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Cette Fanfiction a été écrite dans le cadre du fest' organisé par FESTUMSEMPRA sur le thème « Seven Deadly Sins »

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Contraintes :

Thème : L'oisiveté n'est pas toujours un choix. Cette paresse maladive l'écrase avec une telle force que il/elle se sent incapable de s'en sortir.

Personnage : Gwendolyn la fantasque


L'Etoile de la Paresse


Elle aurait dû sortir. Ne pas les attendre encore une fois. Arrêter de contempler le soleil à travers la meurtrière. Mais elle n'y arrivait pas. Ses membres étaient trop lourds, sa tête perdue quelque part dans le labyrinthe orageux de sa vie.

"Allez viens, cours Vega ! On va rater la présentation d'Ulric " L'écho de ton rire, nos châles qui s'envolent. Tout se mêle et se mélange, seule reste la certitude de notre amour.

Elle avait conscience de son existence, du temps qui courait, mais elle était incapable de se mouvoir. Sa lassitude était si grande... Et puis, elle savait ce qui allait arriver. Elle aimait bien d'une certaine manière. Parfois, lorsque son visage acceptait de bouger, elle en riait même. Elle aurait pu être heureuse, si elle en avait eu la force.

Véga… Mon pilier. Ma petite fleur si fragile au caractère de dragon. Tu t'es envolée si vite. Je n'étais pas prête à vivre sans toi…

Il y avait une drôle de symphonie qui se lançait, à chaque fois qu'elle sentait le danger arriver. Un son un peu discordant, qui lui vrillait l'oreille, mais juste assez pour que ce soit supportable. Comme un moustique qui resterait à distance respectable, sans jamais se rapprocher. Son corps lui hurlait de se lever, de courir, de partir loin. Sa tête était fatiguée. Si fatiguée.

C'est ma faute Véga. Me pardonneras-tu un jour ? Moi je sais que je ne me le pardonnerais jamais. Je n'ai pas couru assez vite. Je t'ai laissé seule. Je t'ai abandonnée sans penser un seul instant que c'était la dernière fois que je te voyais.

Et puis à quoi bon bouger ? Lorsqu'ils arriveraient, ils l'emmèneraient et elle serait obligée de suivre. Rien que d'imaginer l'effort qu'elle allait devoir fournir pour leur obéir l'engourdissait.

- Ce n'est rien. Attendons.

Parfois, elle s'obligeait à parler, pour vérifier qu'elle était toujours vivante.

Un bruit violent contre la porte la fit sursauter. La contraction involontaire de tous ces muscles la laissa pantelante. Elle n'était pas prête.

Je n'ai jamais été prête. Je n'ai pas été prête à la révélation de notre amour. Je n'ai pas été prête à faire face aux Black. Je n'ai pas été prête à nous protéger.

Ses yeux firent le tour de la pièce. Effort monumental qui lui tira un soupir. Tout était noir, miteux, humide et sale. Peut-être était-elle rassurée de quitter cet endroit ? Le loquet de la porte s'ouvrit sur des hommes armés d'épées et de lances.

Comme si cela pouvait réellement les protéger. Un des gardes attira son regard de par ses tremblements, son épée déviant dangereusement vers ses compagnons. Il était petit, avec un léger embonpoint étonnant au vu de la pauvreté de ses vêtements.

N'avaient-ils pas encore compris, après tout ce temps, que c'était uniquement à cause d'elle qu'ils étaient encore en vie ? Qu'il aurait suffit qu'elle lève le bras pour les anéantir ? Tout pédant qu'ils soient.

Vega, tu es ma tempérance, mon rire et mon éclat. Mon miroir brisé, mon bouclier éclaté et mon épée fracassée. "Que vaut une vie Moldue Vega ?" Tout, tu me réponds. "Malgré ce qu'ils nous font subir ?" Non, parce que c'est une vie et que toute vie est précieuse.

- Debout.

- J'aimerais bien, murmura-t-elle. A peine un souffle.

- T'as pas entendu la Fantasque ? Allez, tout le monde t'attend.

Ma petite Fantasque. Tu m'offres ce surnom après mon quinzième bûcher, en pouffant derrière ton voile. Tes doigts qui frôlent ma main, juste une inattention me diras-tu. Mais je sens les frissons qui nous traversent à chaque fois. Tu aimes ce jeu autant que moi. Tu es bien meilleure.

Elle tendit la main vers eux. Mouvement de recul général, lances brandies.

- Idiots. Aidez-moi.

Deuxième souffle, à peine plus fort que le premier.

Les hommes hésitèrent, indécis. Fallait-il la toucher au risque qu'elle leur jette une malédiction ? La forcer à se lever en la piquant, au risque de la tuer et qu'il n'y ait plus de spectacle ? Dur choix.

Finalement, celui avec l'armure la plus rutilante fit un geste de la tête en direction du petit bonhomme un peu gros.

- Vous êtes sûr chef ?

- Grouille-toi Pettigrew, on n'a pas que ça à faire.

Comme moi. Je dois me dépêcher. Rentrer sans tarder. Vega m'attend. Va-t-elle me faire une surprise ? J'ai si hâte de la revoir. De lui offrir mon cadeau pour m'excuser. Je n'aurais pas dû prendre peur devant sa famille. Je sais qu'elle me pardonnera.

Le garde se ratatina encore plus sur lui-même si c'était possible.

La prisonnière le regarda avec pitié. Il fut un temps où elle lui aurait sourit, où elle aurait fait durer cette mascarade pour le simple plaisir de le voir se pisser dessus.

"Hé Vega, regarde ! C'est qui la meilleure ?" Une baguette qui tournoie, des marguerites qui apparaissent dans les cheveux. Vega gagne, comme toujours. Et pourtant. Ce son discordant recommence. Gênant. Mais pas au point que j'y fasse attention. Je l'oublie rapidement.

Ce temps était révolu. Son corps avait abandonné une bataille qu'elle n'était même pas sûre d'avoir jouée. Quand avait-elle changé ? Depuis quand la moindre envie l'avait-elle désertée ? Elle n'était plus qu'une fleur desséchée par les larmes trop longtemps retenues, trouvant un certain réconfort dans cette répétition stupide et aliénante de feu et de mort.

Et le corps découvert dans notre chaumière. Une scène floue, rouge, au goût ferreux. L'incompréhension, le désespoir, mais pas les larmes. Plus jamais les larmes. Plus jamais rien.

- Oui Pettigrew, vient m'aider, susurra-t-elle en vrillant ses yeux dans les siens.

Elle aurait tant aimé être Legilimens comme sa chère Vega… Si seulement les rôles avaient pu être inversés ce jour-là, elle aurait pu… Le contact d'une peau moite contre la sienne la ramena à la réalité. Elle repoussa ces pensées loin au fond de son crâne, les enfermant à double tour dans son cercueil imaginaire. Avec des si, elle aurait pu voler à dos de dragon.

Avec des si, j'aurais pu arriver à l'heure. J'aurais pû te protéger d'Orion. Ce nom a un arrière goût si âcre qu'il me donne envie de vomir. Et ce sang sur ses mains. Je n'ai pas compris. Dis, Vega, pourquoi je n'ai pas compris ? Il est juste partit. Comme ça.

Un craquement sinistre retentit lorsque son corps se déplia, après des jours passés dans la même position. À côté d'elle, Pettigrew frissonna. Sûrement de froid.

Elle marchait si lentement. Plus lentement qu'un condamné à l'échafaud. Enfin, au bûcher dans son cas. Il n'y avait pas si longtemps, elle s'en amusait. Lorsqu'être heureuse ne paraissait pas si inaccessible. C'était un pari bête à la base. Un "je suis sûre que tu ne peux pas monter sur plus de cinquante bûchers". Et il avait fallu qu'elle lui prouve le contraire. Ce soir, ce serait le cinquantième. Que ferait-elle après ? Y aurait-il seulement un après ? Qu'allait-elle faire ?

Qu'a-t-il fait après ? Est-il facile de dormir après avoir tué sa sœur ? Rien qu'à entendre son nom, ma rage brûle. Orion. Les flammes me consument. Pourtant je suis une lâche. Je ne bouge pas. Pourquoi m'aimes-tu Vega ?

Un gouffre de questions sans réponses venait de l'assaillir, pour la première fois depuis très longtemps. La moiteur des mains de son garde n'y était sans doute pas étrangère, songea-t-elle, il lui fallait un échappatoire à cette horreur. Pour un peu, elle en venait presque à regretter son incapacité viscérale à marcher seule.

La sortie hors de la prison lui parut interminable. Un long dédale de couloirs aux pierres inégales la faisant trébucher. Elle était plus trainée que portée par Pettigrew, qui ahanait pourtant sous l'effort. En voilà un qui mériterait de passer plus de temps à l'entraînement, pensa-t-elle. Elle avait beau n'avoir pas fait grand-chose par pure paresse ces derniers jours, elle n'était pas en train de suer sang et eau elle au moins.

Enfin, la porte de sortie apparut au détour d'un virage. Grande ouverte, le soleil couchant dardait ses derniers rayons de soleil au travers, éclairant la moisissure des murs et la saleté de ses chaussures.

- J'aurais pu les nettoyer…

- Comment ?

Pettigrew fut tellement surpris d'entendre sa captive émettre un son depuis sa sortie de cellule qu'il en oublia d'avoir peur.

- Rien, rien, souffla-t-elle, avance.

Comment je peux avancer sans toi Vega ? Chuchote-le moi au creux de l'oreille s'il te plait. Comme tous ces petits mots d'amour que l'on volait au temps.

La chaleur du dehors réchauffa doucement ses os gelés. Si seulement cela pouvait être suffisant pour qu'elle reprenne les rênes de sa vie. Qu'elle ressente à nouveau quelque chose. Autre chose que cette paresse qui l'écrasait avec autant de force qu'un troll l'ayant confondue avec une chaise.

Mais ce nuage dans sa tête ne voulait pas s'évaporer. Et il pesait lourd, si lourd. Chaque jour un peu plus pesant. Et plus il grossissait, plus Vega lui apparaissait, fantôme ésotérique de ses souvenirs.

Elle grimpa sur le bûcher sans même s'en rendre compte.

Regarde Vega, ça y est, c'est mon cinquantième. J'ai gagné, tu as vu ? J'ai gagné mon pari ! On avait dit quoi déjà ? Tu me dois un bisou, non ? Un bisou sur la bouche par contre, j'en ai fait cinquante quand même !

Les flammes commencèrent à lécher le bout de ses pieds. Lancerait-elle le sort ou pas ? Ne serait-ce pas le summum de son incapacité à vouloir quoi que ce soit ? Vega lui en voudrait. Définitivement. Les vivas de la foule traversèrent un instant la brume opaque de ses souvenirs. Ce serait si simple de lui faire plaisir…

Vega, pardon. Pardon d'avoir failli ce jour-là. De n'avoir pas vu le coup venir. Pardon de ne pas avoir pu te protéger comme je te l'avais promis. Pardon de n'avoir pas pu te venger comme je me l'étais promis. J'ai échoué, ma Vega. Pardon.

Une larme roula sur le visage éclairé par les flammes rougeoyantes.

Le choix était dur. Trop dur. Si fatigant. Si fatiguée…