Premier jour de l'année civile

Date d'origine : le 1er janvier

Fandom : Pokémon version Soleil, Lune, Ultra-Soleil et Ultra-Lune


Lorsque Lune s'éveilla, elle avait la jambe droite enroulée autour de quelque chose de doux, tiède, un peu humide, qui se soulevait et s'abaissait à intervalles réguliers. Elle avait une soif terrible et ce n'était pas à cause de l'alcool de canne ou pire, du rhum des îles si réputé à Alola : elle n'avait que quatorze ans, elle ne consommait pas de ces choses-là ! Mais elle avait bu des jus de fruits, des litres de jus de fruits, papaye, mangue, goyave, ananas, passion, sucrés au miel des jardins de fleurs sauvages de Mele-Mele ou de Poni. Elle avait la gorge complètement desséchée.

Lune ouvrit les yeux et découvrit qu'elle était roulée en boule sur l'herbe verte d'un coin du parc entouré d'une haute muraille de bambous. C'était le parc de Malié, immense, qui reprenait les codes d'une ville de Johto qu'on appelait Rosalia. Il y avait un grand plan d'eau en forme de Léviator, une tour dorée à toits de tuiles noires, sur plusieurs niveaux, et de jolis petits pavillons de repos. La jeune fille retrouvait aussi un peu de sa Kanto natale dans cet endroit, surtout par le biais du pont de bois doré qui enjambait l'eau et où se battaient tous les jours six Dresseurs.

La jeune Maître contemplait tout cela en essayant de reprendre ses esprits. Elle avait encore le cerveau brumeux, des courbatures dans presque tous les membres. Elle s'était couchée bien plus tard que l'exigeaient ses quatorze printemps et sa jambe était, en fait, passée autour de la queue de sirène de Scarlett, son Oratoria. La dévouée créature s'était occupée d'elle jusqu'à ce qu'elle tombe de fatigue, la bordant de ses nageoires dans un coin pour qu'elle puisse dormir. D'ailleurs, ses pattes étaient toujours autour de sa taille.

Lune jeta un coup d'œil au soleil, heureusement protégée de sa cruelle brûlure par l'ombre des rangées de bambous. Il était tard dans l'après-midi, sûrement vers les quinze heures.

« Je me demande si je suis la seule à être réveillée ou si les autres le sont aussi depuis longtemps, marmonna la jeune fille en tapotant autour d'elle pour trouver son sac.

-Héééééé, Luuuuune ! l'appela alors une voix depuis un autre coin du parc. Tu es làààà ? Oratoria, fais-nous un signe si tu es le seul à être réveillé ! »

Scarlett leva sa tête au délicat museau blanc, sa crinière bleue mêlée de perles toujours impeccable malgré le temps qu'il avait passé par terre. Il poussa un cri. Lune se frotta le visage et les cheveux en marmonnant.

« Ah, Lune, t'es là ! s'exclama Tili en accourant. C'est fou qu'on ait dormi aussi longtemps, tu ne trouves pas ?! Et pourtant, je ne suis pas du genre à me la couler douce chez moi ! Dès que j'ai un truc à faire, je fonce ! Au fait, t'as pas faim ? Moi je…

-Mais enfin, tu ne peux pas arrêter de crier comme ça ? le tança un autre garçon en arrivant près d'eux. Tu trouves vraiment que c'est la meilleure chose à faire après la nuit qu'on a passée ? »

Lune se redressa sur les coudes sans répondre. Ses cheveux étaient tous ébouriffés. Tili et Gladio avaient la mine plutôt fraîche, eux. Elle se demanda s'ils étaient allés se rafraîchir dans les toilettes du petit restaurant du parc avant de la chercher.

« Je suis affamé, reprit le jeune garçon en croisant ses mains derrière sa tête, pas du tout gêné par les réflexions de Gladio. On va manger ?

-Où ça ? demanda Lune en se redressant et en s'époussetant. Les restaurants sont encore ouverts à quinze heures un 1er janvier ?

-Oui, celui du jardin de Malié ! En plus, tous les clients potentiels sont déjà passés, on sera tranquilles ! »

Lune sourit et rattacha derrière son cou le nœud du top rouge qu'elle portait. Ses hautes chaussettes à hibiscus étaient distendues, elle les rajusta.

Sur la terrasse du petit restaurant, Lilie se tenait à l'abri du soleil sous un parasol orange. Elle avait ressorti son chapeau blanc à larges bords, sa peau très claire étant beaucoup plus fragile que celle des autres, même de son frère Gladio. Elle sourit en apercevant Lune et l'accueillit d'un grand mouvement de la main enthousiaste.

« Bonjour, Lune ! lui lança-t-elle. Est-ce que tu as bien dormi ?

-Aussi bien que possible, étant donné la situation, je suppose, répondit la jeune fille en s'asseyant. Qu'est-ce qu'on mange ?

-Je ne sais pas mais ça sent trop bon ! se réjouit Tili en saisissant la carte. »

Un petit vent agréable soufflait depuis la montagne. Lune le laissa jouer longuement dans ses cheveux attachés en corbeille et dans son cou. Des odeurs s'échappaient de la cuisine du restaurant et c'est vrai que ça donnait l'eau à la bouche !

« Je voudrais une galette avec tout ce que vous arrivez à mettre à l'intérieur ! commanda Tili à la serveuse, entraînant un sursaut à son amie qui ne l'avait pas vue arriver. Du fromage d'Écrémeuh, un œil au plat de Leveinard… non, mettez-en deux ! et ensuite, du jambon, des saucisses coupées en rondelles et une galette de pommes de terre !

-Décidément, on peut même pas te sortir au resto ! le tança Gladio, accablé comme toujours par sa puérilité. Si ce morfale vous laisse de quoi faire dans votre garde-manger, je prendrai une crêpe fromage, saucisse et œuf au plat. Sans excédent fantaisiste, contrairement à lui.

-Oui, pour moi aussi, renchérit Lune en reposant la carte. »

Lilie commanda une galette au fromage, à l'épinard sauvage et aux tomates confites et la serveuse repartit en cuisine. Un peu plus loin, dans le lac en forme de Léviator, l'Oratoria de Lune avait piqué une tête pour se rafraîchir après cette nuit éprouvante, comme le Crabominable de Tili, le Tortank et le Silvallié type Eau de Gladio. La jeune fille s'étira avec bonheur sur sa chaise.

Les quatre amis se mirent à bavarder gaiement et, quand les crêpes salées arrivèrent, enroulées comme des wraps, ils les dégustèrent avec reconnaissance en continuant de contempler le jardin. Ils avaient passé une merveilleuse soirée du nouvel an à Malié et elle se prolongeait de façon encore plus agréable avec ce déjeuner improvisé ! Lune espéra que ses amis se laisseraient tenter par des jeux et des baignades dans le plan d'eau du parc pour le reste de la journée. Et qui sait ? Peut-être que, mais uniquement si elle forçait assez, elle parviendrait à convaincre Gladio de terminer le 1er janvier par une sortie au ciné. Ce serait vraiment délicieux comme manière de fêter les trois-cent-soixante-quatre jours qui s'ouvraient en grand devant eux.