Les souhaits des autres

Harry s'étira longuement avant de filer dans la salle de bain plongée dans le noir complet. Le bain que Dobby lui avait fait couler était délicieux et lui permettait de totalement se détendre. L'équinoxe de printemps avait été moins spectaculaire que le solstice d'hiver et que Samain mais tout aussi douloureux. Heureusement pour lui, comme la transformation physique avait déjà eu lieu, sa période de stase était bien plus courte. L'avantage de cet équinoxe était que le lendemain était un dimanche. Il s'était arrangé avec ses amis pour qu'il le couvre et maintenant, il avait du temps pour lui.

Depuis un moment, il réfléchissait à la proposition de Severus Snape. Être apprenti en potions était un rêve qu'il voulait voir devenir réalité. La matière l'avait toujours passionné et c'était une chance qu'un maître aussi prestigieux – il lui avait avoué qu'il avait mené beaucoup de projets inconnus en Angleterre mais qui avaient eu un succès phénoménal à l'international – se soit penché sur son cas.

Il savait que ça allait engendrer beaucoup de problèmes, surtout du côté de Severus. Pour l'opinion publique, il était un mangemort qui ne devrait même pas approcher du Survivant, peu importe ses qualifications ou ce qu'Harry avait envie de faire réellement. Pour les sorciers, Harry Potter devait absolument devenir auror et sauver la veuve et l'orphelin, épouser une femme à laquelle il passerait tous les caprices et il aurait une ribambelle d'enfants. Tiens ! Il pariait même que ses premiers enfants devraient s'appeler, toujours selon la sacro-sainte opinion des sorciers anglais – avec Molly Weasley en tête – James et Albus pour les garçons et Lily pour sa fille.

Harry se secoua. Il devait penser à son avenir, peu importait ce que le monde sorcier pouvait vouloir pour lui. Il n'avait jamais imaginé un seul instant de ne pas accepter la proposition de Severus mais il savait que s'il voulait qu'on le laisse tranquille, il allait falloir qu'il fasse les choses bien, surtout d'un point de vue officiel.

Et là, il eut une illumination.

-Dobby ?

-Seigneur Harry, s'inclina Dobby.

-Est-ce qu'Andromeda Tonks est toujours dans le manoir d'hiver ? demanda Harry

-Oui, seigneur Harry, confirma Dobby.

-T'a-t-elle donné sa réponse ? demanda Harry

-Non, répondit Dobby. Mais elle a demandé à vous voir dès que possible.

-J'irai dans la semaine, promit Harry.

-Vous avez une idée en tête, comprit Dobby.

-J'ai entendu parler d'une loi en cours de rédaction qui remettrait directement en cause ma majorité sorcière, avoua Harry. J'aimerai m'en passer, bien entendu. Andromeda a un dossier sur mon oncle et elle a découvert mes conditions de vie fabuleuses. Je pense qu'elle pourrait être utile.

-Comment ? demanda Dobby

-J'ai l'intention d'accepter un apprentissage en potions avec Severus Snape, sourit Harry. Seulement, ça va crier de tous les côtés quand on va l'apprendre. Je refuse de me plier aux volontés d'un peuple qui ne veut pas se défendre.

-Je comprends votre point de vue, fit Dobby. Voulez-vous que je lui transmette votre projet ? Vous pourriez faire en sorte que ce soit la condition pour qu'elle revienne dans le clan Black, non ?

-Quoi qu'elle choisisse, de toute façon, je ne pourrais pas la réintégrer avant ma majorité, et encore, si on me laisse faire, fit Harry.

-Chaque chose en son temps, sourit Dobby. Vous devriez sortir de ce bain, je vais vérifier que vous allez bien.

Nu comme au premier jour – Harry avait cessé d'être pudique avec l'elfe de maison depuis qu'il soignait toutes ses blessures après chaque crise de magie – le brun examina rapidement son corps avant de s'habiller et de remonter depuis la Chambre des Secrets vers les parties plus fréquentées du château. Neville l'accueillit avec joie alors qu'il passait dans le dortoir.

-Tu n'as pas bien choisi ton jour, ricana Neville.

-Quoi que j'aie envie de faire, ce n'est pas le bon jour, sourit Harry. Qu'est-ce que j'ai loupé ?

-Une réunion avec tous nos amis, répondit Neville. Je pense qu'il y a quelque chose qui les préoccupent.

-Tous ? s'étonna Harry

-Tous, confirma Neville. Ce soir ?

-Ça me va, accepta Harry.

Les deux amis rejoignirent Hermione et Ginny avant de se rendre dans la Grande Salle pour le déjeuner.

§§§§§

Molly était vraiment agacée.

L'été dernier, elle avait été furieuse que sa fille Ginny n'ait pas réussi à rester la petite-amie d'Harry Potter. La discussion qu'elles avaient eu avait failli salement dégénérer et Ginny avait pu y réchapper en se rendant dès qu'elle avait pu chez son amie Luna qui, une fois n'était pas coutume, était restée chez elle pendant toutes les vacances. Albus lui avait d'ailleurs fait payer chèrement cette défection d'abord en réduisant de moitié ses versements de galions puis en les arrêtant totalement dès août. Cela embêtait grandement la matrone rousse car elle avait besoin de cet argent pour terminer les luxueux arrangements de la propriété qu'elle s'était offerte dans le plus grand secret. Elle tenait vraiment à avoir sa salle de bains en or !

Molly se rendit dans la salle de bal du manoir Black pour la nettoyer après la réunion de la veille et grimaça. Avant son mariage avec Arthur, elle n'avait jamais fait aucune tâche ménagère, les refourguant avec plaisir à ses petits frères quand son père avait été ruiné mais ensuite, surtout en étant enceinte et son mari devant apporter une source de revenus, elle n'avait pas eu le choix. Au fil des années, Molly avait appris à maîtriser les sorts ménagers et s'était débrouillée avec la cuisine – et l'aide du dernier elfe de maison de la famille Prewett, bien entendu – mais ce n'était pas pour autant qu'elle aimait ça. Très souvent, elle se demandait à quoi servait Kreattur, le dernier elfe de maison des Black. Ce dernier traînait dans les couloirs en marmonnant dans sa barbe et était totalement réfractaire à tout ordre qu'elle pouvait lui donner. Elle n'oubliait pas ce qui s'était passé pendant les fêtes ! Ils étaient quand même accompagnés de nul autre qu'Albus Dumbledore et il avait quand même réussi à les blesser sérieusement et à les maintenir évanouis pendant presque une semaine ! Elle avait voulu avoir un tête-à-tête avec l'elfe de maison mais ce dernier l'esquivait sans cesse dès que le sujet était abordé … quand il acceptait de l'écouter un minimum, bien sûr.

Molly était hargneuse pour un autre sujet. Le manoir Black, bien que très mal entretenu, restait une propriété Sang Pur. C'était ce à quoi elle avait toujours aspiré durant son enfance et son adolescence et quand Albus lui avait appris qu'elle allait enfin pouvoir s'installer dans l'une d'entre elles, elle avait été enchantée. Elle n'avait pas attendu l'accord d'Arthur pour s'y installer et il avait fallu l'intervention d'Albus pour le convaincre de s'y installer à son tour.

Mais depuis les fêtes de fin d'année … elle était furieuse ! Elle ne savait pas ce qui s'était passé mais être repoussé dans une minuscule partie du manoir sans possibilité d'aller dans l'immense autre partie, c'était vraiment injuste ! Quand les enfants étaient retournés à l'école, elle avait ressorti tout son arsenal de sorts – et il était vraiment varié, surtout qu'il ne comportait pas que des sorts politiquement corrects – pour détruire le mur de magie qui les isolait et profiter de ce à quoi elle avait droit.

En pure perte.

Tous les sorts lui étaient intégralement revenus en pleine figure. Et comme elle ne s'était pas limitée au simple sort d'ouverture, elle s'était retrouvée très gravement blessée. Les sorts de surveillance qu'Albus avait installés dans toute la maison – maintenant uniquement dans la partie accessible – avaient alerté ce dernier qui avait dû venir à son secours. St Mangouste était impensable sans qu'Arthur ne soit mis au courant et aucun secret ne pouvait être gardé à Poudlard, le directeur avait dû se résoudre à faire appel à Severus Snape pour soigner la matrone. Le rictus moqueur qu'il avait affiché sur son visage pendant toute la durée des soins avait ulcéré la rousse, outré que ce déchet ose se foutre d'elle !

Après cet échec retentissant, elle avait dû cesser ses tentatives de passer de l'autre côté du manoir. Mais ce n'était pas pour autant qu'elle n'enjoignait pas ses enfants à se rapprocher d'Harry Potter. Malheureusement pour elle, dès qu'elle avait récupéré de sa désastreuse première année, Ginny avait cessé de travailler activement à ce but. Ce qui s'était passé, c'était que la jeune fille avait voulu obéir aux ordres de sa mère mais quand elle avait fait mine de mettre ses plans à exécution, Harry l'avait arrêté et lui avait clairement signifié qu'il comptait faire ses choix lui-même en son âme et conscience dès qu'il serait temps. En clair, qu'il se chercherait quelqu'un que quand il s'intéresserait enfin au sexe et pas avant. Naïve, Ginny avait répété à sa mère mot pour mot les paroles d'Harry ce qui lui avait fait grincer des dents. Si elle faisait bien la traduction : pas la peine de lui coller Ginny dans les pattes alors que le sexe n'était encore qu'une vue de l'esprit pour lui. Albus, quand il l'avait su, avait tiqué, mais avait concédé qu'il était peut-être un peu trop tôt pour qu'Harry ait une petite-amie. En fait, ils avaient dû attendre sa quinzième année pour qu'il voie d'un autre œil les filles. Et même là, quand Ginny avait enfin atteint le but qu'on lui avait fixé depuis des années, Harry n'avait pas été assez intéressé pour continuer cette relation qui avait plus ressemblé à un test qu'à une véritable volonté de montrer au monde la future lady Potter.

A ce jour, Harry ne comptait pas reprendre de petite-amie. Cependant, les rumeurs disaient qu'il était extrêmement proche d'Hermione Granger. Cela faisait grincer des dents Molly car elle ne supportait pas la jeune femme. Outre ses origines moldues, Hermione Granger montrait une adaptation au monde sorcier très admirable mais surtout, elle avait su s'attacher deux héritiers Sang Pur parmi les seuls du côté « lumineux », Harry Potter et Neville Longbottom. A la base, Ron avait fait partie de ce groupe mais elle comprenait parfaitement la réaction de son fils quand il avait appris que le Survivant possédait un don aussi noir que celui de parler aux serpents. Ça aurait été une honte que de fréquenter un mage noir en devenir ! Mais après coup, Molly comme Albus s'étaient rendu compte que ça avait été un très mauvais choix tactique puisqu'Harry avait refusé par la suite d'adresser la parole à Ron et Hermione et Neville avaient très vite suivi. Pire, le roux était lentement mis sur le banc de sa maison, à la fois pour son éducation tranchée qui le poussait à s'en prendre aux Serpentards que par les rebuffades qu'il se prenait en voulant s'imposer à Harry et de plus en plus souvent à Hermione.

-Molly ?

La rousse sursauta.

-Professeur ! salua Molly. Je ne vous avais pas entendu !

-Ce n'est pas grave, sourit Albus. Arthur n'est pas là ?

-Il m'a dit qu'il allait travailler tard, renseigna Molly.

-Nous pourrons donc parler tranquillement, sourit Albus. Installez-vous, cela va prendre un peu de temps …

§§§§§

Xosa était mal à l'aise. En fait, il n'avait vraiment pas envie d'être là.

Le conseil s'était réuni mais il était clair que ce n'était pas une session officielle si on se référait au nombre d'absents. Et il n'était pas assez aveugle pour noter que le groupe qui était avec lui avait une vision particulière de leur avenir et des buts précis. Certes, il n'avait pas la même vision mais certaines de leurs idées rejoignaient les siennes. Pour autant, il n'était pas rassuré.

-Kalypsan est mort, annonça Eutar.

Xosa sursauta. Les faë étaient leurs voisins les plus proches et Kalypsan leur chef depuis plusieurs centaines de lunes d'obsidienne. Il avait hérité du trône après la longue agonie de son père et apparemment, il avait succombé à la même maladie. Ils n'étaient pas à proprement alliés mais ils ne se cherchaient pas des noises. Sinon, il était certain que leurs terres respectives auraient ressemblé à un champ de bataille.

-Nva n'a que trente lunes, poursuivit Eutar.

Xosa fronça des sourcils. Mais de quoi parlait le chef du conseil ?

-Nos troupes sont prêtes à soutenir le nouveau seigneur faë, continua Eutar. Elles se trouvent à la frontière et n'attendent que notre ordre pour la passer et se rendre au palais pour protéger cet enfant. Nous devons encore décider qui devra s'y rendre pour coordonner tout cela.

Les discussions emplirent la salle, poussant Xosa à se mettre à l'écart, perdu.

Outre le fait qu'aucun d'entre eux n'avait une once de diplomatie pour traiter correctement avec des faë, le conseil n'avait jamais parlé en session régulière de porter assistance à la lignée royale faë dans le cas où leur seigneur viendrait à disparaître. Se mêler de la politique intérieure d'une autre nation pourrait leur revenir en pleine figure et surtout, les faë pourraient penser qu'ils auraient le droit de mettre le nez dans leurs affaires.

-Alors nous sommes tous d'accord ? demanda fortement Eutar. Chotan ira donc chez le nouveau seigneur faë.

Alors que les cris d'acquiescement s'élevaient dans la pièce, Xosa crut que ses yeux allaient sortir de ses orbites. Etaient-ils tous fous ? Sur toute l'assemblée, Chotan était le pire choix possible ! Sa cruauté et son manque flagrant de tact n'étaient plus à démontrer. Mais le pire restait ses pratiques abjectes. Xosa avait un ami dont la famille habitait sur les terres de Chotan. Depuis qu'il les avait reprises à la suite de son père, il invitait à chaque lune chaque famille qui avait des enfants entre cinquante et soixante-dix lunes environs pendant une semaine. Les parents étaient alors drogués et les enfants laissés à la merci du maître des lieux … Laisser un enfant être aussi proche de lui serait définitivement une très mauvaise idée.

Dans un état second, Xosa entendit les autres discuter des différentes mesures que Chotan pourrait conseiller au prochain seigneur faë pour permettre de conclure des accords privilégiés. Une heure plus tard, l'assemblée se dispersa et chacun rentra chez eux. Eutar et Chotan furent rapidement seuls.

-Xosa n'est pas fiable, annonça Chotan.

-Je m'en doutais, fit Eutar. Je l'ai juste fait venir pour en être sûr.

-Tu veux l'éliminer ? demanda Chotan

-Nous n'avons pas le choix, déclara Eutar. Même si personne ne le croira. Qu'il ne rentre pas chez lui.

-Ce sera fait, promit Chotan en s'éclipsant à son tour.

§§§§§

Augusta termina de remplir les documents et les authentifia avec le sceau des Longbottom.

-Ils faisaient tellement de progrès, se plaignit le médicomage.

-J'en doute, lâcha Augusta. Si vous voulez bien me conduire à eux immédiatement.

Le ton était sans appel et le spécialiste dut obtempérer.

Neville l'avait prévenu que Dumbledore s'intéressait d'un peu trop près à lui. Consciente que le seul point faible de la famille restait son fils Franck et sa femme Alice, Augusta avait décidé de les retirer de l'hôpital sorcier pour qu'ils soient soignés à domicile. Oh, les médicomages qui s'occupaient de leurs cas s'étaient bien insurgés et avaient voulu mettre leur véto mais Augusta leur avait rappelé que la seule personne à avoir leur tutelle en cas de défaillance flagrante était leur chef de famille et non quelques médicomages à peine compétents qui se faisaient des couilles en or en faisant semblant de se pencher attentivement sur leurs dossiers. Ça les avait laissés sans voix.

Deux infirmiers – qui n'en avaient que le nom, si on se fiait à la rudesse dont ils faisaient preuve – amenèrent le couple Longbottom à la matriarche qui les examina rapidement avant d'hocher la tête. En quelques coups de baguette, elle les habilla et leur pria de la suivre. Ils furent menés vers la salle de transports et Augusta activa un portauloin qui les fit arriver tous les trois dans une autre salle de transports.

-Lady Longbottom ? appela une voix

-Allez-y, ordonna Augusta.

Une salve de sorts fonça sur le couple qui ne bougea pas d'un pouce, enfermé dans leur monde. La matriarche n'était pas naïve au point d'ignorer qu'il y avait une raison précise à ce qu'on ait mis des bâtons dans les roues quand elle avait voulu récupérer le couple. Elle avait fait appel à plusieurs briseurs de sorts et des médicomages indépendants de St Mangouste pour vérifier qu'il n'y avait rien de compromettant sur son fils et sa bru. A raison visiblement puisqu'elle pouvait voir les visages de chacun devenir de plus en plus sombres.

Une quinzaine de minutes plus tard, tout s'arrêta.

-Vous pouvez y aller, déclara le médicomage principal.

-Votre paiement se trouve dans vos coffres respectifs, indiqua Augusta. Bonne journée.

Elle utilisa un autre portauloin – celui-ci parfaitement illégal – et l'enclencha. Tous les trois arrivèrent dans l'une des demeures secrètes des Longbottom. Elle les plaça chacun dans une chambre et leur donna deux potions.

L'antidote au poison qui les maintenait enfermés dans leur esprit et une autre pour contrer ses effets secondaires.

Oui, ce n'était pas les doloris à répétition qui les avaient plongés dans la folie mais un poison qui coulait dans leurs veines depuis leur mariage. Augusta avait décidé de profiter de l'attaque pour retirer le couple de l'influence malsaine de Dumbledore. Indétectable, car c'était une invention des Longbottom qu'ils n'avaient pas mis sur le marché, seul un legilimens puissant pouvait se douter de ce qui se passait. Augusta aurait bien aimé voir la tête du directeur de Poudlard quand il avait dû comprendre qu'il s'était fait entuber dans les grandes largeurs.

Les effets étant beaucoup plus rapides sur un Longbottom de sang, la matriarche décida de commencer par son fils. Elle voulait savoir exactement ce qu'il avait livré comme informations à Dumbledore.

-Où suis-je ? balbutia Franck d'une voix rauque

-A l'isolement, répondit Augusta.

Personne n'entrait sur le domaine principal des Longbottom sans montrer patte blanche. Les demeures cachées servaient essentiellement de filtres pour les intrus … voire de prison ou de lieu d'exécution pour ceux qui s'en prenaient à la famille. Aux vues des actes dont il s'était rendu coupable, Franck ne devait pas être étonné de se retrouver là.

Elle lui donna un verre d'eau avec quelques gouttes d'une potion pour soulager sa gorge qu'il but doucement.

-Où se trouve Alice ? demanda Franck

-Dans une autre chambre, répondit Augusta.

-Parfait, fit Franck.

Augusta ne montra pas son étonnement.

-J'aurais quelques questions à te poser, fit Augusta. Quel est ton dernier souvenir ?

-Dumbledore qui venait nous voir, répondit Franck en se rasseyant plus confortablement dans son lit.

Augusta sursauta. De l'avis général, la dernière visite qu'ils avaient eue était celle de la famille Lestrange, qui les avait torturés.

-Si tu ne me crois pas, tu n'as qu'à me donner du philtre de vérité, soupira Franck. Je suis résistant mais avec mon état de santé, ce sera plus sûr.

Sans un mot, la matriarche lui tendit la fiole correspondante. Elle attendit quelques minutes avant de reprendre.

-Pourquoi était-il là ? demanda Augusta

-Il voulait parler à Alice, répondit Franck. Je n'étais même pas sensé le savoir, puisque je devais travailler tard ce soir-là.

-Et pas Alice ? s'étonna Augusta

Le couple était dans la même équipe donc ce que l'un faisait, l'autre le faisait aussi.

-Elle devait travailler autre part, répondit Franck. Quand j'ai moi-même terminé, j'ai été étonné qu'elle ne m'ait pas prévenu qu'elle partait. Je suis tombé nez à nez avec Dumbledore et elle.

-Ensuite ? demanda Augusta

-Dumbledore m'a ordonné de lui préparer une potion de fidélité, révéla Franck.

-Ordonné ? releva Augusta

-Oui, confirma Franck. C'est là que mes soupçons ont été confirmés.

-Quels soupçons ? demanda Augusta

-Je sais qu'Alice m'a convaincu de ne pas m'investir dans toutes les affaires de la famille, soupira Franck. Mais brasser les potions délicates n'étaient clairement pas mon idée, d'autant plus que Dumbledore avait déjà sous la main Severus Snape. Mais c'était comme si j'y étais obligé. J'ai fait quelques vérifications et j'ai compris que j'avais été soumis à une version rare du philtre d'ordre. Je devais obéir à Alice mais également à Dumbledore.

La fureur d'Augusta n'avait pas de limite. Comment avaient-ils pu oser ?!

-J'ai fait en sorte de limiter les dégâts, poursuivit Franck. Comme des sommes extravagantes s'envolaient des coffres de la famille, j'ai fait en sorte de mettre en place des plafonds de retrait assez bas pour Alice et moi pour notre coffre commun et je nous ai interdit l'accès aux autres coffres sans ton autorisation.

La matriarche hocha la tête. Quand elle l'avait découvert, elle l'avait mis sur le compte du fait que le couple voulait totalement se détacher de tout ce qui avait trait aux affaires occultes de la famille Longbottom. A tort, visiblement.

-Quand Dumbledore a donné ses ordres ce soir-là, j'ai enclenché les protections autour de Neville et j'ai voulu activer le poison dans les veines d'Alice, reprit Franck. Il me fallait des réponses et elle était la seule à pouvoir me les donner. Mais je devais d'abord me débarrasser de Dumbledore et j'ai refusé ses ordres. Comme il était moins conciliant que d'habitude, il a commencé à me torturer. Et Alice n'a fait aucun geste pour me protéger.

Augusta voyait bien les jointures de son fils devenir blanches à force d'être serrées. Si Alice n'avait pas bronché en voyant Dumbledore faire, alors c'était qu'ils s'étaient tous trompés sur son compte.

-Les protections de la maison m'ont éjecté du salon et y ont enfermé Alice et Dumbledore, raconta Franck. Je me suis précipité vers Neville et j'ai rajouté tous les sorts de protection que je connaissais. En dernier recours, j'ai bloqué le sang d'Alice pour qu'on ne puisse pas lui faire du mal.

Augusta écarquilla des yeux. C'était une mesure inédite. Son fils avait littéralement renié l'ascendance maternelle de son fils jusqu'à ce que lui ou elle infirme ou confirme cette décision. Peu de Sang Pur y avait recours.

-Quand Dumbledore a débarqué dans la chambre de Neville, j'ai activé le poison dans mon sang et dans celui d'Alice, termina Franck. Malheureusement, je n'ai pas eu le temps de le faire pour Neville …

-Pourquoi as-tu eu l'idée de renier la partie d'Alice ? demanda Augusta

-Quand j'ai compris qu'elle n'avait pas réagi à la détresse d'Harry Potter en tant que marraine, répondit Franck.

Augusta sursauta.

-Explique-toi, ordonna Augusta.

-Alice était de service à la mort des Potter, déclara Franck. Elle avait refusé de me suivre pour fêter Samain ici avec moi.

C'était l'une des choses qui horripilait Augusta. Sa bru ne participait à aucune célébration sorcière et ce n'était pas faute de lui avoir proposé de l'initier.

-La mort d'un chef de famille est ressentie par tous les autres, je ne t'apprends rien, rappela Franck.

Augusta hocha la tête. Quand les Potter étaient morts, Franck était lord Longbottom depuis environ deux ans, conjointement avec sa mère en tant que lady Longbottom. C'était une configuration rarement utilisée à la tête des familles Sang Pur mais parfaitement acceptée.

-Quand je suis rentré à la maison le premier novembre, sachant les Potter morts, j'ai vu Alice qui n'avait pas l'ait affectée de quoi que ce soit, reprit Franck. Les doutes m'ont effleuré quand j'ai dû lui apprendre la mort de Lily et de James. Elle ne s'est même pas inquiétée de l'avenir d'Harry. Deux jours plus tard, Dumbledore venait à la maison.

-Quels sont tes projets ? demanda Augusta

-D'abord, savoir qui est réellement Alice. Ensuite, prendre soin de mon bébé.

-Un bébé qui est maintenant un grand jeune homme de bientôt dix-sept ans, sourit Augusta.

-Hein ? bégaya Franck. Mais où sont passées toutes les années ?!

-Elles sont loin, soupira Augusta.

-Pourquoi m'as-tu réveillé aussi tard ? demanda Franck

-Disons que comme je te croyais entièrement soumis à Dumbledore, il était plus sûr que je t'éloigne de lui en te maintenant dans ton esprit, s'excusa Augusta.

-Je comprends, souffla Franck. Allons, mère, si je suis ici, c'est pour me remettre sur mes pieds et faire payer à ceux qui veulent s'en prendre aux Longbottom, non ?

Augusta ne put que sourire. Qu'il était bon de retrouver son fils …