relecture très sommaire, mais la précédente update commençait à dater... J'ai rarement une heure de dispo d'affilée, surtout que j'évite d"avoir un écran allumé lors des tétées... BREF...

En passant : Crevée :D mais ca va ! on essaye de trouver notre rythme ! Merci d'être au rendez-vous :)

Eiilys : Merci d'avoir franchi le pas cette fois ! Ca fait hyper plaisir de voir un nouveau pseudo !
J'espère que la suite te plaira tout autant ! et c'est gentil pour le chap précédent ! J'ai la sensation qu'il ne s'y passe pas grand chose...

Guest : Merci encore pour tes encouragements !


Il y avait l'amour, la liberté, mais aussi le concept de temps qui passait : Contrairement à Monsieur Temrah, Drago n'en avait pas perdu la notion, et il semblait bien qu'il ne la perdrait jamais, mais il fallait admettre qu'il en avait finalement eu beaucoup plus que le destin n'en accordait habituellement aux hommes : Il avait cinq vies à l'intérieur de lui, qu'il avait déjà pu parcourir presque entièrement. Et puis des siècles et des siècles de non-vie, mais qui avaient tout de même une valeur. Sans compter que si son corps n'avait pas disposé de ce pouvoir de guérison absurde, il serait mort depuis longtemps.

L'idée était simple : Le Détraqueur agissait ainsi parce qu'il souffrait de ne pas exister. Il avalait des vies dans l'espoir de ressentir quelque chose, mais la brièveté des existences humaines, en comparaison de la longueur de la sienne, faisait qu'il n'était pas capable d'en profiter.

Drago, lui, en était capable.

Il avait déjà appris au Détraqueur, malgré lui, à protéger son esprit. Il saurait lui apprendre à voyager dans les vies qu'il avait déjà prises. Pour ça, il suffisait d'entrer en contact avec lui. Il l'avait déjà fait trois fois : il avait simplement besoin d'un terrain psychique sur lequel rencontrer la créature.

La première fois, il ne s'en était pas rendu compte : Son existence lui avait paru si misérable et inutile qu'il avait souhaité qu'elle cesse, et le Détraqueur était dans le même état. Pas mourir, non. Simplement cesser de ressentir tout ça. C'était à cause de Potter qui avait fait semblant de s'être déjà lassé de lui. Le Détraqueur avait senti son désespoir et avait profité d'une vieille brèche dans la protection du dôme magique entourant l'île pour venir le rejoindre. Patiemment, il avait attendu que Drago s'occupe de la suite des opérations.

La deuxième fois, c'était quand cet abruti de Potter l'avait agressé avec sa magie de merde et ait menacé de provoquer une guerre fratricide dont son père aurait été la première victime. Après quoi, à chaque fois qu'il avait dormi, à chaque fois qu'il s'était assoupi, les pensées du Détraqueur s'étaient imposées à lui. Cette fois, c'était la douleur, la peine, la haine et l'inquiétude qui les avaient rassemblés. Cette fois, il en avait eu assez d'attendre, et il avait attaqué.

La troisième fois remontait à moins d'une heure : Il venait d'être privé de son souvenir, de son espoir, de sa certitude, ou de la chose que Potter – encore lui – lui avait volée. Un pan entier de son existence qui disparaissait soudain. Dans son cerveau, dans son cœur, là où il y avait la vie avant, il n'y avait soudain plus rien. Pendant quelques secondes, il avait passé les barrières mentales du Détraqueur, la forteresse noire qu'il avait construit dans son esprit. Il avait véritablement été à même de communiquer avec lui. De rencontrer l'être qui lui ressemblait et que le Détraqueur était, au fond de lui.

Drago n'avait pas su profiter de l'instant : Comme toujours, il avait paniqué. Il avait fui, il l'avait de nouveau abandonné. Il fallait que cela cesse, à la fois pour lui et pour le Détraqueur. Il fallait s'occuper de lui comme d'un enfant dont on ne comprenait pas l'origine des pleurs, mais qu'il fallait s'efforcer d'apaiser, par sa simple présence, s'il ne pouvait faire plus.

Ce bonheur qu'il avait perdu, Drago pouvait encore le sentir, comme quand on lui cassait les dents, à l'époque, et qu'il suçotait sa gencive pour avoir le goût du sang sur sa langue. Il en avait le goût, mais il manquait une présence.

Il avait toujours eu une bonne mémoire, mais il avait du mal désormais à raccrocher les wagons entre eux. Ça avait rapport avec son père. Ça avait forcément rapport avec son père.

« Je suis fier de toi, fils. »

Ce n'était pas cette phrase-là. Celle-ci ne lui avait fourni qu'un demi Patronus informel.

C'était forcément quelque chose qu'il avait fait, qu'il avait répété, invariablement : Il avait dû avoir le droit à des échanges avec son père qui lui avait indiqué la marche à suivre pour manipuler ce crétin de Potter. Des moments doux, intimes et forts, et qu'il avait oubliés.

Forcément.

Ça n'avait aucune importance : Son père lui rappellerait tout ça. Lucius Malfoy en voulait à son fils de ne pas lui avoir octroyé une amnistie totale, mais il n'était pas cruel et il lui raconterait la vérité. Ça lui couterait probablement un ou deux compromis. Il pouvait se le permettre : Lui autoriser une correspondance non surveillée, ou de recevoir des invités triés sur le volet, ou…

Peu importait. Ils sauraient s'arranger.

Ce qui lui fallait, à présent, c'était se glisser une dernière fois dans la tête du Détraqueur et lui expliquer comment voyager dans les vies qu'il possédait. Après quoi, il pourrait définitivement quitter cette île, cette prison, ce Traitre-à-son-Sang, et mettre une mer et un continent entier entre eux.

Ou bien, il mourrait. Ce qui avait peu d'importance, parce qu'il avait déjà vécu plus que ce dont profitaient la plupart des gens. Si tel était le cas, ce serait Rosier ui s'occuperait de son père.

De toute façon, les choses étaient réglées.

« Tu me déçois beaucoup, Drago »

Quelque-chose ne collait pas, et il n'arrivait pas à mettre le doigt dessus. Son esprit était embrouillé, désordonné, déchiré, plein de vides et de zones instables.

Tant mieux : ça le rapprochait du Détraqueur. Il ne manquait qu'un petit coup de pouce pour le faire basculer. Et c'était quelque chose que Rosier pouvait lui fournir. Rosier et Ackerley. Une pierre, trois coups : Aider un ami, punir un ennemi, redonner sa liberté au Détraqueur.

Il n'hésita pas une seconde en débarquant sur la plage, et pénétra aussitôt la cellule de Magie que Potter et Kenaran avaient forgée pour le maintenir en captivité. Il senti de nouveau ramper sur lui la magie de Potter, et se sentit fébrile, brûlant, écœuré.

Le Détraqueur était dans un état affreux, la robe poisseuse de sang, sa capuche lacérée, ses mains plus tordues et abimées que jamais… Il sortit sa baguette de son étui, puis s'empara du visage du Détraqueur pour le baisser vers lui.

Sa gueule sentait la mer, la chair brulée et la magie.

Il marmonna le sort de legilimancie à voix basse. Il ignorait la formule exacte, mais elle ne devait pas être si compliquée à répliquer : Il avait déjà vu Kenaran l'utiliser sur le corps réceptif de Carrow. À l'époque, le Professore avait utilisé son Patronus pour se faire, mais Drago n'en était pas capable et n'en avait pas besoin : Il suffisait de laisser son esprit dériver jusqu'à trouver celui qu'il lui fallait : il l'avait déjà visité une fois et le repéra sans peine. Il reconnut le gamin aux dents tordues, maigre et inquiet. Il survola les souvenirs des coups qu'il avait reçus et de ceux qu'il avait donnés. Il vit son propre corps entre ses mains, et le contact se fit aussi facilement que s'il s'était s'agit de se glisser dans l'une de ses robes trop larges.

Il fallait éplucher les patates.

C'était l'une des tâches les plus chiantes, de celles qui laissaient les mains rouges et sèches, mais au moins, on pouvait l'effectuer en discutant. C'était toujours intéressant de savoir comment ça se passait dans les autres corridors, de savoir qui vendait quoi et à quel prix.

Ackerley avait de quoi s'acheter tout ce qu'il voulait, de toute façon : Il y avait son salaire de cuisinier, mais il y avait surtout le petit pécule qu'il se faisait en achetant à gauche et en revendant à droite, après avoir coupé la marchandise, bien sûr, parce qu'il lui fallait au moins ça pour se changer les idées.

Au bout d'un moment, l'or ne servait plus à acheter des choses, mais du respect.

Voir cette fiotte de Malfoy, avec sa baguette et ses jolis cheveux dorés l'avait mis à bout de nerfs.

Il aurait voulu le tabasser, encore une fois, mais le gamin était si passif que ce n'était même pas drôle. Au début, ça l'avait été : On lui avait dit que Macnair était impitoyable, et pourtant, Malfoy s'était laissé faire sans broncher, et ça avait été marrant de se demander si lui pourrait le faire plier…

Il pensait y avoir réussi : Il lui avait bousillé la main, il avait presque réussi à lui couper la queue, mais le gosse était un Legitimens, et il ne s'était pas attendu à ça. Il avait ramené dans son crâne de ces souvenirs qu'il avait crus à jamais enterrés sous la poudre de licorne… Quand il avait réussi à sortir de là, il n'avait plus été en mesure de bander ou de réfléchir, et il s'était contenté de le tabasser pendant que les autres prenaient leur pied avec lui. Pour le réveiller. Il ne voulait pas baiser un cadavre : il voulait le réveiller et le voir gueuler et pleurer…

C'est Rosier qui avait suggéré que le gosse avait peut-être fini par réellement clamser, et qu'il valait mieux se débarrasser rapidement du corps.

Il leva les yeux de sa patate vers le Sang-Pur.

Il l'observait.

Avec ce sourire malsain qu'il avait toujours, ce sourire qui disait « Un jour, mon pote, je te trahirai. Aujourd'hui ? Demain ? Je le sais pas moi-même. On peut pas être deux lions dans la même meute : L'un de nous doit laisser sa place à l'autre, pas vrai ? »

Ackerley lui sourit en retour. Pas aujourd'hui, en tout cas. Aujourd'hui ressemblait trop à hier, à avant-hier, au jour d'avant ça. Chaque jour ressemblait au précédent. Et Rosier était trop passif, lui aussi, pour agir sans une raison valable. Ackerley savait que ce serait à lui de déclencher les hostilités. Il rebaissa les yeux vers le légume entre ses mains, et songea au fait qu'il avait faim.

Ça faisait des siècles qu'il avait faim. Combien de fois s'était-il nourri ? Véritablement nourri ? Combien de fois avait-il réellement pu refermer sa bouche sur quelque chose de tangible ? Quatre fois ? Cinq fois ?

Il cligna doucement des yeux. Il avait porté la patate à sa bouche. Il ne savait pas trop pourquoi ? Pas pour y goûter, en tout cas : C'était un poison quand c'était cru, non ?

Mais c'était tangible. Et il avait faim.

Il mâcha sa bouchée en ayant l'impression que la fécule lui anesthésiait la langue.

À ses côtés, Rosier. Qui l'observait. Et dans son œil…

Aujourd'hui ?!

Il se levèrent en même temps, mais il était déstabilisé, il recula en panique et évita le premier coup, circulaire, qu'on lui porta. La lame argentée passa à quelques centimètres de son visage. Il lacha un juron et se reprit immédiatement. Du coin de l'œil, il vit les autres réagir, se lever aussi, gueuler.

Il lança son poing dans le menton qui lui faisait face, mais le coup lui sembla bizarre, mou et faible, comme s'il était lancé par quelqu'un d'autre avec son bras à lui… Rosier l'évita facilement en se baissant, et il profita de la remontée pour le cogner dans le ventre. Il se tordit en avant, et eut à peine le temps de voir son genou remonter avant que celui-ci ne lui percute le nez.

Lui aussi était armé. Il lança un coup en visant le cœur et la poitrine : Il savait sa lame être assez affutée pour passer entre les côtes.

Rosier évita aussi ce coup-là, et à nouveau il vit le reflet argenté viser son visage.

Il le vit jusqu'à la toute dernière seconde, quand la lame pénétra la paupière et que dans un réflexe, il ferma désespérément les yeux.

Il éclata alors de rire, même s'il ignorait avec quel corps il riait, avec quel corps il souffrait, et avec quel corps il poignardait l'autre. Il éclata de rire, parce qu'il n'avait plus eu que quelques secondes pour profiter de ce sens si précieux, et qu'il avait fermé les yeux. Il n'avait même pas mal. La surprise, le choc, la sidération avaient surpassé la douleur.

Aveugle, il l'était. Depuis toujours. Sourd aussi.

La lame sortit de son orbite une première fois, mais s'y enfonça de nouveau moins d'une seconde plus tard. Et encore, et encore. Et encore. Il voulut hurler mais il y avait cette chose dans sa bouche qui l'en empêchait. Il lâcha son arme et ne fut plus capable que d'une seule pensée cohérente : Se protéger, s'éloigner de lui, fuir à jamais. Il mit ses mains devant son visage, mais la lame continua à frapper. Un œil, l'autre, et puis la gorge, la poitrine... À aucun moment il ne tenta de lever le sort de legilimancie : Il fallait absolument qu'il meurt avec lui.

Drago ouvrit les yeux mais il ne voyait rien. Ça devrait suffire. Le contact s'était fait. Il glissa ses doigts sous le bâillon et le fit sauter, puis il ôta la capuche du Détraqueur pour révéler son visage blessé. Il posa immédiatement son front contre le sien, et s'étonna de lui trouver une température presque humaine.

Il prononça de nouveau « Legitimens » et se sentit glisser dans l'esprit dans l'esprit du Détraqueur.

La forteresse.

Drago resta complètement interloqué.

La forteresse ?! le contact aurait dû suffire à le faire pénétrer de nouveau derrière ses remparts !

Il observa les murs de pierres noires avec angoisse : S'il ne parvenait pas à lui donner ce qu'il voulait, alors tout ça aurait été pour rien : Il passerait pour un crétin, le Détraqueur ne retrouverait jamais sa liberté, et pire que tout, Rosier aurait des ennuis par sa faute !

Le Cridurut le ramena sur la plage d'Azkaban.

Il tourna un regard paniqué vers son public et s'efforça de réfléchir le plus rapidement et efficacement possible : Qu'est-ce qu'il avait raté ? Est-ce qu'il aurait dû planter lui-même la lame dans les yeux d'Ackerley pour que ça marche ? Est-ce qu'il aurait dû demander à Rosier de crever ses propres paupières ?

Potter courrait déjà vers le château, mais il s'arrêta immédiatement pour tourner un visage désespéré vers lui.

Quel idiot ! Mais quel idiot ! Comme si une sensation physique pouvait être suffisante ! Ce qu'il lui fallait, c'était un état mental ! Celui-ci par exemple ! Il pouvait plonger dans l'esprit de Potter, et voir par ses yeux tout ce qu'il lui avait fait subir ! Et alors…

Ou alors…

Son regard dévia sur l'homme qui se trouvait à ses côtés…

Ou alors…