Hello, hello!

Hey, regardez ça, ça fait trois publications à peu près régulière... J'appelle ça du progrès =)

Il y a des questions récurrentes à propos du nombre total de chapitres... Très honnêtement, je n'en sais rien. Beaucoup. On a à peine entamé cette partie de l'histoire.

Bon, je me doute que ce chapitre-ci risque de déclencher des foudres, je suis prête, j'ai mon visage stoïque ;) Y allez pas troooop fort quand même, c'est mauvais pour ma motivation. Je me tiens prête à me justifier au prochain chapitre et je répète encore, on est au tout début de cette partie donc, patience. Peut-être que vous vous dites que certaines choses sont gratuites mais qu'elles arrivent pour une bonne raison...

Je tiens à préciser que toute l'histoire, la trame générale, est prévue depuis longtemps donc bon... Si vous relisez l'armée et peut-être les cicatrices, vous verrez qu'on allait déjà un peu par là. (cette note d'auteur est en train de vous stresser je sens, mais c'est moi qui suis stressée, en fait).

Merci à Elisa pour la correction !

Enjoy & Review !


"Who gets to determine when the old ends, and the new begins? It's not a day on a calendar, not a birthday, not a new year. It's an event. Big or small. Something that changes us. Ideally, it gives us hope."

Grey's Anatomy

Qui décide de quand l'ancien se termine et la nouveauté débute ? Ce n'est pas un jour sur un calendrier, ce n'est pas un anniversaire, ce n'est pas une nouvelle année. C'est un événement. Grand ou petit. Quelque chose qui nous change. De préférence, cela nous fait espérer.

Grey's Anatomy.

Chapitre 14 :The Old Ends, The New Begins

Sirius tira sur sa cigarette, ses yeux gris perdus sur la lande qui s'étirait devant lui, retraçant du regard les rares pousses de végétation gelées par le froid vif. Il s'enfonça dans sa veste en cuir, se languissant du printemps qui tardait à venir. Il se demanda brièvement si c'était Voldemort qui influait sur le climat, si une telle chose était possible, puis se souvint que le mage noir avait plus d'un Détraqueur à sa disposition. Cela expliquait très certainement l'atmosphère morose qui planait sur le pays tout entier.

Le Magenmagot tardait à ratifier la proposition de Dumbledore de remplacer les Détraqueurs d'Azkaban par des gardes sûrs.

Ils le dégoûtaient, tous ces Sang-Purs qui s'accrochaient à leurs traditions séculaires, incapable de comprendre qu'elles causeraient leur perte.

Il tira une dernière bouffée de sa cigarette entièrement consumée, prenant garde de ne pas se brûler, puis jeta le mégot et l'écrasa d'un coup de talon. Pour plus de sûreté, il le fit disparaître d'un evanesco. Il ne tenait pas à déclencher un incendie par-dessus le marché.

« Sirius ? » appela son meilleur ami – ou aboya plutôt. Remus n'était jamais fou de joie après une nuit de pleine lune mais ce matin là, il remportait la palme de la mauvaise humeur. L'Animagus supposait qu'il était déjà heureux que le loup-garou ne semble pas garder trop de séquelles de la transformation.

Il se retourna et franchit les quelques mètres qui le séparaient du campement, vérifiant brièvement que les protections étaient toujours en place. Remus portait son éternel costume râpé aux coudes et Laura Flemmings était vêtue des vêtements que Sirius avait métamorphosés pour elle à partir d'une de ses chemises de rechange.

Un jour, il lui faudrait demander à McGonagall pourquoi un Animagus parvenait à conserver ses vêtements quand il se transformait alors qu'un loup-garou ne le pouvait pas.

« Petit-déjeuner ? » proposa-t-il à la cantonade, espérant alléger un petit peu l'atmosphère tendue.

« On a l'estomac plein de lapin, Sirius. » rétorqua Remus.

« Très vrai. » lâcha-t-il, tâchant de ne pas s'offenser du ton que prenait le loup-garou pour lui parler. « Vous avez avalé suffisamment de ces pauvres bêtes pour tenir trois jours. Moi, par contre, je… »

« Vous souvenez de votre transformation ! » s'exclama Flemmings, les yeux écarquillés.

« On a un copain Maître des Potions. » expliqua Sirius puisque Remus semblait déterminé à rester planté là et à les écraser tous deux de son aura autoritaire de grand méchant loup-garou. « Enfin, je dis copain… C'est plus une connaissance. » Il fit la grimace. « Je me sens mal d'avoir dit ça. Je crois que je vais vomir. »

« On a pas le temps pour tes bêtises. » gronda Remus. « Laura doit rejoindre le gros de la meute avant que quelqu'un ne remarque son absence. »

La jeune femme ne chercha même pas à dissimuler son élan de panique.

« Mais vous êtes venus me chercher ! » protesta-t-elle. « Vous m'avez marquée ! J'appartiens à votre meute maintenant ! Vous et votre… » Son regard ambré s'arrêta sur Sirius, hésita…

« Ami. » compléta-t-il avec un sourire encourageant. « Animagus à mes heures perdues. On ne s'est pas vraiment présentés… Sirius Black, enchanté. »

Elle serra la main qu'il lui offrit mais ne se détendit pas pour autant.

« Vous êtes ma meute. » insista-t-elle.

« Je ne suis pas un loup-garou. » corrigea-t-il.

« Mais vous êtes marqué, je le sens. » déclara-t-elle en fronçant les sourcils. « Il est votre Alpha. »

« Ou pas. » se moqua gentiment Sirius, sans dissimuler son sourire amusé. Il asséna un coup de coude à Remus mais au lieu d'en rire ou de la contredire, il émit un léger grondement réprobateur. « Tu es sûr que cette potion ne fait plus d'effet ? »

À chaque fois qu'il croisait le regard de son ami, il lui semblait apercevoir la lueur sauvage du loup.

« Je suis à nouveau moi-même. » confirma Remus. « Simplement plus… apaisé. Je pense que c'est le mot. »

« Tu as l'air apaisé comme moi sur le point de me déclarer membre honoraire de la Maison Serpentard. » contra-t-il.

« Bref. » reprit Remus, en lui intimant de se taire d'un geste de la main. « Laura, j'ai besoin que vous retourniez vers Greyback, retrouviez sa place dans la meute et voliez un échantillon de la potion qui permet de se transformer en dehors des cycles lunaires. De préférence rapidement. »

« Si vous voulez bien nous aider. » amenda Sirius, un peu froidement. L'attitude de son ami l'agaçait. « On ne vous force à rien. Si vous préférez rentrer à Londres avec nous, on… »

« Non. » coupa Remus. « Albus a été très clair avec moi. Nous sommes tout à fait prêt à vous protéger, Laura, je suis tout à fait prêt à vous protéger. Mais il nous faut cette potion, comprenez-vous ? »

La jeune femme avait l'air désabusé. Elle coinça ses mèches brunes derrière ses oreilles et leur adressa un sourire ironique. « Je comprends surtout que je n'ai pas le choix. Vous m'avez marquée. Vous êtes mon Alpha. Je ne peux désobéir à vos ordres. »

Sirius resta figé face à cet échange. Il n'avait pas anticipé ce cas de figure là.

« C'est une blague ? » osa-t-il demander, avec un soupçon d'espoir. Il n'y croyait pas lui-même mais peut-être que… Peut-être… L'expression fermée, à peine désolée, de Remus fit voler en éclats toutes les illusions qui lui restaient. « Merde. » cracha-t-il avec dégoût. « Je ne cautionne pas ça, moi. » Il se tourna vers Laura. « Si vous voulez nous aider, de votre plein grès, c'est une chose. Si vous avez trop peur, si vous ne vous pensez pas capable de le faire, alors vous rentrez avec nous. Je vous protégerai, moi. »

Il ne pourrait pas l'emmener au Q.G. naturellement, mais il pouvait trouver autre chose. Il avait écumé pas mal de cachettes durant sa cavale. Il connaissait des grottes, des villages perdus, des endroits qui, sans êtres agréables, étaient sûrs…

« Ce ne sont pas tes affaires, Sirius. » cingla son meilleur ami. « Ce sont des affaires de loups et, en l'occurrence, Laura a raison. Je suis son Alpha maintenant. Rien ne te contraint à obéir parce que tu n'es pas vraiment un loup mais elle l'est. »

« De la merde. » riposta-t-il. « Le temps des esclaves, c'est fini, Remus. Réveille-toi ! Mais qu'est-ce qui t'arrive ? Je ne te reconnais pas. »

C'était la potion. C'était forcément la potion. Quelque chose avait mal tourné et…

« Je n'ai jamais eu de meute avant. » déclara Remus, dans un haussement d'épaules. « Pas une meute à moi. James… »

« Tu divagues. » accusa-t-il, plongeant la main dans sa poche à la recherche de sa baguette, prêt à jeter un stupefix si cela devenait nécessaire. « On n'était pas une meute. On était une famille. »

« Et que croyez-vous qu'est une meute ? » intervint doucement Laura Flemmings. « Pourquoi pensez-vous que les loups solitaires sont si malheureux ? Pourquoi pensez-vous qu'ils dépérissent si vite ? Les loups ne sont pas faits pour vivre seuls. Ils sont faits pour la meute. Je ne l'avais jamais compris avant de rejoindre celle de Greyback. Ils m'ont forcée à la rejoindre, c'est vrai, mais maintenant que j'ai goûté à ce que c'est de ne plus être une solitaire… »

Elle inclina la tête sur le côté et, l'espace d'un instant, elle ressembla à l'énorme louve grise-noire qu'il avait observée cavaler sur la lande, la moitié de la nuit.

« Un échantillon, c'est tout ? » demanda-t-elle. « Après, vous ne demanderez plus de me mettre en danger ? Je peux vous faire confiance ? »

Remus plaça la main sur l'épaule frêle de la jeune femme avec une gravité qui fit froncer les sourcils à Sirius.

« Vous appartenez à ma meute maintenant, Laura. » murmura l'ancien Professeur, si bas que l'Animagus eut du mal à l'entendre. « Vous êtes ma responsabilité. »

Les deux loups-garous se dévisagèrent en silence quelques secondes puis Laura baissa les yeux en ce qui ressemblait fort à une marque de soumission.

« Très bien, dans ce cas. » répondit-elle.

« Vous n'êtes pas obligée. » répéta encore Sirius, l'estomac noué par la certitude que c'était mal de la forcer à espionner pour eux. Ce n'était pas rien qu'ils exigeaient d'elle. Cela pourrait se révéler extrêmement dangereux.

Il préféra s'éloigner tandis que Remus s'enquérait de si elle était capable de produire un Patronus corporel et lui apprenait le sort nécessaire à la transmission de messages.

Il donna un violent coup de pied dans un caillou et tira une autre cigarette du paquet cabossé qu'il gardait dans sa poche. Il ne bougea pas, gardant le dos tourné au campement, même lorsqu'il entendit Laura partir et Remus commencer à ranger malgré les grognements de douleur réguliers et les soupirs las.

Lorsqu'il eut terminé sa cigarette, il en entama une autre.

Et lorsque Remus lui tendit son sac à dos, Sirius le lui arracha presque des mains, le passa sur son dos et se transforma en gros chien noir.

Il trotta loin devant son ami jusqu'à ce qu'ils aient finalement atteint les protections anti-transplannages.

Une fois certain que Remus les avait lui aussi franchies, il redevint humain et transplanna sans attendre les explications que le loup-garou ne semblait, de toute manière, pas bien pressé de donner.

°°O°°O°°O°°O°°

« Mais qu'avez-vous dans la tête ? » grinça Granger. « Vous êtes aussi inconscient l'un que l'autre ! »

Draco échangea un regard exaspéré avec Potter par-dessus la table des Serdaigles – un moment de complicité qu'il aurait nié sous la torture – et tenta d'échapper aux doigts de la jeune fille qui palpait l'hématome sur sa joue. Rien à faire, cependant, elle bloquait son visage d'une prise de fer sur son menton.

« Tu aurais préféré que je laisse Malfoy se faire tabasser ? » s'enquit innocemment Potter, légèrement moqueur.

« Je maîtrisais parfaitement la situation. » maugréa-t-il.

« C'est l'évidence même. » lâcha une voix familière dans son dos.

Un sourire ravi se peignit sur les lèvres d'Hermione et Ginny accueillit la nouvelle venue avec une exclamation chaleureuse. Soulagé d'échapper à l'attention de Granger, Draco laissa les filles se jeter sur sa cousine, croquant dans son toast sans se laisser perturber et ignorant les regards curieux que leur jetaient les adolescents alentours.

À la table des professeurs, personne ne bougea. Draco en conclut donc qu'elle n'était pas là par hasard et cela signifiait…

« Dis donc… » lança Tonks, en agrippant son épaule meurtrie. « Il me semblait avoir dit pas de conneries. » Il dégagea délicatement son épaule. Toutefois, lorsqu'elle parut réaliser qu'elle lui faisait mal, elle fronça les sourcils. « Tu as bien vu Madame Pomfresh, au moins ? »

« Comment es-tu au courant ? » marmonna-t-il, appréciant peu le scandale qu'ils étaient en train de causer. Se faire sermonner en public à la table du petit-déjeuner manquait singulièrement de classe et l'expression triomphante de Granger – selon qui ils auraient mieux fait d'immédiatement aller chercher un Professeur ou un des deux préfets-en-chef plutôt que de rendre justice eux même – l'irrita au plus au point. Au moins, songea-t-il, elle n'était pas vêtue de manière trop excentrique. Le jean bleu foncé, le corset vert sombre passé sur un haut à manche longue violet foncé, le tout agrémenté d'une veste en cuir… Elle avait certainement fait pire même avec la tête de mort qui ornait sa boucle de ceinture et les cheveux marron souris qui encadraient son visage.

« J'ai reçu un hibou de Snape à l'aube. » grinça-t-elle. « Il m'a convoquée dans son bureau pour parler de ton comportement. Tu sais ce que je déteste, Draco ? Arriver en retard au boulot. Et tu sais ce que je déteste vraiment ? »

« Passer du temps en compagnie de Snape ? » suggéra-t-il, pince-sans-rire. « Je ne peux pas te le reprocher, il n'a jamais été très drôle mais en ce moment il est sérieusement coincé. »

« Ce n'était pas la faute d'Harry et de Malfoy. » intervint Ginny, tout en découpant efficacement une mandarine en quartiers. Elle en offrit la moitié à Granger.

Ce témoignage de bonne foi ne parut pas convaincre son Auror de cousine.

« Oh, vraiment ? » ironisa-t-elle. « Dans ce cas, c'est une erreur, pas vrai ? Ils n'ont pas obligé trois garçons à passer la nuit enfermés dans une armoire ? »

« Ils ne l'avaient pas volé. » déclara simplement Potter.

Potter, qui, lui, n'avait pas été tiré du lit par un elfe de maison lui ordonnant de s'habiller au plus vite et de se présenter dans le bureau de son Directeur de Maison pour répondre de ses actes. Potter, à qui personne n'avait fait la morale pendant plus d'une demi-heure. Potter, qui avait été tranquillement attablé avec leurs amis, ignorant avec détermination les remontrances de plus en plus virulentes de Granger. À peine si McGonagall s'était arrêtée sur son chemin vers la table des Professeurs pour lui ôter quelques points.

Le monde était injuste.

« Je n'en doute pas. » accorda sa cousine. « Mais retourner dans vos salles communes comme si de rien n'était ? Je vous pensais un petit plus responsables que ça. Ou au moins plus malins. Quitte à faire quelque chose dans ce genre, arrangez-vous au moins pour ne pas vous faire attraper. Les enfermer dans une armoire… Vraiment ! Quelle idée ! Ne commettez jamais de meurtre, vous vous ferez coincer en moins de deux. »

Il y eu un long silence à table puis Blaise, qui s'était jusque là tenu silencieux, eut une quinte de toux qui ressemblait à s'y méprendre à un fou rire. Ginny explosa une seconde plus tard, suivie de Potter, de Daphné qui, de l'autre côté de Blaise, avait hoché la tête tout du long du discours réprobateur de Granger.

Inutile de dire que la Gryffondor fut la seule à ne pas partager l'hilarité générale bien qu'elle dut lutter pour ne pas laisser percer un sourire amusé.

« Tu sais, Nymphadora… » observa Draco. « Je pense que tu as encore beaucoup à apprendre en matière d'éducation. Toast ? »

Il lui tendit un toast encore chaud, débordant de beurre. Elle fixa le bout de pain du regard, le dévisagea avec un air sérieux qui sonnait faux, puis leva les yeux au ciel et haussa les épaules. Elle attrapa le toast, en croqua la moitié d'un coup de dents puis fit signe à Blaise de se pousser afin qu'elle puisse s'asseoir avec eux.

« J'étais venue te passer le sermon du siècle. » marmonna-t-elle avec une contrarié certaine.

« Ne vous inquiétez pas, Hermione s'en ai déjà chargée. » répondit Daphné.

« Oh, tu peux me dire tu. » protesta sa cousine et, avant que Draco ait comprit ce qui était en train de se passer, les présentations étaient expédiées et Tonks s'était intégrée au groupe comme si elle en avait toujours fait partie. Elle lui vola son assiette et son gobelet et s'offrit un petit-déjeuner aux frais de Poudlard. Si elle perçut les regards réprobateurs en provenance de la table des professeurs, elle n'y prêta aucune attention.

« Merde ! » s'exclama-t-elle, au bout d'un long moment, avant de jeter un rapide Tempus. « Oh, merde, je suis en retard, Snape va avoir ma peau… » Elle asséna à Draco ce qui devait sans aucun doute être une bourrade amicale dans son imagination. « Tout ça, c'est ta faute. La prochaine fois, tiens toi tranquille, cousin, ou alors ne te fais pas prendre. »

Il acquiesça, massant distraitement son épaule douloureuse.

Toute trace d'amusement disparut du visage de sa cousine.

« Vas voir Madame Pomfresh avant le début des cours. » ordonna-t-elle. « Je me fiche que tu doives rater la première heure. » Elle jeta un coup d'œil à Potter, fit un rapide inventaire des hématomes visibles sur le Survivant et pinça les lèvres. « Toi aussi, Harry. »

Elle ne s'éclipsa de la Grande Salle qu'après que Draco ait juré qu'il irait trouver la Magicomage.

« Je l'aime bien. » décréta Daphné.

« Elle est géniale. » contra Ginny, avec un enthousiasme débordant.

« C'est certainement un personnage. » renchérit Granger.

« C'est un complot. » déclara Draco, pour ne pas être en reste.

Il fit face à cinq paires d'yeux dubitatives ou désarçonnées.

« C'est un complot. » insista-t-il. « Je suis la victime dans cette histoire et non seulement me voilà tiré du lit à l'aube comme un criminel, forcé d'écouter Snape monologuer, et on sait tous combien il aime s'écouter parler… »

« Un peu comme toi. » intervint Ginny, dans un soupir.

Il ne daigna pas se laisser distraire par une attaque aussi basse.

« Puis il convoque ma tutrice, sans aucun doute pour monologuer davantage. » continua-t-il. « Et pendant ce temps, tout le monde félicite Saint Potter et le congratule en lui tapant dans le dos. »

Loin de s'offusquer du titre moqueur dont il venait de l'affubler, Potter porta son gobelet de jus de citrouille à ses lèvres et observa d'un air distrait la nuée d'hiboux qui venaient de pénétrer dans la Grande Salle.

Ginny termina sa mandarine, retournant à son étude précipitée de son manuel de Sortilèges.

Granger s'était détournée pour conseiller un première année qui venait de l'aborder timidement pour un problème quelconque.

Daphné corrigeait sa manucure de légers coups de baguette.

Quant à Blaise, il remuait les feuilles de thé collées au fond de sa tasse comme s'il cherchait à y lire l'avenir – ou, plutôt, à éviter de faire cas des revendications pourtant justifiées de Draco.

« Personne ne va relever l'injustice de la situation ? » insista-t-il.

Potter était désormais occupé à cajoler la chouette qui venait d'atterrir à côté de son assiette.

Ginny ne leva pas les yeux de son livre.

Granger lui tournait à présent complètement le dos.

Daphné semblait absorbée par ses ongles.

Blaise…

Il ne laissa pas le choix à Blaise. Il boucha la tasse de sa main et leva les sourcils, lui intimant de répondre.

Il le regretta aussitôt lorsque son meilleur ami, loin de se laisser intimider, offrit avec un grand sourire : « Tu sais… C'est comme ça que ces vilaines rumeurs sur ton obsession pour Potter se répandent… »

Et ce coup-ci, ces traitres d'amis éclatèrent tous de rire comme s'ils n'avaient tous prétendus être trop occupés pour entendre ses doléances.

Ramassant les morceaux épars de sa dignité, Draco se leva et alla rejoindre Weasley, Brown, Lovegood, Londubat et Habbot à la table des Poufsouffles, espérant y trouver davantage de compassion.

°°O°°O°°O°°O°°

« Pourquoi Miss Tonks est-elle ici ? » s'enquit discrètement Albus, en se penchant vers sa sous-directrice.

Autour d'eux, les professeurs continuèrent leur repas, inconscients des sortilèges qui les empêchaient de suivre cette conversation en particulier. Non qu'Albus ait prévu de confier quelques informations sensibles à Minerva mais il préférait généralement s'assurer que leurs discussions demeurent entre eux. Les rumeurs, dans cette école, circulaient plus vite que la grippe en hiver.

Loin de lui prêter l'attention qu'il aurait désirée, Minerva continua de sucrer son gruau matinal. Elle le battait froid depuis quelque temps, plus longtemps qu'il n'aimait l'admettre, d'ailleurs. Leurs rares querelles étaient généralement courtes et il parvenait à se faire pardonner ses fautes assez facilement. Toutefois, la bouteille de scotch hors d'âge qu'il lui avait portée avec été accueillie d'un simple « merci », le livre d'une édition rare sur la Métamorphose des fluides qu'il lui avait offert avait remporté un plus franc succès mais si elle s'était fendue d'un sourire, elle avait pourtant continué à bouder leur partie d'échecs hebdomadaire.

Minerva McGonagall le battait froid et Albus, qui était habitué à ce qu'elle lui accorde sa pleine attention et s'en remette à lui pour toute chose, détestait cela.

« Minerva… » plaida-t-il, en l'observant par-dessus ses lunettes en demi-lunes.

« Cessez de me dévisager avec vos yeux de chien battu, Albus. » le pria-t-elle avec agacement. « Tonks est ici parce que Potter et Malfoy se sont battus avec des septième année et qu'elle est responsable du jeune Malfoy. »

« Harry s'est battu avec des septième année ? » releva-t-il, en levant les sourcils. « Et pourquoi donc ? »

« Pourquoi donc… » répéta-t-elle en grommelant. « Parce que ce garçon semble penser qu'il lui incombe de rectifier tous les torts. »

Elle lui résuma les faits de manière concise et Albus se rasséréna.

« Il ne s'est donc pas tant battu qu'il est venu en aide à un camarade. » corrigea-t-il.

Minerva cessa de remuer son porridge pour le fusiller du regard.

« Puis au lieu d'aller avertir un professeur, il a enfermé leurs agresseurs dans une armoire, avec l'aide de Malfoy, où ils ont passé la nuit. » insista-t-elle. « N'envisagez pas de le récompenser pour une telle idiotie. Je lui ai ôté des points. Étant donné la nature de l'affaire, je juge la punition suffisante. Que le Professeur Snape ait choisi de convoquer la tutrice de son élève le regarde. »

Albus préféra ne pas relever ce dernier point, baladant son regard affûté aux quatre coins de la Grande Salle. Il était agréable de voir toutes les Maisons réunies. Bien que le vert prédominât toujours à la table des serpents, les couleurs se mélangeaient. S'il devait tirer une seule fierté de son temps en tant que Directeur de Poudlard, ce serait sans doute l'union nouvelle des Maisons. La période n'était pas à la ségrégation que la compétition amicale entre les disciples de Gryffondor, Poufsouffle, Serdaigle et Serpentard engendrait.

Ses yeux bleus s'arrêtèrent sur Harry et pétillèrent de plaisir en le voyant discuter vivement avec Tonks qui s'était attablée avec les élèves avec un naturel désarmant. Il était bon de voir le garçon abandonner la morosité qui semblait lui coller à la peau dernièrement.

Albus mit cela sur le compte de cette bagarre. Clairement, l'adolescent avait besoin de se sentir mis à contribution et l'entraînement de Remus ne portait pas les fruits que le vieux sorcier avait escomptés. Les rapports du loup-garou étaient élogieux et inquiets tout à la fois. Harry était un excellent duelliste, mais trop sûr de lui et, à entendre l'ancien Professeur de Défense, trop prompt à jouer l'offensive.

Ils étaient en guerre, il était sans doute préférable que le Survivant sache se défendre correctement. Il craignait, cependant, que l'enseignement de Severus ne l'ait encouragé vers une approche trop… Serpentard du combat où la fin justifiait les moyens. Et, bien qu'il n'y ait certes aucun mal à employer tous les moyens nécessaires pour survivre lors d'une bataille, Albus se plaisait à penser qu'il ne fallait pas pour autant se défaire d'une certaine éthique. Les mages noirs et leurs partisans étaient souvent des sorciers et sorcières qui avaient rejeté toute trace de morale.

« Miss Tonks semble regretter les jours de sa scolarité. » remarqua-t-il négligemment. « Elle est souvent sur le domaine… »

La cuillère cogna contre le bord du bol dans un tintement d'acier et de faïence.

« Que cherchez-vous, Albus ? » demanda ouvertement la Directrice des Gryffondors, en le dévisageant avec attention.

« Vous me peinez, Minerva. » offrit-il, tout aussi honnêtement.

« Vous m'en voyez désolée. » répondit la sorcière, plus âprement que nécessaire. « Il se trouve que j'apprécie la compagnie de Tonks. Cela vous pose-t-il problème qu'elle me rende régulièrement visite ? »

Le mensonge était limpide comme de l'eau de roche. Il n'eut même pas besoin d'user de Légilimencie. Il la connaissait trop bien.

« Absolument pas. » nia-t-il.

Que Severus, Minerva et Tonks mènent leur enquête. Peut-être débusqueraient-ils cet espion, qui l'éludait toujours, plus vite que lui. Il avait, de toute manière, prévu de confier cette mission là au Maître des Potions. Enfin… Avant de voir l'état apocalyptique de ses défenses mentales.

Qu'ils se soient rendus compte que quelqu'un au sein de l'Ordre livrait des informations à l'ennemi et aient entrepris de le démasquer ne le dérangeait pas. Qu'ils aient choisi de lui dissimuler les faits et agissent dans l'ombre, en revanche, lui déplaisait.

Et il n'était pas bien difficile de deviner qui donnait les ordres…

« L'heure n'est pas à la division, Minerva. » rappela-t-il doucement, en découpant d'un geste précis un bout de son œuf au plat avec sa fourchette. « Rien ne pourrait nuire davantage à l'Ordre que des factions qui s'affronteraient en son sein. »

La sorcière fronça les sourcils et continua à manger son gruau, fronçant les sourcils pour méditer cet avertissement pour le moins explicite.

« Il n'est pas question de lutte de pouvoir. » rétorqua-t-elle. « Toutefois, il serait peut-être temps que le Conseil devienne véritablement un Conseil. Pourquoi l'appeler ainsi lorsque vous êtes seul à prendre les décisions ? Nous avons déjà un tyran au Royaume-Uni, Albus, je pense que cela est amplement suffisant. » Elle abandonna sa cuillère dans le bol encore à moitié plein et se leva. « Si vous voulez bien m'excuser, l'un de nous doit s'assurer que cette école fonctionne encore et une mer de papiers à signer m'attend. »

« Je serais dans mon bureau toute la matinée. Envoyez-moi ce qui vous encombre. » offrit-il.

« Ne retournez-vous pas au Ministère ? » s'enquit-elle avec surprise, s'immobilisant près de sa chaise. Filius lui jeta un coup d'œil curieux qu'elle ne vit pas. « Je pensais que le Magenmagot… »

« Le Magenmagot ne se décide pas à se passer de Détraqueurs et Lucius Malfoy l'encourage fortement à s'opposer à mes propositions de mesures préventives. » coupa-t-il, dans un soupir las. « Les Détraqueurs sont la seule garantie que les prisonniers toujours détenus à Azkaban y restent, prétend-il. »

Lucius était un excellent politicien. Il était regrettable qu'il œuvre pour le camp adverse.

Enfin, officiellement du moins.

« Le Ministre s'adressera à eux dans la journée mais j'ai peu d'espoir. » conclut-il.

Minerva pinça les lèvres et secoua la tête.

« Fous, tous autant qu'ils sont. » commenta-t-elle.

« Espérons juste que leur folie ne signera pas notre perte à tous. » déclara-t-il.

°°O°°O°°O°°O°°

Cela faisait longtemps que Remus n'avait pas visité Pré-au-Lard de bon matin. Depuis son temps en tant que Professeur de Défense probablement. Il regrettait souvent cette période… Il n'avait jamais été aussi heureux qu'à Poudlard, en tant qu'élève d'abord, et puis, par la suite, comme enseignant.

Était-ce la transformation harmonieuse de la nuit dernière qui influait sur lui ?

Malgré la douleur lancinante dans ses os et ses muscles, contrecoup naturel de toute transformation loup-garou, il se sentait bien, en paix avec lui-même, comme si un voile s'était levé. Pour la première fois depuis des années, le loup ne raclait pas à la porte de son âme de ses longues griffes aiguisées. La porte était finalement ouverte et Lunard n'était pas loin.

Le pâle soleil lui paraissait plus brillant, il appréciait l'air vif qui lui piquait la peau, humait l'air qui sentait bon le pain chaud, se réjouissait de l'agitation matinale qui animait le village…

Seul ombre noire au tableau : Sirius marchait deux pas devant lui, les mains enfoncées profondément dans les poches de sa veste en cuir, le dos raide.

Son meilleur ami était contrarié, ne comprenait pas… Le loup se serait ébroué de mécontentement face à ce manque de respect envers la hiérarchie de la meute mais Remus ravala son agacement, capable de rationaliser le comportement de l'Animagus.

Sirius n'était pas un loup-garou et certaines choses éludaient ceux qui n'avaient jamais été mordus. Parfois, elles éludaient même les lycanthropes. Laura avait si bien résumé les choses plus tôt… Il y avait un pouvoir dans la meute et s'il en avait eu un aperçu à l'époque des Maraudeurs, il n'y avait véritablement goûté que cette nuit là, lorsqu'il avait marqué Laura.

Remus s'était toujours considéré comme un suiveur. Trop timide, trop blessé par la vie, trop certain de sa propre monstruosité… Il n'était pas un écorché vif comme Sirius et ne s'était jamais rabaissé en permanence comme Peter avait l'habitude de le faire. James l'avait ébloui de sa confiance en lui, de sa fraicheur et de sa bonne humeur, comme il avait ébloui les deux autres. Jamais il ne lui serait venu à l'esprit de chercher à prendre le contrôle de leur petite bande durant leur adolescence… James était le chef, James était l'Alpha et Sirius le secondait. Cela avait toujours été clair dans sa tête comme dans celle du loup.

Il était sans doute incongru qu'un loup-garou se soumette à un cerf mais cela avait toujours paru naturel à Remus.

Et puis, inévitablement, la meute l'avait rejeté. Qui avait été le premier à douter de lui ? James ou Sirius ? Il ne s'était jamais décidé à poser la question. Les mensonges que Peter savait si bien distiller en petites doses avaient sans aucun doute fait leur effet. Ils étaient devenus distants, s'étaient petit à petit détachés de lui, lui avaient fait sentir qu'il n'était plus le bienvenu…

Il était redevenu un loup solitaire.

Laura avait raison, toutefois, les loups solitaires étaient malheureux, dépérissaient plus vite que ceux qui choisissaient de vivre ensemble. Avant que Greyback ne réunissent tous les loups sous sa bannière, il y avait eu quelques communautés au Royaume-Uni, des enclaves d'une dizaine de loups qui vivaient ensembles et ne s'en portaient pas plus mal.

Lunard l'avait aidé à réaliser son désir latent pour une nouvelle meute, quelque chose de semblable à ce qu'il avait connu durant son adolescence. Il avait un temps nourri l'espoir que l'Ordre pourrait lui apporter cette sensation d'appartenance à quelque chose de plus grand que lui mais il avait déchanté très vite. Si l'Ordre était une meute, Dumbledore y régnait en maître et Remus avait fini de se soumettre.

« Sirius. » lâcha-t-il, lorsqu'ils eurent dépassé les limites du village et qu'il s'engagèrent sur le chemin qui menait à Poudlard. L'appel claqua comme un ordre dans l'air froid. Laura aurait détecté la note autoritaire et se serait instinctivement arrêtée, l'Animagus ne l'entendit pas ou choisi de l'ignorer.

Pour Sirius, il n'était pas un Alpha, il ne méritait ni obéissance, ni respect, ni reconnaissance…

À peine sa méfiance.

Il ne fallait pas croire qu'il n'avait pas remarqué le manège de son ami. Les recherches qu'il refusait de partager avec lui, les messes-basses avec Severus, la rancune tenace qu'il vouait à Albus et l'accusation tacite envers lui qui prenait un peu trop souvent le parti du Directeur…

Il n'était pas aveugle, il voyait bien que, bien qu'ils s'acharnaient tous les deux à prétendre le contraire, leur complicité d'antan était fugace au mieux et feinte au pire. Ils avaient des bons jours et des mauvais. Des jours où il était facile d'imaginer que rien n'avait changé et d'autres où la trahison de James et Sirius revenait le hanter comme un coup de poignard en plein cœur.

Remus aimait Sirius comme un frère.

Mais les choses étaient différentes et il refusait d'être à nouveau le bon copain qui le suivait dans toutes ses bêtises. Douze années passées à se débrouiller seul lui avaient donné un goût d'indépendance. Sans parler du fait que le jugement de Sirius laissait grandement à désirer…

« Sirius, tu vas t'arrêter, oui ? » gronda-t-il.

Il fut presque étonné que son ami ne tique pas. Pour lui, l'écho de Lunard dans sa voix était tonitruant. Il lui faudrait parler à Severus. Cette nouvelle version de la potion Tue-Loup était révolutionnaire. Elle allait changer la vie de tous les loups-garous. Ne serait-il d'ailleurs pas plus juste de parler de Révèle-Loup ? Il lui faudrait suggérer le nom. Le Maître des Potions était certain de se faire un nom avec cette découverte – non qu'il ait besoin de se faire un nom. Remus soupçonnait que s'il avait pu se consacrer davantage à ses recherches qu'aux activités de Voldemort, il serait probablement déjà réputé dans tout le monde magique comme un des potionistes les plus brillants de leur époque.

« Ou sinon quoi ? » riposta son ami, alors qu'il dépassait l'imposante ruine de la Cabane Hurlante. « Tu vas me punir comme un bon chef de meute, peut-être ? Je tremble de peur, Remus. » Il continua à avancer à longues enjambées sans aucun égard pour le loup-garou et son corps éreinté d'avoir été malmené par la pleine lune. À peine daigna-t-il lui jeter un coup d'œil par-dessus son épaule. « C'est dégueulasse, ce que tu as fait à cette fille. Dégueulasse. »

« Nous avons besoin de cette potion. » lui rappela-t-il, sans élever la voix. Élever la voix, lorsque Sirius était déjà en train de s'époumoner, ne servait à rien.

Le ricanement amer de l'Animagus raisonna dans l'air vif.

« Et ça justifie tout ? » s'enquit Sirius.

« Malheureusement, cela justifie beaucoup. » répondit-il , dans un haussement d'épaules. « Les guerres ne se gagnent pas avec des bons sentiments, ce n'est pas à toi que je vais l'apprendre. Crois-moi, cela ne me plait pas d'avoir dû lui ordonner de repartir chez Greyback. »

Cela ne lui plaisait même pas du tout.

L'élan possessif s'éleva en lui comme un ras-de-marré qui alla s'écraser sur son sens du devoir. Laura était sous sa responsabilité désormais : c'était à lui de la protéger, à lui de faire en sorte que leur meute reste entière, saine et sauve, à lui de s'assurer qu'aucun danger n'en menace ses membres… La renvoyer au cœur du danger le mettait mal à l'aise pour ne pas dire que cela déchirait son cœur de loup.

« Ah, oui ? » se moqua Sirius sans tendresse. « Pourtant, ça ne se voyait pas. » L'Animagus ralentit finalement suffisamment pour pouvoir le scruter de ses yeux gris. « Fais attention, Lunard, tu ressembles de plus en plus à Dumbledore. »

« Est-ce un mal ? » demanda-t-il, connaissant d'avance la réponse.

Dans la bouche de n'importe qui d'autre, cela aurait été un compliment. Dans celle de Sirius, toutefois, cela prenait la forme d'une accusation.

« À toi de voir. » répliqua son ami.

Ce fut tout ce qu'il consentit à lui dire.

Lorsqu'ils atteignirent les grandes grilles de Poudlard et qu'Hagrid vint leur ouvrir, tout sourire, Sirius choisit de ne pas l'accompagner faire son rapport auprès de Dumbledore.

°°O°°O°°O°°O°°

Les cachots n'avaient jamais été sa partie favorite de l'école bien qu'elle y ait passé du temps à l'époque où elle sortait avec un joueur de Quidditch de Serpentard. Elle remonta les couloirs d'un pas pressé, laissant sa main trainer sur la pierre humide des murs et se demandant vaguement ce qu'il était advenu de Terry Brooks. Il lui semblait avoir entendu dire qu'il avait été un temps remplaçant pour les Pies de Montrose. Un des seuls titres de gloire de ce club était d'avoir Terrens pour Poursuiveur et Capitaine – plus pour longtemps, cependant, il devait approcher l'âge de la retraite, à présent…

Il était impératif qu'elle se remette à jour sur les dernières nouvelles du monde du sport. Sans Charlie pour lui livrer les derniers potins croustillants sur tel ou tel joueur qu'ils trouvaient tous les deux mignon, Tonks avait délaissé cette partie de la communauté magique.

Elle jeta un Tempus et pressa le pas, esquivant un groupe de Serpentards de deuxième année, qui lui jetèrent des regards curieux. Elle était en retard et Snape allait la trucider. Et, pour couronner le tout, lorsqu'elle aurait terminé de se faire sermonner par le Professeur sur son manque de ponctualité, il lui faudrait se rendre au Ministère où elle subirait de nouvelles remontrances de la part de Fol'Œil qui n'appréciait ni les retards impromptus, ni le fait qu'elle ait endossé la tutelle de Draco Malfoy.

Elle imaginait déjà le discours ponctué de « je te l'avais bien dit, gamine » qu'il allait lui débiter dès qu'elle aurait mis un pied dans son bureau. Réintégrer son ancien mentor n'avait pas peut-être pas été une idée aussi judicieuse qu'elle l'avait crue de prime abord. Kingsley n'avait rien trouvé à y redire pour l'instant mais, dans quelques temps, lorsqu'il se serait lassé que Maugrey commente chacune des décisions qu'il prenait en tant que chef du Département des Aurors…

Elle se retrouva face à la porte du bureau de Snape et s'interdit toute nervosité. Elle n'était plus une adolescente boutonneuse que l'on convoquait pour lui taper sur les doigts. Elle ne nourrissait, de toute manière, aucune illusion sur le fait que cette rencontre ait quoi que ce soit à voir avec les frasques de son cousin. L'excuse était toute trouvée et probablement plus pratique pour lui que de courir Londres pour la trouver et lui donner des nouvelles de leur chasse à la taupe.

Sans plus réfléchir, elle frappa.

Et n'obtint aucune réponse.

« Ce ne sont pas ses heures de réception. » offrit timidement une première année, en passant derrière elle. La fillette s'enfuit sans demander son reste en direction des étages, laissant Tonks se mordre la lèvre avec agacement.

Il l'avait faite venir jusqu'en Écosse, elle n'allait pas se contenter d'une porte close.

Elle frappa plus fort, essaya la poignée qui refusa de tourner, et fusilla l'épais panneau de chêne du regard.

« Alohomora. » siffla-t-elle, après avoir vérifié à droite et à gauche que la voie était libre.

Le sort ricocha si brusquement qu'elle eut à peine le temps de l'esquiver.

De mécontentement, elle faillit taper du pied et ne se retint qu'au tout dernier moment.

« Si vous croyez que je vais vous chasser dans tout Poudlard… » marmona-t-elle. « Si cette porte ne s'ouvre pas dans les dix prochaines secondes, je la fais exploser. »

Parler tout seul n'était pas plus recommandé chez les sorciers que chez les Moldus et, pourtant, comme si la porte avait compris la menace, elle bascula, la laissant libre de pénétrer à l'intérieur, ce qu'elle fit avec prudence. Le battant se referma immédiatement dans son dos et se verrouilla dans un clic nettement audible.

La pièce était vide. Elle n'était pas plus avancée.

Avec un soupir exaspéré parce qu'elle détestait perdre son temps à peu près autant que de se retrouver en Écosse au petit matin, elle se laissa tomber sur un des deux sièges qui faisaient face à l'imposant bureau. Dans un geste revanchard qu'elle n'était pas certaine qu'elle aurait totalement assumé si Snape avait décidé d'apparaître à ce moment là, elle s'avachit, posa les pieds sur le bureau et les croisa à la cheville.

Ce fut comme ça qu'elle remarqua le passage dérobé qui, elle en était sûre, n'était habituellement pas ouvert.

Choisissant de prendre cela comme une invitation, elle se leva et s'engouffra dans l'étroit couloir de pierres nues et lisses qui s'enfonçait dans les profondeurs du château. À chaque pas, elle devait faire attention de ne pas glisser sur les pavés humides – ce passage n'avait pas été créé en pensant aux personnes maladroites. Une odeur de vase lui assaillit les narines et elle en déduit qu'elle était sous le lac.

Au bout de cinq minutes, le silence se troubla de légers bruits et l'odeur de vase laissa place au parfum entêtant de plantes séchées. Quelques minutes de plus et elle débouchait dans une pièce aux larges proportions qui était sans conteste un laboratoire et, plus précisément, supposa-t-elle, le laboratoire privé de Severus Snape.

Bien entendu, il y avait une porte tout à fait banale qui, nul doute, menait sur un couloir moins glissant. Pourquoi les hommes étaient-ils toujours obligés de chercher la complication ?

« Ne possédez-vous donc pas de montre, Nymphadora ? » cingla-t-il.

Elle ne prit même pas la peine de le corriger. Comme Charlie, il semblait prendre un malin plaisir à utiliser son prénom uniquement pour la contrarier.

Severus se tenait derrière une longue table de travail, ses sur-robes étaient accrochées à une patère près de l'entrée et, sans elles, il paraissait moins imposant, plus humain en quelque sorte. L'effet n'était pas aussi déconcertant que de le voir porter une tenue moldue mais c'était sans conteste surprenant. Elle se surprit à le détailler plus attentivement, ses yeux gris s'attardant là où ils ne s'étaient jamais attardés auparavant.

Luttant contre le rouge qui voulait lui monter aux joues, elle se concentra plutôt sur ce qu'il était en train de fabriquer. Trois chaudrons bouillonnaient sur sa droite, il était penché sur un bouquet d'herbes qu'il était en train de hacher menu. Ses gestes étaient tout aussi minutieux, élégants et précis que dans son souvenir. Elle observa ses mains, reconnaissant le talent et l'habileté qui faisaient de lui un Maître des Potions renommé, et puis s'appuya contre le mur, bras croisés.

« La prochaine fois, expliquez-moi, ça ira plus vite. » rétorqua-t-elle.

« Il vous suffisait de demander à ce que la porte vous laisse entrer. » répliqua-t-il, en levant les yeux au ciel.

« Eh ben, tiens ! » s'exclama-t-elle. « Et vous croyez que je suis devin, peut-être ? »

Il lui jeta un de ses regards courroucés dont il avait le secret et qui faisaient glapir d'effroi tous les élèves et quelques professeurs de Poudlard.

Elle ne daigna pas ciller.

C'était comme un hippogriffe, décida-t-elle, soit on s'imposait, soit on se faisait piétiner. Elle n'avait aucune intention de se faire piétiner.

« Je ne goûte guère votre ton. » siffla-t-il.

« Goûtez ce que vous voulez, ça m'est bien égal. » riposta-t-elle.

Ils se fusillèrent du regard quelques secondes, puis elle s'approcha de la table, curieuse des ingrédients à l'aspect incongru qu'elle ne reconnaissait pas.

« Et puis, d'abord, qu'est-ce que vous faites ? » demanda-t-elle, jetant un coup d'œil à la mixture bleu qui bouillonnait doucement dans un des chaudrons. « Je vous préviens, si c'est illégal, je vous arrête. »

« Me croyez-vous suffisamment stupide pour avouer un crime potentiel à une Auror ? » se moqua-t-il, avec assez de condescendance pour qu'elle se sente idiote.

Tâchant de dissimuler son trouble, elle se percha sur un des tabouret de l'autre côté du plan de travail.

« Vous seriez surpris de tout ce qu'un homme peut avouer par orgueil. » se moqua-t-elle.

Il lui était arrivé plus d'une fois dans sa carrière de voir un criminel se confesser pour avoir l'air intelligent ou impressionner son auditoire.

« J'espère avoir plus de jugeote qu'un vulgaire sorcier ordinaire. » répliqua Severus.

« Et voilà l'orgueil. » triompha-t-elle, dans un sourire amusé.

Il ouvrit la bouche, certainement sur le point de se lancer dans une de ses diatribes mordantes, puis la referma et inclina la tête en signe de défaite.

« Si l'orgueil est mon défaut, Nymphadora, le vôtre est votre entêtement. » déclara-t-il.

« Têtue comme une mule, c'est ça l'expression. » offrit-elle, en fouillant ses poches à la recherche d'une élastique. Il faisait chaud dans le laboratoire et ses cheveux l'encombraient. « Alors, vous faites quoi ? »

Il la dévisagea quelques secondes puis eut un haussement d'épaules négligeant.

« Je tente de créer une potion qui stopperait les effet de l'Endoloris. Ou, tout du moins, les ralentirait. » expliqua-t-il.

Elle fronça les sourcils. « Sur le moment ou après-coup ? »

Elle mit finalement la main sur une élastique qui trainait au fond de la poche de son jean et attacha ses cheveux en une queue de cheval haute, s'assurant, dans un sursaut de vanité, qu'il n'y ait aucune bosse sur son crâne.

« Après-coup. » confirma Severus, en envoyant remuer un des trois chaudrons d'un coup de baguette. « Les dommages que le maléfice cause aux nerfs sont importants et, dans la plupart des cas, irréversibles. »

« Si vous réussissez, cela pourrait changer la vie de plus d'un patient de Sainte Mangouste… » remarqua-t-elle.

Il parut amusé par ce commentaire.

« Ne me prêtez pas des buts altruistes. » protesta-t-il. « Ma recherche est purement égoïste, je le crains. Et, récemment, ma seule distraction… »

Il amorça le geste de se frotter les yeux, s'interrompit avant de provoquer un contact et alla se rincer les mains à l'évier qui se trouvait sur la gauche. Il utilisa le savon trois fois avant de finalement s'essuyer sur un torchon et de se frotter le visage. Qu'il ait failli commettre une telle erreur, lui qui était si pointilleux sur la sécurité, parut à Tonks un signe évident de son épuisement.

« Je ne vous ai pas faite venir pour parler de potions. » reprit-il, plus sérieusement. « J'ai une mission pour vous. »

Elle se demanda si elle parviendrait un jour à avoir une soirée à elle. Depuis quelques temps, lorsqu'elle n'était pas au travail ou en planque pour le travail, elle était envoyée en mission de surveillance ou de reconnaissance pour l'Ordre, et quand elle avait quelques heures de libres, elle enquêtait sur Fletcher.

« Tant que ça ne consiste pas à arpenter Pré-au-Lard à la nuit tombée… » grommela-t-elle.

Que Poudlard doive être surveillé, tout le monde en convenait. Pourquoi elle, en particulier, était forcée de se geler les fesses toute la nuit à la recherche d'éventuels Mangemorts, elle n'en était pas sûre. Sans doute parce que c'était Remus qui était chargé de répartir les missions de surveillance et que Pré-au-Lard était un poste facile qui ne présentait à priori aucun danger.

« Le stock de potions du Square Grimmaurd n'a pas été saboté. » lui apprit Severus, en faisant léviter les herbes qu'il venait de hacher dans le plus gros des chaudrons. « Toutefois, Minerva a aperçu quelqu'un dans le laboratoire, quelqu'un qui a sans conteste préparé une potion avant de quitter les lieux en prenant soin de ne pas être vu. Il est regrettable pour lui qu'il n'est pas pensé à se méfier du chat tapi dans le coin de la pièce… »

Le mépris était évident dans la voix de Severus et Tonks compris qu'il considérait l'homme comme un amateur peu digne de son temps.

« Je doute que tout cela ait un rapport avec notre espion mais je souhaite m'en assurer. » déclara-t-il. « Il va vous falloir surveiller Bill Weasley. »

De tous les noms possibles, elle n'avait pas été préparée à entendre celui de Bill.

« Vous vous moquez de moi. » l'accusa-t-elle.

« Ai-je l'air d'avoir du temps à perdre en farces ? » grinça-t-il, sans quitter le chaudron qu'il remuait des yeux. « Minerva a distinctement vu Weasley se servir du laboratoire. Il nous faut l'éliminer de notre liste de suspects. »

Elle secoua la tête, incapable d'intégrer ce qu'il était en train de dire. « C'est Bill. »

« Et bien, Bill prépare des potions dangereuses dans le laboratoire du Q.G. pour une raison mystérieuse que je préfèrerai connaître avant qu'elle ne revienne nous hanter plus tard à un moment fort inopportun. » Les mots claquèrent dans la pièce avec tant de force qu'il sembla à Tonks qu'ils rebondissaient sur les murs. « Pouvez-vous enquêter ou non ? »

« Je suis censée aller chercher Charlie et Anthony à l'hôpital, ce soir. » répliqua-t-elle. « Je suis censée les ramener chez eux. Charlie est mon meilleur ami et vous êtes en train de me dire que vous soupçonnez son frère ? Arthur a été tué par des Mangemorts, le… »

« Précisément. » la coupa-t-il froidement. « Arthur Weasley a été assassiné par des Mangemorts. Combien de Weasley reste-t-il que le Seigneur des Ténèbres pourrait utiliser comme moyen de pression ? Cessez de penser que tout dans la vie est affaire de convictions, Nymphadora, rares sont les hommes suffisamment fous pour mourir par idéalisme. La plupart sont simplement pragmatiques. »

« Comme vous ? » ricana-t-elle, presque cruellement. « Si vous ne croyez en rien, pourquoi être devenu un Mangemort ? Pourquoi travailler pour l'Ordre ? Ne me dites pas que c'est par simple pragmatisme. Si c'était le cas, vous vous seriez déjà tiré aux îles Fidji. »

Les yeux noirs se plantèrent dans les siens, suffisamment intenses pour qu'elle se prépare instinctivement à une attaque qui ne vint pas. L'espace d'un instant, elle crut qu'il allait se confier, expliquer ses mystérieuses raisons que Dumbledore et lui étaient si déterminés à taire. Pourtant, elle ne fut pas particulièrement surprise de le voir s'en tirer d'une boutade sarcastique.

« Je n'aime guère le soleil. » lâcha-t-il.

Elle fut tentée d'insister mais devina qu'il valait mieux laisser couler pour mieux revenir à la charge plus tard.

« D'accord. » capitula-t-elle. « Je vais le faire. Mais juste pour vous prouver que vous avez tort et que Bill n'est pas un traître. »

« Faites en sorte de ne pas vous faire remarquer. » la mit-il en garde. « Quelles que soient ses raisons pour fabriquer de telles quantités de potion, qu'il soit mauvais potioniste ou qu'il les sabote à dessein, nous ne pouvons exclure la possibilité qu'il soit impliqué dans quelque chose de dangereux… »

« Je peux me défendre. » soupira-t-elle, lasse de devoir se justifier.

« Quand bien même. » grommela-t-il. « Vous vous révélez une alliée efficace, je détesterai avoir à vous remplacer. »

Un sourire amusé naquit sur les lèvres de la jeune femme. « C'était presque un compliment, ça, Severus. »

« Ne vous y habituez pas. » grimaça-t-il, sans la regarder en face.

Il fixait ses chaudrons avec une concentration exagérée et Tonks croisa les jambes tout en l'observant, se demandant comment quelqu'un en arrivait à un tel degré de renfermement sur lui-même qu'il n'était pas capable d'offrir le moindre compliment sans immédiatement s'en dédire de peur d'avoir l'air un tant soit peu sociable. Quoi qu'elle avait sa petite idée… Les Maraudeurs avaient fait de son adolescence un enfer et, à voir la manière dont la plupart des gens parlaient de lui, que ce soit dans son dos ou en face, l'enfer était loin d'être terminé. Il avait très peu d'amis et devait se sentir extrêmement seul.

« Ce serait plus simple si je pouvais me transformer. » soupira-t-elle, pour couper court à l'étrange malaise. « Bill me connait bien. Le filer sans me faire repérer va être compliqué. »

Il releva la tête, avec une expression étonnée. « Êtes-vous donc toujours incapable de contrôler vos pouvoir de Métamorphomage ? »

« Vous croyez que je me baladerai avec cette couleur de cheveux si je pouvais les contrôler ? » se lamenta-t-elle, non sans amertume. « Ils ont disparu. Je dois me faire une raison. »

Severus fronça les sourcils et, d'un coup de baguette, mis les chaudrons en stase pour mieux se concentrer sur le problème. Il l'étudia comme il étudiait ses ingrédients et cela la mit mal à l'aise.

« Avez-vous consulté un spécialiste ? » s'enquit-il. « D'où semble venir le problème ? »

« J'ai perdu mes pouvoirs, le voilà le problème. » railla-t-elle.

Il pinça les lèvres avec agacement. « On ne cesse pas d'être Métamorphomage, Nymphadora. Un aveugle ne recouvre pas la vue sans raison, un sourd ne se met pas à entendre du jour au lendemain et un Métamorphomage ne perd pas ses pouvoirs. »

Elle prit une profonde inspiration and haussa les épaules.

« Les Médicomages disent que c'est un blocage et qu'ils ne peuvent rien faire. » lâcha-t-elle d'un ton morne. « Ils ont dit que je devais me détendre mais j'ai essayé la relaxation, le yoga et toutes ces conneries et ce n'est vraiment pas pour moi. Sans compter que ça ne marche pas. »

Il réfléchit au problème quelques secondes et fit distraitement le tour du plan de travail. Elle le regarda approcher sans sourciller.

« Qu'en est-il de l'Occlumencie ? » demanda-t-il. « Cela requiert une certaine maîtrise de la relaxation, sans parler d'une totale maîtrise de l'esprit. Vous êtes prometteuse. Avez-vous tenté d'utiliser ce médium pour déterminer l'origine du blocage ? »

Ça ne lui était pas venu à l'idée. Elle fronça les sourcils. « Vous pensez que ça pourrait marcher ? » Elle tenta de ne pas se faire de faux espoirs mais la possibilité d'une solution fit battre son cœur deux fois plus vite. Son optimisme ne dura qu'une poignée de secondes. « Je ne saurais pas comment faire… »

Severus sembla hésiter quelques secondes puis approcha plus près, assez près pour effleurer son menton du bout des doigts. Le contact, pourtant léger, la prit de court et la choqua presque jusqu'à ce qu'elle comprenne ce qu'il désirait. Sans plus tergiverser, elle leva la tête et croisa son regard en une permission tacite.

« Dirigez vos pensées vers le moment où vous avez perdu vos pouvoirs. » exigea-t-il, avant de pénétrer dans son esprit.

Le souvenir se déroula immédiatement dans sa tête, comme une pelote de laine sur laquelle on aurait tiré.

La Nuit des Ténèbres. Les cellules du Ministère. Sirius derrière des barreaux, paniqué comme un animal en cage, terrifié à l'idée de retourner à Azkaban… La fatigue qui pesait sur ses épaules, son corps courbaturé par une nuit passée à se battre, des blessures qu'elle n'avait pas pris la peine de soigner, la douleur lancinante dans sa poitrine qui n'avait rien à voir avec un quelconque maléfice…

« J'ai brisé pas mal de cœurs en mon temps, Tonks. » plaisanta Sirius, trop paternaliste à son goût. « Je n'ai pas pour habitude d'avoir une seule conquête, tu verras quand je sortirai de ce trou à rats… Et puisque on en est aux confidences, puis-je te dire que cette couleur de cheveux ne te va pas du tout ? »

Étonnement, d'abord.

Curiosité face à cette impossibilité de se transformer qui était sans précédent.

Puis la panique.

La panique qui la prit une nouvelle fois à la gorge, le désespoir, la terreur…

Instinctivement, elle chercha à fuir le souvenir sans y parvenir, elle ne contrôlait plus rien. Son esprit, comme ses dons, ne lui appartenait plus. Elle était seule et brisée et…

La présence qui lui imposait les images se fit plus écrasante mais, curieusement, au lieu d'être oppressante, elle était rassurante. Tonks n'était pas seule, elle n'était pas prisonnière. Ce n'était qu'un souvenir, rien d'autre qu'un mauvais souvenir.

Le reste de la scène se rejoua sans qu'elle y prête attention, presque apathique, choquée une nouvelle fois par ce qui s'apparentait pour elle à la perte d'un membre. L'absence de ses pouvoirs était une douleur fantôme.

« Ce n'est pas l'origine du blocage. » déclara le Maître des Potions, dans une réalité qu'elle ne parvenait pas à regagner.

« Severus… » paniqua-t-elle, attrapant à l'aveugle ce qui s'avéra être un bras. Elle voyait sans voir, elle entendait sans entendre, elle était prise au piège de son propre esprit. Elle sentait confusément qu'elle avait déjà fait la même expérience récemment, sans parvenir à mettre le doigt dessus. Dumbledore, souffla une voix dans sa tête. Elle ne savait pas si la pensée venait d'elle ou de lui.

« Je ne vous ferai aucun mal. » promit-il. « Vous êtes en sécurité. Vous avez le contrôle. »

Il relâcha sa prise mentale suffisamment pour qu'elle se détende.

« Souhaitez-vous arrêter là ? » demanda-t-il. « Je pense que le blocage est plus profondément enfoui. »

Elle fut tentée de jeter l'éponge. Tentée seulement. La perspective de peut-être parvenir à récupérer ses pouvoirs était trop alléchante pour qu'elle laisse sa peur la dominer. Dans un élan de confiance qu'elle espéra de tout cœur ne pas avoir à regretter, elle lui abandonna le plein contrôle.

S'il fut surprit, elle n'en perçut rien. Il remonta le fil de la nuit, s'attardant parfois sur le souvenir d'un combat, passant vite à autre chose… Jusqu'à ce qu'il tombe sur la scène qui s'était jouée dans sa cuisine, juste avant qu'ils reçoivent le Patronus de Charlie qui demandait de l'aide sur le Chemin de Traverse…

Elle se cabra, tâcha de repousser Severus, de l'éjecter de sa tête… Elle ne voulait pas revivre ça. Elle ne voulait pas entendre à nouveau Remus dire…

« On doit arrêter. Toi et moi, c'était une parenthèse. Ça n'a jamais été destiné à être autre chose qu'une parenthèse. »

« Remus… »

Détresse.

Les larmes qui coulaient sur ses joues, la boule dans sa gorge qui l'étouffait au point qu'elle ne pouvait plus respirer…

« Il faut fermer la parenthèse. » insista-t-il, en se levant.

Elle sut à cette seconde qu'elle allait le perdre, que c'était terminé.

« Ce n'est pas à toi de décider ! » tenta-t-elle le tout pour le tout, s'efforçant de parler clairement malgré les sanglots. « Je me moque que tu sois un loup-garou ! Je m'en moque ! Il y a des solutions à tous les problèmes, il faut juste prendre le temps de les trouver. Je ne veux pas rompre. Tu n'as pas le droit de rompre si je ne veux pas. »

Elle ne pouvait plus respirer, elle suffoquait de douleur… Il eut un petit sourire triste qui lui donna l'impression que quelqu'un venait de plonger la main dans sa poitrine pour lui arracher le cœur.

« Je t'aime. » avoua-t-elle avec trop de désespoir et d'abandon. « Je t'aime. Tu comprends ça ? Je me fous de tout le reste tant que je peux t'avoir, toi. Je t'aime, Remus. »

Elle cessa de se débattre, cessa de tenter de repousser Severus, cessa de lutter contre la douleur toujours aussi vive qui lui enserrait le cœur…

« Ça ne change rien. C'est fini. » déclara Remus, à mi-voix.

« Non. » refusa-t-elle.

« C'est fini. » répéta-t-il plus fermement.

Deux labradors argentés apparurent, leur enjoignant de venir à l'aide de Gringotts, et elle transplanna dans un état second, si mal et perturbée qu'elle manqua se démantibuler. Elle s'écrasa sans finesse sur le sol crasseux d'une ruelle à quelques mètres de l'artère principale du Chemin de Traverse, mais ne se releva pas tout de suite. Malgré le danger que courraient ses amis, malgré l'urgence, elle resta prostrée au sol et tâcha de ravaler ces sanglots qui lui obstruaient la gorge.

Elle avait tout perdu.

Tout.

L'espace d'une seconde, même sa magie sembla vaciller.

Severus lui rendit sa liberté et l'observa sans un mot. Sa mâchoire était crispée, ses poings serrés et elle sentit les muscles de son bras se contracter sous ses doigts.

Elle le lâcha pour essuyer d'un geste rageur les larmes qui coulaient sur ses joues, tâchant de maîtriser les sanglots qui la secouaient, d'apprivoiser cette douleur qu'elle portait en elle comme un fardeau…

« Buvez. » ordonna-t-il.

Elle saisit la fiole et la vida d'un trait, sans même prendre le temps de vérifier ce dont il s'agissait. La réponse fut aussi immédiate que l'effet de la potion, elle sentit soudain beaucoup plus calme, la douleur reflua légèrement et tous ses muscles se détendirent. Au bout de quelques minutes, elle parvint à contrôler les sanglots et frotta ses joues avec la manche de sa veste, le cuir lui irrita la peau.

« Connard. » lâcha-t-elle, sans bien savoir après lequel des deux hommes elle en avait.

« Au risque de tomber dans le cliché, j'ose avancer que vous n'aurez aucun mal à trouver mieux. » répondit-il simplement. « Tentez donc de vous transformer, à présent que vous avez identifié le problème. »

« Le problème, il est clair. » cracha-t-elle. « Spero Patronum. »

L'énorme loup argenté s'échappa de sa baguette, se posa sur son séant et tourna la tête vers elle, la langue sortie, attendant ses instructions.

« Je préférais l'ancien. » commenta Severus.

« Ce n'est pas drôle ! » s'énerva-t-elle.

Il leva les yeux au ciel.

« Vous n'êtes pas la première à arborer le Patronus d'un amour à sens unique. » décréta-t-il sèchement. « Ce n'est, certes, pas agréable mais personne n'en est encore mort. »

Elle fronça les sourcils. « Vous avez un Patronus ? »

« Essayez d'utiliser vos dons. Je n'ai pas la matinée entière à vous consacrer. » cingla-t-il.

Elle mit ça sur la liste des choses à découvrir plus tard.

« Je l'ai dans la peau ! » s'exclama-t-elle. « Alors, d'accord, peut-être que je ne peux plus me transformer parce que j'ai eu un choc émotionnel mais je l'ai dans la peau, Severus ! Qu'est-ce que vous voulez que je fasse ? » Elle sauta du tabouret et y donna un coup de pied. « Je le déteste cet abruti. »

« Si vous le détestiez réellement, la tâche serait plus simple. » marmonna-t-il avec un agacement certain. « Très bien. Nous emploierons donc ma méthode. »

« C'est-à-dire ? » demanda-t-elle.

Elle eut sa réponse lorsqu'il envahit à nouveau son esprit, trop brutalement et trop rapidement pour qu'elle puisse dresser des défenses qui n'auraient, de toute manière, eut aucune utilité. Elle ne savait pas quel était son but mais elle eut la sensation très désagréable qu'il lui retourna la tête, son crâne paraissait sur le point d'éclater et lorsqu'il se retira finalement, elle était à court d'oxygène.

« Voilà. » lâcha-t-il. « Le problème est réglé. Transformez-vous, à présent. »

Elle le fusilla du regard. « Je vais vraiment finir par vous bottez le cul, vous savez. »

Un rictus ironique joua sur ses lèvres. « Des promesses, toujours des promesses… Il me semble que notre dernier duel ne s'est pas des mieux terminé pour vous… » Le bref éclat d'amusement dans ses yeux fut bien vite remplacé par son sérieux habituel. « Transformez-vous. »

Il y avait tant d'assurance dans sa voix, il paressait tellement certain qu'elle y parviendrait sans effort, qu'elle souhaita que ses cheveux deviennent rose.

Elle n'avait pas de miroir mais l'expression de Severus était suffisamment satisfaite pour qu'elle n'en ait pas besoin. Elle arracha l'élastique qui maintenait ses cheveux en queue de cheval, tira sur les pointes pour apercevoir la couleur… Le rose était pâle et elle ne parvint pas à le raviver malgré tous ses efforts mais elle était tellement heureuse de voir de la couleur qu'elle laissa échapper un cri de joie et lui sauta au cou.

Très clairement, il ne s'y attendait pas.

Ça l'amusa au plus haut point et, dans son euphorie, elle planta un baiser sur sa joue, ne serait-ce que pour l'agacer davantage. Elle visa mal. Ou il tourna la tête. Elle ne savait pas très bien. Le baiser atterrit à la commissure de ses lèvres.

Il aurait été difficile de déterminer lequel des deux rougit le plus.

Tonks prétendit ne pas avoir remarqué, lui rendant sa liberté et sautillant sur place tout en tirant sur ses cheveux pour les inspecter.

« Comment avez-vous fait ? » lança-t-elle entre deux éclats de rire.

« Bien que j'aimerai prétendre à des pouvoirs extraordinaires, je n'ai strictement rien fait. » répondit-il. « Je vous ai simplement donner une raison de ne pas croire que vous alliez échouer. Vous êtes votre propre blocage. Ce qui, par ailleurs, est ridicule. Vous ne devriez pas laisser qui que ce soit ébranler votre confiance en vous. »

« Merci. » souffla-t-elle.

« Inutile de me remercier. » se renfrogna-t-il. « Je n'ai agi que dans l'intérêt de l'Ordre. Nous devons découvrir ce que trame Weasley. »

Elle n'y crut pas une seconde mais fit semblant pour lui faire plaisir.

°°O°°O°°O°°O°°

« Il reste une demi-heure. » hésita Harry.

« Et alors ? » rétorqua Malfoy. « Je ne suggère pas de sécher la Botanique, juste que nous pourrions prendre notre temps pour aller jusqu'aux serres. »

« Prendre notre temps jusqu'à ce qu'il reste cinq minutes et qu'on ait tout raté ? » s'amusa-t-il, alors qu'ils émergeaient du château.

« Par exemple. » répondit le Serpentard, en ajustant son écharpe d'un geste sophistiqué avant d'enfiler ses gants.

Harry fit de même, bien moins élégamment.

« Ça me va. » lâcha-t-il, n'ayant que moyennement envie d'aller en Botanique.

Ils firent le grand tour par le lac, prenant soin de marcher lentement. Ils avançaient en silence, n'ayant pas grand-chose, si ce n'était rien, à se dire. Une trêve avec Malfoy, bien que n'étant certainement pas la chose la plus folle qu'il ait fait cette année, lui paraissait toujours improbable. Ils n'étaient pas amis et, il le soupçonnait, ils ne le seraient jamais. Alliés, à la rigueur, amis… C'était peut-être trop lui en demander.

Le silence, fort heureusement, n'était pas particulièrement gênant.

Malfoy était perdu dans ses pensées, ses yeux gris regardaient dans le vague. Harry ne se décida pas à lui demander s'il avait un problème. Les problèmes de Malfoy, mis à part lorsqu'il tombait dessus au milieu d'un couloir à la nuit tombée, n'étaient pas ses affaires.

L'aboiement les fit sursauter tous les deux.

Ils échangèrent un regard et Harry fut heureux de constater qu'il n'était pas le seul à avoir la main sur sa baguette.

« Crocdur, sans doute. » hésita-t-il.

Les yeux gris fixèrent un point par-dessus son épaule avec un déplaisir évident. « Ou ton idiot de parrain. »

Harry se retourna à temps pour voir l'énorme masse de Patmol trottant un peu plus loin sur le chemin, la langue pendante. Le chien lâcha un nouvel aboiement joyeux mais s'arrêta à une distance respectable, semblant attendre la permission d'approcher.

« C'est bon, tu peux venir. » soupira Harry.

Ce fut un homme qui les rejoignit. Mal rasé, avec des vêtements froissés et un sac à dos vissé sur les épaules. Il empestait tellement le fauve que l'odeur couvrait celle de vase qui émanait du lac.

« Azkaban t'aurait-il tant endommagé le cerveau que tu as oublié comment une douche fonctionne ? » lança Malfoy, en plissant le nez.

« Cousin ! » s'exclama Sirius avec un plaisir qu'Harry soupçonnait d'être feint. Un soupçon confirmé lorsque l'Animagus attrapa le Serpentard par les épaules et tenta de lui donner une accolade pour mieux l'incommoder de son odeur.

Harry ne put retenir un petit rire amusé. Il regrettait de ne pas avoir d'appareil photo, la tête de Malfoy valait son pesant d'or. Il échappa à Sirius et lissa ses vêtements du plat de la main, jeta une dizaine de sorts visant à se rafraichir, et vérifia de façon presque obsessive que ses cheveux n'étaient pas ébouriffés.

« Qu'est-ce que tu fais là ? » demanda Harry, en fronçant les sourcils. Il doutait que Sirius ait fait le déplacement spécialement pour lui cette fois-ci, étant donné son accoutrement. Ses sentiments vis-à-vis de son parrain étaient toujours incertains mais la curiosité pris le pas sur tout le reste.

« Les affaires. » répondit l'Animagus avec un clin d'œil complice, semblant ravi de l'accueil, pourtant mitigé, que lui réservait son filleul.

« Permets-moi de te dire que s'il s'agit là d'un nom de code pour l'Ordre du Phoenix, cela laisse à désirer. » commenta Malfoy, en levant un sourcil dédaigneux.

Sirius lui jeta un regard agacé puis parut finalement remarquer les ecchymoses qu'ils arboraient tous deux un peu trop fièrement au goût de Pomfresh.

« Dans quel pétrin vous-êtes vous encore fourrés ? »

Il n'y avait que Sirius Black pour poser ce genre de questions avec un sourire aussi indulgent qu'amusé. Vu le regard que Severus lui avait jeté lorsque Harry l'avait croisé sur le chemin de la Grande Salle avant le petit-déjeuner, il prendrait garde de ne pas s'approcher de trop près du Maître des Potions pendant quelques jours.

« L'important, c'est que vous leur ayez botté les fesses. » déclara Sirius lorsqu'ils eurent résumé les faits, avant de tirer un paquet de cigarettes cabossé de sa poche.

« Euh... Je ne suis pas sûr que tu ais le droit de fumer ici. » grimaça Harry. Sans compter que s'il se présentait en Défense en empestant le tabac, Snape aurait probablement une attaque – avant ou après l'avoir assassiné, cela restait à voir. Il ne se souvenait que trop bien de comment leur dernière dispute à propos de cigarettes avait terminé.

L'Animagus hésita quelques secondes, son opinion mitigée sur certaines règles de Poudlard sur le bout de la langue, puis rangea finalement le paquet, avec un soupir à fendre l'âme.

« Est-ce qu'on peut parler quelques minutes avant ton prochain cours ? » s'enquit son parrain, avec un espoir qu'Harry ne se décida pas à briser. Il faisait des efforts pour différencier le Sirius de soixante-quinze de celui qu'il avait rencontré deux ans auparavant. Il avait promis d'en faire.

Le Gryffondor interrogea Malfoy du regard – parce que Sirius venait quand même très impoliment de faire comprendre au Sang-Pur que sa présence n'était pas souhaitée et qu'Harry, à force de se voir sermonné par Severus et Lily dans les années soixante-dix, s'était attaché aux bonnes manières. Le Serpentard haussa les épaules avec détachement et déclara qu'il l'attendrait plus loin sur le chemin mais qu'Harry lui devait une faveur.

C'était cher payé pour cinq minutes de discussion avec Sirius mais Harry acquiesça tout de même.

« Je ne savais pas que vous étiez amis. » remarqua l'Animagus, dès que Malfoy se fut éloigné.

« On n'est pas amis. » se rembrunit-il. « Il sort avec Hermione. »

Il attendit le discours moralisateur sur pourquoi les Serpentards étaient tous maléfiques. Le discours ne vint pas.

« Il n'est pas si mauvais, dans le fond, pour un Malfoy. » offrit Sirius, presque dépité d'avoir à admettre une telle chose. « Il tient de sa mère, sans doute. »

Narcissa Black, la beauté froide de Serpentard… Peut-être Draco tenait-il, en effet, de sa mère… Toutefois, il était impossible de nier que Draco était le fils de son père et avait été élevé en tant que tel. Rusé, mesquin, méprisant… La liste n'était pas exhaustive.

« Ce n'est pas de Malfoy que je voulais te parler, de toute manière. » reprit son parrain, en l'étudiant attentivement.

Les yeux gris de Sirius, très semblables à ceux de Malfoy et de Tonks maintenant qu'il le remarquait, le fixèrent avec tant d'intensité qu'Harry se prépara instinctivement à renforcer ses boucliers mentaux. Précaution bien inutile puisque l'Animagus se détourna pour s'installer sur un rocher proche. Le roc, large et plat, était prisé par les élèves qui souhaitaient s'asseoir près du lac.

« Snape s'inquiète pour toi. » lâcha Sirius doucement.

« Parce que tu parles de moi avec Severus maintenant ? » riposta-t-il, immédiatement sur la défensive.

Il espéra qu'il n'était pas à nouveau question de ces histoires de tutelle. Il savait que Snape voulait qu'il soutienne la demande de son parrain devant le Magenmagot, mais c'était un sujet qu'il était heureux d'éviter autant qu'il serait possible de le faire. Fût un temps où il aurait été prêt à accepter n'importe quoi plutôt que de retourner chez les Dursley. Cette époque était toutefois révolue.

« Tu es mon filleul, Harry. » le gronda gentiment l'Animagus. « Si quelque chose ne va pas, ça me concerne. »

« Je suis ton filleul, je ne suis pas ton fils. »

« Je n'ai jamais dit le contraire. » lâcha Sirius dans un haussement d'épaules. « Écoute, si c'est cette histoire de tutelle qui te tracasse... »

« Je n'ai pas envie de parler de ça. » cingla-t-il.

Il ne voulait pas en parler pour la bonne raison qu'il espérait encore que tout pourrait recommencer comme en soixante-quinze. Il avait trouvé là-bas la famille qu'il n'avait jamais eue et il ne voulait pas de pâle équivalent – et il fallait être honnête, tout ce que Sirius pourrait lui offrir, même avec tout l'amour du monde, ne serait qu'un pâle équivalent.

« Je ne compte pas t'interdire de voir Snape. » offrit tout de même son parrain. « J'ai bien compris que... » L'Animagus s'interrompit, parut chercher ses mots, puis haussa à nouveau les épaules. « J'ai bien compris. Tout ce que nous voulons, lui comme moi, c'est te protéger des Dursley. Te protéger tout court. Nous voulons que tu sois en sécurité. »

Harry laissa échapper un bruit moqueur.

« Ça ne risque pas d'arriver tant qu'on ne me laissera pas m'entraîner correctement. » se plaignit-il.

Sirius fronça les sourcils. « Remus m'a dit que l'entraînement se passait bien... »

« Pour un troisième année, peut-être. » râla-t-il. « Il me cantonne aux protego. Je sais jeter un protego, Sirius ! Je sais jeter tout un tas de boucliers. Ce dont j'ai besoin c'est d'apprendre à me battre. Severus avait commencé à m'entraîner mais Remus et Dumbledore... »

« Oh, laisse-moi m'occuper de ces deux là... » grinça Sirius.

Le rictus espiègle de son parrain promettait un plan à l'image des grandes heures de gloire des Maraudeurs.

Mais, pour une fois, Harry s'en réjouit.