L'effondrement du château de cartes

-Harry, Harry ! s'exclama Colin Creevey en le mitraillant avec son appareil photo. Tu veux bien me signer une photo ?

-Est-ce que je l'ai fait ces dernières années ? demanda froidement Harry en fixant Colin droit dans les yeux

-Euh … non ? fit Colin en gigotant sous le regard glacial

-Alors pourquoi penses-tu que je vais accepter aujourd'hui ? claqua Harry. Et fais attention, le droit à l'image existe également dans le monde sorcier et si je trouve une seule photo de moi prise par tes soins dans les journaux, n'espère même pas terminer ta scolarité ou même penser que ta famille aura un toit pour le reste de sa vie.

Le jeune Gryffondor glapit avant de détaler.

Après avoir scellé le lien d'apprentissage, Harry et Severus s'étaient rendus dans les appartements de ce dernier pour se mettre d'accord sur les détails techniques. Le plus jeune avait été intransigeant sur le fait qu'il n'habiterait pas à l'école et l'aîné avait abondé en son sens car le directeur pourrait ordonner l'inscription d'Harry pour les dernières semaines de scolarité, ce à quoi ils se refusaient. Ils avaient décidé que personne ne connaitrait le programme précis de l'apprentissage, uniquement qu'il y aura des potions. Avec un rictus mauvais, Harry avait demandé que Severus ne réponde pas quand on lui demanderait pourquoi il avait choisi Harry Potter parce que ce n'étaient pas leurs affaires et que c'était son choix. Severus acquiesça et décida de mettre en avant le fait que la guilde voulait le nom de son apprenti dans les plus brefs délais, avant la fin de l'année scolaire de préférence. Enfin, ils décidèrent de se voir trois jours par semaine jusqu'à la fin de l'année et qu'il s'entraînerait dans une salle d'apprentissage non loin de sa salle de cours.

Bien entendu, quand Dumbledore avait entendu les conditions d'apprentissage de Potter, il avait été furieux de n'avoir aucune possibilité de parler avec lui pour l'amener à revenir dans son camp. Certes, il était dans la Grande Salle pour le dîner mais ce n'était pas assez pour lui rappeler à qui il devait sa vie actuelle. Il tentait de le croiser dans les couloirs, notamment quand il allait rejoindre ses amis encore scolarisés, mais pour une raison qu'il ignorait, il n'arrivait jamais à l'intercepter.

Harry, chaque soir, avait un sourire satisfait sur les lèvres en regardant le directeur fulminer du haut de la table des professeurs. Il n'ignorait rien de ses tentatives pour lui parler mais il ne comptait pas l'écouter une seule seconde, surtout pour satisfaire sa vision du monde idéal.

Le jeune elfe se détourna du vieux sorcier pour se plonger dans ses pensées.

Entre les cours de Severus et de Laze, il sentait que Ric se retenait de trucider quelqu'un. Pourtant, d'après les lettres de Nolan, Eutar – qui aurait un lien bien plus étroit avec Ric, allez savoir lequel – était sous bonne garde et il n'y avait aucune chance pour qu'il puisse continuer à vivre à brève échéance. Non, quelque chose préoccupait son ancêtre et elle se trouvait dans la dimension des humains. Et plus exactement, avait un lien proche avec Albus Dumbledore, s'il se fiait à sa crispation à l'entente de ce nom.

Mais ce n'était pas pour autant que l'aîné elfe et son compagnon restaient sans rien faire. Puisque Ric avait laissé traîner dans Poudlard le dernier carnet du journal de Laze, le couple avait décidé de travailler à l'extérieur de l'école. Ce fut d'une simplicité enfantine de s'introduire dans le département des Mystères pour activer quelques artefacts, dont les tableaux de Rowena et d'Helga. Ils avaient également sorti de leurs coffres respectifs certains grimoires très précieux qu'ils avaient confié à des personnes soigneusement sélectionnées, habitant la Grande Bretagne ou non, pour qu'ils puissent répandre leurs idées et leurs inventions qu'on avait dissimulées car elles pouvaient sauver des vies. Ils avaient même demandé à Harry de parler ouvertement de ce qu'il avait « trouvé » sur les Fondateurs et ce n'était pas ce que Dumbledore ou Voldemort vomissaient.

-Potter ? fit une voix dans son dos

Le brun se retourna et vit Susan Bones lui sourire. D'un geste, il l'invita à s'installer à la table des Serpentards.

-Merci, sourit Susan.

-En quoi puis-je t'aider ? demanda Harry

-Ton apprentissage m'intéresse, avoua Susan. Je ne pensais pas que c'était possible.

-Dans les faits, c'est extrêmement difficile, corrigea Harry. En étudiant la charte de Poudlard et le règlement intérieur, tu apprends beaucoup de choses.

-Ce n'est pas la même chose ? s'étonna Susan

-La Charte est un pacte magique entre l'école, le directeur et les professeurs, répondit Harry. Ils jurent sur leur magie de la respecter avant toute prise de fonction.

-On ne trouve que le règlement de l'école à la bibliothèque, fit remarquer Susan.

-C'est curieux, n'est-ce pas ? railla Harry. Mais bref, si tu lis attentivement ces deux documents, tu remarqueras que rien n'empêche les maîtres qui enseignent ici d'avoir des apprentis. C'était même une pratique très courante au siècle dernier et ça allégeait beaucoup la charge de travail des professeurs. Mais comme les postes se sont réduits au fil des années, les professeurs et plus encore les directeurs de maison n'avaient pas physiquement le temps de prendre en charge un apprenti.

-Mais le professeur Snape … protesta Susan.

-Le professeur Snape quitte définitivement l'école à la fin de l'année scolaire, déclara Harry.

-Pourquoi on ne le sait pas ? s'insurgea Susan en élevant la voix

Harry lança un regard las à Severus qui écoutait la conversation et qui roula des yeux pour toute réponse. Même si le corps enseignant était au courant, Dumbledore n'avait pas jugé utile de mettre au courant les élèves de son départ prochain. N'étant nullement soumis au directeur, Harry avait décidé de prendre la peine de rectifier cette erreur.

-Tout maître doit enseigner mais également prendre au moins un apprenti dans sa vie, expliqua Harry. Nous ne pouvons pas nier que le professeur Snape a enseigné son savoir avec des méthodes personnelles mais il n'a jamais pris d'apprenti, alors qu'il a sa maîtrise depuis une quinzaine d'années. La guilde de potions a posé un ultimatum avant d'annuler tous ses diplômes qui passe par le fait qu'il doive prendre un apprenti dans les plus brefs délais et qu'il quitte Poudlard.

-Pourquoi toi ? osa Susan. Pourquoi il t'a choisi comme apprenti ?

-Qui sait ? fit Harry en haussa des épaules. Il faudrait demander la réponse au professeur Snape.

Consciente qu'elle n'aurait pas de réponse, elle changea de sujet.

§§§§§

L'Ordre du Phénix se sentait un peu à l'étroit dans le salon des Weasley.

Quand Kingsley Shacklebolt avait voulu se rendre au bal de présentation d'Harry Potter, Dumbledore avait voulu lui faire comprendre par la force qu'il n'était pas tenu d'y aller. Par un moyen inconnu, l'auror s'y était quand même rendu et dès qu'il avait quitté square Grimmaurd, toute la maison avait expulsé l'Ordre. Le directeur avait bien tenté d'y retourner mais rien n'y faisait. Ça n'avait pas arrangé les choses d'apprendre que le propriétaire des lieux n'était pas Harry mais Sirius Black, miraculeusement sauvé de la bataille du ministère et qu'il refusait tout dialogue avec l'Ordre. Pire, les gobelins, qui avaient repris la gestion du patrimoine Black, avait notifié à Dumbledore qu'il avait occupé illégalement le manoir pendant l'absence du propriétaire sans même établir de contrat de location et qu'il était temps de régler ses dettes. Le directeur avait été effaré du montant du loyer d'un tel manoir au cœur de Londres, quand bien même il se trouvait dans un quartier malfamé côté moldu. A son corps défendant, il avait dû déménager le QG et le seul endroit assez grand restait le Terrier.

Après les salutations d'usage, beaucoup de membres demandèrent au vieux sorcier quand ils allaient enfin pouvoir voir le Survivant. Dumbledore grinça des dents en avouant que Potter était pris par ses études et ses nouvelles responsabilités de lord et donc, qu'il lui serait difficile de se libérer. Minerva, le seul professeur qui avait pu se libérer pour assister à la réunion, s'empêcha difficilement de pouffer. Pour le reste du pays, Albus Dumbledore était le mentor d'Harry Potter mais pour les élèves et les enseignants de Poudlard, le plus jeune se fichait totalement des désidératas de l'aîné. Cela faisait plus d'un an qu'Harry avait coupé les ponts avec l'Ordre et elle ne pouvait pas être plus d'accord avec cette décision. Depuis qu'Harry avait disparu, elle pouvait voir objectivement ce qu'était l'Ordre et ses doutes avaient été confirmés, il ne servait pas à grand-chose. Si elle voulait être ironique, les membres de l'Ordre semblaient presque croire que la guerre qui se déroulait était un jeu. Mais ils n'avaient pas l'air de comprendre qu'ils n'avaient qu'une seule vie qu'ils pourraient perdre très rapidement.

Minerva ramena son attention sur le chef de l'Ordre qui essayait de louvoyer pour ne pas révéler que le Survivant ne comptait pas revenir de sitôt. Et comme Dumbledore avait réussi à se mettre à dos leur seul contact fiable du bureau des aurors, l'Ordre du Phénix avait encore moins de soutien et de force de frappe.

-J'ai des contacts avec Potter … se vanta l'un des membres.

Minerva lui jeta un regard incrédule, encore plus lorsqu'elle entendit d'autres se vanter des mêmes faits. Harry ne connaissait même pas de vue ces imbéciles et ils se permettaient de s'inventer une vie ! Elle avait de plus en plus envie de quitter cette bande de bras cassés mais d'une part, son retrait de l'Ordre la mettrait en danger, à la fois de la part de Voldemort – qui, par un moyen qui lui était inconnu, était au courant de chaque mouvement de l'Ordre – et à la fois de Dumbledore qui n'aimait pas qu'on lui échappe, si elle se fiait à ses hurlements quand il avait découvert que Kingsley n'était plus là. Par ailleurs, avec les autres directeurs de maison, ils avaient convenu qu'il serait mieux qu'ils se tiennent au courant des faits et gestes du directeur. Soit, ils avaient réussi à contrer la tentative de Dumbledore pour siphonner la magie de l'école mais ce n'était pas pour autant qu'ils devaient relâcher leur surveillance.

Albus Dumbledore, quant à lui, était en train de se demander pourquoi il avait convoqué une réunion de l'Ordre. Certes, quand ils avaient dû déménager, beaucoup avaient râlé sur le nouveau QG mais aucun n'avait proposé de lieu plus grand pour se réunir. Même Arthur était dérangé de voir autant de monde chez lui mais avant qu'il n'ait pu émettre des objections, Molly avait proposé leur maison comme QG. Albus avait sauté sur l'occasion pour plusieurs raisons dont la première était l'absence de Ginny. La petite rousse, sous la garde de sa mère, avait disparu de sa chambre du jour au lendemain. Pire, l'horloge familiale avait figé son aiguille sur le point où se trouvait déjà celles de Bill, Charlie, Fred et Georges « en sécurité », ce qui voulait tout et rien dire, et encore moins leur localisation. Le directeur et la matrone avaient alors compris qu'elle se trouvait hors de portée mais il fallait absolument qu'ils remettent la main sur elle. La présence de l'Ordre au Terrier permettait à Albus de pouvoir enquêter à son aise.

Pressentant un mal de tête carabiné s'il laissait le bruit se répandre, Albus Dumbledore frappa dans ses mains, ramenant le silence dans la pièce.

-Un peu de calme, je vous prie, fit Albus. Bien, est-ce que vous avez des informations concernant Voldemort ou les mangemorts ? Un à la fois, s'il vous plait.

Dumbledore écouta d'une oreille les platitudes des membres de l'Ordre. Untel avait vu une personne portant une cape noire dans les quartiers mal famés, un autre qui avait des soupçons sur son voisin ou encore celui qui avait cru intelligent de surveiller le manoir d'un sang pur adepte de la magie noire, persuadé qu'il servait Voldemort … Le seul avantage de l'Ordre du Phénix était qu'il répandait sa parole chez les plus crédules.

Il préférait utiliser des mercenaires pour les missions plus musclées …

Tandis que les rapports s'enchaînaient, le directeur observa les membres un à un. Comme Harry Potter s'était mis hors de portée à l'école, il lui fallait pouvoir lui mettre la main dessus dans les plus brefs délais. Il comptait en désigner certains pour surveiller le manoir Potter et qui sait, avoir une opportunité pour enfin discuter avec Harry. Il ne préférait pas l'approcher au ministère car comme il avait révoqué tout ce qu'il avait entreprit au nom des Potter, il était clair que le nouveau lord Potter n'avait pas Albus Dumbledore en odeur de sainteté. Son premier choix aurait été Kingsley Shacklebolt, mais comme il se l'était aliéné en l'empêchant de se rendre au bal de présentation de Potter, sans oublier qu'il ne venait plus travailler car il était malade, d'après ses contacts, il pouvait faire une croix dessus.

Une heure plus tard, alors que la réunion se terminait, Dumbledore avait choisi qui il posterait devant chez Potter.

-Mademoiselle Vance ? appela Albus. Pourriez-vous m'accorder quelques instants ?

§§§§§

Laze s'était rendu chez Garrick. Depuis qu'il avait appris que celui qui était responsable de son emprisonnement avait des liens avec celui qui pourrissait la vie de son descendant, le Fondateur essayait de faire toutes les connexions. Heureusement, Garrick n'était pas ces imbéciles de sorciers et depuis le temps, il avait pu rassembler beaucoup d'éléments sur Albus Dumbledore, dont il se méfiait depuis qu'il était arrivé sur la scène politique avec l'avènement de Gellert Grindelwald. Ce dernier, qui était sous la garde du mage, avait livré de nombreux secrets, y compris les manipulations financières et les violations à la loi dont Dumbledore s'était rendu coupable.

Mais ce jour-là, s'ils étaient ensemble, c'était parce que Garrick avait besoin de son expertise sur la magie fourchelang.

-Même à mon époque, c'était une capacité assez rare, avoua Laze après que Garrick lui ait servi une tasse de thé. Ric était étonné que j'en possède des traces et après quelques recherches, il s'est avéré que j'avais également du sang elfe, trop dilué pour espérer en avoir l'héritage.

-La croyance populaire veut qu'Harry ait obtenu cette capacité quand Voldemort l'a attaqué, rappela Garrick.

-Par droit de conquête, fit Laze. Oui, j'en ai entendu parler. Mais le droit de conquête n'octroie pas les pouvoirs de l'adversaire. Harry est fourchelang parce qu'il est mon descendant et celui de Ric mais également celui d'un lamia. Le don est resté secret chez les Potter jusqu'à ce que Harry le découvre accidentellement.

-En quoi consiste le fourchelangue ? demanda Garrick, curieux

-A la base, c'est un support de magie, expliqua Laze. Les formules en latin véhiculent le pouvoir, c'est la même chose pour le fourchelangue. Les formules magiques en latin résument nos intentions mais cela n'existe pas quand on parle fourchelangue, c'est pour cela qu'on considère qu'elle est différente de la magie sorcière qui est bien plus formatée. Le fourchelangue est plus … brut.

-Dois-je comprendre qu'il a eu cette détestable réputation à cause du christianisme ? nota Garrick

-Adam, Eve et la tentation symbolisée par un serpent, confirma Laze. Les amalgames ont toujours été dangereux. A cause de cela, ceux qui avaient le don se sont faits de moins en moins connaître ce qui a permis à Voldemort de le pervertir. Enfin, pour cela, il faudrait que je puisse voir ce qu'il fait.

-Les mages fourchelang d'Amérique du Sud ont réussi à ôter la marque des ténèbres avec l'un des rares fourchelang britanniques, révéla Garrick.

Laze fronça des sourcils.

-Ils ont réussi ? s'inquiéta Laze

-Quelque chose vous dérange, j'ai l'impression, constata Garrick.

-J'aimerai examiner cette marque, fit Laze. Parce que si je ne me trompe pas, elle n'a pas été faite avec de la magie fourchelang.

Garrick le regarda avec de grands yeux.

-Comment est-ce possible ? hoqueta Garrick

-La magie fourchelang ne se démantèle pas comme ça, expliqua Laze. D'ailleurs, elle ne peut pas être utilisée pour un usage aussi néfaste.

-Pourquoi ? demanda Garrick

-D'après les éléments que j'ai pu récolter sur la marque des ténèbres, c'est un lien magique imposé, répondit Laze. Or, quand on utilise la magie fourchelang mais que l'une des personnes concernées n'est pas totalement consentante, la magie reste très faible. C'est à tester mais je peux parier que la marque peut être retirée avec de la magie sorcière. Puissante, certes, mais magie sorcière quand même. Un fourchelang seul pourrait s'en débarrasser.

Garrick fit marcher ses méninges.

-Tom ne peut y arriver seul, songea Garrick. Il a dû faire appel à d'autres mages fourchelang qui ont confirmé que la marque ne pouvait être retirée dans l'idéal que par deux fourchelang qui avaient un lien avec celui qui avait posé la marque, et au moins un fourchelang qui lui est lié avec d'autres fourchelang.

-La magie fourchelang n'a pas besoin d'avoir un lien avec son auteur pour être démantelée, assura Laze. J'ai besoin d'examiner un sorcier portant la marque et un autre à qui on lui a retiré.

-Je pense qu'on pourrait arranger ça, sourit Garrick. J'ai quelques appels à passer et ça ne devrait pas poser de problèmes.

-Très bien, fit Laze en se levant. J'attends votre lettre.

Le Fondateur salua le mage avant de s'en aller rejoindre son compagnon. Il avait d'autres points à vérifier.

§§§§§

Ginny approcha Bill qui venait de sortir de son entretien avec Muriel.

-Tu as l'air d'aller mieux, sourit Bill.

-Beltaine m'a remis sur pied, sourit Ginny. Et j'avoue que ça a accéléré ma guérison.

L'aîné des enfants Weasley se renfrogna. Il avait appris dans quel état ses frères l'avaient retrouvée et il n'avait pas été loin de marcher sur le Terrier pour exiger des explications de la part de sa génitrice.

-Est-ce que je pourrais te parler ? demanda Ginny

-Viens, invita Bill.

Profitant du temps doux, ils s'assirent sur le banc devant la maison.

-Je me pose des questions, révéla Ginny. Je ne me fais aucune illusion concernant Molly mais le comportement de Ron me semble … bizarre.

-Parce qu'il s'acharne à vouloir redevenir l'ami d'Harry ? demanda Bill

-Pas que, fit Ginny. Nous nous sommes tous rendus compte dès que nous avons mis les pieds à Poudlard que tout ce que Molly nous apprenait était biaisé, si ce n'est complètement faux, quand elle ne nous l'a pas appris tout court. Mais tu remarqueras que Ron a continué à la croire sans rien remettre en cause.

-C'est vrai, songea Bill.

Oui, les membres de leur famille étaient bornés mais pas aussi aveugles que Ron.

-A quoi tu penses ? demanda Bill

-Est-ce que tu penses qu'on aurait pu forcer Ron à être comme ça ? demanda Ginny en hésitant

-C'est une grave accusation, se redressa Bill. Qu'est-ce qui te fait dire ça ?

-Disons que la personnalité de Ron me chiffonne, avoua Ginny. Oui, Molly nous a bercé d'histoires comme quoi je serais la future lady Potter et lui son meilleur ami pour la vie. Mais j'ai pu voir très vite qu'Harry était très loin de ce qu'elle racontait et en étant encore plus proche de lui, Ron aussi. Mais il ne voit rien. Pire, quand on a découvert qu'il parlait la langue des serpents, il est allé le crier sur tous les toits avant d'aller hurler sur Harry.

Bill hocha la tête. Ron commençait d'abord par s'indigner avant de se venger en racontant des histoires. Jamais le contraire.

-Et puis il y a la manière dont il se comporte à l'école, poursuivit Ginny. Il saute à la gorge de tous les Serpentards et surtout de Malfoy. Il se bat avec toutes les personnes qui disent le contraire de ce qu'il pense. Il a pourtant vécu avec Fred et Georges et il a rapidement appris à ne plus monter sur ses grands chevaux !

-Il semblerait avoir changé du tout au tout, nota Bill. Tu penses que ce n'est pas le vrai Ron ?

-Je ne sais pas comment l'expliquer, s'agita Ginny.

Mais Bill voyait parfaitement ce que sa sœur voulait dire, surtout avec les soupçons dont lui avait fait part son supérieur à la banque. Si les rumeurs concernant les capacités de legilimens de Dumbledore s'avéraient exactes – puisqu'il était certain de son emprise sur sa génitrice – alors il n'était pas fou d'imaginer qu'il avait manipulé son frère pour tenter de se rapprocher du Survivant, même si c'était une cause perdue depuis leurs treize ans au moins.

-Tu es briseur de sorts … insinua Ginny.

Bill porta sa tasse à ses lèvres, songeur. Comme il semblait parfaitement conditionné par Molly, aucun des autres enfants ne s'était demandé s'il s'agissait du comportement normal de Ron. Par acquis de conscience, il serait intéressant de vérifier que son plus jeune frère était libre de ses pensées. Mais pour cela, il faudrait le soustraire à la poigne de fer de Molly et de Dumbledore …

-Il faudrait qu'il puisse venir sans que Molly soit au courant, murmura Bill.

-Muriel ou même papa pourraient l'amener, déclara Ginny.

Oui, c'était le mieux qu'ils pouvaient faire …

§§§§§

-Draco Malfoy, hein ?

Hermione ne parut même pas surprise de se trouver nez à nez avec Julia Genest. Cette dernière essayait de parler en tête à tête avec la Princesse de Gryffondor depuis que son couple avec le Prince de Serpentard était avéré.

-Mademoiselle Genest, salua Hermione avant de reprendre son chemin vers la bibliothèque.

-Tu as tiré le gros lot, commenta Julia en lui emboîtant le pas.

Hermione ne laissa pas son agacement apparaître en se voyant tutoyée.

-Draco et moi nous sommes découverts des points communs, déclara froidement Hermione.

-Mais c'est un Serpentard ! s'exclama Julia

-Et ? demanda Hermione. Il reste un sorcier comme les autres, il me semble. Une maison ne fait pas tout dans la vie, et heureusement.

-La plupart pratique la magie noire, pointa Julia.

-Et qu'est-ce que la magie noire ? s'agaça Hermione

La brune fit volte-face pour se retrouver face à la rousse.

-Nous avions déjà établi depuis un moment que nous serions d'avis différents, gronda Hermione. Pouvez-vous enfin me dire ce que vous me voulez ?

-J'ai cru comprendre que vous étiez en contact avec Harry Potter, se lança finalement Julia.

-Oui, et ? demanda de nouveau Hermione. Vous souhaitez un autographe ?

-Je voulais savoir, puisqu'il n'est pas inscrit pour passer ses ASPIC, s'il n'avait pas besoin de soutien, proposa Julia avec un grand sourire.

Hermione ne tint que quelques secondes avant d'éclater d'un rire sarcastique.

-Nous savons toutes les deux qu'Harry pourrait passer beaucoup plus facilement ses examens avec l'aide du professeur Snape que s'il demandait votre aide, ricana Hermione. Sauf si votre but est de faire son éducation sexuelle, bien entendu.

-Je ne vous permets pas … s'indigna Julia.

-De dire la vérité ? coupa Hermione. Jurez sur votre magie ici et maintenant que vous n'avez pas eu de relations sexuelles avec les élèves depuis que vous êtes ici.

Seul le silence lui répondit, puisque Julia s'étouffait de rage.

-C'est bien ce que je pensais, railla Hermione. Bonne journée, mademoiselle Genest. Oh, et la prochaine fois que vous souhaiterez que je vous arrange un rendez-vous avec Harry pour des motifs douteux, passez par son maître d'apprentissage. Je suis certaine que le professeur Snape serait ravi de connaître vos raisons d'importuner son apprenti.

Elle tourna des talons et abandonna la rousse qui se retenait de lui donner une bonne leçon.