évoluer (et ce n'est pas comme si j'avais du contrôle dessus non plus hahaha). Même si je tombais éventuellement en amour avec toi, je n'en aurais rien à faire que ce sentiment ne soit jamais réciproque, surtout que, même si ça arrivait, je ne voudrais quand même pas être en couple parce que ça ne convient juste pas dans ma vie. »

Avec ce long texte, tout le stress que je ressentais tomba. Était-il honnête? Peut-être pas à 100%. Est-ce que je n'étais pas déjà en amour avec lui? Je ne pouvais pas dire, mais j'avais essayé d'être le plus transparent possible.

Sa réponse ne me surpris pas. Il me dit que le sentiment de soulmate n'était pas réciproque puisqu'il n'avait ce sentiment envers personne et que si j'étais correct avec le fait qu'il ne développerait jamais de sentiments pour moi, il ne voyait pas de problème.

Ce fut comme si l'on venait de m'enlever tout un poids que je trainais avec moi sans le savoir. Enfin : transparence, clarté, honnêteté. Même si on ne ressentait pas les mêmes choses, nos volontés étaient compatibles.

Nous continuâmes les questions et j'appris qu'il voyait des gens (pour des dates) environ 15-20 heures par semaine. En même temps ce n'était pas surprenant, en même temps j'aurais espéré moins.

À ce moment, il ne me restait plus qu'à prendre mon courage et lui dire ce que je remettais à plus tard : mes désirs sexuels.