La roue qui tourne
Muriel sortit de la chambre en refermant doucement la porte.
Quelques jours plus tôt, Fred et Georges avaient débarqué chez elle avec le corps sanguinolent de leur sœur Ginny. Après l'avoir installé sommairement dans une chambre, ils avaient fait appel à un médicomage, habitué à les soigner aux quand il y avait des loupés avec leurs créations et ils avaient attendu que leur sœur soit hors de danger pour expliquer ce qui s'était passé.
Apprendre que l'état de sa petite-nièce était uniquement dû à Molly l'avait fait frémir de rage. Elle était prête à faire une descente chez elle pour remettre les points sur les i. Seuls les jumeaux avaient pu la retenir en arguant que Ginny voudrait être avec elle pour cracher à la figure de sa génitrice.
Muriel savait que l'éducation de Ginny était différente de celle de ses frères. Mais elle ne s'était jamais douté que Molly irait jusqu'à torturer sa propre fille parce qu'elle n'avait pas réussi à entrer dans le lit du seul sang pur qui ne s'outragerait pas d'une mésalliance avec les Weasley. La matriarche avait cru qu'elle devrait attendre la fin de l'année scolaire pour récupérer Ginny mais puisqu'elle était là, cela l'arrangeait. Ainsi, elle pourrait partir directement en apprentissage.
Cependant, une chose la turlupinait. D'après les jumeaux, qui tenaient l'information des amis de leur sœur encore à l'école, le directeur en personne avait justifié l'absence de Ginny par des problèmes familiaux. Or, Arthur allait parfaitement bien et ne savait même pas que Ginny était rentrée et surtout, Ron n'était même pas au courant que quelque chose s'était passé. De toute façon, il ne s'était même pas inquiété de l'absence de sa sœur … Mais si Molly avait pu sortir sa fille de l'école sans que qui que ce soit ne s'en aperçoive, y compris sa directrice de maison, alors Albus Dumbledore devait l'avoir aidé. Cela faisait longtemps que Muriel ne croyait plus en sa bonté d'âme donc elle était quasiment sûre que le directeur de l'école avait des intérêts à ce que la jeune fille quitte les lieux en catimini.
La matriarche entra dans le salon où Fred faisait les cent pas, Georges s'occupant de la boutique.
-Alors ? bondit Fred
-Elle dort, rassura Muriel. Mais nous avons des choses à faire en attendant.
-D'accord, fit Fred.
-Est-ce que tu as un moyen pour récupérer ses affaires ? demanda Muriel
-Pourquoi ? se méfia Fred
-Je ne compte pas la laisser retourner à Poudlard, déclara Muriel.
-Elle n'aura pas ses examens … nota Fred.
-Là où elle va, elle les aura haut la main, assura Muriel.
-Elle ne restera pas ici ? sursauta Fred
-Vu l'état dans lequel vous l'avez retrouvé, est-ce que tu penses qu'elle voudra rester ? pointa Muriel
-Pas avant d'avoir réglé quelques points, ricana Fred.
-Soit, concéda Muriel. Est-ce que tu peux faire ça ? Sans que personne ne s'en aperçoive ?
-Sans problème, répondit Fred.
Neville ou même Luna se feraient un plaisir de faire disparaître toute trace de Ginny sans que qui que ce soit ne s'en doute.
-Ensuite, je veux que tu appelles tous tes frères sauf Ron, déclara Muriel. Il est temps de faire une petite réunion de famille.
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Harry s'était rendu à la banque car Ragnok devait lui parler d'un élément important de son patrimoine.
Quel ne fut pas sa surprise quand, lorsque la porte du bureau du directeur Gobelin s'ouvrit, il ressentit une signature magique qu'il avait crue perdue pour toujours.
-SIRIUS !
Le jeune elfe se jeta dans les bras de son parrain qui lui rendit férocement son étreinte. Ils restèrent ainsi quelques instants, le temps d'assimiler qu'ils ne rêvaient pas avant de se séparer et de s'asseoir dans les deux fauteuils que leur indiqua Ragnok.
-Je … bafouilla Harry.
-Tu pensais que j'étais mort car j'avais traversé l'arcade de la mort au ministère, compléta Sirius. C'était ce qu'on voulait te faire croire.
-Ah bon ? gronda Harry
-Ce n'est pas le plus important pour l'instant, balaya Sirius. Quelqu'un m'a sauvé et m'a permis de me soigner depuis presque deux ans. Maintenant, je suis prêt à reprendre ma place à tes côtés comme parrain et dans le monde en tant que lord Black.
-C'est pour cela que je ne suis qu'héritier ?! comprit Harry. J'ai été surpris l'année dernière quand j'ai pris connaissance de tous mes titres.
-Moi vivant, tu ne pouvais pas reprendre la tête du clan Black, confirma Sirius.
-Mais cela veut dire que tu n'as pas été renié ? fronça des sourcils Harry. A moins qu'en tant que dernier Black en vie, tu peux en hériter ?
-Non, je n'ai jamais été renié, confirma Sirius. Si ça avait été le cas, l'Ordre n'aurait jamais pu entrer à Grimmaurd Place. Moi, à la rigueur, toi aussi mais personne d'autre. C'est un autre beau mensonge de Dumbledore … Mais ne parlons pas de cela pour le moment. Si j'ai demandé à Ragnok de te faire venir, c'est parce que je compte faire une soirée où je montre que je suis devenu le nouveau lord Black. Je voulais te proposer d'en profiter pour que tu puisses te présenter en tant que lord Potter.
-Je t'arrête tout de suite, sourit Harry. On va faire dans l'autre sens. TU vas profiter de la soirée que j'organise pour me présenter en tant que lord Potter pour que la société sorcière apprenne que tu es devenu lord Black.
-Quand comptes-tu faire cela ? s'étonna Sirius
-Le premier mai, répondit Harry avec un sourire encore plus grand.
-Beltaine ? souffla Sirius. Mais cela fait des années qu'elle n'est plus célébrée !
-Les célébrations sorcières n'ont jamais été interdites, j'ai vérifié, assura Harry.
-Donne-moi plus de détails, sourit Sirius. Avec un peu de chance, je pourrais également m'innocenter des accusations qui m'ont valu Azkaban …
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Albus se retenait de faire valser tout ce qu'il y avait sur son bureau.
Depuis que les journaux avaient annoncé qu'Harry Potter était de retour, il faisait des pieds et des mains pour pouvoir lui mettre la main dessus. Il avait commencé par se rendre chez les Dursley … pour apprendre la mort de Vernon et de Dudley dans un accident de voiture quelques mois plus tôt. Il savait comment manœuvrer Vernon pour qu'il fasse ce qu'il voulait, contrairement à Pétunia. D'ailleurs, cette dernière avait disparu avec la pute que le fils Dursley avait mise enceinte et son marmot.
Il s'était ensuite tourné vers Gringotts qui l'avait jeté avec perte et fracas. Visiblement, Harry avait donné des consignes très strictes pour les fouineurs et toutes les autorisations qu'il avait eu par le passé avaient été révoquées.
Il avait tenté de forcer les barrières du manoir Black, toujours séparé du QG de l'Ordre du Phénix, mais en réponse, la maison avait encore réduit les lieux dévolus à l'Ordre, soit la salle de bal et une salle de bain avec ses sanitaires.
Pour ne rien oublier, ses contacts lui avaient fait part d'une soirée mondaine organisée par Harry Potter qui aurait lieu début mai. Les directeurs de maison étaient déjà venus le voir avec une liste d'élèves qui avaient été invités. Il avait été à deux doigts de refuser mais deux points l'avaient retenu. Tout d'abord, en tant que directeur de Poudlard, il ne pouvait pas s'opposer à ce que des élèves se rendent dans une soirée mondaine, encore plus des sangs purs ou des mineurs qui avaient l'autorisation de leurs parents, sous peine de voir se révolter une très grande partie de la population. Par extension, il aurait dû interdire à ses propres professeurs de s'y rendre, car certains avaient été invités. Ensuite, toutes les invitations n'étaient pas encore arrivées, notamment celle de Neville Longbottom, ce qui voulait dire qu'il y avait une chance pour qu'il soit invité en tant que directeur de Poudlard – les directeurs des quatre maisons ayant été invités – et président du Magenmagot.
Autre sujet d'agacement, Severus Snape. Son départ de l'école ne l'arrangeait pas du tout et il ne comprenait même pas comment il était possible. Malheureusement, il semblait bien que les sorts rattachés à une organisation plusieurs fois centenaires comme la guilde de potions soient bien plus puissants que les siens. Pourtant, il était certain que les règles pour les maîtres de métamorphoses n'étaient pas aussi strictes. Julia faisait chou blanc dans la conquête du maître de potions qui la rejetait toujours plus durement à chaque fois qu'elle tentait sa chance. Ses doutes comme quoi Severus était amoureux de Lily Evans se révélaient finalement faux.
Albus avait tenté de le faire revenir sur sa décision, insistant sur le fait qu'il était essentiel pour l'effort de guerre mais alors qu'il allait utiliser des arguments plus … percutants, un bouclier était apparu pour protéger Severus. Quand celui-ci tomba quelques instants plus tard, ce dernier lui avait expliqué avec un soupçon d'incrédulité que la guilde lui avait parlé de mesures de prévention qu'elle avait mises en place pour qu'il s'acquitte de son devoir d'apprentissage mais il ne savait absolument pas que ça pouvait prendre cette forme. Comprenant qu'il lui faudrait étudier les actes de la guilde avant d'entreprendre quoi que ce soit sur Severus, Albus l'avait sèchement renvoyé.
Un éclat vert attira l'attention du directeur. Depuis la mort des Potter, Albus Dumbledore avait en horreur cette couleur, car elle lui rappelait bien trop les yeux de Lily avant qu'il ne la tue. La couleur avait été bannie de son bureau et les nombreux artefacts magiques qu'il avait accumulé au fil des années et qui étaient de cette couleur avaient été relégués dans un placard quelconque. Encore plus irrité qu'avant, il examina la pierre verte qui s'avérait être une opale avant de la laisser tomber à terre et de l'écraser impitoyablement, la réduisant en poussière.
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Xénophilius Lovegood se redressa, à l'affût.
Les femmes de sa famille avaient toutes à plus ou moins grande échelle le troisième œil, les hommes se contentant de dons mineurs. Lui avait hérité d'un don pré cognitif et là, il venait de se mettre à hurler. Sans même s'enquérir de ce qui se trouvait devant sa porte, il leva sa baguette et d'un geste, ses affaires, ses meubles et ses vêtements se mirent à voler dans la maison et à se ranger dans des malles de voyage.
Depuis que sa fille Luna était devenue amie avec Harry Potter et sortait avec Neville Longbottom, Xéno se doutait qu'on allait s'en prendre à lui, surtout depuis qu'il publiait dans son journal les informations non tronquées de la réalité de la situation actuelle du pays. Garrick Ollivander, son « parrain », à défaut de d'autres termes, l'avait prévenu que ce n'était qu'une question de jours avant qu'on ne s'en prenne à lui. De tout façon, il avait soigneusement préparé sa retraite.
Les bruits au-dessus de sa tête signalèrent à Xéno que les aurors – ou les mangemorts, en ce moment, ils avaient les mêmes méthodes – étaient entrés chez lui. Il referma le couvercle de sa dernière malle, vérifia qu'il n'avait rien oublié, y compris dans ses caches secrets, avant de rétrécir ses affaires et le matériel du journal pour les mettre dans ses poches. En entendant la porte du sous-sol s'ouvrir, Xéno ne perdit pas de temps et s'en alla sans un bruit.
Une heure plus tard, la maison explosa mais ce n'était pas une grande perte pour le propriétaire, puisque c'était là que sa femme était morte.
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Ric et Laze avaient quitté leur havre de paix pour se rendre à un rendez-vous dont pourrait dépendre l'avenir de la dimension des humains. Le Refuge de Brocéliande, en France, accueillait sans le savoir cette rencontre historique.
Le couple pénétra dans une pièce où il y avait déjà deux personnes qui se levèrent à leur arrivée.
-Je vais faire les présentations, déclara Ric. Voici le Seigneur des Grottes Ragnok, autrement dit le directeur de Gringotts Grande Bretagne et je pense que tu reconnais maître Garrick Ollivander, maître spécialiste en fabrication d'items et artefacts magiques.
-Enchanté, s'inclina Laze. Je suis le seigneur Salazar Serpentard. Pardonnez-moi si mes propos sont déplacés mais je me souviens vous avoir vu façonner les items des premiers élèves qui sont venus étudier à Poudlard et vous fabriquiez les baguettes de tous les élèves de Grande Bretagne. Alors … comment est-ce possible ?
-Tu n'as rien dit à ton compagnon ? ricana Garrick
-D'abord, ce n'est pas mon secret mais le tien, grogna Ric. S'il doit le savoir, c'était uniquement de ta bouche. Et ensuite, je ne l'ai récupéré qu'i peine deux lunes.
L'air rieur de Garrick disparut aussitôt.
-Il avait donc bien été kidnappé, comprit Garrick.
-Et il est présent, rappela sèchement Laze, irrité. Maintenant que les présentations sont faites, puis-je savoir ce que nous faisons là, à défaut d'avoir la réponse à ma question ?
-Les deux sont liés, assura Garrick. Asseyez-vous.
Une collation fut servie avant que Garrick ne reprenne la parole.
-Ric et moi nous nous connaissons depuis … oh, un peu plus de mille trois cents années humaines, fit Garrick. Mais nous sommes devenus … alliés, à défaut d'un autre terme, que deux cents ans plus tard.
Laze et Ragnok écarquillèrent des yeux. Mais quel âge avaient-ils ?!
-Nos peuples respectifs n'étaient pas ce qu'on pourrait appeler alliés, soupira Ric. Nous ne nous affrontions pas, on s'ignorait, c'était aussi simple que cela. J'ai rencontré Garrick alors qu'un détachement de mercenaires elfes défendaient l'un des passages vers notre dimension. Le hasard avait fait que l'un des lieux de cérémonie du peuple de Garrick se trouvait un peu plus loin et ils sont sortis de leur trou pour défendre leur territoire.
-Disons qu'on s'est trompé d'ennemis, rougit Garrick. Mais dès que le malentendu a été réglé, nous nous sommes temporairement alliés pour les vaincre. Les elfes noirs nous en ont quand même voulu.
Pour tout commentaire, Ric montra les dents. Oui, et alors ?
-La curiosité de Ric étant ce qu'elle était, il voulait en savoir plus sur nos méthodes de combat, reprit Garrick. J'adore apprendre et nous avons conclu un marché, chacun apprenait à l'autre ce qui faisait son peuple. C'est d'ailleurs pendant l'un de ses voyages qu'il t'a rencontré, Salazar, et qu'il s'est entièrement dévoué à toi. J'ai ainsi découvert un aspect presque incongru des elfes noirs, leur fidélité à leur âme-sœur.
Laze eut un sourire fier tandis que Ric s'enfonçait dans son siège, embarrassé.
-Enfin bref, se racla la gorge l'elfe. Garrick et moi avons toujours gardé un œil sur cette dimension. Les elfes noirs l'ont quitté à la suite d'attaques violentes sur les passages vers notre dimension et comme les mouvements xénophobes pullulaient, le peuple de Garrick a dû à son tour se cacher.
-Quel peuple ? ne put s'empêcher Ragnok
-Celui des mages, révéla Garrick.
Les mâchoires de Laze et de Ragnok s'écrasèrent au sol. Le peuple des mages avait disparu peu avant la création de Poudlard. Extrêmement proches de la Magie, ils étaient les seuls à pouvoir utiliser les éléments à l'état brut. Leur autre nom était d'ailleurs les élémentaires.
-Les détails viendront plus tard, coupa Ric en voyant Laze prêt à lancer une salve de questions. Peu après avoir commencé à discuter, nous avons noté plusieurs évènements suspects, notamment un échange de connaissances sur la torture et la mort. Mon oncle, qui était à la tête des guerriers, a alors convaincu les grandes familles elfes de fermer définitivement la majorité des passages et de faire garder les derniers. Seuls les guerriers pouvaient passer librement d'une dimension à l'autre et les autres devaient obtenir l'autorisation d'un conseil des guildes. Peu à peu, la dimension des humains a eu moins d'attrait et les passages sont tombés dans l'oubli.
-Il y a un peu moins de quatre cents années humaines, j'ai eu vent de connaissances mages comme elfes qui avaient disparu depuis quelques siècles, reprit Garrick. J'ai mené mon enquête qui m'a mené chez les sorciers de ce pays. C'est d'ailleurs pour en savoir plus que j'ai signé ce contrat exclusif avec eux pour fabriquer les baguettes de tous les sorciers de Grande Bretagne. Bien sûr, pour ne pas attirer l'attention, je me suis marié, j'ai eu des enfants et je prenais la place de mon aîné quand venait l'heure pour moi de disparaître.
Ric eut un sourire railleur.
-Tu te moques de moi à propos de ma fidélité à Laze mais je te signale que c'est la même chose pour toi, ricana Ric. Alana t'a suivi dans toutes tes folies et elle était heureuse d'avoir autant d'enfants. Combien ça t'en fait, aujourd'hui ? Si on se base sur la longévité des sorciers qui est de deux cents ans environ, qu'Alana les fait toujours par trois, tu es au moins à quinze gosses, je me trompe ? Tout en sachant que quand je t'ai connu, tu en avais déjà quatre !
-Tais-toi, bougonna Garrick. Pour en revenir au sujet qui nous rassemble, des connaissances donc perdues ont refait surface. J'ai commencé à vraiment m'inquiéter quand Grindelwald a fait parler de lui car il ne se cachait pas les rechercher activement. Encore plus quand un petit précepteur anglais lui a donné du fil à retordre.
-Dumbledore ? devina Ragnok
-Dumbledore, confirma Garrick. Du jour au lendemain, Grindelwald semblait craindre quelque chose de lui alors que si on se fiait à ses compétences, Dumbledore n'était pas spécialement un adversaire sérieux. Mais il a réussi à le vaincre en combat singulier pour qu'il soit enfermé à Nurmengard.
-C'est là qu'a commencé la descente en enfer de la Grande Bretagne, devina Ric.
-Disons que la pente est devenue plus raide, nuança Garrick. Pour une raison que j'ignore, il a réussi à convaincre le gouvernement de lui donner de plus en plus de pouvoirs, jusqu'à le nommer directeur de Poudlard et président du Magenmagot.
-D'accord, fit Laze. Mais où est-ce que vous voulez en venir ?
-Je suis au courant de tout le cirque qu'il y a autour du jeune Harry Potter et mes doutes sur Dumbledore sont revenus en force, avoua Garrick. Alors j'ai voulu interroger Gellert Grindelwald plus en détail. Outre le fait que l'idée de conquérir le monde venait essentiellement de Dumbledore, je suis tombé sur une information qui a son importance.
-Laquelle ? demanda Ragnok, captivé
-Dumbledore et Grindelwald seraient tombés sur un passage vers la dimension des elfes noirs et ils auraient conclu un marché avec l'un d'entre eux pour obtenir plus de connaissances, révéla Garrick. En échange, ils devraient cacher quelque chose dans la dimension des humains pour leur nouveau professeur. Quand je dis chose, je devrais dire enfant.
-Shanleigh RoseSang, comprit Laze.
-C'est l'hypothèse la plus plausible, confirma Garrick. Pendant une quinzaine d'années, elle avait un bouclier qui l'empêchait de la toucher et quand il est tombé, Dumbledore s'est empressé de la déposer dans un foyer moldu qui n'avait aucun contact avec la magie.
-Garrick m'en a avisé et j'ai fouillé du côté de cette fameuse famille moldue, continua Ric. Les Evans ont changé de comportement du tout au tout quand la petite fille est entrée dans cette famille.
-Quand tu parles des Evans … fit Laze.
-Les parents de Lily Evans ? termina Ragnok
-Exact, confirma Ric. Ensuite, nous ne pouvons faire que des suppositions sur ce qui a dû se passer et nous arrivons à Harry, destiné à détruire le seigneur des ténèbres actuel par une prophétie dont je doute de plus en plus de la véracité, si ce n'est de l'authenticité.
-Je peux vous aider sur ce point, se racla la gorge Ragnok.
Tous les regards se tournèrent vers lui.
-Quand le seigneur Harry est venu pour faire un bilan complet, il avait mentionné cette fameuse prophétie, déclara Ragnok.
Ric s'en souvenait maintenant. Selon Harry, elle était à l'origine du fait qu'on le ballotait dans tous les sens dans le monde sorcier sans même qu'on lui reconnaisse le statut d'être humain. Enfin, en plus vulgaire, il restait un adolescent.
-J'ai rapporté ces mots à la Grande Prêtresse et elle m'a certifié qu'aucun voyant de n'importe quel peuple ne pouvait délivrer une prophétie aussi claire, encore plus si elle ne s'est pas réalisée, décréta Ragnok.
-Donc soit elle s'est réalisée, vraisemblablement quand Voldemort a attaqué les Potter, fit Laze.
-Soit elle a été inventée de toute pièce, termina Garrick. Curieusement, je pencherai plus sur cette deuxième hypothèse. Dès que j'approche des informations concernant la famille Potter et la famille Evans, je fais face à de puissantes barrières dans l'esprit de Grindelwald.
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-Docteur ! interpella une infirmière. Vous devriez voir cela …
La femme fronça des sourcils avant de lui emboîter le pas. Elle venait de prendre son service et elle n'avait même pas eu le temps de prendre un café qu'on venait de lui soumettre un cas.
Elles se rendirent donc dans une chambre et elle s'empara du dossier de la patiente.
Alice Collins, âgée de trente-huit ans.
Bon, au moins, ce n'était pas une inconnue, c'était déjà ça. Le médecin continua sa lecture et découvrit qu'elle avait été retrouvée inconsciente devant les urgences, un passeport périmé pour seule preuve d'identité. Elle avait été placée dans une chambre et à son réveil, le personnel médical avait découvert qu'elle réagissait au prénom et au nom indiqué sur le passeport, qu'elle était muette et surtout, qu'elle refusait tout prélèvement de sang.
Le médecin regarda attentivement la femme qui somnolait dans son lit. Pourquoi diable l'avait-on placé en service psychiatrique ?
Le médecin retourna à sa lecture et eut sa réponse quelques lignes plus tard.
Ah oui, un nouveau cas de syndrome de « sorcellerie ».
Cela faisait quelques années qu'à travers le pays, des dizaines d'hommes et de femmes assuraient avoir vu de la magie à l'œuvre, voire déclaraient être des sorciers. Quand il s'agissait de marginaux, les autorités les classaient sans suite mais quand il s'agissait de personnes qui n'avaient aucune raison de changer de comportement, cela devenait plus inquiétant. Les psychiatres et les psychologues qui intervenaient sur ces cas avaient appelé ce phénomène, à défaut de termes plus adéquats, le syndrome de la sorcellerie, car même si cela prenait des formes variées – elle avait entendu dire que l'une des personnes atteintes de ce syndrome avait voulu s'envoler sur un balai depuis le haut d'un immeuble – toutes les personnes touchées parlaient automatiquement de magie, alors que cela n'existait pas.
Le cas d'Alice Collins entrait dans le syndrome de sorcellerie puisque le personnel médical l'avait vu brandir un morceau de bois comme une baguette avec laquelle elle allait jeter un sort. Dès le début, ils le lui avaient enlevé mais la question se posait de savoir si on pouvait le lui rendre sans qu'elle ne veuille se blesser avec.
Le médecin referma le dossier d'un geste sec. Elle allait avoir du pain sur la planche.
-Bonjour mademoiselle Collins, salua le médecin. J'espère que vous avez passé une bonne nuit …
Deux heures plus tard, Alice maudissait la famille Longbottom. Outre le fait que Franck l'ait répudiée et que Neville l'ait reniée en tant que mère et en tant membre de la famille Longbottom, avec Augusta, ils lui avaient fait boire une potion qui l'avait rendue muette de manière irréversible. Ils avaient ensuite fait un rituel pour qu'elle ne puisse rien révéler de quelque manière que ce soit sur le monde de la magie et enfin, avec son sang, avaient fait en sorte que personne ne puisse connaitre les secrets de la famille Longbottom. Ensuite, ils lui avaient retiré sa magie et l'avaient abandonnée dans le monde moldue avec un petit carnet – son … « passeport », si elle avait bien compris – et sa baguette magique désormais inutile. Elle était assez lucide pour comprendre qu'on la prenait pour une folle et qu'elle allait rester coincée ici pendant un long moment. Elle avait caressé l'espoir qu'Albus la retrouve rapidement mais elle s'était rendu compte qu'aussi puissant puisse-t-il être, il ne pourrait rien faire contre ce que les Longbottom lui avaient fait et pire, qu'elle ne pourrait pas l'aider avec les informations qu'elle avait récoltées.
Sa vie était totalement et définitivement fichue.
