Chapitre 2
Le trajet jusqu'à l'hôpital se déroula dans le calme le plus total. Tim était tellement plongé dans ses pensées qu'il avait laissé sa partenaire conduire, fait tellement improbable que cela l'inquiéta. Ce qui venait de lui tomber dessus était énorme et il allait devoir s'extériorise à un moment pour ne pas exploser.
Une fois arriver sur place, le policier descendit de la voiture et se rua à l'intérieur. Malgré l'urgence de la situation, la brune l'interrompit pour qu'il se pose.
-Lucy, il faut que j'y aille. S'il te plait, laisse-moi passer. Il faut que j'aille la voir, commença-t-il à deux doigts de s'énerver. Il savait que tous ce qu'elle faisait était pour son bien. Seulement, il avait du mal à réfléchir correctement.
-Évidemment qu'il faut que tu y ailles, mais pas dans cet état-là. Tu es à peine capable de parler et encore moins de conduire alors on va se poser deux minutes parce que foncer tête baisser c'est vraiment la dernière des choses à faire, commença-t-elle en s'approchant de lui, n'hésitant pas à osciller entre tendresse et détermination. Voyant qu'il n'arriverait pas à la faire plier, Bradford recula et alla s'asseoir sur un banc, à l'extérieur de l'hôpital.
-Je sais que tu n'as pas tort seulement, je ne sais pas trop quoi faire. Tout ça est tellement énorme, souffla-t-il entre de grandes inspirations, pour essayer de se calmer
-C'est normal. Je veux dire, ta vie vient de changer en un instant. Seulement, peu importe à quel point ces sentiments sont valides, tu ne peux pas les laisser te submerger. Il y a une petite fille tout prêt d'ici qui est terrifiée, perdue et traumatisée. Elle va avoir besoin que tu sois fort pour elle, que tu l'aides à se sentir à nouveau en sécurité.
-Qu'est-ce qu'il se passe si je ne sais pas comment faire ?
-Je suis persuadée que tu y arriveras et que tu vas être un père merveilleux. Tu m'as épaulé après mon enlèvement. Tu as réussi à me faire me sentir en sécurité et tu m'as aidé à reprendre confiance en moi ainsi qu'en mon jugement. Tu as été génial avec Angela après le Guatemala et tu nous as toutes les deux aidé à faire le deuil de Jackson. Je sais que Tamara t'adore et Genny n'aurait jamais pu aussi gérer tout ce que votre père a fait si tu ne l'avais pas autant protégé.
-Merci, murmura-t-il reconnaissant et peu habitué à autant de compliment.
-Il n'y aucun problème. Je sais que parlé n'est pas dans ton habitude et que ma façon de tout psychoanalyser peut être énervante mais si tu as besoin de démêler tout ce qui te passe par la tête, tu peux compter sur moi, rétorqua la jeune brune en lui prenant la main une nouvelle fois. Elle sentit son cœur fondre à ce contact, comme à chaque fois qu'ils avaient été amenés à se toucher. Cependant, elle repoussa ces sensations dans un coin de sa tête, pensant qu'elles n'étaient pas partagées.
-Dire que j'ai une fille. C'est vraiment dingue, sourit-il légèrement. Malgré les difficultés et toutes les émotions apportées par la situation, il ne pouvait empêcher d'être animé par un important sentiment de joie. Il avait tant rêvé de devenir père.
-C'est vrai que ça l'est … Est-ce que tu es prêt à y aller ? Interrogea Chen, le sentant plus calme. Elle savait à quel point il avait toujours souhaité avoir une famille et Lucy était heureuse qu'il puisse avoir cette chance, malgré les circonstances affreuses. Elle ne comprendrait décidément jamais Isabel. L'addiction est une maladie extrêmement grave mais elle ne saisissait pas comment il était possible d'abandonner un homme merveilleux comme Tim, lui cacher son enfant et surtout faire souffrir sa fille à ce point.
Dans un silence confortable, ils se rendirent à l'étage pédiatrique du l'hôpital. Ils se firent indiquer le numéro de la chambre par une infirmière. Seulement, ils furent interrompus en tombant sur les anciens beaux-parents du sergent.
-Robert, Grace, je ne sais pas quoi dire, je suis sincèrement désolé, annonça Bradford en les enlaçant brièvement. Malgré tout ce qu'il s'était passé et le fait qu'il n'était pas resté en contact avec eux, ils s'étaient toujours merveilleusement bien entendu avec le duo. Il les considérait presque comme les parents qu'ils n'avaient jamais réellement eu.
-Merci, c'est nous qui devrions nous excuser. Même si l'on s'attendait à ce genre de nouvelle, jamais l'on n'aurait pu imaginer qu'elle nous cache quelque chose comme ça, qu'elle te prive de ta fille et qu'elle puisse lui faire autant de mal. Mon dieu, pauvre petite, souffla la femme, visiblement sous le choc et accablée de chagrin.
-Vous n'y êtes vraiment pour rien et même si je suis encore vraiment sous le choc, ce n'est pas le moment de culpabiliser. Le plus important c'est d'être là pour Rose maintenant.
-Tu as raison mon garçon. Malgré la difficulté de la situation, nous ne pourrions pas pu imaginer meilleur père pour notre petite fille. Nous avons toujours pensé que tu serais parfait pour ce rôle à l'époque ou Izzie et toi étiez mariés … Je … Excusez-moi mais qui êtes-vous ? Demanda le beau-père de Tim, intrigué, en regardant Lucy qui se tenait en retrait, observant la scène discrètement.
-Robert, Grace, je vous présente l'officier Lucy Chen. Elle est ma partenaire, annonça Tim le plus simplement du monde. Il n'avait employé ni le terme collègue ni ami car aucun des deux ne collaient réellement. En effet, malgré le déni dans lequel il s'était englué, il savait qu'ils étaient bien plus que ça.
-Madame, monsieur, c'est un honneur de vous rencontrer malgré les circonstances tragiques. Tim m'a énormément parlé de vous. Je tenais à vous présenter mes sincères condoléances. Si vous avez besoin de quoi que ce soit, n'hésitez pas, énonça la jeune femme avec sa bienveillance habituelle. Le couple la remercia immédiatement, conscient que si leur ex-beau-fils lui faisait suffisamment confiance pour l'amener, c'était qu'elle devait être très importante pour lui.
-Est-ce que vous avez pu la voir ? Demanda Bradford fébrilement, pressé et anxieux à l'idée de rencontrer sa fille.
-Non pas encore, nous ne sommes pas arrivés depuis longtemps et l'assistante sociale ainsi que le médecin souhaitaient nous voir avant. Il paraît qu'elle refuse de parler ou de manger.
-J'en ai entendu parler, souffla le sergent très attristé.
Ils continuèrent à discuter tous les quatre pendant quelques petites minutes avant d'être rejoint par les professionnels ayant pris en charge l'enfant.
-Vous êtes la famille de Rose Bradford ? Interrogèrent deux femmes, l'une en blouse blanche, l'autre en tailleur. L'assemblée hocha la tête, encore peu habitué à leur nouvelle réalité.
-Comment va-t-elle docteur ? Interrogea Tim sans ménagement.
-Physiquement, elle ne va pas trop mal. Elle n'a pas été blessée pendant l'attaque. Cependant, nous allons la garder quelques jours pour des examens car elle est déshydratée, anémiée et carencée. On va lui faire des intraveineuses et s'assurer que cela n'aura pas d'impact sur le long terme. Nous devons aussi nous assurer qu'elle a bien bénéficier des soins dont elle avait besoin étant bébé, notamment ses vaccins car nous disposons de très peu d'information sur le suivi médical dont elle a bénéficié. Comme vous l'a expliqué la police, ses radios nous montre qu'elle a subis plusieurs fractures qui n'ont pas été soignée. Malgré ça, nous avons bonne espoir qu'avec un peu de temps et des soins appropriés, elle n'en garde absolument aucune séquelle. C'est tous ce que nous savons pour le moment. On ne peut pas dire qu'elle ait un dossier médical digne de ce nom. Nous disposons également de très peu d'information concernant le suivi prénatal de votre ex-femme ce qui est un peu inquiétant, particulièrement en raison de son addiction.
-Vous pensez qu'Isabel à consommer de la drogue pendant sa grossesse ? S'insurgea Grace qui était affligé par le comportement de sa fille malgré son deuil bien présent.
-Nous ne pouvons pas en être sûr. C'est une possibilité mais Rose ne semble pas avoir de symptômes classiques relatifs à une absorption de stupéfiant ce qui est une bonne nouvelle.
-C'est déjà ça … Psychologiquement, qu'en est-il exactement ? J'imagine qu'entre ce que vous venez de nous dire et le fait qu'elle ait assisté à toute la scène, la pauvre petite doit être très choqué mais concrètement, ça donne quoi … Est-ce qu'elle sait qui l'on est ? Demanda Robert. Etant lui aussi ancien policier, il a eu l'occasion de voir beaucoup d'enfants traumatisés. Ils savaient bien qu'aucun d'entre eux ne réagissaient réellement de la même manière.
-J'ai pu lui parler de ce qu'il s'était passé et de qui vous étiez mais je n'ai obtenu aucune réponse. Pourtant, je reste persuadée qu'elle comprend ce que l'on lui dit. Elle est très alerte, même trop, extrêmement observatrice. Elle dessine et à prix certains livres que l'on lui a donné. Il est clair qu'elle n'a aucun déficit intellectuel ou cognitif.
-Elle ne se sent pas en sécurité alors elle choisit de ne pas parler pour garder un semblant de contrôle. On ne peut pas dire que cela soit étonnant vu ce qu'elle vient de vivre, interrompit Lucy comme si c'était une évidence. Entre ses propres traumatismes, son travail dans la police et son bagage éducatif, la belle brune comprenait très bien le comportement de la petite fille. Cela ne l'inquiétait pas tant que ça, la parole pouvait mettre un temps à revenir, ce n'était pas handicapant. Ce qui l'inquiétait plus était son refus de se nourrir. Vu son état de santé précaire, elle avait besoin de reprendre des forces. Quand elle croisa le regard du sergent, elle comprit qu'il en était venu à la même conclusion. Après tout, il avait été à cette place en étant enfant.
-Est-ce que vous pensez que l'on peut la voir ? Demandèrent les deux aînés. L'assistante sociale hocha la tête puis ils se dirigèrent vers la chambre de Rose. Quand ils s'apprêtèrent à entrer Lucy se mit légèrement en retrait.
-Je pense qu'il vaut mieux que je reste dehors. Elle a déjà dû être confronté à beaucoup de nouvelles têtes depuis hier alors il vaut peut-être mieux y aller en douceur … Mais, je ne vais nulle part, je reste juste là, conclut la policière en observant le regard paniqué de Tim. Cela lui faisait de la peine de le voir si chamboulé. Seulement, elle était également honorée qu'il s'autorise à être si vulnérable devant elle car peu de gens ont eu l'occasion de voir cette face de lui.
-Tu as probablement raison … Lucy … Comment je suis censé faire pour qu'elle me fasse confiance ? Après tout, elle ne me connaît pas et elle doit être terrifiée et déboussolée.
-Je suis certaine que tu y arriveras. Tu sais mieux que personne ce dont un enfant a besoin pour qu'il se sente en sécurité. Cela prendra peut-être un peu de temps, vu l'ampleur de ce qu'elle a vécu, mais tu y arriveras, souffla la jeune femme de manière confiante et apaisante.
Après ces paroles de soutien, le policier se retourna et se prépara à entrer dans la chambre pour rencontrer sa fille, ne réalisant toujours pas à quel point sa vie allait être bouleversée.
