Fidèles lecteurs, je vous félicite d'être parvenu jusqu'ici. C'est parce que je prends à cœur de vous raconter mon histoire avec les détails les plus tristes mais également les plus heureux que j'ai pu arriver jusque là moi aussi. J'estime que vous devez savoir ce qu'il s'est passé ensuite, et j'ose espérer que vous partagez cet avis.

La première chose que je peux vous dire c'est que j'ai obtenu mon diplôme. J'ai même eu une mention, c'est dire. L'option musique m'a relativement bien aidée, et j'y ai joué du violon. Devinez qui m'a accompagné ? Tout le monde était très fier de moi. A commencer par mon père : un homme que je n'ai jamais voulu décevoir. Un homme à qui je devais tout. En apprenant la nouvelle il m'a prit dans ses bras et m'a serrée si fort que je n'étais pas certaine que demain verrait le jour. Je ne vais pas vous mentir (plus à ce stade) mais nous avons versé quelques larmes. Vint le tour de ma tante : car avec elle échouer n'est pas permis. Elle m'aurait pardonné de ne pas avoir de mention, mais certainement pas de ne pas avoir la moyenne. On dit jamais deux sans trois, mais trois dernières années ? Jamais ! Dorothea et Claude furent de la partie, bien-sûr, et eux même étaient ravis d'avoir obtenus une mention. Edelgard, ma petite amie de l'époque, m'a seulement félicité tout en me précisant que frapper sur mon crâne n'avait finalement pas été inutile. Tous étaient fiers, mais la plus fière de tous, c'était moi. Oui. J'étais très fier de moi. D'avoir survécue à tout ça. D'avoir su rebondir. Même si j'ai bien plus d'une fois eus envie de baisser les bras, je suis heureuse de ne jamais avoir cédé.

Le professeur Essar est resté en vie jusqu'à la fin. Son cœur bat encore dans sa poitrine aujourd'hui. Oui, j'ai envie de vous parler du corps enseignant d'autrefois car sans eux, je ne serais pas ici non plus. Il faut dire que je leur en ai fait vivre de toutes les couleurs, du début à la fin. Je ne compte même plus le nombre de fois où j'ai été convoquée dans le bureau de Manuela. Vous savez quoi ? Malgré la différence d'âge, nous sommes devenues amies elle et moi. Certainement parce que Dorothea et elle étaient amies déjà. Elles ont chanté ensemble pour le récital et c'était magnifique. J'avais raison, j'étais bien une de ses têtes de mules préférées. J'aime lorsqu'on parle de cette époque, je ris parfois de joie, parfois de honte, mais au moins j'en ris. Cichol est resté dur et sévère mais son visage s'est déridé lorsque je lui ai montré fièrement mon diplôme. Au début, je pensais qu'il ne pouvait pas me voir en peinture (et peut-être que c'était le cas au début) mais il n'a jamais cessé de croire en moi. Nevrland continue toujours de distribuer ses cours au lycée : torturer les élèves est une véritable passion chez elle comme on aimerait tous en avoir au moins une. Et concernant Charon… J'ose à peine croire ce que je vais vous dire mais… Devinez qui j'ai surpris dans le bureau de la directrice alors que j'allais voir ma tante ? Eh oui, vous savez désormais. Ma tante, la directrice de Saint Seiros de surcroit, s'envoyait en l'air dans son propre bureau ! Des souvenirs qui mirent du temps, beaucoup de temps à disparaitre.

Mais parlons de mes amis. Je pense que la décision d'Edelgard a donné une impulsion à Ingrid car elle s'est déclarée avant le récital. Dorothea en a perdu la voix une minute après avoir réalisé et l'on se demandait tous si elle serait capable de monter sur scène, mais jamais elle n'aurait permis à Lorenz de lui voler la vedette alors le garçon à la coupe affreusement découpée aujourd'hui encore s'est contenté des chœurs. Après le spectacle, la chanteuse a carrément calenché dans mes bras. Tout comme elle a calenché dans son lit le soir même puisqu'elles n'ont pas perdue de temps avec Ingrid. Des années de frustration qui quittaient enfin leurs corps et cœurs dans un tendre moment. Dorothea me raconte tout vous savez.

Claude a fait fortune avec ses potions d'amour, incroyable non ? Pas tant que ça, tout le monde ne jure que pas l'amour à dix-sept ans. C'est resté très compliqué entre Dimitri et lui. Pendant longtemps les deux ont continué de se qualifier comme d'éternels célibataires alors qu'ils passaient tout leur temps à s'envoyer en l'air (cela dit c'est ce que je faisais aussi dés que j'en avais l'occasion alors qui suis-je pour juger). Deux célibataires endurcis qui prennent un appartement ensemble après le lycée où aucun n'allait voir ailleurs. Vous me suivez ?

J'en viens à la personne la plus importante de cette histoire, et de ma vie. Ma fausse petite amie, mon ex petite amie, puis ma petite amie. Ma fiancée, et ma femme aujourd'hui. J'en aurais, des choses à raconter, mais je vais aller à l'essentiel. Après la remise des diplômes, nous nous sommes inscrites dans la même université. Edelgard voulait faire du dessin, et moi de la musique. Oui, je suis allée à la fac, je suis en dernière année aujourd'hui. De vous à moi, j'ai longtemps pensé que je jouerais de la guitare mais j'ai trouvé dans le violon une sorte d'écho à ma vie et Edelgard m'a accompagnée dés qu'elle le pouvait : régulièrement. Et puis, ne sait-on jamais si l'envie me prends de dessiner à nouveau un Aigle Crinière. Nous avons pris une chambre à l'université, puis un appartement pour avoir plus d'intimité. S'envoyer en l'air dans les dortoirs conduit parfois à de gênantes situations, embarrassantes (s'il n'y avait eu que dans les dortoirs). Je me garde bien les détails mais j'aimais tellement son expression outrée. Je plaide coupable à chaque fois mais elle est aussi responsable que moi. J'ai demandé sa main après le lycée et elle a manqué de s'évanouir : on peut dire qu'elle a passé plus de temps fiancée que célibataire mais je suis heureuse que cela se termine avec moi. Nous nous sommes mariées l'année dernière et devinez quoi ? Même son père était là. Un des plus beaux jours de ma vie.

Tants de souvenirs, fidèles lecteurs. Tous ces destins, liés, reliés… Telles des diagonales entrelacées. Car si une seule chose s'était passée différemment et si une seule personne n'avait pas été là au moment où elle fut là, à sa place, alors rien de tout cela ne serait arrivé. Des fils reliés, entremêlés, les uns aux autres. A tout jamais.

Vous en voulez plus ? D'accord. Je vous offre pour finir un détail important. Grâce à Dorothea, j'ai arrêté de fumer. Définitivement.

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