Nouveau chapitre, avec un peu de retard. Comme prévu, le texte passe en Rating M à partir de ce chapitre. Vous êtes prévenus.
Et quoi de mieux qu'un chapitre pas très catholique pour commencer le weekend de la Pentecôte... Vous m'en direz des nouvelles. C'est une prise de risques.
Encore une fois, merci à tous ceux qui me lisent, me commentent, et bienvenue aux petits nouveaux ! J'vous aime...
La Confrérie honora ses morts, et reprit ses habitudes. Cette attaque inopinée avait renforcé la haine de toutes les Guildes envers les Borgia, tout en ayant, malgré tout, réussi à semer le trouble : qui étaient les taupes ? Qui seraient les prochains à les trahir ?
Bartolomeo se sentait responsable de la tuerie. Pour lui, tout était de sa faute : il n'avait pas soupçonné l'insoupçonnable tandis que l'or des Borgia gangrenait ses troupes. Et même si les couloirs du repaire lui paraissaient bien vides désormais, Ezio ne lui en voulait pas. Quant à Machiavelli, il pouvait être aussi en colère qu'il le voulait, il n'avait rien vu venir non plus.
— Sommes-nous aussi faibles pour subir une attaque chez nous ?
Ezio tolérait sa colère. Le philosophe était ainsi : il oubliait vite les progrès et les victoires. Le Mentor ne se laissait pas abattre : il savait que les rues de Rome regorgeaient de rebelles qui ne demandaient qu'à s'engager. La détermination de chacun n'avait pas flanchée.
Helena retournait aux baraquements tous les jours pour s'entraîner contre les mannequins de paille, et ainsi dompter son chagrin. Les taches de sang n'avaient pas encore toutes disparues, bien que bues par la terre battue jusque la dernière goutte.
Dans ces moments-là, Selene laissait son amie seule. Elle avait eu besoin de la même chose, à une époque. Elle comprenait et ne posait pas de questions.
A la Rose Fleurie, Ezio aussi pansait ses blessures. Claudia avait soigneusement suturé la plaie sur sa cuisse, l'avait recouverte d'une large bande de lin. Elle restait douloureuse sans le gêner pour autant ; Mancini n'avait pas frappé fort.
Cependant, elle était désagréable. Non pas à cause du tiraillement incessant qu'elle lui infligeait, mais parce qu'elle lui rappelait sa faiblesse. Bientôt, il aurait une cicatrice blanche qui rejoindrait celle qu'il avait déjà, sur son côté, gravée là par cette même faiblesse.
Selene.
Malgré toute l'assurance et la sévérité qu'il s'appliquait à montrer quand il était en face d'elle, Ezio était incapable d'être confiant. L'inquiétude lui rongeait l'esprit, l'empêchait de se concentrer dès qu'elle se trouvait près de lui sur le champ de bataille. Il y avait deux raisons à cela : d'abord parce que Selene était la fille de Federico, et il s'était fait un devoir de la protéger, qu'elle ait réellement besoin de lui ou non ; ensuite, et tout devenait clair à présent, parce qu'il était fou amoureux d'elle.
Ezio, assis sur la bord de son lit, fixait la bandelette de lin sur le haut de sa cuisse. Un léger relief témoignait des points de suture.
L'attaque des baraquements et la mort des recrues avaient tout remis en question. Et si Selene avait fait partie des victimes ? Si c'était elle qu'on avait transpercée devant lui ? L'angoisse lui tordait la gorge. Un jour, peut-être, un tel drame arriverait. Depuis, et plus que jamais, la possibilité de la perdre devenait tangible.
Un Assassin n'est jamais à l'abri.
Ezio ferma les yeux, revit Thomas tomber, imagina Selene à sa place.
Il relaça à la hâte ses culottes sur ses hanches et quitta sa chambre. Il avait pris sa décision. C'était maintenant, ou jamais.
La Rose Fleurie en effervescence, au rez-de-chaussée, lui assura plus de discrétion qu'une nuit sans lune. On l'entendait à peine, on passait en riant sans faire attention à lui. Il remonta le couloir et entra sans frapper dans la chambre de Selene.
La jeune femme avait travaillé toute la soirée. Fatiguée d'avoir passé de longues heures penchée sur le registre, elle s'apprêtait à se coucher. Elle était en train de se déshabiller quand Ezio fit irruption chez elle.
Elle ne fut que peu surprise.
Le temps s'arrêta Selene qui défaisait son corset suspendit son geste. L'un et l'autre s'observèrent, anxieux, conscients d'atteindre les dernières limites de l'acceptable.
Ils s'étaient attendus à ce que cet instant arrive. Les baisers clandestins attisaient les ardeurs et chaque nouvelle rencontre les poussait vers l'instant fatidique.
Céder ce soir serait se perdre à jamais.
Il ne fallait qu'un geste. Celui qui tomberait entraînerait l'autre dans sa chute.
Ezio enclencha le verrou, et Selene tira sur ses lacets.
Il s'approcha, eut ce geste particulier qu'il avait déjà eu avec elle : il passa sa main sur son cou, sa nuque, son épaule. Ses doigts défirent lentement et facilement les entrelacs de fils qui serpentaient dans son dos. Il avait l'habitude. Et le corsage s'affaissa, s'affaissa...
Selene le regardait dans les yeux, les joues roses, le souffle court. Combien de fois avait-elle rêvé de cet instant ? Combien de fois avait-elle espéré que Mentor la rejoigne dans cette chambre après leurs jeux sur les toits, après les baisers fiévreux ?
Le moment était enfin arrivé. Celui qu'ils avaient redouté, chacun de leur côté, autant qu'ils l'avaient attendu.
Selene contemplait son oncle. Elle l'avait déjà vu en chemise, longtemps auparavant, mais elle ne l'avait pas regardé, trop occupée à détester l'homme qui se trouvait dedans. Ce soir, c'était différent. Les muscles saillaient sous la chemise blanche, le col entrouvert laissait apparaître quelques poils sombres. Une chaleur intense irradiait de ce corps masculin, fort et superbe, et elle en fut bouleversée.
« Pourquoi faut-il que tu sois mon oncle ? »
La haine du début s'était muée en désir, et cette passion accidentelle, petit à petit, avait laissé la place à un sentiment plus beau, plus noble, et plus terrible encore que la simple envie d'un corps.
Elle réalisa à point elle l'aimait désormais.
Selene tendit la main, la glissa sous le tissu ; elle rencontra la peau brûlante d'Ezio, son ventre ferme, et le creux doux de quelque vilaine cicatrice. L'homme frissonna sous son toucher.
Le corsage tomba sur le tapis. La chemise aussi.
Ezio prit Selene dans ses bras, happa sa bouche rouge et offerte, et la jeune femme lui répondit avec ferveur et tremblements.
La seule sensation de leur peau l'une contre l'autre était un délice. Selene sourit contre la bouche d'Ezio, que l'avidité rendait un peu maladroite ; elle songea qu'enfin il était libéré de son armure froide et encombrante. Elle pouvait sentir les battements de son cœur affolé, ses chairs puissantes et frémissantes sur les siennes, et ce détail l'enivra. Elle se coula contre lui, pressa instinctivement son bassin contre le sien, et Ezio l'attrapa fermement par la taille. Ses mains coururent jusqu'au creux des ses reins, saisirent les ficelles qui retenaient le jupon sur son corps, chiffonnèrent le tissu, et celui-ci rejoignit le corsage et les robes.
Il y eut une seconde de flottement pendant laquelle Ezio et Selene écoutèrent leur conscience leur rappeler une dernière fois ce qu'ils étaient sur le point de commettre. Il sembla à Ezio que le fantôme de Federico le jugeait, tapi dans un coin de la pièce.
Ezio n'osait pas baisser les yeux sur le corps de Selene. On ne regardait pas le corps de sa propre nièce ; il voulait oublier que c'était elle, toute nue et douce, qui se pâmait dans ses bras. Alors il la dessinait du bout des doigts, et les courbes qu'il traçait le rendaient fou de désir et de douleur.
Il effleura le velours de son sein, sa chair ronde et tendre, le téton tendu vers lui, et un râle mourut au fond de sa gorge.
Ezio avait connu des femmes, beaucoup de femmes, et rares étaient celles qui l'avaient excité à ce point. Si bien qu'il commençait à souffrir, serré dans ses culottes.
Il souffla la flamme de la bougie, respectant le contrat : pas de lumière, jamais dans la lumière ! Mais une petite chandelle oubliée sur le secrétaire projetait une clarté infime qui se reflétait au fond de leurs pupilles.
L'obscurité leur assurait aussi tranquillité. Le moindre bruit, la moindre lueur pouvaient les trahir et les perdre ; or on ne viendrait pas frapper, au beau milieu de la nuit, à la porte d'une chambre sans éclairage.
Il la poussa doucement vers le lit. Selene s'étendit avec la lascivité d'un chat sur les draps. Ezio se souvint de ce fameux matin où sans la reconnaître, ému par cette sensualité de chatte, il avait failli la posséder ; la même scène se rejouait entre eux, et cette fois aucun des deux n'avait envie de s'y soustraire.
Il s'extirpa de ses culottes et s'allongea entre les cuisses de Selene. Encadrant son visage de ses bras, il baisa gentiment ses joues, l'arête de son nez, la commissure de ses lèvres. La jeune femme soupira d'aise. Ainsi couchée sous lui dans sa chaleur, protégée par cette carrure mâle, il lui sembla qu'elle était intouchable. Rien ne pouvait plus l'atteindre, pourvu qu'ils s'étreignent.
Des larmes de bonheur lui piquèrent les yeux.
Elle murmura son nom, apprécia le détail de ses muscles qui se révélait sous ses paumes, depuis sa nuque, son dos, jusque la rondeur de ses fesses, et l'attira plus près d'elle encore.
Dans ce geste, elle effleura le bandage de lin qui couvrait la blessure. Ezio se crispa légèrement, mais la douleur s'estompa vite.
Elle sentit l'érection d'Ezio, nichée au creux de son aine, et se cambra légèrement, dans l'expectative de ce qui allait suivre. Elle soupira de nouveau lorsque la main d'Ezio se referma sur sa jambe, et remonta lentement vers l'intérieur de sa cuisse. L'homme grogna en découvrant qu'elle était déjà prête à le recevoir.
Il se délectait du spectacle que la lumière quasi inexistante parvenait tout de même à lui offrir. En proie à cette délectable douleur qui dévore parfois le bas-ventre, Selene se tortillait sur le lit, tremblait sur le pouce d'Ezio qui tourmentait avec une lenteur insolente son sexe gonflé et humide.
Elle le voulait, le réclamait. Les réflexes de son corps, qu'elle ne maîtrisait plus, ne trompaient personne.
N'y tenant plus, Ezio balaya le souvenir de Federico, saisit Selene, et s'enfonça en elle jusqu'à la garde.
La jeune femme s'arqua, le souffle coupé. Ezio l'emplissait toute entière, comme s'il avait été fait juste pour elle. Elle fut traversée d'un étrange sentiment de complétude.
Il se poussa profondément en elle, se mit à bouger, et les hanches de Selene roulèrent délicieusement contre les siennes en se calquant sur son propre rythme. Celui-ci sut d'avance qu'il ne tiendrait pas très longtemps. C'était doux, c'était chaud, c'était mouillé et divinement étroit. Il dut se contrôler pour ne pas jouir tout de suite.
Il prit le temps de la regarder, d'observer ce visage aux paupières closes renversé dans les édredons, ces lèvres entrouvertes et pulpeuses d'où s'échappaient de faibles gémissements. Une mèche de cheveux noirs tombait sur sa poitrine, s'enroulait gracieusement autour d'un téton. Il la trouva merveilleusement belle dans le plaisir, fragile et vulnérable dans cet abandon.
Il plongea la tête dans sa chevelure et respira son parfum, cherchant à oublier les pensées moralisatrices qui l'assaillaient.
Il aurait voulu que ce moment ne se termine jamais. Cela avait un goût d'infini, et semblait si irréel à la fois. Que Federico, Claudia, et tous les autres aillent au diable ! Leurs silhouettes bleues dans la pénombre, leur peau l'une contre l'autre, la volupté de leurs caresses et de leur union interdite leur vaudraient toutes les malédictions du monde ; tant pis. La chambre de Selene était une bulle, leur univers à tous les deux qui ne connaissait ni culpabilité ni remords.
La jeune femme haletait. Le plaisir montait, et Ezio accélérait la cadence. Selene perdait la tête : la sensation de son sexe dur et palpitant au fond de son ventre était exquise.
Ezio peinait à se contenir. Selene se resserrait autour de lui, elle vibrait, gémissait de plus en plus fort. Fort de sa longue expérience auprès des femmes, Ezio savait comment la mener à l'extase. Il attendit l'instant parfait, se redressa sur un coude, glissa deux doigts entre eux pour la toucher...
Selene s'arc-bouta, se tendit toute entière, et vint en quelques secondes. Des vagues de plaisir la submergèrent, coururent dans ses veines comme un flux tout chaud ; c'était bon à en perdre la tête. Ezio la bâillonna d'une main pour taire son cri. Il vint à son tour alors qu'elle pulsait autour de lui, qu'elle l'emprisonnait en elle, tel un délicieux étau.
L'orgasme fut puissant. Il enfouit sa figure dans le creux de son cou, hoqueta, se déversa en elle.
Et retomba, pantelant, sur sa poitrine.
Leurs cœurs battaient à tout rompre. Une douce félicité s'emparait de leurs membres fatigués. La jeune femme passa une main tendre dans les cheveux noir corbeau d'Ezio, sur son front couvert d'une fine pellicule de sueur.
Ils demeurèrent ainsi quelques instants, calmant leur respiration, reprenant leurs esprits. Puis Ezio roula sur le côté et rabattit les draps sur leurs corps las. Selene se blottit contre lui, refusant de rompre le contact.
Le Mentor déglutit, se tourna vers elle.
— Selene...
Mais la jeune femme posa un doigt sur ses lèvres pour l'empêcher de parler.
— Chut. Ne dis rien. Ne brise pas ce moment.
Elle ne voulait rien entendre : ni une voix couverte de honte, ni une amorce de regret, ni même les mots que se chuchotent d'habitude les amants après leur étreinte. Elle s'accrocha à lui et posa la tête sur son épaule.
Ils s'endormirent, et la chandelle mourut dans sa coupelle d'argent.
