Seul.
Il était debout tout seul devant deux cercueils lourdement décorés.
Il devait faire ses adieux.
Mais il avait promis à son père qu'il ne pleurerait plus jamais devant les autres. Alors il pleurait intérieurement, alors qu'il lui soufflait ses dernières paroles. Il renonça à son courage, sa motivation. Il laissa toutes les émotions qu'il pouvait ressentir demeurer auprès de son père. Il n'en avait plus besoin si son pilier n'était plus là pour les soutenir et les approuver.
Il passa ensuite à sa mère, pensant à tous ces moments passés à trois, son sourire, son odeur, sa voix si maternelle lorsqu'elle lui chantonnait une berceuse quand il était petit pour le reposer ou encore à la teinte amusée dans ses yeux alors qu'elle le grondait. Il lui abandonna tous ses souvenirs, les bons moments passés ensemble, l'amour et la tendresse.
Cela ne servait à rien de se voiler la face. Sans ces deux personnes qui lui avaient tant donné, il n'était rien. Rien de plus qu'une enveloppe physique.
Il se retourna vers la foule d'hypocrites venus pleurer la mort de deux vampires nobles. Cette occasion leur servait plus à établir des relations et à regretter le décès de personnes hauts-placées dans la société vampirique qu'à réellement déplorer la mort de ses parents en tant que tels. C'est à peine s'ils devaient vraiment les connaître.
Et pourtant, eux aussi eurent le droit de défiler tour à tour devant ses parents.
Et cela ne lui fit rien. Il aurait dû s'en indigner de voir un homme devant lui discuter affaires au lieu d'être attristé ou encore être en colère contre cette femme qui criait son désespoir avec un jeu d'actrice des plus risible. Il en fut conscient un instant, ressentant un trou béant dans sa poitrine. Ses yeux le picotèrent un moment mais il se reprit très rapidement.
- Ryouta ! Oh mon dieu mon petit Ryouta, c'est tellement cruel ce qu'il t'est arrivé ! Tu es si jeune !
Une femme venait de le prendre dans les bras avec brusquerie. Le jeune ne réagit pas, ce qui inquiéta la vampire. Elle recula d'un pas ce qui lui permit de mieux la voir.
Il l'associa immédiatement avec celle qui, dix minutes plus tôt, pleurait comme une folle, comme si tout était fini. Elle était grande, brune, l'air d'une top model qui sait comment jouer son rôle d'actrice à la perfection. Elle sentit l'air désintéressé du jeune et reprit :
- Je comprends que tu sois si choqué ! Je ne sais pas si tu te souviens de nous, je suis Kyuna Riziku et voici mon mari, Akihido. Tu sais, nous avions une fois mangé ensemble…
Il ne chercha même pas à se souvenir. Cela lui aurait fait trop mal. Alors il ne répondit rien, ne fit aucun mouvement perceptible.
Il regarda cependant le mari de la dénommée « Kyuna ». Il était plutôt fin, ressemblant à un homme d'affaire de l'extérieur, et Kise ne douta pas qu'il devait aussi en avoir le caractère. Elle continua alors, semblant ne pas se rendre compte que ce qu'elle pouvait dire n'intéressait aucunement l'orphelin.
- Mais ne t'inquiètes pas, mon mari et moi-même allons nous occuper de toi comme de vrais parents ! Tu t'appelleras Riziku Ryouta à partir de maintenant. Tu verras, tu iras vite mieux !
De vrais parents, uh ? Il n'y croyait pas une seule seconde. L'homme ne semblait lui prêter aucune attention et la femme avait l'air de cacher quelque chose. Et de quel droit lui enlevaient-ils son nom de famille, la seule chose qu'il lui restait de ses parents ?
Mais s'ils comptaient s'occuper de lui, cela voulait dire qu'ils lui offriraient logement et nourriture. Alors quand Kyuna lui tendit la main pour lui proposer de la suivre après que la cérémonie soit terminée, il la prit et suivit le couple, d'un pas morne et traînant.
- Ne t'inquiète pas mon chéri, on part juste en mission. Reste à la maison, on reviendra très vi-
- Hiroko ! Dépêche-toi, on est déjà en retard !
- J'arrive !
Elle lui sourit, rayonnante. Sa main effleura sa joue, elle l'embrassa sur le front, avant de sortir de la maison. L'homme qui avait appelé sa femme était déjà dans la voiture, moteur en marche, prêt à partir. Il fit un clin d'œil à son fils en lui disant :
- Enfin tu me rends ma femme petit chenapan ! On revient demain ! Ce n'est pas comme si tu ne nous reverras jamais !
Sa mère monta dans la voiture et…
- Ryouuutaaaa !
Kise se réveilla de sa transe, complètement dérouté. Aaaah… Il avait encore tenté de s'échapper de cette réalité. La porte de sa chambre s'ouvrit d'un coup sec et une tornade blonde se précipita dans ses bras. Des yeux d'un bleu océan le regardèrent avec joie et elle commença à raconter sa journée sans intérêt. Elle avait le même âge que lui ; quinze ans, mais elle était si innocente des malheurs qui pouvaient l'atteindre…
Leiko était la fille de ses hôtes qui voulaient se faire appeler "parents". Elle s'était attachée à lui parce qu'elle avait toujours voulu un frère. Elle faisait d'ailleurs souvent en sorte de se faire passer pour sa sœur jumelle, et le jeune la laissait faire. Il s'en fichait éperdument. Ou plutôt, il masquait ce qu'il pouvait ressentir, mettant ses émotions dans un énième tiroir de la grande armoire de marbre qu'il se représentait souvent mentalement.
- On est déjà en septembre et il… Dis, Ryouta, tu m'écoutes ?
Le blond lui fit signe de continuer, même s'il n'avait absolument rien suivi. Après quinze minutes de son monologue, il l'entendit soudain crier en se levant. Kise leva la tête et vit Kyuna prendre sa fille dans ses bras, la saluant avec joie. Elle lui sourit avec douceur, puis lui demanda si elle aurait le droit d'enfin saluer son « fils ». Leiko rit avant de s'esquiver rapidement après l'avoir prévenue qu'il était l'heure pour elle d'aller voir une amie et Kyuna ferma la porte derrière elle.
Son sourire changea immédiatement dès que sa fille ne put plus la voir. Oh, Kise savait parfaitement ce qui allait se passer. Cela faisait trois mois qu'il était arrivé dans cette maison, et un mois que cette femme avait enfin assouvit ses désirs qu'il ressentait sur lui à chaque fois qu'elle le voyait passer devant elle. Il ne l'avait compris qu'une fois qu'elle avait posé sa main sur lui.
- Ryoutaaa, viens dire bonjour à ta maman préférée…
Sa voix roucoula de désir alors qu'elle s'arrêta à deux pas de lui. Le jeune homme se leva à contre-cœur de son siège. Il s'approcha d'elle alors qu'elle l'observait de ses yeux ardents. Il mit ses bras autour de son cou. Alors, sachant ce qu'il fallait qu'il fasse, il combla l'espace qu'il y avait entre leurs deux lèvres. La femme approfondit le baiser avec avidité, ne le trouvant pas assez énergique à son goût.
Il la laissa faire ce qu'elle voulait de son corps, cadenassant ses pensées dans l'armoire de marbre qu'il s'était créé. Mais il sentait que cette soirée allait être différente avec la façon qu'elle avait de mettre la main sur lui. Et il comprit quand elle lui dit avec envie :
- Mon petit Ryouta, ce soir, on va pousser l'exercice encore un peu plus loin, alors crie pour moi s'il te plait…
Ses yeux s'écarquillèrent alors que, nu sous elle, elle prit son sexe pour s'empaler dessus. Sous le choc, un cri lui échappa. Il ne voulait pas ! Il gesticula pour tenter de s'échapper comme les premières fois où elle l'avait forcé à l'embrasser ou à jouer plus loin avec elle, mais jamais elle n'avait été jusqu'à ce point-là. Elle usa de la force pour le plaquer contre le lit, ramenant ses bras au-dessus de sa tête, et commença à bouger malgré ses protestations. Des geignements lui échappèrent contre son gré et sa vue se brouilla.
- Oh mon dieu, mon Ryouta pleure, ton visage est si… Montre-m'en plus…
Il… Pleurait ?
Kyuna se pencha pour l'embrasser alors qu'elle augmenta la cadence. L'une de ses mains masturbait son clitoris alors qu'elle commença à venir. Son cri de jouissance résonna dans la chambre tandis que son dos s'arqua, libérant ainsi les poignets de Kise qui ne fit pourtant aucun mouvement. Après une minute de silence, Kyuna se retira et s'allongea à côté du blond. Elle frôla sa joue de sa main et lui dit avec le sourire d'une amante :
- C'était magnifique…
Elle plana ensuite encore quelques heures à côté de lui avant d'aller faire sa douche, calculant à la perfection le moment où son mari rentrerait du travail. Elle embrassa une dernière fois Kise, vit qu'il ne répondit pas, et fila en-dehors de la chambre du blond pour aller saluer son conjoint, ignorant tout de la mascarade qui se jouait depuis près d'un mois dans sa propre demeure.
Resté tout seul, Kise se leva par mécanisme. Il se dirigea vers sa salle de bain – privée - et rentra dans la douche. Il commença à faire couler l'eau, augmentant toujours de plus en plus sa température. Il attrapa ensuite le shampooing et, prit d'une soudaine frénésie, frotta sa peau le plus possible. Il voulait tout faire disparaître. Plus aucune trace ne devait rester. Il recommença l'opération plus d'une dizaine de fois jusqu'à s'en brûler l'épiderme et s'arrêta soudainement. Il tomba à genoux, ses bras l'entourant des deux côtés. Sa respiration s'accéléra alors qu'il se sentait perdre pied. Il fut pris d'un haut-le-cœur mais rien ne sortit de plus qu'un liquide jaunâtre. Sa gorge s'enflamma, et une réaction de survie fit place dans sa tête. Il sut ce qu'il avait à faire.
Il n'avait qu'à ouvrir l'armoire de marbre et ranger ce souvenir dedans. Avec tous les autres. Pour ne plus jamais la réouvrir s'il n'y avait rien de plus à y mettre. Enfermer ses histoires dans un endroit que lui-même n'atteindra pas.
Et c'est ce qu'il fit. Lorsqu'il ressortit de la salle de bain, ce fut comme si rien n'était arrivé. Il se rhabilla, changea les draps, prit un livre, et commença sa lecture, dans un silence complet.
- Ryouta, s'il te plait, va aider Leiko à décorer le sapin, j'ai peur qu'elle en fasse trop si personne ne l'aide à la tâche.
Le blond leva la tête de son ouvrage -qui consistait à créer des faire-part pour le bal- avant de se diriger vers la petite empotée qui avait bien du mal à savoir quelles couleurs prendre pour embellir un peu l'énorme sapin se trouvant devant elle.
Il se pencha vers un sac de guirlandes et décorations en tout genre avant de le renverser par terre. Voilà. Ils y verraient déjà plus clair. Le blond se souvint d'un conseil qui l'avait toujours aidé dans ses choix de couleurs quand il était petit. Il prit les couleurs qu'il estimait être les plus chaudes et les boules les plus belles de chaque sac.
Il sentit le regard de Leiko sur lui, fortement perplexe, avant qu'elle ne commence à comprendre à son tour. Elle entreprit de l'aider dans sa tâche et alors que Kise arrangeait les décorations sur l'immense conifère, elle lui donnait tout ce dont il avait besoin dans l'ordre qu'il voulait sans qu'il n'ait besoin de lui dire quoi que ce soit.
Ils prirent deux heures sans pause sur leur œuvre avant d'en voir le bout. Kise apporta lui-même les touches finales, non-mécontent de son travail. Ses parents allaient le féliciter quand ils rentr…
- Oh mon dieu ! Il est magnifique ! Quel talent ! Tu dois être fière ma chérie !
Son sang se glaça alors qu'il entendit la voix trop aiguë. C'était le premier Noël qu'il passerait sans eux. Ses mains se serrèrent autour de l'étoile qu'il venait de placer en haut du sapin. Il secoua sa tête et redescendit de l'échelle, allant ranger cette dernière à sa place sans un regard. Il retourna ensuite à sa tâche première, toujours en silence. Leiko, à côté, ne cessait de bavasser auprès de sa mère pour vanter ses mérites.
Un bal était prévu pour Noël afin de se faire de nouvelles relations. C'était une coutume assez répandue chez les vampires nobles pour entretenir les affaires. Kise n'avait aucune envie de participer à cette comédie mais avait-il réellement le choix ? Avec un soupir, il finit son invitation qu'il montra à Kyuna. Cette dernière lui donna son accord, ravie d'avoir enfin un esprit artistique dans la famille.
Il ne restait plus qu'à envoyer les faire-part et choisir les tenues. Sur ce sujet, les filles se retournèrent toutes deux d'un commun accord vers Kise avant de décider qu'ils allaient devoir aller faire ensemble un tour des boutiques le week-end prochain, sans faute. Ça n'arrangeait pas plus Kise, mais il n'avait pas grand-chose à faire, et cela faisait longtemps qu'il n'était pas sorti. Six mois s'il avait bien calculé. Après tout, il n'avait pas le droit d'étudier selon Kyuna et il n'avait aucun proche qui lui permettait d'aller voir du monde, ni de réelle raison de sortir.
Le week-end arriva à grand pas alors que le bal, lui, n'aurait lieu que d'ici à trois semaines. Mais les filles avaient si peur de ne pas trouver de robes qu'elles voulaient s'y prendre à l'avance. Il paraissait que le vampire de sang pur qu'ils avaient invité avait pour la première fois accepté leur proposition. Elles voulaient donc faire la meilleure impression auprès de lui pour obtenir ses faveurs.
Kise ne put s'empêcher de penser que ce pauvre vampire allait devoir se promener avec une horde de femme à ses côtés pendant toute la soirée puisqu'apparemment il n'avait pas encore choisi de compagne.
Le samedi même, il fut appelé à vingt-deux heure tapante devant le hall d'entrée. Leiko était toute surexcitée et ne put s'empêcher de sauter dans tous les sens avant d'être rapidement reprise par sa mère. Il y avait de meilleures manières de se comporter, surtout en tant que vampire de rang supérieur !
Ce n'était cependant pas ça qui allait l'empêcher de bouger, et sous l'impulsion, elle prit la main de Kise pour l'emporter vers l'extérieur en moins d'une seconde, prenant le blond au dépourvu. Mais dès qu'il fit un pas dehors, il fut surpris par ce sentiment de liberté qui l'atteignit. Les rayons de la lune se reflétèrent sur sa peau et il se sentit immédiatement mieux, comme affranchi de ses murs de briques qui l'empêchaient de respirer.
- Ça va Ryouta ?
Le jeune se retourna vers Leiko, le visage impassible, et acquiesça. Rien ne s'était passé qui devait se faire savoir. Surtout pas ce sentiment de plénitude qui serait rapidement corrigé par son hôtesse. Cette dernière sortit d'ailleurs à son tour de la demeure avec bien plus de dignité et se dirigea vers la Aston Martin DB5, une toute nouvelle voiture qui venait de sortir dans l'année.
Les vampires n'avaient pas les mêmes conceptions de la femme et ce fut Kyuna qui prit le volant, sans que cela ne choque personne dans la rue. Il n'y avait bien qu'une ville de créature surnaturelle pour que personne ne s'en offusque. Ainsi, même s'ils sortaient tard le soir, ils étaient sûrs de toujours trouver un grand nombre d'échoppes ouvertes.
Ils arrivèrent devant le premier magasin et quand ils rentrèrent dans la boutique, les clients comme les employés se stoppèrent net. Quelle était donc cette étrange impression ? Il se sentait épié sans ménagement.
Un salarié s'approcha avec beaucoup de manières et demanda dans la plus grande des politesses ce que ces messieurs-dames désiraient. Sa voix tremblait et il était rouge, transpirant à grosses gouttes. D'un air bien trop arrogant, Kyuna lui demanda ses plus belles confections. L'homme sembla heureux que l'on lui ait répondu et partit rapidement dans la réserve sans demander son reste.
Le blond entendit des murmures surexcités derrière lui et vit un groupe de quatre filles le regarder avant de faire semblant de vaquer à de nouvelles occupations quand elles se rendirent compte que Kise les avait vu. Il comprit alors ce qui se passait. S'ils étaient épiés, ce n'était pas par mépris, mais par désir.
Quelles imbéciles. Si seulement elles savaient réellement ce qui se tramait, elles ne se diraient pas que ce serait bien si elles pouvaient être avec lui. Car quand Kyuna se mettait en colère, cela faisait vraiment mal. Et il ne fallait pas toucher à ce qui était à elle.
Un nouvel homme arriva rapidement en s'excusant pour l'attente. Il avait, avec lui, des tenues ayant toutes l'air ravissantes. Il se présenta comme étant le gérant et les dirigea vers une pièce privée pour qu'ils puissent faire leurs choix et procéder aux essayages. Mais Kise sut rapidement que ce ne sera pas aussi simple quand il vit que Leiko refusa tous les habits proposés alors que Kyuna commença à se demander si le propriétaire ne s'était pas moqué d'eux.
Le jeune homme regarda pourtant les habits et les trouva tout à fait charmants même si certaines retouches auraient été nécessaires. Le pauvre homme se vit se faire envoyer promener d'une manière admirablement polie et pourtant très violente. La top model maniait aussi bien la langue de vipère qu'elle savait ensorceler les gens.
Le même manège ridicule recommença encore une dizaine de fois avant qu'ils ne tombent sur LA boutique ! Enfin, les vêtements « parfaits » furent trouvés. Aux yeux de Kise, ils avaient vu mieux, mais les filles n'avaient pas l'air de cet avis et comme il s'en moquait éperdument, il suivit juste le mouvement.
Le calvaire continua le week-end suivant avec les chaussures qui posèrent le problème d'être à la fois magnifiques, et assorties à la robe. Puis, le dernier week-end avant le bal, ce fut le tour du maquillage et des bijoux. Était-il physiquement possible de perdre autant de temps en une nuit, et se dire que ça valait le coup ?!
Avec un soupir, Kise rajusta sa cravate sur son costume choisi par ses soins, en repensant au temps perdu. Il avait au moins réussi à s'esquiver de la demeure au cours de la semaine dernière sans avoir personne avec lui et enfin il avait pu faire ce qu'il voulait.
Il tendit l'oreille et pu déjà discerner les premiers arrivants du bal entrer dans le manoir.
« Endosse ton rôle à la perfection, tu peux le faire. Tu n'as pas à parler, ta présence suffira. Les filles seront concentrées sur LE vampire de la soirée de toute façon. »
Il prit une inspiration et descendit au rez-de-chaussée, après avoir attendu trente minutes. La salle était bondée de monde et il passa inaperçu pour son plus grand bonheur. Il partit vers le buffet, choisit quelques amuse-bouche et prit place près du sapin, pour écouter les conversations sans chercher à en prendre part.
Il repéra rapidement la vedette de la soirée au vu de la foule qui s'était agglutinée autour de lui. Il ne distingua cependant de cet invité que des cheveux rouges et des yeux tout aussi ardents, qui le transpercèrent l'espace d'une seconde avant de ne revenir à son interlocuteur. Un homme aux cheveux verts semblait lui servir d'escorte et le suivre à chacun de ses pas.
Il se détourna de ces personnes quand il vit que Kyuna et Leiko étaient en train d'essayer de tenir une conversation avec lui. Il pouvait respirer quand elle était occupée. Il changea de place, se rapprochant de la cheminée en s'adossant à une petite fenêtre. Il neigeait dehors, amenant sur la ville, une lueur enchanteresse. La lune embellissait les lieux en se reflétant sur la poudreuse.
- Magnifique n'est-ce pas ?
Kise se retourna vers la personne qui venait de lui adresser la parole. Une femme de vingt-cinq ans d'apparence se tenait également devant la fenêtre pour admirer ce spectacle. Elle avait de longs cheveux roux dévalant ses épaules en cascade et le teint pâle. Ses yeux d'un vert émeraude le regardèrent un instant avant que son attention ne revienne sur la rue. Il fut pris au dépourvu et ouvrit la bouche pour répondre avant de ne se raviser.
S'il parlait, ce n'était que par nécessitée ou obligation. C'était une règle qui facilitait le renforcement toujours plus important de son armoire de marbre.
Juste à ce moment, Kyuna arriva et entama la conversation que Kise suivit par politesse envers la rouquine. Il lui semblait assister au rassemblement de deux grandes amies à la façon dont elles se saluèrent.
- Je m'excuse de ne pas t'avoir accueilli plus tôt Masumi, j'étais quelque peu occupée.
- Ne t'inquiète pas Kyuna, je peux comprendre que tu sois accaparée, ce n'est pas tous les jours qu'on a l'occasion d'avoir un vampire de sang pur chez soi !
Kise fut surpris par l'accent qu'il n'avait pas encore remarqué chez la rouquine. Elle devait provenir d'un pays anglophone et probablement l'écosse s'il en jugeait le physique et l'accent caractéristique de cette contrée.
- J'ignorais cependant que le fameux nouveau fils dont j'ai tant entendu parler était muet.
Kyuna rit et lui répondit :
- Ryouta n'est en aucun cas muet, il n'aime juste pas s'exprimer. Ça le rend plus mignon, tu ne trouves pas ?
Masumi ouvrit grand les yeux avant de voir que Kise faisait de même et rejoint son rire à celui de sa compère. Le blond fut rassuré qu'elle prenne ça à la rigolade. Il ne voulait pas perdre son logement. Où dormirait-il si cela venait à s'ébruiter ? Pour ne pas y penser, il chercha un instant Leiko des yeux avant de l'apercevoir au côté du vampire aux cheveux rouges. Avec un peu de chance pour elle, elle réussira à attirer son attention.
Il regarda sa montre et s'aperçut qu'il était resté bien plus d'une heure dans la pièce. Sa tête le lançait un peu et il préférait prendre congé. Il en informa Kyuna avant de rejoindre sa chambre. Kise eu l'impression de récupérer peu à peu son audition alors qu'il se réhabitua à un décibel un peu plus normal.
Combien de Noël et de bals devrait-il supporter avant de pouvoir enfin quitter cette maison ?
Kise venait de finir le dernier livre qu'il lui restait de la bibliothèque familiale. Il avait tout épluché sans en louper un seul. Le blond passa distraitement sa main sur la couverture du livre en pensant que ce héros de tragédie n'avait pas eu beaucoup de chance. Plongé dans sa réflexion, il n'entendit pas la personne rentrer dans la pièce. Il fut soudain privé de sa vue, deux mains s'abattant sur ses yeux.
- Qui c'est ?
La voix était chantante et rieuse. Mais il n'avait pas eu besoin de l'entendre pour savoir de qui il s'agissait. Il n'y avait qu'une personne pour jouer comme une enfant à seize ans.
- Je me pose bien la question… N'est-ce pas Leiko ?
- Mais ! C'est pas marrant !
Elle retira ses mains et Kise se retourna pour la voir bouder. Il se leva, lui ébouriffa les cheveux et rangea le livre.
- Ryouta, tu penses que maman accepterait si je lui demandais son accord pour passer une semaine entre amies ?
Le blond la regarda et leva un sourcil.
- Oui… Bon, tu n'es peut-être pas le mieux placé pour répondre… Je vais tenter ma chance ! On sait jamais !
Elle lui fit un clin d'œil et ressortie de la salle aussi vite qu'elle y était rentrée. Elle rouvrit cependant la porte en laissant sa tête dépasser et lui dit :
- Si tu cherches de nouveaux livres à lire, tu peux aller chercher dans ma bibliothèque, je ne sais pas si tu seras intéressé, mais ce sera toujours mieux que ces vieux bouquins que tu n'as pas d'autres choix que d'éplucher pour passer le temps !
Elle referma la porte en la claquant et Kise pu l'entendre appeler Kyuna. Elle avait beaucoup trop d'énergie. Le blond s'installa près de la fenêtre et observa la rue en contrebas. La dernière fois qu'il était sorti seul, c'était six mois plus tôt, pour acheter son costume. Il avait dû tellement négocier pour pouvoir y aller sans personne qu'il n'avait pas voulu réessayer depuis. Mais c'était décidé. Il voulait ressortir. Il avait un plan, il était sûr de ne pas se faire choper.
S'il avait bien compris, Leiko allait bientôt faire une semaine de sortie avec ses amies si elle en obtenait l'autorisation. Alors, quand Akihido et Kyuna travailleront, il pourrait se faufiler en douce et revenir avant qu'ils ne rentrent sans que personne ne soit au courant de quoi que ce soit.
Avec espoir, il se dit qu'il pourrait sûrement enfin respirer. Il ouvrit la fenêtre et s'assit sur le rebord pour regarder les gens passer. Faute d'y être, il pouvait au moins observer !
Il entendit en bas le cri de victoire de Leiko et félicita le pouvoir de persuasion de la blonde. Elle était peut-être petite, mais bon dieu qu'elle pouvait être têtue quand elle avait une idée en tête. Et pour une fois, Kise remercia sa capacité d'éloquence. Cela lui permettrait d'obtenir un ticket de sortie !
En moins de trente minutes, elle avait réussi à amadouer Kyuna et il ne doutait pas qu'elle n'avait même pas eu à insister auprès d'Akihido pour obtenir son autorisation. Elle remonta en dix secondes et rerentra en trombe dans la bibliothèque pour tout lui raconter. Et là, Kise su qu'il pouvait s'installer confortablement, car elle n'aura pas fini avant un bon bout de temps.
En attendant que les deux semaines passent, Kise eu le temps de ratisser une partie de la bibliothèque de Leiko. Ses livres avaient au moins le mérite d'être quand même bien plus intéressants que ceux de la bibliothèque familiale. Cela lui permit de passer son temps, quand il n'était pas mandé par Kyuna pour qu'elle puisse profiter un peu de lui, ou quand il n'était pas obligé d'écouter les bavardages incessants de Leiko.
Puis le jour vint. Avec anxiété, il réajusta sa veste. Un mouvement de travers et il serait condamné à rester dans cette demeure sans plus jamais d'opportunités d'en sortir avant qu'il n'atteigne la majorité – vingt-cinq ans chez les vampires-. Et il n'avait aucune envie de pourrir ici.
Il ouvrit la porte d'entrée et fit un pas dehors. Il y était. Il avait deux heures devant lui. Il commença par flâner dans la ville, visitant un peu tout ce qu'il estimait d'intéressant. Ce n'était pas que cela qu'il voulait faire. Ce n'était pas le but de sa sortie, mais il en profita sur le chemin. Autant faire un maximum sans se priver !
Son humeur changea à l'approche de l'Endroit. Il ralentit imperceptiblement son allure et arriva devant les grandes grilles du portail. Il prit une inspiration et s'engagea sur le chemin de terre sans un bruit. En ce jour, il avait fait un temps aussi radieux qu'aujourd'hui, comme pour se moquer de son chagrin. Un an plus tard, il venait leur rendre visite pour la première fois. Il s'arrêta devant la pierre réunissant leurs deux prénoms et y déposa les fleurs qu'il avait acheté un peu plus tôt. La tombe avait été entretenue, probablement par le gardien du cimetière qui ne pouvait permettre à une sépulture de nobles d'être négligée.
Il en fut un peu soulagé, se promettant qu'il essayerait de leur rendre visite un peu plus souvent. Il arrangea les ornements funéraires, plaça son bouquet en occupation centrale et commença à se livrer. Il devait au moins leur raconter, espérant qu'ils l'entendaient de là-haut. Il s'excusa pour ne pas être allé les voir un peu plus tôt, leur raconta ses expériences les plus positives depuis qu'ils n'étaient plus là à ses côtés.
Le temps passa, trop rapidement pour lui. Il reparti le cœur un peu plus léger. Il s'en sentit tellement soulagé qu'il ne remarqua même pas la lumière allumée dans le manoir. Quand il rentra, il fut surpris par Kyuna, les bras croisés, l'air contrarié.
- Qui est-elle ?
- Hein ? Mais qu'est-ce que…
La brune lui prit son bras et l'emmena dans le salon, le balançant sur le canapé sans ménagement.
- Tu étais avec une fille, pas vrai ?! Dis-moi qui elle est ! Tu as passé combien de temps avec elle ? Comment oses-tu sortir sans mon autorisation !
Que… Elle pensait vraiment que Kise pourrait se risquer à aimer quelqu'un avec elle dans les parages ?! Plus important, il allait souffrir s'il ne rattrapait pas le coup. Mais il savait ce qu'il avait à faire.
Il rangea ses émotions bien à l'abri et la torture mentale commença.
Il prit une voix séductrice et lui dit avec le sourire qu'il avait vite appris à faire à ses côtés :
- Comment est-ce que j'aurais osé te faire ça maman, je t'aime beaucoup trop pour ça…
Pour accentuer ses mots, il ouvrit grand les bras pour l'inviter à s'y réfugier, le regard innocent. Kyuna tressailli, son regard vacilla de la colère au désir et elle se jeta sur lui pour l'embrasser avec fureur. La brune aimait dominer, alors Kise la laissa le déshabiller alors qu'il déboutonna avec plus de lenteur les boutons refermant sa robe dans son dos. Cette nuit, il ferait tout pour se faire pardonner. Peut-être que comme ça, elle le laissera ressortir ?
Mais alors qu'elle commençait à se donner du plaisir, bougeant au gré de ses envies tandis que Kise était soumis à elle, la porte d'entrée s'ouvrit alors que la voix d'Akihido retentit.
- Je suis rentré, j'ai encore quelques docum…
Kyuna releva la tête, les yeux écarquillés en voyant son mari rentrer des heures plus tôt que d'habitude. Ce dernier avait lâché son attaché-caisse au sol, sous le choc. La brune se retira rapidement de Kise, le laissant pantois, alors qu'il essayait de récupérer ses vêtements.
- Ce… Ce n'est pas…
La brune essaya tant bien que mal de se rattraper, mettant sa robe devant elle pour cacher maladroitement sa nudité.
- Qu'est-ce que cela signifie Kyuna ?
- Je…
Kise était toujours dans un état second, maintenant ses émotions dans l'armoire de marbre. Il avait le regard vide, fixé au sol, attendant le verdict. Il venait de perdre son logement.
- Kyuna, je ne veux plus te voir pour le restant de la soirée, est-ce que c'est clair ?
- Aki…
- Je suis calme pour le moment, ne me fais pas me répéter.
La femme acquiesça en éclatant en sanglot et se précipita à l'étage. L'échange qui se passa entre les deux individus était recouvert d'une brume épaisse et Kise ne se rendit compte que son cœur battait la chamade que quand il entendit les bruits de pas se rapprocher de lui. Il ne voulait pas se retrouver seul… Par pitié, tout, mais pas ça… Pas encore…
Il se recroquevilla sur le canapé, comme pour se défendre. La main de l'homme d'affaire se posa sur son épaule et il tressaillit. Akihido le lâcha immédiatement.
- Regarde-moi jeune homme.
Kise raffermit sa prise autour de ses genoux. Il s'attendait à se faire frapper, pas à ce que le brun s'adresse à lui de cette voix.
- Très bien, parlons comme ça alors. Est-ce que c'est toi qui l'a initié ?
Kise ouvrit les yeux qu'il avait instinctivement fermé et secoua vivement la tête. Impossible ! … Enfin… Elle aurait été bien plus violente s'il n'avait pas agi comme elle l'aime. Ce n'était pas initier, si ?
- Est-ce que… C'était la première fois ?
Kise se mordit la lèvre et ses doigts jouèrent entre eux. Sa réaction en disait long. L'homme aussi avait compris et lui demanda :
- Depuis combien de temps te force-t'elle ?
Il ne voulait pas répondre à cette question. Cela ferait sûrement plus de mal à cet homme qui ne le méritait pas. Après une minute de silence, ce dernier comprit qu'il n'obtiendrait pas de réponse, mais ce mutisme était pourtant parlant. Cela faisait assez longtemps pour que Kise n'ait pas envie d'en parler.
- Ryouta, mon grand, tu sais que je ne peux pas te laisser vivre dans la maison avec ce qui s'est passé…
Noooon ! Ne dis pas ça ! Sa tête s'était tournée d'elle-même vers Akihido, les yeux remplis de panique.
- S'il vous plaît, ne me faites pas ça ! Je serais sage, je resterais enfermé dans ma chambre sans jamais ouvrir à Kyuna même sous la menace, je me ferais tout petit si vous le souhaitez vraiment, mais ne me mettez pas à la porte, je vous en prie !
Il avait pris les bras de Akihido par impulsion, le suppliant de ne pas le laisser seul. Le brun, surpris, le regarda avant de le prendre dans ses bras. Il lui dit, tant à Kise que pour lui-même :
- Qu'est-ce qui a bien pu se passer alors que je te pensais entre de bonnes mains ? Que t'est-il arrivé ?
Kise se laissa aller contre le brun, ne le lâchant pas, espérant...
- Je suis désolé Ryouta…
Le jeune vampire recula et regarda ses mains.
Aaah… Alors il n'était plus personne ? Très bien, il partirait si c'était ce qu'on voulait qu'il fasse. N'avait-il pas toujours été seul depuis déjà un an de toute façon ? Est-ce que s'en tenir à ce foyer ou alors changer de logement était vraiment important ? Il jeta un coup d'œil autour de lui.
Non, il n'avait aucun attachement à cet endroit. Juste une vague impression de chaleur familiale qui ne lui sera plus jamais atteignable.
Il avait alors imaginé que cela aurait été plus dur de quitter cette demeure, mais au final, il s'en fichait éperdument. L'organisation d'adoption lui avait rapidement trouvé une nouvelle famille d'accueil et cela avait été facile au vu de son statut. Dans la semaine même, il avait posé les valises chez sa nouvelle « famille ».
Cette dernière était… Pour le moins spéciale. Il s'agissait d'un couple sans enfant. L'homme -Fumio- était du genre extrêmement riche qui le montre bien, mangeant bien à la cantine au vu de la bedaine et ne se privant pas au niveau des moyens employés pour gagner les faveurs des autres. Méprisable si on peut dire. Par ailleurs, la femme, Yasuko, ne voulait pas d'enfants pour garder sa « magnifique silhouette ». C'est vrai quoi, il ne fallait pas rigoler avec la beauté du corps ! Kise se doutait pertinemment qu'elle avait choisi son mari pour son compte en banque plus que par sentiment.
Comment les vampires pouvaient-ils à ce point s'accrocher à des choses aussi futiles ?
L'avantage au moins à présent, c'est qu'il pouvait sortir sans peur de se faire enfermer pour les prochaines années. Alors qu'il rentrait d'ailleurs d'une de ses fameuses escapades, Yasuko vint le voir, ses yeux pétillants, une robe de satin rouge bien échancrée et le déhanchement ridiculeusement important, se croyant irrésistible. Depuis qu'il était arrivé -à peine un mois-, elle lui faisait des appels plus que provoquants pour qu'il tombe sous son charme. Kise savait pertinemment ce qu'elle voulait de lui, mais attendait, retardant le moment un maximum. N'était-elle pas au courant de ce qu'ils risquaient tous les deux ?
Avec un soupir, il prépara son énième plan pour s'échapper. Prétexter être fatigué, ou encore… Il remarqua alors la lettre que tenait Yasuko dans sa main. Cela l'intrigua. Elle la lui tendit et dit de sa voix fluette, souriant pour être dans ses bonnes grâces :
- Il y a une lettre pour toi Ryouta, j'espère que ce n'est pas grave !
Le jeune homme fronça les sourcils, ignorant les battements de cils inutilement nombreux que la femme lui fit. De qui ce courrier pouvait-il bien provenir ? Il tenta d'attraper le papier, mais la blonde retira sa main au dernier moment et lui fit la moue. Elle secoua la tête et lui dit :
- Tu ne me remercie pas ?
Oh ! Alors elle voulait quelque chose en échange. Il repensa à ce que Kyuna lui avait appris. Rien de plus simple, il était capable de comprendre ce qu'on voulait de lui, tant pis si cela ruinait ses efforts d'esquives entretenus pendant tout ce mois, cette famille était de toute manière insupportable.
Il se rapprocha donc de Yasuko, qui sembla manquer d'air en le voyant se déplacer de façon bien plus sensuelle que d'habitude. Arrivé à sa hauteur, il posa une main sur la hanche de la femme tandis que l'autre releva son menton. Il fronça imperceptiblement le nez. Comment était-il possible qu'elle survive en mettant autant de parfum sans s'intoxiquer, honnêtement ? Il se pencha en captant son regard comme pour l'hypnotiser, puis l'embrassa dans la foulée, en profitant pour chaparder la lettre qui lui revenait de droit. Lorsque la blonde se réveilla, elle sembla vouloir approfondir le baiser, mais Kise s'éloigna sans qu'elle n'ait le temps de mettre ses mains autour de son cou. Elle était rouge, pantoise et le souffle lui manquait.
Kise la regarda, leva sa main dans laquelle se trouvait la fameuse lettre, sourit innocemment et lui dit :
- Merci maman !
Il détala ensuite jusque dans sa chambre, s'enfermant à clé. C'était devenu un réflexe pour éviter tout ennui. S'enfermer dans cette seule pièce qui pouvait lui sembler sûre -étant donné qu'il avait réussi à y planquer tous les doubles de sa chambre qu'il avait pu trouver-.
Il regarda le destinataire de la lettre et se figea. Cela provenait de son ancienne adresse. Il s'assit sur son canapé avec appréhension et ouvrit lentement l'enveloppe. Il prit une grande inspiration et sortit le courrier.
Il reconnut immédiatement l'écriture efféminée et pourtant si enfantine qui ne pouvait appartenir qu'à Leiko. Il lâcha un soupir de soulagement qui le surprit lui-même. Il ne s'était pas rendu compte qu'il était aussi effrayé avant sa propre réaction.
Kise repensa à la jeune fille. Il n'avait pas eu l'occasion de lui dire au revoir puisqu'au moment où il était parti, elle se trouvait en semaine de vacance avec ses amis.
« Très cher Ryouta,
Comment vas-tu depuis le temps ?
Désolée de ne pas t'avoir écrit plus tôt, mais j'ai vraiment eu du mal à obtenir ta
nouvelle adresse, papa comme maman refusaient de me la donner ! J'ai dû me battre
mon dieu, je n'y ai pas cru ! C'est pour ça que je vais te donner l'adresse d'une amie,
comme ça je pourrais quand même recevoir tes lettres par son intermédiaire !
Et puis, oui, je sais, j'aurais pu te contacter avec le téléphone fixe, mais cela n'aurait
pas été très discret pour toi comme pour moi, ces nouveaux trucs sont pas faciles à déplacer ni très facile à cacher. En plus, je déteste ce fil qui nous empêche de marcher plus de quelques pas ! Les lettres, c'est plus poétique !
D'ailleurs, en parlant de poète, tu ne devineras jamais ce qu'il s'est passé il y a trois
sem[…] »
Kise survola ce passage de la lettre, le trouvant typique d'elle-même. Comment pouvait-elle s'émerveiller de choses si simples ? Il sourit quand il lit à la fin « Ta sœur jumelle, Leiko. ». Elle aimait toujours autant jouer sur ce point !
Il envisagea un moment d'ignorer la lettre, ne voulant plus avoir de contact avec son ancienne famille d'accueil avant de se rendre compte qu'il s'en voudrait sûrement. Après tout, elle avait été la seule à l'accueillir comme il se doit et… Même imperceptiblement, il s'était attaché à elle.
Il se dirigea donc vers son bureau, sortit feuille et stylo et posa son crayon. Qu'était-il censé écrire au juste ?
Dans ses moments-là, il ne pouvait qu'envier Leiko pour sa capacité à bavarder pour un rien. Il en était incapable. Mais il avait juste à s'entraîner. Ça ne devait pas être si compliqué.
Il mit la lettre devant lui, et répondit, maladroitement, mais avec un peu d'entrainement, peut-être réussirait-il à parler aussi abondamment qu'elle le faisait ?
Après une heure d'essais, Kise finit sa ligne, satisfait. Il prépara le courrier, comptant aller le poster le lendemain. Hors de question de sortir de sa chambre maintenant tant que Yasuko était encore dans cette demeure.
Bon, en attendant, il allait s'adonner à sa passion habituelle qui n'avait pas changé depuis un an et demi : la lecture. Il soupira. Ne pouvait-il pas faire autre chose pour une fois ? Il se promit que quand il aura obtenu sa liberté complète, il ne touchera plus jamais un seul livre de sa vie sauf sous la contrainte.
Cinq bons mois s'étaient écoulés depuis qu'il était arrivé dans ce palace de riche auquel il ne réussissait pas à s'habituer. Il avait commencé à fréquenter Yasuko pour qu'elle lui donne ce dont il avait besoin : nourriture, logis, occupation, argent, tout ce qu'il ne pouvait pas se procurer par lui-même lui était offert par la blonde en échange de quelques services physique. Il n'en était pas fier, mais au moins il avait quelque chose en échange, ce n'était pas comme avec Kyuna…
Avec elle, il avait donc compris qu'il pourrait se servir de son physique à son avantage pour obtenir ce qu'il voulait de la part d'une femme.
Il se leva de son lit un soir, alors que Yasuko était encore en train de somnoler à côté de lui. Il ne supportait pas de rester à côté, et s'il avait le choix, il préférait encore s'échapper pour la nuit dans l'ombre d'un coin de rue. La femme ne s'aperçut qu'il sortait que quand il ferma la porte. Kise l'entendit l'appeler mais il fit comme si de rien n'était. Ce n'était pas elle qui allait lui donner un ordre auquel il obéirait !
Il sortit de la demeure, traversa tout le terrain qui appartenait à ses hôtes et arriva sur la rue. Là, il emprunta un chemin qu'il connaissait bien. Cela lui prendrait plus d'une heure de marche, mais il avait tout le temps devant lui pour vagabonder. Il était au moins bien content de ne pas avoir eu à déménager dans une nouvelle ville. Ici, au moins, il pouvait rendre visite à ses parents sans difficultés.
Il passa les grilles à présent plus familières que la première fois où il était venu et s'arrêta devant la pierre. Il remarqua immédiatement quelque chose de différent depuis le mois dernier. Quelqu'un était passé, il en était certain, et ce n'était pas le gardien de tombe. Avec surprise, il souleva le vase rempli de fleurs fraîchement déposé. Il y trouva une enveloppe et fronça les sourcils en y reconnaissant l'écriture de Leiko. Pourquoi avoir fait ça ?
Il finit de s'occuper de la tombe et sortit du cimetière. Il s'installa ensuite à un café et commença la lecture de cette lettre si spéciale. Elle était un peu mouillée, mais dans l'ensemble, elle restait lisible.
« Ryouta,
Je sais que ça doit te faire bizarre de trouver l'une de mes lettres à cet endroit mais je n'avais pas d'autres choix. Il se passe beaucoup de choses en ce moment et… Je ne peux plus t'envoyer de lettres sans que cela risque de te retomber dessus. Je n'ai donc pas trouvé de meilleur moyen pour le moment, même si cela m'attriste de devoir passer par là.
Connais-tu le parc Botan ? Je m'y rends souvent alors que dirais-tu que l'on essaye plutôt de mettre nos lettres dans ce parc ? J'ai caché une petite bouteille de verre près de la statue, tu devrais normalement pouvoir la trouver.
Tiens-moi au courant, je ne veux pas perdre contact avec toi,
Je t'adore,
Ta sœur jumelle préférée ! »
Kise avait du mal à comprendre. Est-ce qu'elle avait des ennuis ? Si oui, pourquoi est-ce qu'elle ne lui en parlait pas ? Enfin, c'était bien à lui de dire ça, quand, lui, avait caché tout ce qu'il se passait avec sa propre mère. Il secoua la tête en buvant une gorgée de son café maintenant froid. Il grimaça. Déjà que pour un vampire, le café n'avait pas beaucoup d'attraction -même s'il avait ce mérite de réveiller- mais froid, c'était tout simplement horrible.
Il entendit du mouvement autour de lui et se rendit compte qu'il servait d'attraction a beaucoup de femmes passant dans les parages. Il était temps pour lui de décoller vers ce fameux parc tant qu'il n'y avait pas encore de personnes assez courageuses pour venir l'embêter en cette agréable soirée.
Il paya donc l'addition, laissant un pourboire au serveur studieux qui s'afférait durement à ses affaires. Renfilant son manteau, il voulut partir quand il entendit quelqu'un l'accoster derrière lui. Il se retourna et se retrouva devant un homme habillé à la dernière mode, avec des habits de marque qui le rattrapa en deux pas.
- Je suis désolé de vous déranger alors que vous êtes tranquillement en train de vous promener, mais il se trouve que je cherchais un homme comme vous depuis quelques temps déjà.
Kise ne comprit pas où l'homme voulait en venir mais décida de l'écouter. Il n'était pas pressé après tout. Voyant qu'il avait toute son attention, l'homme sourit et continua avec joie :
- Je travaille dans une agence de mannequinat et je me demandais si vous ne recherchiez pas un petit boulot ? Qu'en pensez-vous ? Seriez-vous intéressé par travailler chez nous en tant que modèle ?
- Eum… Je…
- Je comprends que vous ayez besoin d'y réfléchir ! Recontactez-moi quand vous aurez pris votre décision ! Je vous laisse ma carte en attendant.
Il ne lui avait même pas laissé le temps de dire un mot !
Rapidement, il lui tendit une carte de visite, que Kise prit par réflexe et l'homme ne s'en démonta pas. Il lui donna son prénom et nom de famille avant de lui dire qu'il espérait le revoir bientôt. Il s'échappa ensuite en chantonnant, tout heureux d'avoir trouvé quelqu'un.
Qu'est-ce qui s'était passé au juste ? Du… Mannequinat ? C'était ridicule. Il rangea la carte de visite dans sa veste, se rappelant de la jeter plus tard.
Perplexe de cette trop rapide interaction, il se dirigea tranquillement vers le parc puis se rendit près de la statue dédiée au créateur de la ville. Il y trouva rapidement la bouteille, bien planquée, et s'installa sur un banc, non loin. Là encore, un papier s'y trouvait, probablement plus récent. Il le lut, vit que le verso était blanc, alors il en profita. Faute de papier, il avait au moins un crayon et il pourrait comme ça lui répondre dans l'immédiat.
Il s'étira une fois qu'il eut fini et remit la bouteille de verre en place. Il n'avait plus qu'à attendre sa réponse. Il regarda sa montre et se dit qu'il était peut-être temps pour lui. Il reprit le chemin du retour, pour retourner dans la maison de sa famille d'accueil.
- Mon Dieu, mon chéri tu es si mignon dans ce joli costume, montre-moi ta jolie bouille !
Il sourit de toutes ses dents en recevant le compliment, levant la tête avec d'autant plus de fierté. Pour ses huit ans, ils faisaient une photo tous les trois et cela, par un professionnel. Il avait eu un habit tout neuf pour l'occasion et qu'il était heureux de cette surprise ! Depuis le temps qu'il voulait faire une photo avec eux !
Sa mère lui prit la main pour qu'ils se dirigent vers la scène de décors là où son père discutait déjà avec le photographe. Dès qu'il les vit s'approcher, il fit un signe à l'homme et sourit en ouvrant les bras vers eux. Ryouta couru vers son père et atterrit comme un boulet de canon dans ses bras en rigolant. L'assaillit lui ébouriffa les cheveux en s'écriant :
- Petite canaille ! Un jour tu réussiras bien par me faire tomber !
Le petit blond releva la tête et le vit lui faire un clin d'œil avant de prévenir le photographe qu'ils étaient prêts. Des étoiles plein les yeux, il suivit son père et se mit entre ses deux parents.
L'homme leur donna quelques instructions, puis dès qu'il fut prêt, il leur demanda de sourire pour la photo. L'enfant fit son expression la plus joyeuse qu'il soit et l'homme appuya sur le bouton.
Tout d'un coup, il eut extrêmement chaud, il ne comprit pas pourquoi. Sa tête lui tournait et il sembla suffoquer.
Il ne semblait pas, IL SUFFOQUAIT RÉELLEMENT ! Il sortit de son songe en sursaut, dans un état de panique total. Il vit de la fumée s'échapper de sous sa porte et envahir toute sa chambre. AU FEU ! Il ouvrit ses yeux en grands et se leva dans la seconde qui suivie.
Avec précipitation, il attrapa sa veste et ouvrit la fenêtre d'un grand coup. Putain de deuxième étage à la con ! Il entendit quelque chose exploser dans la pièce d'à côté et vit avec horreur que le feu s'échappait déjà de cette fenêtre. Il regarda aux alentours et aperçu un arbre. A cinq mètres. Sans élan, ou presque.
Bon sang, quitte à crever, autant tenter le diable !
Il prit une bouffée d'air presque frais, recula de deux pas, expira, et se lança. La fenêtre n'avait heureusement pas de rebord trop haut sinon il n'aurait eu aucune chance. Les yeux grands ouverts, il sentit la gravité faire son effet alors que le vide se tenait à présent sous lui. Il n'y avait plus grand-chose jusqu'à l'arbre, à peine trente centimètres…
Il allait y arriver. Il allait atteindre la branche ! Il la toucha, sa main s'agrippa, mais elle glissa. En plein mois de février, le gel avait recouvert une partie de l'écorce, rendant l'accroche pratiquement impossible. Il ne put l'attraper avec suffisamment de surface et retomba en ligne droite en lâchant un cri.
Non, non, noooon !
Il écarquilla les yeux alors qu'il tombait rapidement, et d'un coup, il se prit quelque chose au ventre qui lui coupa le souffle, arrachant un craquement sinistre à plusieurs de ses côtes. Il venait d'atterrir sur une branche qu'il n'avait pas aperçue, plus basse. Cette dernière céda sous son poids et ils tombèrent tous deux au sol.
Une douleur suraiguë l'atteignit, alors qu'il ne réussit même pas à penser rationnellement. Il avait juste mal… Atrocement mal ! La douleur était insupportable. Qu'est-ce que c'était au juste ? Mon Dieu que quelqu'un l'aide ! Quelqu'un…
Ah… Mais c'est vrai… Il était seul à présent.
Ses yeux se voilèrent, son rythme cardiaque ralentit, alors qu'il se sentit partir. Il n'entendit pas les secours arriver, pas plus qu'il ne se sentit transporté aux urgences.
C'est pour cela que quand Kise ouvrit les yeux, il ne comprit pas immédiatement où il était. Il entendait cet agaçant « bip » résonner dans la pièce de façon régulière mais ne pouvait pas tourner la tête pour confirmer ses soupçons. Il commença à paniquer et le bruit se fit plus strident, alarmant le personnel de l'hôpital. Une infirmière rentra rapidement mais il ne l'entendit pas. Il voulait juste savoir si…
Des mains essayèrent de le plaquer contre le lit alors qu'il tentait de se relever.
- Que voulez-vous ?!
Kise gémit alors qu'il tentait de sentir ses membres et de les bouger, vainement. L'infirmière sembla comprendre et le rassura immédiatement :
- Ne vous inquiétez pas, vous êtes entier et sain et sauf si je puis dire. Vous êtes actuellement sous corticostéroïdes et il est possible que vous ne ressentiez rien. C'est pour cela que vous avez du mal à bouger. Vous avez plusieurs os cassés dont les côtes après votre chute.
Le blond la regarda un instant avant de se réinstaller sur le matelas. Il était épuisé par sa pauvre tentative de check up corporel qui au final s'était même soldé en échec. La femme tenta de lui parler un peu plus mais il ne réussit pas à rester éveillé, sombrant avec délice dans les ténèbres.
Quand il reprit connaissance, Kise était déjà un peu plus alerte, si tant est que le mot soit juste. Il réussit à écouter l'infirmière qui lui indiqua ses différentes blessures, puis lui dit que son ancienne demeure n'était plus du tout habitable. Elle ajouta que sa famille d'accueil n'était plus en capacité d'endosser leur rôle de tuteur et que d'ici à sa sortie de l'hôpital, il aurait une nouvelle famille.
Ils n'avaient pas été blessés par l'incendie puisque les deux étaient dehors quand l'incident a eu lieu. C'est d'ailleurs Yasuko en personne qui avait appelé les secours en découvrant la maison en feu.
Personne n'avait su comment l'accident s'était déclenché, mais Kise se promit qu'il n'accepterait plus jamais de chambre à l'étage.
Il devrait rester au minimum deux bonnes semaines à l'hôpital le temps que tout entame un bon rétablissement. Il aurait largement le temps de contacter l'organisation vis-à-vis de son logement !
En attendant, il resta cloitré entre quatre murs, passant son temps à broyer du noir, lire, ou rêver de l'extérieur. Il remarqua très vite l'intérêt des infirmières et le nombre de fois interminable où les femmes rentraient juste pour vérifier qu'il allait bien contrairement aux hommes qui eux faisaient juste leur boulot.
Mon dieu qu'il avait hâte de quitter cet endroit !
Le moment même où il avait eu le droit de se lever plus de dix minutes, il n'avait pas hésité une seconde à se rendre seul sur le toit pour prendre une grande bouffée d'air frais. L'hôpital n'avait malheureusement pas d'espace vert à proximité alors faute de quoi, il en profita comme il put.
Il avait également mis au courant l'organisme de famille d'accueil quelques jours après son arrivée et celui-ci lui avait rapidement trouvé une nouvelle famille qui viendrait lui rendre visite à sa sortie de l'hôpital. Ses anciens tuteurs n'étaient même pas revenus le voir pendant son séjour, alors il n'en attendait pas beaucoup de la part de sa nouvelle parentèle.
Il rejoignit cependant sa nouvelle demeure plus rapidement que prévu. En effet, il avait rencontré pendant son arrêt, un vampire aux pouvoirs d'auto-régénération. C'était là une capacité extrêmement rare, qui ne se rencontrait pas si souvent.
Et il en avait bien profité. Le blond, possédant la capacité de copier n'importe quel pouvoir pendant cinq minutes depuis qu'il était tout petit, lui avait emprunté son pouvoir sans que l'homme ne soit au courant, diminuant ainsi sa date de sortie de plusieurs jours. Pendant son enfance, il avait adoré copier l'aptitude de sa mère, pour pouvoir chanter comme elle le faisait, mais il ne l'avait plus utilisé depuis qu'ils étaient partis.
Tout vampire noble digne de son rang se devait de posséder un pouvoir aux capacités qui lui étaient propres. Il n'y avait aucune loi vampirique interdisant la pratique de leur pouvoir tant qu'elles ne mettaient pas en danger l'ignorance de leur existence chez les humains.
Ce fait de possession suffisait en lui-même à expliquer la position si haut-placée des vampires nobles vis-à-vis des vampires ordinaires ou anciennement humains. Il était inutile d'évoquer les capacités des vampires de sang-purs. Eux, étaient hors-catégorie.
Ainsi, Kise pu s'enfuir de l'hôpital une semaine plus tôt. Il était actuellement confortablement installé debout, dos au mur du centre de soin, un pied relevé. Il s'étira alors que sa famille d'accueil ne tarderait pas à venir. Il n'avait sauvé que sa veste de l'incendie, mais il en était heureux car il s'agissait de la seule chose précieuse qu'il possédait. Ou devait-il dire que la seule chose précieuse qu'il possédait se trouvait dans l'une des poches de sa veste. Il tâtonna le papier aux nuances noires et blanches pour se rassurer, et patienta.
Il vit une voiture se garer non loin et quatre personnes en sortir : un couple, et deux enfants, tous deux plus jeunes que lui.
Ils se dirigèrent vers lui et chacun le saluèrent tour à tour.
Bienvenue, bienvenue, enchanté. Vous me rejetterez bien assez tôt de toute manière, alors je préfère rester poli et courtois, contrairement à vos demandes. D'ici, Kise voyait déjà les joues de la mère se teinter de rouge malgré elle.
Ah… En y réfléchissant, peut-être pourrait-il en profiter pour racheter ce qu'il avait perdu dans le brasier ?
