Par le sang versé
Albus se réveilla, haletant.
Pour la première fois depuis presque seize ans, il avait revu dans ses songes une personne qu'il n'avait jamais voulu revoir. Il se souvenait avec une clarté diabolique de la date exacte et des détails précis de la fois où il l'avait vu dans ses rêves. La veille, il venait de déposer son fils dans une maison qu'il avait rendu volontairement violente. Deux jours avant, il l'avait tué avec son mari.
Flash-Back
Le meurtre de Lily et James Potter, ainsi que le placement illégal du jeune Harry chez sa famille moldu n'empêchait pas Albus Dumbledore de dormir, loin de là. Mais visiblement, sa conscience en pensait autrement.
Alors qu'il se voyait sur un trône en or massif et serti de pierres précieuses, symbole de sa réussite et de son titre de maître du monde, son rêve le ramena à Poudlard, plus précisément dans la Grande Salle. Cette dernière était vide et contrairement à d'habitude, il se trouvait au niveau des tables des élèves. Parce que l'estrade des professeurs et pire encore, sa place de directeur était occupée.
-Bonsoir Albus, fit l'intruse.
-Lily, fit Albus. Que faites-vous ici ?
-La question la plus légitime serait plutôt ce que vous, vous êtes en train de faire, sourit Lily. Mais nous y reviendrons plus tard.
-Je ne vois pas … protesta Albus avec son air de gentil grand-père plaqué sur son visage.
-Allons, Albus, taisez-vous, coupa doucement Lily. Nous savons tous les deux que vous alliez mentir outrageusement.
Albus fronça des sourcils. Il s'était toujours méfié de Lily Evans parce qu'il avait toujours l'impression qu'elle pouvait voir au-delà de ses masques mais il n'avait jamais pu le prouver.
La rousse s'installa plus confortablement dans le siège du directeur, la place d'Albus depuis des dizaines d'années. Belle, royale, comme s'il était plus légitime qu'elle soit là que lui.
-Pourquoi êtes-vous venu chez moi me tuer avec mon mari ? demanda Lily
-Voldemort vous a … corrigea Albus.
-Nous savons tous les deux que Voldemort est votre marionnette, coupa Lily. Qu'est-ce que nous avions de plus que les autres pour que vous nous considériez comme des dangers pour votre montée au pouvoir ? C'est parce que James n'avait pas confiance en vous et ne comptait pas engager la réputation des Potter à vos côtés ?
Albus serra les poings. Il ne pouvait se le cacher, le refus de James Potter à sa sortie d'école de le soutenir dans son entreprise de rendre le monde meilleur l'avait horriblement vexé. Pourtant, il avait fait en sorte que pendant sa scolarité, il soit privilégié. Mais même le fait que le jeune homme n'ait jamais été puni à la hauteur de ses fautes, y compris quand sa bande avait failli faire tuer un autre élève – bien que l'aventure lui ait bien servi sur un autre plan – ne l'avait pas convaincu de faire confiance à son directeur d'école. Albus avait bien vu l'influence de Lily Evans sur James Potter à partir de sa seizième année, où elle lui avait fait comprendre que le retour de bâton de ses blagues idiotes se ferait ressentir bien assez tôt et surtout, elle avait su admirablement manipuler son orgueil et son arrogance pour qu'il se rende compte que le prestige du clan Potter serait définitivement terni s'il ne respectait pas un minimum ses camarades et le monde qui l'entourait. Contrairement à ce que le directeur voulait, James s'était intéressé à la politique et aux us et coutumes sorcières et sang pur et au lieu de lui demander conseil, il s'était rapproché de son père et de son grand-père qui avaient toujours su voir les véritables intentions d'Albus. Le refus de la lignée Potter l'avait vraiment mis en rage car les héritiers étaient plus charismatiques que lui et pourraient retourner ses soutiens en moins de temps qu'il ne pourrait le dire. Il avait su arranger les meurtres du patriarche et de son fils en accident mais pour James, il lui fallait quelque chose de bien plus spectaculaire pour frapper un grand coup le monde sorcier et lui faire comprendre que rien de bon ne sortirait si on ne s'alliait pas à lui. C'était pour cela qu'il avait donné rendez-vous au couple à Godric's Hollow à Halloween. Ils étaient venus avec leur bébé et la discussion avait rapidement dégénéré. James, en tant qu'auror d'élite, s'était battu jusqu'au bout et Albus concédait qu'il avait apprécié le combat.
Non, la surprise était venue de Lily Evans.
Outre la protection qu'elle avait donnée à son fils Harry, la rousse avait révélé un talent sans pareil pour le combat. Ceux qui avaient enquêté sur le meurtre des Potter en avaient déduit que l'essentiel des combats avaient eu lieu entre James et Voldemort au rez-de-chaussée. Ce qu'ils ne savaient pas, c'était que Lily ne s'était pas réfugiée tout de suite à l'étage avec Harry. Non, elle avait placé son fils dans un coin, avait tracé un bouclier de runes pendant que son mari occupait Dumbledore puis elle s'était lancée dans le combat. Contrairement à James qui était doué avec une baguette, Lily était une virtuose sans, à sa plus grande surprise. Le directeur ne connaissait pas les capacités de son ancienne élève et honnêtement, à tête reposée, il doutait franchement d'avoir pu avoir le dessus si la sécurité de son fils n'était pas en jeu. Elle avait profité d'un sort qui l'avait assommé une minute ou deux pour s'emparer de son bébé et monter à l'étage. C'était d'ailleurs parce qu'elle lui tournait le dos qu'il avait pu la tuer.
Et maintenant, elle venait le hanter ? Elle se prenait pour qui ?!
-J'aurais pu vous protéger de Voldemort si vous m'aviez fait confiance, insista Albus.
-Qui essayez-vous de convaincre ? sourit Lily. Vous ou moi ? Parce que même si vous avez arrangé les choses au cottage pour que ça corresponde à votre vision de l'histoire, je sais qui j'ai empêché de s'en prendre à mon fils. Et ce n'est pas Voldemort.
Albus abandonna son masque.
-Que voulez-vous ? demanda sèchement Albus
-Vous mettre face à vos actes, répondit Lily. Vous avez massacré mon mari et moi pour mettre la main sur le clan Potter et son influence sur le monde sorcier anglais à travers mon fils. Pourquoi ?
-Il sera la consécration de mon plan, sourit furieusement Albus.
-Appréciez les dernières années de votre vie, Albus, déclara Lily. Parce qu'en versant mon sang, vous avez fait plus que tuer la femme de James, la mère d'Harry ou lady Potter. Vous êtes en train de vivre vos derniers instants.
Fin Flash-Back
Là, il venait de se réveiller au matin du 31 juillet avec le souvenir vivace de ce rêve fait des années auparavant. Maugréant dans sa barbe, il s'apprêtait à se rendre au 4, Privet Drive pour y tirer par la peau du cou ce gamin impertinent de Potter. Par le biais de Molly, il l'avait invité au Terrier une semaine auparavant pour qu'il puisse y fêter son anniversaire mais ce dernier avait refusé parce que son oncle refusait que des sorciers approchent quand sa sœur Marge se trouvait chez lui. Le directeur allait donc se rendre chez Potter, kidnapper le gamin qu'il aura préalablement endormi et lui lancer le sort de transfert de magie pour que quand Potter affronterait enfin sa marionnette, il lui enlèverait toute sa magie pour qu'il meure. Il avait même préparé son testament pour que tout le patrimoine Potter lui revienne intégralement.
Un sourire vicieux aux lèvres, Albus Dumbledore quitta le château.
§§§§§
La fratrie Solna se tenait l'un contre l'autre. Fin avait été choqué de voir Melia chez les RoseSang et ne l'avait pas lâché depuis. Kali et Celeb Velvet les observaient avec amusement.
-Bon, coupa Kali. Personne ne sait que mademoiselle ici présente est notre invitée.
-Qu'avez-vous fait du shaman à qui je dois mon emprisonnement ? gronda Melia
-Oh, il est sous très bonne garde, sourit machiavéliquement Kali. Et je compte lui rendre visite très bientôt.
-J'adorerai vous accompagner, fit Melia.
-Je m'en doute, sourit Kali. Mais je crains que ce ne soit pas possible.
-Quel dommage … soupira Melia.
-Mesdames, s'il vous plait, leva les yeux au ciel Celeb. Il me semble que nous avons des problèmes plus urgents.
-Tu es un rabat-joie, cher frère, railla Kali. Mais tu as raison.
-Il est hors de question que Melia retourne là-bas ! trancha Fin
Aucun n'avait besoin qu'il ne précise sa pensée. Avec ce qu'avait vécu sa sœur, il refusait qu'elle retourne dans leur famille. La question de leur mère restait en suspens mais pour leur beau-père et sa famille, ils pouvaient tous aller se faire foutre.
-Cela va de soi, sourit Celeb. Mais il faut une justification pour que ta sœur se mette également au service des RoseSang sans qu'on ne pense qu'elle sera la future épouse de Nolan.
-Je préfère qu'elle passe son tour, grimaça Fin.
Melia se tourna vers son frère, surprise.
-Pourtant, tu me disais qu'il était génial ! s'étonna Melia
-Pas au quotidien, assura Celeb. Autant te le dire tout de suite, je suis le meilleur ami de Nolan et son amant accessoirement et ces deux-là peuvent t'assurer que quand on se prend la tête, tout le monde le sait.
-Mais ce n'est pas le sujet, rappela Kali. Puis-je t'appeler Melia ?
-Avec plaisir, papillonna Melia.
-Alors appelle-moi Kali, sourit Kali sur le même ton.
Celeb haussa un sourcil surpris.
-Rassurez-moi, vous n'allez pas flirter toutes les deux ? siffla Celeb. Je n'ai pas le droit de parler de ma relation avec Nolan mais vous, vous pouvez jouer ?
-Dès qu'il s'agit de Nolan, tu es intarissable, leva les yeux au ciel Kali. Mais tu as raison, nous pourrons faire cela plus tard, loin de tes chastes oreilles.
-Eh ! protesta Celeb
-Enfin bref, balaya Kali. Est-ce que tu sais pourquoi on te gardait si précieusement ?
-Vous n'ignorez pas que les jumeaux sont très appréciés, soupira Melia. Du peu que j'ai pu comprendre, il y a certains rituels interdits dont la base est la gémellité des sacrifices.
Kali fronça des sourcils.
-Tu es sûre que c'est parce que tu as un jumeau qu'on t'a enfermé ? insista Kali
-Ça et le fait que je suis encore vierge, haussa des épaules Melia.
-A ton âge ? s'étonna Celeb
-Contrairement à vous, les hommes, on attend de trouver le bon ou à défaut, un qui ne se viderait pas simplement les couilles, railla Melia.
-Si nous pouvions revenir sur le sujet, fit Fin. Ça a l'air de te surprendre, Kali. Pourquoi ?
-Tout ce que je sais, c'est que ces rituels ont des conséquences vraiment moches, grimaça Kali. Il faudrait que je fasse quelques recherches avant de vous dire à quoi vous avez échappé. Mais dans tous les cas, le résultat devait au moins détruire les RoseSang.
-Tu es sûre ? sursauta Celeb. C'est extrême.
-Il y a d'autres paires de jumeaux à travers le monde, rappela Kali. Et on choisit justement celle dont l'un des membres est sous les ordres de l'une des familles les plus puissantes au monde ? On pencherait plus sur un complot que sur une coïncidence.
-On regardera ça de plus près, promit Celeb.
-Que fait-on pour Melia ? demanda Fin
-En attendant de trouver une solution durable, je peux la prendre en tant que domestique, proposa Kali. Si seulement tu avais un talent …
Les jumeaux se regardèrent, indécis.
-Allez-y, soupira Kali.
-Je me débrouille en couture, avoua Melia. Assez pour intéresser des shamans.
-Tu m'intéresses et pas que sur le plan privé, sourit Kali. Si effectivement tu as le don que je pense que tu as, on va faire affaire.
-Laissez deux femelles ensemble et elles finiront par parler chiffons, se moqua Celeb.
-Tu ne veux surtout pas savoir ce que deux femelles pourraient te faire si tu les emmerdes trop, susurra Kali.
-Et pour notre mère ? s'inquiéta Melia
-Je pense que le plus rapide serait que tu ailles la voir pour qu'on lui donne une protection avant de la faire sortir de là, Fin, réfléchit Celeb. Allons-y dès ce soir, comme ça, ils pourront pleurer sur leurs pertes.
§§§§§
Severus se trouvait au manoir Prince, au chevet de Jeremiah. Ce dernier, après une sortie dans le Londres sorcier, avait eu une faiblesse. Inquiet, le chef des elfes de maison de la maison Prince avait pris sur lui d'appeler Severus. Ce dernier n'était pas rassuré et ne tergiversa pas longtemps avant de sortir sa baguette.
-Que fais-tu, pauvre imbécile ?! cracha Jeremiah
-Je vérifie que vous n'avez pas eu la stupidité de vous laisser toucher par un sort, répliqua Severus avec la même verve.
Depuis le temps, Severus savait comment traiter avec son grand-père et répondre du tac au tac était sa stratégie préférée. Mais alors que les résultats lui parvenaient, l'air de Severus devenait sombre.
-Qu'est-ce qui se passe ? grogna Jeremiah
-Un sort de Mange-Magie, révéla Severus. Au stade deux.
-Comment ça ? gronda Jeremiah. Tu veux dire que quelqu'un de ma maisonnée a voulu me tuer ? Pourquoi pas toi ?
-Je n'ai strictement aucun intérêt à ce que vous disparaissiez à courte échéance, déclara froidement Severus. Je préfère qu'il reste un lord Prince bien en vie plutôt que d'empêcher Voldemort et Dumbledore de fouiner dans ma vie à tout bout de champ.
-C'est ça, renifla Jeremiah. Tu as dit que le sort est au niveau deux, ce qui veut dire qu'on me l'a lancé au plus tard il y a trois jours. Or, mis à part ce matin, je n'étais pas sorti depuis deux semaines !
-Il y a une autre possibilité à laquelle vous n'avez pas pensé, déclara Severus. C'est que votre organisme est plus affaibli que ce qu'on pensait.
Le maître de Potions lança les sorts de diagnostic qui furent sans appel.
-Vous ne vous êtes pas reposé ! tempêta Severus
-Tu ne vas pas me dire ce que je dois faire ! pesta Jeremiah
-S'il vous plaît ! leva les yeux au ciel Severus. Vous mort, tout ce que vous aurez entrepris pour le clan Prince disparaitra puisque ni le ministère, ni Dumbledore et ni Voldemort ne me laisseront reprendre votre œuvre.
Jeremiah bougonna dans sa barbe, conscient que son petit-fils et héritier avait raison.
-On peut faire quoi ? marmonna Jeremiah
-Déjà, contrer le sort, énuméra Severus. Ensuite, vous faire examiner par un médicomage pour réévaluer votre état de santé. Je brasserai les potions dont vous aurez besoin.
-J'imagine que je n'ai pas le choix ? souffla Jeremiah
-Je ne vous le laisse pas, en effet, grinça Severus.
-Soit, renifla Jeremiah. Ne me dis pas que tu es venu juste pour moi ?
-Est-ce si inconcevable pour vous que quelqu'un puisse s'inquiéter pour vous ? soupira Severus
-Tu as des intérêts à ce que je sois en vie, pointa Jeremiah. Tu veux qu'il y ait un lord Prince pour protéger tes intérêts.
-Je ne le nie pas, confirma Severus. Mais je m'inquiète aussi pour vous en tant que personne. Malgré nos différents, vous êtes ma dernière famille et même si vous ne supportez pas le fait que je sois de sang mêlé, vous avez quand même pris le temps de me former comme votre héritier au lieu de mettre un terme à la lignée Prince comme beaucoup de sangs purs l'auraient fait devant cette « infamie ». Cela prouve que vous tenez vous aussi un peu à moi.
-Je n'ai jamais dit ça ! protesta Jeremiah
-Nous sommes tous les deux des hommes de peu de mots, rappela Severus. C'est avec des actes que nous nous exprimons le mieux.
Malgré lui, Jeremiah eut un petit sourire. Oui, en effet, ils avaient beau être différents, ils se ressemblaient trop pour douter de leur lien de parenté. Et au fur et à mesure qu'ils se fréquentaient plus étroitement, ils avaient fini par s'apprécier et à se considérer comme membres de la même famille.
-D'accord, j'accepte, s'inclina Jeremiah.
Alors que le vieux sorcier se renfonçait dans son lit, Severus eut une idée lumineuse.
-Avec votre permission, je vais utiliser votre faiblesse pour me dégager de mes chaînes, sourit machiavéliquement Severus.
-Qu'as-tu en tête, pauvre fou ? bougonna Jeremiah
-Quelque chose qui va vous plaire, assura Severus.
§§§§§
Ragnok était furieux. S'il n'avait pas peur des répercussions sur son peuple, ça ferait bien longtemps qu'il aurait lancé les armées gobelines sur ceux qui s'étaient permis un tel outrage.
Les dernières guerres entre sorciers et gobelins datant de plusieurs siècles, le sorcier lambda ne savait plus qu'il existait des accès dans le monde vers la nation gobeline. Pour éviter une invasion, plusieurs familles avaient accepté d'habiter près de ces entrées pour les défendre le cas échéant.
Seulement voilà, quelqu'un avait exhumé l'une des adresses de ces passages anciennement connus par les sorciers vers la nation et l'avait fait attaquer par des mangemorts.
Il y avait longtemps que le peuple banquier avait établi les liens entre Dumbledore et Voldemort. Ils n'étaient aussi aveugles que les sorciers, eux … Alors que le 31 juillet était au zénith, le directeur de Gringotts Grande Bretagne avait vu les alarmes rugir. Il s'était précipité pour se porter au secours mais trop tard. Il y avait eu trente-quatre morts, trois familles avec sept enfants, quatre adolescents et cinq jeunes adultes massacrés par des sorciers. Ragnok ne pouvait qu'en pleurer de rage.
Quand il s'était présenté devant le Seigneur des Galeries, le Gardien Tisserand et la Grande Prêtresse, tout son corps trahissait sa tension et il était clair qu'il lui tardait de venger dans le sang cette attaque injustifiée.
-Relève-toi, Seigneur des Grottes, intima la Grande Prêtresse.
Ragnok se releva mais garda les yeux rivés au sol.
-Nous voyons bien que ton cœur est englouti par la colère, sourit la Grande Prêtresse. Mais tu te doutes qu'une riposte ne pourra nous conduire qu'à une nouvelle guerre.
-Grande Prêtresse … se justifia Ragnok.
-Nous comprenons ta douleur, coupa doucement la Grande Prêtresse. Mais nos prochains mouvements devront être parfaitement calculés.
-Je suis à vos ordres, s'inclina Ragnok, les dents serrées.
-Tu n'ignores pas que depuis la montée en puissance du sorcier Dumbledore, un détachement de notre armée se tient prêt sous les terres de Grande Bretagne, déclara le Seigneur des Galeries.
-Oui, seigneur, confirma Ragnok. Une partie se trouve sur le Chemin de Traverse.
-Je vais leur adjoindre plusieurs Tisserands, annonça le Gardien Tisserand.
-N'est-ce pas dangereux ? s'inquiéta Ragnok. Depuis que nous côtoyons les sorciers, nous prenions soin qu'ils n'apprennent pas que les gobelins peuvent utiliser la magie. Ce serait exposer notre peuple !
-C'est un risque que nous devons prendre, assura la Grande Prêtresse. Votre allié ne nous permettra pas moins.
Les murmures dans la salle d'audience s'élevèrent. Visiblement, personne mis à part les trois chefs et Ragnok ne savait de qui ils parlaient. Le Seigneur des Grottes – titre officiel des directeurs de Gringotts – acquiesçait à ses paroles. Quand Harry Potter reviendrait dans le monde des humains – il ne doutait pas qu'il se débarrasserait de la prophétie avant de réfléchir sur la décision de rejoindre définitivement le monde de son peuple – il chercherait sûrement des alliés sûrs. La plupart des sorciers lui feraient défaut – et ils s'en mordront les doigts – mais les gobelins ne lui tourneront pas le dos. Oh non, hors de question.
-Voici nos ordres, fit le Gardien des Galeries. Seigneur des Grottes, tu ne répondras qu'à nous des événements qui vont désormais se dérouler sur les terres dont tu es responsable. Les soldats et les tisserands seront également sous ta responsabilité mais pourront rendre compte de leurs faits et gestes directement à la Grande Prêtresse, au Gardien Tisserand ou à moi-même uniquement.
Ragnok retint son sourire alors que des imprécations retentissaient. La guerre en Grande Bretagne passait sous la tutelle directe des chefs de leur nation et les différents chefs de guerre se retrouvaient court-circuités, ce qui les agaçait prodigieusement. Mais montrer leur désapprobation à cette décision était aussi sûr qu'ils devront creuser leur tombe dans la roche dans l'heure suivante. D'autant plus qu'il s'agissait d'une décision historique puisque cela faisait des siècles que la Grande Prêtresse et le Gardien Tisserand ne s'étaient pas investis dans une guerre.
-Va, Gardien des Grottes, congédia le Gardien des Galeries. Ta mission ne souffrira d'aucun délai.
Ragnok s'inclina avant de se retirer. Il ne voulait pas assister à la soufflante que les trois allaient infliger à l'assemblée qui semblait avoir oublié qui dirigeait la nation gobeline.
§§§§§
Dobby se triturait les mains avec ferveur.
Le 31 juillet était arrivé et Harry était arrivé au château Potter trois jours auparavant avec une fièvre frôlant les 45°C. L'elfe de maison avait paniqué et avait contacté Nolan qui lui-même avait appelé Ric en urgence mais ce dernier lui ne s'en était pas inquiété pour autant. La seule chose qu'ils pouvaient faire était de faire baisser la température manuellement. Dobby l'avait donc plongé dans un bain glacé et l'y maintenait depuis son arrivée mais pourtant, la fièvre ne faisait que grimper.
Douze heures plus tard, la magie d'Harry entrait en jeu. Les protections avaient toutes hurlé sans exception et le chef des elfes de maison du clan Potter avait dû intervenir pour élever de nouvelles barrières spécifiques à leur peuple pour que les sorciers ne puissent se douter de rien.
L'aube du 31 juillet avait fait monter l'angoisse à un tout autre niveau. Alors que Dobby et Nolan pensait qu'Harry avait déjà fait sa transformation physique au solstice d'hiver, confirmé par le fait qu'au solstice d'été il n'y avait rien eu d'extraordinaire, un nouveau dôme de protection avait fait son apparition autour du jeune homme. Nolan avait vraiment pâli et son contact comme lui étaient venus en personne dans la dimension des humains pour pouvoir suivre au plus près la transformation. Le crépuscule fit briller encore plus le dôme et alors que l'heure de la naissance du brun approchait, il en était presque aveuglant.
Et à la seconde près …
Un hurlement déchirant retentit dans le château et une onde de magie extrêmement puissante se répandit. Si les elfes de maison n'avaient pas érigé des barrières avec leur propre magie, nul doute qu'elle se serait répandue sur toute l'Angleterre. Le dôme se dissout et le corps retomba brusquement dans l'eau. Dobby se dépêcha de l'en sortir, de le sécher de le placer dans un lit.
Harry ouvrit brusquement les yeux. Des yeux verts sans pupille. Nolan sursauta.
-Il ressemble à … balbutia Nolan.
Ric sourit doucement. Il se souvenait de cette période lointaine où sa vie était encore belle. Il était en couple et attendait un heureux événement. Mais ses ennemis avaient estimé que c'était le bon moment pour l'affaiblir. Il avait donc subi la destruction de sa vie sans pouvoir intervenir. De cette période sombre, la seule chose dont il avait été fier était ce qu'il avait protégé au péril de sa vie.
Sa fille, Luba.
La première femme à accéder au statut de guerrière et à ouvrir la voie pour les autres.
Celle qui avait terrorisé leur peuple pour qu'il craigne les guerriers.
La seule de leur peuple à avoir les yeux vert émeraude.
Les mêmes qu'Harry.
-Oui, il a les mêmes yeux, sourit Ric.
-Vous saviez, murmura Nolan, encore sous le choc. Pourquoi ?
-Pourquoi je ne te l'ai pas dit ? compléta Ric. Cette information s'est perdue il y a bien des lunes et n'avait pas vocation à réapparaître avec toi.
-Sa magie lui a indiqué que nous avions un lien de parenté alors qu'il entamait à peine sa transformation, signala Nolan.
-Je n'avais pas l'intention de le lui cacher, sourit Ric. Et ce n'est pas la seule chose que je vais lui apprendre. Mon ami, redresse notre patient, porte-lui un verre d'eau puis, apporte-lui un miroir.
Les ordres de Ric furent respectés par Dobby et le jeune homme s'examina sous toutes les coutures.
-Que suis-je ? murmura Harry
-Tu es un elfe noir, Harry, annonça Nolan.
-Et parce que tu es de notre sang, un guerrier et l'un des plus puissants, assura Ric.
-Bienvenue parmi nous, Harry, s'inclinèrent les deux elfes.
