Disclaimer : L'univers de Kuroko no Basket que vous reconnaitrez aisément appartient à Fujimaki Tadatoshi. L'auteur me le prête très aimablement pour que je m'amuse avec et je ne retire aucun profit de quelque nature que ce soit de son utilisation si ce n'est le plaisir d'écrire et d'être lue.

Note de l'auteur : Je veux remercier du fond du cœur ma béta-lectrice, Futae qui s'est servie de son "Eagle Eye" (fallait que j'la case celle-là ! ^^) pour corriger cette histoire et me conseiller. C'est grâce à son enthousiasme, ses encouragements et son sens de l'analyse et de la critique sans détour, que cette histoire a pu voir le jour.

Note importante : j'avais décidé de retirer toutes mes histoires de ce site suite à ce que je pense être un piratage. Je me suis laissée convaincre de les remettre, mais malheureusement ce site fonctionne tellement mal que je n'ai pas pu toutes les récupérer. J'ai donc décidé de les reposter. Si vous les lisez et qu'elles vous plaisent, n'hésitez pas à le dire, ça me fera plaisir et ça me remontera le moral même si les commentaires ne seront pas les mêmes qu'à l'origine.


Shadow : toujours là, fidèle et enthousiaste. Merci beaucoup pour ton commentaire. La vie de couple n'est pas toujours un long fleuve tranquille. Il y a parfois des mises au point indispensables pour poursuivre son chemin. Kagami s'emmêle les pinceaux, ça peut arriver quand les sentiments sont aussi forts. Il ne distingue plus sa vie professionnelle de sa vie privée et ça peut être un problème, mais Aomine à la tête sur les épaules et l'expérience pour le recadrer. Les chats s'habituent tout doucement l'un à l'autre. J'allais pas en plus mettre une guerre féline dans cette histoire. Les deux grands fauves ça suffit, non ? X


Le roman de notre histoire

Chapitre 23

Hanami était là. Du sud au nord du pays, les abricotiers en premiers, suivis des cerisiers puis des pêchers, se couvraient progressivement de délicates fleurs du blanc le plus pur et d'un dégradé de rose pastel au fuchsia en passant même par le jaune. C'était l'occasion pour tous les Japonais de se retrouver en famille ou entre amis pour pique-niquer sous les arbres et admirer leur floraison. Il s'agissait d'une tradition qui remontait au VIIIe siècle durant la période Nara pratiquée par la noblesse, mais ce fut pendant l'ère Heian que les célèbres sakura furent les plus fêter par toute la population.

Et justement, dans son jardin, Kagami en avait un grand aux fleurs rosées dont les branches enjambaient le mur d'enceinte et débordaient sur la rue. Celui-là même où il avait trouvé Jade. Aussi, pour lui ce fut naturel d'inviter ses amis à cette occasion. Il proposa à madame Yoshino de se joindre à eux, ce qu'elle refusa prétextant qu'elle le passait avec son fils, sa fille et son gendre. Il avait demandé à Aomine si ses parents seraient d'accord pour venir, mais ils étaient partis à Nagasaki chez son oncle, le frère de sa mère. Et lorsqu'il voulut inviter son père et son grand-père, le correcteur fut le premier enchanté. Kuroko et Ogiwara acceptèrent avec plaisir et le romancier fit donc appel au même traiteur que pour le repas qu'il avait organisé quelques semaines plus tôt. Tout le monde avait été satisfait de la qualité des plats, alors pourquoi chercher ailleurs ? Quant à Himuro et Takao, ils promirent de passer dans l'après-midi.

La journée s'annonçait radieuse. Aidé d'Aomine, Kagami avait installé une longue table en bois avec des bancs et des chaises, recouverte d'une nappe blanche en papier. Le traiteur s'était chargé de la décoration que le maître des lieux avait voulu simple. Deux bouquets de fleurs étaient disposés dans des vases sur la table et constituaient l'ornement. Il ne manquait plus que les invités. Le père et le grand-père de Kagami furent les premiers à arriver. Et Aomine fut témoin de ce que le romancier lui avait déjà dit. Son grand-père, Hasegawa Ryu (1) prit la main de son petit fils et embrassa la bague qu'il avait au doigt, le grenat taillé en cabochon hérité de sa mère. Il serra le vieil homme dans ses bras, qui se portait remarquablement bien du haut de ses quatre-vingt-trois printemps. Son père, Kagami Keigo (2) lui donna également une franche accolade et ils se dirigèrent vers le jardin où il leur présenta Aomine. Il avait déjà vu son père en visio lorsque Kagami avait été hospitalisé et il fut ravi de faire la connaissance de son grand-père. Informé de ce qui était arrivé à son petit-fils, le vieil homme remercia le correcteur d'avoir été là pour son Taiga.

Kuroko et Ogiwara arrivèrent peu après et une fois les présentations faites, il fut temps de passer à table et d'admirer les fleurs de cerisiers si délicates. Les conversations allaient bon train. Kagami père comprit rapidement qu'Aomine était bien plus qu'un correcteur pour son fils. Il réussit à le prendre à part, de l'autre côté de l'arbre pour lui parler.

— Vous semblez beaucoup tenir à mon fils, lui dit-il en sirotant une gorgée de saké.

— Effectivement, répondit humblement celui-ci.

— Taiga est tout ce qu'il nous reste de sa mère à son grand-père et moi… Il a hérité de ma stature, mais il est le portrait craché de ma défunte épouse… J'ai été muté dans notre succursale américaine quelques mois après le décès de ma femme… J'ai voulu laisser Taiga avec son grand-père, mais celui-ci avait bien vu que ça m'arrachait le cœur… Il a insisté pour que je l'emmène avec moi… Je l'ai élevé, mais finalement il a presque grandi tout seul… J'étais tellement accaparé par mon travail que j'étais rarement à la maison ou trop tard et il dormait déjà… J'ai eu la chance qu'il ait un caractère débrouillard et compréhensif… Il ne s'est jamais plaint et on revenait au Japon pour voir mon beau-père dès qu'on le pouvait…

— C'est ce qu'il m'avait un peu raconté… Il m'a dit aussi que vous étiez très liés tous les trois…

— Oui, c'est exact… Ça me contrarierait beaucoup s'il était triste pour une quelconque raison… Je vous le confie… Taiga est le plus beau cadeau que mon épouse m'a fait… il est la prunelle de mes yeux… rendez-le heureux…

— C'est le but de ma vie, je peux vous le promettre…

— Je suis infiniment fier de ce qu'il est devenu… un romancier renommé et reconnu… Sa mère aussi aimait la littérature… c'est pour ça que je l'ai encouragé dans cette voie…

— J'peux vous assurer que c'est un écrivain exceptionnel, ajouta Aomine, honoré d'entendre de telles confidences. C'est comme ça que nous nous sommes rencontrés…

— Dites-m'en plus ?

— Vous connaissez les déboires qu'il a eus avec Rakuzan, commença Aomine.

— Bien sûr, il m'a tout raconté…

— Il a eu l'idée d'un roman dont son ancien éditeur n'a pas voulu et vu les circonstances, il a cherché une autre maison, celle où je suis… Quand j'ai lu ce qu'il nous avait envoyé, j'ai immédiatement demandé à être son correcteur sans même l'avoir rencontré… On a commencé à travailler ensemble et son développement a pris une ampleur qu'il n'imaginait pas au départ…

— C'est-à-dire ?

— Il croyait n'écrire qu'un livre de plus… mais en réalité, ce sera une saga de plusieurs volumes… Tout dépendra de l'évolution qu'il voudra donner, mais ce sera long…

— Eh bien, voilà l'histoire d'une belle rencontre… Je suis certain que vous ferez de belles choses tous les deux…

Aomine se demanda comment il devait interpréter cette dernière phrase. Devait-il la prendre au premier degré à savoir que cette saga serait le best-seller de la décennie ? Ou bien cet homme avait-il vu plus loin qu'il ne le laissait croire et ces mots signifiaient que son fils et lui auraient une belle vie, pleine de joie, de succès et… d'amour ?

— Et ne vous cachez pas, reprit son beau-père. Son grand-père a compris bien plus de choses que vous ne l'imaginez, termina Kagami Keigo avec un sourire taquin. Ainsi que pour le couple de vos amis… Soyez vous-mêmes, ce sera bien plus convivial et plus facile pour vous tous…

Aomine ne put s'empêcher de sourire et même de rire. C'était bien la seconde interprétation qu'il fallait retenir. Décidément ce n'était pas au vieux singe qu'on apprenait à faire la grimace. Cependant, quelque chose dans les paroles de son père attisa sa curiosité. Il avait presque senti une sorte de menace sous-jacente. Peut-être que le" Ça me contrarierait…" rendait la phrase inquiétante, mais était-ce involontaire ou bien les termes avaient-ils été choisis à bon escient ? Fallait-il croire que, si son fils était malheureux pour une raison quelconque, il encourrait les foudres de son père ? Il secoua la tête. Non, ce n'était que les paroles d'un père qui protège son enfant et qui veut le faire savoir. Une partie du cœur de son fils sera toujours à lui, peu importe qu'elle soit grande ou petite. Aomine rejoignit son amant et l'embrassa ouvertement. Celui-ci recula vivement et le regarda, étonné et gêné.

— Ils savent, lui dit-il. Plus on se cachait et plus ça se voyait, expliqua Aomine.

— Vous formez un très beau couple, Taiga, lui dit son grand-père en souriant. Aller ! Buvons un peu de ce délicieux saké.

— J'ai laissé ma bouteille chez moi, dit Aomine en faisant allusion au cadeau de Kagami.

— Pas grave, on la boira tous les deux…

Takao et Himuro arrivèrent en fin d'après-midi comme prévu et la journée se termina dans une joyeuse ambiance. Kagami ne quittait pas son père et son grand-père d'une semelle trop heureux de les avoir tous les deux ensemble auprès de lui. Ce n'était pas si courant aussi profitait-il de leur présence autant qu'il le pouvait. Le vieil homme ne tarissait pas d'éloge sur la maison qui ressemblait à celle où il avait grandi, confia-t-il à son petit-fils. Maintenant elles se faisaient de plus en plus rares, remplacées par des constructions de type plus occidental.

— Où en es-tu de ton roman, raconte-moi, lui demanda le vieil homme, en regardant la bibliothèque et s'asseyant dans un des fauteuils.

— Ça avance… Aomine m'aide beaucoup… c'est mon correcteur… c'est comme ça qu'on s'est rencontré… Et j'espère que j'aurai fini le premier tome d'ici quelques semaines…

— Tu m'en garderas un exemplaire que tu me dédicaceras comme tous les autres…

— Bien sûr grand-père, tout c'que tu voudras…

— Tu es trop impliqué pour t'en rendre compte, mon garçon, ce qui est tout à fait normal, mais pour ton ami, tu es son univers pour qui sait regarder…

— J'avais peur de te décevoir, murmura l'écrivain en baissant la tête et posant son front sur l'épaule du vieil homme.

— Tu es le fils de ma Shizuka (3), jamais tu ne me décevras… Qui sommes-nous pour aller contre le destin ? Ce qui doit être sera, c'est tout… Et c'est quelqu'un de très bien, crois-en moi, gloussa-t-il joyeusement.

— Je t'aime grand-père, fit Kagami en le serrant dans ses bras.

— Moi aussi, je t'aime, mon petit…

L'après-midi touchait à sa fin et le moment de se séparer arriva. Kagami s'acquitta auprès du traiteur et remercia tous ces invités d'être venus. Ils avaient passé une excellente journée sans avoir eu besoin d'aller se perdre au milieu des grands parcs de sakura pris d'assaut par les Tokyoïtes. C'était l'avantage d'avoir un cerisier dans son jardin.

— J't'ai vu parler avec mon père, fit Kagami alors qu'il rangeait la table dans la remise.

— Oui… on a un peu discuté, répondit Aomine, énigmatique.

— Qu'est-ce qui t'a dit ?

— En gros, si j'te rends malheureux, il me tuera…

Ce qui n'était pas si loin de la vérité selon les critères de Kagami Keigo…


Himuro travaillait toujours pour une société de développement d'applications pour smartphones. Comme il l'avait expliqué à Kagami, il faisait ça d'une main tandis que de l'autre, il écrivait ses propres programmes de cybersécurité et de navigation dans le Darkweb. Ce fut de cette façon qu'il entendit parler de ce Cheat Demon dont Takao lui avait déjà décrit le pedigree et qu'il essayait de coincer depuis des semaines. Il avait reconnu la signature du hacker à plusieurs reprises, mais c'était impossible de le tracer. Pourtant, sur des forums d'accès restreint, il avait lu plusieurs fois que ce type était en train de préparer un très gros coup. Et qu'une fois encore, un pirate basculait dans le cyberterrorisme. Cheat Demon était sur la sellette quoi qu'il fasse. Soit il continuait comme hacker, soit il franchissait la ligne rouge et il deviendrait persona non gratta dans les tréfonds d'Internet. Mais il était le seul à décider de l'orientation qu'il voulait donner à son activité.

Himuro savait que Takao serait intéressé par cette information et lui envoya un SMS. Elle confirmait ce qu'ils avaient tous les deux appris sur le personnage. Un être sans foi ni loi. Sans scrupule ni étique. Il faisait ce qu'on lui demandait moyennant finance. Comme ce qu'il avait fait pour Nebuya en piratant le système de télésurveillance de la résidence d'Higuchi. Et ça, ce n'était rien par rapport à ce qu'il pouvait accomplir. Sans parler de toutes les informations sensibles et confidentielles de nombreux gouvernements et politiciens qu'il conservait sur des serveurs anonymes dans plusieurs pays. Il avait su assurer ses arrières. Mais personne n'était infaillible.

En rentrant chez eux, Himuro trouva Takao devant son écran géant. Il était tellement concentré qu'il n'avait pas entendu son compagnon rentrer. Il pianotait à une vitesse incroyable. L'informaticien s'approcha et posa une main sur son épaule. Le sursaut de Kazunari leur fit peur à tous les deux.

— T'es fou ! J'ai failli avoir une crise cardiaque !

— Eh ! J'ai rien fait… désolé, tu m'as fait peur toi aussi…, répliqua Tatsuya en l'embrassant. Cheat Demon ?

— Ouais… C'est une vraie anguille…

— L'info que j't'ai filé ?

— Toutes les rumeurs vont dans l'même sens, mais tu sais c'que valent les ragots là au fond…

— Ouais, y a à boire et à manger… j'prends une douche, on bouffe et après j't'aide…

Cheat Demon… Le démon tricheur… Pourquoi avait-il choisi un tel pseudo ? À quoi ça pouvait bien rimer ? Est-ce que ça avait seulement une signification ? Toutes sortes de bruits couraient à son sujet. Qu'il travaillait pour différents gouvernements en fonction de ce qu'il était rémunéré, qu'il volait des informations classifiées pour son propre compte et faisait du chantage ou bien encore il les négociait au prix fort au plus offrant. Là où il y avait une guerre, il volait des données dans chaque camp pour les revendre à l'autre en se faisant grassement rétribuer.

Demon parce qu'il arrivait à obtenir des infos surprenantes que tous croyaient inviolables. Très bien, ça collait. Effectivement, on pouvait le comparer à un démon pour ça. Mais tricheur ? Peut-être qu'il escroquait ses clients ? Il ne leur remettait pas tout ce qu'il avait trouvé et en gardait une partie pour lui ? Il truquait ses transactions. Il l'annonçait clairement dans son pseudonyme, mais ça n'empêchait pas des personnes particulièrement malintentionnées de faire appel à lui tout en sachant qu'elles n'en auraient peut-être pas pour leur argent. Un gars comme ça était très dangereux. Oh, il n'était certainement pas le seul, mais s'il pouvait être mis hors circuit, le monde irait un tout petit peu mieux. Pas beaucoup, mais se serait toujours ça.

— Tu crois qu'en bas, on pourrait regrouper des types qui ne veulent pas de mec comme lui en liberté ? suggéra Himuro en mangeant ses gyozas.

— J'pense pas… répondit Takao. Ils l'aiment pas donc y feront pas d'affaire avec lui, mais ça veut pas dire qu'ils le balanceront…

— Mouais, c'est juste… Et la rumeur sur son soi-disant gros coup ?

— Là aussi, tout et n'importe quoi. J'en ai parlé avec mes potes de la brigade, ils sont sur le coup, mais…

— … mais ils sont sur les dents, sourit Himuro. Et dans la rue ?

— Eh ben…

— Parfois ce qui se passe dans la rue a été préparé sur le Dark. Ça veut pas dire que c'est ici à Tokyo ni même au Japon… Ça peut très bien être dans un bled perdu de la Patagonie ou en plein cœur de Londres... Tes potes ont pas des indics ?

— Génial ! Ça vaut l'coup d'se renseigner ! Tu sais qu'je t'aime toi ? s'exclama Takao en prenant son téléphone.

— Il faut qu'ils disent que ça risque de mettre beaucoup de monde en danger, ça déliera peut-être les langues, suggéra très judicieusement Tatsuya.

Et ce fut certainement l'idée du siècle. Dans les jours qui suivirent, une rumeur concernant un braquage de grande envergure de plusieurs bijouteries commença à enfler dans les rues mal famées de la ville. Ce qui corrobora le fait que ça se déroulerait à Tokyo. Mais quand et comment ? Voilà ce qu'il allait falloir élucider. À eux deux ils avaient presque trois cents de QI, ils allaient bien trouver une solution.

— Pourquoi préparer un coup sur le Darkweb ? s'interrogeait Takao à voix haute, sans faire attention qu'il était dans le bureau de son patron avec Himuro et plusieurs policiers de différentes brigades impliquées.

— Il a besoin d'un hacker, fit Murasakibara en piochant dans son paquet de M & M's. Ils vont désactiver la télésurveillance et les alarmes…

— C'est certain, mais de quelles bijouteries ? voulut savoir le commissaire Matsumoto. Y en a des dizaines plus ou moins grandes…

— Des boutiques de luxe, pas celles dans des centres commerciaux, allégua Takao.

— Elles sont dans les quartiers chics, dans des rues commerçantes, mais isolées, affirma Himuro.

— Pourquoi ? demandèrent plusieurs voix.

— C'est plus simple pour s'échapper… Dans un centre commercial, c'est plus long d'en sortir… Il faut traverser toute la galerie marchande pour arriver sur un parking surchargé qui peut bloquer la fuite, expliqua-t-il.

— Ça se tient, concéda Fukui, le coéquipier de Murasakibara. Les bijouteries de luxes sont des cibles potentiellement plus faciles…

— Un ou deux braqueurs, un conducteur, reprit Takao.

— Est-ce qu'on peut surveiller les systèmes de sécurité de ces joailleries en particulier ? demanda encore le commissaire.

— Ça doit pouvoir se faire, mais pendant combien de temps ? répondit Himuro alors qu'il savait que Takao avait réussi à le faire pour coincer Haizaki.

— Bon ! s'exclama Matsumoto. Takao, Himuro, vous guettez les alarmes de ces bijouteries avec le cyberterrorisme… On a besoin d'infos ! J'appelle la criminelle, les mœurs et les stups ! Je les veux dans les rues à secouer leurs indics !

— On sait toujours pas quand ça aura lieu, fit remarquer très justement Murasakibara.

— Pendant combien de temps on va devoir observer les systèmes de télésurveillance ? s'enquit Takao qui voyait se profiler des nuits blanches.

— J'en sais foutrement rien, les gars ! Mais on n'a pas vraiment l'choix ! On dit une semaine pour commencer ! Au boulot !

Depuis qu'il était accrédité par la police, Himuro n'avait été réquisitionné que deux fois. Et là encore, il allait devoir avertir son patron qu'il ne serait pas présent pendant plusieurs jours. Il entendit celui-ci souffler au téléphone, bien conscient que ses projets en cours allaient être donnés à d'autres pour ne pas prendre trop de retard. Mais c'était ainsi. De toute façon, l'informaticien n'envisageait pas du tout de faire ce boulot jusqu'à la retraite, donc si son employeur trouvait un bon motif pour le licencier, ça ne le perturberait pas plus que ça. D'un regard, ils se comprirent avec Takao et se rendirent immédiatement dans la salle qui leur était réservée. Elle était pleine d'écrans et d'ordinateurs. Douze personnes pouvaient y tenir et allaient travailler là, ensemble. Pour l'instant les deux hommes mirent le matériel en fonction. Ils ne firent que quelques manipulations basiques. Il était déjà plus de vingt heures et ils auraient bien voulu rentrer chez eux pour mettre en route leur système à eux. Matsumoto leur en donna l'occasion en leur disant que tout le monde ne serait pas là avant le lendemain à la première heure.

Une fois chez eux, Takao et Himuro mirent toute leur structure de contrôle en marche. Et ce n'était pas peu dire. Kazunari était un diable pour la traque et Tatsuya craquait des codes soi-disant inviolables comme de coquilles de noix. Mais ils ne se résumaient pas à ça. Pour coincer Haizaki, Takao avait mis sous surveillance tout le réseau vidéo de l'île de Shikoku pour finalement l'arrêter dans un hôtel de Matsuyama. Il fallait faire la même chose à l'échelle de Tokyo en ciblant les bijouteries qui ne se trouvaient pas dans un centre commercial. Himuro traquerait les intrusions dans les serveurs de télésurveillance à la recherche de la signature spécifique de Cheat Demon. Avant de quitter le poste de police, ils avaient donné ces informations à leurs collègues qui étaient restés sur place. Les deux informaticiens ne pouvaient pas leur expliquer trop de choses étant donné que ce qu'eux-mêmes faisaient c'était du piratage pur.

— Et voilà, fit Takao en appuyant sur la touche entrée de son clavier. Tout est OK !

— On a bien fait de laisser l'système en veille, ça permet de le lancer plus vite…

— Et c'est encore une super idée de l'amour de ma vie, sourit Takao en s'approchant de son compagnon pour le bécoter dans le cou.

Himuro se leva et enlaça son homme. Il l'embrassa avec une voracité qui ne lui ressemblait pas. Il était plutôt du genre, tendre et langoureux d'ordinaire, mais là, il s'était changé en un fauve grondant et affamé. Ça ne déplaisait pas à Takao qui se laissa volontiers dévorer. À petits pas, ils dérivèrent jusque dans leur chambre où le lit leur tendait les bras. Tatsuya se dévêtit en un tour de main et plongea entre les cuisses de son amant qui cria de surprise et de contentement.

— Qu'est-ce tu m'fais là, gémit-il en ôtant son sweat-shirt.

— On va passer des nuits blanches, à dormir et manger quand on peut… C'est quand qu'on aura un moment pour nous, hein ?

— On le prendra quand on voudra, gronda Kazunari en se voyant disparaître dans la bouche insatiable. Annh… Tatsu… tu m'rends fou.

— Moi c'est maintenant que j'te veux…

Il prit ce dont il avait besoin dans le tiroir de la table de chevet, débarrassa Takao de son pantalon, de son sous-vêtement et l'enjamba pour unir leur corps. Était-ce de savoir ce qu'ils allaient faire qui les excitaient à ce point ? Ou bien le fait qu'ils ignoraient quand ils feraient l'amour à nouveau ? Les jours qui s'annonçaient seraient difficiles. La tension nerveuse allait être à son comble. Jamais encore ils ne s'étaient retrouvés dans une situation aussi compliquée. Ce qui semblait décupler la vigueur d'Himuro qui était déchaîné. Il chevauchait son amant comme si c'était leur dernière fois. Leurs cris se faisaient écho, leurs gémissements rajoutaient à leur plaisir. Takao augmenta la cadence de ses hanches, mais emporté par la passion, il fit basculer Himuro, se plaça derrière lui et investi à nouveau ce corps qu'il aimait tant.

Dans cette position, leur rythme devint plus rude, plus brutal. Himuro se redressa, suppliant Kazunari qu'il aille plus vite, plus fort. Ni l'un ni l'autre ne s'appartenait plus. Ils n'étaient plus que deux corps à la recherche du plaisir le plus puissant, le plus long, le plus dévastateur. Jamais leurs étreintes n'avaient été si féroces. Tatsuya retomba à plat ventre sur le lit, cloué comme un papillon par l'ardeur que Takao mettait à le combler. Le plaisir qui le ravagea le tétanisa pendant quelque seconde. Son cri resta bloqué dans sa poitrine avant de se déliter en un feulement profond. Takao continua ses coups de reins, lui aussi au bord de la jouissance quand son amant se retourna et le prit dans a bouche. L'orgasme le brutalisa avec une violence si délicieuse que dans un réflexe incontrôlé, il s'enfonça et se déversa dans la gorge qui l'enveloppait de toute part. Épuisés et comblés au-delà des mots, les deux hommes s'enlacèrent en reprenant lentement pied dans la réalité.

— Tu nous as fait quoi, là ? murmura Takao, un sourire dans la voix.

— J'avais envie, c'est tout…

— On inverse la prochaine fois, d'accord ?

— Tout c'que tu veux… Mais je sais pas quand…

— On trouvera bien une heure ou deux…

Une alarme les fit bondir du lit. Deux bijouteries venaient d'être dévalisées, mais sans que le système de télésurveillance ne soit coupé. Les voitures de police furent sur les lieux en une quinzaine de minutes, mais ne purent que constater les dégâts. Les vitrines étaient brisées, il y avait du verre partout au sol, les présentoirs étaient presque tous vides et les trois employés présents étaient terrifiés. Les caméras avaient tout filmé, mais le visionnage ne donna rien. Les deux voleurs étaient masqués. L'un tenait les vendeurs en joue avec deux pistolets, l'autre raflait la marchandise. La vidéo du magasin d'en face montra une vieille Mazda qui attendait et dans lequel les deux hommes s'engouffrèrent et qui se fondit dans la circulation. L'angle n'avait pas permis de voir la plaque d'immatriculation, seulement le modèle. De toute façon, il s'agissait certainement d'un véhicule volé. Il allait donc falloir éplucher toutes les déclarations de vols de voitures de ce type. Takao et Himuro regardaient l'écran, dépités. Les braqueurs un, la police zéro.

Et ça n'allait pas s'arrêter là. Une semaine plus tard, deux autres bijouteries furent attaquées. Même modus operandi. Et rien à faire, pas moyen de prévoir où aurait lieu le prochain casse, ni quand. Il ne semblait pas y avoir de schéma réfléchi. On aurait dit que les vols se faisaient de manière totalement aléatoire, un peu comme si la cible était décidée au dernier moment. Et là encore, aucun indice exploitable. C'en était désespérant et les deux hackers s'arrachaient les cheveux. Ils étaient à fleur de peau et faisaient de gros efforts pour ne pas se gueuler dessus de frustration. Même s'ils n'étaient pas responsables, le manque de résultat était démoralisant. Par moment, ils arrivaient à s'octroyer quelques heures de repos et de tendresse pour s'aimer et s'excuser d'avoir eu telle ou telle attitude ou d'avoir eu une parole regrettable. Ils étaient dans le même état et se comprenaient. Malheureusement, leur patron était furax bien qu'il sût que toute l'équipe faisait de son mieux. Lui-même avait un supérieur sur le dos qui voulait des résultats. Un de ces cols blancs qui n'avait pas mis les pieds dans la rue depuis bien trop longtemps et qui est persuadé que parce qu'il veut quelque chose, il va l'obtenir. Les différentes brigades avaient essoré leurs indics qui ne leur apprendraient rien de plus. L'enquête était au point mort.


Aomine avait rencontré l'auteur dont sa secrétaire lui avait fait parvenir le manuscrit quelques semaines plus tôt. Et il était aux anges. Il avait d'abord cru à une sorte de plagiat lorsqu'il avait vu qu'il était question d'aliens et d'Égypte Ancienne. Le thème n'était pas sans rappeler le film et la série" Stargate". Mais à mesure qu'il avait avancé dans la lecture, il comprit que ça n'avait rien à voir. Il s'agissait d'une race extraterrestre belliqueuse qui conquiert les mondes qu'elle découvre. Mais parmi l'un d'eux, un savant va réussir à leur échapper avec le début d'une arme pour les anéantir. Il va être pris dans un vortex temporel et se retrouver à l'époque de l'Égypte Ancienne sous le règne d'Akhénaton qui le prendra pour son Dieu, Aton. Le scientifique aura des millénaires devant lui pour mettre au point son arme. Et Aomine avait trouvé l'idée très originale. Le dénommé Hayakawa Mitsuhiro (4) avait un style très élégant et précis contrairement à sa façon de parler. Il voulait dire tellement de choses à la fois qu'il en bafouillait. Ce qui était particulièrement désagréable. Mais peu importait si son histoire tenait la promesse de ces quelques chapitres, il supporterait cette affreuse manie. Il était temps de rentrer, il avait hâte de retrouver Kagami et voir, enfin lire, ce qu'il avait bien pu écrire.

Il descendit au garage pour récupérer sa Toyota quand un fait étrange attira son attention. Il y avait beaucoup de voitures qui tentaient de sortir du parking, mais sans y parvenir. Elles étaient toutes les unes derrière les autres sans avancer. Les conducteurs avaient eu la judicieuse idée de couper leur moteur sinon l'air serait rapidement devenu irrespirable, car toutes n'étaient pas électriques. Il s'enquit auprès d'autres chauffeurs s'ils savaient quelque chose, mais personne ne semblait avoir la moindre information. Il regagna sa voiture pour allumer la radio. Il n'y avait rien sur aucune fréquence. Il regarda son téléphone, il n'avait pas de réseau donc pas moyen de prévenir Kagami qu'il serait en retard. Peut-être étaient-ils surchargés ? Il remonta dans les étages pour sortir par la porte principale de Touou et là il eut une vision de cauchemar. Les rues étaient pleines de voitures qui klaxonnaient comme si ça allait changer quelque chose. Il observa ce capharnaüm pendant plusieurs minutes lorsqu'il remarqua que tous les feux de signalisation étaient au vert. Pas étonnant que tout le monde ait cru pouvoir passer. Voilà la cause de ce gigantesque embouteillage. Et le pire, c'était que les véhicules prioritaires comme les ambulances, les pompiers ou la police devaient eux aussi être pris dans ce bourbier urbain. Il rédigea malgré tout un SMS et l'envoya. Avec un peu de chance, Kagami le recevrait.

De son côté, le romancier avait bien vu qu'il y avait un évènement grave sur une chaîne d'information avant que la diffusion ne soit interrompue. Il eut également le réflexe de joindre son amant pour l'avertir, mais il n'avait pas non plus de réseau. Pour l'instant, il n'avait aucun moyen de savoir si Aomine allait bien. Il n'avait pas de raison de s'inquiéter outre mesure. Aujourd'hui était l'une des deux journées où il devait faire acte de présence à Touou et il devait certainement encore y être. À moins qu'il n'ait eu l'idée de prendre les transports en commun. Les bus devaient être coincés, mais le métro fonctionnait peut-être. C'est sûr qu'ensuite il lui faudrait plus d'une heure de marche pour parvenir jusqu'à la maison. Et il est aussi fort possible que les gens, voyant cette pagaille, aient abandonné leurs véhicules pour tenter leur chance dans le réseau souterrain qui risquait de se retrouver pris d'assaut et très vite saturé. Il ne pouvait qu'attendre, sans pouvoir joindre quiconque. Voilà bien une chose qui n'était encore jamais arrivée. Tokyo paralysée par un gigantesque embouteillage à cause d'un problème de feux de signalisation. Ne pouvant rien de plus, il alla dans la cuisine voir s'il avait tous les ingrédients pour préparer des Teriyaki Burger, un des plats préférés d'Aomine. Il allait rentrer exténué et très certainement sur les nerfs alors au moins s'il avait un bon repas pour se remplir le ventre, ça l'aiderait à se calmer. Ensuite, il prendrait une bonne douche pour se détendre et après…


Dans la salle informatique de la brigade de lutte contre le cyberterrorisme, Takao poussa un cri terrible. Auquel deux autres firent écho. Himuro et Fukui avaient raccroché les wagons. Le premier avait trouvé la bijouterie qui se faisait braquer, le second avait localisé Cheat Demon et le troisième était en train de rétablir les feux de signalisation. Ils travaillaient comme des forcenés, mais prudemment, à pas de fourmi et ça leur demandait une concentration extrême. Il ne fallait surtout pas les déranger. Le commissaire Matsumoto qui était entré quelques minutes avant allait parler quand un bras immensément long se mit devant lui. D'un regard Murasakibara lui fit comprendre qu'il devait se taire et d'un mouvement de tête, il l'invita à le suivre dehors.

— Que se passe-t-il, lieutenant ?

— Il faut surtout pas les déconcentrer, expliqua le géant de son agaçante voix traînante. Ils viennent de reprendre la main sur les serveurs concernés, mais pour l'instant aucune intervention n'est possible à cause des bouchons…

— Ça veut dire qu'ils ont trouvé le responsable et qu'on peut pas l'arrêter, conclut le commissaire en se frottant le menton. Je comprends…

— Y doit pas savoir qu'il a été découvert… Takao a localisé la bijouterie et il est en train de remettre en fonction les réseaux de téléphonie mobile qui vont être surchargés très vite…

— Comment ça ?

— Les gens vont appeler et envoyer des SMS dès qu'ils verront qu'ils peuvent à nouveau le faire… Fukui remet la signalisation en place lentement pour ne pas éveiller ses soupçons… Il est très compétent et pourrait faire ça beaucoup plus vite, mais Cheat Demon n'est pas idiot… Rien ne doit lui mettre la puce à l'oreille… On sait où il est grâce à Himuro et on le cueillera, faites-nous confiance…

— Oh, c'est l'cas, sourit Matsumoto, mais je m'rends compte à quel point je commence à être dépassé par toute cette technologie…

— Pourquoi vous faites pas des stages de mises à niveau ? lui demanda le lieutenant en lui offrant des caramels.

— Je manque de temps, mais vous avez raison, c'est c'que je devrais faire…

— Prenez-le ce temps, ça vaut l'coup, c'est très intéressant… Ah, mon téléphone a du réseau…. Et le vôtre ?

— Non, toujours pas… C'est peut-être pas l'même opérateur…

— Venez, on va voir où ils en sont…

— Murasakibara…

— Hmm ?

— Merci… Sans vous, j'aurais peut-être foutu en l'air trois semaines de boulot…

— Hmm… Des chips ? proposa-t-il au commissaire, alors que ce n'était pas dans sa nature de partager ses friandises, mais il avait bien fallu calmer son chef.


Le hacker se doutait bien que les policiers de la brigade de lutte contre le cyberterrorisme étaient en train de remettre en fonction tout ce qu'il avait déconnecté. Un sourire torve étirait sa bouche. Il s'amusait de les voir se débattre dans toute la pagaille qu'il avait mise. Il fallait avouer que lorsqu'il avait été contacté par ce groupe de malfrats qui voulait cambrioler des bijouteries, il avait rapidement pensé à ce plan. Les premiers vols n'étaient que des tests pour connaître la vitesse de réaction des forces de l'ordre. Mettre hors service les réseaux des téléphones et la signalisation routière était venu après dans l'exécution du projet. La dernière joaillerie, une des plus importantes de la ville, devait permettre aux braqueurs de prendre un gros butin, mais surtout, ils s'en iraient à pied tranquillement puisque la police serait coincée dans les embouteillages. Leur but était de rafler un maximum d'or et de le revendre sur le marché noir. Ce précieux métal était une valeur refuge et comme la crise économique semblait vouloir s'éterniser, ils trouveraient rapidement des acheteurs. Et au passage, lui aussi empocherait une très douillette somme en cryptomonnaie. Pour l'instant, un chaos sans nom régnait dans les rues et lui, il souriait. Il était si sûr de lui, jamais il n'avait été inquiété par qui que ce soit. Les hackers lui fichaient une paix royale du moment qu'il ne s'en prenait pas à l'un d'eux et qu'il ne s'occupait que de ses propres affaires et les autorités étaient bien loin de lui faire peur.

Il avait souri aussi quand il avait appris l'arrestation d'Itsmine. Il ignorait les détails de cette histoire, ni comment il s'était fait avoir et encore moins par qui, mais il était certain que le hacker s'était cru plus malin que celui qui l'avait piégé. On trouve toujours meilleur que soit et ça, Cheat Demon l'avait en permanence dans la tête."Il y a toujours plus rusé, je dois être encore plus prudent." Et cette prudence confinait à la paranoïa. À tel point qu'il ne quittait jamais, ou presque, ses gants en latex qui lui évitaient de laisser ses empreintes où qu'il aille. Même s'il ne s'était jamais fait arrêter et que les autorités n'avaient pas d'information sur son profil génétique, il ne prenait aucun risque. C'était devenu une seconde nature chez lui, ne pas faire de vague dans l'aquarium et tourner en rond dans le même sens que les autres.

Pour l'instant, il attendait la seconde partie de son paiement. L'or devait être fondu et revendu et ça ne se faisait pas si aisément. Il faudrait encore quelques jours avant que son compte ne grossisse de façon plus que conséquente. En tout, pas loin de trois millions en dollars une fois la conversion faite, puisqu'il avait demandé et obtenu une avance plus que confortable. Ce qui était normal, il n'allait quand même pas se lancer dans un projet pareil sans avoir une garantie financière. Il adorait gagner sa vie comme ça. Personne ne savait qui il était. Il pouvait aller où il voulait dans le monde, ses cartes de crédit lui ouvraient toutes les portes. Et il n'avait même pas besoin de changer d'identité puisqu'il était un respectable citoyen japonais plein aux as qui avait fait fortune dans les cryptomonnaies. Il avait quelques relations parmi des directeurs de grosses banques d'affaires, il était invité à des réceptions, à des galas de charité où il se montrait généreux. C'était aussi un célibataire courtisé, mais pour l'instant ni femme ni homme n'avait réussi à prendre son cœur et de toute façon, on ne lui connaissait aucun engagement sentimental sérieux. Hanamiya Makoto était un invisible parmi tant d'autres invisibles, et ça lui convenait très bien. Il alla se coucher. Tout ce bazar serait encore là pendant des heures…


Aomine n'avait toujours pas quitté Touou. Il était remonté dans son bureau et décida d'y passer la nuit. Il était dans l'ascenseur quand son téléphone sonna.

T'es où? fit la voix inquiète de Kagami.

— Au bureau, j'vais dormir là, dehors c'est la panique…

T'es en sécurité?

— Oui, attends… Raccroche, j't'appelle en visio…

Le temps de rallumer son ordinateur et il vit apparaître le visage inquiet de Kagami.

— Tout va bien à la maison ?

C'est calme… J'ai entendu quelques klaxons, mais ce devait être pour rejoindre la route principale qui devait être un peu encombrée…

— T'as vu les infos ? Qu'est-ce que ça raconte ?

Tout et son contraire… Panne du réseau, cyberattaque, surcharge électrique, on saura pas de toute façon... J'espérais que tu pourrais rentrer…

— Moi aussi… Les gens ont abandonné leur voiture pour prendre le métro ou rentrer à pied… Ça va être la panique pendant encore plusieurs heures… Ici au moins, je suis au chaud, au sec et j'ai envie de te voir…, sourit le correcteur.

Moi aussi… tu me manques… Et j'avais tout ce qu'il faut pour te faire des Teriyaki Burger quand tu serais revenu…

— RooohEn plus tu les fais trop bien…, pleurnicha Aomine avec un rictus enfantin. Demain, dès que j'rentre on s'fait une ventrée…

Tu vas bosser?

— Ouais, j'vais en profiter pour relire cet auteur dont je t'ai parlé…

L'Égypte et les extraterrestres?

— C'est ça… Franchement j'ai hâte de lire la suite… Je commence un peu à comprendre où il veut en venir, mais c'est vraiment bien…

OK… te couches pas trop tard…, sourit l'écrivainà l'écran.

— Toi non plus, à demain…

L'écran afficha de nouveau le moteur de recherche et Kagami soupira profondément en se laissant aller au fond de son fauteuil. Il n'avait retenu qu'une seule phrase de cet échange. Aomine avait dit : "… à la maison…" Pour le romancier ça voulait dire qu'il se considérait chez lui, qu'ils étaient chez eux, que c'était leur domicile à tout les deux. Ce qui l'amena à une autre chose. Ils vivaient ensemble depuis presque trois mois. Le correcteur avait apporté pratiquement tous ses vêtements, des livres, des CD et divers objets, alors pourquoi gardait-il son appartement ? Il payait un loyer bien qu'il n'y habitât plus. C'était de l'argent jeté par la fenêtre. Et par les temps qui couraient, il n'y avait pas de petites économies.

Et si Aomine emménageait définitivement avec lui ? La remise était assez grande pour contenir ses meubles et tout ce qu'il emporterait. Corail s'était habitué au jardin et même à Jade. Les deux chats s'ignoraient et chacun allait faire des câlins à " son" humain et un peu à l'autre. Il sentit son cœur se gonfler de joie. Il avait enfin trouvé la personne avec qui il voulait faire sa vie. Il ne manquait plus qu'ils vivent ensemble et peut-être plus tard pourraient-ils envisager le mariage ? L'union entre personnes du même sexe avait été officialisée en août 2028 (5) alors, pourquoi pas ? Mais il ne fallait pas brûler les étapes. Un pas après l'autre pour éviter de se ramasser lamentablement. Déjà amener le sujet sur l'emménagement définitif serait une bonne chose.

Après avoir coupé la communication, Aomine s'accouda sur son bureau et posa son menton sur ses poings. Il avait dit ça avec un tel naturel, "… à la maison…". Chez Kagami, il se sentait chez lui. Plus dans cet appartement. Il y avait encore toutes ses affaires bien sûr, mais ce n'était plus chez lui. Ou tout du moins il ne le considérait plus comme tel. Il avait apporté beaucoup de choses au domicile du romancier, normal qu'il estime que c'était désormais sa demeure. Et pourquoi payer un loyer s'il ne vivait plus dans ce logement ? Même Corail n'y était plus. C'était une idée qui lui plaisait, mais il ne voulait pas s'imposer. Kagami n'était peut-être pas prêt à franchir cette étape. Lui avait vécu avec Haruka même si c'était à la fac, donc il savait quelles concessions et parfois quels sacrifices il fallait faire pour que tout fonctionne en parfaite harmonie dans un couple. Lui, il était prêt.

Sans le savoir, les deux hommes se faisaient un peu le même genre de réflexions. De toute évidence, ils avaient un lien très fort, pas seulement sentimental ou physique, ce qui était indiscutable, mais également une accointance psychologique puissante. Ils leur arrivaient souvent de finir les phrases l'un de l'autre, de se donner un objet sans que l'autre ne l'ait demandé. Par moment, ça frisait la transmission de pensées. Ce phénomène se voyait chez les couples de longue date, mais après juste trois mois en arriver là, ça relevait de l'exceptionnel. C'était dire à quel point leurs sentiments étaient forts et profonds. Et leur connexion merveilleusement complémentaire. Les deux pièces d'un puzzle parfaitement imbriquées à tous les niveaux…

À suivre…


(1) Personnage original. Hasegawa Ryu est le grand-père maternel de Kagami. Et le beau-père de Kagami Keigo

(2) Personnage original. Kagami Keigo est le père de Kagami Taiga.

(3) Personnage original. Hasegawa Kagami Shizuka est la mère de Taiga, l'épouse de Keigo et la fille de Ryu.

(4) Hayakawa Mitsuhiro = joueur de Kaijo, spécialiste des rebonds. Il articule très mal et on ne comprend pas toujours ce qu'il dit.

(5) Pure spéculation de ma part. S'il y a des avancées dans ce sens au Japon, rien n'est encore fait au moment où j'écris et cela risque de prendre bien plus de temps que dans cette histoire.

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