I am a monster ? Yes.

Résumé : Alors que Loki est emmené par les agents du Shield, un événement incongru arrive. Un homme déguisé en agent réussit à s'emparer de la valise que transportait Stark et contenant le Tesseract, avant de la faire tomber par inadvertance et d'en renverser son contenu. Il n'en fallut pas plus à Loki. Il profita du chao et s'en empara. Problème ? Stark ne le laissa pas seul longtemps, et ils voyagèrent tous les deux à travers le temps et l'espace, tombant nez à nez avec une personne bien connue de la déité du mensonge. S'en était même un doux euphémisme.


Le portail s'ouvrit et il s'entendit atterrir lourdement et violemment sur un corps mou, alors qu'il sentait le Tesseract lui échapper des mains et rouler plus loin. En dessous de lui, un second corps s'était échoué pesamment. Loki n'eut pas besoin de regarder pour savoir qu'il devait s'agir d'Iron Man. Il l'avait vu le suivre, habillé de l'uniforme du Shield. Le Midgardien avait tout juste eu le temps de l'attraper avant qu'ils ne disparaissent tous les deux avec le cube cosmique. Ou du moins, il avait vu son double, ou son clone, ou n'importe qui se cacher sous ses traits, en train d'essayer de voler la valise contenant la pierre d'infinité. Pendant que le vrai, l'original qu'il avait lui-même combattu, se tordait au sol tel un poisson gisant hors de l'eau, assailli par une foule inquiète.

Il n'avait pas hésité une seule seconde et avait saisi sa chance en s'emparant du Tesseract, roulant hors de la valise. Cependant, il n'avait pas imaginé que le « second » Iron Man le suivrait. Loki se releva péniblement, ses contusions et ses plaies le lançant de manières désagréables. Non, définitivement, le berserk vert du nom de « Hulk » n'y avait pas été de main morte avec lui. Sa seule utilité avait été de le libérer de la pierre de l'esprit et donc, du contrôle mental de l'autre et de Thanos.

D'après son intuition, Stark, ou n'importe quelle personne se cachant sous ses traits, ne devrait théoriquement pas se relever immédiatement. Dans l'hypothèse où il n'avait jamais connu de voyage inter spatial via un portail, son organisme le tiendrait inconscient quelques instants, n'ayant pas été habitué à la chose. Bien entendu, Loki ne pouvait pas en être certain, ni si l'imposteur se révélait être un ami ou un ennemi. Toutefois, en vu de sa situation actuelle, il n'avait aucune intention d'attendre pour le savoir.

D'un geste brusque, il retira la muselière que Thor lui avait attachée et la lança plus loin. Il s'apprêta à se relever complètement, jetant un dernier coup d'œil en arrière afin de s'assurer que l'homme restait bien hors service, lorsqu'une voix bien connue le coupa dans son élan. Son corps se figea immédiatement, ses membres restèrent ballants durant ce qui lui sembla une éternité, et il en oublia définitivement le « faux » Iron Man à ses côtés.

− Qui êtes-vous ?

La voix était quelque peu fluette et n'avait pas encore complètement mué, pourtant, Loki l'avait instantanément reconnu.

Il mit du temps à se retourner. Priant intérieurement que la voix s'en aille et qu'il l'ait tout simplement imaginé. Mais la voix ne s'en alla pas et pire encore, elle réitéra sa demande. L'interpelé n'eut d'autre choix que de se retourner et de faire face.

Face à lui, un enfant âgé d'une douzaine d'années se tenait debout, les bras croisés et l'air méfiant. L'enfant portait une tenue de combat au tissu riche, propre au peuple d'Asgard et à son statut élevé. Mais le mage n'était pas dupe, et savait parfaitement que l'enfant face à lui ne se sentait pas légitime habillé ainsi, tout comme il avait très vite détecté le léger malaise et l'air suffisant que l'enfant se donnait à l'instant même, dans le but évident d'intimider les deux hommes louches qu'il venait de découvrir. Il ne fallut qu'un coup d'œil à Loki pour se rendre compte d'où il avait atterri, quand et ce que cela signifiait. Lorsque ses yeux tombèrent dans un vert identique au sien, toutes ces couleurs avaient d'ores et déjà quitté son visage, accentuant ses plaies et ses contusions.

Il aurait pu mentir, bien entendu. Prétendre être un simple passant, un simple étranger venant de partout et de nulle part à la fois, un vulgaire nomade en quête d'autres terres ou un guerrier sortant d'une bataille épique. Il y avait tant de choses à dire, de vérités à déformer et de mensonges à colporter. Loki aurait pu dire tout et n'importe quoi. Il en avait l'habitude, il en était même la déité propre, l'incarnation même du mensonge et du chaos. Au vu de sa situation, il en avait le droit. Avec n'importe qui d'autre, excepté Frigga, le mensonge lui paraîtrait même légitime.

Mais voilà, le problème était bien là, finalement.

Loki n'avait plus envie de mentir.

Ou du moins, plus envers la personne qui se tenait devant lui. Il l'avait déjà trop fait, avait trop abusé de cet art. L'enfant innocent face à lui ne méritait pas ça.

Il ne méritait pas ça.

Derrière lui, Loki sentit très nettement le faux Stark reprendre ses esprits, à en croire les frottements de vêtements lui indiquant que l'homme bougeait. Il devait probablement analyser la scène face à lui avec méfiance.

Le mage ferma les yeux de dépit. Il était pris au piège.

− Pour la dernière fois, qui êtes-vous ? S'énerva l'enfant, avant de reprendre d'une voix guindée et arrogante. C'est un ordre de votre second Prince ! D'après vos vêtements, vous venez d'Asgard, et vous semblez même être noble, affirma-t-il en désignant Loki, ou du moins, l'un de vous, avait-il continué en fixant le faux Stark avec un semblant de mépris mêlé à de la curiosité, son attention se redirigeant aussitôt vers Loki.

− Vous faites donc parti de mon peuple. Allez-vous sciemment désobéir à un ordre direct d'un membre de la famille royale ?

À ces mots, le mage sentit très nettement le regard du faux Stark lui brûler la nuque. Encore une fois, il l'ignora complètement et se contenta de s'agenouiller humblement, tel que l'imposait l'étiquette.

— Je vous demande pardon, jeune prince. Je n'avais nullement l'intention de vous contrarier, pardonnez-moi, je vous prie.

Même s'il ne le voyait pas, Loki pouvait clairement imaginer la surprise de l'autre homme, mais son intention était entièrement dirigée vers le second prince, dont le sourire satisfait lui provoqua une étrange sensation de nostalgie.

− Soit. Je vous pardonne, annonça l'enfant, et Loki savait parfaitement qu'en cet instant précis, ce dernier ne faisait qu'imiter Odin. Mais vous ne m'avez toujours pas indiqué vos noms, étrangers, ni d'où vous venez et comment vous avez fait pour pénétrer la cour royale.

Cette fois-ci, ses mots s'adressaient aux deux hommes. Nul doute que le Faux Stark était complètement réveillé, alors. D'ailleurs, ce fut ce dernier qui répondit.

− Oh là, oh là, tout d'abord, tu devrais t'éloigner de lui, gamin. Cet homme est très dange…

− Loki.

− … Pardon ?

− Mon nom est Loki, étranger et non gamin. Second prince d'Asgard et fils d'Odin. Tâche de t'en souvenir, misérable.

L'enfant regardait l'humain avec dédain à présent, et malgré toute l'incongruité de la situation, le Loki adulte ne put s'empêcher de ricaner, attirant l'attention des deux autres. Le faux Stark s'était déplacé à son côté et avait enlevé son casque composant l'uniforme du Shield, des centaines de questions dansant dans le regard. D'ailleurs, maintenant que le mage regardait d'un peu plus près, l'humain semblait avoir vieilli de cinq à dix ans, contrairement au Stark qu'il venait tout juste de combattre.

Intéressant, il ne s'agissait peut-être pas d'un simple clone, tout compte fait.

− Loki, vous dites… ? Fils d'Odin et…

Son regard dubitatif s'attarda sur le Loki adulte, et il reprit, incertain.

— …Frère de Thor, c'est ça ?

L'enfant se contenta simplement d'acquiescer. Toute son attitude respirait l'arrogance due à son titre et l'élégance de la royauté, mais les adultes ne furent pas dupes, et ils avaient tous les deux bien vu le sourire tendre de l'enfant à l'évocation de son père et de son frère.

− Bordel de merde.

À ces mots, les deux « Asgardiens » le regardèrent étrangement, sans que cela ne paraisse gêner celui dont Loki était maintenant sûr d'être Stark. Voyant que sa version plus jeune perdait vite patience, Loki consentit à les présenter.

− Cet homme est Anthony Stark, un guerrier de Midgard, jeune prince, commença Loki en indiquant le susnommé.

− Midgard ? Le coupa l'enfant, les yeux écarquillés.

Le regard curieux et émerveillé de l'enfant ne passa pas inaperçu, et celui perplexe de Stark à la limite du comique aurait presque fait hurler Loki de rire dans une autre situation.

− Mais je pensais que ce peuple était encore bien trop primitif pour ne serait-ce que communiquer avec les autres royaumes. Or, ce guerrier m'a l'air parfaitement civilisé. C'est si curieux. Puis, un air de méfiance passa dans son regard.

− Dites-moi, vous n'êtes pas en train de me mentir, n'est-ce pas ? J'exècre le mensonge !

L'air incrédule de l'humain et son sourire en coin irritèrent immédiatement le Loki adulte.

− Vous voulez rire, intervint Stark pour la seconde fois, vous, Loki, prince d'Asgard, exécrez le mensonge ?

Bien entendu, il ne s'adressait pas à l'enfant.

— Stark.

La voix menaçante et le rappel à l'ordre du mage eut au moins le mérite de retirer le sourire insupportable de l'autre. Mais l'humain n'en prit pas garde, à la place, il se retourna complètement vers son ennemi et, ébahi, continua sans même s'attarder sur l'avertissement.

− Non, mais attend, vieux, tu ne penses pas qu'il y a un problème-là ? Bordel, mais qu'est-ce qui a bien pu t'arriver pour que tu passes de ça à… ça ?

Un long silence lui répondit, avant que l'enfant ne décide enfin de se tourner vers sa version adulte, ignorant encore de qui il s'agissait, et d'engager la conversation en asgardien.

Midgardianere er merkelige… Je forstår ikke sludderet hans. (Les Midgardiens sont étranges… Je ne comprends pas ses bêtises.)

Ikke bry deg om den idioten, unge prins, den mannen er gal. (Ne vous inquiétez pas pour cet idiot, jeune prince, cet homme est fou).

Kanskje… Men det forteller mig fortsatt ikke hvem du er. Du serut comme en adel et en kriger. Nei. Etter rustningen din å dømme, ser du ut som et medlem av kongefamilien. Men, je kjenner noe rart i deg. Ligner à moren de tous, dronning Frigga, mais uendelig, mye mer complexe. Er dere magikere ? (Peut-être… Mais ça ne me dit toujours pas qui vous êtes. Vous ressemblez à un noble et à un guerrier. Non. À en juger par votre armure, vous ressemblez à un membre de la famille royale. Mais je ressens quelque chose d'étrange en vous. Semblable à la mère de tous, la reine Frigga, mais en infiniment plus complexe. Etes-vous magicien ?

Au bout d'un long moment de silence, à laquelle ni le Loki adulte, ni l'enfant et ni Stark n'osèrent briser le silence, ce fut le jeune second prince qui reprit encore une fois la parole, une grimace de consternation peinte au visage.

Ikke fortell mig at du er min skjulte storebror ? (Ne me dites pas que vous êtes mon grand frère caché ?)

− Egentlig er det litt mer komplisert enn som så. (En fait, c'est un peu plus compliqué que ça.)

— Eh sinon, les gars, n'hésitez pas à me dire si je vous dérange, hein !

Le Loki adulte l'ignora encore une fois, réutilisant le multi-langage afin de se faire comprendre de Stark. En réalité, lui-même n'était pas réellement certain de ce qu'il allait dire. Il en avait juste assez du mensonge. On lui avait menti toute sa vie sur sa nature, sa patrie, sa famille, son statut et son rang, allant même jusqu'à lui mentir sur sa véritable race.

On lui avait menti tout comme il l'avait fait de trop nombreuses fois. Utilisant ses mots comme des armes aux lames aiguisées, tranchants et mettant en pièces ses adversaires. Tout comme il l'utilisait parfois comme un baume, glissant de doux mensonges mielleux afin d'attendrir ses cibles et de les manipuler au mieux. Mais surtout, s'il mentait autrefois, c'était surtout par nécessité, parce qu'il n'avait pas le choix et que trop souvent, ses farces l'avaient emmené trop loin. Le mensonge restait alors sur le moment l'une des solutions les plus attrayantes.

Lorsqu'il avait compris ce fait, Loki n'avait plus cessé de mentir.

− Je suis désolé, jeune prince, mais même si dans mon ancienne vie, j'ai eu beau faire partie de la famille royale, aujourd'hui, ce temps est révolu. Dans tous les cas, rassurez-vous, je ne suis pas votre frère caché ou un quelconque bâtard de la famille.

Au soupir de soulagement de l'enfant, Loki eut un rictus indéchiffrable, avant de reprendre son récit.

− Comme je vous l'ai dit, jeune Prince, cet homme est un guerrier de Midgard. Et je suis son prisonnier. Quant à mon nom et à mes titres, j'en ai eu plusieurs au cours de ma longue vie et je ne saurais tous vous les citer. Mais à présent, il ne m'en reste qu'un seul qui me correspond parfaitement.

À l'attente évidente de ses deux interlocuteurs, le Loki adulte reprit la parole. Son ton était vide, et son regard posé sur l'enfant face à lui se faisait de plus en plus nostalgique.

− Je suis un monstre, jeune prince. Mais pas n'importe lequel, je suis celui que vous craignez de devenir et dont vous craindrait inévitablement à l'avenir. Le monstre de vos pires cauchemars. L'infâme créature que vous retrouverez un jour dans votre miroir. Mais rassurez-vous, vous ne serez pas le seul à me craindre, vous serez seulement celui qui me haïra le plus. Car à moi seul, j'incarne ce que vous exécrez le plus.

L'enfant avait reculé de deux bons pas, maintenant, et tout dans son attitude indiquait que s'il n'avait pas réellement compris toute l'ampleur de la situation, il commençait néanmoins à assimiler les points principaux. Quant à Stark, il attendait simplement, restant sur ses gardes pour prévenir de toutes attaques ou fuites, mais regardant soigneusement la scène sous ses yeux, sans en louper une miette.

− Je suis la malice.

D'un geste leste de la main, il invoqua un serpent qui se balada le long du coup de Stark et, lorsque ce dernier s'en aperçut, il jeta l'illusion le plus loin possible de lui en poussant un cri non viril, qu'il nierait toute sa vie d'avoir poussé. Malgré tout, cela amusa l'enfant qui les observait.

— Le feu

De sa main droite, il invoqua une flamme d'un rouge rubis, sans fumée et sans la moindre trace de brûlure.

— Et la glace,

Et de sa main gauche, il conjura une glace d'un saphir parfait, qui lui congela le poignet entier sans que cela n'ait l'air de le déranger.

− Mes pairs me craignent, car je représente à moi seul le chaos et la destruction. Je peux invoquer des tempêtes avec mes mains et provoquer les pires désastres, les pires catastrophes avec mes mots.

Plus personne ne parlait à présent, et même Stark n'osait émettre le moindre son. C'était étrange pour lui, qui venait d'un autre futur, que de voir celui qu'il avait une fois combattu et enfermé, se définir lui-même ainsi. Inconsciemment, et malgré tout ce qu'avait pu lui dire Thor, Tony avait toujours gardé en lui l'image du Loki mégalomane, venu conquérir sa planète. Mais le chemin qu'il prenait en parlant à cet enfant, à cette version de lui-même enfant, s'il avait tout bien compris, restait obscur et malgré toute prudence, Tony voulait voir où tout cela allait les mener.

− Mais ce n'est pas tout, car ça ne l'est jamais.

Malgré toute sa bonne volonté, jamais il n'aurait pu prédire ce que ferait Loki par la suite. Et effectivement, d'un simple geste, Loki dissipa le charme qui le préservait. Immédiatement, l'humain et l'enfant reculèrent de plusieurs pas, effarés.

Sa peau avait viré au bleu. Littéralement. Un bleu intense et subjuguant. Un bleu saphir, à l'image de la glace qu'il venait de faire apparaître. Un bleu irréel. Des stries parcouraient sa peau et zébraient de par en par son visage, le marquant à certains endroits de fines arabesques. Mais le plus intrigant restait à n'en pas douter ses yeux. Tony n'aurait jamais cru qu'il croiserait un jour un regard aussi sanglant. Et pourtant, il fut étonné de ne pas en être plus effrayé que ça. Ce qui, bien entendu, ne fut pas le cas pour l'enfant

Ce dernier arborait une expression proprement horrifiée. Cette fois, c'était sûr, se dit Tony. Quelque chose lui échappait définitivement.

− Vous êtes…

− Oui, c'est exact. Je vous l'ai dit, Mon prince.

− ...Un Jotün / Je suis un monstre.