Supermassive blackhole-Muse


Bucky ne sut pas exactement durant combien de temps ils roulèrent afin de s'éloigner le plus possible des flammes, des tremblements de terre, du champ de bataille d'où s'étaient enfuis leurs nouveaux ennemis. Il faisait froid dans la voiture. Même l'ambiance était glaciale. Personne n'avait prononcé le moindre mot depuis le départ précipité de l'équipe. Morgan s'était endormie sur les genoux de Natasha, qui lui caressait doucement et distraitement les cheveux en regardant à travers la vitre arrière. A ses côtés, Thor était nerveux et fixait un point invisible droit devant lui. Loki était silencieux également, et regardait les lumières de la ville défiler tranquillement au fur et à mesure qu'ils progressaient dans les rues assez calmes. Assise devant, Pepper était perdue dans ses pensées et profitait de cet instant de répit pour remettre un peu d'ordre dans ses pensées confuses et enfin, Bucky restait focalisé sur la route.

Il aurait aimé qu'ils soient invisibles, là-bas. Là où leurs problèmes s'étaient déclenchés. Echapper plus rapidement à cette terreur, ce chahut, ce danger environnant. Avec le temps, il se battait de moins en moins, ce qui ne lui déplaisait pas. Mais ce soir, il s'était senti particulièrement démuni, inutile même. Qu'aurait-il pu faire afin de contrer ces deux divinités avides de pouvoir dont il ne savait pas grand-chose ? Il savait bien que son aide avait été plus précieuse aux côtés de Pepper et de sa fille, qu'il avait bien fait de les protéger et les surveiller pendant que Thor et Loki se chargeaient de leurs redoutables adversaires, mais il aurait aimé pouvoir en faire davantage. Il avait bien trop souvent la désagréable impression de ne pas être à la hauteur, même si Sam passait le plus clair de son temps, à sa manière, à lui rappeler qu'il avait d'innombrables qualités qu'il ne devait surtout pas négliger, car il était essentiel à la survie de leur équipe.

Il s'engagea enfin sur une allée de graviers en soupirant de soulagement. Ils approchaient de l'adresse inscrite sur la carte de visite, ce qui le rassura grandement. Il ne savait trop à quoi s'attendre une fois qu'ils seraient arrivés, mais il savait qu'il ne pas déçu. Tout était extrêmement calme dehors, même s'il n'était pas encore trop tard. Il était à peine vingt heures quarante-cinq. Pourtant, la forêt environnante semblait s'être couché de bonne heure. Au moins, il n'y avait plus personne pour les déranger. Tout était plutôt tranquille, ce qui faisait du bien à tout le monde. Le ronronnement de la voiture de Pepper était apaisant, il avait un effet relaxant sur Bucky et ses nerfs en pelote. Ce soir, il avait vraiment eu peur de perdre d'autres amis. Mais pour une fois, la chance leur avait souri et ils s'en étaient tous sortis indemnes.

Il bifurqua à gauche, puis il se gara. Pendant quelques secondes, tout resta silencieux et personne n'osa bouger un seul orteil, de crainte que quelque chose ne surgisse de l'ombre une fois qu'ils ne seraient plus à l'abris dans le véhicule. Bucky finit par regarder Pepper du coin de l'œil, soucieux, et cette dernière tourna la tête vers lui d'un air un peu inquiet. Jamais le soldat ne l'avait sentie aussi tendue. Il y avait de quoi, après tout. Il souffla un bon coup avant d'ouvrir la portière et de sortir. Il commença par regarder attentivement tout autour avant d'aller ouvrir à Pepper, qui était resté à l'intérieur de la voiture, perdue dans ses songes. Les deux dieux sortirent également, puis ce fut au tour de Natasha en dernier lieu. Elle remit Morgan à sa mère et s'approcha de Bucky. Elle aussi était tourmentée, mais elle savait mieux le cacher et faire croire qu'elle gérait le stress. Qu'elle tenait le coup.

Ils firent quelques pas sur le gravier, entendant les hululements de chouettes au loin. C'était chose commune, dans les environs. En tête de file, Natasha et Bucky échangèrent un bref coup d'œil tandis que Thor couvrait leurs arrières, les sens en alerte. Il était prêt à se battre à nouveau si l'occasion se présentait, même si le premier affront l'avait plus fatigué qu'il n'y parut. Loki et lui avaient repris une apparence plus banale, passepartout. Tous ensemble, ils marchèrent en direction de l'imposante demeure qui se dressait devant eux.

Lorsqu'ils arrivèrent sous le porche, le soldat frappa alors doucement contre la porte, qui s'ouvrit lentement, comme un signe d'invitation à ne pas rester dehors. Ils n'étaient vraiment pas au bout de leurs surprises, ce soir. Tout devenait de plus en plus étrange au fur et à mesure qu'ils progressaient… Le brun poussa la porte et ils se retrouvèrent devant un grand hall éclairé d'une lumière chaude et accueillante. Immédiatement, tous se sentirent plus serein, et une fois qu'ils furent tous entrés, la porte se referma derrière eux. Le bruit fit sursauter Pepper, mais elle était tellement à cran que n'importe quoi aurait pu l'effrayer ce soir.

–Je suppose que les routes étaient suffisamment dégagées pour que vous arriviez aussi rapidement.

Le petit groupe se tourne en direction de la voix qui venait de s'adresser à eux. Ils virent alors un homme assis dans un fauteuil roulant s'approcher d'eux, un sourire illuminant son visage. Tous furent très rassurés d'enfin voir quelqu'un de familier et surtout, bienveillant.

–J'ai eu vent de ce qu'il s'est passé. En plus d'être les bienvenus, vous êtes en sécurité ici, les rassura immédiatement Charles Xavier.

–C'est bon à savoir, souffla Pepper, reconnaissante. Navrée que nous fassions irruption sans avoir prévenu à l'avance.

–Il n'y a pas de mal, affirma le directeur en lui souriant chaleureusement. Je suis très heureux de constater que rien de grave ne vous soit arrivé, et que vous ayez choisi de trouver refuge ici.

–C'est toi qui nous as envoyé l'armure ? l'interrogea Natasha, mais en voyant l'air intrigué de Charles, elle eut sa réponse. Ok, je vois, soupira-t-elle. Tu ne saurais pas si Mad' traine dans le coin, par hasard ? lança-t-elle sans grande conviction, ayant la très nette impression qu'où qu'elle se rende, sa meilleure amie lui filerait toujours entre les doigts. Il me semble qu'en tant que professeur, et surtout à l'approche des examens, elle doit forcément rester dans les parages…

–Co-directrice, corrigea-t-il, en faisant pivoter son fauteuil pour partir dans l'autre sens. Pas seulement professeur.

–Vous ne vouliez plus qu'elle dirige l'école ? lui demanda Bucky.

–C'est plutôt le contraire, l'informa-t-il, tandis que le groupe se mit à le suivre dans le couloir. A mon retour, elle a pensé que je souhaiterais reprendre les commandes, puisqu'il s'agit de ma demeure, mais pendant cinq ans, c'est elle qui a tout géré ici. Alors, nous avons trouvé un compromis : elle a repris son rôle de professeur à temps plein, mais officiellement, elle a autant de pouvoir sur cette école que moi. Elle me conseille de temps en temps et m'aide à comprendre ce qui m'échappe et qui a changé durant mon absence, leur expliqua-t-il en progressant à son aise dans le couloir.

Loki en profitait pour observer attentivement les lieux, qui lui étaient encore inconnus. Il appréciait beaucoup l'architecture du manoir, autant extérieure qu'intérieure. Son œil était attiré par les lampes murales qui diffusaient une lumière douce tout en éclairant les tableaux et clichés exposés sur les palissades de bois. D'un côté, des peintures de maitre. De l'autre, des photographies représentant des personnes dont quelques visages lui étaient familiers. Il devina sans peine qu'il devait s'agir exclusivement de mutants ayant vécu entre ces murs.

–Tu es revenu depuis longtemps ? reprit Charles à l'adresse de Thor, qui marcha sur sa droite. Tu as l'air en formes, poursuivit-il sans lui laisser le temps de répondre à sa question. Mais je trouve cela étrange que ton retour coïncide avec l'arrivée de ces deux êtres qui s'en sont pris à vous ce soir.

–Pour le coup, d'après ce que j'ai compris, il s'agit d'une coïncidence, le défendit Natasha. Mais ça ne veut pas dire que c'est terminé. Ces personnes en avaient après Madison, et elles n'avaient pas l'air très enclines à négocier. D'ailleurs, où est-elle ?

Charles s'arrêta. Il parut hésiter et se mit à réfléchir quant au choix de ses prochaines paroles.

–… Elle… travaille.

. . . . . . . .

Non loin de là, c'était le chaos.

Robots ultrasophistiqués, monstres et soldats surentrainés s'étaient alliés pour réduire en cendres chaque obstacle se dressant sur leur passage, inerte ou vivant. Afin d'éviter les projections de métal dues à l'explosion d'un camion-citerne rempli d'essence, Madison Stark plongea derrière la carcasse à moitié carbonisée d'une voiture de police à laquelle il manquait deux portières, ainsi qu'une partie du capot.

A l'abris derrière son rempart de fortune, la combattante vérifia le nombre de munitions qu'il restait dans le chargeur de son arme de service, mais elle eut la désagréable surprise de constater qu'il était à sec. Plus aucune balle en réserve, et un nombre conséquent d'ennemis à abattre.

En effet, les lieux étaient infestés de nuisibles prêts à sauter sur tout ce qui bougeait. Partout, les adversaires de Madison grouillaient. Le parking était envahi d'une odeur âcre de désespoir et de pétrole. Les seules sources de lumière étaient, entre autres, l'incendie provoqué par l'explosion, les quelques véhicules ici et là qui brûlaient également et dont certains phares étaient allumés, ainsi que les heureux lampadaires qui n'avaient pas encore été touchés. La nuit était fraiche, le vent alimentait dangereusement les flammes.

Madison se servit des reflets dans les vitres partiellement brisées du bâtiment chancelant juste en face pour déterminer les zones à dégager en priorité. Quelques Radjlacks, créatures à la peau écailleuses et aux dents pointues qu'elle ne connaissait que trop bien, avaient pris d'assaut un véhicule blindé des forces de l'ordre, le faisant passer pour un jouet en plastique qu'une poignée d'enfants capricieux se disputeraient un matin de Noël. Leurs cris rauques auraient presque pu faire éclater les quelques fenêtres encore intactes de l'immeuble qui menaçait de s'écrouler à tout moment. Si les vitres explosaient, cela ferait encore plus de projectiles à éviter, ce qui impliquait que Madison se verrait contrainte à dévoiler sa position à ses ennemis en abandonnant sa cachette. Restait donc à espérer que le verre tiendrait bon encore quelques minutes.

Elle ne resta pas seule très longtemps, car elle fut rejointe par un homme à la tignasse châtain ébouriffée par le souffle des déflagrations voisines, qui maugréa quelques vagues commentaires concernant la situation catastrophique dans laquelle ils étaient coincés. Il cala son dos contre la portière enfoncée en soupirant mais il s'en écarta vivement à cause de la chaleur qu'elle véhiculait.

Il portait un ensemble de combat similaire au sien : une tenue ignifuge bleu roi et noire renforcée à certains endroits et mise en valeur par quelques liserai dorés, dont les entrecroisements au niveau du torse formaient un « X ».

–Où est Hank ? demanda la brune en activant un dispositif placé sur son avant-bras droit, matérialisant un schéma en trois dimensions des alentours, néanmoins brouillé par des interférences qui ne s'arrangèrent pas lorsqu'elle tapa dessus dans l'espoir de le faire fonctionner convenablement.

–On a été séparés, répondit Bobby Drake d'une voix forte pour couvrir le bruit des explosions. Je l'ai vu rejoindre Scott de l'autre côté du terrain, l'informa-t-il, tandis qu'une troisième personne se joignit à eux.

Une jeune femme évita de justesse un coup de feu et s'accroupit à leurs côtés. Elle s'attacha les cheveux en quatrième vitesse pour ne plus avoir la vue obstruée par ses mèches brunes.

–Tout va bien, Kitty ?

Avant que la concernée puisse répondre, leur crainte –très fondée– se réalisa, et les vitres du bâtiment volèrent en éclat, dispersant des milliers de morceaux de verre dans tous les sens, y compris dans leur direction.

Kitty eut l'excellent réflex de toucher ses deux acolytes simultanément, partageant temporairement ses pouvoirs avec eux. Le verre ne les blessa donc pas ; il passa au travers d'eux comme s'ils n'étaient que des enveloppes fantomatiques. Kitty les relâcha ensuite presque immédiatement et elle sursauta lorsqu'un éclair s'abattit à seulement quelques mètres d'eux, après quoi elle répondit enfin à la question que lui avait posé son compagnon.

–Au top ! s'exclama-t-elle joyeusement, ses yeux écarquillés contrastant légèrement avec ses propos. On y retourne ?

Madison fit disparaitre la visualisation holographique d'une simple commande, puis son protège avant-bras se développa en une protection armorifiée couleur émeraude. Elle utilisa on autre main afin de l'armer correctement puis, sans hésiter, se redressa partiellement en se retournant et utilisa un tir à protons sortant directement de sa paume pour pulvériser un énorme robot qu'elle avait vu s'approcher d'eux sur son schéma, après quoi elle reporta son attention sur ses amis.

–On y retourne, confirma-t-elle en se mettant totalement debout, puis elle s'élança sur le no man's land.

Kitty et Bobby échangèrent un bref coup d'œil puis ils quittèrent à leur tout leur cachette qui, n'ayant initialement pas une grande fonction protectrice, ne les dissimulait désormais plus du tout des yeux de leurs ennemis. Ils coururent donc à la suite de leur amie en évitant les tirs incessants des soldats, ainsi que les attaques furtives des créatures aux dents pointues.

Tandis que Madison s'occupait de dégager une partie du terrain à même le sol, une jeune mutante à la chevelure blanche comme neige et dont les yeux brillaient d'une lumière pure avait pris possession des cieux et manipulait à sa guise l'électricité qui courait dans les fils d'alimentation des néons, enseignes et lampadaires pour la transformer en éclairs survoltés, qu'elle faisait s'abattre sur les robots, faisant griller tous leurs circuits. Sa présence était très bénéfique à un des ses alliés en contrebas, car elle couvrait habilement ses arrières.

Celui-ci avait donc moins à se soucier des adversaires qui surgissaient dans son dos. Ses deux moyens de défenses principaux étaient l'imposante arme à feu qui crachait des rafales de flammes et d'énergie, ainsi que ses propres yeux. Grâce à sa paire de lunettes aux verres teintés qui lui permettait de contrôler les lasers destructeurs qui sortaient de ses prunelles, il pouvait sans effort détruire les créatures qui s'aventuraient trop près de lui. Le tout était de coordonner ses mouvements, de savoir où et quand frapper et surtout, de ne pas se laisser distraire, à aucun moment.

Il pouvait également compter sur l'aide d'un autre mutant à la force surdéveloppée et dont la peau était bleue. Ce dernier combattait avec le même style d'arme, mais il semblait bien plus à l'aise que le plus jeune, car il avait davantage d'expérience avec ces engins, qu'il avait lui-même fabriqués. Lorsqu'un ennemi parvenait à l'atteindre après avoir miraculeusement esquivé les rafales de tirs, il privilégiait sa force physique pour terminer le travail.

Un bref instant d'inattention et Madison aperçut trop tard un faisceau d'énergie puissant tiré d'un canon adverse. Elle eut simplement le temps d'activer la matérialisation de son bouclier translucide pour limiter l'impact, mais la force fut telle qu'elle passa au travers de la vitre de la station-service deux mètres derrière. Elle atterrit sur un établi qui croula sous son poids jumelé à celui des gravats, entre les fruits et les sachets d'arachides.

Quelques secondes plus tard, ce fut Bobby qui se retrouva dans la même position qu'elle, un rayon plus loin, projeté tel une poupée de chiffon par un monstre relativement remonté. Madison, déjà redressée avec une pomme attrapée à la volée en main, le rejoignit et l'observa marmonner de mécontentement, étalé parmi les chiffons de nettoyages de carrosserie à la propreté douteuse.

–Le monde part en vrille et toi, tu restes allongé ? se moqua-t-elle gentiment. Si tu veux, je reviens dans dix minutes, histoire que tu prennes le temps de t'étirer avant de te lever.

–T'es as d'autres comme ça, en réserve ? rétorqua Bobby du tac-au-tac, ou tu me files un coup de main ? ajouta-t-il, tandis que son amie l'attrapa par le bras pour l'aider à se remettre debout.

Une fois droit, et puisque deux ne venait jamais sans trois, ce fut au tour d'Hank de se retrouver dans la station-service délabrée. Lui eut au moins le mérite d'y arriver de son plein gré, pour se protéger temporairement d'une série de coups de feu, après quoi il se servit de sa propre arme pour pulvériser à distance un petit groupe de créatures qui se décomposèrent en lambeaux de chair putréfiée et fluides sanguins noirs.

Ses deux amis marchèrent dans sa direction, pendant qu'il vérifiait les réglages de son arme améliorée. A l'extérieur, les trois mutants se démenaient pour éliminer la menace.

–Ils se débrouillent bien, pas vrai ? lança Madison en croquant dans sa pomme, sans lâcher les plus jeunes mutants des yeux.

–Pas mal, confirma Hank, mais ça ne va pas durer si on reste là, les bras croisés, poursuivit-il en repartant à la charge.

Bobby, d'humeur taquine, fit apparaitre sous les pieds de l'homme une plaque de glace suffisamment discrète pour qu'il ne la remarque pas. Hank glissa malencontreusement dessus et chuta en se cognant contre une vieille Ford en fin de vie.

–DRAKE ! s'exclama rageusement Hank avant de se redresser pour repartir au combat, n'ayant pas le temps de se disputer avec son allié.

Bobby sourit avec satisfaction. Madison avait envie de rire, mais elle fit l'effort de se retenir, autant par respect pour Hank que par besoin d'imposer un minimum d'autorité au sien du groupe. Elle se devait de montrer l'exemple en évitant de valider toutes les pitreries de ses acolytes.

–C'est Maximoff qui t'a mis au défi de faire ça ?

–On a parié deux dollars, confirma fièrement l'homme. Et deux dollars, c'est deux dollars, affirma-t-il, et brusquement, un soldat à proximité d'eux marcha sur une mine anti-personnelle et explosa, forçant le duo à reculer d'un pas. Beck', reprit Bobby, tu crois que Raven a une dent contre moi ?

–Très sincèrement ? dit Madison en mangeant un autre morceau de pomme, qu'elle mastiqua tranquillement en réfléchissant. Mouais, c'est possible. Allez, on bouge.

Ni une, ni deux, ils regagnèrent la partie. La brune partit de son côté sans trop de précipitation tandis que son ami choisit de prêter main-forte à Scott. Le plus jeune se mit accroupi à temps pour esquiver le châssis d'un pickup, avec lequel son assaillant espérait probablement l'écraser. Cela devenait de plus en plus éreintant, mais il tenait bon tant bien que mal.

–On peut trouver un moyen de contourner leurs attaques !

–Je suis toute ouïe ! s'exclama Bobby en les protégeant in extrémis derrière un mur de glace lorsqu'un soldat casqué leur lança une tige de métal à l'extrémité pointue. Parce que là, concrètement, je ne vois pas ce qui pourrait nous permettre de sortir de là en un seul morceau ! compléta-t-il en renforçant la paroi à l'issue d'une seconde attaque, plus violente cette fois-ci.

–Ce n'est pas la pire menace que l'on ait eu à contrer, mentionna Scott d'un ton enjoué, tout en restant concentré. Il doit bien rester une voiture dans les environs qui n'ait pas encore explosé, on pourrait s'en servir pour distraire une bonne partie du camp adverse, il me faudrait juste un angle de tir adéquat !

–C'est ça le problème, rétorqua l'autre, son corps tout entier se transformant en glace, puisqu'il tirait davantage de puissance de sa mutation. J'apprécie ton optimisme, mais ils sont beaucoup trop nombreux pour qu'on puisse te dégager une fenêtre de tir un minimum correcte, parce qu'il suffirait que tu vises trois centimètres à côté pour que ça touche la citerne et nous fasse tous griller !

D'une part, Bobby n'avait pas tout à fait tort. A ce stade-ci, il leur faudrait un miracle pour limiter la casse au maximum. Mais quoi qu'il arrive, Scott continuerait à réfléchir pour trouver une solution et conserver sa bonne humeur.

De son côté, Kitty refusait de capituler. Elle était dotée d'une agilité et d'une souplesse étonnante, ses gestes étaient furtifs et grâce à son pouvoir étonnant, la plupart des coups que lui portaient ses opposants passaient naturellement au travers d'elle. La plupart, car à cause de sa fatigue grimpante, elle en laissait malencontreusement passer un ou deux que, pour le coup, elle sentait passer. Les deux plus douloureux furent celui qui l'atteignit au bas du dos, et celui qui, d'après ses estimations, lui laisserait une trace sur le front pendant une bonne semaine.

Heureusement, elle possédait également des bracelets intégrés à sa tenue de combat qui infligeaient des décharges à ses adversaires grâce aux condenseurs électriques intégrés. Mais les autres revenaient en masse, encore et encore. Les coups pleuvaient. De plus en plus nombreux, de plus en plus puissants. Et malheureusement pour elle, els robots qu'elle affrontaient avaient une force largement supérieure à la sienne.

Cela devenait de plus en plus compliqué d'esquiver les offensives et de garder l'équilibre, car à chaque choc, ses genoux fléchissaient davantage, sans qu'elle ne tombe jamais à terre. Elle ne baisserait pas les bras, les robots devraient en finir définitivement avec elle s'ils voulaient remporter le combat, car elle ne lâcherait pas, même avec tous les os du corps brisé.

Déstabilisée par les interférences causées par l'électricité corrompue dans l'air, Tornade atterrit un peu en catastrophe et s'abrita derrière un reste de panneau publicitaire. Son regard croisa celui de Hank, elle en profita donc pour tenter de le rejoindre sans se faire agripper par les griffes acérées des Radjlacks qui, contrairement à l'équipe de mutants, paraissaient inépuisables.

–Je ne peux pas atteindre leur chef, ils arrivent de partout, souffla-t-elle à l'homme. Je ne peux pas le faire seule, avoua-t-elle, la voix légèrement tremblante, phénomène dû à sa fatigue et sa peur de ne pas sortir victorieuse de cette épreuve, alors elle osa demander à l'homme : Est-ce que tu peux m'aider… ?

Elle vit alors du coin de l'œil un groupe de robots soulever un pickup et le balancer dans leur direction. Elle attrapa fermement Hank par le bras et les fit se déplacer sur le côté afin d'éviter le véhicule, qui s'écrasa lourdement contre un mur de briques fissuré. L'homme repris son souffle, légèrement sonné, puis vérifia encore une fois les réglages de son arme, notamment sa puissance de feu.

–Passe par la droite, je te rejoins de l'autre côté, l'informa-t-il.

La jeune femme acquiesça et, après avoir soufflé un bon coup pour se donner du courage, repartit de son côté. Savoir qu'elle pouvait compter elle aussi sur quelqu'un pour l'épauler la rassurait grandement. Elle espérait qu'ensemble, ils pourraient venir à bout du Radjlack démesurément géant qui s'approchait dangereusement d'eux en écrasant tout sur son passage.

Un groupe de soldat ayant pris le contrôle d'un char d'assaut abandonné parvint à atteindre les commandes de ce dernier et l'utilisèrent pour tirer un rocket droit vers Bobby qui, occupé ailleurs, ne vit pas le projectile foncer vers lui. Kitty, en revanche, le remarqua et elle sentit son estomac se nouer. Jamais elle ne courut plus vite de toute sa vie.

–BOBBY !

Kitty se jeta sur lui et le serra contre elle de toutes ses forces, et le missile passa au travers d'eux de manière fluide. L'oreille collé contre le torse de l'homme, elle pouvait entendre son cœur battre. Elle n'avait aucun doute que son propre pouls devait être au moins trois fois plus rapide.

Non loin d'eux, le Radjlack immense continuait de s'approcher, faisant trembler la terre à chaque pas qu'il faisait. Scott tirait toujours sur les soldats casqués, Hank combattait des monstres à mains nues et Tornade se démenait pour reprendre de l'altitude, espérant avoir un meilleur angle pour attaquer la plus grosse des menaces, en vain. Même si Hank faisait son possible pour lui dégager le passage, le surnombre de leurs ennemis n'arrangeait rien.

Hank finit d'ailleurs par se faire maitriser par ses opposants. Kitty et Bobby furent séparés ; l'homme fut projeté une dizaine de mètres plus loin tandis que la jeune femme se retrouva dos à dos avec Scott, puis ils se firent rapidement encercler par toute une série de robots, de soldats et de créatures. Tornade, qui avait à peine réussi à décoller, se fit vivement tirer vers le sol et termina dans la même position que ses deux amis. Ils l'aidèrent à se relever et se placèrent en triangle, de sorte à assurer les arrières des uns des autres.

Les cris des Radjlacks se mêlaient aux cliquetis incessants des fusils d'assaut que les soldats armaient et réarmaient ainsi qu'aux grincements des articulations rouillées de certaines machines autonomes, brouillant les esprits du trio. Ils réalisaient que désormais, ils ne pouvaient plus compter sur personne pour venir les secourir. Hank et Bobby étaient hors-jeu, leurs ennemis les avaient violemment séparés des plus jeunes, les laissant livrés à eux-mêmes face à une bonne cinquantaine d'adversaires, dont un dont la taille dépassait les huit mètres de haut.

Collés les uns aux autres, Kitty, Tornade et Scott respiraient à l'unisson, animé par un sentiment commun d'anxiété, mais terni par leur témérité. Ils faisaient bravement front ensemble et ne déserteraient pas, quelle que soit l'issue de ce combat.

Tout s'enchaina très rapidement. Un robot tira un missile au cœur d'une citerne dont le contenu se déversait lentement sur le sol, la faisant exploser. La lumière fut intense, la chaleur insoutenable. Tornade eut l'impression de fermer les yeux pendant une éternité, qui se résuma en réalité en quelques maigres secondes à l'issue desquelles le silence se fit.

Elle se trouvait allongée par terre, sur le dos. Kitty et Scott étaient dans la même position et se massaient douloureusement le crâne. Tous les trois virent Madison s'approcher d'eux d'une démarche très posée. Elle s'arrêta une fois à leur hauteur et attendit qu'ils lèvent tous les yeux vers elle pour prendre la parole.

–Bilan de la journée : vous êtes tous morts, claironna-t-elle avec un grand sourire contrastant avec ses propos, les poings sur les hanches, et l'humanité ne va pas tarder à disparaitre, conclut-elle. Simulation terminée.

Toute une série de spots s'allumèrent autour d'eux et le décor chaotique se dématérialisa progressivement, laissant place à une vaste salle high-tech complètement vide. Scott marmonna quelques paroles injurieuses mais camouflée par le fait qu'il avait le visage à moitié enfoui dans de la poussière artificielle qui finit néanmoins par disparaitre elle aussi. Tornade vit du coin de l'œil Bobby tendre sa main à Hank pour l'aider à se lever, puis ils s'époussetèrent les avant-bras en échangeant quelques commentaires de routine sur ce qu'ils venaient de vivre. Madison, elle, s'étira longuement.

–Donc on a perdu, résuma Scott, frustré.

–Vous connaissez le Kobayashi Maru ? leur demanda malicieusement Madison.

–Toi et tes références obscures… soupira Tornade en se redressant tout se frottant l'arrière du crâne.

–Toi et ta non-culture en science-fiction, rétorqua Madison en levant les yeux au ciel. Vous étiez censés perdre aujourd'hui, résuma-t-elle. Ce test permet de voir comment vous réagissez face à une situation de crise, sans aucune issue positive. Vous avez su rester optimistes, oser demander de l'aide et ne jamais abandonner, énuméra-t-elle en observant successivement Scott, Ororo et Kitty.

–… On s'est fait avoir alors ? souffla Scott avant de porter son attention sur Kitty. Attends, tu l'avais déjà passé, ce test ! C'était juste un rappel pour toi aujourd'hui, pas vrai ? Donc tu savais qu'on allait perdre ?

–Oui, répondit-elle avec une mine gênée.

–Et tu n'as rien dit ?

–Vous auriez agi différemment si vous aviez su, se défendit-elle. Et au moins, aujourd'hui, on a eu le droit à autre chose que des bestioles qui explosent en déversant une substance orangée visqueuse qui ne part totalement qu'à la troisième douche, mentionna-t-elle.

Ils commencèrent à se chamailler gentiment en entrainant Tornade dans leur querelle, sous le regard amusé de Madison, qui finit par rejoindre ses deux autres alliés, toujours occupés à débriefer.

–Bon, ça aurait pu être pire, commenta distraitement Hank.

–Vous auriez pu vous faire une élongation, les nargua une voix féminine dans leur dos.

Les trois individus se tournèrent et aperçurent Raven Darkholme marcher dans leur direction. Ses longs cheveux rouges, qui offraient un magnifique contraste avec sa peau bleue, étaient noués en une tresse qui reposait sur son épaule droite. Un sourire radieux éclairait son visage et une lueur espiègle se lisait dans ses yeux ocre.

–Attention, Bobby, tu commences à te faire vieux… ajouta-t-elle.

–La seule raison pour laquelle je suis tombé, c'est parce que tu as modifié les codes de la simulation depuis le panneau de contrôle, rétorqua le concerné en se massant le bas du dos. Tu es vraiment mesquine… Tout ça parce que je faisais un peu d'animation.

–Parce que les attaques à répétitions n'étaient pas suffisantes ? l'interrogea Hank. Je pense que c'était une bonne séance, décréta-t-il. Un de ces jours, tu pourrais faire un bon mentor.

–Dit-il alors qu'il a moins d'années d'expérience que moi dans le domaine de l'éducation, répliqua Bobby en croisant les bras. N'as-tu pas disparu pendant cinq ans ?

–Était-ce de ma faute ? répliqua le scientifique, amorçant une querelle similaire à celle du trio.

Les deux amies les regardèrent faire un instant, ne souhaitant pour rien au monde les interrompre alors qu'ils étaient si bien partis. Tout en poursuivant leur conversation, ils se dirigèrent instinctivement vers la porte qui donnait sur les vestiaires où ils pourraient se délester de leurs ensembles de combat, rapidement imités des trois autres, ne laissant rapidement que les deux femmes seules dans le simulateur. Elles prirent la direction opposée, celle qui conduisait vers la sortie du simulateur et donnait sur le hall principal du deuxième étage.

–C'était très divertissant, affirma Raven. Tu t'es amusée ?

–Enormément, confirma son amie. Et toi ?

–Oh, tu n'imagines pas à quel point. Je n'ai jamais pris autant de plaisir que celui que j'i éprouvé en sabotant Bobby, affirma-t-elle en riant. Tu sais, on a une très bonne vue depuis la salle de contrôle, dit-elle ensuite.

–Bien sûr que je le sais, j'y ai passé un paquet d'heures à lancer des répliques alternatives de Gremlins sur certains élèves pendant leurs examens. Pourquoi ?

–Parce qu'il… se pourrait que quelqu'un m'ait rejoint là-haut et… répondit-elle, visiblement gênée, avant de finalement lui dire : tu as de la visite.

Quelque chose changea dans la façon qu'avait Madison de regarder son acolyte. Raven s'était attendue à un changement d'attitude de sa part. Au cours des dernières heures, elle l'avait vue profiter pleinement d'un instant d'évasion au sein du simulateur. Elle voyait désormais une certaine inquiétude dans son regard. Pas intense, mais néanmoins présente. Elle savait que l'autre femme, dernièrement, ne recevait plus grand-monde. Lorsque quelqu'un souhaitait lui rendre visite, elle s'arrangeait en général pour travailler sur quelque chose pour éviter la moindre entrevue. Alors les visites-surprises ne l'enchantaient guère.

Pourtant, Madison réadopta presque instantanément un air décidé et posé.

–Je crois que je m'en doutais un peu, dit-elle simplement alors qu'elles ouvraient ensemble les portes de la salle.

Dans le hall, Natasha sentit son cœur s'arrêter de battre pendant un court instant. Elle entrouvrit la bouche mais aucun son n'en sortit, bien qu'un milliard de choses lui traversât l'esprit à ce moment-là. Stupéfait, le soldat retint son souffle, ayant l'impression d'être en plein rêve. La main de Pepper se resserra autour de celle de sa fille, qui fit un grand sourire. Loki fit son possible pour rester de marbre et cacher sa surprise, tandis que Thor resta interdit face à ce duo qui dégageait prestance et assurance. Ce fut par ailleurs lui qui prit la parole en premier.

–… Madison.