Chapitre 7
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Dimanche 9 décembre 2018, Poudlard, 11h30
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Assise derrière son grand bureau, Ginny regarda un instant les tableaux de ses prédécesseurs qui pour certains feuilletaient des grimoires, pour d'autres somnolaient dans leur fauteuil. Il y avait là Phineas Black, Dester Fortescue, Dilys Derwent, Deverard, Albus Dumbledore, Severus Snape et Minerva McGonagall. Elle avait veillé personnellement à ce que le tableau de Colin Crivey n'ait pas sa place sur ces murs – même s'il était mort en fonction. Il n'avait pas été un bon directeur – il n'avait pas été un directeur tout court.
Minerva, Albus et Severus discutaient à voix basses quand ils étaient entrés dans le bureau. Elle ne savait pas quel avait été le sujet de conversation mais depuis qu'elle s'était assise, ils n'avaient pas pipé mot, comme s'ils ne voulaient pas qu'elle les entende – ou alors cela concernait son invité.
- Assieds-toi Lucius, je t'en prie.
L'homme blond la remercia d'un signe de tête – léger, presque invisible – et prit place dans un des sièges à disposition. Il s'installa comme d'habitude, le dos droit, les fesses sur le bord de l'assise comme s'il voulait partir le plus vite possible dès qu'elle sonnerait la fin de leur entrevue mensuelle. Ils se voyaient régulièrement pour que Lucius puisse lui rendre des comptes.
Ginny n'était pas dupe et, surtout, elle n'oubliait pas qu'il avait été deux fois Mangemort, toujours fidèle à son cher maître Voldemort. Il avait réussi à duper une première fois le monde sorcier en déclarant qu'il avait été sous Impérium. Lucius était rusé, malin et roublard – comme le digne Serpentard qu'il avait été jadis. Elle ne se laisserait pas avoir par ses manipulations. Elle se souvenait parfaitement qu'il avait été « résistant » uniquement pour sauver sa peau, il avait fait amande honorable seulement pour que les résistants puissent le protéger. Tout pour survivre, tout pour rester en vie – tout même revoir ses valeurs et retourner sa cape. Et puis…
Quels renseignements avait-il bien pu donner pour rester en vie si longtemps dans les cachots de Potter ? Merlin, il était resté des années. Des années, vivant dans les cachots du Manoir Potter – sans vraiment de séquelles visibles, outre quelques blessures mal cicatrisées. Son esprit aussi avait dû en prendre un coup, mais il n'en laissait rien paraître. Il avait dit – il avait assuré avec une sincérité presque touchante – qu'il avait été torturé presque tous les jours pour le bon plaisir de Potter et de son propre fils. Il avait supposé être encore vivant seulement parce que son fils avait eu besoin d'un défouloir. Mais Ginny se demandait comment il avait fait pour survivre à ça, pour supporter tant de tortures sans devenir ni fou, ni gravement handicapé. Eux-mêmes avaient été enfermés moins longtemps que lui et ils n'avaient jamais été aussi martyrisés que lui. Et pourtant Ginny avait cru devenir folle après tant d'années enfermée.
Essayant d'échapper aux souvenirs douloureux qui revenaient sournoisement dans son esprit, Ginny se racla la gorge, reportant son attention sur Lucius en face d'elle. Il était fort – mentalement parlant – parce que si elle n'avait pas été là lors de son audience, jamais elle n'aurait pu imaginer ne fut-ce qu'une demi-seconde tout ce qu'il avait supporté caché dans les ombres des cachots du Manoir Potter. Sous ses grandes robes élégantes, Ginny savait que se cachaient plusieurs cicatrices qui parsemaient sa peau laiteuse. Son visage était plus fin qu'il y avait quelques années, plus pâle encore si cela était physiquement possible. Ses yeux toujours aussi clairs paraissaient beaucoup plus las, presque moins arrogants que lorsqu'elle l'avait croisé dans la librairie juste avant sa première année à Poudlard – une éternité auparavant.
Elle savait aussi que sa voix serait plus grave, plus rauque aussi, parce que Draco Malfoy lui avait abîmé les cordes vocales. Elle secoua la tête. Le Cercle avait été horrible pour tout le monde, surtout pour les anciens Mangemorts. Lucius était un rescapé – le dernier des partisans de Voldemort, et le Ministère avait été indulgent envers lui, jugeant qu'il avait été suffisamment puni en pourrissant dans les cachots de Potter, quotidiennement maltraité et journellement torturé. Ginny avait approuvé sa libération – Lucius avait suffisamment payé pour tout ce qu'il avait fait par le passé et, comparé à ce que Potter et tout ceux qui l'avaient suivi avaient fait, les actes de Malfoy père ne représentaient rien.
Cependant… Cependant Ginny avait mis ses conditions. Lucius pouvait jouir de sa liberté, refaire sa vie comme il le souhaitait, reprendre un boulot au Ministère s'il le voulait, fonder une nouvelle famille. Mais il devait mensuellement rendre des comptes à Ginny. Il devait pouvoir lui fournir des justificatifs sur tout – ses dépenses, ses déplacements et ses rentrées d'argents. Tout devait être justifiable. Lucius avait bien évidemment accepté de bonnes grâces – et depuis plus de douze ans maintenant, il venait tous les mois dans son bureau pour faire le point.
- Alors Lucius ? Tu as ton relevé ?
Il hocha la tête, chercha dans ses poches et en sortit un parchemin élégamment enroulé. Il le lui tendit, le visage neutre et elle saisit le papier. Dessus, il y avait plusieurs chiffres d'inscrits. Elle parcourut les lignes, regardant les différences dépenses. Il n'y avait rien d'excessif, juste de petites dépenses par-ci par-là qui s'expliquaient par des achats de premières nécessitées – vêtements, fournitures scolaires pour sa fille, aliments et salaire versé à son elfe de maison. Rien d'astronomique. Rien d'inhabituel.
Puis ses yeux tombèrent sur une ligne qui retint son attention. Elle faillit hoqueter de surprise mais elle réussit à garder une expression impassible. Un million cent quatre-vingt-dix gallions. C'était une sacrée somme d'argent qui rentrait dans ses comptes. Il n'y avait rien de marqué à côté, pas de justificatif, pas d'indication d'où provenait cette somme. Qu'avait-il fait ? Ginny sentit son cœur battre un peu plus vite dans sa poitrine, et elle zieuta sa baguette posée nonchalamment sur son bureau à quelques centimètres de sa main.
Qui avait pu verser une somme si importante dans le coffre de Lucius Malfoy ? Qu'avait-il fait pour mériter une telle somme ? Ça lui rappela les lignes qu'elle avait pu voir sur ses anciens – très anciens – relevés. Des tonnes de gallions avaient été brassées par l'ancien Mangemort – expliqués par des pots de vins, des échanges, du blanchissement d'argent. Avait-il repris ces mauvaises habitudes alors que cela faisait des années qu'il était sur le bon chemin ? Avait-il pu les trahir – la trahir alors qu'elle lui faisait confiance ? Etrangement, ça lui fit un pincement au cœur, puis elle prit une profonde et lente inspiration en relevant le regard vers son interlocuteur.
- Peux-tu m'expliquer cette entrée d'argent subite, Lucius ?
Il y avait une pointe de froideur dans sa question et Lucius parut mal-à-l'aise un instant, comme s'il pouvait savoir qu'elle était déçue de lui. Il se redressa, ramena sa canne entre ses jambes et ne regarda même pas le relevé qu'elle lui montrait.
- J'ai… commença-t-il avant de se racler la gorge. J'ai finalement trouvé le courage de vider un des coffres que j'avais à Gringrotts.
Le mot « courage » sembla écorcher sa bouche et Ginny se sentit sourire malgré elle. Bien que repentit, Lucius resterait à jamais un Malfoy et il gardait ses manières aristocratiques – ses valeurs de Serpentard. Son cœur ralentit quand elle comprit de quel coffre il parlait.
- J'ai vendu ses affaires.
Ginny se laissa aller en arrière dans son grand siège et elle reposa le parchemin, son regard ne quittant pas un instant Lucius. Alors, il avait réussi à vendre les affaires de Narcissa. Il était temps, après tout, mais Ginny pouvait comprendre que c'était un grand pas en avant. Après tout, malgré tout ce qu'on pouvait dire de Lucius Malfoy, il avait véritablement aimé sa femme et se séparer des affaires qu'elle lui avait laissées prouvait simplement qu'il avait réussi à faire le deuil de sa bien-aimée. C'était Séléné qui devait être soulagée de cette nouvelle – la jeune femme, une Sang-Pur, d'origine biélorusse, l'avait épousé des années auparavant avant de tomber enceinte d'Hélia. Ginny ne savait pas si c'était un mariage arrangé ou si Lucius l'aimait autant qu'il avait aimé Narcissa mais tous les deux semblaient heureux et Séléné, une adorable poupée blonde d'une trentaine d'année, maintenait Lucius sur le droit chemin – en tout cas, en apparence.
Pour tout dire, Ginny s'attendait à ce que Lucius retourne une nouvelle fois sa cape. Il avait vécu sur la corde raide toute sa vie, manipulant les gens, changeant de camps quand ça l'arrangeait pour sauver sa vie – pourquoi cela aurait-il changé ? Pour le moment tout était bien dans le meilleur des mondes mais si quelque chose devait arriver, Ginny était persuadée que Lucius n'hésiterait pas à la leur faire à l'envers pour préserver sa famille et sa propre vie.
- Il y avait tant d'affaires que cela ?
Lucius plissa des yeux, dédaigneux un instant, avant de redevenir neutre tel un mur de glace. Ginny savait qu'elle appuyait là où ça faisait mal pour son interlocuteur mais elle devait aussi le pousser parfois – pour être sûre de ses intentions.
- Oui, siffla-t-il. Narcissa était une Black avant d'être une Malfoy, elle avait hérité de pas mal de babioles qu'elle m'a offertes.
Il lui sortit une nouvelle liste qui, cette fois-ci, résumait la totalité des babioles en questions. Ginny regarda cela attentivement. Colliers, bagues, bracelets, broches, boucles d'oreilles, coffres remplis de pépites d'or, meubles, pierres précieuses, robes, capes, coupes en or, diadèmes, tableaux rares et livres uniques. Effectivement, beaucoup d'objets rares qui pouvaient expliquer aisément la rentrée importante de gallions.
Il lui expliqua calmement ce que chaque objet lui avait rapporté sans sourciller, sans culpabiliser – alors que des milliers de famille auraient vendu père et mère pour avoir ne fut-ce qu'un tiers de cette somme. Lorsque l'inventaire fut terminé et que Ginny eut noté la totalité des biens qu'il avait vendus et leur prix, elle convia Lucius à rester ici le temps qu'elle aille à Gringotts. Il acquiesça, habitué à son petit manège.
Elle alla jusqu'à sa cheminée et passa un appel via le réseau de cheminette. Elle utilisa son « mandat spécial » – celui qu'elle utilisait pour Lucius et ses rencontres mensuelles. Les gobelins étaient habitués maintenant et ils étaient plutôt agréables envers elle – hommage silencieux à la relative amitié qu'ils avaient éprouvée envers son frère. Elle demanda à voir Gripsy, le chef des coffres – et elle le salua dans la langue gobeline.
- Pourriez-vous, Gripsy, me confirmer que Lucius Malfoy a bien visité son coffre récemment pour vendre les objets qui s'y trouvaient depuis des années ?
- Oui, Madame la Directrice. Je confirme ces faits. Cela a rapporté beaucoup d'argent au sorcier Malfoy et à la banque de Gringotts.
Le gobelin eut un sourire narquois et elle se rappela que sur les coffres des Malfoy, Gringotts avait le droit de toucher un certain pourcentage. Elle vérifierait la suite de la liste des relevés de comptes de Lucius pour voir combien avait pris la banque.
- Je vous remercie, monsieur Gripsy, passez une bonne journée.
Elle essayait d'être aussi aimable que possible et aussi polie que lui avait appris sa mère. Elle se rappelait qu'Harry avait toujours été gentil avec les gobelins et que cela l'avait un peu aidé pendant la guerre contre Voldemort. Ne pense plus à lui. Non, ce n'était pas de bons souvenirs – tout ce qui touchait de près ou de loin à Harry Potter et à Ron. Elle essayait de les oublier – ou du moins, de penser le moins possible à eux.
- Également, Madame la Directrice. Au mois prochain.
Elle lui sourit, puis mit fin à l'appel et retourna s'asseoir derrière son énorme bureau. Lucius avait l'attention tourné vers les tableaux – celui de Dumbledore lui parlait alors que celui de Severus le regardait fixement.
- Comment vas-tu, mon cher Lucius ? Comment se passe la vie à la campagne ?
Lucius haussa les épaules.
- Tout va pour le mieux, répondit-il nonchalamment. L'air de la campagne écossaise me fait le plus grand bien et j'ai de quoi m'occuper lorsque Séléné part en voyage d'affaire.
- Et comment va Hélia ? demanda finalement Severus.
Il ne connaissait pas la jeune sorcière, il ne l'avait jamais vue, enfermé qu'il était dans le bureau directorial, mais Lucius leur en avait parlé lors de ses précédentes visites. Ginny savait que Severus transférait son instinct protecteur qu'il avait eu pour Draco sur la jeune Hélia. Il était hors de question pour Lucius et pour Ginny que quiconque ne mentionne Draco Malfoy. C'était une partie de leur vie qu'ils souhaitaient tous oublier.
- Elle va bien. Elle est à Serpentard, évidemment.
Il y avait de la fierté dans sa voix. Ginny savait qu'il adorait sa fille – Lucius était bien différent avec elle qu'il ne l'avait été avec son fils, à l'époque. Leur relation n'avait rien à voir, beaucoup moins froide, beaucoup moins psychorigide, beaucoup moins malsaine. Lucius aimait Hélia comme jamais il n'avait aimé Draco – les circonstances n'étaient pas les mêmes également, mais vu ce qu'était devenu Draco, peut-être que Lucius avait réalisé qu'il devait s'impliquer émotionnellement avec ses enfants. C'était un sacré pas en avant.
- Elle s'est fait des… amis. De vrais amis.
Severus hocha simplement la tête alors que Dumbledore souriait, les yeux brillant de malice. Personne ne le dit mais le sous-entendu était clair : Hélia avait réussi à se faire de vrais amis contrairement à Draco qui n'avait eu que des sous-fifres.
- Les as-tu rencontrés ?
- Je n'en ai vu qu'un, un dénommé Timothy Hamilton. Un Sang-Mêlé de Serpentard.
L'ancien directeur des vert et argent eut un simple levé de sourcils, étonné mais pas sous le choc. Il n'était pas rare de voir des sang-mêlé à Serpentard, ce qui était le plus surprenant était d'un duo amical entre une Malfoy et un Sang-Mêlé – mais les temps évoluaient.
- Mon fils fait aussi parti de leur petit groupe, intervient Ginny presque à contre cœur.
- Une Serpentard amie avec un Gryffondor, l'école a tellement changé ! dit Dumbledore comme il le disait à chaque fois qu'elle lui racontait tout ce qui changeait annuellement.
Il y eut un petit silence gêné puis Ginny se racla la gorge et répliqua :
- Mon fils n'est pas à Gryffondor mais à Serpentard.
Severus eut un petit rire nerveux, comme s'il ne la croyait pas. Elle-même avait eu du mal à accepter la répartition d'Andreas dans la maison de Voldemort mais elle comprenait que la plupart des élèves cherchait à fuir les rouges et ors puisque c'était la maison d'où provenait Harry Potter et la majorité de son Cercle. Personne ne voulait être associé de près ou de loin à ces mages noirs, surtout pas Andreas qui vivait très mal le fait que son oncle fût le tristement célèbre Ronald Weasley.
- Un Weasley à Serpentard, on aura tout vu, souffla Snape en levant les yeux au ciel.
- Les temps changent, Severus, le réprimanda Dumbledore. Les gens évoluent.
- Si vous le dites, Albus.
Cela sembla mettre fin à la conversation. Personne ne releva l'étrangeté de la situation – un Weasley ami avec une Malfoy. Deux familles ennemies depuis tout temps dont les héritiers devenaient amis. Ça ressemblait presque à la pièce de théâtre écrite par le Moldu Shakespeare : Roméo et Juliette. Sauf que les deux héritiers en question – à savoir son fils et la fille Malfoy – n'étaient pas amants mais simplement amis.
- Tout est en ordre, Lucius. C'est ok pour moi.
- Parfait, dans ce cas, je vais me retirer.
L'homme se leva prestement, lissa ses robes et ses capes puis, canne à la main, se dirigea à grands pas vers la porte. Il salua les portraits puis lui souhaita une bonne journée et il disparut par la porte, laissant dans le bureau un sacré silence.
- Ne penses-tu pas que cela dure depuis trop longtemps, Ginny ? Lucius s'est repenti, il n'est plus l'homme que nous avons connu, il n'est plus un mangemort. Peut-être que vous pourriez le laisser vivre en paix, tu ne crois pas ?
Ginny se frotta les yeux, soupira. C'était toujours la même remarque – depuis plus d'un an, Dumbledore la tannait pour laisser Lucius tranquille.
- Je ne crois pas, Albus. Je n'oublie pas tout ce qu'il a fait tout au long de sa vie. C'est un opportuniste, il n'a pas honte de faire ce qu'il faut pour sauver sa vie. Il le refera, j'en suis certaine, et si un nouveau Voldemort devait voir le jour il repartirait tête baissée dans ses rangs.
- Peut-être que tu as raison, mon enfant, mais tant qu'un nouveau Voldemort ne verra pas le jour, alors je suis sûr que Lucius restera dans le bon chemin, comme depuis maintenant plus de douze ans.
Peut-être qu'Albus avait raison mais Ginny ne faisait pas confiance à Lucius. Il resterait à jamais Lucius Malfoy, avec tout ce qu'il avait fait – toutes les horreurs qu'il avait dit à sa famille, toutes les horreurs qu'il avait faites aussi. Elle ne baisserait pas la garde. Jamais. Même si cela voulait dire faire des réunions avec lui pour les cinquante prochaines années. Elle s'habituerait, elle s'y ferait.
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Vendredi 22 février 2019, Poudlard, 17h45
Tim n'arrivait pas à se sortir de la tête l'histoire de la Chambre des Secrets. Il avait refait le cauchemar, celui où il se trouvait dans la grande salle sombre et humide, avec la petite fille rousse à ses pieds, Tom Jedusor qui se présentait comme étant Voldemort et puis Harry Potter qui lui parlait. Il l'avait refait, donc, au moins quinze fois en trois mois. C'était fatiguant, parce que ces cauchemars étaient loin d'être reposants. Et il n'arrêtait pas de se demander : est-ce que la Chambre avait réellement existé ?
Il avait essayé de faire des recherches mais il ne savait pas par où commencer. Il n'y avait pas de livre intitulé « la Chambre des Secrets », il avait essayé de chercher dans certains grimoires mais rien ne faisait référence à cette fameuse Chambre. Dommage. Il ne s'attendait pas à ce que ce soit facile comme recherche, mais de là à ne rien trouver en trois mois – c'était long trois mois, mine de rien.
Alors il avait décidé de prendre le centaure par les cornes.
Il n'avait pas voulu en parler aux autres du groupe mais s'il obtenait des réponses aujourd'hui, il réunirait Hélia, Orphy et Andreas pour leur en toucher deux mots. Ça ne servait à rien de les inquiéter si la Chambre des Secrets n'était que le fruit de son imagination. Et si elle existait réellement pourquoi en avait-il rêvé ? Comment son esprit aurait-il pu recréer une chose sans qu'il ne la connaisse ?
Doucement, presque hésitant, Tim tapa à la porte du bureau et attendit l'autorisation d'entrer. La pièce était la même que la dernière fois, rien n'avait changé, sauf peut-être qu'il n'y avait pas son serpent qui sifflait dans un coin.
Le professeur Thomas releva les yeux de la copie qu'il corrigeait. Ses sourcils se haussèrent de surprise de le voir là à cette heure-ci. Tim se retint de trépigner sur place, sous le regard inquisiteur de son aîné.
- Tu as encore perdu ton serpent ? Elle n'est pas ici.
Les lèvres du professeur Thomas se relevèrent en un sourire indulgent. Tim lui répondit par une moue gênée. Ce n'était peut-être pas une si bonne idée que cela. Et si ça n'avait été que le fruit de son imagination ? Et s'il faisait perdre son temps au professeur d'Histoire de la Magie ? Il se sentait un peu bête.
- Oh, non, ce n'est pas ça. Je suis désolé de vous déranger professeur mais… Je peux vous poser une question ?
- Evidemment, Timothy. Assieds-toi.
Tim le remercia d'un mouvement de tête et vint s'installer sur la petite chaise en face du bureau. Le professeur Thomas poussa sa copie sur le côté pour lui accorder toute son attention.
- Ça peut peut-être vous paraître bizarre comme question.
- Il n'y a pas de question bête. Vas-y, lance-toi.
L'homme était avenant, agréable. Tim se détendit d'un seul coup. Ici, il était presque sûr qu'il ne serait pas jugé, quelque fût sa question. Il se sentait soudainement plus confiant, l'homme savait comment rassurer ses élèves.
- Est-ce que vous connaissez la Chambre des Secrets ?
Le professeur Thomas fronça les sourcils, son expression devenant immédiatement renfermée.
- Où as-tu entendu parler de la Chambre ?
Alors, elle avait bel et bien existé. Cependant, Tim ne voulait pas répondre à cette question – que dirait-il s'il lui avouait qu'il en avait rêvé ? Il l'enfermerait à Sainte Mangouste, à coup sûr. Et âgé de douze ans, Tim ne voulait vraiment pas se retrouver enfermé dans une chambre d'hôpital. Merci mais non merci. Il allait le prendre pour un cinglé.
- J'ai… J'en ai entendu parler à l'orphelinat par d'autres enfants… plus… âgés.
Il n'était pas sûr de lui, pas sûr de son mensonge. Mais il n'avait trouvé que cela comme excuse – pour ne pas parler de son rêve. C'était un peu léger comme mensonge mais il espérait que ça suffirait pour obtenir des réponses. Face à lui, le professeur fronça les sourcils un instant puis souffla, se laissa aller dans son fauteuil sans le quitter des yeux.
- Eh bien, voyons. Que pourrais-je te dire concernant la Chambre des Secrets ? Il y a dix-huit ans, tout le monde pensait encore que la Chambre n'était qu'une légende extravagante et ridicule. Je vais commencer par cette légende puis nous pourrons parler de ce qu'il s'est passé il y a dix-huit ans. Cela te convient-il ?
Sans voix, Tim hocha précipitation la tête, déjà happé dans l'histoire. Savoir que la Chambre des Secrets avait réellement existé donnait une tout autre signification à son cauchemar.
- Alors… Comme tu dois le savoir, Poudlard a été fondé il y a plus de mille ans par les quatre plus grands mages et sorcières de l'époque. Les quatre maisons de l'école portent leurs noms : Godric Gryffondor, Helga Poufsouffle, Rowena Serdaigle et Salazar Serpentard. Ensemble, ils ont bâti ce château, hors de vue des Moldus, car à cette époque les sorciers subissaient de terribles persécutions de la part des non-magiques. Pendant quelques années, les fondateurs de l'école travaillèrent ensemble dans une parfaite harmonie. Mais peu à peu, des désaccords apparurent. Un conflit éclata entre Serpentard et les autres. Serpentard voulait que le choix des élèves admis à Poudlard soit plus sélectif. Il pensait que le savoir magique devait être réservé aux familles de sorciers et à elles seules. Il ne voulait pas prendre d'élèves nés de parents moldus car il estimait qu'on ne pouvait pas leur faire confiance. Au bout d'un moment, une grave dispute éclata entre Serpentard et Gryffondor, et Serpentard finit par quitter l'école.
Le professeur Thomas marqua une pause. Tim se rendit compte qu'il était pendu à ses lèvres et que chaque information trouvait une place dans son cerveau.
- Voilà ce qu'on peut dire à partir des sources historiques que nous disposons. Cependant, il existe aussi une légende. D'après cette dernière, Serpentard aurait aménagé une salle cachée dans le château, une salle dont les autres ne connaissaient pas l'existence. Serpentard aurait ensuite scellé l'entrée de la Chambre des Secrets de telle sorte que personne ne puisse l'ouvrir jusqu'à ce que son authentique héritier arrive à l'école. Seul l'héritier de Serpentard aurait le pouvoir d'ouvrir la Chambre et d'utiliser la chose horrible qu'elle contenait pour chasser de l'école ceux qui ne seraient pas dignes d'étudier la magie.
Une nouvelle fois, le professeur Thomas marqua une pause.
- Jusqu'à il y a dix-huit ans, c'était tout ce que le monde sorcier savait concernant la Chambre des Secrets. L'école a été fouillée de fond en comble par des sorciers qui ont essayé de découvrir la Chambre, sans succès. Pendant des années, tout le monde pensait que le monstre et la Chambre n'existaient pas. Personne n'avait pensé que, puisqu'ils n'étaient pas des héritiers de Salazar Serpentard, personne ne pourrait trouver la Chambre. Ces imbéciles.
La dernière partie ne devait pas lui être destinée mais le professeur semblait être tellement dans ses pensées que Tim ne s'en formalisa pas. Thomas marqua un nouveau silence, un peu plus lourd que précédemment.
- Et que s'est-il passé il y a dix-huit ans, Professeur ?
- La Chambre des Secrets a été ouverte, une nouvelle fois.
- Une nouvelle fois ?
Le professeur Thomas hocha de la tête.
- La chambre avait été ouverte en 1943. Le monstre en était sorti et avait fait une victime qui hante aujourd'hui encore les lieux.
Tim nota mentalement que cela voulait sans doute dire que la victime était aujourd'hui un fantôme. Il allait devoir enquêter. Qui était ce fantôme ? Où pourrait-il le trouver ? Il avait envie de le voir, de lui parler, pour comprendre.
- Cinquante ans plus tard, en 1993, la Chambre a été de nouveau ouverte.
- Il y a-t-il eut d'autres victimes ?
- Seulement des blessés, tout s'est bien terminé. Le monstre a été tué, les blessés ont été guéris. Il n'y a plus aucun danger, Timothy. L'école est sûre, crois-moi.
- Et savons-nous ce qu'était finalement le monstre, professeur ?
Le professeur Thomas se lécha les lèvres, mal-à-l'aise pendant une seconde, mais bien vite il retrouva son visage avenant. Tim se demanda ce que le monstre pouvait bien être pour mettre mal-à-l'aise le professeur d'histoire de la magie.
- C'était un basilic, mais il est mort maintenant. Un élève de l'époque l'a tué. Comme je vous l'ai dit, Timothy, il n'y a plus aucun danger. Vous pouvez dormir tranquille.
Tim avait tellement d'autres questions mais le professeur Thomas récupéra sa copie pour reprendre sa correction. Il avait employé le vouvoiement – visiblement, il ne voulait plus en parler. Tim était content puisqu'il lui avait déjà donné beaucoup d'informations, à lui maintenant d'aller chiner les autres infos ailleurs. Tim se leva, lissa ses robes.
- Merci beaucoup, Professeur.
- Pas de soucis, Tim. Cependant, un conseil, ne te tracasse pas avec cette histoire de Chambre. Comme je te l'ai dit, tout est sûr maintenant. La Chambre a été refermée et personne ne sait où elle se trouve. Elle a été oubliée et c'est mieux ainsi.
- Oui, Professeur, merci encore.
Prestement, il sortit du bureau, bien décidé à « se tracasser » avec cette histoire de Chambre des Secrets. Il avait eu des réponses, évidemment, mais pas suffisamment à son goût. Qui avait ouvert la Chambre ? Qui avait été les blessés ? Qui avait été tué ? Pourquoi rêvait-il de la Chambre, nom de Merlin ? Pourquoi rêvait-il de Voldemort ? Ou d'Harry Potter ? Et qui était cette fille évanouie au début de ses cauchemars ?
Quelque chose de froid le traversa entièrement et Tim eut un frisson.
- Oh ! Pardon ! s'exclama une voix.
Il se tourna vers la voie en question et retint une moue de dégoût. Devant lui, flottait un fantôme qui venait visiblement de lui passer à travers le corps. L'ectoplasme semblait désolé de lui être rentré dedans – ce n'était pas agréable comme sensation mais rien de bien méchant. Tim lui répondit que ce n'était pas grave, que lui-même ne faisait pas suffisamment attention.
- Si je peux faire quoi que ce soit, n'hésitez pas à me faire signe !
Le fantôme – si les souvenirs de Tim étaient corrects il s'agissait de Lord Draben – commençait déjà à faire demi-tour. C'était sa chance !
- Attendez ! Excusez-moi j'ai une question, pouvez-vous m'aider s'il-vous-plaît ?
Le fantôme du Chevalier l'observa un instant avant d'incliner la tête légèrement en signe d'affirmation. Tim se mordit la lèvre inférieure, se demandant si sa question allait l'offenser ou pas. Etait-ce poli de poser ce genre de question à un fantôme ? Il n'en était pas sûr mais c'était le seul moyen d'obtenir des réponses fiables.
- Est-ce que vous savez si un des fantômes qui se trouvent dans le château est mort à Poudlard ?
Le fantôme fronça les sourcils. La question ne devait pas être commune – et peut-être, comme il l'avait pensé, impolie. Tim savait que cela faisait bizarre – aucun autre élève ne devait l'interpeller ainsi au détour d'un couloir
- Evidemment. Il y a Mimi qui est morte dans le château, c'est d'ailleurs la seule d'entre nous. Elle se trouve dans les toilettes des filles au deuxième étage.
- Merci beaucoup, Lord Draben !
Le fantôme eut l'air enchanté que quelqu'un se rappelle son nom mais déjà Tim tournait les talons pour aller jusqu'au deuxième étage. Ça avait été plus facile qu'il ne l'avait initialement pensé. Il n'avait pas eu besoin d'amadouer le professeur Thomas pour qu'il lui donne des informations sur la Chambre, il n'avait pas dû chercher bien loin pour trouver un fantôme qui réponde à sa question. Tout se déroulait bien – mieux même qu'il n'aurait pu imaginer. C'était parfait ! Il ne restait plus que cette Mimi, puis il pourrait retourner voir les copains pour leur parler de toutes ses découvertes.
En y pensant, c'était étrange quand même qu'un basilic ait pu se balader au calme dans l'école. Il y avait quand même eu un mort, mais personne n'en parlait – il n'y avait rien dans les archives de l'école, comme si tous voulaient oublier ce qui s'était passé à ce moment là. Ça ne devait pas être une bonne époque, certes, mais quand même ! Comment cela se faisait-il qu'il n'y ait aucune trace sur la deuxième ouverture de la Chambre ? L'école devait avoir tellement de secrets – Tim était sûr que tellement de choses avaient dû s'y passer. Comme pour lui…
Sa première année resterait dans les mémoires – enfin surtout dans la sienne, celle d'Orphy, celle d'Andreas et celle d'Hélia. Les autres… Cela avait été un secret alors évidemment toute l'école avait été au courant et, pourtant, après les vacances, c'était comme si rien ne s'était passé. Ce n'était pas rien de déjouer les plans d'un mercenaire. Alors Tim n'imaginait même pas tout ce que l'école avait dû voir alors que les humains avaient simplement tout effacé de leurs mémoires. Les murs n'oubliaient pas, observateurs silencieux des différents évènements, témoins négligés des faits extraordinaires.
Tim aurait tout donné pour pouvoir communiquer avec eux – pouvoir les toucher et voir tout ce dont ils avaient été spectateurs. Il aurait adoré voir ce qu'il s'était passé dix-huit ans plus tôt lorsque la Chambre avait été ouverte pour la seconde fois – et bien d'autres choses, ils devaient y avoir tellement tellement d'évènements intéressants.
Il arriva essoufflé devant la porte des toilettes des filles du deuxième étage. C'était ouvert mais il n'y avait aucun bruit – comme si les toilettes étaient vides. Ce qui était plutôt étrange parce que Tim avait remarqué que les filles aimaient bien aller aux toilettes en groupe et qu'habituellement elles parlaient beaucoup. Pourquoi pas ici ?
- Mimi ? appela-t-il en hésitant à franchir le seuil des toilettes.
C'était quand même les toilettes des filles et il était un garçon. Est-ce qu'il avait le droit d'entrer ? Allait-il se faire punir ? Ou pire, allait-il perdre des points ? Hélia lui en voudrait beaucoup s'il perdait des points.
Il vit, accroché à la porte, un panneau « hors service ». Tout s'expliquait. Il fit un pas en avant. C'étaient des toilettes… horriblement sinistres. Alignés sous un grand miroir cassé par endroits et tâché de rouille, les lavabos étaient ébréchés et sales. Les portes en bois des cabines avaient dû être peintes en bordeaux mais elles étaient aujourd'hui écaillées. L'une d'elles pendait même, retenue par un seul gond, prête à s'effondrer à tout moment.
- Mimi ?
Un sanglot s'éleva d'une des cabines et Tim se dirigea presque à contrecœur vers l'origine du son. Devant la porte, il marqua une pause, se demandant s'il devait pousser le battant en prenant le risque de tomber sur une jeune fille bien vivante qui pleurait toutes les larmes de son corps.
La tête translucide d'une jeune fille passa subitement à travers la porte qu'il fixait. Il sursauta.
- Qu'est-ce que tu veux ? Ces toilettes-là c'est pour les filles. Tu n'es pas une fille à ce que je sache.
Tim fit un pas en arrière, leva les deux mains. Mimi sortit complètement de la cabine des toilettes. C'était une jeune fille petite et trapue. Son visage maussade était aujourd'hui soupçonneux alors qu'elle l'observait des pieds à la tête. Derrière de longs cheveux pendants se cachait une paire de lunettes aux verres épais. Elle ne devait pas avoir plus de quatorze ans.
- Tu es venu pour te moquer de moi ?
- Non ! s'écria Tim, choqué. Pourquoi est-ce que je me moquerais de toi ?
Des larmes apparurent dans les yeux translucides de Mimi et Tim se sentit dépassé. Il ne savait pas quoi faire quand quelqu'un pleurait devant lui. Surtout un fantôme.
- Tu crois que je ne sais pas ce que les gens disent de moi dans mon dos ? La grosse Mimi ! Mimi la moche ! Mimi geignarde, Mimi râleuse, Mimi minable !
- Je… Je te jure ! Je ne savais même pas qui tu étais il y de ça vingt minutes !
Cela sembla couper court à la peine du fantôme, qui se stoppa net, son corps flottant au-dessus du sol.
- C'est vrai ? demanda-t-elle, sincèrement étonnée. On vient toujours ici pour se moquer de moi ou pour me jeter des choses à la figure.
- Je ne suis pas là pour ça, promis. J'avais juste quelques questions.
Mimi parut se gonfler de fierté. Ça ne devait pas lui arriver souvent, qu'on vienne la questionner sur quoi que ce fût. Elle avait l'air bien seule – et vraiment particulière. S'il pouvait éviter, Tim ne reviendrait pas dans les toilettes du deuxième étage. Elle lui faisait peur, un peu.
- J'aimerais te parler de la Chambre des Secrets ? Tu sais ce dont je parle ?
- Plus ou moins, roucoula-t-elle.
Elle devait être bipolaire, parce qu'elle ne pleurait plus du tout maintenant. Tim se demanda si elle était pareil lorsqu'elle était en vie. Elle devait être invivable.
- Le professeur Thomas m'a dit que la Chambre avait été ouverte il y a dix-huit ans. Pourrais-tu m'en parler ?
- La dernière fois que la Chambre des Secrets a été ouverte, Harry Potter a sauvé une fille.
- Attends… Harry Potter ? C'est Harry Potter qui a sauvé une fille ? Il a pu ouvrir la Chambre ?
Il marqua une pause. C'était incompréhensible. Comment – et pourquoi – un homme aussi méchant, aussi mégalomane avait-il pu sauver quelqu'un ? De ce que les gens disaient, c'était un homme horrible. Puis l'information monta à son esprit.
- Une fille ? Quelle fille ?
Il pensa à la fille rousse qu'il voyait dans ses cauchemars et il se demanda si c'était la même. Peut-être qu'elle pourrait l'aider à comprendre son rêve. Peut-être qu'elle pourrait lui parler de cette année où elle avait failli mourir. Il sentit son souffle s'accélérer, son cœur battre fort dans sa poitrine. Peut-être… Peut-être qu'il allait avoir des réponses.
Mimi eut un petit rire amusé. Elle s'éleva dans les airs, fit volte-face et revint devant lui, les mains liées devant elle, ses doigts entrecroisés sous son menton.
- Une fille qui est aujourd'hui directrice de l'école !
Hélia et Andreas le regardaient bizarrement, attendant qu'il commence à parler. Mais Tim ne savait pas par où commencer. Trop d'informations tournaient dans son esprit. La Chambre existait bel et bien. Elle avait été ouverte en 1943 par un certain Tom Jédusor – le monstre de la légende était un basilic qui avait tué Mimi Geignarde et qui était mort maintenant. Cinquante ans après cette mort regrettable, la Chambre avait été ouverte une nouvelle fois – Tim ne savait pas comment – et il y avait eu beaucoup de blessés, des gens qui avaient été paralysés par le regard du basilic. Une jeune fille avait été enlevée – Ginny Weasley maintenant directrice de Poudlard – et Harry Potter l'avait sauvée. Il avait été un héros. C'était inimaginable – impensable. Comment un mage noir aussi taré avait pu être un jour un héros ? Tim ne comprenait pas – et sans doute ne le comprendrait-il jamais. Il n'arrivait toujours pas à le croire alors que Mimi lui avait tout expliqué pendant de longues minutes.
- Qu'y a-t-il Tim ? demanda le rouquin.
- Tu es tout pâle, surenchérit la jeune fille. Tu es bizarre en ce moment.
Oui, Hélia n'avait pas tort, il avait été bizarre. Parce que ses cauchemars le secouaient – il avait été obsédé par la Chambre des Secrets parce que ça le hantait la nuit. Il avait eu besoin de comprendre. Il ne savait toujours pas pourquoi il avait rêvé de la Chambre, de Potter et de Jédusor. Tout ce qu'il savait c'était que maintenant qu'il connaissait la véritable histoire, un poids invisible semblait s'être envolé de sa poitrine, comme si il devait connaître la vérité avant de pouvoir continuer à vivre. Il se sentait plus libre, moins angoissé.
- J'ai lu l'Histoire de Poudlard et dedans, il y a une légende qui m'a… disons, obsédé.
- J'ai lu ce livre.
- Moi aussi, ajouta Andreas. De quelle légende parles-tu ?
C'était un mensonge. Mais il ne voulait pas leur parler de ses cauchemars – c'était trop bizarre. Ils le prendraient pour un fou s'ils leur racontaient qu'il rêvait d'Harry Potter. Ils ne devaient pas le savoir.
- Vous avez déjà entendu l'histoire de la Chambre des Secrets ?
- Evidemment, s'exclama Andreas.
Hélia, elle, hocha la tête légèrement.
- J'ai fait des recherches et il s'avère que tout cela est vrai. La Chambre a été ouverte. Deux fois. Il y a eu un mort la première fois puis plusieurs blessés cinquante ans plus tard.
- Je sais, souffla une nouvelle fois Andreas.
- Alors c'est vrai ? demanda-t-il. Ta mère a été à l'école en même temps qu'Harry Potter ?
Il y eut un silence gêné. Hélia, silencieuse, essayait d'assembler toutes les informations qu'on lui donnait au compte-gouttes. Elle connaissait, évidemment, l'histoire de la Chambre, son père lui en avait parlé. Il lui avait dit qu'elle ne pouvait être ouverte que par le véritable héritier de Salazar Serpentard et qu'elle avait été ouverte deux fois. Il ne lui avait pas dit qui en était à l'origine, ni qu'il y avait eu un mort ou des blessés. Il lui avait juste raconté qu'elle n'avait rien à craindre parce que le monstre était mort et que l'école était sûre. Harry Potter n'avait jamais été mentionné, parce que son père en parlait rarement. Et il mentionnait encore moins la directrice de l'école – sauf lors de ses entretiens mensuels.
Pour tout dire, elle ne comprenait pas ce que la mère d'Andreas venait faire là-dedans. C'était une Weasley, elle ne pouvait donc pas être l'héritière de Serpentard.
- Oui, répondit sombrement Andreas. Ma mère était à Poudlard en même temps qu'Harry Potter et que son Cercle. Elle était à Gryffondor, elle aussi. Tout comme tous mes oncles.
- J'ai discuté avec Mimi, la fille qui a été tuée la première fois que la Chambre a été ouverte. Elle m'a dit… elle m'a dit que Potter avait sauvé ta mère.
Hélia sentit ses yeux s'ouvrir ronds comme des soucoupes sous le coup de la surprise. Potter avait sauvé la directrice ? Tim aussi ça l'avait stupéfait mais il ne laissait rien percevoir, attendant de voir la réaction de son ami. C'était étrange de savoir que Potter n'avait pas été un connard toute sa vie – ça ébranlait légèrement l'image antipathique qu'il avait du mage noir. Il avait eu une enfance, il n'avait pas été un sans cœur dès sa naissance. C'était venu après – il ne savait pas quand mais il avait changé, passant de héros à méchant. Comment pouvait-on changer aussi extrêmement ?
- Oui, c'est vrai. Potter a sauvé ma mère dans la Chambre des Secrets en 1993. Mais il l'a aussi enfermée pendant des années au Manoir Potter. Il l'a torturée. Je ne connais pas les détails mais je sais qu'elle dort avec un sort de silence sur sa chambre tous les soirs parce qu'elle en fait encore des cauchemars et qu'elle se réveille en hurlant de peur et de douleur. Son propre frère l'a torturée pendant des années.
L'ambiance devint étrange, chargée de rancœurs.
- Mon père aussi, ajouta d'une petite voix Hélia. Lui aussi a été enfermé au Manoir Potter pendant des années. Il a été torturé par Potter, par Weasley et par presque tout le Cercle. Il a survécu mais lui aussi dort avec un sort de silence autour de sa chambre.
- Harry Potter a sauvé des gens, oui, mais il en a tué tellement ensuite. Il a fait tellement de peine, tellement de carnage. Il a semé la mort dans son sillage sans pitié. Mais il a été puni. Il a été tué par ma grand-mère. Cependant, Ronald…
- Ronald, reprit Hélia, est tout aussi pourri que Potter et lui n'est pas mort. Ce n'est pas juste. Il a torturé tellement de gens lui aussi, il a fait tellement de mal qu'il devrait être mort mais ce n'est pas le cas et je trouve ça injuste.
Hélia n'avait pas tort. Tim détestait Ronald plus que tout au monde parce qu'il avait tué ses parents. Et maintenant qu'il savait tout ce qu'il avait fait endurer à la mère et au père de ses amis, il avait envie de lui faire autant de mal, de le faire autant souffrir. Il se promit intérieurement que pour tout ce qu'il leur avait fait vivre, il se vengerait.
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Merci à Angelyoru pour ta présence, pour tes reviews ! Une surprise t'attend le 1er janvier pour te souhaiter une bonne et heureuse année ! :)
Passez de bonnes fetes de fin d'année
