Nage en eaux troubles
Ragnok se redressa et prit un grimoire qu'il consultait régulièrement depuis l'été dernier.
Depuis près d'un siècle, les Potter étaient en danger, notamment parce qu'ils étaient tous tués d'une manière ou d'une autre, au point qu'aujourd'hui, il n'en restait qu'un. Les manœuvres d'Albus Dumbledore étaient un coup particulièrement vicieux dans l'ego du gobelin car ça lui montrait clairement qu'il avait relâché son attention un instant de trop. Qu'il manipule les sorciers, soit, ils s'en mordraient les doigts bien assez tôt, mais un gobelin, c'était une honte !
Quelqu'un frappa à la porte.
-Entrez ! rugit Ragnok, encore furieux contre lui-même
Gripsec entra, imperméable à l'humeur massacrante de son supérieur et s'installa dans le fauteuil destiné aux visiteurs.
-Vas-tu me faire perdre mon temps ?! cracha Ragnok
-J'ai le plan pour que les tuteurs du seigneur Potter disparaissent à sa majorité, annonça Gripsec.
Ragnok se calma. Quand il avait été alerté pour la transformation du jeune Potter, il avait discrètement demandé une enquête sur ses conditions de vie. L'image que renvoyait la famille Dursley était bien trop parfaite alors avec l'aide des dons des autres créatures magiques, il avait découvert l'envers du décor … ainsi que le potentiel de nuisance pour son client. Avant même qu'il ait émis l'idée, Gripsec s'était proposé pour mener cette mission à bien. C'était d'autant plus compréhensible avec la fureur qui l'avait envahi en apprenant la vérité. Connaissant la future nature du jeune homme, le haut gardien avait longuement travaillé sur un plan où on ne soupçonnerait ni l'implication des gobelins et encore moins celle d'Harry Potter. Non, il ne fallait pas qu'il y ait de traces. En plus, il fallait faire vite car mars suivait son cours et tout devait être prêt pour cet été.
-Je t'écoute, fit Ragnok.
-L'entreprise de Vernon Dursley est florissante, déclara Gripsec. Pour autant, les aménagements nécessaires sont très loin d'être faits et les conditions de travail sont dégradantes. Mais comme il s'agit de l'entreprise la plus importante de la ville, les employés se taisent.
-Cet immonde personnage, même s'il en est propriétaire, ne fait rien ? grinça Ragnok
-C'est là que ça devient intéressant, sourit Gripsec. Il a beau se conduire comme si les lieux lui appartenaient, ce n'est pas du tout le cas.
-Explique-toi, fit Ragnok.
-La Grunnings est certes dirigée par Vernon Dursley mais elle appartient en fait à une certaine Margareth Linon, veuve de son état depuis une trentaine d'années et grande mécène dans le pays, répondit Gripsec. Cette moldue est très énergique compte tenu de son âge et il est connu qu'elle gère encore tous les biens qu'elle a acquis par elle-même comme ceux qu'elle a obtenus de son époux. Sauf la Grunnings mais personne ne connait son lien avec.
-Viens-en aux faits ! siffla Ragnok
-Mes enquêteurs ont découvert que Vernon Dursley la faisait chanter en lui faisant croire qu'il est le fils illégitime de son époux, déclara Gripsec. Comme elle insistait sur sa fidélité, si les médias apprenaient le contraire, tout ce qu'elle avait entreprit jusqu'alors serait irrémédiablement détruit. Elle lui a laissé la totale gestion de cette entreprise mais mon avis est que dès que son propre fils sera en âge d'avoir une situation, il la dépouillera.
-Intéressant … fit Ragnok. Quoi d'autre ?
-Le fils Dursley ne sera pas compliqué à éloigner, sourit machiavéliquement Gripsec. Nous avons découvert qu'en se servant des contacts de madame Linon, ainsi que de son argent et de celui de la rente illégalement versée pour le seigneur Potter, il distribuait des pots de vin pour que toute plainte contre son « charmant chérubin » soit enterrée aussi profondément que possible. La liste reste toute de même assez impressionnante.
-Fais-moi rire, fit Ragnok.
-Nous allons des vols à l'étalage aux coups et blessures en passant par les agressions à main armée sans oublier les tentatives de viol, énuméra Gripsec.
-Les ?! releva Ragnok. Parce qu'en plus, c'est un récidiviste ? Comment est-ce qu'il a pu échapper à la justice moldue ?!
-L'argent de son père et les appuis de madame Linon essentiellement, rappela Gripsec. Mais surtout, il a commis ses délits dans un rayon restreint, ce qui fait que toutes les plaintes ont été étouffées par les mêmes personnes.
-Si l'une d'elle avait lieu hors de sa zone de confort, cela nous aiderait, songea Ragnok.
-J'y ai pensé, fit Gripsec. Leur influence et leur réputation sont restés intactes. C'est pourquoi j'ai pensé à ça …
Il lui tendit une photo moldue.
-Qui est-ce ? demanda Ragnok en observant le document
-Johan Kristina, treize ans, fille d'immigrés biélorusses, renseigna Gripsec. Elle vit avec sa famille à quelques kilomètres de l'école privé de Dudley Dursley dans un quartier extrêmement pauvre. Son père se tue à la tâche avec ses deux frères aînés tandis que sa mère s'occupe d'elle et de ses deux petits frères. Elle a également une sœur aînée, Natasha, qui vit avec eux et c'est d'elle qu'on doit la situation actuelle.
-C'est-à-dire ? fit Ragnok
-Pour gagner sa vie, la sœur de la jeune Johan n'a pas trouvé d'autres moyens que de vendre son corps, avoua Gripsec. Mis à part sa sœur Johan qui lui sert de couverture, sa famille n'en sait rien. En prétextant garder la plus grande de ses sœurs avec elle dans le petit pressing où soi-disant elle travaille, elle allègerait la charge de travail de sa mère qui lui en est assez reconnaissante. Mais à la place, elles vont dans l'une des maisons closes illégales de la capitale et pendant que sa sœur travaille, Johan étudie dans le débarras attenant.
-Laisse-moi deviner, ça a dégénéré avec l'un de ses clients ? railla Ragnok
-On peut dire ça, concéda Gripsec. Vernon Dursley était l'un des clients réguliers de Natasha et l'un des plus brutaux aussi. Elle l'acceptait parce que les prestations moins classiques étaient bien plus rémunérées et qu'elle avait vraiment besoin de cet argent pour sa famille. Depuis un an, certaines fois, Dursley venait avec son fils. Il y a trois mois, c'était le cas et je n'ai pas tous les détails. Tout ce que je sais, c'est que Natasha a sûrement dû refuser une demande du fils Dursley et que le ton est monté. Johan a sûrement voulu voir ce qui se passait et la catastrophe est arrivée.
-Elle a été violée, comprit Ragnok, la gorge se serrant.
-Avec sa sœur, confirma Gripsec. L'aînée par le père, la cadette par le fils. Malheureusement, avec leur situation, elles ne pouvaient rien dire à personne. Un mois plus tard, Johan a découvert qu'elle était enceinte. A treize ans.
-Elles n'ont pas porté plainte ? s'étonna Ragnok
-Ce serait une honte dans la communauté slave dans laquelle leur famille gravite de savoir que l'un de ses enfants vend son corps pour vivre, même s'il y a eu viol, expliqua Gripsec. Porter plainte pour Johan, ce serait dévoiler l'activité de Natasha et elles ne peuvent s'y résoudre.
-Et comment elle est en train de cacher qu'elle est en train d'attendre un enfant ? demanda Ragnok. Elle ne peut sincèrement pas dire qu'elle n'en sait rien !
-Sa grossesse ne se voit pas pour le moment, expliqua Gripsec.
-Donc tant qu'elle ne se dévoilera pas, elle ne pourra pas nous être utile … fit Ragnok.
Mais le rictus machiavélique de Gripsec lui indiqua qu'il avait mis le doigt sur la solution.
-Je t'écoute, sourit Ragnok.
-Que diraient les voisins si une jeune fille à peine majeure débarquait chez les Dursley pour révéler qu'elle attend l'enfant de leur rejeton chéri ? ricana Gripsec. Et qu'elle reviendrait chaque jour pour que sa future belle-famille reconnaisse l'enfant ? Et si ça poussait les Dursley à fuir leur situation confortable irrémédiablement détruite ?
-Tu comptes utiliser une moldue ? fit Ragnok
-Nos adversaires et Dumbledore le premier ne jouent pas fair-play, rappela Gripsec. Il n'a pas hésité à détruire des centaines de vies uniquement pour sa gloire personnelle. Oui, nous allons utiliser une enfant pour emprisonner une famille qui n'en mérite même pas le nom. Mais entre ça et un massacre qui exposerait sans aucun doute le monde de la magie et que Dumbledore s'empresserait d'utiliser à ses fins ? Je choisis la moldue. Sans aucune hésitation. Et au moins, nous n'avons pas à créer la situation de toute pièce …
Contrairement à Dumbledore, compléta Ragnok. Oui, le plan de Gripsec avait des chances de marcher mais il lui semblait … incomplet.
-Tu comptes t'en prendre qu'au fils Dursley ? demanda Ragnok
-Oh, nous nous sommes déjà occupés du père, ricana Gripsec.
-Comment ? sursauta Ragnok
-L'audit du patrimoine Potter, sourit machiavéliquement Gripsec. Il comprend la rente versée pour les besoins du seigneur Potter. Même si elle est illégalement versée au foyer Dursley, elle reste obligatoire pour tout enfant Sang Pur qui n'est pas élevé par ses parents. Nous avons donc tout à fait le droit de nous demander où elle est passée. Et comme Dursley n'a jamais déclaré cette rente au fisc …
Le même sourire machiavélique orna les lèvres de Ragnok.
-Si avec ça, ils ne plongent pas tête baissé … ricana Ragnok.
§§§§§
Hermione fut surprise quand elle reçut un courrier du ministère. Assez intriguée, elle vérifia discrètement qu'elle ne serait pas dangereuse pour elle avant de l'ouvrir.
Mademoiselle Hermione Granger,
En tant que personnage politique de premier plan, je me dois de connaître les personnages clés du pays. Harry Potter fait partie de ceux-là et j'ai remarqué que votre nom était le plus souvent accolé au sien.
Je me suis permis de mener une petite enquête et je dois avouer que je suis époustouflé uniquement par vos résultats scolaires. Savez-vous que vous avez obtenu les plus hauts scores aux BUSE depuis presque cent ans ? Je ne peux que vous féliciter pour ce prodige.
Si je prends contact avec vous, c'est pour vous proposer un partenariat.
Je n'entends que des éloges sur votre intégration dans le monde sorcier et vous avez un point de vue novateur du fait que vous venez du monde moldu. J'ai pour projet de demander une étude complète sur l'évolution des moldus par rapport aux sorciers pour qu'à terme, je puisse entamer les modifications sur la Loi du Secret.
J'aimerai que vous preniez la tête de ce groupe de travail.
Je sais que vous êtes encore scolarisée et que vous n'avez même pas vos ASPIC mais je suis persuadé que vous pourrez mener les deux de front.
Je serais ravi de pouvoir répondre à vos questions par retour de courrier.
Cordialement,
Rufus Scrimgeour
Ministre de la Magie d'Angleterre
La jeune femme referma le pli et ne trahit pas son scepticisme. Cette proposition était incongrue voire même … déplacée. Oui, elle était la meilleure amie d'Harry mais ce n'était pas une raison pour que le ministre en personne s'intéresse à elle ! Comme il l'avait soulignée, elle était à peine majeure et n'avait même pas ses examens donc il serait complètement saugrenu de la mettre à la tête d'un tel projet. De plus, une étude sur l'évolution du monde moldu par rapport au monde sorcier ? Elle était persuadée que cette étude existait déjà au département des Mystères et qu'elle n'était pas en faveur des sorciers.
-Mademoiselle Granger ?
-Professeur Flitwick, salua Hermione en souriant.
-Puis-je vous être d'une quelconque aide ? proposa Filius. J'ai cru comprendre que vous aviez reçu un courrier du ministère.
-Comment … ? sursauta Hermione
-L'oiseau qui vous a apporté cette missive est passé littéralement sous mon nez, rit Filius. J'ai eu le temps de voir la bague à sa patte.
Hermione réfléchit. Filius Flitwick faisait partie des rares professeurs à ne pas faire de différence entre les élèves, qu'ils soient nés de moldus ou nés de sorciers, ou qu'ils appartiennent à Serdaigle, Poufsouffle, Serpentard ou Gryffondor.
-Je ne crois pas qu'un couloir soit le meilleur endroit pour une telle discussion, se décida Hermione.
-Vous n'avez pas tort, sourit Filius. Puis-je vous proposer de me rejoindre dans mon bureau juste après le dîner ?
-J'en serais ravie, répondit Hermione.
-Bien, fit Filius. Au revoir, mademoiselle Granger.
-Au revoir, professeur, salua Hermione.
La jeune femme s'éloigna et rentra à la tour Gryffondor, rangeant soigneusement la lettre dans l'une de ses poches secrètes. Elle avisa Ginny et alla la rejoindre.
-Que dirais-tu d'une soirée entre filles ? proposa Hermione après avoir lancé une bulle d'intimité autour d'elles
-Ça faisait longtemps, remarqua Ginny. Uniquement Luna ou avec les langues fourchues ?
-Si on pouvait réunir toutes les filles, ce serait génial ! soupira Hermione
-Ce soir ? proposa Ginny
-J'ai rendez-vous après le dîner mais ce sera avec plaisir, fit Hermione.
-J'organise tout alors, déclara Ginny.
-T'es géniale ! assura Hermione
Ginny écrivit plusieurs lettres qu'elle envoya par le biais de son hibou Coq avant de reporter son regard sur son amie.
-Pourquoi tu n'as pas de petit-copain, Hermione ? demanda subitement Ginny
Hermione bascula dans son siège, songeuse.
-Tu oublies que je suis de toutes les aventures du grand Harry Potter, ricana Hermione. Une vie amoureuse me semble assez incompatible.
-Pourtant, tu voies quand on te drague, pointa Ginny.
-Je ne suis pas aveugle, fit Hermione. Mais personne ne m'intéresse.
-Ni Harry ni Draco ? railla Ginny
-Eh ! protesta Hermione. Comment ne pas baver sur ces deux apollons ?
-Tu n'as pas tort, rit Ginny. Non, sérieusement ?
-Ils sont inaccessibles, rappela Hermione.
C'était un code entre elles. Avec Pansy, Daphnée, Astoria, Luna et Ginny, elle avait remarqué que les deux Princes, avaient de grandes responsabilités mais pour autant, ils ne se rendaient pas compte de leurs sentiments respectifs. Non, ils n'étaient pas amoureux l'un de l'autre mais les filles avaient compris qu'ils ne savaient pas exprimer leurs sentiments. Pansy, qui était attirée par Draco, savait qu'elle allait ramer pour le lui faire comprendre.
-On en discutera ce soir, promit Ginny.
-Hermione ?
La bulle d'intimité venait de se dissoudre avec l'arrivée de Ron. La brune se renfrogna. Le roux ne lui avait absolument pas manqué.
-Oui, Ron ? soupira Hermione
-Je ne t'ai pas vu à mon anniversaire, accusa Ron.
Hermione lui lança un regard incrédule.
-Nous ne sommes pas amis, Ron, rappela sèchement Hermione. Je ne vois pas pourquoi j'y aurais assisté. Surtout que je t'avais dit non.
Une semaine avant la fameuse fête, Ron l'avait invité devant toute la maison Gryffondor. Visiblement, il avait pensé qu'avec la pression de ses camarades, elle accepterait sans hésiter. Malheureusement pour lui, Hermione n'avait jamais plié devant les diktats des sorciers et elle avait clairement refusé l'invitation. D'autant plus que la fête organisée dans une salle quelconque avait largement dégénéré avec plusieurs étudiants ivres – dont quelques-uns avaient moins de treize ans – et d'autres avaient dangereusement frôlé le coma éthylique.
-Mais pour mes dix-sept ans … protesta Ron.
-Et alors ? cracha Hermione
La main de Ginny l'empêcha d'aller plus loin. Elle regarda son amie qui lui faisait signe de ne pas continuer. Reniflant ostensiblement, Hermione se leva en ignorant de manière flagrante son interlocuteur et suivit Ginny dans son dortoir en remettant les sorts d'intimité.
-Qu'est-ce qui se passe avec le dix-septième anniversaire de cet abruti ? grommela Hermione
-Il comptait te demander en mariage, annonça de but en blanc Ginny.
-Il passe au niveau supérieur alors que j'ai toujours refusé de sortir avec lui ? s'étonna Hermione. Qu'est-ce que je ne sais pas ?
-Maman le pousse à avoir une situation pour après l'école, grimaça Ginny. Elle doit se douter qu'il ne réussira rien par lui-même mais toi, tu seras magistrale une fois ta carrière commencée.
-Donc il se cherche un pigeon pour vivre à ses crochets, grimaça Hermione. Mais pourquoi moi et pas une riche héritière sorcière ?
-Parce que les sorciers demanderaient des garanties qu'il serait incapable de fournir, rappela Ginny. On lui demandera toujours de pouvoir subvenir aux besoins de sa famille. Comme il ne veut pas utiliser ses dix doigts et ce qu'il a entre ses deux oreilles, ce n'est pas gagné. Pourquoi toi précisément … disons qu'il a un gros béguin pour toi depuis le Tournoi des Trois Sorciers.
-Oh, ça va ! grogna Hermione alors que Ginny ricanait
§§§§§
Astoria quittait Luna à la bibliothèque pour rejoindre sa sœur Daphnée dans les cachots. Elle profita du fait que des élèves de 7e année de sa maison allaient dans la même direction pour les suivre. Plus encore depuis le retour de Voldemort, il était dangereux pour les Serpentards de se promener seuls dans les couloirs de l'école. Sans compter Dumbledore et sa haine contre la maison de Salazar. Les plus importants héritiers avaient toujours reçu sa suspicion et en tant qu'amie de Draco Malfoy – et peut-être future petite-amie de Blaise Zabini, si ce dernier réussissait à convaincre Daphnée qu'il ne lui ferait pas de mal – elle était également étroitement surveillée.
Alors qu'ils traversaient le hall, le hibou des Greengrass déboula vers Astoria. Ne voulant pas perdre ses camarades de vue, elle détacha rapidement le pli de sa patte, la glissa dans sa poche et fila dans les cachots. Quand elle se trouva en sécurité dans son lit, elle l'ouvrit.
Ma chère Astoria,
Normalement, j'aurais seulement écrit à sa sœur mais j'estime que tu dois également être au courant.
Dans mon dos, ton père t'a fiancé.
Je sais, c'est abrupt mais je ne voyais pas comment te l'annoncer autrement.
A la base, ton père et moi voulions une alliance avec la famille Malfoy, surtout parce que je savais que le temps que Lucius ait étudié toutes les demandes, tu serais majeure. Mais le « maître » de ton père semble pressé de mettre la main sur sa nouvelle génération d'esclaves donc il fait en sorte de vous lier à lui au plus vite. Daphnée y échappe parce que sur elle repose l'héritage de ma famille.
Ton fiancé s'appelle Jonathan Dawlish, de six ans ton aîné. Son père est un auror des plus pathétiques mais lui est l'héritier de la famille. Techniquement parlant, il n'a pas de métier mais il a commencé il y a peu sa « carrière » en bas de l'échelle.
Pourquoi est-ce que ton père a choisi un si mauvais parti pour toi ? Je m'efforce de trouver la réponse. Ne t'affole donc surtout pas si tu reçois des lettres de ce rustre.
Je ferais tout pour annuler cette aberration.
Je t'aime
Ta mère
Astoria se retint de vomir. Elle savait son père totalement fou depuis qu'il avait rejoint les rangs du seigneur des ténèbres mais de là à renier tous les traditions Sang Pur pour le satisfaire, elle aurait pensé qu'il aurait plus d'amour propre ! Se recomposant un air neutre, elle sortit de sa chambre et avisa sa sœur dans la salle commune. Sans un mot, elle lui tendit la lettre qu'elle venait de recevoir. Son air devint sombre et d'un regard, lui demanda d'attendre quelques instants. Moins d'une demi-heure plus tard, toute leur bande était rassemblée à l'abri des regards et des oreilles indiscrètes. Daphnée faisait les cent pas, furieuse.
-Comment oses-t-il ?! cracha Daphnée
La lettre était passée de mains en mains et tous étaient indignés.
-Passe encore le mariage arrangé, tempêta Daphnée, mais un Dawlish ? Nos deux familles seraient la risée des Sang Pur !
Draco tiqua sur une autre information.
-Votre mère envisageait un mariage avec moi ? s'étonna Draco
-Ne fais pas celui qui est étonné ! claqua Daphnée. Malgré l'abruti qu'est ton père, tu es l'un des partis les plus recherchés dans nos cercles ! Tu devais te douter qu'un jour ou l'autre, la question de ton mariage serait posée sur la table !
-Du calme, Daphnée, tempéra Pansy.
-Voldemort essaie de placer ses pions parmi la nouvelle génération, fit Blaise en serrant Astoria dans ses bras.
-On devait s'en douter après que Narcissa nous ait invités pour les fêtes de fin d'année, souffla Théo. Il s'agit maintenant d'échapper à la marque jusqu'à ce que la guerre se termine.
Théo, Draco et Daphnée se comprirent en un seul regard. Etant chacun premier héritier de leurs familles respectives, la menace qui pesait sur eux était plus importante.
-On va disparaître, décida Draco.
-Mais … la guerre ! s'exclama Pansy
-Si nous restons, nous allons être enrôlés contre notre gré, expliqua Théo. Et c'est sur nous que les conséquences tomberont, surtout pas sur nos parents qui suivent ce dégénéré.
-Je n'ai pas dit que nous allons nous exiler, reprit Draco. Mais nous devons nous mettre hors de portée de nos parents qui portent la marque.
-Et comment ? demanda Pansy
-Mis à part Astoria, nous allons tous être majeurs cette année, réfléchit Théo. Pour la magie familiale, nous pouvons être indépendants.
-Mais les demeures ancestrales seront plus à même de nous protéger, rappela Astoria.
-C'est vrai, abonda Blaise. Et en plus, une fois que vous serez hors des barrières, vous serez à la merci des mangemorts qui n'hésiteront pas à vous traîner devant Voldemort.
-Pas faux … concéda Daphnée. Mais nous n'avons pas le choix. Au moins jusqu'à ce qu'on revienne ici.
-Il y a un autre problème, intervint Théo. Nous ne sommes pas spécialement en sécurité ici aussi. Nous sommes d'une utilité relative pour Dumbledore et il ne nous protègera pas.
-La solution serait de quitter définitivement Poudlard, déclara Blaise.
Tous se turent, conscients de l'importance de cette décision.
-Prenons un problème à la fois, trancha Draco. Il faut d'abord assurer notre sécurité sans pour autant que la magie familiale n'imagine que nous lui tournons le dos.
-Pour cela, il faudrait que nous ayons accès à une bibliothèque familiale, rappela Daphnée. Et ce sans se faire attraper.
-Il faudrait sortir du château pour cela et Dumbledore ne nous couvrira certainement pas, déclara Pansy.
-Ma mère pourrait nous aider mais elle ne saura pas où chercher, se désola Blaise. Nous ne sommes pas anglais …
-Ma mère le pourrait, hésita Draco. Mais elle est étroitement surveillée, à la fois par Dumbledore et par Voldemort.
-Voilà ce que nous allons faire, décida Théo. Chacun de notre côté, nous allons réfléchir au problème et dans une semaine, nous allons mettre toutes nos idées en commun. Ça vous va ?
Tous hochèrent la tête et se séparèrent. Daphnée pinça les lèvres en voyant sa sœur dans les bras de Blaise mais elle devait concéder qu'elle avait besoin de réconfort et même si son camarade n'était pas là en tant que futur petit-ami, il le serait en tant qu'ami.
-Tu ne vas pas te mettre entre eux ? demanda Théo qui était resté à ses côtés
-Elle est sensible à son charme et j'ai peur qu'il lui brise le cœur, avoua Daphnée.
-Il sait parfaitement que s'il le fait, il t'aura sur le dos, ricana Draco qui était lui aussi resté. Laisse-la faire ses choix.
-Tu es enfant unique, tu peux parler, renifla Daphnée.
-Pourquoi son mariage te met hors de toi ? demanda Théo. Nous savons tous que nous pouvons avoir notre mariage arrangé.
-C'était implicite dans notre famille, soupira Daphnée. Maman avait réussi à négocier avec père qu'on ne parlerait mariage qu'après nos dix-sept ans. Mais depuis que Voldemort est de retour, il brise toutes ses promesses.
-Et pourquoi pas ton mariage ? demanda Draco
-Je dois reprendre le nom de ma mère, parce qu'il est plus important que celui des Greengrass, répondit Daphnée. C'est donc elle qui a toute autorité pour gérer les négociations.
Les deux garçons hochèrent la tête.
-Est-ce que vous avez une idée pour nous mettre à l'abri ? demanda Daphnée
-La priorité est de faire comprendre à la magie familiale qu'on ne lui tourne pas le dos même si nous quittons nos maisons, rappela Théo. C'est pour cela qu'il est préférable qu'on y réfléchisse à tête reposée. Mais l'idéal serait qu'on mettre la main sur une maison familiale et qu'on la place sous le statut de refuge.
C'était une pratique qui datait des guerres moldues. Les sorciers pris entre deux feux, quand ils ne vivaient pas dans une demeure ancestrale, étaient généralement sous la protection d'un lord Sang Pur. Ces derniers lançaient sur certains domaines précis leur appartenant des protections spécifiques dites de refuge. S'ils étaient quand même attaqués, la magie familiale entrait en jeu … et les belligérants n'étaient généralement plus là pour en parler. Mais pour cela, il fallait qu'ils soient sous la protection d'un lord régnant ou d'un héritier suffisamment puissant, et encore …
Les trois amis retournèrent dans la salle commune et se séparèrent après un dernier regard de connivence.
