Le règlement du site interdit de répondre aux reviews dans le texte des chapitres, mais je voulais au moins dire un grand merci à ceux qui prennent le temps d'en mettre. Je ne peux pas toujours y répondre en privé, mais sachez que je les lis toutes, et que c'est toujours un plaisir d'en voir une nouvelle arriver (d'autant plus que les stats de fréquentation étant décédées, il n'y a plus aucun moyen de savoir s'il y a eu ne serait-ce qu'un clic sur une histoire. Les commentaires, les abonnements et favoris sont donc plus précieux que jamais pour les auteurs - et traducteurs)
Merci à vous, et bonne lecture :)

De sa main libre, Crowley saisit la poignée de la porte donnant sur la salle de réception. « Allez, soupire-t-il, il est l'heure de tomber les masques. » Il prend une profonde inspiration, ouvre la porte pour Aziraphale. Emboitant ainsi le pas à son époux, il peut sentir les centaines de regards qui glissent sur lui, à la recherche d'une autre personne. Il n'est jamais aussi heureux de pouvoir se cacher derrière ses lunettes de soleil que dans ce genre de moments.

Aziraphale lui rend la politesse en lui tirant sa chaise, et ils s'assoient côte à côte. Doutant que les étudiants aient compris de quoi il retourne, Crowley se demande alors combien d'autres gestes intimes platoniques seront nécessaires avant que tout le monde percute. Ce n'est pas dans sa nature d'en faire, mais Aziraphale apprécie ce genre d'attentions, et s'y adonner reste une manière sûre pour Crowley de lui rendre son affection. Il s'appuie alors contre le dossier de sa chaise, passe un bras sur celui d'Aziraphale, et scrute l'assemblée jusqu'à tomber sur le garçon qui tient les paris. Ce dernier lui rend son regard, et Crowley affiche un sourire narquois jusqu'à ce que les yeux de l'étudiant s'illuminent d'un mélange de surprise et de jubilation. Le Dr Crowley n'a pas la meilleure côte, très loin de là, ce qui signifie que les sommes pariées sur les favoris vont couvrir les gains des deux vainqueurs, plus une sacrée marge de bénéfices. Une belle conclusion, sauf peut-être pour Gabriel et son égo.

Crowley se tourne pour murmurer à l'oreille d'Aziraphale : « Oh, regarde. Je crois qu'ils commencent à capter. »

Comme s'il venait d'entendre quelque chose de particulièrement romantique, Aziraphale lui répond d'un sourire infiniment doux. « Oh, vraiment », réplique-t-il avec un sincère amusement. Ses yeux scrutent la foule, où la stupeur puis la compréhension transforment peu à peu les visages comme une vague parcourt l'océan.

Assise un peu plus loin, Eve les contemple. Les contraires s'attirent, se dit-elle, et elle n'a jamais vu un couple constitué de deux êtres plus différents que ceux-là. L'un grand et l'autre petit. Une silhouette mince et sèche, l'autre douce et toute en rondeurs. L'obscurité, et la lumière.

Le Dr Crowley se penche pour murmurer quelque chose qui illumine le visage du Dr Fell. Elle n'entend pas leurs paroles, et ils ne semblent pas aussi détendus et spontanés qu'ils ne l'étaient sur ce banc, avant la rentrée. Mais ils ont l'air proches alors qu'ils se touchent à peine. À la manière dont ils se tendent des objets sans avoir à demander. À leurs postures qui s'accordent même quand ils ne se regardent pas, leurs cannes posées ensemble sous leurs chaises. À leur façon de s'interrompre mutuellement quand ils discutent (Le Dr Fell bienveillant et amical, le Dr Crowley tantôt poliment imperturbable, tantôt sarcastique).

Quand le plat principal arrive, le Dr Fell en savoure chaque bouchée. Le Dr Crowley avale sa part quasiment d'un coup avant de s'appuyer contre le dossier et de l'observer. Ou d'essayer de l'observer, en tout cas, car les étudiants qui partagent leur table enchaînent les questions, et lui n'a pas de bouche pleine pour excuser ses silences.

« Où vous êtes-vous rencontrés d'ailleurs? » demande un étudiant.

Le Dr Fell affiche un sourire tendre. « Dans un jardin.

— Vraiment ? »

Le Dr Crowley hausse les épaules. « Je faisais le mur, et lui était perché dessus. Je m'ennuyais, alors je l'ai rejoint. Le reste, comme on dit, appartient à l'histoire.

— Pourquoi vous ne portez pas d'alliance ? » s'enquiert un autre, les yeux rivés aux mains de Crowley.

« Pour par avoir à la retirer à chaque fois que je m'occupe des plantes.

— Pourquoi les lunettes noires ?

— Problème oculaire », rétorque sèchement le Dr Crowley.

« Ne soyez pas impoli » déclare le Dr Fell au même moment.

Ils échangent un long regard, qui peu à peu s'adoucit d'une tendresse telle que les interrompre constituerait une insulte grossière, et la plupart des étudiants se plongent plutôt dans leur dessert.

Le Dr Fell mange son dessert ainsi que celui de Crowley, sans qu'aucun d'eux ne s'en plaigne. Mais lorsque la distribution de cafés et de crackers commence, Eve s'aperçoit que le Dr Crowley a quitté la salle en toute discrétion.

Et alors que tout le monde rit des blagues nulles tirées des papillotes surprise, le Dr Crowley revient s'asseoir. Son sourire mince égale pourtant la bonne humeur du Dr Fell, et désormais, plus personne ne doute qu'ils sont bien ensemble.