La révolte gronde
Pétunia Dursley était une femme comblée.
Elle avait épousé un homme qui l'avait courtisée de la plus charmante des façons avant de lui demander sa main en grande pompe et lui avait offert le plus grand des mariages, si impressionnant qu'on en avait parlé pendant un certain temps. Cet homme lui avait donné le plus adorable des fils qui faisait ses études dans une école réputée, Smeltings. Il était à la tête de sa propre entreprise qui faisait beaucoup marcher l'économie de la région, ce qui lui permettait de ne pas travailler. Son mari avait une nouvelle voiture chaque année, ils avaient acheté une villa à Majorque où ils se rendaient tous les ans pour les vacances d'été.
Bref, elle avait tout pour être heureuse.
En apparence.
Peu après qu'une femme habillée étrangement ait annoncé à sa sœur Lily qu'elle était une Sorcière, un vieil homme avec une très longue barbe était venu un soir pour discuter de l'avenir de sa petite sœur. Mais le lendemain matin, elle avait commencé à lui dire des horreurs et même à lui donner des coups. Elle se sentait prisonnière de son propre corps et même qu'on la faisait agir contre son gré. Ses parents, qui n'avaient pas l'habitude de faire de différences entre leurs deux filles, s'étaient mis à critiquer son comportement et à encenser la petite rousse. Curieusement, dès que Pétunia entrait dans la chambre de Lily, son comportement redevenait normal et sa sœur lui assurait qu'elle comprenait qu'elle était piégée. Entre ces quatre murs, elles redevenaient des sœurs et Lily apprenait à Pétunia tout ce qu'elle savait du monde sorcier.
Pétunia avait honnêtement espéré que quand Lily quitterait enfin la maison, ce cauchemar cesserait. Que nenni !
A sa plus grande horreur, un homme qu'elle n'avait jamais vu, vulgaire, mal élevé et arrogant avait tenté de lui faire la cour.
Elle pouvait le dire honnêtement, Vernon avait une technique de drague de bas étage, vraiment lourdingue, ce que toute personne sensée aurait fui à la seconde.
Malheureusement, sa malédiction avait fait des siennes et elle s'était vu répondre à cet homme totalement antipathique. Pire, elle avait accepté ses avances puis sa demande en mariage ! Elle ne parlait même pas de la nuit de noces, pire que quand elle était obligée de coucher avec lui.
Et la grossesse … elle avait été malade jusqu'à l'accouchement, ce qui était extrêmement rare ! L'enfant qu'elle portait était trop gros pour son gabarit et prenait tous les nutriments qu'elle ingurgitait. Résultat des courses, elle perdait du poids ce qui avait pour conséquence d'affaiblir son organisme et lui faire garder le lit. Malgré son état alarmant, son cher « mari » avait refusé à ce qu'elle soit hospitalisée avant l'inévitable accouchement d'un « petit » Dudley.
Sérieusement ? Quel prénom horrible ! Mais comme dans la plupart du temps dans sa vie, elle n'avait pas eu son mot à dire …
Dudley Dursley était un enfant colérique et gourmand. Pétunia avait voulu l'éduquer de manière qu'il puisse s'intégrer un minimum en société mais Vernon et sa malédiction y avaient mis le holà. Tous les caprices de cet enfant étaient satisfaits dans la minute, si elle faisait mine de le gronder ou même de commenter son comportement, elle recevait une gifle au mieux et elle devait être à la disposition exclusive des deux hommes de la famille.
Un jour, le cauchemar se transforma en enfer.
Pétunia avait été vraiment surprise de découvrir sur le pas de sa porte un panier dans lequel se trouvait un bébé à peine plus âgé que son propre enfant. La lettre l'avait rendue intérieurement furieuse, d'autant plus qu'on ne lui avait même pas confié proprement le nouvel orphelin. Quand ce dernier avait ouvert les yeux, elle n'avait pas douté sur le fait que le bébé était son neveu.
Mais tout de suite, Vernon l'avait considéré comme un intrus qui devait gagner sa pitance. Très vite, le petit Harry avait dû l'aider dans la tenue de sa maison. Le ménage, la lessive, le repassage, la cuisine, le jardinage … tout y passait, alors que son balourd de fils ne faisait que se goinfrer toute la journée, à l'image de son père. Curieusement, à son contact, sa malédiction perdait de plus en plus de force, jusqu'à ce qu'elle soit, sinon aimable, assez cordiale et pédagogue. Elle parvenait ainsi à contourner son comportement forcé à un tel point qu'elle récupérait le contrôle de son corps. Quand elle sentait qu'elle allait hurler sans raison sur le brun, elle modulait sa voix pour seulement parler fort, quand elle voulait le frapper, elle déviait le coup, et ainsi de suite. Malheureusement, en présence de Vernon, elle devait quand même le toucher et elle avait tout fait pour les deux enfants ne soient jamais en présence l'un de l'autre.
Harry s'était révélé être un enfant très intelligent, au contraire de Dudley qui voulait en faire le moins possible. Pétunia avait donc appris au brun à lire, écrire et compter alors qu'il avait à peine cinq ans. Elle lui avait également appris les leçons les plus importantes de sa vie, notamment comment passer sous les radars, comment se débrouiller seul, être indépendant, en fait.
Et le onzième anniversaire d'Harry arriva.
Elle se souvenait parfaitement comment ça s'était passé quand la lettre de Lily était arrivée et comme vengeance, elle n'avait pas prévenu Vernon que ça allait empirer jusqu'à ce qu'il laisse Harry lire la sienne. Elle avait moyennement apprécié de vadrouiller par monts et par vaux pour essayer vainement d'échapper aux centaines de lettres. L'arrivée du géant l'avait fait sourire mais moins quand, après le départ d'Harry, elle avait dû essuyer la fureur de son mari. Elle ne parlait même pas de son départ pour son pensionnat …
Mais quand Harry avait pris le train pour la première fois, elle avait eu la surprise de découvrir que sa malédiction ne reprenait pas de force. Mieux, elle commençait à s'estomper. Mais méfiante, elle continua à se montrer soumise mais pour autant, elle travaillait activement à comprendre sa situation.
Quand elle se retrouvait seule à la maison, désormais, elle fouillait sans état d'âme dans les papiers du foyer. Elle avait ainsi découvert que l'arrivée d'Harry leur avait octroyé une très confortable rente qui disparaissait immédiatement dans les comptes privés de Vernon ou encore dans les cadeaux coûteux dont ils recouvraient Dudley. Pétunia avait alors détourné à son tour une partie de la rente vers son compte de jeune fille qu'elle n'avait jamais pensé à fermer et revendait tout ce que Dudley ne pouvait utiliser pour que l'argent obtenu aille au même endroit. Elle profitait que son cher « mari » était la plupart du temps hors de la maison – elle n'était pas aveugle au point de ne pas s'être rendu compte qu'il l'avait trompé à peine la bague passée au doigt – pour se créer une situation. Elle avait donc commencé par retoucher des vêtements et après plusieurs années, elle était devenue une couturière émérite. Cacher ses activités était devenue une seconde nature et honnêtement, seul Harry aurait pu se douter de quelque chose. Avec ses économies – une partie de son héritage, la partie de la pension d'Harry qu'elle détournait, l'argent qu'elle prenait sans aucun état d'âme à Vernon et son salaire propre – elle s'était renseignée sur le divorce et cherché un bon avocat. Elle avait bien évidemment réuni toutes les preuves nécessaires pour que le divorce pour fautes soit prononcé aux torts de Vernon. Quant à Dudley, elle ne se faisait pas d'illusions, il était le fils de son père, elle n'était qu'une poule pondeuse, même pas sa mère.
Mais au fond d'elle, Pétunia savait que tout prendrait fin au dix-septième anniversaire de son neveu. C'était une intuition qui se faisait de plus en plus forte au fil des années. C'était un espoir auquel elle voulait croire à tout prix, une lueur dans son enfer.
Où Harry et elle, tous les deux, pourraient enfin vivre et non survivre.
§§§§§
Sirius s'était enfermé dans sa chambre, furieux.
Comment avait-il pu être un tel abruti ? Lui, un enfant Black !
Le brouillard dans lequel il évoluait depuis qu'il avait découvert les corps de Lily et James s'était brusquement levé et il s'était trouvé nez à nez avec un maître legilimens. Ce dernier n'avait pas compris quand il avait subitement rencontré le mur. Heureusement, l'ancien détenu était encore très faible car ses années à Azkaban et sa cavale, sans compter son emprisonnement au quartier général de l'Ordre du Phénix, étaient loin de lui avoir fait du bien. Sirius avait ensuite perdu connaissance et avait dormi près d'une semaine.
Il venait de se réveiller à peine quelques minutes auparavant et après une douche rapide et avoir réellement vu ce qu'il était devenu physiquement depuis quinze ans, il s'était enfin penché sur ce qui s'était passé pendant ce temps.
Et il était un abruti !
Il se souvenait parfaitement de la présence de Dumbledore chez les Potter le soir de leur mort alors qu'il n'était pas dans le secret. Son souvenir suivant le plaçait dans une cellule d'Azkaban, soit un trou d'au moins trois jours. Le journal de Fudge avec la photo des Weasley et de Pettigrow était clair dans son esprit, son évasion, la capture de de ce rat et ses premiers moments avec Harry également … Mais après sa fuite de Poudlard, il avait reçu une lettre d'Harry qui était en fait un portauloin et le brouillard s'était installé.
Sinon, il ne comprendrait pas pourquoi il ne s'était insurgé de la participation non conforme de son filleul au Tournoi des Trois Sorciers, et encore moins pourquoi il avait accepté d'ouvrir tout le manoir Black à l'Ordre du Phénix !
Il y avait de nombreux points qui n'étaient pas cohérents et tous avaient pour origine Dumbledore. Il comprenait maintenant les réticences de ses parents quand il parlait du directeur de l'école. Oh, il n'allait pas aller jusqu'à dire qu'il aurait dû les suivre dans leur déchéance en suivant Voldemort mais il n'aurait jamais dû accorder sa pleine et totale confiance au vieux sorcier sans autre garantie que celle qu'il était président du Magenmagot et grand Manitou d'Angleterre. Concrètement parlant, il n'avait rien fait pour les sorciers. Permettre à Remus de faire ses études à Poudlard ? Pendant l'une des descentes des aurors chez les Yaxley avant son emprisonnement, il avait jeté un coup d'œil dans la bibliothèque et était tombé sur la Charte de Poudlard, dont une copie était gardée précieusement par toutes les familles Sang Pur d'Angleterre. En ouvrant simplement la première page, il avait vu noir sur blanc que l'école était ouverte à toutes les créatures dotées de magie, ce qui voulait dire que les directeurs ne pouvaient pas les refuser sous peine de perdre leur magie et ce, peu importe les lois du ministère. Officiellement, donc, Dumbledore n'aurait jamais pu refuser l'inscription de Remus. Mais quand il avait poursuivi ses recherches dans cette lignée de pensée, il avait appris que depuis le directeur était à son poste, le Grimoire de Poudlard, artefact puissant créé par les Fondateurs pour recenser toutes les créatures magiques capables de faire de la magie sorcière à travers les îles britanniques, avait été confié au ministère qui faisait une purge drastique de tout ce qui n'était pas purement sorcier. Maintenant qu'il avait l'esprit plus clair, il se doutait que son ami y avait échappé dans un but précis. Autre point, en aidant Harry à faire ses bagages avant sa cinquième année, à travers son brouillard, il se souvenait être tombé sur une enveloppe en parchemin ancien avec quelques lignes qui l'avait glacé au plus profond de lui sans qu'il n'ait pu réagir. « A Harry Potter, 4, Privet Drive, dans le placard sous l'escalier ». Comment avait-on pu ne pas s'interroger sur les conditions de vie du Survivant avec une telle information, et le directeur le premier ?!
-Simple, fit une voix dans son dos.
Sirius tomba nez à nez avec Tom.
-La clinique m'a appelé, éclaira Tom. Réveillé mais visiblement peu disposé à parler avec qui que ce soit.
-La ferme Tom ! aboya Sirius. Pas la peine de me dire que je suis un con, je m'en suis rendu compte tout seul ! Et sors de ma tête !
-Tes barrières occlumens sont au minimum, indiqua Tom. Reprends-toi, par Merlin !
Sirius arrêta d'arpenter la pièce et entreprit de se calmer, conscient qu'il n'arriverait à rien en s'enfermant dans son ressentiment. Quelques exercices banals de respiration plus tard, l'ancien détenu s'assit sur son lit.
-Qu'est-ce que tu as entendu ? soupira Sirius
-Je suis arrivé quand tu pensais à la lettre de Poudlard, répondit Tom en prenant place dans le siège des invités. C'est ce qui avait vraiment d'écrit sur l'enveloppe ?!
-Oui, répondit Sirius. J'étais dans le cirage et je n'ai pas réagi mais à quoi ça aurait servi à ce moment-là ? J'étais en cavale et personne n'aurait voulu m'écouter.
Tom ouvrit la bouche mais Sirius le coupa.
-Ce n'est pas le sujet, reprit Sirius. Pourquoi tu penses que c'est intentionnel que personne ne s'est penché sur la famille d'Harry ?
-J'ai eu le temps de me renseigner sur ta petite bande et toutes les personnes qui gravitaient autour de vous pendant votre scolarité et après votre mort, expliqua Tom. Malgré le grand respect qu'avaient Lily et James Potter pour lui, jamais ils n'auraient confié la vie de leur enfant à Dumbledore. Les seules personnes en qui ils avaient totalement confiance étaient Severus Snape et toi.
Sirius baissa le regard, gêné. Il se souvenait d'ô combien James et lui avaient été cruels avec Severus Snape, uniquement parce qu'il n'entrait pas tout à fait dans le moule du psychopathe en devenir. Jusqu'à ce qu'il décroche sa maîtrise de potions, Lily n'avait pas cessé de se battre pour qu'ils ne le martyrisent plus. A ce moment-là, sachant que les maîtrises étaient extrêmement difficiles à obtenir et qu'il fallait s'y connaître aussi bien en magie dite « blanche » qu'en magies occultes, ils avaient compris que Severus Snape était un gosse comme eux qui avait dû faire avec ses cartes pour réussir. Oui, il était honteux de son comportement passé et il ne fallait pas oublier que ce brouillard lui ordonnait de sauter à la gorge du maître de potions à chaque fois qu'ils se croisaient.
-Nous étions leurs meilleurs amis, comprit Sirius.
-C'est ça, confirma Tom. Du peu que j'ai pu entendre d'elle, Lily Potter aurait dû préparer un testament où elle aurait formellement interdit à ce que son fils soit placé chez sa sœur dont les relations … conflictuelles on va dire étaient connues de tous. Et James Potter te faisait assez confiance pour avoir un lien de sang tout ce qui est formel avec toi ! Encore plus en faisant de toi le parrain de son fils selon les anciens rites !
Quand Dimitri Vater lui avait communiqué les premiers résultats des examens de Sirius, les deux liens lui avaient sauté aux yeux, surtout le second. Vater lui avait indiqué que les liens de sang comme ceux qu'avait Sirius l'empêchaient de trahir la personne avec laquelle il avait établi le lien. Le legilimens lui avait également appris que les marraines et les parrains magiques ne pouvaient ni s'en prendre à leurs filleuls et encore moins les trahir, ce qui avait pour conséquence que Sirius n'aurait jamais pu livrer les Potter à Voldemort. Tom s'était alors rapproché de Narcissa, ne se souvenant pas du caractère aussi imposant du parrainage et elle lui avait expliqué que les rituels premiers de parrainage n'étaient plus réalisés depuis environ deux siècle dans l'archipel britannique à cause de l'affaiblissement manifeste des Sang Pur qui pouvaient en mourir pendant la cérémonie. A la place, un simple contrat était signé entre les parents et le parrain et / ou la marraine.
Sirius sursauta aux mots de Tom. Le lien était un secret qu'ils n'avaient même pas partagé avec le reste des Maraudeurs. Curieusement, ni James ni lui n'en avaient senti le besoin. Quant au parrainage … C'était Lily qui les avait convaincus avec la menace de Voldemort qu'ils formaient une famille et qu'un lien magique serait plus tangible qu'un simple morceau de papier.
-Ça ne répond toujours pas à ma question, fit Sirius.
-Si, sourit Tom. Tu es le seul à avoir la tutelle d'Harry Potter devant la loi et la Magie. Si on t'avait donné un procès après la mort des Potter, le lien de parrainage aurait établi que tu n'aurais jamais pu livrer les Potter et tu aurais pu l'éduquer selon les principes Sang Pur. Or, Harry est le Survivant et il a été désigné pour vaincre Voldemort. Est-ce qu'il aurait dû se plier aux désidératas du peuple sorcier sous ta tutelle ? Non, parce qu'il aurait eu la protection des Black et surtout des familles Sang Pur.
Sirius réfléchit. C'était une théorie qui méritait qu'on s'arrête dessus. Et malheureusement, elle était parfaitement plausible.
-On voulait avoir le contrôle total sur Harry, comprit Sirius.
-C'est l'hypothèse la plus logique, avoua Tom. Et si personne ne s'est inquiété au sujet de l'adresse de ton filleul, à commencer par Dumbledore, c'est parce que ça devait sûrement l'arranger.
Sirius était également arrivé à cette conclusion.
-Harry est en danger, déclara Sirius.
-Et tu ne pourras pas lui venir en aide en restant les bras ballants, rappela Tom. Je suis là pour que je puisse te convaincre de te soigner. Si tu veux aider ton filleul, il serait temps de te reprendre en main.
-D'accord, accepta Sirius.
-Merci Merlin, tu m'écoutes enfin ! soupira Tom. Je prie pour que celle qui acceptera de t'épouser puisse supporter ton fichu caractère !
-Eh ! pesta Sirius. Je suis un sorcier très sérieux !
Tom pouffa.
§§§§
Luna se redressa au beau milieu de la nuit, haletante.
La vision qu'elle avait eue avait été tellement intense !
Les jambes flageolantes, elle se rendit dans la salle d'eau et passa de l'eau sur son visage pour terminer de se calmer et de se réveiller. Des décisions devaient être prises rapidement avant que la catastrophe n'arrive. Silencieusement, elle s'habilla chaudement avant de quitter sans bruit le domaine des Serdaigles. La blonde ne faisait pas beaucoup de sorties nocturnes mais quand c'était le cas, il lui semblait bien que Poudlard protégeait ses pas, qu'importe ce qu'elle faisait. Elle se glissa hors du château et entra rapidement dans la forêt interdite.
-Dame Luna ?
Teeresa la fée voleta vers elle, prévenue par les alertes du village qui avaient retenti.
-Teeresa, souffla Luna. Nous n'avons pas le temps. Il va falloir que vous partiez au plus vite.
-Que voulez-vous dire ? fit une nouvelle voix
Plusieurs fées approchèrent, intrigués.
-Conseil Faë, s'inclina Luna. Je suis peut-être jeune selon les standards humains et sorciers mais je suis quand même une Servante du Temps. Cette nuit, les voiles du temps se sont ouverts à mes yeux et j'y ai vu votre destruction totale et définitive en ces lieux. Je suis venue immédiatement vous prévenir.
Le conseil s'éloigna pour en discuter. Teeresa s'approcha de la jeune sorcière.
-Est-ce que c'est grave ? demanda Teeresa
-J'y ai vu la mort, j'ai senti la torture, la souffrance, la douleur, avoua Luna. J'ai senti que si je ne vous préviens pas, alors le monde perdrait une partie de lui. Je refuse que mon inaction vous coûte la vie.
La fée voleta vers elle jusqu'à ses yeux.
-Merci, s'inclina Teeresa. Peu importe si les anciens refusent de vous écouter, même s'il ne se passe rien, je tiens à vous remercier de protéger les miens.
-C'est naturel, sourit Luna. Nous sommes tous enfants de la Magie et il faut qu'on se serre les coudes contre ceux qui veulent La détruire.
A ce moment-là, le conseil revint.
-Merci de nous avoir prévenu mais nous affronterons cette menace comme nous avons affronté les autres, déclara leur chef. Nous restons.
-Pardon ?! hoqueta Luna, incrédule
Elle n'y croyait pas ! Elle venait de les prévenir qu'ils allaient se faire exterminer et ils faisaient comme si de rien n'était ?
-Comme vous le dites, vous êtes jeune et vous ne connaissez pas nos méthodes pour nous protéger, sourit une fée. Nous saurons prendre soin de nous.
-Mais … protesta Teeresa.
-Il suffit, Teeresa ! tonna le chef. Notre décision est sans appel !
Le conseil ainsi que les Fées qui s'étaient approchés pour écouter ce qui se passait retournèrent au village. Abasourdie, Luna les regardait s'éloigner. Pour elle, les Servants du Temps étaient toujours soigneusement écoutés et leurs prédictions suivies ou au moins, prises en compte. Mais là … là ! Rien ! Les fées n'avaient visiblement même pas envisagé de s'éloigner pour quelques jours de leur village ou même lui demander des précisions sur ce qu'elle avait vu. Maintenant qu'ils avaient refusé de croire qu'ils allaient être tués à brève échéance, comment allaient-ils prendre que ladite échéance était pour l'une des prochaines pleines lunes ?
-Dame Luna !
Une fée voleta jusqu'à la sorcière. Elle avait une feuille qui formait une poche.
-Teeresa ?! s'étonna Luna. Mais qu'est-ce que tu fais ?
-Je viens avec vous, déclara Teeresa. Les anciens ont accepté que je rende visite à mon amie sorcière.
-Je ne veux pas que tu fuies ton village, fronça des sourcils Luna.
-Je ne le fuis pas, assura Teeresa. Mais les anciens sont conscients que si je ne m'éloigne pas d'eux au plus vite, je pourrais créer des dommages irrémédiables au village, comme remettre en cause leur clairvoyance et leur influence. Je suis … en vacances ?
Les nerfs de Luna craquèrent et elle partit dans un fou rire.
-Ça fait du bien, sourit Luna. Bien, je t'aiderai pour te cacher du directeur. Veux-tu aller voir Hermione pour la mettre au courant de la situation ?
-Non, secoua la tête Teeresa. J'aimerai voir quelques trucs avant de lui dire que je suis au château.
-Lesquels ? demanda Luna, intriguée
-Je veux des certitudes avant d'en parler, éluda Teeresa.
-Soit, capitula Luna. Tu pourras rester avec moi en attendant. Veux-tu que je t'aide avec tes bagages ?
-Non merci, refusa Teeresa.
Toutes les deux se mirent alors en marche vers l'école. Tandis que la voyante essayait de comprendre ce qu'elle avait fait pour que les fées ne la prennent pas en considération, la fée, elle, songea qu'elle aurait beaucoup de choses à faire. D'abord, retrouver la trace de la poudre de fée arrachée aux siens depuis quelques temps. Ensuite, comme elle en avait discuté avec Luna quelques temps auparavant, observer Harry pour chercher une alternative aux glamours qu'elle avait initialement conseillé pour cacher les tatouages magiques du jeune homme. Enfin, elle allait en profiter pour essayer de trouver un nouvel endroit pour les siens dans le cas où il leur faudrait quitter leur havre de paix. Contrairement aux anciens, elle croyait en Luna mais elle connaissait également les anciens qui pouvaient se révéler très butés. Mais cela pouvait se comprendre car les sorciers avaient l'habitude de les considérer moins bien que les insectes ou uniquement comme des ingrédients de potions. Ce n'était un secret pour aucune créature magique que les sorciers étaient essentiellement égocentrés et que seulement en de rares cas, on ne pouvait rien attendre d'eux sauf s'ils étaient directement concernés. Oh, Teeresa ne se leurrait pas, Hermione était un cas à part puisqu'elle partait déjà avec un handicap aux yeux des nés de sorciers puisqu'elle était née de moldus. Par certains côtés, les humains – ou moldus pour les sorciers – pouvaient se révéler pire que les sorciers mais eux n'étaient pas conscients de la présence des créatures magiques alors que les sorciers si. Même si à proportion égale les moldus étaient plus dangereux que les sorciers, les deux peuples conduisaient chacun à leur manière la Magie à sa perte.
Luna conduisit Teeresa dans sa chambre et lui montra un bonzaï sur sa table de chevet.
-Puis-je m'y installer ? demanda Teeresa, enthousiaste
-Hein ? s'étonna Luna. Mais ce n'est qu'un mini-arbre !
-Ce sera parfait pour moi, assura Teeresa.
-D'accord, fit Luna, dubitative. Est-ce que je peux faire quelque chose pour améliorer ton confort ? Un lit, une commode par exemple ?
-Non merci, fit Teeresa.
Toutes les deux se couchèrent pour essayer de grappiller quelques heures de sommeil.
