Chapitre 3

En pédiatrie, les chambres étaient bien plus confortables et mieux décorées que dans le reste de l'hôpital. Ainsi, quand Tim, Grace et Robert rentrèrent dans la chambre, ils purent voir une pièce aux murs colorés, des meubles confortables entourant le lit médicalisé, des images d'animaux accrochés un peu partout et le tout était éclairé par une grande fenêtre.

Après avoir scanné la pièce, leurs yeux se posèrent sur l'occupante de la chambre. Il s'agissait d'une petite blonde assez mince, à la peau claire et aux yeux d'un bleu très intense. L'assistante sociale les fit venir près du lit. -Rose, je te présente Tim, Robert et Grace. Je t'ai parlé d'eux tout à l'heure. Ce sont tes grands-parents et ton père. Ils aimeraient passer un peu de temps avec toi. Est-ce que cela te va ? Demanda la jeune femme, ne souhaitant pas la brusquer. La petite fille regarda successivement les trois nouveaux arrivants en détails puis retourna sans un mot à son livre. Vu qu'elle ne semblait pas perturbée plus que cela par leur présence, ils restèrent.

-Bonjour, Rose, comme te l'a expliqué l'assistante sociale, je m'appelle Tim. Je suis ton papa. Je suis tellement heureux de te rencontrer. Est-ce que tu veux bien que l'on s'installe un peu avec toi ? Demanda-t-il timidement. Après l'avoir observé pendant quelques secondes, elle hocha la tête. Les trois adultes s'assirent à côté du lit d'hôpital dans des fauteuils. Ils étaient très gênés et aussi ému, ne sachant pas par où commencer de peur de la brusquer. Pendant près de deux heures ils discutèrent tous les trois timidement de tout et rien en essayant de nouer un lien avec elle, sans toutefois la brusquer ou l'obliger à parler avant qu'elle ne se sente prête. Durant tout ce temps, la petite fille les avait observées de manière intriguée, ne sachant probablement pas quoi faire de toutes ces nouvelles informations. Après un long moment et quand ils la virent se mettre à somnoler, le trio décida de garder le silence

Le policier la regarda dormir, hypnotisé. Cette adorable petite blonde était sa fille. Il n'arrivait pas à y croire. Il avait rêvé d'avoir des enfants pendant tellement longtemps. C'était un rêve éveillé. Seulement, Tim aurait tout donné pour que les choses se passent autrement. Il aurait tout donné pour qu'Isabel lui parle de sa grossesse. Il aurait tout fait pour l'aider et même si cela n'aurait pas forcément marché. Au moins, cela aurait au moins permis à Rose de ne pas souffrir autant car il n'aurait jamais laissé personne faire du mal à sa petite fille. Plongé dans ses pensées, il n'entendit même pas Lucy entrer dans la chambre, plusieurs sacs dans les mains.

-Hey, que fais-tu là ? Tu n'as quand même pas attendu dehors tout ce temps ? Interrogea-t-il curieux.

-Non, en fait, j'en ai profité pour récupérer quelques petites choses. Je vous ai rapporté à manger puisque je me suis dit qu'aucun de vous trois ne voudrait quitter cette chambre. J'en ai aussi pris pour Rose au cas où cela la tenterait davantage que la nourriture de l'hôpital, ce qui serait compréhensible. Avant cela, j'ai rejoint Angela et Nyla à l'appartement d'Isabel pour lui rapporter quelques affaires. Je me suis dit que cela pourrait l'aider d'avoir des choses familières autour d'elle.

-Ce sont d'excellentes idées, très attentionnées, remercia Grace en chuchotant, commençant à comprendre pourquoi son ex-beau-fils semblait tant apprécier la jeune brune.

-C'est une très bonne idée, merci, souffla Tim en la regardant poser de la nourriture sur la table ainsi que des vêtements. Pour finir, la belle policière s'approcha du lit et y posa délicatement une adorable peluche en forme de dauphin. Sous le regard intrigué de son partenaire, Lucy s'expliqua.

-Il n'y avait que peu de jouets et d'affaires dans l'appartement, et encore moins en bon état. Seulement, cette peluche ne semblait pas abimée et elle avait été bien caché sous le matelas de Rose. Je me suis dit que cela signifiait qu'elle y tenait beaucoup.

-L'endroit où elles vivaient… C'était moche à ce point ? Interrogea la mère d'Isabel. Les deux hommes de la pièce avaient déjà eu affaire à assez d'appartement de drogué pour ne pas avoir à poser la question.

-Disons que ce n'est pas vraiment l'endroit le plus adéquat pour une enfant, lança-t-elle timidement, ne souhaitant pas accabler cette mère en deuil davantage. Perdre un enfant n'était jamais facile, encore moins dans des circonstances pareilles, et l'officier Chen savait que si elle laissait transparaître tout le mal que la blonde avait fait à sa fille, cela les blesserait encore plus.

Pendant un petit moment, ils firent le point sur les avancées de l'enquête et le couple de personnes âgées répondit à leurs questions tout en mangeant ce qui avait été apporté. Une bonne dizaine de minutes plus tard, Rose se réveilla en raison du bruit.

Toujours très silencieuse, elle observa les personnes faces à elle et plus particulièrement la nouvelle arrivante. Quand elle vit cela, la brune tenta une approche.

-Bonjour Rose, je suis une amie de Tim… Ton papa… Il faut que je te dise que je suis vraiment désolée pour ta maman et je te promets que l'on fera ce qu'il faut pour retrouver la personne responsable de cela. J'ai pensé que tu aurais peut-être faim alors j'ai ramené des petites choses à manger… Je suis aussi passé par ta maison et je t'ai ramené des affaires ainsi que ce petit bonhomme qui devait se sentir un peu seul sans toi, annonça Lucy en mettant la nourriture sur sa table de chevet et en lui tendant la peluche ramenée.

En voyant ce qui était son jouet préféré, les yeux de l'enfant grossir pour passer de la jeune femme à la peluche plusieurs fois. Puis, elle tendit la main pour attraper son dauphin et le serrer dans ses bras si fort quelle disparue complètement derrière le corps de la petite blonde. Cette dernière continua à câliner son doudou en se rallongeant dans le lit.

Les adultes se regardèrent attendris mais aussi légèrement attristés. La pauvre enfant avait visiblement vraiment besoin d'être rassuré, ce qui donnait une bonne indication quant à l'enfer qu'elle avait vécu.

Quelques minutes plus tard, Lucy reçu un message et fit signe à Tim de sortir. Ils retrouvèrent Angela, Nyla et Grey dans la salle d'attente.

-Hey, comment est-ce que tu te sens ? Interrogea Angela, consciente du tourment qui devait l'animer.

-J'ai l'impression d'avoir la tête qui va exploser vu tout ce qu'il s'est passé en moins de 24 heures… J'ai une fille Angela… Une fille de quatre ans qui est absolument adorable mais aussi traumatisée.

-J'imagine que ça doit être vraiment bouleversant mais s'il y a une chose de sûre, c'est que Rose a de la chance de t'avoir. Je sais que tu feras tout ce qu'il faut pour que tout ce qu'elle a vécu ne finisse par être qu'un mauvais souvenir et qu'elle ait la vie qu'elle mérite, s'exclama le lieutenant Harper en se passant de ses habituels sarcasmes. Elle imaginait facilement à quel point cela devait être perturbant d'apprendre que son ex-femme lui avait fait tant de cachoterie mais surtout qu'elle ait pu violenter un enfant. La policière savait à quel point la drogue pouvait faire des dégâts mais elle connaissait aussi le passé de son collègue et le traumatisme qui en résultait. Cela devait être très dur d'imaginer que sa fille ait vécu la même chose.

- Je ne suis même pas sûr de savoir comment faire. Je me retrouve d'un seul coup avec une fille de 4 ans et je n'ai pas été préparé à cela.

-Personne ne l'est fils, être parent c'est juste faire de son mieux tous les jours en faisant appel à son instinct et tu en as un excellent. En plus, en cas de besoin, nous sommes là. C'est à ça que ça sert la famille. Tout ira bien, rassura Grey de manière paternelle.

-Tu vas faire un super papa, Tim, sourit Lucy en posant tendrement une main sur son épaule sous le regard attendrie de l'équipe qui savait depuis longtemps que l'alchimie entre ces deux là n'était pas que professionnelle. Le policier se détendit à son contact et après avoir remercié ses collègues pour leur soutien, ils se mirent à parler de l'enquête.

Les policiers traquaient les diverses connaissances d'Isabel et ses possibles dealers pour dresser une liste de suspect mais la tâche était longue tant la blonde était tombée bien bas. Après avoir discuté un moment, les policiers furent rejoints par les anciens beaux-parents de Tim.

-Les heures de visite sont terminées, les médecins nous ont dit que nous devions partir, annonça Grace.

-Quoi ? Je ne veux pas qu'elle reste seule après ce qu'elle vient de vivre.

-Mon garçon, s'occuper d'un enfant c'est un marathon pas un sprint. On a tous besoin de se reposer après une journée pareil. Nous pouvons te raccompagner chez toi avant de rentrer, continua le père d'Isabel.

-Tu sais, ça pourrait lui faire du bien d'être un peu seule pour récupérer. Rose a rencontré beaucoup de monde en peu de temps. Elle a peut-être besoin de digérer tous ça, toi aussi d'ailleurs, renchérit Lucy, sachant bien qu'il ne lâcherait que s'il était persuadé que c'était ce qu'il y avait de mieux pour sa fille et non pour lui-même.

-Très bien … Je vais aller lui dire au revoir et on rentre mais je compte bien revenir à la première heure demain matin,conclut-il avant de se rendre dans la chambre. Avant de revenir, le sergent fit un crochet par la salle des infirmières pour leur donner son numéro de téléphone et leur demander de les prévenir au moindre problème.

Puis, il rentra chez lui, encore sous le choc de cette journée de dingue. En pilote automatique, il alla promener Kojo, le nourrit et alla prendre une douche. Après tous cela, il se décida enfin à appeler sa sœur Genny, pour la prévenir qu'elle venait de devenir tante. La belle rousse était presque autant sous le choc que lui, n'arrivant pas à croire ce que son ancienne belle-sœur avait pu faire subir à sa petite fille. Après avoir discuté pendant quelques minutes, la jeune femme raccrocha en prévenant son frère qu'elle s'organisait avec son quotidien puis prenait le premier avion pour Los Angeles.

Une fois seul avec ses pensées, Tim se mit à angoisser. Il avait toujours rêvé d'être père mais il y avait une petite partie de lui qui ne cessait de se demander s'il allait y arriver, s'il allait être capable de donner à ce merveilleux petit ange qui venait d'entrer dans sa vie ce dont elle allait avoir besoin pour grandir et guérir.

Il était parti très loin dans ses souvenirs d'enfance quand, il entendit sonner à la porte. Qui donc pouvait se pointer à une heure pareille ? Cela avait intérêt à être important car il n'était vraiment pas d'humeur. Le blond se leva pour aller ouvrir, prêt à rembarrer quiconque se trouvant à la porte, mais il se détendit immédiatement en voyant Lucy sur le pas de sa porte, avec dans sa main, un sac de nourriture venant de son restaurant préféré.

- Chen, je …

- Je sais ce que tu vas dire. Tu n'as pas faim, pas envie de discuter et tu as envie d'être seul mais il est hors de question que je te laisse ruminer dans ton coin complètement affamé après la journée que tu viens de passer alors nous allons manger et discuter … Si tu crois que je vais te laisser le choix, c'est que tu me connais mal, interrompit la belle brune, un peu anxieuse à l'idée de dépasser les limites implicites qui régissaient leur relation mais trop préoccupé par son état pour abandonner.

- Tu n'avais pas à faire ça tu sais … Tu en as déjà fait énormément aujourd'hui, souffla-t-il en lui souriant tendrement. C'était exactement le genre de moment qui avait tendance à lui faire oublier qu'il avait une petite amie, qu'elle était son ancienne élève, que jamais ses sentiments ne pouvaient être réciproques et que de toute façon, c'était une très mauvaise idée.

- Je sais mais j'en avais envie, sourit-elle en retour après qu'il se soit écarté de l'embrasure de la porte pour la laisser entrer. Avec la plus grande aisance du monde, Lucy entra et salua Kojo affectueusement puis elle se rendit directement dans la cuisine pour préparer la table. Cela le remuait un peu de la voir si à l'aise dans sa propre maison mais le policier se ressaisit immédiatement, de peur de partir trop loin dans ses pensées.

Quelques minutes plus tard, le duo se retrouva donc sur le canapé, à manger de la nourriture italienne, avec un match de football en fond sur la télévision.

- J'ai appelé Genny ! Elle vient aussi vite que possible.

- C'est une bonne chose. Tu vas avoir beaucoup à gérer en peu de temps. Tu risques d'avoir besoin d'aide.

- C'est sûr. Elle a essayé de garder son calme mais elle était aussi choquée que moi.

- C'est plus que normal mais Tim, je suis persuadée que tu vas être un papa vraiment merveilleux.

- Tu as bien vu à quel point elle avait l'air effrayé cette après-midi. Comment est-ce que je vais pouvoir l'amener à me faire confiance ? Après tout, elle n'a aucune raison de me croire quand je lui dis que je vais m'occuper d'elle. Non seulement toutes les personnes qu'elle a rencontrées jusque-là ont visiblement pris un malin plaisir à la faire souffrir mais en plus elle vient de voir sa mère se faire tuer et moi j'apparais au bout de 4 ans sans même savoir si Isabel lui a parlé de moi.

- Evidemment, ça risque de ne pas être simple mais sois toi-même et tout ira bien. Je sais que ce genre de retour dans le passé n'est jamais simple et que tu en parles peu mais tu sais mieux que personne ce dont elle a besoin. Donne lui tout l'amour et la sécurité dont tu aurais rêvé quand tu étais enfant et tout ira bien. Pour le reste ça viendra avec le temps. Après tout, tous les parents commettent des erreurs de temps en temps mais ça ne veut pas dire que ce sont de mauvais parents. Puis, tu peux compter sur nous tous pour t'aider en cas de besoin. Je ne vais nulle part, rassura la jeune policière.

- Merci … J'ai bien besoin de me vider la tête pour être prêt pour demain, ça te tente un film, proposa Tim, bien plus calme qu'en début de soirée. Il ne l'admettrait probablement jamais mais son opinion comptait plus que tout pour lui.

Après tout, Lucy était à la fois la personne la plus clairvoyante mais aussi positive qu'il ait rencontré. Elle avait un don pour voir le meilleur en tous et pour les pousser à faire toujours mieux. C'était inspirant et apaisant.

Après une bataille bon enfant pour savoir quoi regarder, ils s'installèrent confortablement pour regarder un film. En une journée, de nombreuses choses avaient changé, ce qui était aussi terrifiant qu'existant, seulement, il se dit, qu'avec le soutien de ses amis et sa famille mais aussi le désir ardent qu'il avait toujours eu d'être père, il pourrait définitivement y arriver.