13 juin 2012

Severus Rogue s'était résigné depuis bien longtemps à ce que chaque nouvelle année passée à Poudlard lui soit exécrable, mais il fallait reconnaître que la présente avait vraiment décroché le pompon, même selon ses standards.

Tout avait commencé par la disparition du morveux Potter – et oh, l'ironie mordante de cela lui donnait un urticaire ignoble. Bien sûr que son engeance s'était empressé de compliquer la vie à la nation entière dès qu'elle l'avait pu. D'un autre côté, Severus avait promis de veiller à la sécurité de l'enfant de Lily Evans. Inutile de préciser que l'entreprise venait de se compliquer furieusement.

Et tout ça à cause de la négligence de Dumbledore. Une des rares occasions dans sa carrière enseignante où le directeur de Serpentard était tombé parfaitement d'accord avec Minerva McGonagall. Non, il n'avait pas fait bon d'être le directeur de Poudlard en ce début d'année.

Avec pareille introduction, l'année scolaire s'était déroulée à l'avenant : insolents sales gosses commettant des frasques dans les couloirs ou manquant tuer leurs camarades de classe par leur refus de prêter attention à ce qu'ils faisaient en cours, créatures dangereuses présentes dans l'enceinte de l'école, et tentatives accrues du Ministère de fourrer son nez là où il n'aurait pas dû grâce à une excuse moins facile à contrecarrer que les précédentes.

Et maintenant, pour finir en beauté ce désastre, cet incompétent de Quirrel s'était avéré être un mage noir pas si incompétent que cela, puisqu'il s'était promené environ dix mois sous le nez de plusieurs sorciers et sorcières renommés sans jamais laisser voir qu'il avait consenti à se laisser posséder par les mânes du Seigneur des Ténèbres en personne. Rien qu'à imaginer les dégâts qu'il aurait pu causer au sein de l'établissement, Severus s'était autorisé à déboucher une bouteille de whisky Pur-Feu et la vider à moitié pour se calmer les nerfs.

Franchement, un énième cursus gâché en Défense contre les Forces du Mal auquel s'ajoutaient les agressions sur plusieurs licornes était un prix absurdement léger à payer en échange.

Oh, et n'oublions pas que Quirrell s'était laissé appâter par la perspective de mettre la main sur la Pierre Philosophale – encore une fois, merci infiniment à Dumbledore pour ses plans géniaux. Pour sa part, Severus doutait que Nicolas Flamel eût confié son magnum opus à d'autres mains que les siennes ou celles de son épouse, réputation ou talent pouvant aller se faire voir ailleurs. Non, il était bien plus probable que l'Alchimiste ait remis un leurre à son ancien élève, et la désinformation s'était chargée du reste.

En tout cas, Quirrell et son (vraiment très) indésirable passager avaient mordu à l'hameçon, et une fois rassemblées toutes les informations nécessaires sur les pièges protégeant l'objet convoité, s'étaient empressés de créer une diversion avant de tenter un vol.

Le résultat, c'était un Cerbère en piteux état – conséquence d'avoir ingéré un sédatif surpuissant caché dans une carcasse de poulet – plusieurs salles de l'aile droite ravagées par la tempête de sorts et maléfices déchaînée lorsque le directeur était descendu là-bas afin de confondre et arrêter le cambrioleur, et un miroir du Risèd fêlé – ce qui avait dû être une conséquence de la tempête de sorts mentionnée au préalable, rien moins que deux archimages essayant de s'entretuer n'aurait pu fragiliser la complexe toile d'enchantements imprégnant l'artefact au point de laisser une marque dessus. Dans tous les cas, il n'était plus possible de récupérer quoi que ce soit dans les profondeurs du miroir.

Et pour parachever cette catastrophe, le spectre du Seigneur des Ténèbres avait fui sitôt sa réalisation qu'il ne pourrait pas l'emporter dans son actuel état de faiblesse, leur laissant les dégâts à réparer et un cadavre de Mangemort sur les bras.

Question fin de trimestre, inutile de dire que la faculté n'avait pas souvent connu pire.

Heureusement que le banquet de fin d'année était prévu pour la semaine prochaine. Severus ne voulait vraiment pas donner à l'Univers le temps de reprendre son souffle et de leur lâcher dessus une autre de ce que Murphy considérait comme une blague.

Parce que c'est bien connu, si ça n'emmerde pas le plus de gens possible, ce n'est pas drôle aux yeux de la pensée gouvernant le cosmos. Hélas.

22 juin 2012

Hermione flairait quelque chose de pourri au Royaume du Danemark. Et non, elle ne disait pas cela uniquement car les jumeaux Weasley avaient trouvé moyen de dérober un cabinet de toilettes, ce qui avait nettement ruiné la plomberie du deuxième étage.

Elle disait cela en raison du monumental barouf ayant eu lieu la semaine précédente. Personne ne savait exactement ce qui s'était produit, mais tout le monde l'avait entendu – pareil concert de miaulements déchirants, de gargouillis visqueux et de détonations grondantes, il aurait fallu être complètement sourd pour l'ignorer. Même au sommet de la tour de Serdaigle, ça avait fait trembler les briques de la maçonnerie !

Bien entendu, la rumeur s'était déployée joyeusement : le dragon emprisonné sous les fondations du château avait eu une crise de foie, une armée de démons ou de Fae avait tenté de passer au travers d'une faille interdimensionnelle causée par le nœud de lignes de force sur lequel Poudlard était bâti, ou encore le genius loci en train de se former, conséquence de plusieurs générations de sorcières et sorciers passant entre ces murs, venait de gravir une nouvelle étape dans sa prise de conscience. À titre personnel, Hermione préférait l'hypothèse formulée par Béatrice Haywood de Poufsouffle, comme quoi toute l'architecture de sortilèges protégeant l'école signifiait ainsi qu'elle était sur le point de s'écrouler – franchement, avec tout ce qui s'était produit au cours de leurs trimestres, c'était la suggestion la plus raisonnable.

Dans tous les cas, le professeur Quirrell avait brillé par son absence pendant une semaine, tout le reste de ses collègues avaient fait grise mine, l'aile droite où se trouvait le couloir interdit s'était lancée dans d'intenses travaux de réfection (franchement, il était temps) et Serpentard avait gagné la coupe des Quatre Maisons pour la septième année consécutive.

Pour son bilan étudiant, Hermione était mitigée : d'accord, la magie était passionnante, mais elle espérait que ses parents lui avaient trouvé de bons carnets de vacances afin de lui permettre de rattraper sa sixième. Sorcière ou pas, elle devait encore passer ses A-Levels !

Pour son bilan social, ça pêchait aussi : pour toutes leurs promesses d'égalité, les sorciers n'en avaient pas moins leurs préjugés. Si Drago Malfoy se conduisait de manière aussi ignoble à l'école, c'était probablement car il était autorisé à agir de même à la maison. Et vu l'influence de cette famille dans les rangs supérieurs du Ministère anglais – elle avait consulté les journaux et les généalogies disponibles à la bibliothèque – ça ne présageait rien de bon sur ses perspectives dans la société sorcière elle-même.

Et enfin, son bilan espion : jamais dans les films de James Bond, on ne voit quelqu'un remplir un rapport ou recevoir des instructions de manière aussi bassement matérielle qu'un simple courrier, et on ne dit pas non plus à quel point ça finit par devenir monotone. Inutile de le préciser, son petit béguin pour Ian Fleming avait péri de sa belle mort.

Ainsi résumé, il n'y avait réellement qu'une seule réponse à fournir à sa mère quand celle-ci l'avait réceptionné à l'arrêt londonien du Poudlard Express.

« Alors, ma puce ? Conclusion de ta première année à l'école magique ? »

« … Beaucoup plus frustrant que ce que j'aurais cru, en fait. »